64631 S P D I S C U S S I O N PA P E R NO. 1117 Filets sociaux de sécurité dans les États fragiles : Le programme d’alimentation scolaire à base communautaire au Togo Colin Andrews, Elena Galliano, Carolyn Turk et Giuseppe Zampaglione Août 2011 Filets sociaux de sécurité dans les États fragiles : Le programme d’alimentation scolaire à base communautaire au Togo Colin Andrews, Elena Galliano, Carolyn Turk et Giuseppe Zampaglione Août 2011 Sommaire Ce document s’intéresse à un petit programme d’alimentation scolaire à base communautaire initié au Togo en réponse à la hausse du prix des aliments de 2007/2008. L’analyse porte essentiellement sur les leçons politiques et opérationnelles qui peuvent être tirées de ce programme, notamment dans une optique de meilleure compréhension des opportunités de duplication à plus large échelle et de pérennisation. L’étude aborde tout particulièrement la question de l’élaboration de filets de sécurité dans les États fragiles et dans les contextes où la capacité gouvernementale en matière de livraison de services aux communautés vulnérables et défavorisées reste faible et fragmentée. Ici, l’alimentation scolaire est examinée en tant qu’outil permettant l’utilisation de mécanismes informels basés sur l’implication des communautés et de la société civile. L’analyse repose sur les enquêtes qualitatives et quantitatives réalisées sur les sites bénéficiaires du programme. Elle identifie les défis opérationnels et les opportunités d’adaptation qui entourent l’expansion de l’alimentation scolaire à l’ensemble du Togo, notamment en matière de ciblage, de rentabilité, d’approvisionnement et de questions institutionnelles. La nature des bénéfices sociaux et économiques générés, particulièrement les impacts diététiques et les effets sur les ménages et la communauté locale sont également examinés. Le document cherche essentiellement à partager les leçons tirées des conclusions de l’évaluation du programme, afin que celles-ci puissent s’avérer utiles dans la préparation de programmes similaires, au Togo ou dans d’autres pays. Les résultats de l’analyse confirment les possibilités d’implantation de l’alimentation scolaire dans un contexte de faible capacité et d’utilisation du programme en tant que tremplin vers un filet social de sécurité de plus grande ampleur et plus complet. Classification JEL : H53 — Sécurité sociale et régime public de pension ; I38 — Politique gouvernementale ; Dispositions et effets des programmes de bien-être Mots clés : Alimentation scolaire, développement conduit par les communautés, approches informelles, diversité diététique i Filets sociaux de sécurité dans les États fragiles : Le programme d’alimentation scolaire à base communautaire au Togo * Human Development Network, The World Bank; Email: candrews@worldbank.org, elena.galliano@gmail.com, cturk@worldbank.org, Gzampaglione@worldbank.org Address for Correspondence: The World Bank, 1818 H Street NW, Washington DC 20433, USA ii Remerciements Au cours de la préparation de ce document, Andy Chi Tembon, John Elder et Alexandre Marc ont effectué d’excellents commentaires. Nous remercions particulièrement Elena Celada, qui nous a fourni des appuis sur tous les aspects relatifs au projet et aux évaluations antérieures ainsi qu’Herve Assah et Sylvie Nenonene qui ont revu le travail accompli. Nous sommes également reconnaissants envers les nombreuses contreparties qui nous ont fait part de leurs réactions et de leurs idées ou qui ont contribué aux différents documents de référence utilisés ici, notamment Bouty Yawavi Agboka, Secrétaire technique du Projet de développement communautaire, ainsi que Egbenovi Agbo, Yaovi Ameyapoh, Kokou Amouzouvi. Ce document a reçu l’appui du Fonds fiduciaire pour un développement environnemental et social durable (TFESSD) financé par les gouvernements de la Finlande et de la Norvège. Les auteurs demeurent les seuls responsables du contenu de la version finale. De plus, les opinions exprimées ici sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement celles de la Banque mondiale, de ses directeurs généraux ou des pays qu’ils représentent. iii Table des matières Sommaire ......................................................................................................................................... i Remerciements ............................................................................................................................... iii  Acronymes ...................................................................................................................................... 1  I.  Introduction ............................................................................................................................... 2  II.  Objet et méthodologie ............................................................................................................... 4  III.  Contexte .................................................................................................................................... 7  3.1  Contexte général ................................................................................................................ 7  3.2  État fragile : Pauvreté et facteurs exogènes ....................................................................... 8  3.3  Réponse à la crise alimentaire ......................................................................................... 11  3.4  Protection sociale : Liens avec le programme général .................................................... 12  IV.  Principales questions opérationnelles et de mise en oeuvre ................................................... 15  4.1  Éléments de conception ................................................................................................... 15  4.2  Arrangements institutionnels ........................................................................................... 16  4.3  Financement du programme ............................................................................................ 20  4.4  Suivi ................................................................................................................................. 21  4.5  Ciblage ............................................................................................................................. 22  4.6  Approvisionnement en aliments ...................................................................................... 24  4.7  Coûts ................................................................................................................................ 26  4.8  Bénéfices pour les enfants ............................................................................................... 29  4.9  Bénéfices économiques et sociaux dans les ménages et les communautés ..................... 33  V.  Le programme d’alimentation scolaire à base communautaire en tant que filet de sécurité : un modèle pour les états fragiles et souffrant d’insécurité alimentaire .................................. 45  5.1  Origine et principes de base ............................................................................................. 45  5.2  Ce filet de sécurité peut-il être reproduit et faire l’objet d’une expansion ...................... 47  VI.  Conclusions et recommandations ........................................................................................... 54  Annexe 1. Couts annuels du programme d’alimentation scolaire au TOGO ($ EU) ................. 60  Annexe 2.  Modèle pour la standardisation des coûts de l’alimentation scolaire ........................ 62  VII.  Bibliographie ........................................................................................................................ 64  iv Liste des encadrés Encadré 1 : Objectifs généraux des programmes d’alimentation scolaire .................................... 13 Encadré 2 : Préparation et distribution des repas .......................................................................... 18 Encadré 3 : Passation de marchés locale....................................................................................... 25 Encadré 4 : Groupes de discussions sur l’épargne ........................................................................ 37 Liste des graphiques Graphique 1 : Changements dans la fréquentation scolaire (pour cent) ......................................... 5 Graphique 2 : Comparaison de coûts ............................................................................................ 46 Liste des tableaux Tableau 1 : Changements dans la présence scolaire entre 2008–2009 et 2009–2010 .................. 14 Tableau 2 : Statistiques nationales sur les écoles et l’inscription scolaire (2006–2007) .............. 23 Tableau 3 : Comparaison de prix avec d’autres programmes d’alimentation scolaire en Afrique. ................................................................................................................. 28 Tableau 4 : Valeur nutritive des rations dans les écoles primaires ............................................... 30 Tableau 5 : Exemple de menu hebdomadaire dans deux régions, Savanes et Maritime .............. 32 Tableau 6 : Résumé des caractéristiques nutritionnelles de quatre types de repas ....................... 32 Tableau 7 : Injection de liquidités dans les communautés, an 1 (2007–2008) ............................. 36 Tableau 8 : Nombre de femmes-mamans dans les villages échantillonnés .................................. 39 Tableau 9 : Réinvestissement des profits dans les régions échantillonnées Maritime et Savanes ................................................................................................................... 39 Tableau 10 : Production locale et articles alimentaires importés. ................................................ 40 Tableau 11 : Ressources injectées dans les communautés, Années 1 et 2 .................................... 42 Tableau 12 : Secteurs de réinvestissement des revenus et de l’épargne réalisés grâce au programme d’alimentation scolaire .................................................................... 44 v Acronymes AFSSA Agence française de sécurité sanitaire des aliments AGAIB Agence d’appui aux initiatives de base AGAIB Agences d’appui aux initiatives de base APE Association de parents d’élèves CDD Développement conduit par les communautés DSRP Document de Stratégie de réduction de la pauvreté (Poverty Reduction Strategy Paper) EFMFTI Initiative de financement accéléré d’éducation pour tous (Education For All Fast Track Initiative) EPPR Programme d’urgence pour la réduction de la pauvreté (Emergency Program for Poverty Reduction) GFCRP Programme de Réponse à la crise alimentaire générale. GFCRP Programme de Réponse à la crise alimentaire générale (Global Food Crisis Response Program) IDA Agence de développement international (International developpement agency) LICUS Pays à faible revenu en situation de stress (Low Income Countries Under Stress) MICS Enquête à indicateurs multiples (Multiple Indicator Country Survey) OMS Organisation mondiale de la santé ONG Organisation Non Gouvernementale PAM Programme alimentaire mondiale PIB Produit Intérieur Brut PNUD Programme des Nations-Unies pour le Développement QUIBB Questionnaire sur les indicateurs de base (Questionnaire with Base Indicators) S&E Suivi et Évaluation ST Secrétariat technique 1 I. Introduction Ce document fait l’examen d’un petit programme d’alimentation scolaire à base communautaire réalisé dans le cadre d’une sous-composante de projet de développement communautaire. Il s’intéresse à ses forces et à ses faiblesses en tant que filet social de sécurité et mécanisme de protection sociale, particulièrement dans un cas où la sécurité alimentaire du pays reste fragile. Le document repose sur les analyses quantitatives et qualitatives réalisées sur les différents sites du programme et qui permettent notamment de conclure que : (i) dans un contexte d’insécurité alimentaire et de faiblesse gouvernementale, le recours à une approche informelle en matière de filet de sécurité permet d’atteindre de bons résultats en matière de ciblage, de nutrition des enfants et de bénéfices pour le ménage ; et que (ii) ce type de filet de sécurité peut être dupliqué avec l’ampleur souhaitée dans d’autres zones (et États) fragiles souffrant d’insécurité alimentaire. Ces derniers devront cependant disposer, comme le Togo, d’une production alimentaire minimale dans la zone ciblée et de communautés cohésives qui utilisent des mécanismes de mobilisation et d’entraide informels. Le document prouve qu’un filet de sécurité peut avoir recours avec succès à des mécanismes informels existants et impliquant la participation des communautés et de la société civile ceci, dans les États fragiles, dans les contextes où la capacité gouvernementale en matière de livraison de services aux communautés vulnérables et défavorisées reste faible et fragmentée, lorsque la présence du secteur public formel est limitée et quand il y a absence de coordination des donateurs dans certaines des régions les plus défavorisées. Le programme d’alimentation scolaire à base communautaire du Togo fournit à cet égard des leçons concrètes, non seulement en matière de réponse rapide aux besoins à la base mais aussi d’orientation simultanée des acteurs vers une politique de protection sociale nationale et inclusive. L’étude examine tout d’abord pourquoi, dans un contexte d’État fragile comme celui du Togo, l’appui accordé aux ménages pour la création ou la consolidation de leurs moyens de subsistance réussit à renforcer leur résilience et à minimiser les impacts de la crise alimentaire. Le programme d’alimentation scolaire à base communautaire cible en effet également le renforcement des moyens de subsistance, notamment en aidant les ménages à avoir accès aux ressources nécessaires. Les moyens de subsistance désignent ici « l’ensemble des biens et ressources qu’une personne doit posséder afin de mener une vie en santé et productive ». Les 2 appuis et la protection accordés peuvent donc inclure non seulement la conduite d’activités génératrices de revenus, mais aussi la facilitation de l’accès à l’éducation, aux soins de santé, à la commercialisation et même l’aide alimentaire si elle fait partie d’une approche intégrée 1 d’amélioration de la sécurité économique de base des populations . Le programme d’alimentation scolaire du Togo a été institué en réponse aux défis en matière de sécurité alimentaire auxquels font face la plupart des régions rurales. Il fournit un repas nutritif par jour aux élèves du cycle primaire des communautés ciblées, procure des ressources additionnelles (environ 8-9 $ EU) aux ménages vulnérables et permet à un certain nombre de femmes de la communauté de tirer des profits réguliers de la préparation des repas. L’étude examine en second lieu les moyens qui ont permis de faire reposer ce filet de sécurité sur des mécanismes informels existants et qui permettent de compenser l’absence de parties prenantes fortes (membres de la communauté offrant un service de préparation et livraison des repas aux élèves du cycle primaire, approvisionnement local en aliments, ONG locales et associations de parents-enseignants assurant le suivi des activités de l’école). Elle étudie également comment cette approche fournit une base solide à l’appropriation locale et à la responsabilisation et comment, en tant que terrain d’essai pour une intégration à plus large échelle, elle favorise les partenariats entre parties prenantes formelles et informelles. 1 Agence des EU pour le développement international. Speaker’ s Corner : Protecting Livelihoods in Conflict and Fragile States. Un forum en ligne, 22-24 janvier 2008, accueil et modération par le Dr. Laura Hammond, Washington DC; USAID. http://www.povertyfrontiers.org/ev_en.php?ID=2105_201&ID2=DO_TOPIC 3 II. Objet et méthodologie Ce document donne un aperçu des leçons opérationnelles qui peuvent être tirées de la mise en œuvre du programme d’alimentation scolaire à base communautaire du Togo. Lancé en 2008 en réponse à la crise alimentaire, le programme a été implanté dans les écoles primaires situées dans les régions rurales souffrant d’insuffisance alimentaire ; il a touché 84 écoles et 16 800 enfants au cours de la première année et 92 écoles et 21 300 enfants au cours de la seconde. Le programme a eu un effet multiplicateur tangible sur l’épargne des ménages, sur les afflux monétaires directs dans l’économie locale et sur le réinvestissement de l’épargne dans cette économie. Cette section fournit des informations et des preuves appuyant sa duplication à plus large échelle et son intégration nationale. Les indications et les données présentés ici sont en grande partie tirées des rapports d’évaluation produits en cours d’exécution et des conclusions tirées par la mission d’évaluation. Tous ces documents ont fourni des informations et recommandations importantes, qui ont aidé à la compréhension des bénéfices, avantages, limites et défis du programme tout en permettant simultanément d’en suivre les progrès et de faire face aux lacunes opérationnelles et défis institutionnels. Dans cette perspective, le document fait le point sur toutes les évaluations antérieures ; les leçons et les données présentées sont surtout basées sur trois études, soit : (i) une évaluation quantitative comprenant une enquête auprès de 1 050 ménages appartenant à 35 villages situés dans cinq régions et comprenant un échantillonnage par grappe, stratifié par région, qui a été réalisé en plusieurs étapes. Cette méthode d’enquête a facilité l’évaluation des bénéfices éducationnels et économiques des projets comme du montage institutionnel du programme ; (ii) une évaluation du contexte stratégique et administratif national du Togo en matière de protection sociale ; (iii) une évaluation qualitative de la perception du programme par les bénéficiaires. Celle-ci a été menée d’une part à l’aide de groupes de discussion comprenant des femmes appartenant aux ménages touchés, des femmes-mamans, des élèves (garçons et filles), et des membres de la communauté (hommes et femmes) et d’autre part par le biais d’entrevues semi-structurées avec les petits commerçants. L’échantillon comprenait six villages situés dans 4 deux régions (Savanes et Maritime) et choisis parmi les villages ayant fait partie de l’évaluation quantitative. Le Togo prépare actuellement son programme d’activités en matière de protection sociale. Cependant, lorsque le programme d’alimentation scolaire a démarré, le pays sortait de plusieurs années d’isolement et d’absence des donateurs. Ce document présente les principaux éléments du travail préliminaire accompli et permet, grâce à l’analyse des principales conclusions et données, de démontrer que dans un pays comme le Togo, qui souffre de faibles niveaux de gouvernance et de plusieurs années d’absence des bailleurs, il est possible de protéger de façon efficace les moyens de subsistance en ayant recours, d’une part aux ressources locales et aux mécanismes informels à base communautaire permettant de faire face aux difficultés et d’autre part aux partenariats avec le gouvernement et les structures d’éducation formelles (Graphique 1). Graphique 1 : Changements dans la fréquentation scolaire (pour cent) Source : Auteurs (2011). Le document répond en particulier aux questions suivantes :  Dans les communautés bénéficiaires, le programme d’alimentation scolaire réussit-il à atteindre ses principaux objectifs, soit la réduction de la faim chez les enfants du primaire et l’augmentation des ressources dont disposent les ménages au cours des périodes d’insécurité alimentaire et de pression économique?  Quels sont les autres éléments qui ont permis la réussite du programme et la création de ses bénéfices globaux ?  Quels changements de comportement au sein du ménage peut-on attribuer au programme d’alimentation scolaire? 5  Quels sont les principaux défis opérationnels du programme, tels que perçus par les différentes parties prenantes et exécutants (par ex., ciblage, passation de marchés, suivi du programme, type de mécanisme de mise en place de l’alimentation scolaire, etc.)?  Quelles doivent-être les principales caractéristiques du montage opérationnel et institutionnel d’un programme multisectoriel de ce type? Par ailleurs, le programme est mis en œuvre par le biais d’une approche communautaire qui confie aux femmes du village la préparation et la distribution des repas scolaires. Dans ce cadre, les bénéfices attendus ne sont pas réservés seulement aux enfants bénéficiaires des repas, mais doivent s’étendre également les ménages et à la communauté dans son ensemble. Ce document présente en détail les avantages spécifiques et l’ampleur des bénéfices potentiels générés par cette approche, en comparaison avec ceux issus de programmes d’alimentation scolaire traditionnels et centralisés. Enfin, le document et ses conclusions (i) illustrent comment les mécanismes de filet de sécurité peuvent être utilisés avec succès dans un contexte de fragilité, notamment grâce à l’utilisation des ressources locales et de l’effet de levier des mécanismes informels d’adaptation face aux difficultés ; (ii) font la preuve de la pertinence de l’alimentation scolaire comme filet de sécurité et des avantages d’une approche à base communautaire dans les régions du Togo souffrant d’insécurité alimentaire ; et (iii) traitent des questions relatives à une augmentation de l’ampleur du programme. 6 III. Contexte Cette section est consacrée à la description du contexte géographique, socio-économique, fiscal et politique du Togo ; elle fait un synopsis du rôle joué par la pauvreté et les facteurs exogènes sur cet État fragile, résume sa réponse à la crise alimentaire et fait le lien entre cette réponse et le programme de protection sociale en général. 3.1 Contexte général Le Togo est un petit pays d’Afrique de l’Ouest qui comprend six régions géographiques distinctes et cinq régions administratives — Savanes, Kara, Centrale, Plateaux, et Maritime respectivement réparties du nord au sud. L’agriculture représente 60 pour cent des moyens de subsistance et la déforestation actuelle serait attribuable aux pratiques ancestrales de culture sur brulis. Contrairement à plusieurs autres pays d’Afrique de l’Ouest, le Togo est largement autosuffisant en matière alimentaire2. Le pays est composé de 37 tribus, parmi lesquelles les Éwé les Mina, et les Kabre constituent les groupes les plus importants. On y parle cinq langues principales, soit le français (officielle, la langue du commerce), l’éwé et le mina (les deux langues africaines majoritairement parlées dans le sud), ainsi que le kabye/kabiye et le dagomba (les deux langues africaines majoritairement parlées dans le nord). On y pratique trois religions, soit l’islam (20 pour cent), le christianisme (29 pour cent) et les croyances autochtones (51 pour cent). Ces dernières affectent le taux d’éducation des filles3. L’âge moyen est de 19,3 ans, avec 39,9 pour cent de la population âgée de 0 à 14 ans. Selon la méthode Atlas, le revenu national brut par personne s’élève de 440 $ EU (valeur 2 Institut International de Politique Alimentaire. 2004. Indicateurs de science et technologie agricole. ASTI, Résumé pays No 16. Washington DC : IFPRI. http://www.ifpri.org/sites/default/files/publications/Togo_CB16.pdf 3 On sait que les filles entrent au couvent vaudou à l’âge de quatre ans et ne complètent guère leur éducation. « La visite des directeurs généraux de l’UNICEF au Togo se concentre sur l’éducation », communiqué de presse, septembre 2008, Nations Unies, New York. 7 actuelle). La malnutrition affecte environ 30 pour cent de la population et le facteur de risque de maladie infectieuse est élevé4. Entre 1980 et 2010, l’indice de développement humain (IDH) du Togo s’est accru de 0,7 pour cent par an et est passé de 0,347 à 0,428, ce qui place actuellement le pays au 139e rang sur 169 pays offrant des données comparables. L’IDH de l’Afrique subsaharienne est pour sa part passé de 0,293 en 1980 à 0,389 aujourd’hui, ce qui place le Togo au-dessus de la moyenne régionale. 5 En 2009, le taux d’inscription scolaire global s’élevait à 93,6 pour cent. La même année et pour tous les niveaux d’éducation primaire, le taux de redoublements, était de 22,9 pour cent et le taux général de complétion du cycle primaire de 61,4 pour cent. Les données les plus récentes relatives à l’abandon scolaire au primaire datent de 2006 et font état de 55,5 pour cent de décrochage. 6 En 2009, 65 410 enfants d’âge scolaire ne fréquentaient pas l’école, soit 9808 garçons et 55 602 filles. On estime que la croissance réelle du produit intérieur brut (PIB) s’accélèrera pour atteindre 3,6 pour cent en 2011 et 3,9 pour cent en 2012, notamment en raison de l’importance croissante de l’aide et des investissements étrangers, de la dépense dans les infrastructures et du programme gouvernemental de réformes structurelles et financières7. Après plusieurs décennies de direction par un parti unique, de troubles civils internes et d’augmentation importante de la pauvreté de la population, des élections ont été tenues en 2005 et le président, Faure Gnassingbé, a été réélu pour un second mandat de cinq ans en mars 2010. Des élections locales devraient avoir lieu en 2011 et des élections législatives en 2012. 3.2 État fragile : Pauvreté et facteurs exogènes On considère comme État fragile un pays à faible revenu caractérisé par une faible capacité et/ou légitimité gouvernementale et une population vulnérable à tout en ensemble de 4 FAO http://www.fao.org/economic/ess/food-security-statistics/en/ 5 http://hdrstats.undp.org/en/countries/profiles/TGO.html. 6 http://web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/TOPICS/EXTEDUCATION/EXTDATASTATISTICS/EXTEDS TATS/0,,contentMDK:22614780~menuPK:7196605~pagePK:64168445~piPK:64168309~theSitePK:3232764,00.ht ml?TGO,206 7 Economist Intelligence Unit. 2011. http://country.eiu.com/Togo . 8 chocs. 8 Pendant plusieurs années, ce pays n’a pas la capacité d’élaborer des politiques et de mettre en place les institutions susceptibles d’appuyer un cadre réglementaire complet et inclusif. Le Togo figure parmi les États fragiles d’Afrique. La présence d’un régime autoritaire et antidémocratique, l’instabilité politique, une piètre gouvernance, la faiblesse de la capacité institutionnelle et le manque de transparence dans les investissements publics figurent parmi les principaux facteurs qui ont été responsables de la détérioration de la confiance entre les citoyens du Togo et ses dirigeants comme de la réduction drastique du nombre de donateurs présents. Cette impasse sociopolitique prolongée a affecté de façon importante l’économie nationale et a nui à la capacité du gouvernement en matière de livraison de services de base à la majorité de la population. En réalité, plus de 60 pour cent des 6 millions de togolais vivent actuellement sous le seuil de pauvreté, une condition liée à la sous-nutrition à un point tel que 64,2 pour cent des communautés pauvres sont affectées par la sous alimentation. La pauvreté est beaucoup fréquente en zone rurale, où elle touche 3 ménages sur quatre, qu’en zone urbaine où elle affecte deux ménages sur cinq. En fait, près de la moitié de la population rurale souffre actuellement d’insécurité alimentaire et 37 pour cent supplémentaires demeurent à risque. 9 Certains facteurs exogènes ont récemment contribué à l’appauvrissement du Togo. En 2007, les pluies et les inondations ont dévasté le pays et l’année suivante, la crise des prix du carburant et des aliments a affecté le Togo plus que tout autre pays d’Afrique subsaharienne. L’effet combiné de la hausse du prix des aliments et des pertes agricoles dues aux inondations a laissé 13 pour cent des ménages des Savanes (2008) dans une insécurité alimentaire sévère et a mis en péril les moyens de subsistance de plus du tiers des ménages des Savanes, du Kara et des Plateaux (300 000 personnes). Les stratégies informelles de dernier recours ont dû être utilisées : les adultes ont réduit leur apport alimentaire au profit des enfants, la qualité du gain nutritionnel 8 Wikipedia 9 Rapport de la Banque mondiale No: 45237-TG. Togo. Document projet du fonds fiduciaire de Réponse à la crise du prix des aliments, pour la proposition d’octroi d’un don additionnel en vertu du programme de réponse à la crise alimentaire générale, 30 septembre 2008. 9 fourni par le repas principal s’est dégradée, les grains entreposés pour la prochaine saison ont été mangés et le bétail a été vendu. 10 L’index du prix des aliments récemment publié par la Banque mondiale dépasse de 36 pour cent le niveau atteint en 2010 et s’approche du pic de 2008. Ces flambées sont attribuables aux graves évènements météorologiques, aux restrictions frappant les exportations, à l’utilisation croissante des biocarburants, à la faiblesse des réserves globales et à la montée des prix du carburant (le pétrole brut a augmenté de 21 pour cent au cours du premier trimestre de 2011 en raison de l’instabilité au Moyen-Orient et en Afrique du Nord). Au Togo par exemple, le maïs constitue 60 % des productions vivrières. En 2007, le prix de cette seule denrée a connu une croissance de 42 pour cent alors qu’en 2010, avec une valeur dépassant de 74 pour cent celle de l’année précédente, il se plaçait en tête des augmentations clés de l’index du prix des aliments. 11 Les prévisions à court terme pour le Togo ne sont donc guère plus encourageantes. Les enfants figurent parmi les victimes les plus importantes de cette situation. Au Togo, selon l’Enquête à indicateurs multiples (MICS) la plus récente (2006), un enfant sur quatre est sous-alimenté. Environ 50 000 enfants de moins de cinq ans souffrent de malnutrition, avec des taux de malnutrition sévère qui dépassent les seuils critiques fixés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). 12 On trouve des pourcentages similaires chez les enfants qui fréquentent les deux premières années du cycle primaire. On a signalé que les deux régions les plus au nord, soit les Savanes et la Kara, présentaient des taux de malnutrition aiguë respectif de 32 et de 24 pour cent, 13 une situation reconnue par le gouvernement. Les caractéristiques signalées comprenaient : une incapacité à fournir aux enfants des aliments appropriés en qualité comme en quantité, un manque d’accès aux services de santé essentiels, à l’eau potable et aux mesures sanitaires et des niveaux croissants de pauvreté et de vulnérabilité. 10 Programme alimentaire mondial. «Togo — Enquête rapide sur la sécurité alimentaire des ménages», avril 2010, Rome 11 Banque mondiale. 2010. « High and Volatile Food Prices Continue to Threaten the World’s Poor», communiqué de presse, 14 avril 2011, Washington DC. 12 http://www.unicef.org/wcaro/WCARO Togo Factsht Malnutrition.pdf 13 Le gouvernement du Togo a endossé l’étude. UNICEF 2007. Document programme révisé pour le Togo (2008- 2012). New York: N. http://www.unicef.org/about/execboard/files/07-PL43-Togo(1).pdf 10 3.3 Réponse à la crise alimentaire En décembre 2010, le gouvernement du Togo a mis en place un mécanisme de fixation du prix du carburant destiné à diminuer la pression sur le budget en liant les prix intérieurs aux prix mondiaux, un mécanisme qui a été doté d’un stabilisateur interne devant permettre d’atténuer les fluctuations et d’amortir l’effet des augmentations de prix sur les consommateurs.14 En avril 2010, le Togo figurait parmi les huit pays retenus comme participants à la première ronde du Programme global d’agriculture et de sécurité alimentaire multidonateurs (GAFSP). Ce programme a été mis en place par la Banque mondiale à la demande du G20 en appui à l’agriculture menée au niveau national, aux plans de sécurité alimentaire et à la promotion des investissements dans les petites exploitations agricoles. 15 En 2009, le gouvernement a adopté le Document complet de Stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP) pour la période 2009-2011, dont les principaux piliers sont (i) l’amélioration de la gouvernance économique et de la transparence ; (ii) la promotion de la reprise économique et du développement durable ; et (iii) la prise en considération des besoins sociaux urgents. Dans le cadre de ce dernier pilier, la protection sociale reste un domaine d’intervention essentiel à la construction du capital humain 16 et les filets sociaux de sécurité deviennent des canaux privilégiés de redistribution des ressources destinées à la gestion du risque chez les plus vulnérables. Le gouvernement a également procédé à la préparation d’une stratégie complète du secteur agricole, centrée sur la nécessité d’une production intérieure suffisante pour répondre aux besoins de consommation intérieure et sur la capacité globale du cycle agricole (production, transformation et mise en marché) à répondre de façon systémique à une crise du prix des aliments. 14 Economist Intelligence Unit. 2011. http://country.eiu.com/Togo. 15 Banque mondiale. 2010. «High and Volatile Food Prices Continue to Threaten the World’s Poor», communiqué de presse, 14 avril 2011, Washington DC.. 16 Le «Développement du capital humain» vise (i) la promotion de l’éducation et des systèmes de formation; (ii) le développement des services et systèmes de santé; (l’amélioration du niveau nutritionnel de la population en général; (iv) l’amélioration de l’accès à une eau sécuritaire et aux infrastructures sanitaires; et (v) la promotion de l’équité entre les genres et la protection sociale. Il entend fournir une réponse efficace à la pauvreté chronique et faciliter l’accès aux besoins sociaux de base des pauvres chroniques. 11 En matière d’éducation, le Rapport sur le statut de l’éducation dans le pays a été préparé par le gouvernement et a reçu l’appui de l’Initiative de financement accéléré d’éducation pour tous (EFMFTI). 17 Il s’agit actuellement du principal outil d’appui international au secteur de l’éducation primaire au Togo. 3.4 Protection sociale : Liens avec le programme général Au Togo, le programme de protection sociale — mis à part les secteurs traditionnels relatifs au travail, aux pensions et à l’assurance santé — constitue une nouveauté. En effet, les filets sociaux de sécurité sont presque entièrement assurés par des ressources externes ; ils sont consacrés à la réhabilitation des communautés vulnérables et à l’amorce d’un processus de reconstruction utilisant des stratégies de développement pro-pauvres complémentaires. L’immédiateté des besoins de développement humain et social a incité plusieurs donateurs bi et multilatéraux à avoir recours aux acteurs internationaux, aux ONG locales, ou à tout autre mécanisme informel à base communautaire susceptible d’assurer un acheminement rapide des ressources. Ainsi, dans le cas du programme d’alimentation scolaire, les principaux canaux d’acheminement des services reposent sur des mécanismes issus des communautés locales et l’exécution du programme a été placée sous la responsabilité des ONG locales. L’approche adoptée au Togo exploite également l’effet de levier apporté par la forte expérience formelle des associations de parents d’élèves (APE) et des ONG régionales dans la gestion et l’appui aux écoles rurales. Elle tire également profit du système informel de femmes- mamans (femmes de la communauté qui préparent/vendent les collations et les repas). Ici, la formation qui permet de s’assurer de la conformité aux normes en matière de quantité, de contenu nutritionnel et de sécurité a donc des avantages qui dépassent largement les murs de l’école. « Les filets de sécurité permettent aux ménages de saisir des opportunités d’investissement qu’ils auraient manquées — à la fois en matière de développement du capital humain de leurs enfants et de moyens de subsistance pour les travailleurs du ménage. Les 17 En 2009, le Secrétariat et le partenariat (UNESCO, UNICEF, WFP, WHO, et la Banque mondiale) de l’Initiative de financement accéléré d’éducation pour tous travaillent avec tous ces partenaires (FRESH, Deworm the World) afin de répondre à la demande du pays pour des programmes de déparasitage de qualité en milieu scolaire dirigés par le secteur de l’éducation. http://www.educationfast-track.org. (Bundy et coll. 2009) 12 programmes de filet de sécurité peuvent contribuer plus précisément à l’accumulation du capital humain des pauvres en prévenant les conséquences néfastes de la malnutrition et le sous- investissement en éducation, ainsi qu’en favorisant l’investissement dans les biens productifs » (Grosh et coll. 2008). Les programmes d’alimentation scolaire, en tant que qu’outils de transferts alimentaires en nature, fournissent des ressources supplémentaires aux ménages puisqu’ils rendent la nourriture disponible lorsque nécessaire. Les bénéficiaires les plus probables sont notamment les enfants et leurs familles, dont le revenu ne permet pas d’acheter les aliments adéquats et qui sont susceptibles d’avoir une meilleure diète s’ils reçoivent des aliments déterminés ou s’ils peuvent les acquérir à des coûts subventionnés (Encadré 1). Encadré 1 : Objectifs généraux des programmes d’alimentation scolaire  Répondre aux besoins alimentaires immédiats des enfants.  Soulager la faim à court terme et accroître la capacité d’apprentissage.  Augmenter l’accès à l’éducation (par ex., inscription, présence, rétention et complétion).  Réduire les inégalités sociales et entre les genres. Le gouvernement du Togo considère que les programmes d’alimentation scolaire constituent, du moins à court terme, des mécanismes de filet de sécurité essentiels à la réduction de la vulnérabilité, particulièrement dans les ménages qui se sont appauvris suite à la crise du prix des aliments et aux inondations (Tableau 1). À plus long terme, les programmes d’alimentation scolaire pourraient s’avérer l’un des éléments clés du programme de protection sociale du pays et de l’appui à l’éducation universelle. En fait, la mise en place de programmes d’alimentation scolaire durables fait partie des mesures à long terme envisagées par le EFMFTI. 13 Tableau 1 : Changements dans la présence scolaire entre 2008–2009 et 2009–2010 Régions Garçons Filles Total Maritime Village bénéficiaire 2,3 % 11,9 % 6,7 % Village non bénéficiaire 2,4 % 3,6 % 3,0 % Plateaux Village bénéficiaire 13,4 % 26,6 % 19,7 % Village non-bénéficiaire -13,5 % -2,8 % -15,8 % Central Village bénéficiaire -14,6 % -15,8 % -15,2 % Village non-bénéficiaire -22,7 % -20,7 % -21,8 % Kara Village bénéficiaire 10,9 % 15,1 % 12,6 % Village non bénéficiaire 4,7 % 10,6 % 7,5 % Savanes Village bénéficiaire 23,6 % 34,2 % 27,9 % Village non bénéficiaire 37,7 % 21,9 % 30,3 % Total Village bénéficiaire 6,8 % 12,6 % 9,4 % Village non-bénéficiaire -9,1 % -5,5 % -7,5 % Source : Agbo E., 2010 b dans Évaluation de l’opération de fourniture de repas aux écoliers des zones vulnérables du Togo, Analyse qualitative. 14 IV. Principales questions opérationnelles et de mise en oeuvre Cette partie du document fait la description des caractéristiques opérationnelles et des arrangements institutionnels du programme ; elle analyse les principales constatations et conclusions tirées par l’évaluation terrain, notamment en matière de ciblage, de provenance des aliments, de bénéfices nutritionnels, éducatifs, et sociaux chez les enfants ainsi que de bénéfices socio-économiques dans les ménages et chez les autres membres de la communauté. 4.1 Éléments de conception Le programme d’alimentation scolaire à base communautaire du Togo a financé pendant deux ans et dans les cinq régions du pays, un repas quotidien complet destiné à chaque enfant fréquentant l’école primaire. Cette intervention avait surtout comme objectif d’améliorer le bien- être nutritionnel des enfants en période d’insécurité alimentaire, d’accroître les inscriptions, la fréquentation et la performance scolaires, d’introduire des changements de comportement en matière de lavage des mains et d’hygiène et si possible, d’améliorer la cohésion communautaire et la capacité d’organisation. Le transfert de ressources aux ménages en situation difficile représentait un avantage additionnel. Un fonds de 2 millions $ EU a permis la préparation et la distribution quotidienne de repas du midi à 16 800 élèves de 84 écoles primaires situées dans les zones rurales les plus pauvres au cours de la première année et à 21 300 élèves de 92 écoles primaires l’année suivante. La distribution des repas par le programme a débuté avec l’année scolaire 2008-2009. Le montage opérationnel et institutionnel du Programme d’urgence pour la réduction de la pauvreté (la première réponse concrète de la Banque mondiale à la crise) a été utilisé. Le Secrétariat technique, mis en place pour appuyer l’exécution des projets de développement communautaire financés par la Banque, a été équipé afin de pouvoir gérer les fonds et activités additionnels requis par le programme d’alimentation scolaire. Le programme est donc devenu une composante du Projet de développement conduit par les communautés, initié au Togo afin de fournir aux communautés vulnérables des infrastructures socio-économiques de base et les moyens nécessaires à la conduite d’activités génératrices de revenus. Le programme entend financer dans ce cadre 350 sous-projets identifiés et réalisés par 15 les communautés elles-mêmes. La composante d’alimentation scolaire a été financée par le Fonds fiduciaire de réponse à la crise du prix des aliments, qui a été approuvé par le Conseil d’administration en mai 2008 et tant qu’élément du Programme de Réponse à la crise alimentaire générale (GFCRP). 18 Il n’y avait aucun autre mécanisme formel d’alimentation ou de cantine scolaire au Togo avant la mise en place du programme. Les parents versaient généralement une petite allocation aux enfants (environ 25-30 FCFA) afin que ces derniers puissent acheter une collation ou un repas préparé par les femmes du village (femmes-mamans) autorisées par l’école à vendre de la nourriture. 19 Ce système, relativement efficace, s’est avéré de plus en plus coûteux suite à la crise du prix des aliments. À la fin de l’année scolaire 2007-2008, le coût d’un repas de base (c. à d. 120 grammes de riz sauce poisson) avait augmenté de 50 pour cent20. 4.2 Arrangements institutionnels La mise en œuvre du programme est assurée par trois parties prenantes principales, soit : le gouvernement national, les organisations non gouvernementales et les communautés locales. Ces dernières fournissent essentiellement les services liés aux repas (l’approvisionnement, l’achat, la préparation des aliments et la distribution des repas sur place), mais elles participent également au programme en envoyant leurs enfants à l’école, en acquérant de nouvelles connaissances et en prenant les décisions incombant au niveau villageois. Les ONG locales et régionales, incluant les APE, sont responsables de l’exécution du programme et du suivi quotidien sur le terrain (Encadré 2). Le gouvernement national assure l’orientation générale du programme par le biais du Comité de pilotage. 18 Les objectifs du GFCRP sont les suivants: (i) réduire les impacts négatifs générés par la hausse et par la volatilité des prix sur la vie des pauvres, et ceci en temps opportun; (ii) appuyer les gouvernements dans l’élaboration de politiques pérennes qui réduisent les impacts adverses des prix élevés et volatiles des aliments sur la pauvreté tout en minimisant la création de distorsions à long terme sur le marché; et (iii) appuyer une croissance généralisée en matière de productivité et de participation aux marchés agricoles, ceci afin d’assurer une réponse adéquate et durable en matière d’approvisionnement alimentaire. 19 Les femmes-mamans doivent avoir en main un cahier de santé mis à jour, sur lequel figurent les vaccins et les examens réalisés par le Département régional de la santé. 20 Banque mondiale. 2010b. Projet de développement conduit par les communautés au Togo, Document Nº 54513- TG. Washington, DC : Banque mondiale. 16 Ces trois groupes comprennent six acteurs principaux : Le Ministère du Développement à la base qui est responsable de l’ensemble du programme. Au niveau central, un Comité de pilotage présidé par le Ministre de l’Éducation primaire supervise la mise en œuvre et assure l’orientation stratégique générale. Le programme est ensuite coordonné par le Secrétariat technique. Le Secrétariat technique (ST) fait la liaison entre le Comité de pilotage, le Ministère du Développement à la base et les ministères techniques (Santé et Éducation). Il a développé une relation de travail avec le Ministère de la Santé pour la conduite de campagnes de déparasitage et de diverses autres activités liées à la nutrition, à la prévention et à la protection sanitaires. Le ST conserve la responsabilité générale de l’exécution de toutes les sous-composantes : la gestion générale et le financement du programme, ainsi que la sélection, le recrutement et le transfert des fonds aux ONG régionales. Les ONG régionales organisent et mettent en œuvre l’alimentation scolaire sur le territoire géographique qu’elles desservent. Leurs responsabilités comprennent notamment : (i) la signature des contrats et le transfert des fonds opérationnels aux APE locales, ainsi que la vérification du respect des règles d’exécution ; (ii) la vérification quotidienne du nombre d’enfants enregistrés à l’école ; (iii) le suivi de la qualité et de la quantité des repas ; (iv) la transmission de rapport sur les questions financières au ST ; (v) la divulgation aux enseignants et parents d’informations sur le programme et sur les activités concomitantes tels que le déparasitage ; (vi) l’assurance de la conformité aux normes de manipulation des aliments. En raison de la crise institutionnelle et de gouvernance prolongée, les associations de parents d’élèves (APE) ont joué sur une base volontaire un rôle majeur dans la gestion des écoles rurales. Ce sont elles qui ont organisé, financé et fourni le personnel nécessaire à la poursuite des activités. Maintenant fortes et bien établies, les APE font partie de réseaux interrégionaux et d’un regroupement national. Elles voient ici à ce que la gestion du programme au niveau de l’école soit adéquate et transparente. Elles sont notamment responsables de l’exécution quotidienne et du suivi de la qualité et de la quantité des repas en (i) vérifiant que la qualité des repas et les procédures de distribution sont conformes aux normes (ii) effectuant les paiements hebdomadaires aux femmes-mamans. 17 Les femmes-mamans sont payées sur la base des repas individuels distribués (0,31 $ EU par jour). Elles utilisent ces montants pour l’achat des aliments, le transport (du marché à l’école) et le remboursement de leur travail, ce qui leur assure un revenu quotidien d’environ 1 à 3 $ EU par jour. En général, on dénombre cinq à huit femmes-mamans par école et chacune cuisine pour 35 à 40 enfants. Les femmes-mamans peuvent choisir de travailler individuellement ou en équipe, selon le nombre total d’enfants et la nature des ententes prises avec les membres de la communauté. Elles sont choisies parmi les femmes dont le carnet de santé est régulièrement mis à jour par le Département régional de la santé. Leur statut sanitaire est vérifié tous les six mois, particulièrement sur les maladies infectieuses et transmissibles. En raison du fait qu’elles ont des revenus tout au long de l’année scolaire, leur position dans la communauté n’est pas négligeable. Les organes administratifs des écoles sont très impliqués dans les procédures quotidiennes du programme et sont responsables du décompte des enfants présents chaque jour à l’école et de la transmission de ce nombre aux femmes-mamans. Encadré 2 : Préparation et distribution des repas Les repas sont préparés par les femmes-mamans, soit par des femmes du village sélectionnées à cet effet, Un comité regroupant les femmes-mamans, les autorités des écoles, les APE, l’ONG régionale et des représentants locaux du Ministère de l’Éducation se réunit aux deux semaines pour planifier les repas. Les facteurs pris en considération sont les suivants : (i) disponibilité locale des produits alimentaires (ii) contenu calorique global (iii) goûts locaux (iv) besoins en matière de diète équilibrée et diversifiée. Une fois que le menu est établi, toutes les écoles d’une même région sont tenues de s’y conformer. Les femmes-mamans bénéficient de formations sur la sécurité alimentaire de base, les normes d’hygiène, la comptabilité et la gestion commerciale élémentaires. En fournissant ces services, le programme contribue, à travers les ONG, à l’accroissement du capital humain et au renforcement des communautés Le programme profite de l’expérience institutionnelle et opérationnelle acquise par le Programme de développement conduit par les communautés et le Programme d’urgence pour la réduction de la pauvreté. Le nouveau gouvernement a mis en place, pour ce dernier, des conseils d’administration comprenant des représentants de la société civile, d’organisations à but non 18 lucratif, et de représentants du gouvernement. Ces conseils d’administration sont chargés de la supervision des nouvelles agences régionales indépendantes et sans but lucratif, les Agences d’appui aux initiatives de base (AGAIB). Cette formule a aidé, au niveau des politiques nationales, à l’établissement d’un consensus entre les secteurs sur le fait que les programmes d’alimentation scolaire peuvent constituer (du moins à long terme) une mesure d’assistance aux ménages vulnérables habitant des zones d’insécurité alimentaire. Elle a également permis d’appuyer la structure du programme d’alimentation scolaire en assurant les services requis, ceci malgré un minimum de nouvelles compétences et capacités. Pour ses besoins, le programme a utilisé l’expérience approfondie des APE dans la gestion et l’appui aux écoles rurales comme effet de levier et a transformé le réseau étendu des femmes-mamans en faisant d’elles les fournisseurs de services principales. Or, non seulement l’exécution du programme s’est-elle déroulée sans anicroche significative, mais elle a permis un transfert des capacités important qui a renforcé les structures locales et les membres de la communauté. L’exécution au niveau local a solidifié les relations entre les APE, les administrateurs des écoles primaires, les membres de la communauté et les organisations à la base. En retour, ces acteurs ont bénéficié de renforcements des capacités et d’appuis institutionnels constants dans des secteurs tels que la fourniture efficace de services, l’hygiène adéquate, le suivi, la comptabilité et les techniques participatives. En bref, suite à cette expérience, les communautés sont plus cohésives et les grandes lignes d’un filet de sécurité se dessinent. Non sans défaut, le programme doit cependant encore élaborer des mécanismes de coordination et de partenariat plus adéquats avec les gouvernements locaux, les ministères techniques concernés et les donateurs. Leur absence est attribuable en partie à une longue période de faiblesse du gouvernement, au manque de capacité du secteur public et à une présence limitée des donateurs et en partie au manque de soutien accordé aux acteurs du gouvernement naissant et au manque d’éducation sur les avantages des structures servant de filet de sécurité. Un travail conjoint avec le Ministère de l’Eau et des Mines et une collaboration plus poussée avec le Ministère de la Santé pourraient par exemple faire partie d’un appui gouvernemental transdisciplinaire plus important. Ce choix repose sur le fait que les écoles 19 primaires ne sont pas dotées d’infrastructures d’approvisionnement en eau adéquates, ce qui compromet les conditions d’hygiène de base et la participation des filles. Le Ministère de l’Eau et des Mines a exprimé sa volonté –bien qu’il n’ait pas agi en ce sens — de construire de petites infrastructures d’approvisionnement en eau dans les communautés où les programmes 21 d’alimentation scolaire sont mis en œuvre, ce qu’il n’a pas encore fait. Par ailleurs, les campagnes de déparasitage actuellement menées par le programme en collaboration avec le Ministère de la Santé ne sont pas systématiques et ne sont pas inscrites aux calendriers des écoles primaires. Le programme envisage le renforcement du Secrétariat technique central grâce au recrutement d’un coordonnateur de projet qui serait chargé d’une coordination adéquate avec les interventions complémentaires menées pendant la phase d’expansion. En raison du rôle central du Secrétariat technique dans le programme d’alimentation scolaire, cet apport permettrait de mieux appuyer le renforcement des collaborations entre les parties. Les résultats et impacts générés dans le cadre des arrangements institutionnels actuels du programme devraient permettre de procéder sans difficulté à une amplification des opérations. Cependant, il faudra intégrer, au moment de la conception, des mécanismes de renforcement de la coordination et des partenariats avec les services gouvernementaux locaux, les organismes donateurs et les agences des Nations Unies. 4.3 Financement du programme Le Secrétariat technique (ST) est responsable du financement général du programme. Il verse les fonds nécessaires aux six ONG nationales et internationales qui appuient le projet au niveau régional. Les transferts sont trimestriels et prévoient le coût des repas pour une période de trois mois. 21 Un don additionnel financé par l’Opportunité pilote de réponse à la crise du Projet de développement conduit par les communautés, document de la Banque mondiale nº 54513-TG (2010). De plus, en vertu de la Note de stratégie intérimaire (2008), la Banque mondiale a appuyé deux projets d’infrastructures. Le second devait s’élever à 10 millions $ EU, mais a finalement bénéficié d’un financement de 26,2 millions. L’un de ses trois piliers, bien qu’il s’applique aux zones urbaines, reste la fourniture d’eau potable propre. Le travail a débuté, ce qui prouve l’engagement du gouvernement sur cette question. 20 Ces ONG travaillent en collaboration avec les APE et la communauté élargie dans la sélection du groupe de femmes du village qui seront chargées de préparer les repas, habituellement de façon rotative. Les fonds sont transférés aux APE mensuellement qui paient les femmes-mamans tous les vendredis. Le réapprovisionnement des fonds se fait sur la base des rapports d’exécution préparés par les ONG régionales et contresignés par les APE et les représentants des écoles. 4.4 Suivi En raison du caractère décentralisé du programme et de la simplicité de ses schémas d’exécution, la supervision des progrès et de la performance est effectuée depuis les niveaux opérationnels inférieurs. De façon concrète, cette formule permet de réduire au minimum les lacunes dans la transparence des opérations et les accrocs dans la qualité de la performance. Dans chaque communauté, l’APE, les gestionnaires de l’école et les professeurs supervisent la distribution des repas aux élèves. Cette mesure permet d’assurer la surveillance des femmes-mamans, de vérifier la diversité diététique, d’assurer la formation de tous les participants et d’appuyer le renforcement du capital humain à long terme. De plus, le fait que les bénéfices s’étendent à la communauté dans son ensemble favorise un suivi de facto, notamment par les petits producteurs agricoles, les commerçants et les fournisseurs qui bénéficient des apports en capitaux du programme. Ces mécanismes de suivi formels et informels ont été testés sur le terrain pendant deux ans et ont permis de tirer des leçons très importantes. Si l’on veut éviter les bénéfices excessifs aux dépens de la qualité, il faudra par exemple resserrer le système afin de pouvoir s’assurer que les repas sont distribués quotidiennement et qu’ils contiennent les ingrédients requis en quantité suffisante. Pour cela, il faudra notamment renforcer les capacités et les mandats de suivi des APE et fixer un plafond des profits nets. Les femmes devront être encouragées à tenir une comptabilité simplifiée permettant de suivre les dépenses hebdomadaires ; un exemple type devrait d’ailleurs être annexé à cet effet au manuel d’exécution de la sous-composante d’alimentation scolaire. 21 4.5 Ciblage Au moment de l’élaboration du programme d’alimentation scolaire à base communautaire, il a été décidé que le ciblage de type géographique était celui qui répondait le mieux aux objectifs fixés. Cette méthode est généralement utilisée lorsque les programmes sont d’ampleur relativement faible et lorsque l’homogénéité en matière d’importance de la pauvreté dans les zones potentielles est importante.22. Elle permet également de favoriser la répartition des bénéfices chez les pauvres, avec de faibles chances d’erreurs d’inclusion. Le programme vise en premier lieu la réduction de l’insécurité alimentaire des ménages lorsque surviennent les crises économiques et les chocs externes (inondations). Dans cette perspective, le ciblage géographique a été effectué à partir de quatre critères précis, soit endroit : vulnérable aux inondations, sujet aux crises des prix alimentaires, ciblé par les opérations du LICUS, 23 et sélectionné par le projet de développement conduit par les communautés, qui a retenu les critères de pauvreté issus du QUIBB utilisés par le Document de Stratégie de réduction de la pauvreté. Dans les différents districts, les écoles ont ensuite été classées selon le taux de pauvreté local. 24 Au cours des deux premières années d’activité, le programme a successivement retenu 84 puis 92 écoles primaires (dont au moins 39 étaient situées dans les régions affectées par les inondations). Le nombre total des enfants fréquentant les écoles ciblées, soit, 16 800 élèves au cours de la première année et 21 300 élèves au cours de la seconde (Tableau 2), ont permis de fixer avec certitude le nombre total des bénéficiaires directs du programme. 22 Au Togo, les trois quarts de la population rurale sont pauvres, avec les taux suivants : Savanes 92,4 pour cent, Centrale 84 pour cent, Kara, 80 pour cent, Plateaux 60,2 pour cent et Maritime 71,1 pour cent (FMI 2010). 23 Le LICUS (pays à faible revenu en situation difficile) est un fonds fiduciaire de la Banque mondiale consacré à l’aide aux pays les plus fragiles et marginalisés, qui vivent des conflits et les luttes institutionnelles très importants. 24 L’incidence de la pauvreté est la suivante : Savanes 90,5 pour cent, Centrale 77,7 pour cent, Kara 75,0 pour cent, Maritime 69,4 pour cent et Plateaux 56,2 pour cent (IMF 2010). 22 Tableau 2 : Statistiques nationales sur les écoles et l’inscription scolaire (2006–2007) Régions  Nombre d’écoles  Nombre d’enfants inscrits  Nombre moyen d’élèves par école  Lomé Golfe  996  207 721  209  Maritime   1 099  210 894  192  Plateaux  1 514  241 670  160  Centrale  660  120 291  182  Kara  745  126 942  170  Savanes  572  114 099  199  Total national   5 586  1 021 617  183  Source : Manuel d’exécution (avril 2008) — Ministère de la Coopération, du Développement et de l’Aménagement du Territoire, Direction générale, Secrétariat technique Les caractéristiques liées à la pauvreté étaient similaires chez les quelques 20 000 enfants touchés par année. Le bénéficiaire typique vit en effet au sein d’un ménage pauvre dans lequel les parents peuvent à peine payer le transport vers l’école, fournir l’argent de poche nécessaire aux repas ou assumer les frais d’éducation des enfants. De plus, ces derniers travaillent souvent sur la parcelle agricole ou dans le ménage ; certains avaient d’ailleurs initialement été inscrits à l’école, mais ont dû abandonner. En outre, la fréquentation scolaire des filles a augmenté, même si aucun effort spécifique n’avait été prévu en ce sens au moment de l’élaboration du programme. Les entrevues et discussions avec les parents ont en effet indiqué que la mesure incitative créée par la fourniture des repas et le fait que les enfants soient protégés pendant qu’ils sont à l’école ont joué un rôle certain dans l’augmentation de la présence des filles à l’école. Si l’on comptabilise la fourniture de repas aux enfants, les transferts nets effectués par le programme peuvent être estimés à environ 10 pour cent de la consommation annuelle d’un ménage moyen qui a deux enfants à l’école ou encore à 20 pour cent de sa consommation annuelle si l’on se fie aux données sur la consommation du ménage rural tirées du QUIBB (2006). En fait, 70 pour cent des ménages bénéficiaires avaient au moins un enfant inscrit à l’école primaire, avec une moyenne de deux enfants par ménage bénéficiaire. Le nombre d’enfants inscrits augmentait en fonction de la taille du ménage, un fait qui indique clairement 23 l’état de pauvreté du ménage. Par conséquent, on peut affirmer que le programme est efficace dans une distribution de ressources qui tient compte des niveaux de pauvreté des villages ruraux. La distribution de repas aux élèves des écoles primaires a eu des effets tangibles et intangibles. L’accès aux services éducatifs a augmenté, ce qui a indirectement favorisé l’augmentation des opportunités en matière d’activités productives et génératrices de revenus au sein même des ménages. La demande prévisible en nourriture a permis un meilleur accès aux marchés locaux et une amélioration progressive des compétences des communautés. Dans certains cas, il y eu renforcement de la cohésion sociale entre les ménages et les membres de la communauté alors que dans d’autres cas, la situation a créé des divisions et dissensions. De plus, même si le programme ciblait principalement les élèves, il devait également permettre de réduire la vulnérabilité des ménages dans les zones d’insécurité alimentaire, ce qu’il a réussi à faire. 4.6 Approvisionnement en aliments Le programme repose sur une approche privilégiant l’achat décentralisé des aliments, dont la responsabilité est confiée aux femmes du village chargées de la préparation des repas (femmes-mamans). L’approche est informelle et n’est pas coordonnée avec une instance gouvernementale nationale ou locale, une ONG régionale ou locale ou un service de restauration. De plus, les gestionnaires de l’école et les APE n’ont aucune juridiction sur le processus d’achat des aliments. Cette approche simplifiée à l’approvisionnement, qui demeure basée sur l’achat individuel d’une petite quantité d’aliments, favorise une meilleure appropriation et une plus grande responsabilisation à la base. Elle joue de plus un rôle important dans l’identification des obstacles ou des erreurs qui pourraient menacer la distribution des aliments aux enfants. Cependant, elle entraîne certaines difficultés, notamment dans la prévision des quantités requises, le contrôle de la qualité des aliments et l’identification de leur provenance. En fait, le programme ne détient pas toutes les informations relatives aux sources d’approvisionnement. En d’autres termes, il contribue à l’amélioration de la cohésion sociale en mobilisant une part de la chaîne d’approvisionnement qui va du producteur au transformateur mais ne peut mesurer les données y afférentes (Encadré 3). 24 Encadré 3 : Passation de marchés locale Une évaluation des procédures d’achat des produits destinés au programme d’alimentation scolaire permettrait une meilleure compréhension des sources d’approvisionnement de nourriture (que signifie en fait l’approvisionnement local), de l’organisation de la chaîne d’approvisionnement et de ceux qui en tirent profit, des conditions qui permettent aux petits producteurs d’avoir accès aux marchés générés par le programme d’alimentation scolaire et des impacts sur la production agricole et le développement local. On trouvera ci-après quelques-unes des principales interrogations et domaines de recherches. Quantités de nourriture Sources d’approvisionnement  Quelles sont les quantités achetées par  D’où provient la nourriture achetée pour le chacune des femmes du village (par programme d’alimentation scolaire? ingrédient/produit et quantité/poids)?  Les zones d’insécurité alimentaire ont-elles des  La quantité requise par le programme difficultés lorsqu’il s’agit de répondre à la d’alimentation scolaire est-elle toujours demande créée par le programme? accessible localement?  Quels sont les articles du panier alimentaire qui  Quelle distance chaque femme doit-elle ne sont pas suffisamment accessibles ou parcourir afin d’acheter tous les disponibles dans les zones souffrant d’insécurité ingrédients du panier nécessaire à la alimentaire? préparation des repas?  Quelle part des provisions destinées au  Quelles sont les modalités régissant le programme provient des petits producteurs? marché et les prix?  Quelle est la distance entre le marché le plus  La demande créée par le programme proche et l’école? d’alimentation scolaire a-t-elle entraîné  Comment les petits producteurs sont-ils une augmentation des prix? organisés?  Les producteurs vendent-ils directement  Comment le programme pourrait-il créer un sur le marché? Comment sont-ils environnement favorable aux petits producteurs organisés? Y a-t-il des intermédiaires? afin que ceux-ci puissent avoir accès aux Qui sont les commerçants? marchés créés par le programme?  Les commerçants chargent-ils un taux  Quelles sont les conditions qui permettraient aux d’intérêt lorsque les femmes achètent petits producteurs d’avoir accès aux marchés à crédit? créés par le programme et de quelles façons  Combien coûte un approvisionnement pourraient-ils être appuyés à cet effet par le direct avec des producteurs individuels gouvernement, les donateurs ou le secteur privé? opérant à petite échelle ou avec des  Quelle serait la meilleure approche en matière groupes de producteurs? d’approvisionnement? Source : Auteurs (2011). 25 4.7 Coûts Le coût complet des repas fournis sur place par le programme du Togo comprend les frais administratifs liés à la gestion du programme, le coût des produits alimentaires, le travail et les autres frais. La comparaison de ce coût avec les données des enquêtes publiées et de quatre autres programmes subsahariens permet de constater que l’importance des kcal. reste la principale source de dépense du programme togolais ; de plus, lorsque la valeur calorique des repas est standardisée, le Togo se situe au bas de l’échelle en matière de coûts des repas scolaires. Coûts administratifs. Les coûts administratifs du programme s’élèvent à 15 pour cent, soit 10 pour cent absorbés par les dépenses administratives et de suivi et 5 pour cent par les frais de transport, ce qui fait du programme une intervention au rapport coût-efficacité très avantageux. Ceci est en grande partie attribuable à l’implication concrète des communautés dans les activités de suivi et de fourniture de services. Coût des repas. Le coût des repas représente environ 85 pour cent des coûts généraux du programme sur le terrain. On a évalué que les produits alimentaires — les frais liés à l’achat, au transport et à l’entreposage des aliments — ont représenté 60 pour cent du coût des repas, auquel ont été ajoutés 25 pour cent pour le travail de préparation (incluant la dépense en eau et en bois), d’acheminement et de distribution. Les casseroles et ustensiles ont été apportés à l’école par les femmes-mamans. Un repas individuel (hors frais administratifs) a coûté 44 $ EU par enfant la première année (pour 16 800 élèves et 140 jours d’école) et 56 $ EU par enfant la seconde année (pour 21 000 élèves et 180 jours d’école). Si l’on inclut les frais administratifs, le coût des repas passe à 51 $ EU la première année et à 64 $ EU la seconde. 25 Lorsque l’on fixe les kcal à 770, les données sur deux ans font chuter les coûts à 28 $ EU (Tableau 3). Coût unitaire d’un repas. Le coût d’un repas s’élève à 0,31 $ EU (environ 0,36 $ EU si l’on inclut les frais administratifs) et chaque femme-maman est responsable de la préparation de 35 à 40 repas individuels. Les revenus dépendent de la disponibilité et du prix des produits sur les marchés locaux et du respect de la taille des portions fixée au moment de l’entente. On 25 Dans la section sur les constatations, les questions de détermination des coûts seront abordées et complétées par un tableau complet et des considérations sur les coûts du programme 26 procède actuellement à une révision des menus afin que chaque repas contienne plus de vitamines et de sources énergétiques. Ceci pourrait rendre le programme plus coûteux et hausser le prix unitaire des repas. L’ajout d’un fruit par jour pourrait par exemple être compensé par une réduction correspondante des quantités des autres produits alimentaires. Importance des revenus des femmes-mamans. Ces revenus correspondent ou sont légèrement supérieurs aux salaires versés dans les secteurs informels et agricoles. 26 Plusieurs facteurs, notamment le prix des aliments, leur disponibilité, le transport et la distance jusqu’au marché font fluctuer le revenu des femmes. La majorité des femmes-mamans interrogées, sauf celles qui font jusqu’à 30 pour cent de profit sur le coût des repas (dans certains cas jusqu’à 4 $/2 000 FCFA par jour), et le coordonnateur du projet s’entendent sur le fait qu’une augmentation du prix unitaire permettrait de garantir le maintien de la qualité des repas et une meilleure appréciation du travail effectué. Les gestionnaires du programme considèrent généralement que des profits de plus de 10 pour cent ne devraient pas être autorisés par le projet si l’on veut maintenir la qualité et la quantité des repas servis aux élèves. Comparaison avec d’autres programmes. Grosh et coll. (2008) ont indiqué que les frais administratifs moyens d’un repas scolaire représentaient environ 30 pour cent (allant de 10 à 55 pour cent) des coûts totaux d’un programme alors que Galloway et coll. (2009) les ont plutôt évalués à 40 %, ceci à partir de l’examen de quatre programmes mondiaux (WFP) d’alimentation scolaire d’Afrique subsaharienne — en Gambie, au Kenya, au Lesotho, au Malawi. Les coûts totaux estimés de ces quatre programmes ont varié de 28 $ EU à 63 $ EU par enfant et par an (avec une moyenne pondérée de 40 $ EU par enfant et par année) 27 . En moyenne, 59 pour cent de la dépense totale a été consacré l’achat des aliments. La contribution des communautés locales s’est élevée en moyenne à 5 pour cent de la dépense totale (avec une variation allant de 0 pour cent au Lesotho à 15 pour cent au Kenya), ou encore à environ 2 $ EU par enfant et par année (Tableau 3). 26 Dans le secteur formel, le salaire minimum est fixé à 28,7 $ EU (13 757 FCFA) par mois. Dans le secteur informel, les salaires sont inférieurs à ce seuil et varient de 12,3 $ EU à 20,6 $ EU (6 000 à 10 000 FCFA) par mois ou de 0,55 $ EU à 1 $ EU (270 à 455 FCFA) par jour. Dans le secteur agricole, le salaire minimum s’élève à un peu plus de 1 $ EU (500 FCFA) par jour, mais reste sujet à d’importantes disparités régionales. 27 Les coûts des programmes ont été standardisés en utilisant une ration quotidienne de 700 kcal par repas quotidien, pour 200 jours d’alimentation scolaire et ajusté en fonction des ruptures de services. 27 Tableau 3 : Comparaison de prix avec d’autres programmes d’alimentation scolaire en Afrique.28 Variables Kenya Lesotho Malawi Gambie Togo Nombre d’enfants 1,156,000 390,000 214,000 113,000 21,000 Nombre de jours par an 195 180 183 146 180 kcal par jour en moyenne 703 n.a. 376 551 1,150 Coûts pour les donateurs (%) 71 13 92 82 100 Coûts pour le gouvernement (%) 14 87 3 8 0 Coûts pour la communauté (%) 15 6 5 10 0 Coûts totaux par année 21,935,000 21,556,000 4,962,000 2,787,000 854,878 Coûts par enfant par année 19 55 23 24 64 Coûts standardisés par enfant et par an* 28 62 49 43 28 Note : * Ajusté à 700 kcal par jour pour une année scolaire de 180 jours. Voir l’Annexe 1 pour le modèle de calcul des prix de l’alimentation scolaire. Source : Galloway et coll. (2009) et calculs de l’auteur (2011). La ventilation des coûts dans les deux ensembles, soit dans le programme du Togo et le groupe examiné, est basée sur des hypothèses différentes, notamment en matière de nombre de jours, de quantités de nourriture et d’apport calorique des repas. Le programme du Togo est celui qui offre le panier alimentaire le plus important avec une ingestion quotidienne moyenne de 1 200 kcal. Dans les autres programmes mentionnés, les coûts ont été standardisés sur la base d’une ration quotidienne de 700 kcal et de 180 jours de fréquentation scolaire. Par comparaison, le programme d’alimentation scolaire du Togo paraît donc relativement plus dispendieux. De plus, ces coûts sont largement influencés par la présence d’un mécanisme de développement communautaire décentralisé, qui favorise les achats individuels et quotidiens ou hebdomadaires pour chaque école ainsi qu'un approvisionnement sur les marchés locaux. Il est clair qu’il existe des moyens d’alimenter les enfants qui présentent un meilleur rendement coût efficacité, par exemple la distribution de collations fortifiées au lieu d’un repas scolaire traditionnel (cantine scolaire). Une telle option permettrait de réduire sensiblement les temps de préparation et les coûts généraux. Cependant, les intentions du programme doivent également être prises en considération, notamment les efforts d’implication de la communauté et d’amélioration du revenu des femmes grâce à leur participation à l’exécution du programme. 28 School feeding: Outcomes and costs, par R. Galloway, E. Kristjansson, A. Gelli, U. Meir, F. Espejo, et D. Bundy, Food and Nutrition Bulletin, vol. 30, nº 2 - 2009, Université des Nations Unies. 28 Dans un pays largement fragile, le programme a fourni des repas de façon constante et des sources de revenus concrètes. Sa capacité à fixer et à maintenir le prix unitaire des repas témoigne de la pertinence de ses structures. Néanmoins, le fait de prévoir, au moment de l’élaboration, un scénario du pire en matière d’augmentation soudaine du prix des denrées alimentaires permettrait certainement de protéger la toute nouvelle structure de protection sociale dont on peut maintenant observer les premières manifestations.. 4.8 Bénéfices pour les enfants Inscription scolaire et fréquentation. Le programme a contribué de façon importante à l’attraction et au maintien des enfants bénéficiaires à l’école, notamment en facilitant l’accès aux enfants plus âgés qui n’étaient pas encore inscrits et en attirant de plus en plus de filles. Les résultats en matière de taux d’inscription, d’abandon, d’absentéisme et d’âge d’entrée à l’école29 sont particulièrement positifs chez les filles et ceci dans toutes les régions. En 2009–2010, l’augmentation des nouvelles inscriptions dans les écoles bénéficiaires était de 16 points supérieure à celle du groupe contrôle d’écoles (Banque mondiale 2010). Le taux d’abandon était de 0,9 pour cent dans les écoles bénéficiaires comparativement à 1,4 pour cent dans le groupe contrôle. L’absentéisme a également été plus faible chez les enfants inscrits dans une école bénéficiaire et le taux de rétention, en matière de pourcentage d’enfants fréquentant l’école chaque jour, a été de 2 pour cent supérieur à celui du groupe contrôle. Bien que l’année scolaire 2008-2009 ait été marquée par une augmentation générale des inscriptions et de la fréquentation en raison de l’initiative gouvernementale qui a permis l’abolition des frais de scolarité, l’étude d’un échantillon a permis de démontrer que celles-ci avaient été plus importantes dans les communautés desservies par le programme que dans celles qui n’avaient reçu aucun appui, particulièrement chez les filles. Le personnel enseignant dans les villages est encore largement financé par les parents. Dans les écoles des villages ruraux, les enseignants payés par la communauté sont généralement plus nombreux que ceux qui sont payés par l’État. En ce sens, les changements positifs en matière d’inscription et de fréquentation 29 L’âge moyen des filles en première année était de 6,9 ans dans les écoles bénéficiaires et de 7,6 dans les écoles contrôle. 29 scolaire dans les écoles bénéficiaires observés sont sans aucun doute attribuables aux incitatifs du programme d’alimentation scolaire. Même si les changements au niveau de la performance de l’éducation n’ont pas été examinés par l’évaluation terrain, les enfants ont affirmé ressentir des changements dans leur comportement à l’école. Ils ont affirmé qu’ils étaient plus concentrés et moins fatigués, qu’ils avaient plus de temps à consacrer à leurs devoirs et qu’ils pouvaient rester plus longtemps dans le périmètre de l’école, ce qui leur permettait de se faire des amis. Les repas scolaires ne font donc pas que soulager la faim à court terme, ils remplacent les revenus des enfants qui devaient travailler durant l’heure du déjeuner ou qui devaient parcourir une distance importante pour aller manger à la maison. Apport diététique. Le programme est opérationnel dans des zones où la sécurité alimentaire représente un réel problème. Plus de 70 pour cent des enfants habitant les zones rurales du Togo ne reçoivent pas l’apport calorique quotidien nécessaire. Or le programme fournit aux enfants un repas complet par jour et la quantité approximative de calories nécessaire à une journée d’école complète. Une évaluation nutritionnelle des aliments servis dans les écoles bénéficiaires a indiqué que l’apport calorique moyen par repas est d’environ 1 200 kcal. par jour alors que l’ensemble des repas ne fournissent généralement dans ces zones que 60 pour cent à 70 pour cent des apports caloriques nécessaires aux enfants d’âge scolaire. Le Tableau 4 ventile les contenus énergétiques généraux des repas scolaires. Tableau 4 : Valeur nutritive des rations dans les écoles primaires Type d’écoles Marges acceptables dans la valeur nutritive des rations des enfants de 6 à 12 ans. Énergie (kcal) Protéines (grammes) gras (grammes) Demi-journée 600–900 (30–45 %) 16–24 (40–60 %) 7–11 Journée complète 1 200–1 500 (60–75 %) 28–36 (70–90 %) 14–17 Jusqu’à 2 000 Au moins 40 Pensionnat (jusqu’à 100 %t) (jusqu’à 100 %) >23 Source : Bundy et coll. (2009). Les interventions en nutrition présentant le meilleur rapport coûts-efficacité sont celles qui ciblent les 24 premiers mois d’existence. Dans cette optique, la fourniture de nourriture aux enfants d’âge scolaire ne peut pas corriger les dommages causés par les manques nutritionnels 30 antérieurs. Cependant, l’alimentation scolaire peut améliorer la présence active à l’école, soulager la faim à court terme et augmenter les capacités de concentration, d’apprentissage et de performance des enfants dans les tâches spécifiques qu’ils doivent accomplir. Ces effets ne se font pas sentir uniquement mais sont plus importants chez les enfants souffrant de malnutrition. Par ailleurs, il serait possible d’obtenir des bénéfices supplémentaires en matière de capacités cognitives et de niveau d’études complété en combinant la fourniture d’aliments fortifiés et le déparasitage. 30 Les évaluations récentes ont révélé que la majorité des enfants est satisfaite de la qualité et de la quantité des repas. Les parents ont souligné que la viande ou le poisson ne sont pas inclus tous les jours aux repas et se sont dits préoccupés par la quantité de protéines fournie. De leur côté, les femmes-mamans ont affirmé qu’un taux fixe de 0,31 $ EU ne permet pas de défrayer un apport en viande suffisant pour chaque enfant (Tableau 5). Les repas pris à l’école sont plus diversifiés que ceux fournis à la maison, puisqu’ils contiennent des protéines animales, généralement absentes de la diète des enfants (Tableau 6). Pour le moment, seules les remarques des enseignants et des parents semblent indiquer que les enfants ont tiré profit d’une diète diversifiée et améliorée. Par exemple, dans les écoles visitées, non seulement le nombre d’enfants a-t-il doublé, mais ces derniers semblent moins malades. Depuis le début du programme, on n’a signalé que peu ou pas d’absences scolaires. Cependant, il faudra considérer des ajustements à la diète puisque les repas ne semblent pas offrir une balance nutritionnelle adéquate : il y a par exemple prédominance de produits vivriers et rareté de vitamines, calcium et protéines (les fruits ne sont pas encore offerts, même si cela avait été recommandé dans le document projet). Le programme examine également la possibilité d’incorporer des fortifiants sous forme de micronutriments et de compléments, incluant les fortifiants alimentaires cultivés ou transformés localement. 31 De plus, pour les 30 Bundy, D., C. Burbano, M. Grosh, A. Gelli, M. Jukes, et L. Drake. 2009. Rethinking School Feeding: Social Safety Nets, Child Development, and the Education Sector. Banque mondiale, Washington DC. 31 Le Moringa est une plante qui permet de combattre la pauvreté et la malnutrition. Elle pousse rapidement dans plusieurs types d’environnements et la plante est presqu’entièrement comestible. Les feuilles contiennent tous les acides aminés nécessaires et sont riches en protéines, en vitamines A, B et C et en minéraux. Cette plante est cultivée au Togo et une commission de l’Université de Lomé étudie actuellement ses qualités et les quantités requises pour fortifier les aliments, les ingrédients à utiliser, les modalités d’emploi et les coûts impliqués. 31 besoins liés à l’apprentissage, le programme concentre actuellement son action sur un seul repas important, une situation qui est loin d’être idéale. La répartition des apports alimentaires en deux plus petits repas, soit le petit déjeuner (par ex. une collation dont l’apport calorique est élevé) suivi d’un déjeuner moins important seraient plus propices à l’apprentissage. Cependant, des changements dans l’horaire et le type de repas offert auraient sans aucun doute des conséquences opérationnelles par exemple en matière de coûts, de disponibilité d’ingrédients adéquats pour le petit déjeuner et le déjeuner ainsi que de complication des horaires et de la charge de travail des femmes-mamans. Tableau 5 : Exemple de menu hebdomadaire dans deux régions, Savanes et Maritime Lundi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Témanoukopé (District de Gboto dans la région Maritime) Nouilles de mais + Fèves + manioc + "Ayimolou" (riz + Nouilles + pain + Riz + sauce (avec sauce de légumes huile ou sauce + fèves) + poisson poisson poisson) avec poisson/viande poisson Shalom (ville de Dapaong dans la région des Savanes) Riz + sauce tomate Nouilles + gari + Fèves + nouilles + Nouilles de riz + "Ayimolou" (riz + (avec viande ou poisson poisson sauce légumes ou fèves) + poisson poisson) arachide (avec grillé viande) Source : Agbo E., 2010b dans «Évaluation de l’opération de fourniture de repas aux écoliers des zones vulnérables du Togo, Analyse quantitative». Tableau 6 : Résumé des caractéristiques nutritionnelles de quatre types de repas Type de repas Calories (Kcal) Proteines Calcium Fer (g) (mg) (mg) Repas basé sur le riz 1 951,40 80,72 284,74 23,48 Repas basé sur les nouilles de mais, 1 295,07 48,14 841,65 21,83 le millet, et le riz Repas basé sur le« niébé » (pois noirs) 1 011,50 63,61 202,31 15,49 Repas basé sur des nouilles ordinaires 810,52 41,57 55,61 5,73 (macaroni) Critère OMS et *AFSSA 2007 (enfants de 6–21 ans) par critère quotidien 1 457,80 – 2 325 17,53 – 34,89 700 – 1 200 7 – 10 Critère pour les repas du midi : 874,80 – 1 395 10,50 – 20,90 420 – 720 4,2 – -6,0 60pourcent des critères quotidiens Notes : *Agence française de sécurité sanitaire des aliments. Source : Agbo E., 2010 b dans « Évaluation de l’opération de fourniture de repas aux écoliers des zones vulnérables du Togo, Analyse quantitative ». 32 Afin de mieux suivre les bénéfices nutritionnels du programme d’alimentation scolaire, il y a eu prise de mesures anthropomorphiques (poids/taille) chez les enfants du primaire, et ceci dans un échantillon couvrant des écoles bénéficiaires et non-bénéficiaires. Ces données ont été comparées à l’index régional de malnutrition. Une seconde collecte aura lieu à la fin du programme. Finalement, les entrevues de type qualitatif effectuées avec les parents des enfants bénéficiaires indiquent que les parents ont tendance à acheter et à consommer la même quantité de produit vivrier (mais ou riz) qu’avant le programme, ce qui sous-entend une meilleure distribution de la nourriture dans le ménage et permet aux membres, tout spécialement aux plus jeunes enfants, de tirer avantage d’une cette augmentation relative d’aliments. Effet de substitution. Cette évaluation n’a pas examiné les conséquences potentiellement négatives que pourrait avoir l’effet de substitution. En effet, si un enfant qui reçoit un repas à l’école se voit privé d’un repas supplémentaire à la maison parce que les parents diminuent sa portion, il y a réduction des bénéfices tirés du programme d’alimentation. Certains parents et enfants bénéficiaires interrogés ont indiqué que le repas scolaire était de loin le plus important – dans plusieurs cas le seul de toute la journée et que l’enfant n’a pas faim ou ne demande pas de nourriture le soir en raison de l’importance des portions disponibles à l’école. 4.9 Bénéfices économiques et sociaux dans les ménages et les communautés De façon générale, le programme a encouragé des changements positifs dans les ménages, notamment en matière de (i) comportement des enfants ; (ii) réduction de la dépense quotidienne du ménage consacrée à la nourriture, évaluée à 8-10 $ EU par mois, puisqu’au moins un repas est subventionné par le programme et que les femmes sélectionnées par le programme bénéficient d’un revenu ; (iii) sensibilisation au fait que l’amélioration des pratiques d’hygiène domestique favorise la santé ; (iv) capacité accrue de planification des dépenses du ménage et de gestion des ressources ; (v) sentiment de fierté pour avoir réussi à envoyer les enfants à l’école tout en économisant ; (vi) d’implication et intérêt plus importants des deux parents dans les questions liées à l’école. Le programme est perçu comme une source certaine de bénéfices sociaux et économiques pour le ménage. En fait, les bénéfices identifiés vont bien au-delà de l’effet de substitution 33 immédiat qui consiste à fournir aux enfants des repas à des prix subventionnés. Les ménages pauvres n’ont pas à verser à l’enfant une allocation quotidienne pour le repas et peuvent utiliser ces économies dans des activités productives ou plus probablement dans l’amélioration générale de la nutrition et de la santé du ménage. Il y a eu augmentation des inscriptions et de la fréquentation dans les écoles primaires bénéficiaires, particulièrement en ce qui concerne les filles, en partie à cause de l’importance de la pauvreté et en partie en raison du fait que les parents retirent les enfants de l’école pour que ceux-ci les aident aux champs. L’élimination des frais de scolarité, instituée par le gouvernement en 2008, ne suffit cependant pas à s’assurer que les enfants vont bien à l’école. Les ménages sont en effet devenus responsables de la fourniture de services éducatifs à leurs enfants en défrayant partiellement la rémunération des enseignants villageois. Dans les périodes de difficultés économiques, le paiement des enseignants justifie d’ailleurs souvent le retrait scolaire. Dans cette perspective, le programme d’alimentation scolaire devient une puissante mesure d’incitation à l’inscription et au maintien des enfants à l’école et un mécanisme de réduction du risque lorsque surviennent les difficultés financières. Malgré qu’ils soient limités, les bénéfices économiques sont bien réels, notamment en matière d’épargne et de revenu. On a en effet estimé à 8–10 $ EU par mois l’épargne que pouvait accumuler un ménage grâce au programme. Les femmes-mamans gagnent 1 à 3 $ EU par jour et dans certains cas, les petits commerçants ont doublé leur stock d’aliments mis en marché. Le programme représente donc pour tous ces acteurs économiques locaux une source de demande prévisible et constante en biens et services. Celle-ci est pour sa part définie par le nombre d’enfants scolarisés auxquels les repas sont fournis chaque jour et par la teneur du panier alimentaire y afférent. De façon générale, les économies locales reflètent la chaîne des actions générées par la préparation des repas, qui affectent elles-mêmes positivement plusieurs parties prenantes locales. Au cours de la première année, le programme a injecté 1 400 $ EU par mois dans chaque communauté locale, un montant qui est passé à 1 600 $ EU par mois la seconde année. Il s’agit de sommes considérables pour de petits villages dans lesquels le volume des transactions commerciales est très limité. Même s’il reste difficile de quantifier l’impact du programme sur le commerce local et ses effets multiplicateurs sur l’économie locale, les résultats tirés des rencontres tenues avec des 34 groupes de discussion comprenant des ménages et des commerçants semblent indiquer qu’il y a eu initiation d’une dynamique au sein de l’économie locale. Les transactions commerciales ont augmenté, des mécanismes d’épargne informels ont été institués et de nouvelles activités génératrices de revenus ont été créées. De plus, le projet a permis à 600 femmes-mamans de mener une activité génératrice de revenus stable. Après une période de stagnation sociale prolongée, ces femmes, qui ont appris à s’organiser et à livrer de grandes quantités de nourriture, à préparer les aliments dans le respect de pratiques hygiéniques et saines et à budgétiser leurs repas, constituent certainement la première incarnation d’un capital humain à long terme. De plus, leurs revenus sont souvent investis dans les biens sociaux destinés à leurs enfants (fournitures scolaires, services de santé) ou dans des activités génératrices de revenus. Ce sont évidemment surtout les fournisseurs d’aliments de base, de services de préparation des repas et d’autres services complémentaires (femmes-mamans, petits commerçants, petits producteurs et transporteurs) qui tirent des profits directs des activités. Cependant, lorsque les communautés bénéficiaires sont elles aussi examinées en tant que bénéficiaires, il apparaît de plus en plus clair que les programmes d’alimentation scolaire peuvent contribuer à créer une demande stable pour les aliments locaux, ce qui génère en retour des effets multiplicateurs sur l’économie et la communauté locale (Tableau 7). Jusqu’à maintenant, le potentiel de création de résultats en matière de développement local par le programme d’alimentation scolaire du Togo n’a pas été exploré. L’hypothèse de travail suppose que si les repas sont fournis localement à partir d’aliments cultivés par les petits producteurs et achetés dans la communauté ou sur les marchés situés à proximité, alors le programme d’alimentation scolaire représente une source de demande en aliments qui est stable, prévisible et peut être satisfaite localement. Dans cette perspective, les petits producteurs et leurs familles profitent des opportunités d’accès à de plus larges marchés générées par le programme. Les entrevues réalisées avec les petits commerçants (souvent les femmes ou les parents des petits producteurs) ont d’ailleurs permis de constater que depuis le début du programme, ces derniers avaient doublé leur stock de produits sur le marché. En fait, la quantité hebdomadaire d’aliments requis pour la fourniture de repas quotidiens à plus de 100 000 enfants de plus de 90 communautés est achetée sur les marchés locaux. Jusqu’à maintenant, l’augmentation des opportunités pour les petits producteurs n’a pas été démontrée. L’évaluation du programme 35 devrait donc prioriser la collecte de données y afférentes afin que l’on puisse déterminer si cette augmentation est effective. Cependant, il paraît évident que le programme d’alimentation scolaire crée chaque jour une demande prévisible et stable (en termes de quantité) d’aliments, et ceci, tout au long de l’année scolaire. Tableau 7 : Injection de liquidités dans les communautés, an 1 (2007–2008) Nombre Nombre de Coût des repas par an Coût des repas par mois Régions d’écoles repas par an CFA* $ EU** CFA $ EU Maritime 20 560,000 84,000,000 179,158.05 13,200,000 28,153.4 Plateaux 19 532,000 79,800,000 170,212.57 12,540,000 26,747.6 Centrale 13 364,000 54,600,000 116,437.24 8,580,000 18,297.28 Kara 15 420,000 63,000,000 134,350.66 9,900,000 21,107.5 Savanes 17 476,000 71,400,000 152,268.04 11,220,000 23,927.8 Total 84 2,352,000 352,800,000 752,426.56 55,440,000 118,233.5 Notes: * Le coût annuel des repas comprend tous les frais associés à leur préparation, soit les produits de base, le travail, les produits alimentaires, le transport, etc. Cette donnée est basée le coût quotidien de 0,31 $ EU par jour, multiplié par 84 écoles, pour une année de 140 jours et 22 jours d’école par mois. ** Les données en $ EU varient en fonction du taux de change de la devise. Calculs de l’auteur à partir des coûts du projet figurant au manuel d’exécution (2011) Bénéfices économiques observés. Selon les évaluations, le programme a généré des bénéfices économiques aux principales parties prenantes du programme tout en permettant le démarrage potentiel d’une dynamique de développement économique. Parents. Les parents des enfants bénéficiaires ont admis que le fait de ne pas avoir à fournir un ou plusieurs repas (le ménage moyen a deux enfants à l’école) par jour permet de réduire ses dépenses quotidiennes. Il est probable que le programme leur permet d’augmenter la disponibilité de la nourriture dans le ménage et d’acheter des aliments qui répondent aux besoins des autres membres du ménage (Encadré 4) 36 Encadré 4 : Groupes de discussions sur l’épargne Dans la région Maritime, (Temanou Kope), un père a affirmé qu’il dépensait 300 FCFA (0,60 $ EU) en nourriture par jour d’école alors que durant les weekends, il devait débourser deux fois plus. Un autre participant a déclaré qu’il épargnait 10 bols de maïs par mois, soit l’équivalent de 10 $ EU (5 000 FCFA). À Klologo (Maritime), un autre participant a fait remarquer qu’avant le programme, il dépensait plus de 16 $ EU par mois et consommait jusqu’à 40 bols de nourriture alors que maintenant, il ne déboursait que 10 $ EU et 20-25 bols pour la même période. À Kpembona (Savanes), une mère a révélé qu’elle devait auparavant utiliser un plein sac de maïs (l’équivalent de 100 kg) pour nourrir les 12 membres du ménage et ajouter à cela 2 $ EU par semaine (1 000 FCFA) d’allocation pour que son enfant puisse acheter de la nourriture à l’école. Source : Agbo E. (2010 b). L’épargne représente environ 8-10 $ EU par mois et près de la moitié de la ration alimentaire quotidienne. L’épargnée générée est investie dans (i) une meilleure distribution de la nourriture au sein du ménage, ce qui permet aux plus petits enfants de recevoir une quantité appropriée de nourriture, (ii) l’amélioration de la productivité notamment par le biais d’achat de fertilisants, d’investissements dans la production de l’arachide et d’acquisition d’animaux de reproduction ; (iii) dans certains cas, dans la réponse aux besoins croissants du programme d’alimentation scolaire (culture de légumes, vente de bois et d’eau) ; et (iv) la santé, l’éducation et l’aide aux parents dans le besoin. Les transferts nets du programme peuvent être estimés, en termes de repas et sur la base de l’enquête QUIBB de 2006, à environ 20 pour cent de la consommation annuelle des ménages. Femmes-mamans. Le programme a recruté environ 600 femmes-mamans en deux ans. Ces femmes gagnent actuellement de 1 à 3 $ EU par jour, ce qui équivaut à un revenu mensuel de plus de 60 $ EU. Il faut recruter pour chaque école de 5 à 10 femmes-mamans. Selon des communautés, le groupe recruté travaille soit pendant toute l’année ou encore avec d’autres groupes de façon rotative. Les femmes reçoivent une rémunération fixe de 0,31 $ EU par enfant, somme à partir de laquelle elles doivent acheter la nourriture et préparer/distribuer les repas. La préparation comprend : L’achat des produits vivriers, de la viande, du poisson et des légumes sur le marché, le transport, l’entreposage lorsque nécessaire, l’achat du bois et de l’eau dans la communauté et la cuisson des repas. En moyenne, une femme cuisine pour 35 à 40 enfants et 37 travaille environ 5 heures pendant l’avant-midi et le début de l’après-midi. Par ailleurs, puisqu’il s’agit d’un travail générant un revenu fiable dans un contexte de rareté des opportunités emploi, des plaintes et des conflits ont été signalés. La fluctuation des revenus dépend de plusieurs facteurs, notamment : (i) du nombre d’enfants pour lesquels des repas sont préparés. La plupart des femmes-mamans préparent pour 35 à 40 enfants, mais travaillent en équipes de différentes tailles (Tableau 8). Dans les mêmes communautés, les équipes opèrent de façon rotative ; (ii) du nombre de femmes-mamans qui se partagent le travail de préparation des repas quotidiens (les femmes-mamans préfèrent être organisées en équipes) ; (iii) de la disponibilité des articles alimentaires sur le plus proche ; (iv) de la variation des prix due à la disponibilité saisonnière; et (v) des différences régionales et des fluctuations de prix. Finalement, on a signalé des différences dans la composition des repas et l’utilisation des ingrédients. En fait, certaines femmes-mamans auraient décidé, afin d’augmenter leurs profits, de réduire dans chaque portion les quantités d’ingrédients les plus chers (souvent la viande et le poisson) pour les remplacer par une plus grande part de produits vivriers. Lorsque cela se produit, l’apport calorique reste à peu près le même, mais le niveau de protéines est moins important. Pour contrer ce phénomène, le programme devrait d’une part renforcer le suivi effectué ainsi que le rôle et la capacité des APE dans le contrôle de la quantité et de la qualité des repas et d’autre part enquêter sur les cas de profits supérieurs au détriment de la qualité. Les femmes sont également encouragées à tenir une comptabilité simplifiée qui leur permettrait un suivi hebdomadaire de leurs dépenses en nourriture (un exemplaire type devrait figurer au manuel d’opération). En plus des gains monétaires, le programme offre aux femmes-mamans la chance d’apprendre une profession dans laquelle elles acquièrent des compétences culinaires et apprennent à cuisiner pour plusieurs groupes d’individus. 38 Tableau 8 : Nombre de femmes-mamans dans les villages échantillonnés Région/Villages Nombre de femmes-famans Status Maritime Klologo 3 Cuisinaient pour l’école avant le Kovie 6 Cuisinaient pour l’école avant le Temanou kope 12 Formées par une ONG régionale Savanes Dapaong 15 (rotatif) Cuisinaient pour l’école avant le Kpembona 30 (rotatif) Tierou 12 (rotatif) Formées par une ONG régionale Source : Agbo E. (2010b), « Évaluation de l’opération de fourniture de repas aux écoliers des zones vulnérables du Togo, Analyse qualitative » Les femmes-mamans utilisent surtout leurs revenus pour répondre aux besoins sociaux (santé et éducation) et pour des investissements agricoles, notamment l’achat de fertilisants ou le le travail aux champs. En fait, puisque leur routine quotidienne leur laisse peu de temps pour ces activités, plusieurs femmes aident leur mari à assumer les dépenses permettant d’augmenter la productivité agricole. Finalement, certaines femmes ont investi leurs revenus dans d’autres activités génératrices de revenus comme la préparation de pâtisseries et de bière, l’achat d’animaux de reproduction, la culture de légumes ou l’achat et l’entreposage de produits agricoles tels que le maïs, les fèves et le millet (Tableau 9). Tableau 9 : Réinvestissement des profits dans les régions échantillonnées Maritime et Savanes Fréquence de réponses similaires Activité Maritime Savanes Kovie Temanu Dapaong Kpembona Achat de vêtements et de médicaments et 2/6 5/7 8/13 24/26 paiement de fournitures et frais scolaires* Agriculture et produits** 2/6 2/7 3/13 20/26 Ustensiles domestiques*** 1/6 2/7 18/26 Contrat d’apprentissage 1/6 2/13 Tontine 22/26 Note : *les soins aux enfants comprennent, par ordre d’importance : les soins de santé, la contribution au salaire de l’enseignant, les frais d’inscription à l’école secondaire et supérieure, les fournitures scolaires, les vêtements et les tenues pour occasions spéciales, la nourriture, les leçons de conduite aux enfants plus âgés ; **Métayage, production d’arachides, achat de fertilisants ou d’animaux de reproduction ; production de bière locale et pain. *** Vaisselle, casseroles, huile, savon et sel. Source : Discussions en groupe (Agbo E., 2010b dans «Évaluation de l’opération de fourniture de repas aux écoliers des zones vulnérables du Togo, Analyse qualitative»). 39 Petits commerçants. En général, les produits alimentaires qui ne sont pas disponibles sur le petit marché de la communauté ou du village voisin sont achetés sur les marchés des villes principales du district. Les petits commerçants qui fournissent les produits nécessaires au programme d’alimentation scolaire peuvent dont compter sur la demande en aliments créée. Chaque école doit en effet nourrir environ 200 enfants, ceci tous les jours de l’année scolaire, une demande qui, quoique de petite ampleur, reste prévisible. Les achats de produits non périssables sont effectués toutes les semaines alors que les ingrédients frais sont achetés tous les jours. Les femmes-mamans n’ont pas de fournisseur régulier et concluent la meilleure affaire sur le marché. Ceci permet à divers vendeurs de profiter de ces achats supplémentaires. Les entrevues effectuées avec les petits commerçants indiquent d’ailleurs que la demande pour certains articles a doublé depuis le début du programme et qu’ils ont multiplié par deux la quantité d’aliments apportée au marché (Tableau 10). Tableau 10 : Production locale et articles alimentaires importés. Ingrédients achetés au marché local Ingrédients importés Maïs, millet, fèves, légumes frais (surtout ocra, Riz, huile, sel, cubes de bouillon, pâtes de poivrons et tomates) manioc, paprika, poisson et viande blé et pâte de tomate Source : Entrevue avec le Directeur du Secrétariat technique (2011). Petits producteurs. Grâce aux achats effectués localement, le programme joue certainement un rôle de facilitation important dans l’accès aux marchés par les petits producteurs. En effet, les produits nécessaires chaque semaine sont vendus sur les marchés communautaires situés à proximité de l’école et sont utilisés dans la préparation quotidienne des repas fournis à 21 300 enfants de 92 communautés. On ne dispose pas encore de données quantifiées permettant de prouver que les petits producteurs profitent d’opportunités accrues, notamment parce que la provenance des aliments achetés n’est pas documentée avec exactitude. Selon certaines informations, les produits vivriers, les fèves et les condiments nécessaires à la préparation des repas scolaires proviendraient de petits producteurs locaux, qui sont souvent des parents (ou encore conjoints) des commerçants. De plus, l’approvisionnement hebdomadaire est effectué par chaque femme-maman, qui achète la quantité de nourriture nécessaire à la préparation de sa part du repas auprès de différents commerçants et ceci au meilleur prix possible. Même s’il ne fait aucun doute que le programme 40 d’alimentation scolaire constitue une demande en aliments prévisible, stable (en matière de quantités) et répartie sur toute l’année, il faudra mener des enquêtes plus poussées si l’on veut mieux saisir l’ampleur des revenus potentiels des petits producteurs, retracer la provenance des produits locaux afin d’identifier le lieu de production et mesurer quelle part de cette production est vraiment limitrophe aux zones touchées par le programme (par ex., les repas sont aussi composés d’aliments importés). Finalement, il serait important d’analyser les possibilités de liens fructueux avec d’autres programmes ciblant l’amélioration de la production agricole ou la promotion de la création d’un environnement favorable aux petits producteurs. Ces liens seraient particulièrement importants dans le cas des écoles situées dans des zones éloignées qui ne sont pas connectées aux routes et par conséquent ne sont pas accessibles aux automobiles ou aux motocyclettes. Dans ces cas, l’accès aux marchés est très coûteux et demande beaucoup de temps, ce que diminue d’autant les revenus des femmes-mamans dont une partie doit être consacrée aux frais de taxi, et ceci sans compter les heures additionnelles requises pour le parcours de longues distances. Dans ces zones (par ex. la région des Plateaux comprend 16 écoles situées en région éloignée), le programme pourrait envisager une autosuffisance partielle en appuyant la production agricole locale. Création de dynamiques économiques. Au cours de la première année d’activité (2008– 2009), le programme a injecté environ 1 400 $ EU par mois en argent comptant, ceci dans chacune des 84 communautés touchées (soit l’équivalent de 738 672 FCFA en moyenne). L’année suivante, avec 92 écoles touchées, ce montant est passé à 1 600 $ EU par mois. Le coût unitaire des repas quotidiens a été fixé à 0,31 $ EU (150 FCFA) pour toutes les régions. Les achats faits pour le programme d’alimentation scolaire peuvent avoir un effet boule de neige puisque les petits commerçants, les petits producteurs, les producteurs de légumes, les fournisseurs de services tels que les chauffeurs de taxi et les vendeurs d’ustensiles de cuisine bénéficient tous d’un revenu supplémentaire (voir Tableau 11). 41 Tableau 11 : Ressources injectées dans les communautés, Années 1 et 232 Financement global Financement par Nombre Nombre Année Par Par communauté d’élèves d’écoles Par jour Par jour semaine semaine Par mois / par mois ($ (FCFA) * ($ EU) ** (FCFA) ($ EU) (US$) EU) 16,800 2008- 84 2,520,000 5,371.05 12,600,000 26,855.20 118,163.10 1,406 2009 21,000 2009- 92 3,150,000 6,708.74 15,750,000 33,539.70 147,592.20 1,604 2010 Total 265,755.3 Ressources additionnelles dans le nombre total de communautés au cours de l’an 2 **** Élèves Écoles Par Par supplémentaires supplémentaires Par jour Par jour semaine semaine Par mois Par mois ($ an 2 an 2 (FCFA) ($ EU) (FCFA) ($ EU) (FCFA) EU) 4,300 8 630000 1337,69 3 150 000 6 684,50 13 860 000 29 429,10 Note : *Les FCFA/ $ EU que le programme alloue quotidiennement pour la préparation des repas scolaires dans la totalité des communautés bénéficiaires. Ce montant sera ensuite investi dans l’achat d’aliments sur le marché, le défraiement des coûts de transport, etc. ** Les valeurs en $ EU peuvent fluctuer en fonction du taux de change. *** les $ EU que le programme alloue en moyenne tous les mois (en calculant un nombre identique d’élèves par école) dans chaque communauté. ****Les sommes additionnelles injectées quotidiennement, hebdomadairement et mensuellement au cours de l’an 2 suite à l’intégration au programme de huit écoles supplémentaires. Source : Calculs de l’auteur à partir du manuel d’opération. Responsabilisation des enfants, des femmes et des ménages. Les enfants apprécient leurs leçons, l’apprentissage et le temps passé à l’école avec leurs pairs. Ils sont devenus des agents de changement dans leurs familles et avec leurs pairs au fur et à mesure qu’ils ont pris conscience des mesures d’hygiène et de nutrition appropriées et de l’importance de pouvoir se concentrer en classe. Plusieurs groupes issus de la communauté ont été impliqués dans l’exécution du programme à tous les niveaux ; ils ont ainsi acquis de nouvelles habiletés et ont participé aux processus de prise de décisions importantes sur l’éducation de leurs enfants et le bien-être de la communauté. De plus, les bénéfices du programme ont touché toute la communauté ; ils ont aidé à réduire les préoccupations alimentaires et financières des ménages et leur ont permis de contribuer davantage à l’éducation de leurs enfants comme de mieux planifier les ressources permettant de répondre à leurs besoins sociaux et économiques. Les communautés ont également 32 Basé sur les données tirées de l’« Évaluation de l’opération de fourniture de repas aux écoliers des zones vulnérables du Togo, analyse quantitative ». 42 acquis de nouvelles compétences ; elles sont plus sensibilisées à l’importance des mesures d’hygiène et sont devenues des contreparties dynamiques des institutions politiques et administratives locales (Tableau 12). Renforcement institutionnel. Ce programme de filet de sécurité repose largement sur le rôle joué par les institutions informelles, les ONG, les organisations à la base et les mécanismes communautaires déjà en place (les APE par exemple sont très impliquées dans l’exécution générale et la supervision du programme d’alimentation scolaire). Cette approche à base communautaire a permis de renforcer la responsabilisation et l’appropriation de la communauté en général et d’augmenter la participation des parents dans les questions collectives liées à l’école, à la santé et au bien-être de la communauté. Pour améliorer sa performance, le programme a par ailleurs besoin de la participation et de l’implication concrète des agents du Ministère de la Santé et de l’Assainissement, des membres des comités d’eau du district et communautaires et des inspecteurs d’écoles primaires, soit d’instances dont les mandats commencent à être clairs et dont les capacités sont graduellement mises en place. Dans cette optique, le programme permet la création progressive de nouvelles dynamiques institutionnelles et favorise la création de nouveaux rôles et responsabilités au sein de l’administration locale. L’Unité de gestion du programme (Secrétariat technique), qui opère au sein du cadre institutionnel formel et au niveau des autorités centrales, travaille de façon efficace mais elle aurait besoin de renforcement des capacités de coordination avec les autres secteurs et programmes de donateurs. Finalement, le fait de piloter un programme dont l’exécution et la fourniture de services reposent essentiellement sur des structures informelles mises en relation avec des structures formelles de protection sociale ou d’autres secteurs permet d’apprendre beaucoup, particulièrement en matière d’outils novateurs de protection sociale dans des zones vulnérables à l’insécurité alimentaire. Par conséquent, le mérite du programme d’alimentation scolaire ne réside donc pas seulement dans sa réponse rapide à une crise nationale, mais également dans le renforcement des capacités aux niveaux central et décentralisé et l’essai de mécanismes d’exécution susceptibles de générer les résultats les plus rapides et les meilleurs. 43 Tableau 12 : Secteurs de réinvestissement des revenus et de l’épargne réalisés grâce au programme d’alimentation scolaire Parents Femmes-Mamans Commerçants Frais de scolarité au village Frais de scolarité au village Besoins du ménage Médicaments, vaccins et autres besoins Médicaments, vaccins et autres Funérailles et autres en santé besoins en santé événements spéciaux Vêtements, ustensiles domestiques, Appui à l’agriculture via le paiement Tontine pour mototaxi des enfants à l’école du travail, l’achat de fertilisants, mobiliser des fonds l’exploitation en partage. Tontine pour mobiliser des fonds Production de bière locale, de pain, etc.. Appui aux parents dans le besoin Vêtements et ustensiles domestiques Fertilisants Contrat d’apprentissage Arachides, bière locale et autres Tontine pour mobiliser des fonds productions locales Achat d’animaux de reproduction Culture de légumes (pas dans les Savanes) Bois, eau et poulets pour vente au programme Source : Agbo E., 2010b dans «Évaluation de l’opération de fourniture de repas aux écoliers des zones vulnérables du Togo, Analyse qualitative». 44 V. Le programme d’alimentation scolaire à base communautaire en tant que filet de sécurité : un modèle pour les états fragiles et souffrant d’insécurité alimentaire Cette section cherche à savoir si le programme d’alimentation scolaire constitue un filet de sécurité adéquat dans les États fragiles et souffrant d’insécurité alimentaire. Elle retrace tout d’abord, l’origine et les principes sous-jacents à ce filet de sécurité et résume ses caractéristiques principales. Ensuite, elle examine les avantages de l’approche communautaire versus l’alimentation scolaire de type traditionnel. Elle évalue enfin les conditions qui permettraient la reproduction et l’extension du programme en tant que filet de sécurité. 5.1 Origine et principes de base Le programme d’alimentation scolaire a été mis sur pied dans des zones présentant des problèmes de sécurité alimentaire très importants en tant qu’intervention complémentaire au Projet de développement communautaire. Il a été élaboré en réponse à la crise d’insécurité alimentaire, dans un contexte où l’environnement institutionnel était faible et la présence des donateurs minime. L’exécution a été décentralisée et a impliqué plusieurs parties prenantes locales. Le recours à une approche informelle reposant sur les mécanismes à base communautaire devait lui permettre d’atteindre des résultats immédiats en utilisant des solutions en quelque sorte « prêtes à l’emploi » face à l’absence des systèmes de filets de sécurité formels. Ces solutions demandaient la mise en place d’arrangements institutionnels qui pouvaient tirer parti des mécanismes présents sur le terrain et assurer la fourniture de services et les déboursements rapides avec un certain succès. Cet aspect était particulièrement important en raison de la faiblesse importante de la base institutionnelle et des capacités. 45 Graphique 2. Comparaison de coûts Source : Elena Galliano (2011). On trouvera ci-après les principales caractéristiques de l’approche à base communautaire de l’alimentation scolaire : Le Programme repose sur des interventions communautaires en cours (CDD et EPPR), ce qui permet les synergies et l’utilisation potentielle des structures organisationnelles et d’exécution déjà présentes sur le terrain (les APE et les communautés sont bien préparées à être consultées sur les décisions stratégiques et la supervision du programme puisque l’approche CDD implique une approche basée sur la demande) ; L’exécution est basée sur les pratiques communautaires informelles courantes. En fait, le programme a simplement formalisé le système existant des femmes-mamans, qui préparaient et vendaient de la nourriture et des repas dans les écoles bien avant l’arrivée du programme. Celui-ci les a encadrées en leur fournissant des standards de qualité et de quantité à respecter (les menus sont discutés toutes les deux semaines et doivent contenir un certain nombre de calories et de poids), ainsi que des règles de fonctionnement (hygiène) et des formations en comptabilité simplifiée, etc. Les mécanismes d’exécution sont liés aux organisations et institutions à base communautaire. Puisque la mise en œuvre est essentiellement assurée à l’intérieur l’école, la gestion et la coordination sur le terrain sont en grande partie assurées par les administrateurs de l’école et les APE. Ces dernières constituent des organisations à la base bien établies, qui sont particulièrement importantes et s’expriment ouvertement au sein du village. 46 Le processus décisionnel est du ressort de la communauté. Les décisions relatives à l’amélioration de l’exécution du programme sont prises par la communauté scolaire (APE, parents, enseignants, ONG locales impliquées). Par exemple, la majorité des écoles enquêtées avaient décidé qu’il serait dorénavant préférable de disposer, pour la préparation des repas, de locaux propres et appropriés au sein du périmètre de l’école, ceci plutôt que d’avoir recours à une préparation des repas scolaires à la maison. Ceci a permis aux femmes-mamans de travailler plus efficacement. En fait, elles ont gagné du temps en restant à l’école après qu’elles aient réuni les ingrédients et soient allées chercher l’eau et le bois puisqu’elles n’avaient pas à marcher jusqu’à la maison pour la cuisson et revenir ensuite à l’école pour distribuer les repas. De plus, le fait d’avoir des équipes organisées de cuisinières a facilité le travail notamment grâce au partage des ustensiles, aux économies d’échelle réalisées (sauces, etc.), à l’entraide lorsque nécessaire, etc. La supervision et le suivi du programme sont effectués de bas en haut. Le suivi du programme est assuré par un réseau d’institutions formelles et informelles locales (régionales et communautaires), ce qui favorise une bonne coordination et un bon suivi des activités et de la qualité du programme. Au niveau communautaire, les APE assurent la supervision quotidienne du programme, également suivi de façon générale par les administrateurs scolaires et les comités villageois. Ceci demande et garantit une transparence et une imputabilité très importantes. Au niveau régional, les ONG chargées de suivre le programme acheminent les fonds aux APE sur la base des rapports de suivi produits et assurent la liaison avec le Coordinateur national du programme (ST). 5.2 Ce filet de sécurité peut-il être reproduit et faire l’objet d’une expansion Les données recueillies et l’expérience du Togo laissent entrevoir que le programme d’alimentation scolaire pourrait être reproduit dans d’autres situations d’urgence si le contexte est favorable et que les trois conditions suivantes sont réunies. Présence de capital social communautaire. Ce qui a permis au programme du Togo de bien fonctionner, c’est justement le fait que le filet de sécurité a été élaboré sur la base de mécanismes informels d’entraide et de mobilisation déjà opérationnels, notamment la présence de femmes préparant des repas pour toute l’école et autres formes de partenariat entre l’école et la communauté. La capacité essentielle à l’exécution du programme était donc déjà présente. Par conséquent, la reproduction de ce modèle dépend de la capacité des communautés ciblées à se 47 mobiliser et à utiliser non seulement les compétences et les relations existantes au niveau communautaire, mais aussi les autres formes d’organisation interne et de mécanismes de réduction du risque développés comme alternative à l’absence ou à la faiblesse du gouvernement. Cohésion et organisation communautaires. Cette approche fonctionne bien dans des zones où les communautés présentent une cohésion et une organisation communautaire relativement importante, ce qui permet un démarrage rapide des opérations, un travail d’équipe fructueux et une réceptivité face aux mécanismes de supervision et de suivi internes favorisant une plus grande imputabilité. L’implantation de ce type de programme de développement communautaire dans des communautés fragmentées pourrait nuire à son efficacité puisque plus de temps devrait être consacré à la recherche de liens positifs et de raisons justifiant la formation de partenariats assortis d’un fonctionnement conjugué et transparent. Présence d’une production alimentaire locale. Il doit y avoir un minimum de production agricole dans la communauté ou dans les zones limitrophes. Si la production locale était rare ou limitée, le programme pourrait difficilement assurer une fourniture efficace et constante de nourriture tout au long de l’année et par conséquent répondre aux besoins des écoles locales. L’achat des aliments sur des marchés autres que locaux demanderait davantage d’organisation au programme, des règles d’acquisitions spécifiques, des mesures incitatives et une implication plus importante du gouvernement et des parties prenantes du secteur privé. Expansion. L’expansion du programme est une question complexe, qui soulève encore plusieurs interrogations. Le programme est d’ampleur relativement faible, même s’il a commencé à étendre sa couverture avec la seconde phase. La phase pilote a généré de bons résultats, n’a pas éprouvé de problèmes d’exécution majeurs et a été considérée comme satisfaisante par tous les bénéficiaires. Lorsqu’une phase pilote a été menée avec succès, l’expansion des activités apparaît comme l’étape suivante la plus logique. En fait, l’évaluation de la pertinence de cette expansion dérive de différents facteurs, notamment de la fin de la période d’urgence, de la reconnaissance du succès de l’intervention pilote réalisée à petite échelle et de la volonté de permettre à davantage d’enfants d’avoir accès à son bénéfice. Par conséquent, l’expansion devient possible lorsque les commanditaires du programme peuvent et sont prêts à faire passer le programme « de l’îlot d’excellence qui dessert et responsabilise une poignée de 48 communautés à une opération d’échelle régionale, grâce à laquelle l’approche du programme profite à de plus nombreuses communautés » (Binswanger et Aiyar 2003). L’expansion du programme du Togo est tout d’abord essentiellement géographique (plus de communautés et plus d’écoles dans toutes les régions). Dans cette optique, le ciblage représente certainement l’aspect le plus important. En effet, l’augmentation de la couverture par l’ajout de nouvelles écoles soulève certaines questions incontournables : pour qui le programme à t-il vraiment été élaboré ? quels sont ceux qui devraient en bénéficier? profite-t-il à des individus qui n’ont pas besoin de nourriture subventionnée? ceci se fait-il au détriment des plus pauvres ? Au fur et à mesure que le programme augmente et se rapproche d’une couverture universelle, la proportion des enfants non pauvres risque d’être plus importante (Bundy et coll. 2009). Il s’agit en fait ici de considérer d’une part les erreurs d’inclusions qui se produisent lors de l’utilisation d’un ciblage géographique, mais pas nécessairement lorsque d’autres mécanismes plus sélectifs sont employés (lesquels ont par ailleurs leurs propres problèmes tels que les coûts sociaux potentiels causés par la stigmatisation), et d’autre part l’importance de la marge d’erreur effective. Il faut également repenser le type d’approche à l’exécution du programme, particulièrement en matière d’à-propos du maintien du développement communautaire et de l’approche informelle. En fait, cette approche n’est peut-être pas la meilleure lorsqu’il s’agit de couvrir tout le pays. Certaines zones pourraient être incapables de reproduire le schéma existant et ne pas s’être dotées de mécanismes communautaires informels suffisamment adéquats pour que ceux-ci puissent jouer un effet de levier dans l’exécution du programme. Par exemple, il est possible que cette approche ne puisse pas être appliquée en zone urbaine. Le programme pourrait également prendre de l’ampleur en intégrant des programmes complémentaires. Cette hypothèse suppose l’établissement de partenariats avec d’autres donateurs (UNICEF, PAM, PNUD, ONG internationales, etc.), avec les services sociaux locaux (au Togo, ils ne sont pas encore intégrés aux administrations locales, mais font partie des directions sectorielles des principaux ministères au niveau du district) et avec le secteur privé. Le programme a un fort potentiel d’attraction. En fait, la création de liens avec d’autres programmes est importante lorsque les avantages sont réciproques et touchent différentes périodes de l’existence, notamment afin que les bénéfices tirés par un groupe d’âge en particulier dérivent d’interventions auprès d’un groupe plus jeune. Au Togo, le programme pourrait être coordonné 49 avec le programme de développement de la petite enfance de l’UNICEF, qui s’attaque à la malnutrition et aux autres problèmes des enfants d’âge préscolaire33, ou encore avec le PAM sur les questions liées à l’enrichissement des aliments. De plus, le programme d’alimentation scolaire pourrait faire partie d’un ensemble d’interventions qui pourrait tirer avantage des effets de synergies entre la nutrition, la santé et l’éducation sur le bien-être général des enfants et des ménages. Au Togo, les conditions et les caractéristiques de ces partenariats doivent encore être examinées. Enfin, l’expansion pourrait être envisagée sous l’angle d’une augmentation ou d’une amélioration du degré d’intégration du programme dans les structures gouvernementales. Lorsque les programmes aspirent à une couverture régionale ou nationale, l’importance des liens avec la structure centrale et/ou les structures locales améliore la légitimité et la reconnaissance du programme, particulièrement lorsque ce dernier implique une meilleure réponse du gouvernement aux demandes et aux besoins des communautés. Pour que cela soit possible, il faut avoir défini des objectifs de politiques et de programmation, les responsabilités correspondantes, les critères d’imputabilité aux deux extrémités de la chaîne d’exécution et les fonds alloués. Dans ce cas, l’expansion doit aussi être examinée à la lumière de la légitimité des programmes dans les cadres de politiques, ce qui conduit en dernier lieu à la question clé du financement du programme et de sa pérennité. Le gouvernement du Togo n’a pas encore contribué au programme. Cependant, si celui-ci était endossé et faisait l’objet d’une plus grande appropriation formelle, les possibilités suivantes pourraient se concrétiser : (i) le programme de développement conduit par les communautés et basé sur des mécanismes d’exécution informels pourrait évoluer vers une exécution plus structurée dans laquelle les communautés et les mécanismes informels initiaux sont moins pertinents et ne sont plus au cœur du fonctionnement du programme, et (ii) le programme pourrait devenir vulnérable aux choix politiques et à la plateforme de programmation dans les circonscriptions électorales. De plus, l’expansion du programme risque d’entraîner une modification du modèle original, notamment en raison de changements dans les besoins et chez les parties prenantes. Par exemple, le programme d’alimentation scolaire à base communautaire du Togo a été élaboré en 33 L’UNICEF fournit une assistance nutritionnelle d’urgence aux enfants mal nourris de moins de cinq ans dans les régions suivantes : Kara, Maritime et Savanes 50 tant que filet de sécurité au cours d’une période de crise alimentaire d’urgence, un rôle qu’il a rempli tout à fait adéquatement si l’on se fie aux données collectées. Cependant, maintenant que cette situation d’urgence est résorbée, que le gouvernement élabore son propre programme politique en matière de développement et d’engagements et que le programme d’alimentation scolaire entend augmenter l’ampleur de sa couverture, quelques questions importantes doivent être abordées, notamment :  Le programme d’alimentation scolaire du Togo conservera-t-il ses caractéristiques de filet de sécurité et à qui le programme profitera-t-il si le Togo émerge de l’insécurité alimentaire et de la fragilité politique?  Le programme changera-t-il d’objectif pour devenir essentiellement un outil d’éducation important en appui au programme national en matière d’éducation?  Le programme d’alimentation scolaire devra-t-il redéfinir ses objectifs seulement sur la base des résultats en matière d’éducation des enfants?  Le programme reposera-t-il encore sur des mécanismes informels à base communautaire?  Le programme peut-il s’appliquer aux zones urbaines et aurait-il un sens dans les zones non rurales? La question la plus importante reste la question du financement de cette expansion et de son coût en fonction de différents scénarios (régional, national, etc.). Il est crucial que certaines questions déterminantes soient abordées, notamment la définition du rôle des filets de sécurité dans le programme national de protection sociale du Togo, le rôle des filets de sécurité informels et leur position face aux relations et partenariats avec le gouvernement et le rôle de l’alimentation scolaire dans les programmes des secteurs de l’éducation, de la santé et de la protection sociale. Les données collectées prouvent que ce programme a attiré de nouveaux élèves à l’école et que la pression économique sur les familles a diminué. L’éducation de base est reconnue comme l’un des piliers du développement humain et un droit fondamental. Il existe de nombreuses preuves des bienfaits de l’éducation et des liens positifs entre l’éducation et la réduction de la pauvreté. Si le programme maintient sa capacité à attirer et à garder les enfants à l’école, ce résultat peut être considéré comme un investissement important dans le capital humain. Le gouvernement et les partenaires au développement se sont montrés intéressés à la 51 poursuite et à l’expansion de la couverture du programme. En fait, le gouvernement a clairement apporté son soutien politique aux programmes d’alimentation scolaire en affirmant (dans le DSRP) qu’à long terme, ces derniers pourraient constituer un élément important du programme de protection sociale national et un appui politique à l’éducation universelle. De plus, la mise en place de programmes d’alimentation scolaire durables figure au nombre des mesures à long terme mentionnées dans le EFMFTI. Parallèlement, le programme d’alimentation scolaire a encore tout à fait le profil d’un filet de sécurité puisque les chances d’éducation sont liées à la capacité des membres d’un ménage à envoyer leurs enfants à l’école. En réalité, l’éducation des enfants dépend largement de leur inscription effective à l’école, de leur participation aux activités scolaires (les enfants ont-ils l’opportunité d’apprendre ? ont-ils accès à l’éducation ?) et de leur capacité à apprendre les matières enseignées, soit d’un ensemble de conditions liées à l’alimentation et au repos des enfants ainsi qu’à une situation économique du ménage suffisamment améliorée pour que celui- ci puisse envoyer ses enfants à l’école. Ce programme présente donc à la fois les caractéristiques d’un filet de sécurité et celles d’un programme susceptible de conduire à des améliorations dans le secteur de l’éducation. Par conséquent, les opportunités éducatives et socio-économiques offertes par programme encouragent une augmentation de sa couverture afin qu’il puisse rejoindre plusieurs autres zones et écoles vulnérables. Quelle que soit la façon dont elle est faite, l’augmentation de l’ampleur est essentiellement fonction des coûts et des contraintes budgétaires (les considérations propres aux coûts ne sont pas encore disponibles). Pour le moment, le gouvernement n’a pas les moyens financiers nécessaires au soutien de ce type d’activités. Par conséquent, l’augmentation de l’ampleur pourrait reposer essentiellement sur les partenaires au développement tels que la Banque mondiale, les autres agences des Nations Unies et les donateurs bilatéraux, avec, si possible, une contribution initiale du gouvernement. L’approche à base communautaire, qui ancre l’exécution et les responsabilités en matière de suivi dans les mécanismes informels des communautés, devrait autant que possible être conservée puisqu’elle garantit un démarrage rapide des activités sans coûts d’investissement initiaux et qu’elle met en branle des dynamiques socioéconomiques importantes dans des zones vulnérables. Finalement, le fait de maintenir et de renforcer l’approche de développement communautaire implique que certaines interventions 52 liées au programme de protection sociale et à certains aspects du programme du secteur de l’éducation continuent à être menées par le biais de filets de sécurité informels opérés par la société civile et les communautés. Le gouvernement du Togo serait probablement d’accord avec cette affirmation, ceci pour au moins deux bonnes raisons. Premièrement, la vision : L’alimentation scolaire représente un investissement dans le capital humain ; le gouvernement pourrait décider d’appuyer le succès du programme d’alimentation scolaire et de fournir aux communautés et organisations à la base les mesures incitatives nécessaires, ceci jusqu’à ce que le gouvernement soit pleinement capable d’assumer d’autres dépenses. Deuxièmement, manque de capacité adéquate. Le programme est mené avec succès au niveau local sous la direction générale d’un comité de pilotage, bien qu’il soit dans les faits « sous-traité » aux groupes à la base (APE, ONG locales et femmes-mamans) et aux communautés dont l’engagement, la connaissance et l’expérience sur le terrain permettent d’exécuter avec succès le programme. La formation des instances nationales et la délégation des responsabilités d’exécution aux autorités centrales et locales ou à d’autres circuits formels demanderait l’allocation de beaucoup de temps et de ressources au transfert de capacités et entrainerait un certain degré de tracasseries politiques. 53 VI. Conclusions et recommandations Premièrement, dans un contexte de fragilité, il reste possible d’élaborer des filets de sécurité qui reposent sur des mécanismes existants et typiquement basés sur l’engagement des communautés et de la société civile. Après deux ans d’une exécution menée par le biais de mécanismes communautaires informels, le programme d’alimentation scolaire du Togo a prouvé qu’il présentait de nombreux avantages par rapport aux approches plus centralisées et plus formelles. Compte tenu de la faiblesse de la capacité gouvernementale, le recours aux ressources locales a permis une réponse immédiate dans des délais organisationnels réduits et l’utilisation d’éléments qui ont facilité le démarrage tout en appuyant les processus de développement locaux. L’approche institutionnelle inhérente au programme a favorisé l’adaptabilité et l’appropriation. L’adaptation de la communauté a été rendue possible grâce à une exécution locale du programme. L’approche à base communautaire a en effet facilité l’appropriation du programme et préparé la pérennité en impliquant les communautés dans les différents aspects de la mise en œuvre (processus de préparation des plans de menus, cuisson et achats, suivi, etc.). Certaines données qualitatives ont démontré la présence d’une certaine cohésion sociale, notamment dans l’augmentation des interactions sociales entre les femmes qui cuisinent et entre les membres de la communauté participant aux comités du programme ou de l’école. Le processus a graduellement aidé à la création de liens positifs avec les structures décentralisées qui sont se sont montrées intéressées à apporter leur appui. Alors que les expériences menées par le programme d’alimentation scolaire soulignent le rôle important joué par les mécanismes informels dans l’exécution, la force relative de ces structures risque de constituer un défi lorsque le programme sera consolidé et prendra de l’ampleur. Déjà, au cours de ses deux premières années de mise en œuvre, le programme a en quelque sorte centré l’attention des parties prenantes sur l’idée d’une politique de protection sociale nationale inclusive. Ceci pourrait constituer un défi au fur et à mesure que le dialogue politique progresse en termes de réflexion sur la pertinence globale de l’alimentation scolaire face à d’autres outils et sur les rôles et les responsabilités des différents acteurs si le programme passe de réponse d’urgence à une intervention plus permanente. 54 Deuxièmement, la pertinence de l’alimentation scolaire en tant que filet de sécurité fait l’objet d’un large consensus au Togo, notamment en raison de la prévalence de l’insécurité alimentaire et du manque d’accès aux services de base. Le programme est rapidement passé à une couverture plus étendue grâce à la présence de modalités d’exécution simples et innovatrices qui pouvaient être implantées dans des délais très courts (en matière de ciblage, d’acheminement des transferts, de passation des marchés). Le programme a en effet dès le départ ciblé facilement ses bénéficiaires à l’aide d’un ciblage géographique qui, en raison de la pauvreté importante, risquait peu d’entraîner des erreurs d’exclusion. De plus, l’importance accordée à la fourniture locale de services et au rôle des communautés locales dans la préparation et la production des repas a permis de réduire au minimum les délais d’acheminement des transferts. L’un des aspects les plus novateurs du programme demeure le fait que les repas ont été dans la mesure du possible préparés à partir d’aliments produits localement. Le menu, qui tenait compte des goûts locaux et de la disponibilité saisonnière, a été largement préparé avec des produits locaux (provenant de petits producteurs vivant dans la communauté ou les villages limitrophes). Il semble que ces derniers aient été assez nombreux pour répondre à une grande partie des besoins du panier alimentaire, par exemple en matière de maïs, fèves, légumes (en fait très limités puisque le panier alimentaire ne contenait pas suffisamment de légumes frais), viande, poisson et épices. Les données qualitatives et quantitatives indiquent que la réponse fournie par l’alimentation scolaire a généré plusieurs bénéfices importants attendus, mais aussi inattendus. L’effet le plus direct du programme s’est fait sentir au niveau de l’inscription et de la fréquentation scolaire des enfants. Le programme a rapporté de bons résultats, non seulement au niveau de l’incitation à la fréquentation scolaire, mais aussi du maintien des enfants en classe pour toute la journée, certainement grâce à la distribution d’un repas nutritif dont ils n’auraient pas bénéficié à la maison. Les données présentées soulignent également une présence accrue et inattendue des filles issues des communautés rurales à l’école. Dans ce contexte, l’intervention a donc constitué un point d’entrée pour l’amélioration de l’accès à l’éducation et de l’apport alimentaire. En tant que mécanisme de réponse, elle offre plusieurs possibilités d’adaptation future, particulièrement en matière d’accès à des services de santé complémentaires (déparasitage). Les résultats présentés soulignent également la présence de répercussions directes sur le ménage, notamment une épargne de 8-9 $EU sur les aliments, une incitation à des 55 pratiques d’hygiène adéquates et une participation accrue des parents à l’école et dans la communauté. Les retombées des effets multiplicateurs sur l’économie locale ont été particulièrement soulignées par l’analyse qualitative. Les arrangements institutionnels du programme ont favorisé l’épargne du ménage ainsi que l’entrée directe d’argent comptant et le réinvestissement des revenus dans l’économie locale. Le programme a également indirectement instauré des mécanismes assurant un revenu stable aux APE et aux femmes-mamans pendant neuf mois ainsi que des gains supplémentaires aux petits producteurs, aux chauffeurs de taxi et aux commerçants. L’épargne du ménage et les profits générés par les femmes-mamans chargées de la préparation des repas ont été largement réinvestis dans des activités productives ou encore utilisés soit pour défrayer les frais des services d’éducation et de santé soit pour aider des parents dans le besoin. Dans des zones affectées par une crise, ces effets multiplicateurs sont particulièrement importants. L’incidence des bénéfices économiques tirés par les petits producteurs et les commerçants locaux localisés dans la zone d’influence du programme est plus élevée que dans une approche centralisée, dans laquelle les aliments seraient entièrement importés ou proviendraient de commerçants importants. De plus, le programme d’alimentation scolaire suscite une demande prévisible et stable d’aliments puisqu’il est opérationnel pendant un nombre de jours fixe par année et fonctionne à partir d’un panier alimentaire prédéterminé contenant des articles produits localement achetés hebdomadairement sur les marchés les plus proches. Les informations anecdotiques collectées au cours de l’évaluation terrain indiquent que les femmes et les parents des producteurs font souvent office de petits commerçants et ont donc appris à adapter leur demande en fonction des besoins du programme et de la demande accrue en aliments. Il faut parfois utiliser des services de transport pour acheminer les articles alimentaires à la maison ou à l’école. Les chauffeurs de taxi locaux sont disponibles et ont ainsi de meilleurs revenus. L’un des défis non résolus a trait à la composition diététique des repas scolaires. Ces derniers sont abondants, nutritifs et appréciés des enfants ; pourtant, l’option qui consisterait à introduire une diète plus équilibrée, des légumes et des fruits frais ou encore des repas fortifiés a été soulevée. Cette dernière option pourrait s’avérer particulièrement importante en raison du manque de présence régulière et abordable de fruits et légumes frais sur le marché. Certaines 56 options ont été considérées, notamment : (i) l’utilisation d’une herbe locale (fraiche ou séchée) appelée “moringa,� mondialement connue pour son contenu nutritionnel et qui fait actuellement l’objet d’études dans diverses institutions de recherche de Lomé, mais celles-ci ne sont pas complétée ; et (ii) la poursuite des partenariats potentiels avec le PAM et d’autres ONG locales et internationales, dans une perspective de complémentarité possible au programme, notamment en matière de fourniture de fortifiants alimentaires. Troisièmement, l’analyse a identifié certaines problématiques liées à une amplification et à une reproduction dans l’avenir du programme d’alimentation scolaire. L’expansion du programme est une question complexe, qui soulève encore plusieurs interrogations. Le programme est en effet d’ampleur relativement faible, mais il a commencé à étendre sa couverture avec la seconde phase. La phase pilote a généré de bons résultats, n’a pas éprouvé de problèmes d’exécution majeurs et a été considérée satisfaisante par tous les bénéficiaires. Lorsqu’une phase pilote a été menée avec succès, l’expansion des activités apparaît comme l’étape suivante la plus logique. Ici, celle-ci est tout d’abord essentiellement géographique (plus de communautés et plus d’écoles dans toutes les régions). Dans cette optique, le ciblage représente certainement l’aspect à considérer le plus important. En effet, l’augmentation de la couverture par l’ajout de nouvelles écoles soulève certaines questions incontournables : pour qui le programme à t-il vraiment été élaboré ? quels sont ceux qui devraient en bénéficier ? profite-t-il à des individus qui n’ont pas besoin de nourriture subventionnée ? ceci se fait-il au détriment des plus pauvres ? L’expansion est également liée aux contraintes en matière de coûts et de budget. Actuellement le gouvernement n’a pas les moyens financiers qui lui permettraient d’appuyer ce type d’activités. Par conséquent, cette expansion devrait essentiellement reposer sur l’apport de partenaires au développement tels que la Banque mondiale, les autres agences des Nations Unies et les donateurs bilatéraux, avec, si possible, une contribution initiale du gouvernement. De plus, l’expansion des programmes risque d’entraîner une modification du modèle original, notamment en raison de changements dans les besoins et chez les parties prenantes. Par exemple, le programme d’alimentation scolaire à base communautaire du Togo a été élaboré en tant que filet de sécurité au cours d’une période de crise alimentaire d’urgence, un rôle qu’il a rempli tout à fait adéquatement si l’on se fie aux données collectées. Cependant, maintenant que cette situation 57 d’urgence est résorbée, que le gouvernement élabore son propre programme politique en matière de développement et d’engagements et que le programme d’alimentation scolaire entend augmenter l’ampleur de sa couverture, il convient de s’interroger sur la pertinence de l’alimentation scolaire comparativement à d’autres interventions, particulièrement dans les zones non agricoles. Le programme constitue un filet de sécurité fiable et prévisible. Cet aspect est très important dans un pays considéré comme fragile en raison de sa faiblesse institutionnelle et de sa situation de crise et de post-crise. Le programme est opérationnel tous les jours de l’année scolaire dans les écoles les plus désavantagées des zones affectées par la crise. Pour cette raison, les ménages peuvent compter sur l’épargne réalisée en matière de préparation des repas, et ceci pendant toute l’année scolaire, ce qui leur permet de mieux planifier les ressources dévolues au bien-être et aux mécanismes permettant de faire face aux difficultés du ménage. De plus, le programme représente une source fiable de revenus pour plusieurs membres de la communauté (femmes-mamans, commerçants sur les marchés locaux et petits producteurs fournissant les aliments destinés aux repas scolaires). Les données collectées et l’expérience du Togo portent à croire que le programme d’alimentation scolaire pourrait être reproduit dans d’autres situations d’urgence, s’il y a présence d’un environnement favorable et que les trois conditions suivantes sont réunies : présence de capital social communautaire, cohésion et organisation communautaire, production alimentaire locale. Recommandations opérationnelles pour la suite Il faudrait renforcer les mécanismes de suivi évaluation à la base, notamment le suivi des directives en matière de respect de la qualité et de la cohérence dans la composition des repas ; On pourrait introduire dans les directives opérationnelles des mécanismes d’appui à l’amélioration de la comptabilité et des mécanismes de paiements, par exemple l’utilisation de fiches budgétaires par les femmes-mamans. Cette mesure pourrait demander une formation initiale. 58 Le programme pourrait bénéficier d’une revue de ses coûts et de comparaisons avec des programmes similaires mis en œuvres dans d’autres contextes fragiles qui présentent des considérations opérationnelles semblables. Les opportunités de partenariat pourraient être explorées afin d’encourager les synergies additionnelles et de maximiser les résultats dans les secteurs de l’éducation, de la santé, du développement agricole et de la gouvernance. Le programme pourrait mobiliser davantage l’expertise des spécialistes en nutrition sur les questions de diète et d’apport nutritionnel. La fortification des aliments est tout particulièrement à examiner. À des fins d’évaluation, plusieurs aspects restent à examiner, notamment l’équilibre entre les interventions directes et indirectes, les effets de l’alimentation scolaire sur les résultats en matière d’éducation, les impacts des concepts novateurs introduits par le programme, notamment sur les questions d’approvisionnement en aliments. Dans la planification d’une expansion éventuelle, le programme devrait examiner différentes modalités et divers scénarios de développement. Ceci permettrait de préciser les adaptations à apporter aux modalités d’exécution, de voir dans quelle mesure les mécanismes d’exécution locale doivent être conservés, et surtout, d’examiner les différentes modalités de financement, qui devraient sans aucun doute inclure des financements externes. 59 Annexe 1. Couts annuels du programme d’alimentation scolaire au TOGO ($ EU)34 An 1 (US$) Nombre Coûts Rémunération Coût Coûts Coûts x Coût total d’écoles totaux des Femmes- des des Coordination Programme des Mamans (II) aliments services du programme (I-IV) repas (I-II) des (IV) (I) ONG (III) Maritime 20 173.600 41.667 131.933 17.360 8.680 199.640 Plateaux 19 164.920 39.583 125.337 16.492 8.246 189.658 Centrale 13 112.840 27.083 85.757 11.284 5.642 129.766 Kara 15 130.200 31.250 98.950 13.020 6.510 149.730 Savanes 17 147.560 35.417 112.143 14.756 7.378 169.694 Total 84 729.120 175.000 554.120 72.912 36.456 838.488 Pourcent of total 87 % 21 % 66 % 9% 4% 100 % Par jour/enfant 0,31 0,07 0,24 0,03 0,02 0,36 Par année/enfant 43 10 33 4 2 50 Hypothèses Nombre de femmes 500 Nombre d’enfants 16.800 Nombre de jours d’école 140 Profit femme/jour (max-min) US$1–4 Profit moyen par femme/jour US$2,5 Écoles 84 Coût/enfant/repas 0,31 Services ONG 10 % Coordination du programme 5% Nombre moyen enfants/école 200 34 Calculs de l’auteur sur la base des données dans Agbo E., 2010 b « Évaluation de l’opération de fourniture de repas aux écoliers des zones vulnérables du Togo, Analyse quantitative ». 60 Coûts Coûts des totaux Coût services Coûts x des Rémunération des des Coordination Coût total Nombre repas des Femmes- aliments ONG du programme Programme An 2 ($ EU) d’écoles (I) Mamans (II) (I-II) (III) (IV) (I-IV) Maritime 22 280.213 45.833 234.380 28.021 14.011 322.245 Plateaux 21 267.476 43.750 223.726 26.748 13.374 307.598 Centrale 14 178.317 29.167 149.151 17.832 8.916 205.065 Kara 16 203.791 33.333 170.458 20.379 10.190 234.360 Savanes 19 242.002 39.583 202.419 24.200 12.100 278.303 Total 92 1.171.800 270.000 901.800 117.180 58.590 1.347.570 Pourcentage du total 140 % 32 % 108 % 14 % 7% 161 % Parjour/enfant 0,31 0,07 0,24 0,03 0,02 0,36 Par année/enfant 56 13 43 6 3 80 Hypothèses Nombre de femmes 600 Nombre d’enfants 21.000 Nombre de jours d’école 180 Profit femme/jour (max-min) 1–4 $ EU Profit moyen par femme/jour 2,5 $ EU Écoles 92 Coût/enfant/repas 0,31 Services ONG 10 % Coordination du programme 5% Nombre moyen enfants/école 228 Source : Auteur (2011) 61 Annexe 2. Modèle pour la standardisation des coûts de l’alimentation scolaire En 2009, le PAM a évalué les coûts de ses programmes d’alimentation scolaire et de ceux des gouvernements africains, puis il a comparé ces coûts en utilisant des mesures standardisées. Il s’agissait d’estimer tous les coûts des programmes d’alimentation scolaire en Afrique, incluant les coûts pour le PAM, les gouvernements et les communautés. Le Kenya, le Malawi, le Lesotho et la Gambie ont été retenus pour analyse en raison du fait que leurs repas étaient tous composés de repas chauds. Tous les coûts liés à cette étude ont été fournis par le PAM, les parties prenantes des ministères de l’Éducation et les communautés. Il y a deux programmes d’alimentation scolaire au Lesotho, le premier est localisé dans les régions montagneuses et exécuté par le PAM alors que le second est situé dans les basses terres et opéré par le gouvernement. Les coûts estimés sont ceux constitués par la moyenne des coûts de ces deux programmes. L’auteur a inclus ici les données relatives au Togo en utilisant les mêmes paramètres de calcul et l’information disponible sur les coûts. En termes de contenu calorique des repas, plusieurs programmes d’alimentation scolaire du PAM et des gouvernements fournissent environ un tiers des besoins énergétiques des enfants d’âge scolaire, comme le démontrent les programmes du Kenya et du Lesotho dans lesquels les repas offrent de 500 à 700 Kcal par jour. Le programme du Togo offre des repas dont le contenu calorique d’élève à 1 200 kcal. Afin de pouvoir comparer les coûts des différents programmes, on a procédé à une standardisation des coûts en utilisant un modèle qui calcule le nombre de jours d’alimentation et l’énergie fournie, ceci sur la base d’un repas quotidien de 700 kcal et de 200 jours d’école. Le nombre de jours exacts d’alimentation scolaire a été fourni afin que les coûts puissent être calculés. Ce dernier peut s’avérer inférieur au nombre de jours d’alimentation scolaire planifiés en raison des ruptures dans la chaine de livraison, qui se produit lorsque la nourriture n’est pas fournie en raison de problèmes d’approvisionnement ou climatiques. 62 Les coûts ont été calculés à l’aide de l’équation suivante : Cs = Cpr x [200/Dsf] x [700/Kcal] Dans lesquels: Cs = Coût par bénéficiaire Cpr = Coût réel par bénéficiaire à partir de la dépense totale du projet Dsf = Nombre de jours d’alimentation kcal = Rations planifiées en kilocalories. 63 Vii. Bibliographie ———. 2007. « Document Programme révisé pour le Togo » (2008-2012). New York : Nations Unies http://www.unicef.org/about/execboard/files/07-PL43-Togo (1) .pdf ———. 2008. « La visite du Directeur général de l’UNICEF se concentre sur l’éducation ». Communiqué de presse, septembre 2008. New York : NU. ———. 2008. « Projet de développement conduit par les communautés du Togo, Document Nº 45237-TG. 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Galloway, R., E. Kristjansson, A. Gelli, U. Meir, F. Espejo, et D. Bundy. “School Feeding: Outcomes and Costs.� Food and Nutrition Bulletin 30(2) : 2009. Grosh, M., C. del Ninno, E. Tesliuc, et A. Ouerghi. 2008. For Protection and Promotion, The Design and Implementation of Effective Safety Nets. Washington, DC : Banque mondiale. http://web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/TOPICS/EXTEDUCATION/EXTDATAS TATISTICS/EXTEDSTATS/0, contentMDK:22614780~menuPK:7196605~pagePK:64168445~piPK:64168309~theSitePK:3232764, 00.html?TGO,206 http://www.povertyfrontiers.org/ev_en.php?ID=2105_201&ID2=DO_TOPIC Institut International de Recherche sur les Politiques alimentaires. 2004. Agricultural Science and Technology Indicators. ASTI Country Brief No. 16. Washington DC: IFPRI. http://www.ifpri.org/sites/default/files/publications/Togo_CB16.pdf Revenga, A. Rising Food Prices: Policy Options and World Bank Response. Note préparée pour la rencontre du Comité de développement, avril 2008, Banque mondiale, Washington, DC. Slate, R. et A. McCord. 2009. Social Protection, Rural Development and Food Security: Issues Paper on the Role of Social Protection in Rural Development. Londres : Overseas Development Institute. U.S. Agency for International Development. Speaker’ s Corner : Protecting Livelihoods in Conflict and Fragile States. Forum en ligne 22-24 janvier, 2008 tenu et modéré par le Dr. Laura Hammond, Washington DC. www.unicef.org/wcaro/WCARO_Togo_Factsheet_General.pdf 65 Social Protection Discussion Paper Series Titles No. Title 1117 Social Safety Nets in Fragile States: A Community-Based School Feeding Program in Togo, August 2011 (also available in French) 1116 Strengthening Governance of Social Safety Nets in East Asia by Sara Giannozzi and Asmeen Khan, August 2011 (online only) 1115 International Portability of Health-Cost Coverage: Concepts and Experience by Martin Werding and Stuart McLennan, July 2011 (online only) 1114 Liberia’s Cash For Work Temporary Employment Project: Responding to Crisis in Low Income, Fragile Countries by Colin Andrews, Prospère Backiny-Yetna, Emily Garin, Emily Weedon, Quentin Wodon and Giuseppe Zampaglione, July 2011 1113 Employability and Productivity among Older Workers: A Policy Framework and Evidence from Latin America by Edmundo Murrugarra, July 2011 (online only) 1112 Cash Transfers, Children and the Crisis: Protecting Current and Future Investments by Ariel Fiszbein, Dena Ringold, Santhosh Srinivasan, June 2011 (online only) 1111 Severance Pay Programs around the World: History, Rationale, Status, and Reforms by Robert Holzmann, Yann Pouget, Milan Vodopivec and Michael Weber, May 2011 (online only) 1110 Portability of Pension, Health, and other Social Benefits: Facts, Concepts, Issues by Robert Holzmann and Johannes Koettl, May 2011 (online only) 1109 Disability and Poverty in Developing Countries: A Snapshot from the World Health Survey by Sophie Mitra, Aleksandra Posarac and Brandon Vick, April 2011 1108 Advancing Adult Learning in Eastern Europe and Central Asia by Christian Bodewig and Sarojini Hirshleifer, April 2011 (online only) 1107 Results Readiness in Social Protection & Labor Operations by Laura Rawlings, Maddalena Honorati, Gloria Rubio and Julie Van Domelen, February 2011 1106 Results Readiness in Social Protection & Labor Operations: Technical Guidance Notes for Social Service Delivery Projects by Julie Van Domelen, February 2011 1105 Results Readiness in Social Protection & Labor Operations: Technical Guidance Notes for Social Safety Nets Task Teams by Gloria Rubio, February 2011 1104 Results Readiness in Social Protection & Labor Operations: Technical Guidance Notes for Social Funds Task Teams by Julie Van Domelen, February 2011 1103 Results Readiness in Social Protection & Labor Operations: Technical Guidance Notes for Labor Markets Task Teams by Maddalena Honorati, February 2011 1102 Natural Disasters: What is the Role for Social Safety Nets? by Larissa Pelham, Edward Clay and Tim Braunholz, February 2011 1101 North-South Knowledge Sharing on Incentive-based Conditional Cash Transfer Programs by Lawrence Aber and Laura B. Rawlings, January 2011 1008 Social Policy, Perceptions and the Press: An Analysis of the Media’s Treatment of Conditional Cash Transfers in Brazil by Kathy Lindert and Vanina Vincensini, December 2010 (online only) 1007 Bringing Financial Literacy and Education to Low and Middle Income Countries: The Need to Review, Adjust, and Extend Current Wisdom by Robert Holzmann, July 2010 (online only) 1006 Key Characteristics of Employment Regulation in the Middle East and North Africa by Diego F. Angel-Urdinola and Arvo Kuddo with support from Kimie Tanabe and May Wazzan, July 2010 (online only) 1005 Non-Public Provision of Active Labor Market Programs in Arab-Mediterranean Countries: An Inventory of Youth Programs by Diego F. Angel-Urdinola, Amina Semlali and Stefanie Brodmann, July 2010 (online only) 1004 The Investment in Job Training: Why Are SMEs Lagging So Much Behind? by Rita K. Almeida and Reyes Aterido, May 2010 (online only) 1003 Disability and International Cooperation and Development: A Review of Policies and Practices by Janet Lord, Aleksandra Posarac, Marco Nicoli, Karen Peffley, Charlotte McClain-Nhlapo and Mary Keogh, May 2010 1002 Toolkit on Tackling Error, Fraud and Corruption in Social Protection Programs by Christian van Stolk and Emil D. Tesliuc, March 2010 (online only) 1001 Labor Market Policy Research for Developing Countries: Recent Examples from the Literature - What do We Know and What should We Know? by Maria Laura Sanchez Puerta, January 2010 (online only) 0931 The Korean Case Study: Past Experience and New Trends in Training Policies by Young-Sun Ra and Kyung Woo Shim, December 2009 (online only) 0930 Migration Pressures and Immigration Policies: New Evidence on the Selection of Migrants by Johanna Avato, December 2009 (online only) 0929 Ex-Ante Methods to Assess the Impact of Social Insurance Policies on Labor Supply with an Application to Brazil by David A. Robalino, Eduardo Zylberstajn, Helio Zylberstajn and Luis Eduardo Afonso, December 2009 (online only) 0928 Rethinking Survivor Benefits by Estelle James, December 2009 (online only) 0927 How Much Do Latin American Pension Programs Promise to Pay Back? by Alvaro Forteza and Guzmán Ourens, December 2009 (online only) 0926 Work Histories and Pension Entitlements in Argentina, Chile and Uruguay by Alvaro Forteza, Ignacio Apella, Eduardo Fajnzylber, Carlos Grushka, Ianina Rossi and Graciela Sanroman, December 2009 (online only) 0925 Indexing Pensions by John Piggott and Renuka Sane, December 2009 (online only) 0924 Towards Comprehensive Training by Jean Fares and Olga Susana Puerto, November 2009 0923 Pre-Employment Skills Development Strategies in the OECD by Yoo Jeung Joy Nam, November 2009 0922 A Review of National Training Funds by Richard Johanson, November 2009 0921 Pre-Employment Vocational Education and Training in Korea by ChangKyun Chae and Jaeho Chung, November 2009 0920 Labor Laws in Eastern European and Central Asian Countries: Minimum Norms and Practices by Arvo Kuddo, November 2009 (online only) 0919 Openness and Technological Innovation in East Asia: Have They Increased the Demand for Skills? by Rita K. Almeida, October 2009 (online only) 0918 Employment Services and Active Labor Market Programs in Eastern European and Central Asian Countries by Arvo Kuddo, October 2009 (online only) 0917 Productivity Increases in SMEs: With Special Emphasis on In-Service Training of Workers in Korea by Kye Woo Lee, October 2009 (online only) 0916 Firing Cost and Firm Size: A Study of Sri Lanka's Severance Pay System by Babatunde Abidoye, Peter F. Orazem and Milan Vodopivec, September 2009 (online only) 0915 Personal Opinions about the Social Security System and Informal Employment: Evidence from Bulgaria by Valeria Perotti and Maria Laura Sánchez Puerta, September 2009 0914 Building a Targeting System for Bangladesh based on Proxy Means Testing by Iffath A. Sharif, August 2009 (online only) 0913 Savings for Unemployment in Good or Bad Times: Options for Developing Countries by David Robalino, Milan Vodopivec and András Bodor, August 2009 (online only) 0912 Social Protection for Migrants from the Pacific Islands in Australia and New Zealand by Geoff Woolford, May 2009 (online only) 0911 Human Trafficking, Modern Day Slavery, and Economic Exploitation by Johannes Koettl, May 2009 0910 Unemployment Insurance Savings Accounts in Latin America: Overview and Assessment by Ana M. Ferrer and W. Craig Riddell, June 2009 (online only) 0909 Definitions, Good Practices, and Global Estimates on the Status of Social Protection for International Migrants by Johanna Avato, Johannes Koettl, and Rachel Sabates-Wheeler, May 2009 (online only) 0908 Regional Overview of Social Protection for Non-Citizens in the Southern African Development Community (SADC) by Marius Olivier, May 2009 (online only) 0907 Introducing Unemployment Insurance to Developing Countries by Milan Vodopivec, May 2009 (online only) 0906 Social Protection for Refugees and Asylum Seekers in the Southern Africa Development Community (SADC) by Mpho Makhema, April 2009 (online only) 0905 How to Make Public Works Work: A Review of the Experiences by Carlo del Ninno, Kalanidhi Subbarao and Annamaria Milazzo, May 2009 (online only) 0904 Slavery and Human Trafficking: International Law and the Role of the World Bank by María Fernanda Perez Solla, April 2009 (online only) 0903 Pension Systems for the Informal Sector in Asia edited by Landis MacKellar, March 2009 (online only) 0902 Structural Educational Reform: Evidence from a Teacher’s Displacement Program in Armenia by Arvo Kuddo, January 2009 (online only) 0901 Non-performance of the Severance Pay Program in Slovenia by Milan Vodopivec, Lilijana Madzar, Primož Dolenc, January 2009 (online only) To view Social Protection Discussion papers published prior to 2009, please visit www.worldbank.org/sp. Sommaire Ce document s’intéresse à un petit programme d’alimentation scolaire à base communautaire initié au Togo en réponse à la hausse du prix des aliments de 2007/2008. L’analyse porte essentiellement sur les leçons politiques et opérationnelles qui peuvent être tirées de ce programme, notamment dans une optique de meilleure compréhension des opportunités de duplication à plus large échelle et de pérennisation. L’étude aborde tout particulièrement la question de l’élaboration de filets de sécurité dans les États fragiles et dans les contextes où la capacité gouvernementale en matière de livraison de services aux communautés vulnérables et défavorisées reste faible et fragmentée. Ici, l’alimentation scolaire est examinée en tant qu’outil permettant l’utilisation de mécanismes informels basés sur l’implication des communautés et de la société civile. L’analyse repose sur les enquêtes qualitatives et quantitatives réalisées sur les sites bénéficiaires du programme. Elle identifie les défis opérationnels et les opportunités d’adaptation qui entourent l’expansion de l’alimentation scolaire à l’ensemble du Togo, notamment en matière de ciblage, de rentabilité, d’approvisionnement et de questions institutionnelles. La nature des bénéfices sociaux et économiques générés, particulièrement les impacts diététiques et les effets sur les ménages et la communauté locale sont également examinés. Le document cherche essentiellement à partager les leçons tirées des conclusions de l’évaluation du programme, afin que celles-ci puissent s’avérer utiles dans la préparation de programmes similaires, au Togo ou dans d’autres pays. Les résultats de l’analyse confirment les possibilités d’implantation de l’alimentation scolaire dans un contexte de faible capacité et d’utilisation du programme en tant que tremplin vers un filet social de sécurité de plus grande ampleur et plus complet. Reseau pour le développement humain A propos de cette série.... Les documents de cette série ne sont pas des publications officielles de la Banque mondiale. Ils présentent des résultats préliminaires et bruts qui sont diffusés afin d’encourager les discussions et les échanges. Toute citation et utilisation de ce document devrait ainsi tenir compte de son caractère provisoire. Les observations, interprétations et conclusions exprimées dans ce document n’engagent que leur(s) auteur(s) et ne sauraient être attribuées à la Banque mondiale, à ses institutions affiliées, à des membres du Conseil des Administrateurs ni aux pays qu’ils représentent. Pour plus d’informations, veuillez contacter le Service Consultatif pour la Protection Sociale, Banque mondiale, 1818 H Street, N.W., Bureau G8-138, Washington, D.C. 20433-0001. Téléphone: (202) 458-5267, Fax: (202) 614-0471, Courrier électronique : socialprotection@ worldbank.org ou bien visitez www.worldbank.org/sp.