70835 Banque Mondiale AFTHE (HSS Hub, Dakar) Driss ZINE-EDDINE E. Note technique succincte sur le RAMU 1. Contexte Le système de santé du Bénin est financé essentiellement par les paiements directs des ménages (52%). Les mécanismes de prépaiement et de mutualisation du risque maladie ne sont pas obligatoires et ne couvrent que 6% de la population. Ce qui suppose un pourcentage élevé de la population faisant face aux dépenses catastrophiques de soins. En outre, les familles font face à des barrières financières pour accéder à des services de santé cruciaux tels que le traitement antipaludique, les soins obstétricaux… Ce qui ne permet pas au pays de lutter efficacement contre les surmortalités de la mère et de l’enfant. Suite aux recommandations des Etats Généraux de la Santé tenus en 2007, le Gouvernement a pris la décision d’initier la réflexion et une concertation élargie en vue d’instaurer progressivement un Régime d’Assurance Maladie Universel (RAMU) au Bénin. Aussi, le Conseil des Ministres a-t-il décidé, en mai 2008, de créer un Comité Technique Interministériel (CTI) présidé par le Ministre en Charge de la Santé. Composé des principales parties prenantes du projet, le CTI a pour principale mission d’alimenter le Gouvernement en propositions concrètes dans le domaine. Le Secrétariat du CTI est assuré par une Unité relavant directement du Secrétaire Général du Ministère de la Santé (MS). En juillet 2009, un atelier technique sur le RAMU a été organisé par le Gouvernement. L’atelier a vu la participation de plusieurs institutions comme les centrales syndicales, les représentants des prestataires de soins publics et privés, des Départements publics, des Mutuelles de santé… L’objectif principal de l’atelier était de valider les orientations stratégiques du RAMU et le schéma de sa mise en œuvre. Depuis, des commissions ont été créées et des travaux et études menés (état des lieux, orientations stratégiques, quelques paramètres techniques et financiers…). Le 19 décembre 2011, le Chef de l’Etat, Dr Thomas Boni YAYI, a présidé la cérémonie de lancement officiel du RAMU. Durant cette cérémonie, le Ministre de la Santé, Professeur Dorothée Akoko KINDE GAZARD, a expliqué le pourquoi du RAMU. Elle a présenté les objectifs de ce régime ainsi que son architecture, son financement… et les prochaines étapes. Le Ministre de la Santé a insisté sur le chronogramme de la mise en œuvre du RAMU qui s’étend de cette date de lancement jusqu’en avril 2012 avec notamment, la mise en place des outils de gestion du RAMU, la formation du personnel et la finalisation des textes législatifs (Janvier à Mars 2012) et puis l’ouverture du droit aux prestations du RAMU qui se fera, selon le Ministre, en avril 2012. 1 Quelques mois auparavant, le Chef de l’Etat (mai 2011), a pris la décision de rendre gratuite la prise en charge des cas de paludisme chez les femmes enceintes et les enfants de moins de cinq ans. 2. Contenu du RAMU Selon le MS, « le RAMU est une initiative du Gouvernement du Bénin, visant à améliorer l’accessibilité financière des populations aux soins de santé de qualité. C’est un dispositif assurantiel, un système de couverture sociale maladie destiné à protéger l’ensemble des populations béninoises contre les conséquences financières du risque maladie ». C’est un dispositif destiné à assurer une meilleure coordination et un fonctionnement harmonieux et efficient des mécanismes déjà disponibles, à créer un mécanisme d’insertion des travailleurs des secteurs informel et agricole ainsi que des couches sociales démunies dans le dispositif de prise en charge, tout en veillant au respect des principes de base que sont la couverture universelle, l’approche contributive, la solidarité nationale, la responsabilité générale de l’Etat, l’équité, la gestion participative et l’efficience. Le but du RAMU est « d’alléger la souffrance des populations par une réduction progressive et durable du phénomène de « paiement direct des soins», en vue de faire progresser la qualité, la solidarité, l’équité et l’efficience dans le financement du système de santé au Bénin. ». L’objectif général est de contribuer à l’amélioration de l’accessibilité financière des populations béninoises aux soins de santé de qualité. Selon le MS, les principes de base du RAMU sont au nombre de sept à savoir : - Couverture universelle: Une couverture efficace pour toutes les couches de la population béninoise, sans distinction aucune. L’universalité est ici appréciée en termes de prise en compte de l’ensemble de la population béninoise pour un paquet de base le plus large possible au moindre coût. - Approche contributive : Bâtir le RAMU principalement sur la contribution des bénéficiaires. Il s’agit de concevoir des fourchettes de primes en rapport avec les capacités contributives des diverses couches sociales et d’asseoir un dispositif pour subventionner les primes des couches sociales les plus démunies (gage de pérennisation du système). - Solidarité nationale : Mise en commun des risques, large partage des coûts : Solidarité entre « riches » et « pauvres », vieux et jeunes, travailleurs et sans emploi, citadins et ruraux, bien portants et moins bien portants. - Responsabilité générale de l’Etat: La santé est un bien public, un droit humain consacré par la constitution et garanti par l’Etat, d’où le rôle régulateur du dispositif RAMU par les pouvoirs publics. - Equité: Dans le cadre de la mise en place du RAMU, l’équité est appréciée sous deux aspects : l’équité d’accès qui consiste à faciliter l’accès de tous à un paquet de prestations de base, selon les besoins de chacun et l’équité contributive qui vise à faire participer chaque couche sociale en fonction de sa capacité contributive. - Gestion participative : Elle recouvre deux dimensions dans le cadre du RAMU, à savoir : la participation des bénéficiaires à la gouvernance du système et le contrôle social. - Efficience : Il s’agit de maximiser les résultats tout en minimisant les coûts. Ainsi, les dispositions seront prises pour : éliminer les lourdeurs et lenteurs administratives, sécuriser 2 au maximum le système en vue d’une minimisation des fraudes et abus, veiller à obtenir de meilleurs résultats au moindre coût. 3. Ce qui a été déjà fait Il faut dire que la volonté politique affichée au plus haut niveau est déjà un atout majeur pour la réforme en question. L’annonce de la mise en place du RAMU par le chef d’Etat est favorable à une mobilisation de tous qu’ils soient des fonctionnaires, des détenteurs d’enjeux ou des PTF. Toutefois, il est à préciser que plusieurs PTF (BIT, OMS, Coopération Française, Coopération Suisse…) ont été fortement impliqués autour de l’initiative à laquelle ils ont contribué énormément, particulièrement dans sa phase de préparation des études et des projets de textes législatifs et réglementaires. En plus du projet PRPSS qui n’a pas encore démarré, la BM a apporté un soutien en termes de formation (ateliers sur l’assurance maladie et le financement des systèmes de santé) et d’assistance technique lors de la préparation du PRPSS. Lors de la phase préparatoire jusqu'à la fin de l’année 2011, plusieurs travaux ont été achevés : - les principes de base, les orientations stratégiques et les options de l’architecture d’ensemble du RAMU ont été définis et validés en atelier ; - les principaux paramètres techniques et financiers ont été définis, notamment le paquet des prestations de base c’est-à-dire le panier de soins à couvrir, la liste des médicaments remboursables, la segmentation des cibles, les fourchettes de primes, les modalités d’affiliation, les modalités de prise en charge des cas spéciaux, les sources de financement ainsi que la coordination et la gestion du système. Toutefois, il faut noter que les options de financement du RAMU ne sont pas assez approfondies et projetées sur plusieurs années. Enfin, le processus de mise en place de l’ANAM a démarré le 24 Août 2011 avec la nomination en Conseil des Ministres du Directeur Général et de la Directrice Générale Adjointe. Ils sont appuyés par le Comité Technique Interministériel et le Point Focal RAMU qui relève du Secrétariat Général du MS. 4. Ce qui reste à faire : Le plus dur et le plus (techniquement) déterminant reste à faire, à savoir, la mise en œuvre effective, efficace du RAMU et sans heurts. 4.1. Les principales étapes à franchir Ces étapes, synthétisées dans l’annexe 1 (proposition de plan d’étapes), sont les suivantes : Législation et réglementation : Cette étape consiste à adopter le texte de loi du RAMU et des textes d’application (décrets et arrêtés). Le travail sur les textes d’application n’est pas à sous-estimer car c’est lui qui va permettre au Gouvernement d’appliquer la Loi sur le RAMU. Ces textes porteront notamment sur l’ANAM, l’affiliation, l’immatriculation et le recouvrement des cotisations, la sous-traitance de la gestion des feuilles maladie (si c’est pertinent), le conventionnement et système de tiers- payant, les listes des bénéfices (panier de soins, liste des médicaments remboursables, dispositifs médicaux admis au remboursement, nomenclature des actes médicaux et de biologie...), le contrôle médical, la liste des pathologies lourdes à prise en charge spéciale… Délai : Fin mars 2012 3 Développement de l’ANAM, des outils de gestion du risque maladie et de recouvrement : L’ANAM constitue l’institution de mise en œuvre du projet RAMU. A ce titre, tout échec ou retard dans sa mise en place serait un échec et un retard pour l’entrée en vigueur du RAMU. Deux volets sont importants à ce niveau, il s’agit, premièrement, de mettre en place une institution qui « fonctionne ». C’est-a-dire, une agence qui a un bâtiment décent, une équipe assez étoffée et formée qui dispose d’équipements et de fournitures de bureau en quantité suffisante (matériel informatique, téléphonie, bureautique…). Deuxièmement, cette institution doit disposer d’outils de gestion du risque maladie, particulièrement la gestion des feuilles de soins. A moins que le Gouvernement décide de confier cette tâche à un organisme sous-traitant. En outre, si l’option de sous-traitance est exclue, il serait alors nécessaire de créer également des antennes départementaux/régionaux de l’ANAM pour un service de proximité. S’il y a sous- traitance, le sous-traitant doit bien évidemment disposer, lui-même, de ces extensions régionales. Délai : Mi octobre 2012 Test des outils de gestion et de recouvrement et conventionnement avec les prestataires : Une fois que ces outils sont mis en place, il est nécessaire de les tester à très petite échelle en vue de vérifier leur efficacité. Il s’agira ensuite d’effectuer les ajustements éventuels avant de passer à la généralisation de l’application de ces outils. Il s’agira également pour l’ANAM de signer les conventions nécessaires avec les prestataires de soins qui porteront aussi bien sur le tiers payant, les tarifs de conventionnement, les modalités de paiement, le contrôle médical… Délai : Fin novembre 2012 Affiliation, Immatriculation et prélèvements des cotisations : Cette activité se fera parallèlement à la phase de test des outils de gestion. Le grand défi de cette étape et de gérer le grand nombre de dépôts de dossiers qui doivent normalement provenir des employeurs et des caisses de retraites. Ces derniers doivent recevoir les requêtes de paiement des cotisations, de la part de l’ANAM, une fois les groupes concernés sont immatriculés. Délai : Fin décembre 2012 Production & distribution des cartes et début de remboursement et de paiement des prestataires : Il n’est pas nécessaire que les cartes d’assurés soient électroniques et à contrôle biométrique pour démarrer le RAMU. Une simple carte avec une photographie est suffisante pour le démarrage (en attendant le système de biométrie qui interviendra au milieu ou vers la fin de l’année 2013 ; tout dépendra des délais de l’appel d’offres dans le cadre du PRPSS). Cette activité sonnera le démarrage effectif du RAMU (ouverture du droit aux prestations) puisqu’il sera alors possible de commencer le remboursement des bénéficiaires et le paiement des prestataires. Délai : 1er trimestre 2013 4 4.2. Ce que le projet PRPSS finance Le projet appuiera le développement institutionnel de l’ANAM en finançant les activités suivantes :  Formation de ses cadres qui feront des stages et des study tours en visitant des institutions similaires dans des pays de la sous-région (Ghana, Gabon…) et en dehors de celle-ci (Afrique du Nord, Asie, Amérique Latine…).  Recrutement d’une assistance technique, pendant douze mois, portant sur le développement institutionnel de l’ANAM et sur le système d’information. L’assistance technique travaillera avec l’équipe de l’ANAM, les personnes ressources du Ministère de la Santé ainsi que tous les départements concernés afin de finaliser l’organigramme de l’ANAM, de proposer une grille de description de poste et la liste exhaustive des ressources humaines nécessaires à cette institution tout en suggérant un plan de formation de court et de moyen termes. L’assistance technique travaillera également sur le processus de mise en place d’un système d’information et sur la production d’une Carte à contrôle biométrique. Elle aidera l’ANAM à avoir une bonne interface avec le Cabinet spécialisé qui mettra en place le système de Carte à contrôle biométrique. Enfin, le projet PRPSS contribuera au financement de l’acquisition d’un logiciel de gestion du risque maladie.  Aider la Cellule à se doter d’équipement informatique de base (ordinateurs, logiciels de bureautique, imprimantes…). Le projet essaie d’introduire la dimension technologique dans la perspective d’amélioration du processus d’identification des populations les plus pauvres, pour une meilleure transparence, une vélocité d’action et une bonne qualité des services du Fonds de Solidarité des Indigents (FSI). Pour cela, un cabinet spécialisé sera recruté afin de proposer une solution biométrique pour la mise en place d’une carte d’assuré au profit des indigents bénéficiaires du FSI. Les délivrables du Cabinet, dans les zones sanitaires concernées par le PRPSS, seront :  Production de cartes magnétiques.  Fourniture d’un serveur, d’équipements et de logiciels nécessaires à la gestion de la Carte magnétique avec contrôle biométrique.  Conception et mise en œuvre d’un système d’information et d’un système de gestion adéquats.  Elaboration de manuels pour l’utilisation de ce système biométrique.  Formation des cadres de l’ANAM et des prestataires concernés. Cette activité sera nécessaire également pour le développement de la biométrie pour le RAMU. L’appel d’offres concernant ce volet pourrait s’élargir à un outil informatisé et adapté à la biométrie pour la gestion des feuilles de soins, le paiement des prestataires et même le recouvrement des cotisations (à étudier). 5 5. Ce qui reste à financer par le Gouvernement et par les PTF Deux options s’offrent au Gouvernement : (i) accélérer la mise en fonctionnement de l’ANAM ou (ii) accélérer une sous-traitance de la gestion du RAMU par une entité publique existante ou par une compagnie d’assurance privée. Dans l’option (i), il s’agira de financer ce que le projet PRPSS ne finance pas. Nous insistons ici sur le local, le recrutement du personnel, les équipements non financés par le PRPSS, les moyens de mobilité, les moyens de communication, les activités complémentaires de formation et l’appui technique non pris en charge par le PRPSS… Dans, l’option (ii), il s’agira de financer au même temps le développement de l’ANAM, en tant qu’entité coordinatrice et de régulation, ainsi que le montant du contrat de sous-traitance. 6. Recommandations pour la mise en œuvre du RAMU 6.1. Le projet de Loi RAMU - Le gouvernement /MS devrait choisir une voie rapide pour le processus d’approbation du projet de Loi (initiative parlementaire versus initiative gouvernementale). - Certes, la diligence est recommandée, toutefois, la lecture de ce projet de loi fait naître quelques craintes quant aux choix qui sont stipulés, notamment en ce qui concerne la gestion déléguée (voir plus bas). La BM partagera ses soucis en annotant le projet de loi le plus tôt possible. 6.2. Les textes d’application La méthode proactive (et participative) est hautement recommandée pour plus de promptitude. Il n’est guère conseillé d’attendre l’adoption de la loi pour commencer le travail sur les textes d’application (qui demeure une tâche hyper lourde et complexe). Les projets de textes doivent être préparés concomitamment à la discussion du projet de loi au Parlement, quitte à opérer les modifications nécessaires au fur et à mesure. 6.3. L’architecture du RAMU - Il est important d’éviter la fragmentation en responsabilisant l’ANAM. Dans la loi, il est préférable de confier la gestion du RAMU et de son développement et extension à l’ANAM, tout en ouvrant la possibilité de conventionnement pour des gestions déléguées (fonds ; feuilles de soins ; affiliations & immatriculation). Nous ne croyons pas qu’il faille mentionner ces institutions sous-traitantes dans la loi en vue de ne pas se lier les mains d’avance. - En cas de gestion déléguée, il est nécessaire de tenir compte des éléments suivants : o Les caisses de retraites gèrent un produit dit « froid » contrairement à l’assurance maladie qui est un produit plutôt « chaud ». o Il faut s’assurer que les sous-traitants aient une capacité de gestion supérieure à ce pourrait avoir l’ANAM. o Il faut s’assurer également que ces sous-traitants aient des extensions régionales/départementales. o Avant la validation du conventionnement, il faudrait développer l’ANAM à un certain niveau qui lui permettrait d’organiser son Conseil d’Administration (c’est l’organe 6 qui doit valider ce type de contrats) et de signer d’égal à égal avec les gestionnaires délégués. o Avant la signature de ces contrats, un appel d’offre pourrait être nécessaire, particulièrement lorsque le sous-traitant ciblé est une compagnie d’assurance privé. o L’Etat et ses PTF se trouveraient en face d’un besoin de financement et du développement de l’ANAM (en tant qu’institution de coordination et de régulation) et des montants des contrats de sous-traitance. o Ces gestionnaires délégués exigeront des délais assez importants pour se préparer, surtout lorsqu’il s’agira d’institutions publiques n’ayant aucune expérience dans le domaine. 6.4. Un système d’extension progressif « Les plus grands voyages commencent avec un premier pas ». Il est recommandé (en parallèle au projet d’amélioration du Fonds de Solidarité des Indigents - FSI destiné aux plus vulnérables économiquement) de commencer avec un sous-régime relativement facile à mettre en place (exemple : les fonctionnaires et retraités du secteur public). Cette approche permettra au pays d’acquérir une expérience dans le domaine de la gestion de l’assurance maladie obligatoire/nationale en vue d’étendre progressivement la couverture à d’autres groupes (secteur formel privé, secteur informel, indépendants…) et d’intégrer les mécanismes de gratuités existants ainsi que le FSI. 6.5. L’ANAM A l’instar du National Health Insurance Authority au Ghana, l’ANAM se doit d’être l’acteur principal de mise en œuvre du RAMU. Plus son opérationnalisation est rapide plus la mise en place du RAMU le sera également. Et plus cette institution est forte techniquement (avec les moyens matériels nécessaires) plus le RAMU sera efficient. Nous croyons que son rôle est déterminant. 6.6. Engagement exceptionnel de l’Etat et mobilisation plus importante des PTF Ce qui est déjà un acquis est la grande volonté du gouvernement d’aller de l’avant dans la mise en place rapide du RAMU (soutenu par le chef de l’Etat). Ceci devrait être une opportunité pour travailler plus vite et pour mobiliser davantage de ressources par l’Etat et par ses PTF. Le soutien à l’ANAM et à son développement rapide exigent une mobilisation exceptionnelle de tout le monde : gouvernement, administration et PTF. 6.7. Délais raisonnables du démarrage de l’ouverture des droits Les pires ennemis traditionnels de ce type de réformes sont : la précipitation, le laxisme de l’Administration et l’absence de ressources et de pré-requis nécessaires avant le lancement effectif. Le gouvernement du Benin devrait éviter les risques liés à la précipitation et à l’absence de pré-requis, quitte à retarder l’ouverture des droits de quelques mois. Ce qui ne représente pas en soi-même une longue période pour un projet d’une telle envergure et d’une telle complexité ! Quelle serait alors une échéance courte, mais raisonnable ? Essai de réponse : ni le 1er avril (qui n’est pas réalisable à notre avis), ni un différé sine die. Le RAMU pourrait être effectivement opérationnel (commencement des remboursements), avec la mobilisation de tous, en 2013 ; et c’est déjà une grande performance vu la complexité de ce genre de réformes ! 7 Annexe 1 : Proposition de Plan d’étapes pour la mise en œuvre du RAMU (scenario optimiste) - 1ère phase1 - Etapes Activités à réaliser Produits Date limite Financement Commentaires Législation et Adoption de la Loi et des Textes - Loi adoptée et publiée Fin Mars Gouvernement - Il serait nécessaire d’opter réglementation d’Application - Décrets et Arrêtés adoptés 2012 essentiellement pour le circuit d’approbation et publiés le plus court possible (introduction de la Loi par un Député plutôt que par l’Administration ?) - La méthode de travail sur les textes d’application doit être proactive (ne pas rester passif jusqu'à l’adoption de la Loi) Développement de - Mettre un local à la disposition de - ANAM logée, équipée, Mi Octobre Gouvernement - Dans le cas où l’option de l’ANAM, des outils l’ANAM staff recruté et formé 2012 (surtout : local, gestion déléguée est retenue, de gestion du risque - Fournir le nécessaire pour son - Antennes régionales staff, dépenses le Gouvernement sera dans maladie et de fonctionnement (équipements, créées et fonctionnelles récurrentes et l’obligation de financer recouvrement fournitures, bureautique, moyens de - Métier de gestion du équipement non également le montant du communication, …) risqué maladie pris en charge par contrat entre l’ANAM et - Recruter un minimum de staff approprié par l’ANAM les PTF ; en plus l’organisme gestionnaire - Recruter l’assistance technique des antennes délégué - Organiser un ou plusieurs study tours régionales) - Dans ce cas, l’ANAM se - Développer des outils de gestion PTF (équipement, contentera d’un rôle de internes logiciels, assistance coordonnateur et de - Acquérir un logiciel de gestion du technique, study régulateur risque maladie (+formation) tours) - Créer des antennes régionales 1 Phase de couverture des fonctionnaires. Elle permettra au pays d’acquérir une expérience dans le domaine de gestion de l’assurance maladie obligatoire/nationale en vue d’étendre progressivement la couverture à d’autres groupes (secteur formel privé, secteur informel, indépendants…) et d’intégrer les mécanismes de gratuités et le Fonds de Solidarité des Indigents (FSI). 8 Etapes Activités à réaliser Produits Date limite Financement Commentaires Test des outils de - Tester et ajuster les activités de Recouvrement, tiers Fin Gouvernement et Une étape nécessaire qui se fera gestion et de recouvrement, de prise en charge paiement, remboursement Novembre PTF en parallèle avec l’affiliation et recouvrement et (tiers payant), de gestion de feuilles des bénéficiaires et 2012 l’immatriculation. conventionnement de maladie et de paiement des paiement des prestataires avec les prestataires prestataires testés et ajustés Affiliation, - Enregistrer et immatriculer les - Bénéficiaires affiliées et Fin Gouvernement et Immatriculation et personnes éligibles (adhérents et immatriculées décembre PTF prélèvements des ayants droit) - Employeurs et caisses 2012 cotisations - Faire les requêtes pour le paiement de retraites saisis des cotisations auprès des - Début du recouvrement employeurs et des caisses de retraite - Commencer le recouvrement Production & - Produire et distribuer des cartes - Cartes de bénéficiaires 1er trimestre Gouvernement et Les cartes seront probablement distribution des simples (en attendant le système produites et distribuées 2013 ANAM simples en attendant la mise en cartes et début de biométrique) - Début du place du système biométrique remboursement et - Commencer le remboursement des remboursement et des qui pourrait être fonctionnel un de paiement des bénéficiaires et le paiement des paiements peu plus tard dans l’année prestataires prestataires (2013) 9 Annexes 2 : Proposition de Chronogramme pour la mise en œuvre du RAMU Période de travail (2012) 1er Trim. Etapes 2013 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 Législation et réglementation Développement de l’ANAM, des outils de gestion du risque maladie et de recouvrement Test des outils de gestion et de recouvrement et conventionnement avec les prestataires Affiliation, Immatriculation et prélèvements des cotisations Production & distribution des cartes et début de remboursement et de paiement des prestataires 10 Annexes 3 : Commentaires de la Banque Mondiale sur le rapport d’étape du Projet RAMU (Octobre 2011) Commentaire sur le Document intitulé “Processus de mise en place d’un régime d’assurance maladie universelle (RAMU) - Rapport d’étape au 15 juillet 2011 » Tout d’abord, nous présentons toutes nos félicitations au Gouvernement du Benin et, particulièrement au Ministère de la Santé tant pour cette franche volonté d’aller de l’avant dans le processus de mise en œuvre du RAMU que pour le processus participatif qui est utilisé dans ce but. Ensuite, nous réitérons la disponibilité de la Banque Mondiale en vue de vous accompagner dans ce processus au travers de notre projet commun « Renforcement de la Performance du Système de Santé » et de nos experts dans le domaine qui, en cas de besoin, seraient disposés à vous apporter l’appui technique nécessaire. Enfin, nous félicitons l’équipe de rédaction du document, cité en titre, pour la bonne synthèse des concertations et des études antérieures. Ce document a le mérite également de relater succinctement les options de la configuration institutionnelle, technique et financière du RAMU. En tant que partenaire du Gouvernement du Benin dans ce processus de mise en œuvre du RAMU, la Banque Mondiale (BM) souhaiterait formuler quelques commentaires sur le document en question, qui sont comme suit : 1. Dans le plaidoyer, en complément à la lutte contre les dépenses directes des ménages, il faudrait ajouter que ce type de dépenses induit des dépenses catastrophiques individuelles qui conduisent, à leur tour, à l’appauvrissement des familles. 2. Des informations doivent être mises à jour comme par exemple a la page 13, tableau 2, ligne 4 sur le projet de la BM qui n’a pas été mis en vigueur en 2010. 3. L’architecture institutionnelle du RAMU est hyper fragmentée. Cette fragmentation pourrait handicaper lourdement le passage à des taux de couverture élevés. Elle serait également un lourd fardeau financier en raison des coûts de transaction qui seraient induits par cette multiplicité hypertrophiée des institutions et des régimes. Cette option ne pourrait être valable que provisoirement le temps que l’ANAM ait atteint sa vitesse de croisière. La loi sur le RAMU devrait prévoir une période transitoire de 3-5 années après laquelle la majorité des régimes existants (gratuités, prise en charge des indigents, fonctionnaires, secteur privé formel…) rentrerait sous le parapluie de l’ANAM. 4. Pour le cas spécifique du secteur informel, nous pensons qu’il faudrait le scinder en deux : - un secteur informel localisé (exemple des petits commerçants ayant pignon sur rue et payant éventuellement des taxes à la Commune ou à la ville…). Celui-ci pourrait être intégré directement à l’ANAM pour ceux qui ne sont affiliés à aucune mutuelle corporatiste ou communautaire. 11 - Un secteur informel (et agricole) non localisé. La population concernée est soit indigente (dans ce cas elle serait prise en charge ailleurs), soit sans couverture. Dans ce dernier cas, il faudrait promouvoir des Mutuelles Communautaires qui constitueraient des groupements au niveau du District/Province. Ces regroupements provinciaux pourraient être appuyés par un niveau national que l’ANAM pourrait assurer. 5. Il n’est pas dit dans le document si ce régime doit être obligatoire ou facultatif. Dans le dernier cas, il faudrait s’attendre au risque très élevé aussi bien du parasitisme (et abus) que de la sélection adverse, surtout si l’adhésion est individuelle. 6. Dans la partie « source de financement », il faudrait insister sur le fait que l’Etat est un employeur, et à ce titre, il doit honorer ses cotisations patronales telles qu’elles seront fixées dans les textes législatifs (en plus des enveloppes qu’il devrait payer pour les indigents, les groupes spéciaux et les gratuités pour des programmes prioritaires comme la SMI). 7. Concernant le FSI, qui devrait normalement basculer vers l’ANAM, ses ressources devraient être utilisées non seulement pour le paiement des cotisations des indigents, mais aussi pour la couverture de leurs tickets modérateurs (co-paiements) afin d’éviter tout paiement aux bénéficiaires (indigents). 8. Toujours au niveau du financement, les primes mensuelles mentionnées à la page 33 sont régressives ; c’est-à-dire que plus on est pauvre, plus le taux de prime est élevé. Prenons par exemple les cas des revenus suivants en CFA : 100.000 ; 200.000 ; 300.000 ; 550.000 ; 2.000.000 et 5.000.000. Selon la grille de la page 33, les taux de cotisation implicites seraient respectivement de : 2,5% ; 1,8% ; 1,5% ; 1% ; 0,3% et 0,1% ! 9. En général, les deux options d’approches suivies par les pays pour la fixation des cotisations et/ou primes sont les suivantes : - Le pays décide d’un panier de services pour une population déterminée et effectue des études actuarielles en vue de savoir combien ceci lui coûterait sur une longue période (5- 10 années par exemple). - Le pays étudie son espace fiscal et la capacité contributive de ses entreprises et de sa population. A partir de là, une enveloppe mobilisable est calculée qui, à son tour, déterminera l’envergure du panier de soins et le niveau des tickets modérateurs (co- paiement). - Le Benin a choisi apparemment la première option au travers de laquelle des gaps financiers importants sont apparus très clairement aux pages 45 et 46. 10. Concernant le panier de soins/bénéfices, nous recommandons la plus grande prudence quant à la prise en charge des évacuations sanitaires à l’étranger. Ce mécanisme doit être entouré de gardes fous nécessaires dans le but de limiter autant que faire ce peu les abus qui en découleraient. A ce niveau, il faudrait également améliorer la qualité de l’offre de soins disponible dans le pays (dans les deux secteurs privés et publics) et rendre disponibles des services qui font actuellement défaut dans le pays2. 2 Une approche régionale parallèle profiterait aussi bien au Benin qu’aux pays voisins en vue d’atteindre des économies d’échelle. En effet, les pays de la sous-région pourraient convenir de créer des pôles d’excellence 12 11. Toujours au niveau du panier de services, en ce qui concerne les « cas spéciaux » (page 35) : en raison de leurs externalités négatives, les maladies et infections transmissibles doivent être combattues par les pouvoirs publics et cette lutte doit être considérée comme un bien public. Par contre, pour les maladies non transmissibles, l’Etat se doit d’assurer la prévention primaire ; alors que les régimes d’assurance maladie doivent assurer la prévention secondaire (pour des diagnostics précoces) et le traitement qui est coûteux et qui induit des dépenses catastrophiques pour les ménages. 12. Il ne faudrait pas exclure le secteur privé à but lucratif du cadre de conventionnement avec le RAMU, surtout si le secteur privé à but non lucratif est admis dans ce conventionnement. Il s’agirait alors d’aligner les tarifs de responsabilité / de conventionnement des deux composantes du secteur privé. Bien évidemment, le patient qui souhaiterait recourir aux services d’un prestataire privé à but lucratif subirait un ticket modérateur plus élevé que s’il utilisait un prestataire moins coûteux (privé SBL ou public). Ceci est similaire aux médicaments s’ils sont remboursés en fonction du prix du médicament générique le moins cher. Le patient qui choisirait le médicament le plus cher sur le marché subirait un ticket modérateur élevé. 13. Au niveau des organes de gouvernance, il ne faudrait pas admettre les prestataires de soins dans le Conseil d’Administration de l’ANAM en vue éviter le risque de conflit d’intérêt. Toutefois, du moment que le Ministère de la Santé est présent (qui est également prestataire de soins), ces entités pourraient assister aux réunions du CA à titre d’observateurs uniquement sans aucun pouvoir de vote. Quant aux partenaires techniques et financiers, ils n’ont pas leur place dans le CA sauf pour ceux qui financement directement le RAMU (par exemple ceux qui paient les cotisations pour les groupes les plus vulnérables…). 14. Concernant le modèle Sim-Ins. Il est pratique, économique et simple à utiliser. Toutefois, il faudrait y inclure des variables dichotomiques sur l’élasticité de la demande et son pendant le hasard moral. 15. Les études actuarielles et sur les coûts permettent de calculer les taux de cotisation et les subventions nécessaires pour la pérennité du financement du RAMU sur une longue période. Toutefois, ces études sont plutôt un art qu’une science exacte. C’est pour cela qu’il serait nécessaire de mentionner les niveaux de ces cotisations dans les textes d’application et non pas dans la Loi qui est difficile à modifier en raison de son long circuit d’approbation et des jeux politiques aléatoires ; alors qu’il est plus aisé de modifier des textes d’application/décrets. Toutefois, le plafond des cotisations pourrait être mentionné. 16. Si Monsieur le Président du Benin fera une déclaration sur la question au mois de novembre, nous recommandons à ce que Son Excellence reste dans des généralités concernant les caractéristiques du RAMU (pour ne pas avoir les mains liées plus tard), mais insiste plutôt sur le calendrier et le processus de mise en œuvre. Avec tous nos souhaits de réussite. (cancer, chirurgie cardio-vasculaire de pointe…). Chaque pays disposera d’un centre ou d’un institut d’excellence hyper spécialisé. De telle sorte à éviter les évacuations sanitaires en dehors de la zone régionale et à ce que la sous-région couvre tous les besoins à des coûts raisonnables. La concentration de plusieurs pôles d’excellence dans un seul pays à revenu faible, quand c’est possible, est, en général, très coûteuse et non pérenne. 13