67999 NOTE DE POLITIQUE NO. 30 MARS 2012 NOTE DE POLITIQUE COMMERCIALE DE L’AFRIQUE FAITS MARQUANTS Mombert Hoppe et Francis Aidoo EN AFRIQUE DE L’OUEST l’intégration régionale a Elimination des obstacles au commerce entre le progressé moins rapidement que prévu et un certain Ghana et le Nigeria: Renforcer l'intégration nombre d’engagements régionale par la mise en œuvre des engagements de politiques soit n’ont pas été traduits en termes de la CEDEAO réformes de politiques ou de réglementations, soit n’ont Les marchés mondiaux offrent d’importantes possibilités pour les pas abouti faute de mise en entreprises des pays en développement. En exportant vers les grands œuvre des réformes. marchés, les entreprises peuvent augmenter la production, la croissance et l'emploi à un rythme plus rapide qu’en se concentrant uniquement sur LES ENTREPRISES des marchés intérieurs de taille plus réduite. Les entreprises des pays en MANUFACTURIÈRES développement doivent toutefois surmonter de sérieux obstacles avant GHANEENNES signalent, parmi les principaux obstacles de pouvoir exporter vers les marchés mondiaux. à l’accroissement des échanges avec le Nigeria, des Dans ce contexte, les exportations régionales peuvent être un test paiements informels et des important et un terrain d'apprentissage pour ces entreprises. Ceci retards substantiels, des frais s’explique par le fait que les barrières à l'accès aux marchés régionaux de transit et des exigences sont souvent inférieures à celles des marchés mondiaux, les marchés des complexes pour pays voisins étant souvent similaires en termes de goût, de normes, de l'enregistrement des produits. distance et de culture. La création de marchés régionaux peut donc Les commerçants nigérians permettre aux entreprises d’étendre leurs opérations et de générer des ont depuis longtemps critiqué économies d'échelle, les rendant plus compétitives. Accéder aux le traitement discriminatoire marchés régionaux augmente également les incitations à investir et lors de la création de sociétés commerciales au Ghana, permet aux fournisseurs de se spécialiser et d'intégrer les chaînes affirmant que les protocoles d'approvisionnement régionales dont les clients finaux sont à la fois les relatifs à la libre circulation marchés nationaux et internationaux. des personnes et le droit d'établissement ne sont que En outre, il est souvent plus facile politiquement de réduire les barrières partiellement mis en commerciales au sein d’une région plutôt que sur les marchés mondiaux. application. L'élimination des obstacles commerciaux régionaux et le renforcement de l'intégration régionale n’en aident pas moins les pays à s'intégrer POUR RENFORCER LES également dans les marchés mondiaux, car les obstacles au commerce ÉCHANGES entre le Ghana régional sont souvent aussi des obstacles au commerce avec le reste du et le Nigeria, les engagements monde. existants doivent être pleinement mis en œuvre et les lois devront être En Afrique de l'Ouest, les processus et le degré d'intégration régionale appliquées. La transparence sont en retard sur les prévisions, et de nombreux engagements politiques et de meilleurs mécanismes de soit n'ont pas été traduits en termes de réformes politiques ou réclamation devront être au réglementaires, soit n’ont pas abouti faute de mise en œuvre de ces cœur de toute initiative réformes. La région reste donc faiblement intégrée, et est caractérisée par la persistance de barrières tarifaires (par exemple, lorsque les règles d'origine restrictives ne peuvent pas être remplies) ainsi que d’importantes barrières non tarifaires. WORLD BANK 1| www.worldbank.org/afr/trade Il n’existe toujours pas d'accord au niveau de la CEDEAO concernant la structure précise du Tarif Extérieur Commun et le schéma actuel pour le libre-échange régional est confronté à des défis importants. Cette note porte sur le processus d'intégration régionale en Afrique de l'Ouest, en se concentrant sur le Ghana et le Nigeria. Les deux pays représentent environ 61 % de la population et 68 % du PIB de la CEDEAO1. Ils sont déjà étroitement liés, le commerce non pétrolier bilatéral entre les deux pays étant passé de moins de 15 millions de dollars avant 2000 à plus de 130 millions de dollars US en 2010, selon les données de Comtrade. Alors que la part des exportations non pétrolières du Ghana au Nigeria est passée de moins de 0,5 % du total à la fin des années 1990 à environ 1,9 % des exportations mondiales en 2010, un document de travail récent estime leur potentiel pour les exportations du Ghana vers le Nigeria à plus de dix fois leur niveau actuel et le potentiel du commerce bilatéral au double des flux observés2. Au-delà du commerce, on observe depuis longtemps des flux migratoires substantiels entre les deux pays. De récentes estimations donnent le nombre de 125 000 émigrants ghanéens au Nigeria (OIM 2009), soit 13 % des Ghanéens à l’étranger, et plus de 50 000 Nigérians au Ghana (RDC 2007)3. Cette note évalue les défis auxquels les exportateurs de marchandises au sein de la région sont confrontés lorsqu’ils tentent de tirer parti de la zone de libre-échange de la CEDEAO. Elle met l’accent sur l'expérience de 30 entreprises exportatrices au Ghana qui ont été interviewées pour comprendre les difficultés de l'exportation vers le Nigeria sous le régime préférentiel. Les plaintes concernant le manque d’application des engagements existants sont cohérentes bien que souvent vagues. Selon cette étude, les producteurs ghanéens signalent, parmi les principaux obstacles à l'accroissement des échanges avec le Nigeria, des retards et des paiements informels importants —même lorsque que la documentation est complète— des frais de transit et des exigences pour l'enregistrement du produit. Malgré la taille relativement faible de l'échantillon, il est vraisemblable que ces résultats, par ailleurs en accord avec les travaux récents du West Africa Trade Hub (WATH) s'appliquent également à un plus large éventail d'opérateurs économiques au Ghana. L’application des engagements existants au Ghana et au Nigeria et la facilitation des flux commerciaux entre eux sont essentiels pour la libéralisation des échanges et la poursuite de l’intégration régionale. L’adoption de politiques adéquates dans ces deux grandes économies dynamiques devrait être la priorité dans un dialogue sur les politiques focalisé sur l'intégration régionale en Afrique de l'Ouest, car elle pourrait devenir un catalyseur pour une intégration plus poussée dans cette région. La suite de cette note est structurée de la façon suivante : Tout d'abord, on donnera un aperçu des politiques et des engagements commerciaux actuels entrepris dans le cadre du processus d'intégration régionale avant d’examiner la mise en œuvre de ces engagements en Afrique de l'Ouest. On se tournera alors vers une discussion de nos résultats sur les difficultés spécifiques auxquelles sont confrontées les entreprises ghanéennes lorsqu’elles exportent vers le Nigeria. Enfin, on proposera des recommandations de politiques pour relever les défis identifiés. 1 La Côte d'Ivoire, troisième plus grande économie de la région, émerge lentement d'un long conflit. 2 Voir le document de travail réalisé par Adam et Twneboah (2008). 3 Ces chiffres semblent être une estimation prudente. Le Haut-Commissariat du Nigéria au Ghana a déclaré à plusieurs reprises que plus d’un million de Nigérians vivent au Ghana. En 2008, l'Université du Ghana a indiqué que près de la moitié de leurs 1100 étudiants étrangers venait du Nigeria (OIM 2009). 2| www.worldbank.org/afr/trade Les politiques commerciales et le cadre régional en Afrique de l'Ouest Sans un accord sur le Tarif extérieur commun (TEC) ou une union douanière fonctionnelle en Afrique de l'Ouest, les pays appliquent leurs propres tarifs extérieurs4. Le Ghana et le Nigeria ont largement aligné leurs tarifs douaniers sur ce qui sera probablement un TEC, mais des différences demeurent. Selon les données de COMTRADE, la moyenne simple des tarifs extérieurs du Ghana est de 12,7 % tandis que celle du Nigeria est de 11,9 %. Toutefois, le Nigeria prélève un droit additionnel jusqu'à 100 % sur 245 lignes, augmentant le tarif moyen à 13 %. De plus, le Nigeria applique les interdictions d'importation sur approximativement 10 % des lignes tarifaires à six chiffres (Hoppe et Pitigala 2011) et envisage maintenant des droits additionnels sur certains produits. Le respect des normes reste lourd et l’utilisation détournée de normes à des fins protectionnistes est parfois mentionnée. Toutefois, en raison de l’absence de données suffisantes, aucun des deux pays n’a une mesure agrégée de l'importance des mesures non tarifaires. En l’absence d’une union douanière fonctionnelle, la zone de libre-échange (ZLE) régit les relations commerciales intra-régionales —et le Schéma de libéralisation des échanges de la CEDEAO (SLEC) est au cœur de la ZLE. En vertu du SLEC, les tarifs préférentiels pour le commerce intra -régional sont fixés à 0 % et les produits ne doivent faire face à aucune restriction quantitative. Bien que créé en 1983, le SLEC n'a vraiment débuté qu'en 1990, et a été réaffirmé dans le cadre du Traité Révisé de la CEDEAO en 1993. En principe, il couvre maintenant tous les produits d’origine communautaire et vise à assurer la libre circulation des biens et des personnes au sein de la CEDEAO. Toutefois, la part du commerce intra-régional est restée faible à environ 10 % dans la CEDEAO. L'UEMOA, le groupe régional intégrant le plus d’économies francophones au sein de la CEDEAO, est plus intégrée avec environ 11 % de commerce intra-régional bien qu’il s’agisse d’une zone économique plus petite (Goretti et Weisfeld 2008). Après plus de deux décennies, le SLEC est toujours confronté à un nombre important de défis et n’est pas appliqué de façon satisfaisante, comme l’a montré un récent rapport du West Africa Trade Hub (2010a) (USAID). Pour bénéficier du SLEC, les entreprises doivent démontrer qu’elles respectent les règles d’origine restrictives indiquées dans le schéma. Les entreprises doivent enregistrer leurs produits en utilisant un processus d’approbation de longue haleine en deux étapes (la première étape par une commission nationale qui transfère la décision à une commission régionale) qui dure environ quatre à six mois. De nombreux opérateurs du secteur privé considèrent ce processus lourd, aboutissant à un faible nombre de produits enregistrés. L’enregistrement est nécessaire pour chaque produit individuel qu’une entreprise entend exporter dans le cadre du SLEC. Ainsi, 1100 entreprises ont enregistré seulement quelques 3200 produits en 2006, dont 1325 proviennent du Nigeria et 800 du Ghana selon la Banque Centrale du Nigeria. Un système d’agrément permettant un passage transfrontalier plus rapide pour ces entreprises a également été convenu, mais il n’est pas encore appliqué. Le SLEC couvre également le commerce de transit et établit le régime de TRIE (Transit routier inter- États) pour assurer plus facilement la circulation des biens en transit sans avoir à payer des droits de 4 Les États Membres de la CEDEAO sont généralement d’accord que le Tarif extérieur de l’UEMOA sera adopté ème après une période de transition —Le plus important est l'inclusion d'une 5 bande tarifaire de 35 % à la ème demande du Nigeria . Cette 5 bande tarifaire viendra compléter les quatre bandes tarifaires existantes pour les biens sociaux (0 %), les matières premières et les produits de première nécessité (5 %), les produits intermédiaires (10 %) et les produits finis (20 %). Les États Membres de la CEDEAO ne s’entendent toujours pas sur les produits devant être classées sous la bande tarifaire supérieure et les pays continuent d’appliquer des listes tarifaires similaires mais distinctes. En outre, le désaccord sur les exemptions (temporaires) au TEC et les questions essentielles de l'harmonisation des procédures d'évaluation de produits persistent ; et il n'y a eu aucune discussion sur les autres taxes perçues à la frontière et le traitement des exemptions tarifaires. Une autre pierre d'achoppement concerne l’accord sur la façon de partager l'ensemble des recettes qui seraient perçues par l'union douanière. 3| www.worldbank.org/afr/trade douane et autres taxes. Un système de caution et de carnet uniques est prévu pour accompagner ces flux de transit. Cette initiative vise également à normaliser les limites de charge à l’essieu, à créer un régime régional d’assurance de véhicule, à harmoniser les normes des véhicules et à réduir e les barrages routiers le long des principaux corridors. Les protocoles établissent également le droit des citoyens dotés d’un document de voyage en et d’un certificat de santé valides de rester jusqu’à 90 jours dans un autre état membre de la CEDAO ava nt de devoir formellement établir une demande de résidence. Une telle demande devrait être automatiquement attribuée. Le Traité Révisé de la CEDAO de 1993 a réaffirmé les engagements pris dans les protocoles existants et stipule que les citoyens de la CEDEAO devraient être traités de la même manière que les citoyens nationaux dans l’établissement et la gestion d’une entreprise5. Des engagements en attente d’application Toutefois, notre analyse montre qu’après plus de deux décennies d’application, ces objectifs ne sont pas atteints. Même lorsqu’un produit est enregistré et que les informations nécessaires sont fournies, le franchissement de la frontière peut s’avérer difficile en raison de paiements additionnels fréquemment exigés ou d’interdictions d’importation pour certains produits. Les douanes nigérianes ne font pas la distinction entre les exportateurs de la CEDAO et les exportateurs du reste du monde dans l’application des interdictions. Ainsi, le commerce intra-régional n’est pas exempt de droit et de quota et les frontières présentent des obstacles significatifs à l’intégration régionale. Ces observations corroborent celles d’un ensemble de rapports récents du West Africa Trade Hub évaluant dans quelle mesure les lois nationales reprennent les engagements régionaux et leur degré d’application. Ces rapports indiquent également que le SLEC n'est que partiellement appliqué dans les États Membres, que les coûts commerciaux restent élevés, et que les exportateurs paient des droits de douane, même lorsqu’ils devraient bénéficier d'un traitement en franchise de droits. Le rapport sur le Ghana (WATH 2010b) montre que celui-ci bloque périodiquement l’importation en franchise de biens originaire de l’espace CEDEAO et applique un grand nombre de droits et redevances additionnels qui ne sont pas des droits de douane mais qui sont perçus sur toutes les importations. Il s’agit notamment de la Redevance statistique, de divers fr ais de traitement ou de prélèvement d'expansion des exportations. À l'exception de la TVA et du prélèvement national d’assurance maladie (NHIL), la plupart d’entre eux ne sont pas appliqués aux produits fabriqués dans le pays et donc fonctionne comme des droits d’entrée supplémentaires. Le rapport WATH souligne également que le Ghana continue d’appliquer des interdictions et des quotas à l’importation (temporaires) pour un certain nombre de produits, principalement agricoles. Le rapport sur le Nigeria décrit, quant à lui, les interdictions à l’importation et autres restrictions quantitatives, les barrières non tarifaires discriminatoires et le traitement incorrect des biens en transit comme problèmes majeurs de non-conformité avec les protocoles du SLEC. Alors que les exportateurs ghanéens se plaignent essentiellement des difficultés d’accès au marché nigérian, les négociants nigérians critiquent depuis longtemps le traitement discriminatoire lors de création de sociétés commerciales au Ghana, affirmant que les protocoles relatifs à la libre circulation des personnes et au droit d’établissement ne sont que partiellement appliqués. Les activités des négociants nigérians au Ghana sont une source de friction de longue date dans le grand public et les médias. La loi sur l’investissement du Ghana réserve un certain nombre d’activités économiques exclusivement aux ghanéens, comprenant le commerce de micro-détail, le colportage ou petit kiosque 5 ème Cf. le « protocole additionnel A/SP.2/5/90 relatif à l’exécution de la 3 étape (droit d’établissement) du protocole sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et d’établissement », indiquant que en « matière d’établissement et de services, chacun des États Membres s’impose d’accorder sur son territoire un traitement non discriminatoire aux ressortissants et sociétés des autres États Membres ». 4| www.worldbank.org/afr/trade dans tous les lieux publics, les services de taxi et de location de voiture, et les boutiques de barbiers. Toutefois, la loi stipule que les entreprises commerciales, appartenant tout ou en partie à un non- ghanéen, et impliquées uniquement dans l’achat ou la vente de biens, peuvent opérer si elles investissent au moins 300 000 dollars US et emploient au moins dix ghanéens6. Un seuil d’investissement équivalent plus bas, 50 000 dollars US, est fixé pour les autres activités. La nature discriminatoire de ces dispositions semble aller à l’encontre des traités et des protocoles existants de la CEDEAO7, et plusieurs plaintes ont fait état de l’application discriminatoire de ces dispositions au détriment des nigérians. La question a refait surface à plusieurs reprises durant les quatre dernières années, notamment lorsque des organes de presse et associations nigérianes telles que NUTAG, Union nationale des Associations nigérianes des commerçants, ont rapporté que cent boutiques de détail de commerçants nigérians ont été fermées durant le mois de septembre 2010 sous prétexte de non-conformité avec la loi sur l’investissement. NUTAG estime qu’environ un millier d’entreprises au Ghana sont menacées. D’autres plaintes signalent que des sociétés nigérianes dans d’autres secteurs éprouvent des difficultés particulières pour obtenir des licences d’exploitations et de construction —mais elles sont difficilement vérifiables. Bien que ces questions semblent avoir moins retenues l’attention récemment, les tensions entre les commerçants du Ghana et du Nigeria restent latentes. S’enregistrer au SLEC : Un long processus Les Ghanéens et d’autres exportateurs se plaignent que l’accès au marché du Nigeria est extrêmement difficile. Une récente étude de la Banque mondiale (2009) a révélé que jusqu'à 15 % des importations du Nigeria entrait dans le pays de manière informelle, en grande partie le long de la frontière Bénin- Nigeria, où les produits Ghanéens entrent également. Cette note fournit des données plus structurées sur les difficultés que rencontrent les exportateurs ghanéens, en s’appuyant sur l’expérience de 30 entreprises ghanéennes exportatrices au Nigeria. Bien que ces entreprises ne représentent qu’une faible part des opérateurs économiques au Ghana, nous croyons que leur expérience est également représentative des autres opérateurs. Même si les entreprises interviewées connaissent le SLEC, seulement la moitié d’entre elles est enregistrée au titre du régime, expliquant que celui-ci n’est que partiellement appliqué et que des paiements informels sont encore nécessaires pour accéder au marché nigérian. Elles soutiennent également que les exigences d'enregistrement auprès des autorités nigérianes sont discriminatoires à l'égard des producteurs non-nigérians et les interdictions d'importation au Nigeria sont aussi appliquées aux exportations des producteurs de la CEDEAO. Ces restrictions à l'importation sont non seulement incompatibles avec les engagements de l'OMC ; elles violent aussi le SLEC qui stipule spécifiquement que les exportateurs régionaux ne devraient pas être soumis à des restrictions quantitatives. La principale plainte constamment exprimée tout au long des entrevues est le manque de moyens officiels pour obtenir réparation. Les 30 entreprises manufacturières interrogées étaient ou avaient été exportatrices vers le Nigeria par voie terrestre et ont une expérience substantielle (de neuf ans et demi en moyenne). Leurs activités couvrent un large éventail de produits manufacturés (vêtements et textiles, nourriture et boissons, plastique, aluminium, produits pharmaceutiques, etc.). Plus de 90 % des entreprises de l’échantillon ont déclaré au moment de l’enquête qu’elles exportaient au Nigéria et la quasi -totalité qu’elles exportaient également dans d’autres pays de la sous-région. Pour un tiers d’entre elles environ, les 6 Une nouvelle loi du Centre de promotion des investissements du Ghana (GPIC) est en cours de discussion et augmenterait le seuil d’investissement à un million de dollars, mais elle n’a pas encor e été adoptée. 7 Les protocoles de la CEDEAO sur le droit d’établissement autorisent la possibilité pour un État Membre de en exclure certaines activités spécifiques ; mais il n’apparait pas clairement si le Ghana a formellement exclu le secteur de la distribution. 5| www.worldbank.org/afr/trade exportations représentent une part significative de leurs activités, indiquant que plus de 50 % de leur production était exportée. La part moyenne des exportations en partance pour le Nigeria pour toutes les entreprises interviewées était de 45 %. Comme déjà indiqué, seulement 17 des 30 grands exportateurs ghanéens interviewés se sont enregistrés et ont utilisé le SLEC. Parmi ceux-ci, environ 60 % avaient reçu une formation sur le SLEC, tandis que ce chiffre n’était plus que de 17 % pour les entreprises non inscrites, et parmi elles, 17 % ont indiqué que cette formation n’était pas suffisamment détaillée. Sur les 14 entreprises ayant déclarées avoir reçu une formation sur le SLEC, plus de 70 % ont affirmé s’être enregistrées ultérieurement. Ces chiffres, bien que subjectifs et fondés sur un petit échantillon, indiquent que la formation joue un rôle positif pour les entreprises s’enregistrant au SLEC. Parallèlement, outre une connaissance insuffisante du régime, les entreprises ont citées l’inefficacité de sa mise en œuvre et de faibles volumes d’exportation au sein de la CEDEAO comme raisons pour ne pas s’enregistrer. Bloqués à la frontière : paiements informels et délais Alors que les entreprises bénéficient dans une certaine mesure du SLEC, seulement un tiers des répondants a indiqué que les autorités frontalières appliquent scrupuleusement ce régime. Par conséquent, les entreprises pensent que les bénéfices pourraient être sensiblement plus importants si le SLEC était réellement appliqué. Sur les 17 entreprises affirmant avoir bénéficié du SLEC, plus de 40 % ont déclaré ne pas avoir bénéficié d’entrée en franchise de droits sur le marché nigérian auparavant, la raison étant principalement qu'elles n'avaient pas payé de pots de vin ou autres paiements informels8. Plus important encore, près d’un tiers des exportateurs ont déclaré que leurs produits avaient parfois été interdits d’entrée au Nigeria. Ces barrières étaient en général justifiées par des interdictions d’importation officielles nigérianes et s’appliquaient à des produits tels que les biscuits, les pots en céramique, les jus de fruits, les packs de boissons alcoolisées, les objets en bois et les produits pharmaceutiques. Toutefois, comme souligné précédemment, le refus d’accorder le même traitement aux producteurs de la CEDEAO qu’aux producteurs domestiques violent les traités et les protocoles de la Communauté, en plus d’être incompatibles avec les traités de l’OMC. En plus de payer des droits de douane, les entreprises se plaignent de la lenteur excessive des inspections et des exigences de documentation, des délais et de la corruption aux frontières, des exigences d’inscription réglementaire au Nigeria avec la NAFDAC, Agence nationale pour le contrôle de l’Alimentation et des produits pharmaceutiques, et des coûts élevés pour le transit par le Togo et le Bénin. Selon les exportateurs, l’inspection physique à la frontière exige le déchargement et le rechargement des marchandises, augmentant substantiellement les coûts et les délais. Les différends sur les exigences officielles en matière de documentation et l'exactitude des documents présentés s’ajoutent aux retards et, en l’absence de transparence concernant les documents nécessaires, le potentiel d’extraction de rentes augmente. Ainsi, la congestion est la norme et les brimades sont la règle pour les exportateurs ghanéens au poste-frontière de Semé, point d'entrée au Nigeria. Nos entretiens révèlent que les entreprises partent du principe que les biens ne peuvent entrer au Nigeria sans paiement informel aux fonctionnaires des douanes et aux autres fonctionnaires de sécurité, même si les négociants ont toute la documentation, y compris les documents d’enregistrement au SLEC. La subornation et la corruption sont la règle et ont un impact significatif sur le commerce transfrontalier —bien que les informations obtenues à partir des entretiens ne nous 8 Nous avons observés que certains exportateurs ignorent s’ils paient, ou non, des droits dans la mesure où aucun reçu n’est généralement émis. 6| www.worldbank.org/afr/trade permettent pas d'estimer la valeur de ces pots-de-vin ou les retards correspondants aux barrages routiers et postes frontaliers. Il est frappant de constater que seulement deux des répondants ont déclaré n’avoir jamais payé de pots-de-vin lorsqu’ils exportaient au Nigeria, tandis que les autres ont affirmé que le paiement de pots - de-vin aux frontières était inévitable et qu'ils en avaient payés directement ou par l'intermédiaire de leurs transporteurs. Les exportateurs qui ont refusé de corrompre les douaniers ont subi d’importants retards avec toutes sortes d’excuses, même si leurs documents étaient en règle. Il a été rapporté que les biens des exportateurs pouvaient être retardés à la frontière pendant plus de trois semaines. Aussi longtemps que ces paiements seront exigés, indépendamment du fait de savoir si un produit est admissible pour entrer en franchise de droits, le régime du SLEC ne stimulera pas le commerce régional. Dans le même temps, lorsque les documents sont incomplets, des paiements non officiels permettent les transactions commerciales, empêchant les organismes concernés d’exercer leurs mandats. Dans un certain nombre de cas, des fonctionnaires des douanes nigérianes se sont plaints de faux certificats d'origine de produits ghanéens où des produits étaient simplement reconditionnés au Ghana dans le but d’obtenir un accès en franchise de droits au marché nigérian. Les défis de l’enregistrement d’un produit Les produits alimentaires et pharmaceutiques doivent être certifiés par la NAFDAC ( National Agency for Food and Drug Administration and Control). Cependant, acquérir la certification NAFDAC est perçu comme un obstacle supplémentaire au commerce avec le Nigeria. La certification est astreignante et complexe et les frais d'inscription sont excessifs (UE 2010). Les produits doivent être enregistrés avant d'être déchargés au Nigeria, et la certification et l'enregistrement exigent qu'un échantillon du produit soit importé au Nigeria. Ceci nécessite à son tour une licence d'importation supplémentaire avant l'importation de l'échantillon. Les produits ne peuvent être enregistrés que par une filiale localement enregistrée ou un partenaire local devant avoir une procuration de la société de production, ce qui peut créer des problèmes juridiques. De plus, selon le site Internet de la NAFDAC, les frais d’enregistrements sont 10 à 15 fois plus élevés pour les produits importés que pour les produits fabriqués localement, et cet enregistrement nécessite d’être renouvelé tous les cinq ans, à 60 à 100 % des coûts initiaux d’enregistrement. La base de données de l’UE sur l’accès au marché (UE 2010) montre que les entreprises doivent enregistrer chaque type de produit et doivent s’acquitter d’une redevance d’enregistrement séparée pour les différentes tailles du même produit. En plus de l’enregistrement à la NADFAC, les produits soumis à d’autres normes obligatoires émises par SON (Organisation des normes du Nigeria) doivent démontrer leur conformité et respecter un processus d’enregistrement en deux étapes. Les types de produits doivent être certifiés par le bureau de SON dans le pays exportateur avant son importation au Nigeria, et obtenir un certificat pour le produit (valide pendant trois ans) si l’exportateur fournit un rapport de tests acceptable. Par la suite, chaque livraison devra être ainsi certifiée. De toute évidence, l’enregistrement et la certification à la NAFDAC et à SON présente un obstacle redoutable pour les fabricants ghanéens qui tentent d'exporter leurs produits vers le marché nigérian dont certains exigeant une certification. Difficultés pour le transit : coûts supplémentaires au Togo et au Bénin Les trois quarts des exportateurs de notre échantillon ont affirmé qu'ils doivent payer des frais de paiements informels importants avant d'être autorisés à transiter par le Togo et le Bénin. Certains exportateurs les incluent dans les indemnités générales de transport qu'ils paient aux transporteurs. Les 7| www.worldbank.org/afr/trade paiements informels aux barrages routiers s’ajoutent à ces coûts. Même la différence de langue sert de prétexte pour soutirer d’autres paiements informels. Le récent rapport WATH (2010a) se réfère à ces paiements qui semblent s’apparenter à des certificats d'inspection de véhicule (payable par année au Bénin, mais par voyage au Togo). Au Togo, les transporteurs ont également signalé des délais importants dans l'obtention des documents aux frontières, l’obligation de payer des frais d'escorte et le non-respect du régime de cautionnement douanier, laissant les transporteurs se battre pour récupérer les paiements de cautionnement (WATH 2011a). Le rapport spécifique sur le Bénin (WATH 2011b) rapporte que le régime n’est pas plus fonctionnel au Bénin et décrit la façon dont les marchandises en transit au Bénin sont assujetties à une accumulation de taxes supérieures à 6 %, ainsi qu’à des frais d’escorte douanière de plus de 100 dollars US par camion, même lorsque les scellés des conteneurs sont correctement appliqués. Ces pratiques aux frontières du Togo et du Bénin sont contraires aux traités commerciaux de l’OMC, ainsi qu’au protocole du SLEC qui prévoient la libre circulation des biens, des services et des personnes. En vertu des dispositions du SLEC, le commerce en transit ne devrait être régit que par un carnet et un cautionnement unique. Rendre le SLEC opérationnel Rendre le SLEC opérationnel sera la première étape pour parvenir à un accord de libre-échange fonctionnel à l'échelle de la CEDEAO ; il permettra aux entreprises de la CEDEAO de bénéficier de plus grands marchés, d’accroître la spécialisation et d'intégrer les filières d'approvisionnement régionales. Ceci favorisera ensuite la croissance, créera des emplois et augmentera la productivité comme première étape pour devenir plus compétitif sur les marchés mondiaux. Enfin, pour en garantir la crédibilité, il sera important de démontrer que la ZLE peut être efficacement mis en œuvre avant l'application du tarif extérieur commun, encore à convenir, et la réalisation d’une union douanière. Malgré tous les défis à surmonter pour les entreprises, exporter au Nigeria est rentable et offre un potentiel de croissance des exportations. Nos conclusions concordent avec celles d’une étude récente du WATH, en ce que le SLEC n’est pas correctement appliqué, la raison clé étant le manque de volonté politique des gouvernements. Le Traité Révisé de la CEDEAO de 1993 prévoit un règlement des différends entre les parties concernées soit par accord direct sans préjudice des dispositions du traité et des protocoles pertinents, soit par une décision exécutoire de la Cour de la Communauté. Toutefois, seuls les États Membres ou la Commission peuvent renvoyer une affaire à la cour, celle-ci n’ayant aucun mécanisme officiel de règlement des différends directement accessible aux opérateurs du secteur privé9. Probablement en raison des activités de surveillance accrues menées dans le cadre du programme Borderless West Africa (Afrique de l'Ouest sans Frontières), un certain nombre de pays ouest-africains ont mis en place des permanences téléphoniques de plainte pour les conducteurs souhaitant signaler les tracasseries routières. Il n’existe pas de données sur l’utilisation de ces nouvelles « hotlines ». Cependant dans la mesure où elles sont directement reliées aux organismes nationaux chargés de l’application de la loi, leur utilisation risque fort d’être affectée par les préjugés à l’encontre de ces mêmes organismes. Depuis 2007, les ministères du Ghana et du Nigeria se sont réunis pour discuter des questions de commerce bilatéral, le Nigeria se concentrant sur le traitement des commerçants nigérians vivant au Ghana et le Ghana sur les difficultés auxquelles sont confrontées ses exportateurs. Les deux pays ont rédigé un accord bilatéral de commerce et l'investissement stipulant qu’ils consentent à mettre 9 Seulement en cas de violations des droits de l'homme le tribunal compétent pour se prononcer sur les cas présentés par les citoyens individuels de la CEDEAO. Les États membres de la CEDEAO ont donné ce mandat spécifique à la cour en 2005. Cependant, il ne semble pas y avoir de cas testant l’amplitude de ce mandat et si, par exemple, une plainte présentée par un individu en ce qui concerne l'humiliation à un poste frontière serait acceptée par le tribunal. 8| www.worldbank.org/afr/trade pleinement en œuvre le protocole de la CEDEAO sur la libre circulation des biens et services (chapitre VII du Traité Révisé de la CEDEAO de 1993) pour faciliter la libre circulation des échanges entre les pays, tout en respectant les règles d’origine telles que définies dans les protocoles de la CEDEAO. L'accord stipule également que les deux parties feront des dispositions spéciales dans leurs lois sur l'investissement pour les ressortissants de la CEDEAO. Il prévoit la création d'un Comité mixte permanent, l'harmonisation des procédures réglementaires et l'inclusion de dispositions spéciales d'investissement. L'accord réaffirme également le droit des citoyens en possession d’un titre de voyage et d’un certificat de santé valables de rester jusqu’à 90 jours dans un autre pays membre de la CEDEAO. En principe, aucune de ces dispositions n’est nouvelle ; elles ne reflètent que des engagements existants au niveau de la CEDEAO. Le Conseil économique fédéral du Nigeria a approuvé la signature de l'accord, bien que celle-ci n’ait pas encore eu lieu. L'accord ne faisant que réaffirmer les engagements déjà pris dans les traités de la CEDEAO, sa valeur réelle résidera dans un effort renouvelé pour mettre ces derniers en œuvre. Il devrait être un soutien plutôt qu’un obstacle au processus d'intégration en cours, et pourrait fonctionner comme un catalyseur pour une application élargie aux autres États Membres. L'accord prévoit par ailleurs de régler les différends par les voies diplomatiques. Le dédouanement au Ghana s’est récemment considérablement amélioré depuis que la société privée GC Net assure la gestion du traitement électronique des documents commerciaux et douaniers, ainsi que la facilitation du commerce de transit vers les pays enclavés à travers le Ghana. Bien qu'il y ait déjà eu un début de collaboration entre la NAFDAC, le Conseil des aliments et produits pharmaceutiques (FDB) et le Conseil ghanéen des normes (GSB) pour faciliter les échanges de biens produits localement, il est difficile de déterminer si des résultats tangibles ont été accomplis au niveau de l’harmonisation des normes ou de la reconnaissance mutuelle des résultats des tests, des évaluation de conformité et des normes. Recommandations Il sera crucial, compte tenu de l’importance politique et économique du Ghana et du Nigeria dans l’Afrique de l’Ouest, de résoudre les problèmes identifiés. Les réformes réussies dans ce contexte seront susceptibles d’être un catalyseur pour une plus grande intégration régionale et intra-régionale. Pour renforcer le commerce entre le Ghana et le Nigeria, les engagements existants devront être pleinement mis en œuvre et les lois devront être appliquées. La transparence et de meilleurs mécanismes de réclamation devront également être au cœur de toute initiative. Un accès amélioré à des mécanismes impartiaux pour obtenir la réparation des torts et le règlement des différends renforcerait également le respect des lois et engagements existants. Par ailleurs, la simplification des procédures commerciales à la frontière, des exigences d'enregistrement des produits pour répondre aux normes nationales et, en particulier de l'enregistrement dans le cadre du SLEC, s’impose comme une nécessité. Ce processus impliquerait la révision des lois existantes et de la fiscalité et, à moyen terme une collaboration accrue entre les agences réglementaires et les autres. En outre, un mécanisme devrait être créé pour assurer l’évaluation de l’amélioration de la transparence, de la réduction de l’arbitraire et de la simplification des procédures. Les deux pays devraient accélérer l’élimination des obstacles restants dans les échanges de biens pour permettre à leurs entreprises un meilleur accès aux principaux marchés régionaux. De plus, s'attaquer aux obstacles auxquels les exportateurs ghanéens font face au Nigeria créerait un environnement politique plus favorable à amélioration de la situation des commerçants nigérians au Ghana. Dans le cadre de l’amélioration de la transparence, les deux gouvernements devraient publier une synthèse aisément accessible des procédures en vigueur et des frais formels et redevances perçus aux 9| www.worldbank.org/afr/trade frontières, et garder ces informations à jour. Celles-ci devraient inclure la publication d’autres exigences réglementaires, comme les exigences d’enregistrement des produits au Ghana et au Nigeria, dont les documents nécessaires aux frontières. Les organismes de normalisation concernés devraient ensuite mettre ces informations en ligne sur Internet. Pour élargir le partage de ces informations, le Conseil de promotion des exportations du Ghana pourrait intensifier ses activités de formation pour le secteur privé, à destination des petites entreprises, et s'impliquer dans les sommets d'affaires régionaux ou bilatéraux. Une meilleure transparence créerait un environnement dans lequel les opérateurs économiques connaissent leurs droits et leurs obligations et augmenterait leur confiance dans l’utilisation des voies de recours10. Grâce à cela, les ministères respectifs du commerce et des finances des deux pays pourraient examiner les procédures existantes et évaluer le respect des engagements déjà pris dans le cadre de la CEDEAO, particulièrement si les résultats de cette évaluation ont été rendus publiques. Cet examen non seulement améliorerait la transparence, mais pourrait également permettre l’élimination des obstacles (temporaires) au Ghana et des interdictions d’importation au Nigeria, et l'application uniforme des procédures déjà existantes. La poursuite de la transparence devrait être complétée par des initiatives visant à simplifier les procédures et les exigences en matière de documentation aux frontières —c.-à-d. réduire le nombre d'organismes présents, renforcer la collaboration et la délégation entre ces organismes, et examiner et éventuellement réduire et consolider le nombre d'impôts et de frais à payer aux frontières. Ceci permettrait de diminuer le nombre de transactions entre commerçants et fonctionnaires et diminuerait les coûts et le temps nécessaires à la traversée des frontières. Créer un mécanisme de guichet unique et un point unique de paiement des transactions commerciales serait un des objectifs à long terme pour réduire la possibilité d'extorquer des paiements illégaux. Pour que ces réformes aient une chance de succès, un soutien politique inconditionnel de haut niveau, ainsi que celui de tous les organismes présents aux frontières sera nécessaire. La responsabilité de ces initiatives pourrait être assurée conjointement par les services de l’immigration et des douanes du Ghana (Ghana Immigration Service et Ghana Revenue Authority) et les services de l’immigration, des douanes et le groupe de travail sur la facilitation des échanges du Nigeria (Nigeria Immigration Service, Nigeria Customs Service, et Nigeria Task Force on Trade Facilitation) Les gouvernements ghanéens et nigérians devront aborder deux autres questions importantes et lancer des initiatives pour : (a) encourager le changement de comportement —en particulier celui des fonctionnaires frontaliers— pour lutter contre la corruption et les paiements informels ; et (b) établir des mécanismes impartiaux permettant l’utilisation de voies de recours et le règlement des différends et assurer leur fonctionnement, ce qui ne semble pas exister à ce jour. Bien qu’encourager un changement de comportement par la formation et une professionnalisation accrue constitue un projet à long terme, l'accent initial devrait être mis sur le renforcement des mécanismes déjà établis dans les cas de harcèlement. Il sera essentiel d’assurer la conformité avec les lois et d’induire un changement de comportement en modifiant l'équilibre des forces vers les utilisateurs de l'infrastructure commerciale. Maintenir l’anonymat des plaintes pourrait contribuer à accroître l’utilisation du système, les opérateurs économiques étant souvent réticents à l'utiliser de peur d'accroître la répression par les agents frontaliers. Les mécanismes pourraient également être élargis pour recevoir les plaintes d’utilisateurs dans les cas où les autorités frontalières n’appliquent pas les procédures de façon correcte sans pour autant exiger des paiements informels. Ce type de mécanisme pourrait d'abord être testé en tant qu’opération pilo te 10 Des centres d’information frontaliers récemment créés à Aflao (Ghana) et Kodjoviakopé (Togo) améliorent déjà la transparence, mais la publication de ces informations officielles par les organismes frontaliers soutiendrait cette initiative. . 10| www.worldbank.org/afr/trade aux frontières d’Aflao et de Semé avant d'être étendu à d'autres postes frontaliers. L'engagement politique des hautes autorités sera là aussi nécessaire pour assurer que les plaintes individuelles sont suivies d’effet, générant ainsi progressivement la confiance dans le système et conduisant à un cercle vertueux. Au-delà des initiatives nationales, les États Membres pourraient faire pression pour établir un point d'investigation à l'échelle de la CEDEAO, éventuellement dans le cadre de la Cour de justice, qui servirait d'interlocuteur officiel pour demander réparation des torts lorsque les traités de la CEDEAO portant sur la libre circulation des marchandises, des personnes et du transport ne sont pas appliqués. Des indicateurs mesurables devront être mis au point pour évaluer la capacité des réformes et initiatives à stimuler les échanges entre les deux pays. Ainsi, le nombre d'interactions avec les fonctionnaires ou le délai moyen de passage de la frontière dans chaque sens pourrait être enregistré. La collecte de données anonymes sur le montant des paiements formels et informels que les commerçants acquittent pour franchir la frontière pourrait être utilisée pour établir les tendances en matière de gestion des frontières. Enfin, les statistiques sur le nombre de plaintes déposées et les verdicts rendus permettraient un meilleur suivi de l’évolution l'équilibre des forces entre fonctionnaires et commerçants. Parallèlement à ces réformes procédurales, les deux Gouvernements devront assurer le suivi de la révision des lois et des procédures, et travailler à la mise en conformité de leurs politiques commerciales, d'investissement, et autres —ainsi que de leur application— avec les engagements existants de la CEDEAO. Le commerce entre le Ghana et le Nigeria bénéficiera également d’une collaboration approfondie entre la NAFDAC, le FILS, le GSB, et le FDB. Ceci comprend l’établissement de la reconnaissance mutuelle des normes et des certificats de conformité, ainsi que la réduction des coûts des procédures d'enregistrement et leur simplification. Toutes les initiatives doivent être structurées de manière à assurer la cohérence avec les engagements existants et devraient être ouvertes à d'autres organismes de normalisation intéressés dans la région. Les questions de paiements liés au transit par le Togo et le Bénin devront être abordées dans une logique de corridor — par exemple dans le cadre de l'initiative du corridor Abidjan-Lagos soutenue par la Banque mondiale. À propos des auteurs Mombert Hoppe est économiste au Département de développement économique et de réduction de la pauvreté de la région Afrique de la Banque mondiale. Francis Aidoo est consultant indépendant basé à Accra. Ce travail est financé par le Fonds fiduciaire multi-donateurs pour le commerce et le développement soutenu par les gouvernements du Royaume-Uni, de la Finlande, de la Suède et de la Norvège. Les opinions exprimées dans ce document reflètent uniquement celles des auteurs et ne sont pas nécessairement les points de vue des bailleurs de fonds, du Groupe de la Banque mondiale ou de ses administrateurs. Références Adam, Anokye et George Tweneboah. 2008. « The Changing Trade Pattern of Emerging Economies: Gravity Model of Ghana’s Trade Flow ». Disponible sur le site Internet SSRN : http://ssrn.com/abstract=1327569. Banque mondiale. 2009. « Nigeria: Employment and Growth Study ». Rapport Nº 51564-NG Development Research Center. 2007. Global Migrant Origin Database, update March 2007. http://www.migrationdrc.org/research/typesofmigration/global_migrant_origin_database.html 11| www.worldbank.org/afr/trade Goretti, Manuela et Hans Weisfeld. 2008. « Trade in the WAEMU: Developments and Reform Opportunities ». Document de travail du FMI, Nº WP/08/68. Hoppe, Mombert et Nihal Pitigala. 2011. «Africa Trade Policy Notes: The Impact of Multiple- Taxation on Competitiveness in Nigeria ». Note de politique commerciale en Afrique Nº 16. Banque mondiale, Washington, D.C. « Migration in Ghana, A Country profile 2009 ». Organisation internationale des migrations : Genève. Numéro de référence : 978-92-9068-557-9 Union européenne. 2010. Base de données d'accès aux marchés. Accéder sur le site Internet http://madb.europa.eu le 25 novembre 2011. West African Trade Hub. 2010a. « ECOWAS Market Integration: Results of A Preliminary Gap Analysis ». Rapport technique du WATH Nº 33. West African Trade Hub. 2010b. « Ghana: A Gap Analysis of ECOWAS Market Integration ». Rapport technique du WATH Nº 36. West African Trade Hub. 2010c. « Nigeria: A Gap Analysis of ECOWAS Market Integration ». Rapport technique du WATH Nº 37. West African Trade Hub. 2011a. « Togo: A Gap Analysis of ECOWAS Market Integration ». Rapport technique du WATH Nº 44. West African Trade Hub. 2011b. « Benin: A Gap Analysis of ECOWAS Market Integration ». Rapport technique du WATH Nº 45 12| www.worldbank.org/afr/trade