FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 1 33451 NoteFocus N° 21 MAI 2001 AU BANGLADESH, IVGVD CONJUGUE UN PROGRAMME DE MICROFINANCE ET UN PROGRAMME DE PROTECTION SOCIALE POUR AIDER LES PLUS PAUVRES Certains groupes de population sont extrêmement pauvres et les activités de microfinance telles qu'elles se présentent habituellement ne répondent pas à leurs besoins. La série des Études La plupart des études portant sur les programmes de microfinance au Bangladesh spéciales est l'instrument montrent que ces derniers ciblent bien les pauvres, en particulier les femmes, qu'ils de base utilisé par le permettent à leurs clients de saisir des opportunités économiques et d'élargir leur CGAP pour faire connaître aux pouvoirs publics, aux accès à des ressources et qu'ils contribuent à leur donner de l'assurance et à amélio- bailleurs de fonds et aux rer leur bien-être1. Toutefois, les pauvres ne forment pas un groupe homogène. institutions privées et Certains sous-groupes ont encore moins d'actifs et moins de possibilités d'emploi, financières les meilleures souffrent d'un déficit de consommation plus important et sont davantage exposés à pratiques en microfinance. des chocs économiques et sociaux périodiques que les autres. Selon des estimations Le CGAP vous invite à lui détaillées, 27 % de la population rurale bangladeshi, soit environ la moitié de la popu- faire part de vos lation classée en dessous du seuil de pauvreté sur la base de son niveau de revenu, vit commentaires, de vos dans des conditions de « pauvreté absolue »2. La plupart des individus extrêmement contributions et de toute demande d'envoi d'autres pauvres souffrent de déficit alimentaire chronique. Beaucoup d'entre eux sont anal- études de cette série. phabètes, ne possèdent aucune terre qu'ils pourraient cultiver et survivent dans des conditions d'insécurité endémique qui débouchent souvent sur leur expulsion, l'ex- 1818 H Street, N.W. propriation de leurs biens et des actes de violence3. Les études effectuées ainsi que les Washington, DC 20433 observations recueillies laissent penser que les personnes extrêmement pauvres ne Tel : 202 473 9594 bénéficient généralement pas des services des programmes de microfinance ordi- Fax : 202 522 3744 naires4. Il existe plusieurs raisons, du point de vue de l'offre, d'exclure les extrêmement Courriel : cgap@worldbank.org pauvres des programmes de microfinance. En effet : Site Web : 1Shahid Khandker, Fighting Poverty with Microcredit: Experience in Bangladesh (New York : Oxford University Press, www.cgap.org 1998) ; Syed Hashemi and Sidney Schuler, « Rural Credit Programs and Women's Empowerment in Bangladesh », World Development (avril 1996) ; Mahabub Hossain, « Credit for Alleviation of Rural Poverty: The Grameen Bank in Bangla- desh » (Washington : IFPRI, 1988). 2La pauvreté absolue est définie, aux fins de la présente Note, par une consommation maximale de 1 740 calories par jour. 3Étude intitulée « Rural Poverty: Bangladesh as a Case Study », (New Delhi : Sage, 1995), publiée sous la direction de Hossain Zillur Rahman et Mahabub Hossain. 4Hassan Zaman, « Microcredit Programs: Who Participates and to What Extent? » et Syed M Hashemi, « Those Left Be- hind: A Note on Targeting the Hardcore Poor », publié sous la direction de Geoffrey Wood et d'Iffath Sharif dans l'ou- vrage intitulé Who Needs Credit? Poverty and Finance in Bangladesh (Dhaka : University Press Ltd, 1997). CGAP Bâtir des services financiers pour les pauvres FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 2 La réussite des opérations de microcrédit est dépenses de consommation, ou qu'ils soient largement tributaire de la rigueur du proces- trop pauvres pour pouvoir rembourser sur sus de sélection de la clientèle, qui a pour une base régulière des emprunts effectués au objet d'assurer que l'argent emprunté pourra titre d'activités qui ne génèrent pas immédia- être remboursé. Les membres des groupes ou tement de revenus. les agents des programmes prennent grand soin d'éliminer, au stade de la présélection, les La recherche d'un taux de remboursement clients qui pourraient présenter des risques. élevé et la discipline de groupe incitent donc les La préférence est donnée aux clients membres agents des programmes et les membres des de ménages ayant un revenu régulier, plu- groupes à exclure les personnes extrêmement sieurs sources de rémunération et quelques pauvres. Il est aussi intéressant de noter qu'il biens (c'est-à-dire les mieux « nantis » parmi existe également des facteurs de sélection non les pauvres) parce que, même si les activités négligeables du côté de la demande car les très financées ne génèrent pas suffisamment de pauvres se retirent souvent d'eux-mêmes du mar- revenus et de bénéfices, ces clients peuvent ché. Ils peuvent juger « ne pas être solvables » ou néanmoins rembourser leurs emprunts. ne pas avoir suffisamment de ressources pour Une crainte est que les ménages qui vivent générer les revenus nécessaires au remboursement dans le dénuement utilisent le montant de d'un emprunt, et ils n'ont souvent pas assez leurs emprunts ou les revenus tirés des activi- confiance en eux pour chercher à rejoindre un tés financées par ces emprunts pour payer des programme de crédit. Figure 1 Expansion du programme IGVGD Evolution du nombre de participantes à IGVGD 350 000 300 000 s reb 250 000 mem 200 000 de reb 150 000 Nom 100 000 50 000 0 1988­90 1990­92 1992­94 1994­96 1996­97 1998­99 Période 2 FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 3 Certains programmes ont toutefois réussi à trée » pour faire participer les plus démunis à ses étendre la portée de leurs activités. La présente activités de développement. note est consacrée au programme de génération BRAC a compris que les dons de céréales ali- de revenus pour le développement des groupes mentaires étaient, pour les groupes de population vulnérables (Income Generation for Vulnerable extrêmement pauvres, une forte incitation à parti- Groups Development -- IGVGD) qui est peut- ciper au programme6. Dans le cadre d'IGVGD, être, de tous les programmes, celui qui affiche les BRAC procède à la distribution gratuite de meilleurs résultats. IGVGD est un programme céréales alimentaires pour attirer les extrêmement conçu pour accroître la sécurité alimentaire, mené pauvres en subvenant à leurs besoins de consom- conjointement par l'État bangladeshi, le mation immédiats, puis il fournit à ces derniers des Programme alimentaire mondial (PAM) et le formations et des services d'épargne et de crédit Comité du Bangladesh pour le progrès rural pour renforcer leurs capacités de développement. (Bangladesh Rural Advancement Committee -- Lorsque la période de fourniture gratuite de BRAC), qui est la plus importante ONG bangla- céréales prend fin, les participantes peuvent pour- deshi5. IGVGD cible les femmes bangladeshis des suivre des activités génératrices de revenus, deve- zones rurales qui n'ont pas de ressources et qui nir clientes des programmes de microfinance ordi- n'ont guère ou pas de possibilité de dégager des naires et, grâce aux compétences qu'elles viennent revenus ; il a fourni une aide sous forme de d'acquérir, dégager des ressources au moins égales céréales alimentaires et de services d'épargne et de à la valeur monétaire des céréales qu'elles ont crédit à près d'un million de participantes au cours reçues. Le projet IGVGD, qui a été lancé à titre des dix dernières années. Les deux tiers des parti- d'opération pilote en 1985, est maintenant un cipantes ont réussi à « sortir » de la pauvreté abso- programme d'envergure nationale et a bénéficié à lue ; elles sont maintenant clientes de systèmes de près d'un million de femmes. microfinance, et ne se sont jamais retrouvées dans une situation nécessitant un secours de l'État. Le cycle d'IGVGD Le programme IGVGD est géré conjointement Le programme IGVGD : par l'État du Bangladesh et BRAC -- par le biais sa structure et ses opérations de son programme de microfinance, c'est-à-dire le Programme de développement rural (PDR). Il Le concept IGVGD comporte trois éléments essentiels : un filet de IGVGD a pour base un programme de protection sécurité sous forme de distribution gratuite de sociale donnant lieu à la distribution gratuite de céréales alimentaires, un programme de formation céréales alimentaires, pendant 18 mois, aux et des services financiers d'épargne et de crédit. ménages tenus par une femme qui n'ont pas de Les femmes qui doivent recevoir gratuitement des ressources et risquent le plus de souffrir de la faim. céréales en participant au programme sont sélec- BRAC a pu constater, dans le cadre de ses activi- tionnées par des représentants élus localement. tés, qu'il lui était difficile d'inclure les très pauvres BRAC évite ainsi toute dépense de ciblage ainsi dans ses opérations de microfinance habituelles et que les écueils politiques du choix des bénéfi- qu'il lui fallait donc trouver un autre « point d'en- ciaires. Les ménages sont sélectionnés sur la base de trois critères : 5BRAC opère dans plus de 50 000 des 86 000 villages du Bangladesh. Son Programme de développement rural (PAR), programme de micro- Leur chef est une veuve ou une femme aban- finance ordinaire, compte 3,5 millions de membres. BRAC a 35 000 écoles primaires non traditionnelles assurant une éducation à 1,1 mil- donnée lion d'enfants pauvres. Il poursuit également des programmes de santé et de population, des programmes d'assistance juridique et des pro- 6Maya Jessica Tudor retrace de manière intéressante l'évolution du pro- grammes agricoles. BRAC emploie 25 000 personnes à plein temps et gramme dans son étude intitulée « An Idea, Its Innovation and Evolu- 35 000 personnes à temps partiel. tion: BRAC's IGVGD Program » (polycopié). 3 FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 4 Ils possèdent moins de 20 ares de terres nomique du ménage s'est améliorée. En pratique, Leurs revenus mensuels sont inférieurs à 300 80 % des femmes participent à au moins deux taka (6 dollars) cycles successifs d'IGVGD, et deux tiers des femmes à au moins trois cycles. BRAC inclut alors 90 % des femmes bénéficiant de cette aide alimentaire dans son programme en Les formations et les filières propres à n'excluant que celles qui souffrent des handicaps chaque type d'activité physiques les plus graves. La très grande majorité (environ 85 %) des Une fois sélectionnées, les participantes choisis- membres d'IGVGD reçoivent un appui et une for- sent un domaine de formation à partir d'une liste mation dans les domaines de l'élevage de volailles comprenant, notamment, l'élevage de volailles et et autres animaux de ferme, de l'horticulture autres animaux de ferme, l'horticulture maraî- maraîchère, de l'agriculture, de la production pis- chère, etc. et elles suivent cette formation pendant cicole ou d'activités liées à la restauration ou à une période qui, dans la plupart des cas, est ache- l'épicerie. Les femmes possèdent déjà certaines vée six mois après leur inclusion dans le pro- compétences en ces domaines et il existe des gramme. Une fois formées, les participantes sont débouchés assurés pour ces produits. L'élevage inscrites dans un centre de BRAC. Elles doivent des volailles n'exige que très peu d'investissements assister aux réunions hebdomadaires et aussi éco- dans des matériels ou dans l'infrastructure, ce qui nomiser, chaque mois, un montant de 25 taka explique la place considérable qu'occupe cette (0,50 dollar) qui est déposé chez BRAC sur un activité dans le programme de formation assuré compte rémunéré au taux de 6 %. Les partici- par le BRAC dans le cadre d'IGVGD. pantes peuvent effectuer des dépôts plus fréquents Pour promouvoir à la fois les opportunités de (hebdomadaires par exemple) si elles le désirent générer des revenus et l'expansion générale du sec- tant qu'elles épargnent au moins 25 taka par teur de la volaille, BRAC a forgé des liens avec les mois. Cette condition est similaire à celle à services publics chargés de l'élevage au Bangladesh laquelle sont assujettis les membres du pro- pour pouvoir bénéficier d'activités de formation et gramme ordinaire de BRAC qui sont, eux, tenus de vaccination et d'un appui vétérinaire. Dans d'épargner chaque mois 20 taka sur un compte chaque village ou groupe de villages, une femme chez BRAC. reçoit une formation dans le cadre de laquelle elle Le premier prêt de 2 500 taka (50 dollars) est apprend à vacciner les animaux et à leur donner également décaissé dès l'achèvement de la forma- des soins. Elle est ensuite payée entre un demi taka tion et les remboursements hebdomadaires prévus et un taka par vaccination effectuée ; les vaccins et au calendrier commencent immédiatement. Le les médicaments sont fournis gratuitement par les prêt est assorti d'un taux d'intérêt uniforme de services publics chargés de l'élevage. 15 % et a une échéance à 12 mois. BRAC offre en outre des formations diversifiées Dès qu'elles ont fini de rembourser ce prêt ini- de manière à intégrer chaque étape du processus tial, les participantes reçoivent un deuxième prêt, d'élevage de volailles (de l'éclosion des oeufs à la de 4 000 taka (80 dollars). Le cycle de distribu- vente des poulets) et réduire ainsi les déséquilibres tion de céréales, qui couvre 18 mois, prend géné- au sein du système. Certaines femmes apprennent ralement fin avant que le deuxième prêt n'ait été à s'occuper des volailles pendant les deux mois sui- intégralement remboursé. Lorsque tous les rem- vant l'éclosion des poussins. Elles les vendent à la boursements ont été effectués, les « sortantes » fin de cette période et achètent une nouvelle série d'IGVGD deviennent membres des services de de poussins d'un jour. D'autres femmes appren- microfinance ordinaires (le PDR à BRAC). Cette nent à élever des poules pondeuses. Elles se lan- participation est facilitée lorsque la situation éco- cent dans cette activité en achetant 10 poulets 4 FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 5 Le cycle d'IGVGD 1ere étape : L'administration centrale détermine le nombre de femmes de chaque thana (la circonscription administrative la plus petite) qui recevront gratuitement des céréales alimentaires dans le cadre du programme d'assistance. Cette allocation est fonction du ciblage géographique des zones en situation d'insécurité alimentaire. Les comités formés au niveau des thanas par des représentants de l'État, des élus et des organisations béné- voles répartissent le nombre de bénéficiaires entre les différentes collectivités locales relevant de la thana (qui sont généralement au nombre de huit à dix). 2e étape : Les représentants élus des collectivités locales soumettent le nom des femmes devant recevoir gratuitement des céréales. Ces noms sont approuvés par le comité du thana. 3e étape : BRAC sélectionne, dans la liste des femmes devant recevoir gratuitement les céréales, celles qui participeront au programme d'IGVGD (généralement 90 % du total). 4e étape : Le cycle de 18 mois d'IGVGD commence : 30 kilos de céréales alimentaires sont distribués chaque mois aux participantes. Ces dernières et BRAC choisissent leur domaine de formation et les activités de formation com- mencent. 5e étape : La formation est achevée (dans la plupart des cas) le sixième mois, et le premier des deux prêts est décaissé. Les participantes assistent à des réunions hebdomadaires et économisent 25 taka (0,50 dollar) par mois. Elles commencent immédiatement à rembourser leur emprunt. 6e étape : Le premier prêt est intégralement remboursé et le deuxième prêt est décaissé. 7e étape : Le 16e mois, les participantes peuvent commencer à utiliser leur épargne si elles le désirent. 8e étape : Le 18e mois, le cycle est achevé et la distribution de céréales alimentaires prend fin. Les remboursements se poursuivent si le deuxième prêt n'a pas été complètement remboursé. 9e étape : Les participantes qui sortent du cycle d'IGVGD sont invitées à devenir membres du programme ordinaire de microfinance de BRAC. Source : Maya Jessica Tudor : « An Idea, Its Innovation and Evolution: BRAC's IGVGD Program » (polycopié). hybrides par l'intermédiaire de BRAC au prix de part pour relancer cet art autochtone et d'autre 250 taka. Beaucoup de femmes ramassent les part pour ouvrir de nouvelles perspectives écono- oeufs pour les vendre aux établissements d'accou- miques à d'importants groupes de population. vage ou sur le marché. D'autres encore vendent BRAC a sollicité des services des ponts et chaus- des aliments pour volailles. Quelques-unes reçoi- sées et des collectivités locales l'autorisation de vent une formation qui doit les aider à mettre en planter des mûriers le long des routes. Des femmes place une couveuse. Ces formations sont assurées recevant des céréales dans le cadre d'IGVGD plan- collectivement par BRAC et les services publics taient des mûriers et montaient la garde pour éviter chargés des volailles et des animaux de ferme. que leurs plants ne soient volés ou détruits. Elles Outre l'élevage de la volaille et des animaux de récoltaient ensuite les feuilles pour les vendre à des ferme, BRAC a décidé de poursuivre certaines séricicultrices qui, pour la plupart, participaient interventions novatrices, telles que la sériciculture. aussi au programme d'IGVGD et s'occupaient des Le tissage de la soie est un art traditionnel dans activités séricicoles du stade de l'oeuf au cocon. certaines régions du Bangladesh, mais la concur- Les cocons étaient vendus aux filateurs, qui à leur rence exercée par le tissage de la soie en usine et tour cédaient le fil aux tisseurs. BRAC fournissait les matières synthétiques, ainsi que l'absence de les motifs, assurait le contrôle de la qualité et ven- nouveaux motifs et d'activités de commercialisa- dait la soie par l'intermédiaire de ses grands points tion ont provoqué un net déclin de cette branche de distribution urbains, ou bien l'exportait. Il dis- d'activité. BRAC a décidé de relier les différentes pensait une formation d'une journée aux plan- étapes du processus de production de soie, d'une teuses/gardiennes des mûriers et une formation 5 FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 6 Figure 2 Les grands indicateurs de pauvreté 80 gea 40 rcentu Po 0 aba Ve Sa sa Pr Sa A díhiver Sa ndonnée uve ns ns terre atiqu u ns m ns s,divorcée terre sa ement axim vêtement nd s ale um s 2 sa s s, ris INDICATEURS Clientes d'IGVGD Extrêmement pauvres Zones rurales du Bangladesh Source : Hossain Zillur Rahman et Mahabub Hossain, directeurs de publication de Rethinking Rural Poverty: Bangladesh as a Case Study (New Delhi : Sage, 1995) et données des enquêtes menées auprès des femmes participant à IGVGD. de cinq jours aux femmes chargées de l'élevage des du PAM. Le personnel du Programme alimentaire vers à soie. Toutefois, les graves inondations de mondial se rend également plusieurs fois par an 1998 ont détruit la plupart des mûriers et la mala- sur le terrain pour procéder à des vérifications die a tué un grand nombre des vers à soie, de sorte ponctuelles des progrès accomplis. L'emploi des que BRAC a dû réduire l'envergure de son pro- fonds versés à BRAC à des fins de formation et de gramme de sériciculture. financement fait l'objet d'audits annuels réalisés par des experts comptables nommés par le PAM Suivi du programme pour le compte des bailleurs de fonds. La division Le programme d'IGVGD se caractérise par des des études et évaluations de BRAC, qui opère de innovations constantes et un suivi attentif des acti- manière indépendante, procède aussi à des exa- vités à plusieurs niveaux. Le gouvernement et le mens périodiques des différents aspects PAM assument la responsabilité du suivi du pro- d'IGVGD7. gramme en procédant à l'examen des rapports 7Se reporter, par exemple, à Ghulam Sattar et al, « Food Aid and Sus- mensuels et trimestriels de BRAC qui est, quant à tainable Livelihoods: BRAC's Innovations against Hunger » et à Dil- lui, tenu de mettre ses documents et ses rapports ruba Ahmed, « Poverty Alleviation of the Hardcore Poor in Bangla- à la disposition des agents concernés de l'État et desh » (polycopié, BRAC, 2000). 6 FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 7 Les excellents résultats d'IGVGD : d'un tiers des ménages retenus pour IGVGD, les du premier contact à la sortie des femmes étaient le principal soutien de famille. Un participantes du programme cinquième des femmes devaient mendier pour obtenir de la nourriture. Environ 90 % des femmes Le ciblage des personnes étaient analphabètes et plus de la moitié d'entre extrêmement pauvres elles ne pouvaient compter que jusqu'à 20. Une enquête longitudinale d'un échantillon Amélioration de la situation représentatif à l'échelle du pays composé de 400 économique des participantes membres d'IGVGD a permis de constater l'excel- lent ciblage des extrêmement pauvres par le pro- L'enquête longitudinale a été complétée par des gramme8. Les indicateurs de base établis au début opérations d'évaluation participatives menées, en des années 90 montrent que 8 % des ménages 1996 et en 1999, auprès de plus d'une centaine de ruraux bangladeshis avaient, à l'époque, une femme participantes à IGVGD qui avaient rejoint le pro- pour chef, alors que c'était le cas de 44 % des gramme en 1994, dans 10 sites différents. Ces ménages couverts par le programme d'IGVGD. évaluations ont montré que les femmes avaient Environ 4/5 des femmes participant au pro- grandement profité du programme, qui leur a per- gramme ne possédaient aucune terre agricole, mis d'accroître leurs revenus et d'acquérir des contre 16 % des ménages ruraux et 53 % des très biens. Les participantes ont expliqué que, grâce à pauvres. Quatre-vingt quinze pour cent des la distribution de céréales alimentaires dans le ménages couverts par IGVGD étaient pratique- cadre d'IGVGD, il leur avait été possible d'écono- ment sans terre (moins de 0,20 ha) contre seule- miser les faibles gains qu'elles auraient, sinon, dû ment 49 % des ménages ruraux et 72 % des extrê- utiliser pour acheter des aliments. Les prêts qui mement pauvres. Environ un tiers des ménages leur ont été initialement consentis, et les montants inclus dans le programme d'IGVGD n'avaient pas qu'elles ont pu épargner, leur ont permis de se de biens avant de participer au programme, 87 % lancer dans des activités rémunératrices. Grâce à ne possédaient pas de couverture (contre 37 % des l'appui sous forme de céréales alimentaires et à extrêmement pauvres) et la moitié environ n'avaient l'aide financière dont elles ont bénéficié, elles ont pas de lit. Moins d'un cinquième des femmes possé- connu un répit qui leur a permis de réinvestir leurs daient plus de deux saris et 44 % n'avaient ni san- gains dans leur activité et de rembourser leur dales ni chaussures. Les ménages des femmes emprunt. L'élevage de volailles est, de toutes les inclus dans IGVGD étaient généralement de taille activités, celle qui a donné les meilleurs résultats ; plus limitée que la moyenne des ménages bangla- certaines femmes ont réinvesti l'argent qu'elles deshis vivant en zone rurale et la proportion de ont tiré de la vente de poulets (ou d'oeufs) pour femmes les composant était plus élevée. Les acheter des chèvres. Quelques autres se sont lan- ménages pauvres sont généralement nucléaires, cées dans des activités différentes, telles que le voire même plus petits, et ils comptent un nombre décorticage du riz, le petit commerce de rue ou important de femmes abandonnées. Dans plus l'ouverture d'une boutique. La majorité des femmes ont indiqué que, lors- 8L'enquête a été réalisée pour le compte du Programme alimentaire qu'elles ont cessé de recevoir gratuitement des mondial. L'échantillon, composé de 400 femmes réparties sur l'en- céréales au bout de 18 mois, elles ont eu peur de semble du territoire, a été constitué par une méthode d'échantillon- ne pas pouvoir continuer à gagner leur vie et ont nage aléatoire à trois niveaux. Les enquêtes longitudinales ont été me- nées auprès des mêmes femmes à trois dates différentes : en 1994, 400 connu des moments difficiles. La plupart d'entre femmes ont été interrogées alors qu'elles venaient tout juste d'être in- elles ont toutefois noté que, si leur niveau de cluses dans le programme ; en 1996, 398 de ces mêmes femmes ont consommation a réellement chuté à ce moment- été interrogées alors qu'elles venaient de sortir du programme ; enfin, là, elles ont néanmoins réussi à poursuivre l'acti- 345 femmes de ce même groupe ont été interrogées en 1999, c'est-à- dire trois ans après leur sortie du programme. vité rémunératrice qu'elles avaient entreprise grâce 7 FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 8 Celles qui s'en sont sorties... Quand son mari est mort de la tu- bénéficié d'un prêt de 1 000 taka quelques poulets mais elle élève berculose, Jorimon s'est retrouvé de BRAC qu'elle a utilisé en par- aussi des chèvres qu'elle vend seule avec ses deux filles, sans tie pour acheter à BRAC des pou- chaque année au marché de aucune possession mais avec lets de « race », en partie pour l'Eid. Sa vache lui donne du lait ; une dette de 5 000 taka. Elle a acheter des poulets locaux et en elle vent le produit de la traite du travaillé pour des ménages mieux partie pour investir dans le com- matin mais garde celui de la nantis du village et a survécu en merce d'un vendeur de saris du traite de l'après-midi pour ses gagnant un petit peu d'argent ou village. Jorimon a bien tiré profit filles. Ces dernières vont à en mendiant pour avoir à manger. de ses investissements. À la fin l'école de BRAC. L'année der- En 1994, elle a commencé à re- de la première année, elle avait nière, Jorimon a reçu une forma- cevoir 31,5 kilos de céréales revendu ses poulets, en avait tion pour apprendre à coudre chaque mois et est devenue acheté de nouveaux et grâce à ainsi qu'un prêt de BRAC pour membre d'IGVGD. un nouveau prêt, avait acheté acheter une machine à coudre. deux chèvres. Elle confectionne maintenant Jorimon a suivi une formation de des vêtements pour enfants et trois jours concernant l'élevage Lorsque le cycle d'IGVGD a pris des blouses pour les femmes de de volailles. Elle avait déjà élevé fin en 1996, les agents de BRAC son village. Elle a remboursé des poulets mais, à cette occa- lui ont demandé de devenir tous ses emprunts, économise sion, elle a appris comment les membre du programme PDR. de manière régulière et rêve vacciner, les garder propres et Ceci fait, elle a obtenu un prêt d'avoir une maison à elle. leur donner les bons aliments. pour acheter une vache. Au Jorimon est très stricte sur la Elle a aussi appris qu'il était im- début, elle a eu du mal à s'en scolarisation de ses filles. Elle portant d'épargner et, pour une sortir sans les céréales gratuites, espère qu'elles feront des femme, de pouvoir subvenir à ses mais elle y est quand même par- mariages intéressants et qu'elles propres besoins et elle a reçu des venue grâce au prêt de BRAC. auront des vies prospères. conseils sanitaires. Elle a alors Jorimon continue d'élever ... et celles qui n'ont pas réussi Rafeza est devenu membre manger à sa faim. Elle a reçu plus en plus dur de s'acquitter de d'IGVGD au début du cycle de une formation portant sur l'éle- sa tâche. Aucun agent de BRAC 1994-96. Elle avait perdu son vage de volailles et a vendu une n'est venu lui demander d'adhé- mari quelques années aupara- partie de ses céréales pour rer au PDR. Peut-être était-elle vant et avait quatre fils et trois acheter quelques poulets. trop âgée ; peut-être n'était-elle filles. Deux des garçons et deux pas jugée suffisamment active. À la fin du cycle d'IGVGD, elle a des filles étaient mariées mais Elle a réussi à marier sa plus retiré les 300 taka qu'elle avait étaient trop pauvres pour assu- jeune fille. Un de ses fils est parti économisés. Les agents du pro- mer la charge du ménage de chercher du travail. Rafeza vit gramme lui ont dit d'acheter des leur mère. Rafeza travaillait pour avec son fils cadet qui va à poulets avec cet argent mais elle d'autres ménages et devait sou- l'école religieuse gratuite. Elle avait besoin d'acheter de la vent mendier pour obtenir des travaille quand elle peut et sub- nourriture. Elle a eu du mal à aliments et nourrir les deux fils et siste grâce à la charité et aux subsister sans les céréales gra- la fille qui continuaient de vivre dons des autres. Elle aimerait tuites. Elle a continué de tra- avec elle. Les céréales gratuites bien pouvoir participer de nou- vailler pour d'autres ménages lui ont permis de survivre. veau au programme de distribu- mais, avec l'âge, il lui était de Refeza se rappelle avoir enfin pu tion de céréales alimentaires. 8 FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 9 Tableau 1 Évolution de la situation économique des ménages Participantes à IGVGD Variables 1994 (avant le 1996 (à la fin du Programme) programme) 1999 (+ 3 ans) % des ménages sans couvertures 86 n.d. 75 % des ménages sans lits 42 40 36 Revenu mensuel (en Tk) avant l'enquête 75 717 415 % des ménages gagnant plus de 300 taka 7 64 31 % des ménages ayant une épargne auprès d'une ONG 11 34 37 % des ménages mendiant 18 2 0 % des ménages sans terre 78 62 n.d. % des ménages sans bien de famille 27 13 n.d. % des ménages quasiment sans terre 94 72 n.d. n.d. = non disponible au crédit. Elles ont ensuite pu contracter de nou- en tôle sur leur logement, et une femme a même veaux emprunts, qu'elles ont remboursés, et elles dit qu'elle avait acheté un petit terrain à cultiver. ne sont pas retombées dans le dénuement qui était Plusieurs des femmes interrogées ont fait valoir auparavant leur lot. À l'opposé, un quart des que, le plus difficile quand on est très pauvre, c'est femmes ont indiqué qu'elles n'avaient pas pu réta- l'attitude des autres ménages (un peu moins) blir leur situation lorsqu'elles ont cessé de recevoir pauvres. Elles ont dit qu'elles étaient mal traitées gratuitement des céréales alimentaires. Elles ont et qu'on leur faisait sentir qu'elles étaient des vendu leurs poulets, utilisé le solde de leur « moins que rien ». Quelques femmes ont indiqué emprunt pour financer leur consommation et ont que, auparavant (c'est-à-dire avant leur participa- eu du mal à rembourser celui-ci. Elles ont indiqué tion à IGVGD), elles avaient tenté de devenir que leur situation est aussi désespérée qu'aupara- membre de BRAC mais qu'on leur avait répondu vant et qu'elles espéraient vraiment pouvoir qu'elles étaient trop pauvres, qu'elles n'avaient pas recommencer à bénéficier du programme de les compétences nécessaires pour « s'en sortir », céréales alimentaires. qu'elles ne feraient que gaspiller l'argent de leur Un peu plus de la moitié des femmes interro- emprunt et, de surcroît, mettraient tout le monde gées dans le cadre des évaluations participatives en difficulté. Le programme d'IGVGD a donné à ont indiqué que leur ménage avait pu acquérir cer- ces femmes davantage confiance en elles et a tains biens grâce au programme. Un grand contribué à améliorer leur statut au sein de la nombre d'entre elles ont même pu acheter des communauté villageoise. saris et des sandales avec leur propre argent alors L'enquête longitudinale a permis de réunir des que, dans le passé, elles devaient avoir recours à la données quantitatives sur certains indicateurs éco- Zakat (c'est-à-dire à la charité) et porter les vête- nomiques à trois périodes différentes -- lors de ments usagés donnés par les riches. La majorité de l'inclusion des intéressées dans le programme en ces femmes pouvaient faire trois repas par jour, 1994, à leur sortie du programme en 1996, et même en période creuse. Quelques femmes ont trois ans plus tard en 1999. Si 1994 est l'année de fièrement annoncé qu'elles avaient installé un toit base du programme, 1996 est, à bien des égards, 9 FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 10 son point culminant. La distribution gratuite de revenus ont très fortement augmenté par rapport céréales aux ménages étudiés venait juste de s'ar- à leur niveau de 1994. Il semble donc que les rêter mais l'impact de cet arrêt ne se faisait pas femmes participant au programme IGVGD aient encore sentir. En fait, les participantes avaient pu améliorer durablement leur situation écono- désormais accès à leur épargne et venaient d'obte- mique, qui reste satisfaisante trois ans après leur nir un deuxième financement. Les informations sortie du programme. recueillies pour 1999 correspondent donc à une période de stabilisation et mesurent mieux l'im- La sortie du programme pact économique à long terme du programme Le programme d'IGVGD a été conçu dans le but IGVGD. crucial de permettre aux participantes, qui sont Les données de l'enquête témoignent d'une extrêmement pauvres, de gagner accès à des pro- diminution notable du nombre de ménages qui ne grammes de microcrédit ordinaires et partant, de possèdent pas, ou quasiment pas (moins de 0,20 suivre une trajectoire qui pourra leur permettre de ha), de terres et d'une augmentation du nombre réduire leur degré de pauvreté. IGVGD constitue de propriétaires de terres familiales entre 1994 et donc, à divers égards, la première étape d'une 1996. Il est extrêmement intéressant de noter que ascension économique, et son succès peut être le pourcentage de femmes obligées de mendier mesuré en partie par le nombre de femmes qui pour survivre est tombé de 18 % en 1994 à 2 % en deviennent, à terme, des membres à part entière 1996 et est nul en 1999. Le pourcentage de des programmes de microfinance. ménages possédant des couvertures et des lits a En avril 2000, 92 % des femmes incluses dans également augmenté au cours de cette période de l'échantillon aléatoire initialement établi pour le cinq ans, pour passer de 14 à 25 % dans le cas des cycle 1994­96 ont été de nouveau contactées et couvertures et de 58 à 64 % dans le cas des lits. Les interrogées aux fins de la présente étude. Le revenus mensuels ainsi que le pourcentage de tableau 2 montre que les deux tiers environ de ces ménages gagnant plus de 300 taka ont fait un femmes ont réussi à devenir des membres à part bond entre 1994 et 1996 pour toutefois diminuer entière de programmes de microfinance ordinaires. quelque peu par la suite mais, malgré ce recul, les Bien que la plupart d'entre elles aient adhéré à Tableau 2 Adhésion à une IMF Participantes à IGVGD Catégorie 1994 (avant le 1996 (à la fin du Programme) programme) 2000 (+ 4 ans) Membres d'une IMF 15 % 28 % 66 % Répartition des adhérentes* BRAC n.d. n.d. 65 % Grameen n.d. n.d. 22 % Proshika n.d. n.d. 7 % ONG locales n.d. n.d. 16 % Autres ONG n.d. n.d. 2 % * Cette répartition est basée sur les 66 % de clientes incluses dans l'enquête de 1999 qui étaient membres d'une IMF. La somme des pour- centages est supérieure à 100 % parce qu'une même personne peut être membre de plus d'une ONG-IMF. Aucune donnée sur la réparti- tion entre IMF n'est disponible pour 1994 et 1996. n.d. = non disponible 10 FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 11 BRAC, un certain nombre de femmes sont deve- rentes activités. La fourniture et la distribution des nues membres d'autres institutions de microfi- céréales alimentaires gratuites sont assurées par nance (IMF). Le programme d'IGVGD de BRAC l'État dans le cadre d'un programme préexistant joue donc un rôle très utile en « préparant » une dans lequel le programme de microfinance de clientèle pour l'ensemble du secteur des IMF. BRAC n'intervient aucunement. Les formations sont dispensées conjointement par l'ONG et par La question de la subvention l'État. Le coût de la fourniture de prêts de moindre montant donne lieu à une subvention Selon les estimations de BRAC, la formation croisée du programme de microcrédit ordinaire de d'une femme coûte, en moyenne, 500 taka. BRAC, mais le suivi financier et la comptabilité BRAC perçoit des intérêts au taux uniforme de d'IGVGD sont assurés indépendamment du PRD 15 % sur les prêts qu'il consent aux participantes à pour qu'il soit possible d'évaluer les subventions. IGVGD, c'est-à-dire au même taux que pour les Il est toutefois fortement recommandé de sépa- clients de son programme de microfinance ordi- rer clairement les opérations relatives à chacune de naire (PDR). D'après ses calculs, le coût de la ces activités et, dans la majorité des cas, il est pré- fourniture de ses services à chacun de ses clients férable qu'une institution de microfinance ne est de l'ordre de 600 taka. Dans le contexte du fournisse que des services financiers et qu'elle PDR, ce coût est financé par le produit des inté- forge des partenariats avec des prestataires pour la rêts applicables au premier prêt de 4 000 taka. Le fourniture des services non financiers. Toute sub- premier prêt accordé à une participante à IGVGD vention devrait émaner des partenaires, et non pas n'est, toutefois, que de 2 500 taka et les intérêts de l'institution de microfinance, pour que l'objec- qu'il génère ne suffisent pas à couvrir le coût du tif reste clairement le développement d'une insti- service. Le montant estimatif de la subvention de tution viable. Il importe donc de structurer toute BRAC au titre de chaque prêt initial octroyé à une subvention croisée des taux d'intérêt avec le plus participante à IGVGD est donc de 225 taka. La grand soin pour éviter que cette opération n'ait un subvention qu'il accorde donc au titre du crédit et impact négatif sur la viabilité financière du pro- des services de formation est de 725 taka par gramme ou de l'institution dans son ensemble. cliente. Pour l'instant, le PAM fournit gratuite- ment à BRAC les céréales alimentaires que celui-ci Conclusion distribue pendant 18 mois à chaque participante à IGVGD. Si l'on inclue dans les calculs le coût des Le programme d'IGVGD de BRAC montre qu'il céréales (6 000 taka aux prix courants), la sub- est possible d'améliorer suffisamment la situation vention totale est, pour chaque femme, de l'ordre des ménages, même ceux qui vivent dans le de 6 725 takas (soit environ 135 dollars). L'État dénuement le plus complet, pour leur permettre et les bailleurs de fonds estiment qu'il s'agit là d'avoir accès aux services de microfinance. La d'une faible somme si l'on considère que la très principale innovation de BRAC tient aux liens grande majorité des participantes au programme novateurs qu'il a établis entre la microfinance et d'IGVGD cessent, lorsqu'elles en sortent, d'avoir les filets de sécurité sociaux. Il ne faut toutefois régulièrement besoin de secours. pas croire que cet exemple est unique ou qu'une Les subventions qui forment la base du pro- telle opération ne peut être assurée que par une gramme d'IGVGD soulèvent quelques questions grande ONG. Au Bangladesh, de petites ONG de difficiles car, en règle générale, la fourniture de portée locale (notamment Jagorani Chakra) services non financiers et de services financiers par obtiennent elles aussi de bons résultats dans le une même institution a pour effet de réduire l'ef- cadre d'opérations similaires. D'autres, comme ficacité de cette dernière et de compromettre sa CARE Bangladesh, ont réussi à allier des opéra- viabilité. BRAC évite ce problème, pour l'essen- tions de microfinance et des mécanismes d'emploi tiel, en séparant les fonctions relatives à ces diffé- garantis par l'État. 11 FN21_FR.qxd 10/17/07 10:46 PM Page 12 NoteFocus BRAC a permis aux deux tiers des participantes à son programme de devenir des N° 21 membres à part entière de programmes de microfinance ordinaires. Étant donné qu'environ un million de femmes ont participé au programme d'IGVGD depuis le lancement de ce dernier, les deux tiers d'un million de femmes vivant autrefois dans le dénuement sont maintenant membres de programmes de microfinance auxquels elles n'auraient probablement pas pu avoir accès sans IGVGD. Syed Hashemi a rédigé cette Note avec l'appui de Maya Tudor, Le programme n'a pas vraiment permis d'améliorer durablement la situation d'un étudiante de troisième cycle à tiers des participantes. BRAC exclut également 10 % des femmes recevant des Stanford University effectuant un stage à BRAC, et de Zakir céréales alimentaires d'IGVGD parce qu'elles sont trop âgées ou handicapées. Le Hossain, Nagorik Uddyog, à programme n'est donc pas une panacée pour toutes les femmes couvertes par les Dhaka. À la suite de la mission menée par Elizabeth Littlefield au filets de sécurité sociaux et il reste nécessaire de fournir de manière plus systéma- Bangladesh au début de 2000 et tique une assistance élémentaire aux plus pauvres. des entretiens qu'elle a eus avec Fazle Hasan Abed, fondateur et L'un des risques fondamentaux que courent les programmes qui, comme président de BRAC, il a été jugé IGVGD, font intervenir une gamme limitée d'activités économiques, tient à leur nécessaire de diffuser plus largement les résultats obtenus vulnérabilité face aux chocs macroéconomiques et extérieurs. Les maladies aviaires par BRAC dans le cadre du peuvent devenir épidémiques, détruire les poulaillers domestiques et forcer un programme IGVGD. L'auteur tient à remercier Salehuddin Ahmed, grand nombre de clients à s'endetter. Les activités de sériciculture et la filière du ver Aminul Alam, Mushtaque à soie d'IGVGD ont énormément souffert des inondations et des maladies du ver à Chowdhury, G M Sattar et Rabeya Yasmin (BRAC) des informations, soie. Il importe donc de veiller à mettre en place des plans pour pallier les problèmes explications et commentaires de ce type, par exemple en diversifiant le portefeuille d'activités. qu'ils ont bien voulu lui fournir et qui lui ont permis de préparer Le succès remporté par le programme d'IGVGD montre à quel point il est cette Note. Elizabeth Littlefield, important d'innover pour mettre la microfinance au service de la lutte contre la pau- Imran Matin, Brigit Helms, Doug Pearce, Tiphaine Crenn, Rich vreté. Si la microfinance n'est pas une panacée en matière de réduction de la pau- Rosenberg and Ousa vreté, et bien qu'elle ait fait l'objet de nombreuses initiatives mal conçues et vouées Sananikone, tous membres du CGAP, ont aussi fait part de leurs à l'échec qui n'ont fait que compromettre le secteur, elle offre néanmoins toujours précieux commentaires. Directrice des opportunités considérables pour les pauvres. Si de nombreux praticiens de la de publication : Tiphaine Crenn microfinance ont choisi la facilité en faisant valoir que la microfinance n'est pas N'hésitez pas à faire lire cette adaptée à la situation des extrêmement pauvres, des programmes comme IGVGD Notes à vos collègues ou à nous demander des exemplaires permettent de replacer ces derniers au coeur des débats politiques et de l'agenda supplémentaires de ce numéro ou opérationnel. IGVGD nous met au défi de mettre en place des mécanismes efficaces d'autres études. d'un bon rapport coût-efficacité pour inclure ceux qui ne sont pas couverts par les Toutes les études du CGAP sont programmes ordinaires de microfinance. Assister les populations indigentes afin de disponibles sur le site web du CGAP : www.cgap.org. les aider à sortir de l'extrême pauvreté a des impacts sociaux trop importants pour ne pas saisir les occasions offertes. CGAP 1818 H Street, N.W. MSN P3 - 300 Washington, DC 20433 États-Unis Tél. : 202 473 9594 Fax : 202 522 3744 Courriel : cgap@worldbank.org Site Web : www.cgap.org