80649 Note d’information Microfinance et banque mobile : vers une approche intégrée ? E n janvier  2012, une nouvelle activité bancaire était sur le point de voir le jour aux Philippines. Après deux années d’activité dans le secteur du Avant de s’intéresser aux cas les plus récents d’IMF ayant recours à la banque mobile, il est utile de dresser un état des lieux de ce secteur. Selon l’Étude refinancement des institutions de microcrédit, BanKO mondiale 2012 sur l’adoption des services d’argent (enregistrée comme caisse d’épargne) était prête à mobile, conduite par le programme « Mobile Money se lancer dans la microfinance de détail en utilisant for the Unbanked  » (l’argent mobile au service des la téléphonie mobile comme outil principal. Ayant personnes non bancarisées) de la GSMA, il existe travaillé pendant des années à la Bank of the Philippine Islands (BPI), la directrice générale, Teresita Tan, était actuellement 150  services actifs d’argent mobile très consciente du coût élevé du fonctionnement des dans 72  pays, dont 41  lancés en 20125. Quatre- succursales et de la nécessité de s’appuyer sur la vingt-deux millions de clients sont enregistrés dans téléphonie mobile pour réussir le lancement d’une le monde, dont 30  millions disposent de comptes entreprise à bas coût dont les activités pourraient actifs6. Ces services ont recours à 520  000 agents être développées1. Cette démarche a débouché sur pour assurer les transactions avec les clients. L’achat la création d’une nouvelle institution de microfinance de crédit téléphonique représente 61 % du volume qui offre aux clients des services de paiement, des transactions en argent mobile, mais les transferts d’épargne, de prêt et d’assurance accessibles de personne à personne (P2P) constituent 82 % de la essentiellement grâce au téléphone mobile ainsi valeur des transactions. que dans les 2  000  points de vente partenaires de BanKO. À mesure que le client se constitue un Ces chiffres démontrent clairement la croissance historique d’épargne, il remplit les critères voulus continue du secteur de l’argent mobile, mais il pour bénéficier d’un prêt qui est directement viré subsiste des obstacles majeurs à la poursuite de cette dans son compte BanKO sans qu’aucune vérification préalable ne se fasse en personne. croissance et à la valeur ajoutée que le secteur apporte aux pauvres et aux personnes non bancarisées. La BanKO représente un nouveau modèle d’entreprise gestion efficace d’un réseau d’agents continue d’être apparu au cours des dernières années, depuis que un problème. De nombreux agents éprouvent des le CGAP a fait état pour la première fois dans ses difficultés à rentabiliser les services d’argent mobile publications du lien entre la microfinance et les et font face à des coûts imprévus liés à la gestion des services bancaires par téléphone mobile (ou « banque liquidités. Seuls 63  % des agents enregistrés sont mobile »)2, 3. À ce stade, BanKO reste toutefois une considérés comme actifs7. Les clients souscrivent exception. La plupart des institutions de microfinance certes à ce nouveau service, mais beaucoup d’entre (IMF) réfléchissent encore à la meilleure façon de eux ne continuent pas à effectuer des transactions tirer parti des services de banque mobile pour par la suite ou ne le font qu’occasionnellement. leurs activités en fonction de leurs propres cadres En conséquence, de nombreux opérateurs se juridiques et réglementaires et de leur contexte opérationnel particulier4. Le présent article examine retrouvent avec une large base de clients inactifs et les dernières données sur la façon dont la banque ne savent pas comment procéder pour les inciter à mobile influence la manière dont les IMF mènent leurs être plus actifs. En fait, seuls six fournisseurs d’argent activités de base et servent leur clientèle, ainsi que mobile ont réussi à accumuler plus d’un million de les nouveaux modèles d’entreprise qui s’esquissent. clients actifs. 1 Les informations sur BanKO proviennent d’un entretien mené avec la DG, Teresita Tan, en décembre 2012 et de contacts ultérieurs entretenus jusqu’en juin 2013. 2 Dans cet article, le terme « banque mobile » est utilisé dans le sens le plus large possible, qui intègre les paiements et les transferts d’argent par téléphone mobile. Il est reconnu que de nombreux services, tels que M-PESA au Kenya, sont effectivement des services de paiements mobiles. Les plateformes mobiles renvoient aux plateformes technologiques spécifiques utilisées. Par ailleurs, le présent article porte sur la banque mobile par opposition aux services bancaires sans agences, qui intègrent d’autres moyens technologiques, tels que les cartes, les terminaux de points de vente et les guichets automatiques. Le document porte uniquement sur l’utilisation du téléphone portable pour les transactions financières et non pour les transactions non financières telles que la collecte de données ou le rappel des remboursements. 3 Cf. Kumar, McKay, et Rotman (2010). 4 Dans le présent article, les IMF sont définies comme toute institution financière formelle qui offre au moins des prêts à une clientèle principalement à faible revenu. Cette définition couvre les organisations non gouvernementales dont la seule activité est la fourniture de prêts, les institutions financières No 88 non bancaires, les établissements de microfinance et les banques commerciales qui se concentrent sur des opérations de microfinance. Août 2013 5 http://www.gsma.com/mobilefordevelopment/wp-content/uploads/2013/02/MMU_State_of_industry.pdf. 6 Les estimations de la GSMA sont basées sur la définition suivante des comptes actifs : ceux dans lesquels au moins un transfert de personne à personne, Michel Hanouch un paiement de facture, un paiement groupé, l’achat de crédit téléphonique, une opération de dépôt ou de retrait d’espèces a été effectué au cours des et Sarah Rotman 30, 60 ou 90 jours précédents. Lorsque les entreprises sondées ont fourni des taux d’activité pour plus d’une période, la GSMA a considéré la période présentant le taux d’activité le plus élevé. 7 Pour plus de 60 % des participants à l’enquête de la GSMA, un agent actif s’entend d’un agent ayant effectué au moins une transaction financière dans les 30 derniers jours. 2 Le présent article vise à répondre aux questions D’un point de vue méthodologique, les travaux de suivantes : recherche ont consisté à conduire des entretiens avec • Partie 1 : Quelles possibilités s’offrent aux IMF de des IMF qui ont expérimenté ou pleinement intégré tirer parti de la banque mobile pour les transactions la banque mobile dans leurs activités de microfinance. de microfinance ? Certaines d’entre elles avaient déjà été interrogées • Partie  2  : Quelles sont les expériences des IMF dans le cadre du dernier rapport du CGAP sur le ayant servi d’agents pour des systèmes de banque sujet, l’objectif étant de tirer les enseignements de mobile ? leurs activités au cours des dernières années. Les • Partie  3  : Les IMF et leurs clients tirent-ils des autres IMF incluses dans l’étude sont nouvelles avantages de l’utilisation de la banque mobile ? dans le domaine de la banque mobile. Alors que le • Partie 4 : Pourquoi certaines IMF ont-elles pris la nombre d’IMF concernées était faible dans le cas de décision stratégique de ne pas se lancer dans la l’étude précédente, il aurait été possible d’évoquer banque mobile ? le cas d’un plus grand nombre d’institutions dans le • Partie 5 : Comment la banque mobile favorise-t- présent document si l’on avait disposé de plus de elle l’émergence de modèles opérationnels de place. L’encadré 1 résume les principales conclusions microfinance innovants ? de l’étude. Encadré 1 : Principales conclusions • Rien n’indique que les IMF et leurs clients constituent le • La mesure dans laquelle une IMF réduit ses coûts d’ex- moteur du développement de la banque mobile dans un ploitation grâce à la banque mobile dépend du transfert marché. ou non par l’institution du coût des remboursements de • Les IMF qui réussissent à tirer profit de la banque mobile prêts à l’emprunteur. De même, la mesure dans laquelle la sont en général installées dans les pays où un service de mobilisation de l’épargne par le biais de la banque mobile cette nature est déjà largement utilisé. Sur ces marchés, permet à une IMF de réduire ses coûts de financement les clients peuvent même attendre ou exiger de leur IMF varie en partie selon que l’IMF ou le client prend en charge qu’elle propose les services bancaires mobiles comme les frais de transaction. option de remboursement. • On constate de plus en plus que les clients des IMF • Pour les IMF, les avantages des services de banque mobile apprécient le gain de temps et les économies de coûts dépendent en grande partie du succès des services réalisés grâce aux services de banque mobile pour les bancaires mobiles existants. Dans les marchés où la remboursements de prêts et que leurs besoins sont mieux banque mobile est très présente, les IMF et leurs clients servis lorsqu’ils peuvent rembourser leurs emprunts par le peuvent plus facilement en tirer profit. biais du téléphone portable. • Actuellement, les IMF ont le plus souvent recours aux • Un des principaux facteurs déterminant le choix de services de banque mobile pour des remboursements la formule de remboursement des clients est tout de prêts. Davantage d’IMF utilisent ces services pour la mobilisation de l’épargne que pour les versements de simplement le degré de proximité respectif de l’agent et prêtsa. Les préoccupations habituelles des IMF au sujet de de la succursale bancaire. la banque mobile se sont avérées gérables. Elles portent • Même dans un pays disposant d’un service viable essentiellement sur les questions suivantes : comment la de banque mobile, on peut invoquer des raisons banque mobile affectera-t-elle la dynamique de groupe et institutionnelles ou propres au marché pour reporter les taux de remboursement ? Comment le rapprochement l’intégration de la banque mobile dans les institutions des comptes se fera-t-il dans le système d’information de de microfinance. La détérioration de la situation du gestion ? Comment les clients et le personnel s’adapte- portefeuille de prêts en est un exemple. ront-ils aux nouvelles options de paiement ? • Les nouvelles IMF doivent envisager d’adopter la banque • Les IMF ne sont généralement pas bien placées pour mobile dès leur lancement afin d’éviter les coûts et les construire leur propre système de banque mobile et de- obstacles liés à la gestion du changement et veiller à ce que vraient plutôt chercher à tirer parti des services existants. l’investissement dans ces services remplace d’autres coûts • À ce jour, l’expérience des IMF agissant comme agents des plutôt que de s’ajouter aux coûts parallèles de trésorerie. systèmes de banque mobile fait apparaître des résultats • L’une des plus grandes avancées récentes dans le domaine mitigés, principalement en raison des coûts de gestion des de la fusion entre la microfinance et la banque mobile liquidités et de la structure du système de commissions. est l’avènement de nouveaux modèles opérationnels de • Rien n’indique réellement que les IMF touchent les clients microfinance qui exploitent les téléphones mobiles et dans de nouvelles zones géographiques ou des couches les réseaux d’agents pour gérer les demandes de prêts, à faible revenu grâce à la banque mobile. Des indices vérifier la situation des clients et prendre des décisions en qualitatifs indiquent que les IMF ont recours à la banque matière de prêts. mobile afin d’obtenir un avantage concurrentiel, mais cet avantage est susceptible de diminuer à mesure que d’autres a. Selon un récent sondage réalisé par Triple Jump Advisory IMF intègrent la banque mobile dans leurs opérations. Services (2013). 3 1. Quelles possibilités s’offrent code pour recevoir des paiements de facture par téléphone portable. Cette stratégie est le moyen le aux IMF de tirer parti plus rapide pour une IMF de tirer parti des services de la banque mobile pour de banque mobile et nécessite le plus bas niveau les transactions de microfinance ? d’investissement possible, l’IMF pouvant importer les données et effectuer un rapprochement manuel des La figure 1 illustre un processus de fonctionnement données. Une IMF peut également choisir d’investir traditionnel d’un établissement de microfinance. dans un « intergiciel » qui automatise le processus de Bien que n’étant pas destiné à faire ressortir les téléchargement et de rapprochement des données complexités de tous les modèles de microfinance, il de remboursement de la plateforme de la banque permet de voir dans quel secteur de la microfinance mobile dans le système d’information de gestion (SIG) la banque mobile peut jouer un rôle. À ce jour, de l’IMF — l’intergiciel peut également être utilisé les trois principaux domaines dans lesquels la pour télécharger et rapprocher les données relatives banque mobile a le plus influé sur les IMF sont les aux décaissements de prêt et à l’épargne. D’après remboursements de prêts, les décaissements de certains fournisseurs de technologie, cet intergiciel prêts et la mobilisation de l’épargne. En revanche, coûte entre 10 000 et 20 000 dollars au Kenya, selon le les nouveaux modèles opérationnels de microfinance niveau d’automatisation et la nature du SIG de l’IMF. (examinés à la partie  5) innovent dans tous les L’automatisation devient plus intéressante à mesure domaines du processus opérationnel. qu’augmente le nombre de clients utilisant le système de banque mobile pour effectuer des transactions de Les IMF ont tendance à recourir à l’une ou l’autre microfinance, le manque d’automatisation pouvant de deux stratégies applicables à l’exploitation de être un obstacle à la croissance. systèmes de banque mobile, chacune présentant des implications différentes quant au niveau Pour l’IMF, la seconde stratégie consiste à investir d’investissement nécessaire et aux fonctionnalités dans une technologie qui relie les porte-monnaies offertes aux clients (ces deux stratégies ne sont pas mobiles des clients à leurs comptes dans l’IMF. Cela exhaustives, mais elles représentent les approches permet aux clients d’accéder à ces comptes par le les plus communément appliquées par les IMF à ce biais de leurs téléphones portables et d’effectuer jour). La première stratégie consiste tout simplement des transactions financières entre leur compte et à recourir soit à la fonctionnalité «  règlement de le porte-monnaie mobile8. L’IMF exploite le réseau facture » du prestataire existant de services de banque d’agents de l’opérateur de banque mobile existant mobile et de son réseau d’agents pour faciliter le pour faciliter les opérations de dépôt et de retrait remboursement des prêts et/ou la mobilisation d’espèces9 dans le porte-monnaie mobile du client, de l’épargne, soit à la fonctionnalité «  paiements puis dans son propre compte. Pour les IMF qui groupés  » pour faciliter les décaissements de essaient de mobiliser l’épargne, cette option peut prêts. Dans cette approche, l’IMF utilise son propre s’avérer plus intéressante que la première stratégie code de règlement de facture, tout comme une puisque les économies virées dans le compte compagnie des eaux ou du gaz utiliserait son propre bancaire de l’institution de microfinance demeurent Figure 1. Processus de fonctionnement traditionnel d’un établissement de microfinance Les IMF tirent parti des systèmes de banque mobile existants 3 2 1 VérificaƟon Montage Demande préalable et MobilisaƟon Décaissements Remboursements Suivi du Renouvellement de prêt décision de prêt de l’épargne de prêts de prêts portefeuille ou clôture du prêt 8 Pour ce faire, l’IMF fournit le plus souvent son propre code USSD (Unstructured Supplementary Service Data, ou service supplémentaire pour données non structurées), autrement dit une série de chiffres commençant généralement par un astérisque et se terminant par le signe dièse (par exemple,*2427#). Le code USSD est l’un des canaux de communication les plus efficaces pour les paiements mobiles. Il est connu pour être plus sûr et plus convivial que le SMS et, à la différence des applications basées sur le Web, il est disponible même sur les modèles de téléphone les plus simples. Cette option n’est pas propre au code USSD : les IMF peuvent aussi l’appliquer en utilisant les SMS ou l’Internet pour relier les porte-monnaies électroniques existants de leurs clients à leurs comptes bancaires domiciliés dans l’IMF. 9 Les opérations de dépôt d’espèces facilitent les remboursements de prêts et la mobilisation de l’épargne, alors que les opérations de retrait facilitent les décaissements de prêts et l’accès à l’épargne. 4 accessibles par le biais du porte-monnaie mobile du teforme M-PESA pour le remboursement des prêts, client et du réseau d’agents de l’opérateur existant les décaissements de prêts et la mobilisation de de banque mobile10. Selon certains fournisseurs de l’épargne11. Elle a démarré ses activités en 2009 sim- solutions technologiques, une IMF disposant d’un plement en utilisant la fonctionnalité « règlement de système d’information de gestion robuste devrait facture  » de M-PESA. L’IMF nourrissait les mêmes investir entre 50 000 dollars et 100 000 dollars pour craintes au sujet de l’impact potentiel sur la cohésion bénéficier de cette fonctionnalité sur un marché de du groupe, donc sur les taux de remboursement, et paiement mobile relativement mature comme le se demandait si les remboursements par téléphone Kenya où plusieurs entreprises technologiques sont en portable accroîtraient l’efficacité ou compliqueraient concurrence pour fournir ces services aux nombreuses la vie des agents de crédit par l’introduction de pro- institutions financières qui sont en relation avec la cessus fastidieux de rapprochement manuel. Après plateforme M-PESA. Sur d’autres marchés, le coût plusieurs années d’expérience, SMEP DTM signale pourrait être plus élevé pour les premiers entrants, que malgré la réduction de la fréquence des réunions mais il est susceptible de diminuer à mesure que la (qui sont passées d’une rencontre par semaine à une technologie et les processus d’intégration deviennent par mois), les clients ont réussi à faire la transition sans plus uniformes. Au Kenya, un certain nombre d’IMF effets négatifs sur le rythme des remboursements. sont passées de la première stratégie à la deuxième, Certains membres du groupe continuent de payer ce qui permet plus de fonctionnalités entre les porte- chaque semaine, d’autres payent mensuellement monnaies électroniques des clients et leurs comptes avant la réunion, tandis que d’autres paient lors des dans les IMF. réunions12. La possibilité de payer lorsque cela leur convient ainsi que, dans certains cas, la réduction de Il est utile de garder ces deux stratégies bien présentes la fréquence des réunions sont considérées comme à l’esprit lorsque l’on examine les expériences des IMF des avantages non négligeables par les clients. tirant parti des systèmes existants de banque mobile. Pour surmonter les préoccupations liées au rappro- Remboursements de prêts chement manuel, SMEP DTM a investi dans un inter- giciel qui intègre mieux son SIG avec M-PESA. Cela Dans un marché doté d’un système de banque a considérablement réduit la nécessité du rapproche- mobile largement utilisé et assorti d’un réseau ment manuel et a apaisé les craintes des agents de d’agents vaste et efficace, la possibilité d’accepter crédit. Ils soutiennent maintenant davantage l’utilisa- les remboursements de prêts par téléphone est tion de M-PESA, qui a eu une influence positive sur sans doute l’un des avantages les plus rapides la volonté des membres du groupe d’adopter éga- que les IMF tirent de la banque mobile. Trois lement cette option de paiement. La rémunération questions préoccupent habituellement la direction des agents de crédit dépendant souvent de la taille des IMF au sujet de l’introduction de cette option et de la qualité de leur portefeuille, l’instauration de remboursement  : comment va-t-elle affecter la d’incitations visant à faire en sorte qu’ils profitent dynamique de groupe et le respect des échéances de de l’efficacité induite par l’adoption de services de remboursement  ? Comment le rapprochement des banque mobile est dans l’intérêt bien compris à la données se fera-t-il dans le système d’information fois des IMF et des agents de crédit13. de gestion  ? Comment les clients et le personnel, notamment les agents de crédit, s’adapteront-ils aux La société Faulu Kenya Deposit Taking Micro-Finance nouvelles options de paiement ? Limited a introduit les services de banque mobile pour deux raisons principales : la demande des clients SMEP DTM Limited est une IMF kenyane qui offre et les économies de coûts14. Avant de disposer de à ses 168  000 clients la possibilité d’utiliser la pla- cette possibilité de remboursement par le biais de la 10 La première stratégie peut être utilisée pour mobiliser l’épargne en permettant aux clients d’utiliser la fonctionnalité « règlement de facture » pour transférer des fonds dans le compte de l’IMF. Toutefois, les clients ne seraient pas en mesure de tirer parti de la téléphonie mobile ou du réseau d’agents de l’opérateur de banque mobile pour accéder à ces fonds dans le compte de l’IMF. 11 Les informations sur SMEP DTM proviennent d’une réunion entre le consultant du CGAP Tony Oyier et le personnel de l’IMF en janvier 2013 et de contacts ultérieurs entretenus jusqu’en juin 2013. 12 Certains groupes effectuent les remboursements en utilisant un seul téléphone portable ; le chef du groupe reçoit de l’argent des membres du groupe dans son porte-monnaie M-PESA, puis le transfère de son porte-monnaie électronique vers les différents comptes des membres domiciliés à SMEP DTM. 13 Entretien avec George Kinyanjui en novembre 2012, ainsi que contacts ultérieurs entretenus jusqu’en juin 2013. M. Kinyanjui a travaillé comme consultant pour plusieurs IMF, y compris SMEP DTM, lors de leur transition vers les solutions de banque mobile. 14 Ces informations sur Faulu proviennent d’une interview réalisée avec le responsable des TIC Kennedy Kipkemboi en août 2012 et de contacts ultérieurs entretenus jusqu’en juin 2013. 5 plateforme M-PESA, les clients du groupe passaient clients de Musoni en 2011 font état de contraintes de par un processus de remboursement fastidieux qui liquidités chez les agents. De nombreux agents ont du consistait à déposer les espèces dans le compte mal à payer plus de 58 dollars à 116 dollars par client, Faulu d’une succursale de banque commerciale et alors que les produits de prêts de Musoni vont de 58 à à joindre le bordereau de versement au formulaire 2 316 dollars (Sadana et al. 2011)20. En conséquence, de remboursement disponible dans une agence les clients désireux de retirer le montant total du prêt Faulu ou dans une réunion de groupe. Les nouveaux ont dû le faire auprès de plusieurs agents, ce qui est clients peuvent rembourser leurs prêts ou effectuer peu pratique et accroît les coûts. Bien que Musoni des dépôts par téléphone portable en se servant de couvre les frais de décaissement de prêt s’élevant à M-PESA. Conformément à la stratégie du groupe, 0,35  dollar facturé par Safaricom aux comptes des des réunions de la même fréquence et de la même clients, ces derniers sont tenus d’acquitter les frais de durée sont toujours de rigueur. Pour maintenir 0,29 dollar pour chaque retrait (Cracknell 2012). Par la stabilité des groupes et gérer la qualité du ailleurs, le fractionnement de la transaction entre de portefeuille, Faulu continue d’offrir des programmes nombreux agents peut ne pas résoudre entièrement d’éducation financière à ses clients. Deux ans après le problème dans les zones où les clients des IMF sont le lancement de ce service en décembre 2010, près servis par un petit nombre d’agents. de 54 % des 300 000 clients de Faulu s’étaient inscrits à la banque mobile, même si 15  000 d’entre eux SMEP DTM s’appuie également sur M-PESA pour seulement utilisaient régulièrement le service15. Ceux décaisser les prêts, mais son approche est moins qui s’en servaient le faisaient de façon très active : ils directe. Elle vire l’argent sur le compte SMEP DTM effectuaient en moyenne plus de dix transactions par d’un client. À partir de ce compte, ce dernier peut mois, y compris la consultation du solde et des mini utiliser la solution de banque mobile de cette IMF relevés bancaires. pour transférer les fonds vers son porte-monnaie mobile M-PESA afin de les retirer auprès d’un agent ou dans un distributeur automatique de billets (DAB). Décaissements de prêts Chaque jour, entre 34 700 dollars et 46 300 dollars Bien qu’un certain nombre d’IMF mettent à profit sont retirés des comptes de SMEP DTM grâce aux les services de banque mobile pour effectuer les services M-PESA — soit le double du montant qui décaissements de prêts, la valeur moyenne élevée est transféré de M-PESA vers SMEP DTM pour le des décaissements de prêts par rapport aux remboursement des prêts et l’épargne. Cela montre remboursements peut soulever deux questions. La que les clients apprécient d’accéder à leurs fonds première est de savoir si les agents peuvent traiter hors des agences SMEP DTM grâce à la fonctionnalité ces transactions de plus grande ampleur, compte de banque mobile de leur institution de microfinance. tenu des contraintes de liquidités ; la deuxième est de savoir si les restrictions sur les transactions des Avant de recourir au service M-PESA, SMEP DTM services de banque mobile ne sont pas trop faibles décaissait ses prêts à l’aide de chèques qui coûtaient pour certains prêts16. 0,64  dollar chacun. Les frais de décaissement de 0,35  dollar facturés par Safaricom permettent Musoni est une IMF kenyane qui prétend être la des économies de 45  %, auxquelles s’ajoutent des première institution de microfinance au monde à économies supplémentaires réalisées par l’IMF grâce avoir adopté un mode de fonctionnement excluant à la réduction des dépenses de personnel. Avec les entièrement le numéraire. Au 30 avril  2013, elle chèques, le rapprochement des relevés bancaires comptait environ 10  000 clients et avait décaissé nécessitait deux comptables à temps plein, ce qui plus de 6,3 millions de dollars en prêts17, 18, 19. Tous n’est pas le cas avec les décaissements par téléphone les remboursements sont effectués par le biais de portable. Les clients peuvent disposer des fonds M-PESA et Musoni décaisse tous les prêts par la même immédiatement, car ils n’ont plus besoin d’attendre plateforme. Toutefois, des études menées auprès des que leur chèque soit compensé. Les services de banque 15 http://www.nation.co.ke/business/news/-/1006/1065316/-/5kkxr3z/-/index.html. 16 Ces restrictions devraient normalement être introduites à des fins réglementaires, liées à la gestion du risque et à la lutte contre le blanchiment d’argent et contre le financement du terrorisme (AML/CFT). 17 http://www.economist.com/blogs/schumpeter/2013/02/microfinance (site web visité le 11 avril 2013). 18 Ces informations sur Musoni proviennent d’un entretien avec le directeur financier, James Owino, en août 2012 et de contacts ultérieurs entretenus jusqu’en juin 2013. 19 Dans cet article, le taux de change considéré est de 1 dollar pour 86,36 shillings kenyans (taux de change moyen annuel au 18 avril 2013). Source: http://www.centralbank.go.ke. 20 http://www.musoni.co.ke/index.php/products (consulté le 11 avril 2013). 6 mobile peuvent cependant encore nécessiter un En résumé, un nombre croissant d’IMF ont recours certain niveau d’intervention manuelle généralement aux services de banque mobile pour faciliter les causée par les changements de numéros de téléphone remboursements de prêts. Grâce à ces services, les IMF par les clients ou par des erreurs commises lors de réussissent aussi à mobiliser davantage d’épargne, en la saisie de leurs coordonnées bancaires. Même particulier au Kenya. En revanche, les IMF sont moins dans le cas de Musoni, spécifiquement conçue pour nombreuses à utiliser les services de banque mobile fonctionner avec le système M-PESA, 7 à 8  % des pour faciliter les décaissements de prêts, et celles qui transactions nécessitent une intervention manuelle le font continuent de connaître des difficultés liées (Cracknell 2012)21. à la disponibilité des liquidités chez les agents. Les préoccupations habituelles des IMF au sujet de la banque mobile se sont avérées gérables. Elles portent Mobilisation de l’épargne essentiellement sur les aspects suivants  : comment la banque mobile va-t-elle affecter la dynamique de La Kenya Women Finance Trust (KWFT), une IMF groupe et les taux de remboursement  ? Comment de dépôt, a lié ses comptes aux porte-monnaies le rapprochement des comptes se fera-t-il dans le électroniques de M-PESA afin de recevoir plus système d’information de gestion  ? Comment les facilement les dépôts22. KWFT estime qu’au cours clients et le personnel s’adapteront-ils aux nouvelles des sept premiers mois de fonctionnement de options de paiement ? Comme le montre l’encadré 2, ce système, 30  % de sa base totale de dépôts il est toujours difficile pour des IMF de concevoir leur provenaient de clients qui transféraient les fonds propre système de banque mobile. dans leur compte KWFT au moyen de M-PESA. SMEP DTM utilise également avec succès M-PESA 2. Quelles sont les expériences pour collecter les dépôts. En janvier 2013, entre des IMF ayant servi d’agents 17  400 dollars et 23  200  dollars ont été transférés pour des systèmes de chaque jour de M-PESA à SMEP DTM. Ces montants banque mobile ? comprennent certes les remboursements de prêts, mais ils représentent 30 à 40 % du total des dépôts À ce jour, l’expérience des IMF agissant comme agents des clients dans les comptes d’épargne. des systèmes de banque mobile fait apparaître des ré- Même hors du Kenya, les services de banque mobile sultats mitigés. Cela est dû à deux caractéristiques des sont utilisés pour mobiliser l’épargne. BRAC, l’une des réseaux d’agences des IMF. Premièrement, même si de nombreuses IMF disposent d’un réseau plus vaste plus grandes institutions de microcrédit au monde, a que celui de toute autre institution financière dans un lancé un projet pilote au Bangladesh en décembre pays, une IMF comptera au mieux 200 à 300 agences. 2012 au sein de 12 agences en leur offrant le service Les IMF peuvent certes contribuer de façon significa- de paiement mobile bKash pour leur permettre tive à l’édification d’un réseau d’agents, mais celui-ci d’effectuer des dépôts d’espèces dans leurs comptes doit compter des milliers d’agents pour que sa taille d’épargne BRAC23, 24. Parmi les titulaires de compte soit considérée comme significative. Deuxièmement, mensuels enregistrés dans ces agences, 28 % ont eu puisque les commissions sont généralement collectées recours au service bKash pour effectuer des dépôts par le siège de l’IMF, le caissier de l’agence n’est pas au cours des trois premiers mois de la phase pilote. incité à promouvoir les services bancaires mobiles. Le rapprochement avec le SIG de BRAC est manuel, Même si certaines IMF ont changé la façon dont elles mais il ne s’est pas avéré être assez fastidieux pour répartissent les commissions des agents dans leur ré- justifier d’investir dans un intergiciel. BRAC acquitte seau d’agences, le processus est généralement moins les frais de transfert bKash pour ses clients, car elle direct que dans le cas où un agent indépendant reçoit juge important d’augmenter le nombre d’épargnants une commission directement à la suite d’une transac- dans le système, ce qui entraînera par la suite une tion, ce qui l’incite à prendre le temps nécessaire pour baisse du coût du capital. expliquer l’utilisation du service aux clients. 21 Ce chiffre datant de 2012 était apparemment déjà en baisse à l’époque. 22 Ces informations sur KWFT ont été recueillies lors d’une réunion entre Tony Oyier (consulatnt du CGAP), Isabella Nyambura (assistante de l’administrateur-délégué) et Christine Mwea (gestionnaire générale des engagements financiers) en janvier 2013 et grâce à des contacts entretenus jusqu’en juin 2013. 23 Lancé en juillet 2011, bKash est un service de banque mobile qui fonctionne comme une filiale de la Banque BRAC. 24 Les informations sur le projet pilote de BRAC proviennent de Sazzad Hossain (BRAC) et Greg Chen (CGAP). 7 Encadré 2 : Les IMF doivent-elles créer leur propre système de banque mobile ? Bien qu’il puisse être tentant pour une IMF opérant dans revenus des commissions et frais de transaction, et de un marché dépourvu de service viable de banque mobile décongestionner quelque peu les agences, mais ils n’ont de mettre en place son propre système, l’expérience pas permis à cette IMF ou à ses clients de réaliser le montre que les capacités essentielles requises pour gérer plein potentiel de l’initiative. Par exemple, le système de façon optimale une IMF ne correspondent pas aux Banki M’manja ne permet ni de rembourser des prêts exigences techniques inhérentes au développement d’un ni de mobiliser l’épargne. Selon MIX Market, OIBM a système de banque mobile ou aux compétences indis- réussi à doubler ses comptes de dépôt entre la fin 2009 pensables pour gérer le réseau connexe d’agents. Même et septembre 2012 pour les porter à 500 000. Mais avec lorsque les fonds sont disponibles, de nombreuses IMF 60 000 clients seulement inscrits à Banki M’manja, dont n’ont pas l’envergure nécessaire pour justifier l’important 20  % seulement sont actifs, il est peu probable que ce investissement de départ que nécessite la mise en place service de banque mobile soit la force motrice à l’origine de services bancaires mobiles. Beaucoup, en outre, ne de cette augmentation de comptes de dépôt. disposent pas d’une infrastructure informatique solide capable d’étayer les opérations bancaires de base. Enfin, Près de deux ans et demi après le lancement de Banki les IMF doivent définir clairement l’objectif stratégique M’manja, Airtel Money a été relancé au Malawi avec qu’elles visent en créant un service de banque mobile et plus de 5  000 agents (dont 1  800 à 2  000 sont actifs). être persuadées que ce service est le meilleur moyen de OIBM s’est rapidement connecté à ce système et a régler leurs problèmes spécifiques. permis aux clients de Banki M’manja d’effectuer des remboursements de prêts et de mobiliser l’épargne La société Opportunity International Bank du Malawi par le biais de ses agents. Ainsi, OIBM est-elle passée (OIBM), présentée dans les travaux de Kumar, McKay d’une démarche consistant à mettre en place son propre et Rotman (2010), a lancé son propre service de banque service de banque mobile et son réseau d’agents à une mobile, appelé Banki M’manja, en mai  2010 a. Bien politique visant à tirer parti d’un réseau existant pour ses qu’elle ait obtenu l’aval des autorités de contrôle en transactions de microfinance. novembre  2011, OIBM n’a pas encore mis en place un réseau d’agentsb. Banki M’manja propose simplement a. Ces informations sur OIBM proviennent d’un entretien en des services d’information sur les comptes, l’achat de novembre 2012 avec le responsable de la transformation, crédit de téléphone, les paiements de factures et des ser- Luckwell Ng’ambi, et d’un échange en avril 2013 avec le même interlocuteur et le responsable du SIG, Lumbani Manda. vices de transfert de fonds à d’autres clients d’OIBM. Ces b. En partie en raison de la pénurie de carburant et de devises, services permettent certes à OIBM d’abaisser les coûts les conditions d’exploitation au Malawi sont difficiles depuis d’exploitation liés à ces opérations, de tirer quelques le lancement de la banque mobile par OIBM. Une des plus grandes institutions de microfinance du Cette activité implique des coûts et des avantages Mali, Kafo Jiginew, qui compte 280  000 déposants pour les IMF. Pour Kafo Jiginew, le partenariat avec et 46  000  emprunteurs25, a affecté  102 de ses le premier opérateur de réseau mobile du Mali était 169 agences au rôle d’agent d’Orange Money depuis une alliance stratégique importante qui le différenciait le lancement de ce service en 200926. Pour Orange, le de ses concurrents. Pour des raisons similaires, la plus principal avantage de ce partenariat est qu’il ajoute grande IMF du Sénégal, CMS, met ses 200 agences une centaine de nouveaux points de vente à son réseau à la disposition du service de porte-monnaie mobile à la faveur d’une seule négociation avec la direction de Yoban’tel de la Société générale de banque du Kafo Jiginew. Orange peut donc éviter les longues Sénégal. L’alliance avec une banque solide, comme et laborieuses négociations en tête-à-tête qui sont la Société générale, était une raison suffisante pour souvent nécessaires avec des agents indépendants. faire partie du partenariat. Au-delà de la visibilité, Kafo Orange tire également profit du surcroît de couverture Jiginew voit dans sa collaboration avec Orange Money rurale que lui assurent les agences de Kafo Jiginew. un moyen de diversifier son offre de produits, ce qu’elle Même si les IMF traitent un volume significatif de considère depuis quelques années comme un objectif transactions d’Orange Money, elles ne sont pas les important. Les revenus tirés des commissions perçues agents les plus actifs du réseau Orange, peut-être sur les transactions d’Orange Money représentaient en raison de l’absence d’incitations directes. La plus également un facteur important pour la direction de forte activité transactionnelle est assurée par un super l’IMF. Kafo Jiginew a perçu des commissions d’une agent indépendant qui partage les commissions avec valeur totale de 17 500 dollars en 2011, 42 300 dollars les sous-agents qu’il gère. en 2012 et 40 000 dollars pendant les cinq premiers 25 Mix Market, au 30 avril 2013. 26 Ces informations sur Kafo Jiginew et Orange Money proviennent d’entretiens avec le directeur général adjoint de Kafo Jiginew, David Dao, et la responsable de la distribution et de la division commerciale d’Orange Money, Hawa Diallo Toure, en janvier 2013 et de contacts ultérieurs entretenus jusqu’en juin 2013. 8 mois de 201327. Toutefois, ce partenariat n’a pas été afin de maintenir la discipline du remboursement. sans difficultés pour Kafo Jiginew, la plus importante Actuellement, le taux de non-remboursement des étant la gestion des liquidités qui, en fin de compte, prêts non garantis de Tameer est inférieur à 0,5 %, et affecte la capacité d’Orange à maintenir un service à la la banque hésite à changer ce modèle pour introduire clientèle de qualité sur les sites des agents. La question une nouvelle méthode de remboursement. Au de la concurrence entre IMF entre aussi en ligne de Pakistan, les institutions de microfinance ont tendance compte. Lorsqu’une IMF sert d’agent à un prestataire, à éviter de prendre des risques dans les processus les clients d’IMF concurrentes peuvent utiliser ses de remboursement des clients, de petits impayés agences pour effectuer des remboursements de pouvant sérieusement affecter les marges29. Toutefois, prêts. Pour l’IMF agent, il s’agit là d’une possibilité comme l’ont prouvé un certain nombre d’IMF au intéressante d’attirer les clients de la concurrence. Kenya, la dynamique de groupe et la discipline de remboursement ne doivent pas nécessairement être Pour une IMF, le fait de servir d’agent à un service affectées. Tameer se prépare à lancer un projet pilote de banque mobile ne veut pas nécessairement dire dans certaines agences, au troisième trimestre de qu’elle va offrir ce service à ses clients pour les 2013, pour commencer à introduire EasyPaisa dans le remboursements de prêts. Cette attitude est logique processus de remboursement des prêts. si le réseau d’agents ne s’étend pas plus loin que celui des agences de l’IMF : le service apporterait peu de En plus d’être elles-mêmes des agents, les IMF valeur ajoutée aux clients en termes de commodité, peuvent jouer d’autres rôles dans ce réseau. Au le point d’accès le plus proche pour effectuer des Bangladesh, bKash s’est appuyé sur l’organisation dépôts, que le paiement soit en numéraire ou par non gouvernementale BRAC pour les premiers recru- voie électronique, étant toujours l’agence de l’IMF. tements et identifications d’agents, ainsi que pour la D’autre part, lorsque le réseau d’agents s’étend au- gestion des liquidités. Il s’agissait d’un partenariat delà de celui des agences de l’IMF, il est surprenant formel par lequel bKash rémunérait l’ONG BRAC que cette dernière ne profite pas de sa position en vue d’obtenir 5 600 agents et gérer ses liquidités d’agent pour offrir ce service à ses clients. durant la première année d’activité. Ces premiers On peut citer à titre d’exemple Tameer Microfinance agents ont été choisis parmi les emprunteurs indivi- Bank, qui entretient l’une des relations les plus étroites duels de BRAC, une base de clients avec qui l’ONG qu’une IMF puisse avoir avec un service de banque était en contact direct et étroit. La gestion directe du mobile. Une part majoritaire de Tameer a été rachetée réseau d’agents a été transférée à bKash après cette par Telenor, l’opérateur mobile avec lequel elle a lancé période initiale, permettant à bKash d’établir dès le le service de paiement mobile EasyPaisa28. Quatre ans début un réseau d’agents beaucoup plus rapidement après le lancement d’EasyPaisa en 2009, très peu de que cela n’aurait été possible autrement. clients de Tameer microfinance utilisent ce service. Les agences de Tameer sont mises à contribution En résumé, les IMF et les services bancaires mobiles pour inscrire de nouveaux clients au service EasyPaisa doivent étudier ensemble, de manière plus straté- ainsi que pour des opérations de dépôt et de retrait gique, la manière dont les IMF peuvent mieux jouer d’espèces, mais ce service n’est pas utilisé pour les le rôle d’agent de banques mobiles. Afin d’éviter les remboursements et les décaissements de prêts par problèmes liés à la gestion des liquidités, il est peut- les clients de Tameer. Tameer a connu des taux de être préférable d’utiliser certaines agences d’IMF défaut de paiement extrêmement élevés — jusqu’à pour le recrutement de nouveaux clients plutôt que 25 % — lorsqu’elle a commencé à exercer des activités pour l’exécution d’opérations de retrait et de dépôt. de microfinance en 2005 parce qu’elle avait adopté À l’inverse, certaines IMF peuvent proposer unique- une approche de laisser-faire en ce qui concerne ment des opérations de dépôt, alors que d’autres ont l’identification et le suivi des clients. Elle a rapidement la capacité de gérer des sites d’agents au sein de leur compris que le marché avait besoin de critères clairs en base de clients. Globalement, il semble que le rôle matière de sélection des clients. Une fois le processus des IMF en tant qu’agents de services de banque enclenché, l’emprunteur doit faire l’objet d’une gestion mobile soit moins important si l’on tient compte des continue assurée par des chargés de relations dédiés expériences de ces dernières années. 27 Taux de change au 18 juin 2013 : 1 dollar = 487,750 FCFA Source : www.bceao.int 28 Ces informations sur Tameer Microfinance Bank proviennent d’entretiens avec le directeur général adjoint en décembre 2012 et de contacts ultérieurs entretenus jusqu’en juin 2013. 29 Les institutions de microfinance sont régies par la Banque nationale du Pakistan en vertu d’un strict régime de crédit. Le défaut de paiement est constaté 30 jours après l’échéance, conduisant à la suspension de tous les revenus sur les prêts. Après 60 jours de retard, une provision pour perte est constituée à hauteur de 25 % du capital non remboursé. Après 180 jours de retard, une perte correspondant au montant total du capital non remboursé est provisionnée et le compte est sorti du bilan. 9 3. Les IMF et leurs clients tirent-ils changer son fournisseur de technologie et d’effacer de son bilan l’investissement antérieur. des avantages de l’utilisation de la banque mobile ? Coût des ressources. L’exemple du Kenya tend à prouver que le fait de s’appuyer sur un système de Kumar, McKay et Rotman (2010) ont étudié trois banque mobile existant et largement utilisé peut être avantages potentiels des services de banque mobile un moyen efficace de mobiliser des dépôts. Comme pour une IMF, dont chacun sera réexaminé dans mentionné précédemment, KWFT a mobilisé 30 % de cette partie  : i) atteindre de nouveaux clients  ; son épargne totale à partir de dépôts effectués par ii)  améliorer les caractéristiques économiques de le biais de M-PESA de juin à décembre 2012. Dans le l’IMF ; et iii) mieux servir les clients existants. même ordre d’idées, 30 à 40 % des dépôts d’épargne enregistrés quotidiennement par SMEP DTM sont effectués via M-PESA. La mesure dans laquelle cette Atteindre de nouveaux clients situation contribue efficacement à la réduction du coût des ressources varie selon que le client ou La banque mobile pourrait aider les IMF à développer l’IMF prend en charge les frais de transaction de leur clientèle de trois grandes façons : les IMF peuvent 0,35 dollar facturés par M-PESA et aussi en fonction atteindre de nouvelles zones géographiques ; les pre- du pourcentage du dépôt moyen que ces frais de mières IMF à adopter ces services peuvent améliorer transaction représentent. Elle dépend également de la valeur proposée à la clientèle et attirer de nouveaux la durée des dépôts inscrits dans les comptes des clients à partir du marché cible actuel 30  ; et/ou les IMF et de la différence de taux d’intérêt entre ce que IMF peuvent atteindre de nouveaux segments à faible l’IMF paie pour le financement de gros et ce qu’elle revenu en offrant des services plus abordables. paie pour les dépôts. SMEP DTM est convaincue que les dépôts reçus des clients par l’intermédiaire On ne dispose pas d’indices prouvant clairement de M-PESA constituent une source de financement que les IMF ont pu tirer parti des services de moins coûteuse que d’autres31. banque mobile pour atteindre un nombre important de nouveaux clients dans de nouvelles zones Coûts opérationnels. Les services de banque mobile géographiques ou des segments à faible revenu. peuvent avoir un impact significatif sur le coût des Atteindre les segments à faible revenu dépendra ressources humaines de l’IMF, en particulier à moyen en partie de la réduction significative des coûts de et à long terme. L’automatisation peut réduire le fonctionnement de l’institution — une problématique besoin de personnel chargé d’enregistrer les données compliquée comme le prouve la partie suivante. S’il au siège social et permettre aux agents de crédit de y a eu une augmentation du nombre de ses clients, disposer de davantage de temps pour développer Faulu estime qu’elle provient de clients satisfaits leurs portefeuilles, comme c’était le cas avec SMEP qui vantent les services de l’institution à leurs pairs DTM. Les agents de crédit de SMEP DTM ont qui ne sont pas encore clients d’une institution de également bénéficié de la réduction de la fréquence microfinance ou qui sont clients d’une autre IMF. des réunions de groupe. Cependant, les IMF qui choisissent de ne pas modifier la durée et la fréquence de ces réunions ne parviendront pas à optimiser la Améliorer les caractéristiques réduction de leurs coûts. La banque mobile peut aussi économiques de l’IMF générer des coûts. Les coûts d’exploitation de KWFT ont augmenté en raison des frais liés à l’accès à un Le recours aux services de banque mobile implique canal USSD et à la nécessité d’ouvrir un centre d’appels des coûts et des avantages pour les IMF. 24 heures sur 24 pour répondre aux questions des clients sur le nouveau service de banque mobile. Pour Investissement dans la technologie. Toute IMF qui les IMF, comme Faulu, qui ont choisi de subventionner cherche à offrir une solution sur mesure de banque les frais de transaction facturés par le prestataire de mobile à ses clients, qu’il s’agisse d’une solution banque mobile existant, cette politique pourrait aussi existante ou non, devra investir dans la technologie entraîner une augmentation significative des coûts de appropriée. Compte tenu de la complexité du choix fonctionnement. d’un fournisseur de technologie et de la mise en œuvre d’une solution, des coûts imprévus sont La mesure dans laquelle une IMF réduit ses coûts susceptibles d’apparaître. OIBM est en train de d’exploitation dépend aussi du transfert ou non 30 Les nouveaux clients peuvent être soit de nouveaux clients dans le secteur de la microfinance, soit des clients de la concurrence. 31 Dans le cas de SMEP DTM, le client supporte les frais liés à l’utilisation de M-PESA, alors que KWFT les prend en charge pour le compte de ses clients. 10 par l’IMF du coût des remboursements de prêts à Deuxièmement, ceux qui ont continué à utiliser l’emprunteur. Pour des raisons liées à la sécurité, bKash, exclusivement ou en alternance avec les à la fraude, aux erreurs administratives et aux agences d’IMF, connaissaient mieux les offres de coûts, de nombreuses IMF exigent désormais des services de bKash. Ils savaient que bKash pourrait être emprunteurs qu’ils remboursent leurs prêts de façon utilisé pour autre chose que des remboursements de indépendante, ce qui libère les agents de crédit de ce prêts, notamment pour les transferts, les paiements fardeau. Dans ces cas, la réduction du temps et des de factures et les recharges de crédit téléphonique, coûts profiteraient au client plutôt qu’à l’IMF. même si seule une minorité a tiré avantage de ces Recettes d’exploitation. Les services de banque services supplémentaires. mobile peuvent également générer des frais de Troisièmement, un certain confort d’utilisation de transaction et des commissions pour les IMF qui ces services était important. Certains clients qui ont investissent dans les solutions de banque mobile qui cessé d’utiliser bKash ont déclaré que cela était dû permettent aux clients d’accéder à leurs comptes IMF au fait qu’ils ne savaient pas comment effectuer des par le biais du téléphone portable. Faulu facture les mini relevés bancaires, la consultation de solde, les transactions avec leurs téléphones portables  ; la transferts d’un compte Faulu vers un porte-monnaie plupart d’entre eux comptaient sur les agents pour M-PESA et les transferts vers d’autres comptes Faulu. les aider à les effectuer. Cependant, aucune preuve n’indique que ces flux de Ce projet pilote, bien qu’il ne fournisse des données revenus sont importants à ce stade, KWFT notant simplement que « l’effet net est positif ». que pour une seule IMF dans un pays, constitue un point de référence utile sur la manière dont la banque mobile peut mieux servir les clients existants. Mieux servir les clients existants Il montre aussi que le secteur de la microfinance doit approfondir le dialogue avec la clientèle sur ce sujet, Dans les pays où les services bancaires mobiles dans divers contextes, afin de mieux appréhender la sont bien établis, les clients peuvent pousser les capacité de la banque mobile à améliorer les services IMF à les adopter. Au Kenya, un certain nombre offerts aux clients. d’IMF indiquent que la demande des clients est un facteur déterminant de leur investissement dans la Ces trois parties portant sur les avantages de la banque banque mobile. Selon SMEP DTM, ces services sont mobile peuvent se résumer de la façon suivante : rien désormais considérés comme des fonctionnalités de ne prouve réellement que les IMF touchent les clients base qui sont attendues des clients. La non-fourniture dans de nouvelles zones géographiques ou des de ce service aurait conduit à une perte de clientèle et de réputation. À mesure que cette technologie se couches à faible revenu grâce à la banque mobile. répand dans les autres pays, la pression des clients En revanche, des preuves qualitatives indiquent que deviendra plus forte. les IMF ont recours à la banque mobile afin d’obtenir un avantage concurrentiel, mais cet avantage Bien que rien n’atteste que les IMF favorisent le diminuera probablement à mesure que d’autres IMF développement de la banque mobile dans un pays, commenceront à intégrer les services de banque un projet pilote récent de BRAC consistant à recourir mobile dans leurs opérations. Le calcul des facteurs à bKash pour les remboursements des prêts montre économiques des IMF est très complexe et dépend que même les clients se trouvant dans un pays sans des décisions prises par chaque IMF. Bien qu’il existe système de banque mobile omniprésent peuvent des preuves d’économies de coûts spécifiques, tels apprécier les avantages de ces services pour les que des économies de temps pour les agents de opérations de microfinance (voir encadré 3 pour plus crédit des IMF, une étude plus approfondie et globale de détails sur le projet pilote). Les études de suivi sur la rentabilisation de ces services est nécessaire. menées auprès des clients du projet pilote permettent En fait, la plupart des IMF seraient bien avisées de de mieux comprendre ce qui influence l’adoption par déterminer avec plus de précision les coûts et les la clientèle des services de banque mobile pour les revenus liés à la prestation des services de banque opérations de microfinance. Premièrement, un des principaux facteurs déterminant le choix de la formule mobile. Comme l’illustre le projet pilote BRAC-bKash, de remboursement des clients est tout simplement il existe de plus en plus de preuves démontrant que le degré de proximité respectif de l’agent et de la les clients des IMF apprécient le gain de temps et succursale. La perspective de gagner 15 minutes de les économies de coûts réalisés grâce aux services temps de déplacement à l’aller comme au retour s’est de banque mobile pour les remboursements de révélée suffisamment convaincante pour pousser les prêts et que leurs besoins sont mieux servis lorsqu’ils clients à continuer à utiliser un agent bKash plutôt disposent de la possibilité de rembourser leurs qu’une agence BRAC. emprunts par le biais du téléphone portable. 11 Encadré 3 : Projet pilote BRAC avec bKash En novembre  2011, l’ONG BRAC a lancé un projet 38 % parce qu’ils avaient des problèmes avec les agents. pilote pour tester les remboursements de prêts par de En moyenne, ces clients avaient recours à des agents situés petites entreprises au moyen de bKash. Il a été mis en seulement 0,7 km plus près d’eux qu’une agence, ce qui place dans cinq agences urbaines et concernait environ se traduisait par un gain de sept minutes dans chaque 3  000  emprunteurs individuels. Tous les emprunteurs sens. Les clients ont indiqué qu’ils n’ont dépensé qu’entre étaient tenus d’effectuer des remboursements sur un 0,12 et 0,25 dollarc en frais de transport pour se rendre à compte mobile bKash, mais n’acquittaient pas de fraisa. l’agence et qu’ils sont souvent amenés à se rendre dans Après huit mois d’utilisation obligatoire de bKash, les cette zone pour d’autres raisons, éliminant ainsi le léger clients avaient la possibilité de rembourser par le biais de avantage que la distance confère aux agents. Contraire- bKash ou de revenir à l’option traditionnelle consistant à ment à ceux qui ont choisi de continuer à utiliser bKash, rembourser au guichet d’une agence. Dans les trois mois 62 % des clients ne savaient pas que bKash pouvait servir qui ont suivi, 42 % des clients alternaient entre l’utilisation à autre chose qu’à rembourser des prêts contractés auprès de bKash et le passage à l’agence, 21 % ont exclusivement de BRAC. Presque tous les clients (85 %) ont déclaré que eu recours à bKash, et 37 % ont exclusivement privilégié le principal changement qui pourrait les pousser à utiliser l’option de l’agence. de nouveau bKash serait de recevoir un reçu papier, plutôt qu’un simple SMS de confirmation. Pourquoi les clients ont-ils opéré ces choixb ? Les clients qui alternaient entre le remboursement par Les clients qui ont continué à rembourser par le biais le biais de bKash et le passage à l’agence. Les raisons de bKash. Quatre-vingt-deux pour cent des clients de ce de l’alternance variaient. Dix-sept pour cent ont eu un groupe ont déclaré qu’ils continuaient à utiliser bKash, problème avec l’agent, 33 % ont utilisé l’agence lorsqu’ils soit parce que l’agent était plus proche que l’agence se trouvaient à proximité, et 28 % ont simplement apprécié BRAC, soit parce que cette formule les tenait moins la souplesse que procure le recours aux deux options. Mais longtemps éloignés de leur domicile ou de leur lieu de les clients ont principalement continué à utiliser bKash soit travail. En moyenne, un agent se trouvait 1,7 km plus près parce que l’agent était plus proche que l’agence BRAC, du client qu’une agence, ce qui se traduisait par un gain soit parce que cette formule les tenait moins longtemps de 15  minutes dans chaque sens. L’utilisation de bKash éloignés de leur domicile ou de leur lieu de travail. à d’autres fins n’a pas semblé être un facteur majeur. a. Au moment du lancement du projet pilote, bKash n’était Soixante-cinq pour cent n’ont pas utilisé bKash pour opérationnel que depuis quatre mois. Tous ses agents étaient d’autres services que le remboursement du prêt contracté encore nouveaux dans le domaine de la banque mobile et presque aucun des clients n’avait auparavant effectué de auprès de BRAC, même si 82 % connaissaient l’existence transactions par téléphone portable. Ce projet pilote a des autres usages. Les clients étaient heureux d’utiliser remplacé le processus de remboursement traditionnel qui bKash pour les remboursements de prêts, mais ont indiqué obligeait les clients à se rendre dans les agences BRAC une qu’ils reconsidéreraient le recours à ce service si des frais fois par mois. étaient introduits. b. Pour répondre à cette question, une équipe de recherche de BRAC, avec le soutien analytique du CGAP, a réalisé des Les clients qui ont cessé de rembourser par le biais de entretiens qualitatifs et quantitatifs avec 65 clients pour des bKash. Trente-huit pour cent des clients de ce groupe prêts dont la valeur variait entre 1 875 dollars et 8 750 dollars. sont revenus à l’option consistant à payer à l’agence parce c. Taux de change au 19 juin 2013 : 1 dollar = 77,76 BDT. qu’ils ne maîtrisaient pas la technologie bKash et les autres Source : www.bangladesh-bank.org 4. Pourquoi certaines IMF pour retarder l’intégration des services bancaires mobiles dans les établissements de microfinance. ont-elles pris la décision stratégique de ne pas se lancer La banque mobile n’est pas une solution pour les IMF dans la banque mobile ? confrontées à des problèmes de qualité de portefeuille. Ces institutions gagneraient à se concentrer sur leur viabilité et à régler d’abord leurs problèmes de Même si un système de banque mobile efficace est portefeuille avant de s’intéresser à la banque mobile. susceptible d’influer positivement sur l’activité des En 2011, l’IMF marocaine Al Amana nourrissait un institutions de microfinance, cela ne signifie pas projet ambitieux de banque mobile32. Le directeur nécessairement que chaque IMF doit se lancer dans général actuel, qui venait d’être nommé à l’époque, ce domaine. Même dans un pays disposant d’un décida d’arrêter le projet pendant qu’il était encore à service viable de banque mobile, on peut invoquer la phase de conception. La qualité du portefeuille de des raisons institutionnelles ou propres au marché l’IMF se détériorait pour un certain nombre de raisons33 32 Ces informations sur Al Amana proviennent d’un entretien avec le directeur exécutif, Youssef Bencheqroun, en novembre 2012 et de contacts ultérieurs entretenus jusqu’en juin 2013. 33 Entre autres, le printemps arabe. Cf. Chehade et Negre (2013). 12 et Al Amana décida de se passer des gains d’efficacité que les clients soient davantage incités à utiliser le potentiels de la banque mobile jusqu’à la résolution porte-monnaie plutôt qu’à se rendre chez l’agent. des problèmes de qualité du portefeuille. Kashf Foundation, une ONG–IMF desservant La décision d’Al Amana est similaire à celle (mentionnée 300  000  clients au Pakistan, a commencé à recourir précédemment) de Tameer au Pakistan, qui a choisi aux agents Omni de la United Bank Limited (UBL) en de sécuriser la qualité de son portefeuille de prêts janvier 2011 comme option offerte à ses clients parti- avant de se lancer dans la banque mobile. Toutefois, culiers (soit environ 65 % de sa clientèle) d’effectuer d’autres IMF pakistanaises, en particulier celles qui des remboursements de prêts36. Actuellement, 40 % ont le statut d’ONG, ont commencé à utiliser les des remboursements de prêts émanant de clients services de banque mobile pour les remboursements individuels se font par le biais de 1 800 agents Omni, de prêts34. Le Pakistan est certes l’un des chefs de qui traitent en moyenne 75  000 transactions d’une file de l’activité de banque mobile, mais la majorité valeur de 1,85  million de dollars chaque mois37. Les des transactions se font encore au guichet. Autrement clients apprécient le gain de temps et les économies dit, les transactions sont effectuées auprès d’un agent qu’ils réalisent en se rendant chez un agent Omni plutôt qu’à partir du porte-monnaie mobile du client. Fidèles aux usages dans l’environnement plus large plutôt que dans l’une des 160 agences de Kashf  — de la banque mobile, même les ONG de microfinance des économies de l’ordre de 0,41 dollar à 1,02 dollar qui ont ouvert la voie dans l’utilisation des porte- sur les coûts de transport. Kashf a jusqu’ici supporté monnaies mobiles pour les remboursements de prêts les frais de transaction facturés par UBL. Les clients ont plutôt tendance à recourir à des agents pour les choisissent le mode de paiement à adopter pour le remboursements de prêts au guichet. remboursement, généralement en fonction du degré de proximité respectif de l’agent et de l’agence. Kashf Asasah, une ONG de microfinance comptant a constaté que 30  % des remboursements se font 12 000 clients et 19 agences au Pakistan, a mis à l’es- après les heures de travail et le week-end. Le système sai le porte-monnaie mobile EasyPaisa pour les rem- de remboursement auprès des agents fonctionne tel- boursements de prêts, mais a opté depuis pour les lement bien que Kashf ne se presse pas de passer transactions au guichet auprès d’agents d’EasyPaisa35. aux remboursements par porte-monnaies mobiles. Les clients étaient confrontés à de nombreux pro- Kashf tire avantage d’agences moins encombrées, de blèmes lorsqu’ils utilisaient le porte-monnaie mobile. niveaux de liquidités plus faibles dans ces agences et Les chefs de groupe devaient effectuer auprès d’un de coûts d’assurance réduits. Autre fait plus important agent EasyPaisa un dépôt dont la valeur correspondait encore du point de vue de Kashf, les clients ont désor- au montant à rembourser, puis transférer le montant mais le choix dans la façon de rembourser leurs prêts. approprié du porte-monnaie mobile vers le compte d’Asasah. Mais ils ont eu du mal à gérer le numéro L’expérience pakistanaise souligne un point impor- de téléphone portable, le numéro de compte et le tant concernant le lien entre les services bancaires numéro d’identification personnel nécessaire pour mobiles et la microfinance. Les clients des IMF ont effectuer la transaction. En réalisant les transactions tendance à suivre la tendance du marché local de au guichet, toutes ces étapes sont effectuées par le banque mobile : dans le cas du Pakistan, les clients personnel d’EasyPaisa au nom du client d’Asasah. des IMF préfèrent les transactions physiques aux tran- Étant donné que le réseau d’agents EasyPaisa, sactions électroniques à l’image de la majorité des composé de 20 000 points de vente, est largement clients de banque mobile du pays. supérieur au réseau d’agences d’Asasah, le passage aux transactions physiques continue d’assurer aux En résumé, la décision de ne pas se lancer dans la clients de l’IMF la commodité et les faibles coûts de banque mobile tient principalement au fait que le déplacement qu’ils appréciaient lorsqu’ils recouraient moment n’est pas jugé opportun, soit en raison de au porte-monnaie mobile. Comme Al Amana, Asasah préoccupations plus importantes de viabilité, de reste convaincue que le porte-monnaie mobile l’existence d’autres solutions, « plus faciles », telles présente des fonctionnalités utiles et constitue une que les paiements au guichet, ou de l’absence d’un solution pour l’avenir. Toutefois, il faudra attendre système de banque mobile sur lequel s’appuyer. 34 Au Pakistan, la réglementation applicable aux ONG de microfinance est plus souple que celle qui s’applique aux institutions de microfinance, s’agissant notamment des conséquences de la détérioration des portefeuilles de prêts. 35 Ces informations sur Asasah proviennent d’un entretien avec la directrice générale, Tabinda Jaffery, et son personnel en juillet 2012 et de contacts ultérieurs entretenus jusqu’en juin 2013. 36 Ces informations sur Kashf Foundation proviennent d’un entretien avec le directeur général, Roshaneh Zafar, le responsable informatique, Faisal Saeed Malik et le directeur financier, Shahzad Iqbal, en juillet 2012 et de contacts entretenus jusqu’en juin 2013. 37 Taux de change moyen en mars 2013 : 1 dollar = 98,06 roupies Source : www.sbp.org.pk 13 5. Comment la banque mobile tudes d’épargne. Elle offre aux nouveaux clients un compte qui allie l’épargne, l’assurance, les paiements favorise-t-elle l’émergence mobiles et, par la suite, le crédit. Le premier jour, de modèles opérationnels le client reçoit le compte d’épargne et les produits de microfinance innovants ? d’assurance-vie. Si le client épargne 50 dollars, il peut emprunter l’équivalent38. Après avoir constitué un bon Le présent article a examiné jusque-là la manière historique de remboursement au bout de plusieurs dont la banque mobile a permis aux IMF d’innover mois, les clients peuvent commencer à emprunter le dans quelques aspects du processus opérationnel double des sommes épargnées et ainsi de suite. L’ou- de la microfinance, notamment les remboursements verture de compte se fait sur les sites des agents où et les décaissements de prêts et la mobilisation les clients sont en mesure de repartir avec un compte de l’épargne. Plusieurs nouvelles institutions ont entièrement activé et une carte bancaire après un pro- commencé à tirer parti des services de banque mobile cessus d’enregistrement de 10 à 15 minutes. BanKO à de nombreuses étapes du processus schématisé à a consacré beaucoup de temps au début de ses acti- la figure 2. vités de détail à mettre en place un réseau d’agents. Au début, le plan était de s’appuyer principalement Afin de procéder à des comparaisons utiles avec les sur les agents GCASH, BanKO étant un partenariat modèles traditionnels de microfinance, cette partie tripartite entre BPI (40 %), Globe Telecom (40 %) et met l’accent sur les institutions qui offrent au moins Ayala Corporation (20 %). Mais l’IMF s’est vite rendu des prêts et éventuellement d’autres types de services financiers aux personnes pauvres en s’appuyant sur la compte que les agents GCASH ne seraient pas en banque mobile. En se basant sur ces critères, plusieurs mesure de gérer tous les besoins de liquidité des institutions intéressantes sortent du lot. clients de BanKO. Elle a donc commencé à recruter ses propres agents en qualité de partenaires. GCASH Aux Philippines, BanKO est un exemple de la manière joue néanmoins un rôle important dans l’activité de dont ces institutions utilisent la banque mobile pour BanKO puisque son porte-monnaie sert de passe- la mise en place des prêts, les demandes de prêt et relle pour le compte BanKO lors des transactions la vérification préalable des références des clients. effectuées auprès d’un agent. Les clients de GCASH Quand BanKO a commencé ses activités de détail, bénéficient également du réseau d’agents de BanKO, elle a utilisé des agents de crédit à la manière des IMF qu’ils peuvent utiliser pour leurs transactions. traditionnelles, mais cette démarche s’est avérée trop coûteuse et trop exigeante en main-d’œuvre. BanKO Toujours aux Philippines, la mBank, récemment a donc commencé à innover dans la façon dont elle créée, met en œuvre une approche similaire à celle traitait les demandes de prêts et effectuait les dé- de BanKO, mais en coopération avec l’autre principal marches de vérification préalable. Elle savait que son opérateur de téléphonie mobile des Philippines, modèle économique ne permettrait pas de visites Smart Communications39. Les clients de mBank à domicile dans le cadre des vérifications d’usage. se voient d’abord offrir un compte adossé sur un BanKO repose plutôt d’abord sur l’épargne et par porte-monnaie mobile pour les transactions, suivi la suite sur le remboursement du prêt et les habi- d’un compte d’épargne. Sur la base de l’historique Figure 2. Nouveau processus de fonctionnement des établissements de microfinance Les IMF Ɵrent parƟ des systèmes de banque mobile existants VérificaƟon Montage Demande préalable et MobilisaƟon Décaissements Remboursements Suivi du Renouvellement de prêt décision de prêt de l’épargne de prêts de prêts portefeuille ou clôture du prêt Nouveaux modèles opéraƟonnels des insƟtuƟons de microfinance : BanKO, mBank et M-Shwari 38 Taux de change au 18 avril 2013 : 1 dollar = 41,2 PHP Source : www.bsp.gov.ph 39 Ces informations sur mBank proviennent d’une rencontre avec le directeur général, Arnaud de Lavalette, en décembre 2012 et de contacts ultérieurs entretenus jusqu’en juin 2013. 14 des transactions effectuées par le client dans le choses difficiles à fournir par le biais des modèles de porte-monnaie mobile et d’une évaluation du crédit microfinance traditionnels. Les innovations deviennent du client basée sur l’utilisation du réseau SMART, potentiellement passionnantes lorsqu’elles allient des la banque offre un produit de prêt qui fonctionne éléments des deux mondes, mais elles entraînent comme un compte à découvert. Lorsqu’un nouveau également de nouveaux défis. L’accès aux services client sollicite l’ouverture d’un compte par SMS, un de BanKO et de mBank n’étant possible qu’avec des employé de la mBank le rencontre pour l’aider à cartes SIM de Globe et de SMART, respectivement, remplir le formulaire de demande. Parallèlement, le la croissance des activités des deux institutions risque personnel du siège de la mBank saisit les données d’être limitée à la part de marché de chaque opérateur du client dans le SIG de la banque après avoir reçu de téléphonie mobile partenaire40. la photographie du formulaire à partir du téléphone portable du personnel de terrain. Comme mentionné précédemment, Musoni est un autre exemple d’un nouveau type d’IMF qui s’est Quelle est la différence entre ces deux modèles lancée dans une activité de crédit différente en créant opérationnels et le modèle traditionnel  ? Tout dès le début des services de banque mobile pour d’abord, ils ont recours à la banque mobile à diverses les décaissements et les remboursements de prêts. étapes du processus de microfinance. Les deux Contrairement à BanKO et mBank, les demandes s’appuient sur la banque mobile pour l’enregistrement de prêt de groupe, les vérifications d’usage et les à distance des clients. Ils utilisent l’historique des décisions d’accord de prêt se font encore en personne. transactions comme un outil clé pour effectuer Une fois approuvés, toutefois, les décaissements se les vérifications d’usage et accorder des prêts, et, font dans les 72 heures par le biais de M-PESA. Les dans le cas de mBank, ont commencé à utiliser les remboursements s’effectuent également grâce à la données d’utilisation du téléphone mobile à des fins fonctionnalité «  règlement de facture  » de M-PESA. d’évaluation du crédit. Leur modèle d’affaires est Musoni est unique en ce sens qu’elle a commencé à basé non seulement sur les soldes des prêts, mais fonctionner en utilisant uniquement M-PESA comme aussi sur les volumes de transaction et sur l’épargne. mécanisme de décaissement et de remboursement. En fin de compte, la différence principale devrait être La plupart des IMF examinées dans le cadre de la liée à la rentabilité des opérations. BanKO compte présente étude ont traversé des périodes de transition un peu plus de 200 employés pour 300 000 clients. longues, coûteuses et souvent perturbantes afin d’offrir Leurs prêts aux particuliers sont accordés à un taux l’option des paiements mobiles à leurs clients. Musoni d’intérêt de 2,5  % par mois sur un solde dégressif. a évité toutes ces péripéties en adoptant M-PESA dès Ce taux est légèrement inférieur à celui du marché le début et en obligeant les clients à recourir à cette pour les microcrédits, en particulier parmi les IMF méthode. Son expérience montre que les nouvelles non bancaires, mais il est encore trop tôt pour évaluer IMF établies dans les marchés où l’infrastructure de l’ampleur des économies de coûts réalisées grâce au banque mobile existe doivent sérieusement envisager modèle d’affaires basé sur la technologie mobile. dès le lancement d’adopter la banque mobile afin d’éviter les coûts et les obstacles liés à la gestion du Deuxièmement, BanKO et mBank s’inspirent d’élé- changement et de veiller à ce que l’investissement ments tirés à la fois du monde de la microfinance et du dans ces services innovants remplace d’autres coûts, secteur de la banque mobile. Contrairement au porte- tels que les frais de gestion de trésorerie, plutôt que feuille GCASH, le compte BanKO n’est délibérément d’engendrer des coûts parallèles. pas prépayé. Il était clair pour BanKO que les clients pauvres veulent générer des intérêts sur leur épargne, En résumé, de nouveaux modèles d’entreprises emprunter, établir un historique de crédit et avoir ac- apparaissent, fondés sur l’utilisation plus intensive cès aux produits d’assurance. Ces produits sont plus des services de banque mobile dans le processus difficiles à offrir par le biais d’un service de porte-mon- opérationnel de la microfinance. L’avenir dira si ces naie mobile entièrement prépayé, en partie en raison modèles sont viables et comment les clients ont réagi de la réglementation. En outre, les clients pauvres sou- face à ces nouveaux prestataires de services et à leurs haitent parfois accéder facilement à leurs économies, produits. Il est cependant clair que ces innovations ne accéder plus rapidement au crédit en fonction de leurs seraient pas possibles sans l’infrastructure de banque capacités d’emprunt et entretenir une relation allé- mobile qui s’est développée dans de nombreux gée avec leur fournisseur de services financiers, toutes marchés au cours des dernières années. 40 Au 1er trimestre 2013, SMART disposait de 67 % de part de marché et Globe 33 % (source : www.gsmaintelligence.com). 15 Encadré 4 : Le cas de M-Shwari M-Shwari est un service mobile de prêts et de comptes peut s’avérer être la partie la plus difficile d’une initiative d’épargne avec intérêts, lancé au Kenya en novembre 2012 visant à assurer la réussite d’une nouvelle affaire ou d’une par Safaricom et la Commercial Bank of Africa (CBA). Ce nouvelle gamme de produits. Une caractéristique unique produit s’appuie sur les 17 millions de clients de M-PESA. de M-Shwari tient à l’établissement d’un partenariat Il est innovant à plus d’un titre, notamment parce qu’il commercial solide entre Safaricom et CBA à un stade réunit deux acteurs improbables qui, traditionnellement, précoce. Safaricom gère tous les aspects liés au marketing n’offrent pas de microcrédit sur le marché de masse. et à la distribution, et fournit à CBA des informations sur l’utilisation du service de téléphone, du service de Toutes les opérations sur les comptes M-Shwari sont transmission de données et de la plateforme M-PESA par effectuées par le biais de téléphones mobiles, tandis que les clients. CBA effectue les opérations de rapprochement l’inscription se fait instantanément dans le menu M-PESA indépendamment du fait que le client soit titulaire ou non des flux de liquidités et de valeurs électroniques, garde d’un compte CBA. Les données des clients de Safaricom les fonds, évalue la situation de crédit des clients, assume sont utilisées pour réaliser une évaluation de crédit pour le risque d’insolvabilité et fournit la licence bancaire. les clients, qui, une fois inscrits, peuvent accéder à leur Ce partenariat fonctionne en grande partie parce que plafond de crédit à l’aide de leur téléphone mobile. Le Safaricom a trouvé une banque qui n’est pas un concurrent compte épargne génère des intérêts de 2 à 5  % sans sur le marché du bas de gamme. limitation du montant épargné. Les clients ont accès à Fait intéressant, plusieurs expériences antérieures de de petits prêts instantanés de 1 à 240 dollars à 7,5  % produits similaires à M-Shwari sur le réseau mobile ke- remboursables en un mois. nyan n’ont pas réussi à s’imposer pour diverses raisons. Le produit a clairement répondu à une demande M-Kesho, le partenariat entre Safaricom et Equity Bank, insatisfaite : un million de clients y avaient souscrit un mois a été confronté à de nombreuses difficultés : le manque après le lancement, totalisant plus de 11,5  millions de d’efforts de promotion des deux partenaires  ; un pro- dollars d’épargne et près de 1,2 million de dollars de prêts. cessus d’inscription mal organisé selon lequel seul un Cette adoption rapide met en évidence le potentiel de nombre limité d’agents M-PESA pouvaient enregistrer ces nouveaux modèles d’entreprises à se développer plus de nouveaux clients  ; l’activation du compte prenait rapidement que les IMF classiques. Les clients apprécient 48 heures. Le manque de promotion peut s’expliquer en le caractère pratique du prêt et le fait qu’il constitue une partie par la tension concurrentielle entre Safaricom et solution de remplacement aux sources habituelles de Equity Bank, ces deux acteurs se faisant concurrence pour crédit auprès des membres de la communauté. Parmi les fournir des services financiers sur le marché de masse. premières personnes à l’adopter figurent les clients des IMF classiques tels que les commerçants qui utilisent les Source  : Étude de l’équipe AppLab Money de la Fondation prêts à vue pour développer leurs activités. Grameen  ; MicroSave Briefing Note #139  : M-Shwari: Market Reactions and Potential Improvements, février 2013. Comme l’a démontré la banque mobile classique au cours http://www.ignaciomas.com/announcements/safaricomsm des dernières années, la création de partenariats fructueux -shwarimobileyesbuthowcool 6. Conclusion la banque mobile. En revanche, rien n’indique qu’une IMF a fortement contribué à l’adoption «  Les IMF ne se posent pas la question, mais de ce système. À ce jour, les IMF qui ont réussi à considèrent la banque mobile comme la réponse. utiliser la banque mobile pour leurs opérations se Elles ont besoin de savoir ce qu’elle essaie de trouvent dans des marchés disposant de systèmes résoudre. Il ne s’agit pas simplement d’une question de banque mobile matures, où les clients savent d’informatique ou de marketing. La banque mobile déjà que le téléphone mobile peut être utilisé pour modifie l’ensemble des opérations ». Cette citation effectuer des paiements, et où un service viable de de l’ancien directeur général d’une IMF en Afrique banque mobile avec un réseau d’agents efficace est résume bien la situation actuelle. Les IMF doivent disponible et peut être mis à contribution par les développer leur «  théorie du changement  » sur la IMF. L’expérience montre que cette infrastructure manière dont la banque mobile peut être utilisée de banque mobile doit être mise en place et qu’un pour améliorer les opérations de microfinance et sur vaste changement de comportement doit avoir lieu les coûts et avantages probables pour l’institution et avant que les IMF et leurs clients puissent profiter ses clients. des avantages des services bancaires mobiles. Comme le disait le directeur de BRAC Microfinance, Notre étude confirme que les IMF et leurs clients Shameran Abed, « le projet pilote [ bKash ] a été un peuvent tirer des avantages de l’utilisation de succès opérationnel et nous discernons les avantages 16 pratiques que ce service peut offrir à nos clients, mais Chehade Nadine et Alice Negre. 2013. “Lessons nous ne le déploierons plus largement que lorsque Learned from the Moroccan Crisis.” Fiche Washington le réseau d’agents sera plus mature et la population CGAP, juillet. plus sensibilisée à l’existence des services financiers mobiles ». Cracknell, David. 2012. “Policy Innovations to Improve Access to Financial Services in Developing Countries: La plus grande avancée dans l’union entre la Learning from Case Studies in Kenya. Washington microfinance et la banque mobile vient sans doute de l’avènement de nouveaux modèles opérationnels Center for Global Development. http://www.cgdev.org/ de microfinance. La banque mobile a contribué à doc/LRS_case_stu dies/Cracknell_Kenya.pdf promouvoir une nouvelle approche de la microfinance en utilisant le téléphone portable, les données relative Insight. 2009. “Accelerating Financial Inclusion through à l’utilisation et les services des agents pour gérer les Innovative Channels: 10 Obstacles for MFIs Launching demandes de prêts, la vérification de la situation des Alternative Channels—And What Can Be Done clients et les décisions en matière de prêts. La culture about Them.” Boston : Insight Accion International, de la microfinance a commencé à fusionner avec celle décembre. http://centerforfinancialinclusionblog. des paiements mobiles pour fournir bien plus que files.wordpress.com/2011/09/accelerating-financial- ce que les services de microfinance ou de paiement inclusion-through-innovative-channels.pdf mobile peuvent offrir seuls. La banque mobile facilite également l’établissement de nouveaux partenariats Karlan Dean, Melanie Morten et Jonathan Zinman. entre des acteurs improbables qui apportent chacun 2012. “A Personal Touch: Text Messaging for Loan son expertise, permettant de fournir des services Repayment.” Cambridge, Mass.: National Bureau financiers novateurs aux personnes non bancarisées. of Economic Research, mars. http://www.nber.org/ Cette histoire en est encore à ses balbutiements — papers/w17952.pdf?new_window=1 le plus grand déploiement de services de banque mobile dans le monde n’existe que depuis un peu Kumar Kabir, Claudia McKay et Sarah Rotman. 2010. plus de six ans. Des questions demeurent cependant. Microfinance et banque mobile : Quelles expériences Quel est le mélange optimal de banque mobile et de à ce jour ? Note Focus 62 Washington CGAP, juillet. microfinance ? Un modèle basé sur les relations et les http://www.cgap.org/sites/default/files/CGAP-Focus- opérations scripturales peut-il permettre d’atteindre Note-Microfinance-and-Mobile-Banking-The-Story- l’échelle nécessaire  ? Des approches de plus en So-Far-Jul-2010.pdf plus dépendantes de la technologie seront-elles en mesure d’offrir à distance des services financiers de Mas Ignacio, Akhand J. Tiwari, Alphina Jos, Denny la qualité requise et présentant des taux de défaut George, Krishna U. M Thacker, Nitin Garg, Raunak de paiement acceptables ? À mesure qu’un nombre Kapoor, V. Shivshankar, Swati Mehta et Vartika Shukla. croissant de fournisseurs de services de banque 2012. “Are Banks and Microfinance Institutions mobile prendront de l’envergure, la capacité des IMF à tirer parti de cette technologie l’emportera-t-elle sur Natural Partners in Financial Inclusion?” Lucknow, le renforcement de la concurrence qu’engendrent les Inde  : MicroSave, mai. http://www.microsave.net/ nouveaux modèles d’entreprises de microfinance  ? files/pdf/Are_Banks_and_Microfinance_Institutions_ Les IMF opèrent dans un contexte passionnant Natural_Partners_in_Financial_Inclusion.pdf et, plus important encore, leurs clients peuvent largement profiter d’abondantes innovations. McCaffrey Mike, Olivia Obiero et George Mugweru. 2013. “M-Shwari: Market Reactions and Potential Bibliographie Improvements.” Fiche MicroSave No139 Nairobi, Kenya : MicroSave, février http://www.microsave.net/ Bernhardt, Jennifer, et Stephanie Grell Azar. 2012. files/pdf/BN_139_M_Shwari_Market_Reactions_and_ “Using Mobile Technology to Expand Financial Potential_Improvements.pdf Inclusion: The Credit Union Experience.” Guide technique. Madison, Wisc. : WOCCU. Sadana Mukesh, George Mugweru, Joyce Murithi, David Cracknell et Graham A. N. Wright. 2011. Caruso, Carol. 2011. “Mobile Banking for MFIs: Why It Pays to Take Your Time.” Amsterdam: Triple Jump “Analysis of Financial Institutions Riding the Advisory Services. http://www.triplejump.eu/upload/ M-PESA Rails.” Nairobi, Kenya  : MicroSave, mars. media/Mobile_banking_Feasibility_article_Q311_ http://www.microsave.net/files/pdf/Analysis_of_ final_1_.pdf Financial_Institutions_Riding_the_M_PESA_Rails.pdf 17 Triple Jump Advisory Services and Microfinance Voorrips Gera, Philippe Breul et Francois Coupienne. Opportunities. 2013. “Mobile Banking Study: 2012. “Mobile Banking Study: The Microfinance Experiences and Perspectives of Microfinance Perspective.” Brussels, Belgium: PHB Development, Institutions.” Amsterdam: Triple Jump Advisory mars. http://www.phbdevelopment.com/images/ Services and Microfinance Opportunities, janvier. stories/downloads/phb%20brief%202_march%20 http://www.triplejump.eu/upload/media/Triple_Jump_ 2012_mmoney%20models%20for%20mfis_final.pdf Mobile_Banking_Survey_Public_Version_final.pdf Yousif Fatima en collaboration avec Elizabeth Berthe, Ventura Arnaud, Thierno Seck, Greg Rung et Prakriti Jacinta Maiyo et Olga Morawczynski. 2012. “Best Singh. 2011. “Beyond Payments: Next Generation Practice in Mobile Microfinance.” Grameen Foundation Mobile Banking for the Masses.” PlaNet Finance and Institute for Money, Technology & Financial & Oliver Wyman. http://www.oliverwyman.com/ Inclusion, juillet. http://www.grameenfoundation.org/ media/OW_En_FS_2011_Publ_NextGeneration sites/default/files/Best_Practice_in_Mobile_ MobileBanking.pdf Microfinance.pdf No 88 Août 2013 Nous vous encourageons à partager cette Note Focus avec vos collègues ou à nous contacter pour recevoir des exemplaires supplémentaires de ce numéro ou d’autres de la même série. Nous vous invitons à nous faire part de vos commentaires sur cet article. Toutes les publications du CGAP sont disponibles sur son site : www.cgap.org. CGAP 1818 H Street, NW MSN P3-300 Washington, DC 20433, États-Unis Cette Note Focus a été rédigée par Michel Hanouch et Sarah Rotman du CGAP. Outre les nombreuses personnes de chacune des organisations décrites ici qui ont participé aux entretiens, les auteurs souhaitent remercier Leesa Shrader pour sa précieuse contribution, Tél : 202-473-9594 ainsi que plusieurs collègues du CGAP  : Greg Chen, Minh Huy Lai, Claudia McKay, Kate McKee, Steve Rasmussen et Michael Tarazi. Fax : 202-522-3744 Les auteurs tiennent également à remercier BRAC et bKash pour leur collaboration sur l’étude portant sur les clients et spécifiquement Md. Golam Saklyen de BRAC qui a dirigé cette étude. Le Programme d’innovation en matière de technologie et de modèles opérationnels du CGAP est cofinancé par la Fondation Bill et Melinda Gates, le CGAP, la Fondation MasterCard et le ministère britannique du Développement Courriel : international (DFID). cgap@worldbank.org Nous suggérons la citation suivante pour cette Note Focus : © CGAP, 2013 Hanouch, Michel et Sarah Rotman. 2013. Microfinance et banque mobile : vers une approche intégrée ? Note Focus 88 Washington CGAP, juillet. Print : ISBN 978-1-62696-020-6 epub : ISBN 978-62696-022-0 pdf : ISBN 978-1-62696-021-3 mobi : ISBN 978-62696-023-7 Ministry of Foreign Affairs of the Netherlands AFRICAN DEVELOPMENT BANK GROUP