44649 DOCUMENT DE TRAVAIL DE LA BANQUE MONDIALE NO. 148 Rompre le cercle vicieux Une stratégie pour promouvoir la croissance dans un milieu rural sensible aux conflits au Burundi Editeurs: Ilhem Baghdadli Bernard Harborne Tania Rajadel BANQUE MONDIALE 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page i D O C U M E N T D E T R AVA I L D E L A B A N Q U E M O N D I A L E N O. 1 4 8 Rompre le cercle vicieux Une stratégie pour promouvoir la croissance dans un milieu rural sensible aux conflits au Burundi Editeurs: Ilhem Baghdadli Bernard Harborne Tania Rajadel BANQUE MONDIALE Washington, D.C. 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page ii Copyright © 2008 Banque internationale pour la reconstruction et le développement/Banque mondiale 1818 H Street, N.W. Washington, D.C. 20433 (États-Unis d'Amérique) Tous droits réservés Fabriqué aux États-Unis d'Amérique Premier tirage: mai 2008 Fabriqué de papier recyclé 1 2 3 4 5 11 10 09 08 Document de travail de la Banque mondiale sont publiés pour fair connaître les résultats des travaux de la Banque mondiale à la communauté de développement dans les meilleurs délais possibles. Ce document n'a donc pas été imprimé selon les méthodes employées pour les textes imprimés officiels. Centaines sources citées dans le texte peuvent être des documents officieux qui ne sont pas à la disposition du public. Les constatations, interprétations et conclusions qu'on trouvera dans le présent rapport n'engagent que les auteurs et ne doivent être attribuées en aucune manière à la Banque mon- diale, à ses institutions affiliées ou aux membres de son Conseil des administrateurs,ni aux pays qu'ils représentent. La Banque mondiale ne garantit pas l'exactitude des données citées et décline toute res- ponsabilité quant aux conséquences de leur utilisation. Les frontières, les couleurs, les dénomi- nations et toute autre information figurant sur les cartes n'impliquent, de la part du Groupe de la Banque mondiale, aucun jugement quant au statut juridique d'un territoire quelconque et ne signifient nullement que le Groupe reconnaît ou accepte ces frontières. Le contenu de cette publication fait l'objet d'un copyright. La copie et/ou la transmission de passages ou de l'ensemble de la publication sans autorisation peut être une violation de la loi en vigueur. La Banque mondiale encourage la diffusion de ses travaux et accorde normalement cette autorisation sans tarder et, si la reproduction répond à des fins non commerciales, à titre gratuit. 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Food supply--Burundi. 3. Violence--Burundi. I. Title. HN796.Z9C6214 2008 307.14120967572--dc22 2008016844 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page iii Table des matières Préface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . vii Remerciements. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ix Acronymes and abréviations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xi Résumé analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xiii 1. Une stratégie pour une croissance dans un milieu rural sensible aux conflits. . . . 1 Une histoire de violence cyclique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 Étudier les conflits aux niveaux de la communauté, de l'État et du secteur privé . . . 2 Prévenir les risques de conflit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 Principales leçons tirées des pratiques modèles internationales . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 Les sources de la stratégie de croissance rurale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 2. Croissance du Burundi: La nécessité d'une performance de longue durée et stable. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Comprendre les schémas de croissance du Burundi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Comprendre la pauvreté pour mieux concevoir les réformes . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 3. Relance agricole: Sécurité alimentaire et plus. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39 Sécurité et aide alimentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40 Filière de la culture vivrière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 Filière de l'élevage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64 4. Cultures d'exportation: Vers une contribution significative à la croissance . . . . 77 Filière du café. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 Filière du thé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86 Filière de l'horticulture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 5. Surmonter les principaux obstacles à la croissance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 Assurer la sécurité des biens et des personnes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110 Encourager le développement des infrastructures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116 Améliorer le climat d'investissement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 128 Annexe : Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139 Références bibliographiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143 iii 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page iv iv Table des matières TABLEAUX 1.1 : Actions recommandées pour renforcer la croissance rurale . . . . . . . . . . . . . . . . . .12 2.1 : Contribution de trois secteurs à l'économie, 1970­2005 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .32 2.2 : Statut professionnel des jeunes au Burundi, 2006 (%) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .35 3.1 : Impact du WFP sur la population (approche statistique naïve) . . . . . . . . . . . . . . .44 3.2 : Impact du WFP sur les populations (approche économétrique) . . . . . . . . . . . . . .45 3.3 : Efficacité du ciblage du WFP et des autres transferts publics en 2006 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .47 3.4 : Typologie simplifiée des systèmes de production, d'après les pratiques de gestion de la fertilité des sols . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .52 3.5 : Caractéristiques des systèmes d'élevage au Burundi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .67 4.1 : Production de thé sec au Burundi (en tonnes) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .90 4.2 : Projection de la capacité d'affrètement et des coûts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .101 4.3 : Comparaison des frais d'expédition par vols charters par rapport aux vols passagers réguliers ($EU/kg) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .101 4.4 : Marchés, contraintes et opportunités pour le Burundi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .102 4.5 : Avantages et inconvénients des marchés ordinaires et des marchés de niche . . . .104 5.1 : Actions requises dans le secteur de l'énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .121 5.2 : Le réseau routier au Burundi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .121 5.3 : L'accès au réseau routier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .121 5.4 : Actions requises pour le secteur des transports . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .124 5.5 : Actions requises pour les secteurs de l'eau et de l'assainissement . . . . . . . . . . . . .126 5.6 : Développement du secteur des télécommunications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .127 5.7 : Tarifs en centimes de dollars EU/minute et nombre d'abonnés . . . . . . . . . . . . . .127 5.8 : Besoins en investissements par année . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .129 5.9 : Classement du climat économique du Burundi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .130 FIGURES 1.1: Dépenses publiques au Burundi, Mozambique, Ouganda, Rwanda et Sierra Léone (en pourcentage du PIB, de 1960 à 2005) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .3 1.2: Des institutions faibles conduisent à des conflits et à une plus grande destruction des institutions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .4 1.3: Comparaison des niveaux de croissance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .6 2.1: Agriculture et PIB réel (taux annuels de croissance, 1970 à 2005) . . . . . . . . . . . . .25 2.2: Croissance du PIB, dépense publique et APD, 1970 à 2005 . . . . . . . . . . . . . . . . . . .28 2.3: Satisfaction en matière de services publics chez les utilisateurs, Burundi 2004 . . .36 2.4: Que devraient être les priorités de votre communauté ? Burundi 2004 . . . . . . . . .37 3.1: Indice de la faim, comparaison internationale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .41 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page v Table des matières v 3.2: Indice de la faim dans le monde (IFM), Burundi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .42 3.3: Part de la population (%) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .42 3.4: Proportion des individus appartenant à des ménages ayant un apport calorique journalier inférieur à 1.900 kcal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .43 3.5: Composition du PIB agricole, 1980­2003 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .50 3.6: Tendances de la production de culture vivrière par habitant, 1990­2005 . . . . . . .53 3.7: Rentabilité des principales cultures vivrières au Burundi (rendement de la terre, travail) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .54 3.8: Proportion des cultures vivrières commercialisées, Burundi, début des années 2000 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .55 3.9: Population 2005 des animaux d'élevage, en pourcentage de la population de 1999 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .68 4.1: Production de café du Burundi (1.000 sacs de 60 kg) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .78 4.2: Prix annuels de l'Arabica (dollars EU/kg) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .79 4.3: Comparaison des prix payés aux producteurs dans les pays d'Afrique de l'Est . . .82 4.4: Impact potentiel des actions prioritaires sur les recettes de l'industrie du thé . . . .92 4.5: Douze actions de relance clé pour améliorer la compétitivité de l'industrie du thé au Burundi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .95 4.6: Exportations horticoles du Burundi, 1987­2002 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .96 5.1: Dépenses d'infrastructure par secteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .118 5.2: Electricité--Capacité installée et demande de pointe (2006), production, ventes et pertes (2002­2006) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .119 5.3: Comment les investisseurs perçoivent la qualité des infrastructures . . . . . . . . . .119 5.4: Tarifs électriques (dollars EU/MW) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .120 5.5: Fonds d'entretien des routes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .122 5.6: Trafic routier en pourcentage du trafic terrestre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .123 5.7: Eau potable : production, ventes et pertes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .125 5.8: Accès à l'eau potable dans les zones urbaines et rurales, 2001 . . . . . . . . . . . . . . . .125 5.9: Tarifs de l'eau (dollars EU/m3) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .126 ENCADRÉS 5.1 : Points saillants du nouveau décret sur la microfinance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .135 5.2 : Les taux d'intérêt sont-ils trop élevés ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .135 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page vi 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page vii Préface A u cours des quarante dernières années, la croissance économique du Burundi a plafonné en dessous de la moyenne subsaharienne. Le pays n'a toujours pas encore connulerebonddecroissanceattenducequiestgénéralementlecaspourlespayssortantd'un conflit.Dans un pays come le Burundi où 63 pour cent de la population souffre d'insécurité alimentaire, la croissance économique demeure un préalable à l'établissement d'une paix durable. Dès lors,un enjeu majeur a été d'identifier et de mettre en oeuvre les activités de relance de la croissance,y compris en stimulant des secteurs moteurs tels que l'agriculture,qui four- nit 94 pour cent des emplois dans le pays,80 pour cent des recettes d'exportation et 40 pour cent du PIB. Ce rapport est une contribution à notre réflexion sur l'identification des moyens de stimuler la croissance rurale pour briser le cercle vicieux de la pauvreté et des conflits au Burundi. En mettant en commun les résultats de l'analyse empirique et normative à tra- vers un large éventail de sources potentielles de croissance pour pays, cet ouvrage identifie les secteurs de l'économie rurale les plus susceptibles de stimuler la croissance et de conso- lider la paix. Elle se focalise sur les besoins à court terme et propose des réformes de poli- tiques et d'investissements pour relancer la croissance et augmenter la sécurité alimentaire, à travers l'augmentation de la production alimentaire et le renforcement de la compétitivité des cultures d'exportation. Cette étude résulte d'une étroite collaboration avec le gouvernement du Burundi et les bailleurs de fonds, notamment l'Union Européenne/Stabex, le Fonds Monétaire Interna- tional (FMI),l'Agence des Etats-Unis pour le Développement International (USAID),l'Or- ganisation des Nations-Unis pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO), le Ministère Britannique du Développement International (DFID), l'Agence Française de Coopération et la Coopération Belge. Nous espérons qu'elle répondra aux attentes des décideurs et Spé- cialistes, ainsi que les autres partenaires au développement impliqués dans à la recherche des moyens de relancer la croissance au Burundi. Elle pourrait également être d'un grand intérêt pour d'autres pays sortant de conflits, où le développement d'une base agricole solide peut durablement stimuler la croissance. Karen Mcconnell Brooks Directrice Sectorielle Agriculture et Développement Rural Région Afrique Banque Mondiale Alassane Sow Représentant Résident de la Banque Mondiale au Burundi vii 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page viii Préface L e rapport sur les sources de croissance rurale au Burundi est le fruit d'un travail méticuleux réalisé par d'éminents Experts de la Banque Mondiale sur demande du Gouvernement du Burundi. Il décrit l'environnement global qui explique l'approfondissement de la pauvreté et formule des propositions pour lever les obstacles à la croissance économique du Burundi. Le Gouvernement du Burundi a défini en collaboration avec ses partenaires au déve- loppement, un Cadre Stratégique de Croissance et de Lutte Contre la Pauvreté (CSLP) et a souscrit aux objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Le présent rapport est un apport important dans la lutte contre la pauvreté dans la mesure où il met l'accent sur la croissance économique du monde rural qui constitue plus de 90% de l'emploi, contribue pour plus de 50% du PIB et plus de 80% de recettes d'expor- tations. Ainsi, l'augmentation du revenu des agents économiques du monde rural produira plus d'effets multiplicateurs au niveau de l'économie nationale. Cela permettra de quitter le cercle vicieux de la misère pour amorcer le cercle vertueux de la croissance économique et de réduction de la pauvreté. En effet,en mettant l'accent sur les réformes des filières d'exportation comme le café,le thé et l'horticulture, le rapport propose la production des produits de spécialité à hautes valeurs ajoutées qui répondent aux exigences des marchés de niche.La pénétration des mar- chés de niche permettra au Burundi d'augmenter ses recettes d'exportation et les revenus aux producteurs agricoles. La réalisation de cette ambition exige au préalable un approfon- dissement de la paix nécessaire à la sécurité des biens et des personnes, la bonne gouver- nance, la stabilité macroéconomique,le développement des infrastructures et l'amélioration de l'environnement des affaires. Le Gouvernement du Burundi se réjouit de ce travail précieux, et s'engage à mettre en oeuvretouteslespropositionspertinentescontenuesdanscerapportencollaborationavectous les agents économiques burundais et les partenaires au développement, afin de renverser la tendance à la paupérisation généralisée du peuple burundais. S. E. Le Deuxième Vice--Président de la République du Burundi Gabriel NTISEZERANA 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page ix Remerciements L e gouvernement du Burundi tient a remercier toutes les personnes qui ont contribué à la réussite de ces travaux. La liste qui suit n'est pas exhaustive, ce n'est qu'un échantillon à travers lequel les autres pourront se reconnaître. Equipe de la Banque Mondiale et consultants internationaux Ce présent rapport résume le travail réalisé par l'équipe multidisciplinaire conduite par Ilhem Baghdadli (Économiste,TTL,AFST3) avec l'appui de Bernard Harborne (Spécialiste en chef, co-TTL, AFTCS). L'équipe comprenait Antonio Eustache (Conseiller senior, SDNVP),Aurore Simbananiye (Assistante de Programmes,AFMBI),Daniel Alberto Benitez (Économiste,FEU),Deo-Marcel Niyungeko (Ingénieur municipal,AFTU2),Elke U.Kreuz- wieser (Expert senior, DSP), Ephraim Kebede (Économiste, AFTP3), Eric Mabushi (Éco- nomiste,AFMBI),Germaine Mafougong (Assistante de Programmes,AFTS3),Guillemette Sidonie Jaffrin (Expert financier, AFTFS), Jean-Paul Zoyem (Consultant, Prem Poverty), Jean-Pascal Nguessa Nganou (Économiste pays, AFTP3), John Baffes (Économiste senior Agriculture,DECRG),Korotimi Sylvie Traore (Assistante de programmes,AFTS3),Michael Morris (Économiste en chef Agriculture,AFTS3),Quentin T.Wodon (Économiste en chef, AFTPM), Susana Carrillo (Expert senior Gouvernance, WBI), Tania Rajadel (Économiste, AFTS3),Vincent L.Fruchart (Spécialiste Conflicts,DVS).Les principaux contributeurs exté- rieurs à la Banque sont : Vincent Glaesener (FAO), Patricia Larbouret (FAO), Marc Moens (FAO), Ba Mbaye (FAO) Alexander Kavalec (FAO), Dan Clay (MSU), Anne Ottawa (MSU) Paul Deluco (MSU) Luis Flores(MSU), Eric Kacou (OTF) and James Foster (OTF), Maurice Wiemer(Chemonics) ; Les rapporteurs du rapport principal étaient Dipack Dasgupta (SASPR),StephenMink(LeadEconomist,AFTSN),VivianFoster(LeadEconomist,AFTSN), Janvier Nkurunziza (UNCTAD),Peter Uvin (The Fletcher School) et Tom Bundervoet (Vrije Universiteit Brussel). La Contribution du Gouvernement du Burundi L'atelier de Janvier 2007 a connu la participation de S. E. Pierre NKURUNZIZA, Président de la République ; tandis que S. E. Gabriel NTISEZERANA, 2è Vice-Président, a participé à l'atelier de Mai 2007. Les membres du Gouvernement ci-après ont également pris part aux travaux des deux ateliers : Denise Sinankwa (Ministre des Finances), Potame Nizigire (Ministre des Travaux Publics et de l'Equipement), Herman Tuyaga (Ministre de l'Energie et des Mines), Donatien Nijimbere (Ministre du Commerce et de l'Industrie), Jean de Dieu Mutabazi (Ministre de l'Agriculture et de l'Elevage) ; L'organisation matérielle des travaux a été assurée par le Projet PAGE, sous la coordi- nation de Séléus Nezerwe ; Les personnes ressources ci-après ont contribué aux travaux : Pr TharcisseYamuremye (Expert macroéconomiste du Page), Nestor Niyungeko (filière café), Charles Ntunguka (Sécurité alimentaire), Cyrille Sigejeje (Secrétaire Général CCIB), Rémy Keza (Service ix 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page x x Remerciements Planification marcoéconomique), Tracy Dexter (Alert International), Charles Ndayiziga (CENAP),Déo Ngendakumana (CURDES),Jean Marie Kavumbagu (Ligue ITEKA),Isidore Toyi (Prasab),Aloys Nizigiyimana (FAO),Potien Kadirigiza (STABEX),Stany Habonimana (Rugo Farm); Les ateliers ont connu aussi une forte participation de cadres de l'Administration Publique, du secteur privé, de la société civile, des ONGs, des bailleurs de fonds, ainsi que les médias. 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page xi Acronymes and abréviations ABEC Association burundaise des exportateurs de café AIC Accord international sur le café APD Aide publique au développement ASS Afrique subsaharienne CAE Communauté de l'Afrique de l'Est CCIB Chambre de commerce et d'industrie du Burundi CGP Cellule de gestion pays CNDD-FDD Conseil national pour la défense de la démocratie--Forces de défense de la démocratie CNRS Commission nationale pour la réhabilitation des sinistrés CWS Station de lavage du café DDR Désarmement, démobilisation et réinsertion DEC Économie du développement DGE Direction générale de l'électricité DGEE Direction générale de l'eau et de l'électricité DGHER Direction générale de l'hydraulique et des énergies rurales DSP Développement du secteur privé DSRP Document stratégique de réduction de la pauvreté DVS Développement social E&M Exploitation et maintenance FAO Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture FBC Formation brute de capital FBu Franc burundais FLF Fruits et légumes frais FMI Fonds monétaire international FNL Forces nationales de libération GAP Bonnes pratiques agricoles GdB Gouvernement du Burundi IDE Investissements directs étrangers IFM Indice de la faim dans le monde IMF Institution de microfinance ISA Institut supérieur de l'agriculture ISABU Institut des sciences agronomiques du Burundi ITAB Institut des techniques agricoles du Burundi MDRP Programme multinational de démobilisation et de réinsertion MI Mortalité infantile MSTQ Métrologie, normalisation, essai et qualité MSU Michigan State University (Université de l'État du Michigan) NCS Nourriture contre scolarisation NCT Nourriture contre travail OCDE Organisation de coopération et de développement économiques xi 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page xii xii Acronymes and abréviations OCIBU Office du café du Burundi ODM Objectifs de développement pour le millénaire ONG Organisation non gouvernementale ONU Organisation des Nations Unies ONUB Opération des Nations Unies au Burundi OTB Office du thé du Burundi OTF On The Frontier (Cabinet de consultance américain, spécialisé en compétitivité) PAM Programme alimentaire mondial PAS Programme d'ajustement structurel PCN Note d'achèvement de projet PDP Personne déplacée à l'intérieur de son propre pays PIB Produit intérieur brut PMA Pays les moins avancés PME Petites et moyennes entreprises PMF Productivité multifactorielle PREM Réduction de la pauvreté et gestion économique PU Population sous-alimentée QUIBB Questionnaire des indicateurs de base du bien-être RDS Réseau de développement social Regideso Régie de production et de distribution de l'eau et de l'électricité RMCP Ratio marginal capital-production RSS Réforme du secteur de la sécurité SCAA Specialty Coffee Association of America (Association du café de spécialité des États-Unis) SFI Société financière internationale SODECO Société de déparchage et de conditionnement du café SOGESTAL Société de gestion des stations de lavage SoRG Sources de croissance rurale SPS Sanitaire et phytosanitaire STABEX (Système de) stabilisation des recettes d'exportation TCER Taux de change effectif réel TIC Technologies de l'information et de la communication TT&P Transport, télécommunications et postes UWC Enfants souffrant d'insuffisance pondérale WBI Institut de la Banque mondiale 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page xiii Résumé analytique A u coeur de la région des Grands Lacs, le Burundi est l'un des pays les plus pauvres du monde.Avec 7 millions d'habitants,la densité de population de ce petit pays enclavé est l'une des plus fortes du continent africain. Des fractures socioéconomiques remontant à l'occupation coloniale du XIXe siècle ont contribué à lui créer un passé particulièrement violent et agité. Marqué par des coups d'État, assassinats de chefs d'État et massacres, le pays a été entrainé dans un cycle de violence et de sous-développement entrecoupé de brèves périodes de paix suivies d'une répression étatique encore plus sévère et de conflits armés. Les accords de paix d'Arusha de 2000, l'accord de Pretoria signé fin 2003 avec le Conseil national pour la défense de la démocratie--Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD), les élections pacifiques de 2005 et le dernier accord de paix de Dar-es- Salaam conclu avec les Forces nationales de libération (FNL) ont ouvert la voie à une période de stabilité relative. Ce fragile processus politique n'a cependant pas connu en parallèle la reprise de la croissance économique constatée dans les pays africains sortant d'un conflit. Il n'en reste pas moins une condition préalable à une paix durable. La présente étude vise à identifier les domaines de l'économie rurale burundaise pré- sentant le plus fort potentiel immédiat de stimulation de la croissance et de consolidation de la paix au cours des trois prochaines années. L'accent à court terme est mis sur l'écono- mie rurale. Il est cependant vital que le Gouvernement du Burundi et ses partenaires s'at- taquent à d'autres domaines critiques à moyen terme pour le soutien de la croissance. Leur capacité à occuper une génération en plein essor, jeune et de plus en plus urbanisée rend particulièrement importants les secteurs de l'industrie et des services. En tant que premier défi, il s'agit de prendre appui sur les bonnes pratiques internationales et l'histoire burun- daise pour développer une base agricole solide,capable de soutenir une croissance durable. Les enseignements tirés des bonnes pratiques recommandent d'une part, un renforcement des institutions pour que l'aide puisse efficacement absorbée et que des réformes ciblées puissent être apportées, et d'autre part, l'élaboration de réformes favorables aux pauvres pour prévenir les risques de conflits. Au Burundi, la faiblesse des institutions a nourri un cycle vicieux de pauvreté et de violence. L'incertitude chronique à encouragé d'investisse- ment opportuniste qui a exacerbé les tensions latentes entre les trois principales compo- santes de la société : l'État, les communautés et le secteur privé. Notre étude identifie les réformes stratégiques et les investissements potentiellement capables de stimuler l'approvisionnement alimentaire et de renforcer la compétitivité des produits agricoles d'exportation, pour intensifier la croissance rurale. Afin de faciliter les interactions constructives entre les trois principales composantes de la société burundaise, l'étude recommande: Au niveau étatique: renforcer les capacités pour que l'État soit à même d'assumer ses responsabilités et de servir efficacement ses composantes, sans être surdimen- sionné ni faire un mauvais usage des fonds publics. Cela devrait encourager une gestion macroéconomique plus efficace ainsi que l'élaboration et la mise en oeuvre de réformes visant à étayer la croissance. Ce dernier exercice implique la privatisa- xiii 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page xiv xiv Résumé analytique tion du principal organisme agricole parastatal et l'identification d'investissements publics prioritaires. Au niveau communautaire : investir dans le capital humain et physique afin de garantir la sécurité alimentaire et de continuer à développer le secteur agricole. Au cours des quarante dernières années de violence cyclique, les communautés ont été si profondément meurtries et ont perdu tant de biens physiques et sociaux que leur aptitude à satisfaire les besoins les plus élémentaires s'en est trouvée amoindrie. L'objectif le plus important à présent est de sortir des conditions d'urgence qui ne se concentrent que sur la subsistance, et de commencer à faciliter le retour à des moyens d'existence souples et à des échanges locaux robustes. Auniveaudusecteurprivé:changerlamanièredeconduirelesaffairesetlesinter- ventions dans ce domaine afin de faire naître des incitations à investir dans la production et la transformation.Le développement économique est généralement stimulé par un secteur privé en expansion qui sert l'intérêt public tout en recher- chant (et trouvant) le sien.Le rôle de l'État est aussi d'encourager ce développement du secteur privé en fixant des règles mettant en accord les intérêts privés et publics. Le but ultime est par conséquent d'augmenter l'implication du secteur privé dans l'économie et sa contribution à une croissance partagée. Le chapitre 1 présente les principales interventions recommandées par l'étude. Le cha- pitre 2 démontre la nécessité d'une performance économique viable et stable au Burundi.Les chapitres 3 et 4 établissent un diagnostic du secteur agricole,et enfin le chapitre 5 suggère des moyens de lever les contraintes les plus fortes. Principales constatations Chapitre 1. Une stratégie pour une croissance dans un milieu rural sensible aux conflits L'histoire mouvementée du Burundi révèle le lien inextricable entre guerre civile et crois- sance, pauvreté et composition économique du pays. Le cycle vicieux de la pauvreté et de la violence a été alimenté par des institutions faibles et l'absence d'un engagement constructif de l'État, des communautés et du secteur privé. Dans le cadre d'un effort à long terme, l'étude définit une nouvelle approche permettant de mieux cibler les investissements et les réformes, et d'aider le gouvernement à conduire un changement positif. La stratégie s'ap- puie sur les principales conclusions du rapport des collaborateurs,émises à la lumière d'une approche à trois piliers, inspirée par Tony Addison [2000]. Ces conclusions sont présentées dans la figure ci-dessous. Chapitre 2. Croissance du Burundi : nécessité d'une performance durable et stable Les faiblesses et la volatilité passées de la croissance du Burundi étaient dues à l'incapacité de l'État à s'engager dans des dépenses publiques efficaces pour développer les maigres richesses du pays. L'incertitude chronique des scènes politique et économique a également encouragé l'investissementopportunisteetlemauvaisusagedesfondspublics,enparticulierdanslesec- teur du café.De plus,les dépenses publiques élevées et inefficacement ciblées ont entrainé un 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page xv Résumé analytique xv --Pilier 1-- --Pilier 2-- --Pilier 3-- Améliorer la gestion Renforcer les communautés Développer le secteur privé macroéconomique et en investissant dans le à travers la chaîne de la capacité de l'Etat capital humain & physique valeurs de l'agriculture ­ Renforcer l'efficacité ­ Appuyer les organisations ­ Elaborer des options de priva- des dépenses publiques de producteurs et les tisation des sociétés parasta- ­ Réduire la dette extérieure services de vulgarisation tales dans les sous-secteurs du café et du thé -­Améliorer la gouvernance ­ Aider les producteurs à et la capacité de l'État être des acteurs ­ Créer un cadre encourageant ­ Investir dans les routes le développement d'un rurales et la gestion de la secteur privé conforme à terre et de l'eau l'intérêt général ­ Développer le petit entrepreneuriat taux d'endettement supérieur à la moyenne de l'Afrique subsaharienne (ASS), avec peu de résultats.Une attention soutenue devrait à présent être accordée au renforcement de la capa- cité de l'État à être un instrument du développement. Dans les situations de post-conflit, l'État doit également être capable d'élaborer et de mettre en oeuvre des réformes favorables auxpauvres.Notreanalysedelapauvretémontrequ'auBurundi,lesménagesdusecteuragri- cole constituent non seulement le groupe le plus important mais également le plus démuni. C'est pourquoi le présent rapport identifie les réformes stratégiques et les investissements potentiellement capables d'améliorer les revenus des ménages de ce secteur. Chapitre 3. Reprise agricole : la sécurité alimentaire et au-delà Si la situation alimentaire du Burundi demeure une grande préoccupation, elle présente également des possibilités de croissance inexploitées. Pendant plusieurs années, certaines parties du pays ont souffert de crises alimentaires causées par la répétition des conflits,l'in- suffisance de la production alimentaire et la croissance rapide de la population engendrée par un taux de natalité élevé et le retour des réfugiés. La culture vivrière et l'élevage de bétail représentent 91 % du PIB et constituent la prin- cipale source de revenus de la plupart des ménages. La performance actuelle de ces filières est très basse et les importations de denrées alimentaires sont en augmentation,exerçant une pression de plus en plus forte sur les réserves de devises. Le faible rendement agricole est dû en partie à l'inefficacité des systèmes de production, à la difficulté d'accès aux intrants, et à l'absence d'investissements dans le capital humain et physique. Avec une augmentation de la demande alimentaire de 3 % à 6 % par an, une amélioration de l'efficacité de la produc- tion agricole et de l'élevage destinés à la consommation locale peut contribuer à la crois- sance. Le chapitre 3 explique plus en détail la question de la sécurité alimentaire du pays et identifie les actions prioritaires visant à surmonter les obstacles à une croissance élevée des filières de la culture vivrière et de l'élevage. Chapitre 4. Cultures d'exportation : vers une contribution significative à la croissance Les cultures de rente représentent quasiment l'essentiel des recettes d'exportation.Le café,de loinleplusimportant,estproduitparprèsde800.000ménagesetreprésente85%desrecettes 11162-00_FM.qxd:11162-00_FM.qxd 6/9/08 3:24 PM Page xvi xvi Résumé analytique d'exportation en dépit de son rendement médiocre.Le thé est actuellement la deuxième plus grande culture de rente. Il contribue pour 12 % au total des recettes de l'exportation. Il est produit par quatre domaines agricoles et plus de 50.000 petits exploitants. L'horticulture a récemment pris de l'extension et semble offrir des possibilités de diversification des risques et des revenus agricoles. Privatiser les filières du café et du thé et développer la petite entreprise dans la filière hor- ticole est essentiel pour augmenter la contribution des cultures d'exportation à la croissance. La privatisation des filières du café et du thé devrait veiller à ce que les transferts de proprié- tés améliorent la compétitivité du secteur et contribuent à la répartition de la croissance. Accroître la contribution de l'horticulture à la croissance appelle une approche différente et dépendra de l'amélioration du climat des affaires et de l'accès au financement rural. Chapitre 5. Surmonter les principaux obstacles à la croissance Dans le Burundi post-conflit, la faible sécurité des biens et des personnes constitue un obs- tacle majeur et le surmonter requiert de renforcer la sécurité et la justice tout en réduisant les inégalités et la discrimination.La prévention des conflits nécessitera aussi une meilleure ges- tion des questions foncières qui alimentent les tensions et réduisent les investissements. Compte tenu de ses ressources financières,de sa situation d'enclavement et de son carac- tère essentiellement rural, le Burundi post-conflit a connu des difficultés considérables à développer des services d'infrastructure efficaces. Le renforcement du réseau routier rural pour faciliter une meilleure commercialisation locale des produits alimentaires constitue une priorité immédiate. L'étape urgente suivante est la rationalisation de la production et de la distribution de l'énergie afin d'améliorer l'utilisation des installations existantes.Le dévelop- pement de la production et de la distribution de l'électricité pourrait également encourager la transformation des produits agricoles et l'apport d'une valeur ajoutée. Enfin, faire des affaires reste coûteux et risqué. Le Burundi doit améliorer son cadre juridique et réglementaire,renforcer les institutions publiques qui soutiennent l'entreprise privée, et rendre plus abordables les facteurs de production. 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:25 PM Page 1 CHAPITRE 1 Une stratégie pour une croissance dans un milieu rural sensible aux conflits Bernard Harborne, Ilhem Baghdadli et Tania Rajadel C e travail vise à identifier les domaines de l'économie rurale burundaise qui ont le meilleur potentiel de stimulation de la croissance et de consolidation de la paix. Il se focalise sur les trois prochaines années et la manière dont le gouvernement burundais peut aider sa population à se reconstruire matériellement après une longue période de guerre civile. Même s'il est important d'intégrer une génération de plus en plus urbanisée dans les secteurs de l'industrie et des services, une base agricole solide n'en constitue pas moins un élément clé pour réussir à rompre le tragique cycle de la violence au Burundi. Toute la question est là : quelle stratégie de croissance est-elle capable de rompre le cercle vicieux de la violence ? Qu'y a-t-il de différent en 2007 par rapport aux autres périodes de reconstruction post-conflit de l'histoire burundaise et qui offre plus de chance de succès à cette stratégie de croissance ? Pour répondre à ces questions, ce chapitre passe en revue l'histoire de violence du Burundi et sa relation avec la croissance économique. Il s'inspire également de l'expérience d'autres pays qui connaissent des périodes de transition semblables ainsi que des leçons qui peuvent s'avérer utiles. Une histoire de violence cyclique Le Burundi a un long passé de turbulences, marqué par l'une des statistiques de violence les plus sombres du continent--assassinats de chefs d'États, fréquence des coups d'États et massacres au cours des quatre dernières décennies. On peut distinguer quatre périodes dis- tinctes de croissance partielle et de crises. 1 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:25 PM Page 2 2 Document de travail de la Banque Mondiale 1962­1972--Indépendance et croissance économique limitée (en moyenne 2 % de croissance du PIB par habitant) combinée à une montée de la violence interethnique. En 1972, une rébellion conduit au massacre de quelque 300.000 Hutus et fait chu- ter la croissance du PIB annuel à -7 %. 1973­1991--Accalmierelative,croissanceconstanteetaugmentationdufluxdel'aide étrangère avec l'interruption de la violence. La période comprise entre le début des années 70 et la moitié des années 80 est marquée par une augmentation de l'aide et des emprunts accompagnée de quelques reformes. Cependant, en 1987, le premier coup d'État de Buyoya, qui a vu le massacre de près de 20.000 personnes et la fuite au Rwanda de plus de 60.000 réfugiés, a ouvert la voie à l'instabilité politique. 1992­2000--Guerrecivileetcriseéconomique.Lereferendumde1992voitl'instau- ration du multipartisme et l'élection de Melchior Ndadaye en tant que premier pré- sident Hutu en 1993. Son assassinat, cette même année, entraîne le massacre de plus de 100.000 personnes et la fuite de plus de 500.000 réfugiés. La crise économique qui s'en suivit est aggravée par l'embargo économique infligé au pays à la suite du second coup d'État de Pierre Buyoya en 1997. Des pourparlers de paix sont entre- pris en 1998. 2000­2007--Accorddepaixettransitionfragile.En2000,prèsde90partiessignent l'Accord de paix d'Arusha, une étape décisive mais fragile. Le processus avait d'abord été appuyé par une mission de maintien de la paix de l'Union africaine et une autre des Nations Unies par la suite. En 2005, des élections pacifiques portent Pierre Nku- runziza du CNDD-FDD au poste de président. Sur le plan économique, l'embargo est levé en 1999, permettant aux bailleurs de fonds de participer à la relance du pays. La performance du Burundi reste médiocre (le PIB réel n'augmente que de 0,9 % en 2005), d'où l'urgence de s'attaquer à la question de la croissance. Cette histoire de violence épisodique montre le lien inextricable entre la guerre civile et la croissance, les niveaux de pauvreté et la composition économique du Burundi. Nous y trouvons des périodes de paix relative accompagnées de périodes de violence féroce et bien organisée. Scully (1997) expose bien cette corrélation entre pauvreté et guerre : « [ . . . ] les pays qui tuent leur propre population sont plus pauvres et se développent plus lentement que ceux qui ne le font pas [ . . . ] les massacres perpétrés au Burundi entre 1965 et 1990 ont réduit de 54,8 % le PIB.» Étudier les conflits aux niveaux de la communauté, de l'État et du secteur privé Comme le fait remarquer la section consacrée au conflit du chapitre 5, un certain nombre de causes majeures sont à la base du conflit. Cependant, l'histoire de violence du Burundi se caractérise essentiellement par le rôle répressif de l'État envers certaines parties de la population, principalement associées à l'identité hutu. De plus, au Burundi, l'État joue un rôle prédominant et on peut constater qu'en plus des longs épisodes de violence dont a souffert le pays, la politique de l'État et l'investissement ont, en période de paix, renforcé 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:25 PM Page 3 Rompre le cercle vicieux 3 la distribution inégale des ressources entre les différentes couches de la population, entre- tenant ainsi le sous-développement. Les dépenses publiques burundaises représentent la part de PIB la plus grande de toute la sous-région. Elles sont nettement supérieures à celles de sociétés comparables connais- sant de semblables périodes de transition guerre-paix. (Figure 1.1). Figure 1.1. Dépenses publiques au Burundi, Mozambique, Ouganda, Rwanda et Sierra Léone (en pourcentage du PIB, de 1960 à 2005) 30.00 25.00 20.00 15.00 10.00 5.00 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 0.00 Burundi Mozambique Rwanda Sierra Léone Ouganda Source : Banque mondiale, Indicateurs de développement dans le monde. Le Burundi a connu une guerre totale et est entré dans un cycle de sous-développe- ment--conflit, où chaque période de cessation des hostilités semble avoir été suivie d'une résurgence apparemment inévitable du conflit. Addison (2001) décrit ce cercle vicieux de pauvreté et de violence ainsi que ses effets sur les trois principales composantes de la société que sont les communautés, le secteur privé et l'État (Figure 1.2). Pour lui, le cycle peut être rompu en transformant les institutions étatiques et en leur apportant la capacité et des motivations pour encourager les interactions constructives entre ses composantes. Des institutions faibles et l'instabilité macroéconomique génèrent une incertitude chro- nique qui encourage l'investissement opportuniste, réalisé en fonction des circonstances et non d'une stratégie, et attise les tensions entre les communautés, le secteur privé et l'État. Les trois acteurs adoptent tous des mesures pour survivre, s'adapter ou exploiter. Auniveaudel'État,lecycledepauvretéetdeviolenceestgénéralementassociéàla faiblesse des capacités, à un comportement de prédation et à la corruption, avec des investissements biaisés en faveur de certains groupes, régions et secteurs. L'État échoue ainsi à mettre en place un cadre susceptible d'attirer les investissements du secteur privé, d'aider les communautés pauvres à améliorer leurs perspectives d'avenir et d'encourager des interactions constructives entre ces composantes. Lesecteurprivémanquedemotivationpoursedévelopperdanslesensdel'intérêt public et pour recréer des marchés et de l'emploi. Il se focalise sur le commerce plu- tôt que sur les investissements à long terme dans la production, ceux-ci étant plus vulnérables à la prédation. 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:25 PM Page 4 4 Document de travail de la Banque Mondiale Figure 1.2. Des institutions faibles conduisent à des conflits et à une plus grande destruction des institutions Passé de faiblesse des institutions - Formelle ex. lois, constitution - Informelle ex. valeurs partagées, éthique Incertitude chronique Résultats à court terme Investissements opportunistes accrus Sous-investissement et investissement déséquilibré Par les communautés Par le secteur privé Par l'État - Faibles investissements, - Accent sur le commerce - Faible capacité de l'État dans le capital humain, physique et naturel - Sous-investissement dans - prédation / corruption - Capital social fracturé la production - Investissement social et - Accent sur la subsistance économique insuffisant/ pour d'éviter l'expropriation Réseaux d'affaires étroits déséquilibré Croissance faible et déséquilibrée Conflit Destruction des institutions Source : Addison 2003. Auniveaudescommunautés,lemanqued'investissementspublicsetprivésaggrave les inégalités sociales, la stratification et les risques de conflits. La pauvreté et la vio- lence fracturent également le capital social et brisent la confiance au sein et entre les communautés d'une part et entre ces communautés et l'État d'autre part. Ces stratégies d'adaptation entraînent une croissance faible et non équilibrée qui attise le conflit, contribue à saper les institutions et conduit à un nouveau cycle de pauvreté et de vio- lence. Les principales leçons impliquent une transformation des institutions et des politiques pour favoriser des interactions constructives entre l'État, le secteur privé et les communautés. En adaptant les leçons d'Addison au Burundi, on arrive à des résultats éloquents. 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:25 PM Page 5 Rompre le cercle vicieux5 État Les institutions gouvernementales ont été des instruments d'oppression violente, des dis- tributeurs inéquitables de l'investissement et des organismes injustes de contrôle des mar- chés. Comme souligné au chapitre 4 à propos des cultures de rente, le café en particulier, les investissements publics ont été biaisés en faveur de certaines zones géographiques et de certaines classes de la société. En outre, le plan quinquennal de 1988­1992 « n'a alloué que 16 % de ses fonds d'investissements au développement rural tandis que l'essentiel est allé aux centres urbains où étaient concentrées les entreprises industrielles et de services large- ment aux mains des sociétés parapubliques et de l'élite Tutsi » (Gaffney 2000). À la fin des années 90, les Tutsis de Bururi géraient ainsi 60 % des plus grandes entreprises publiques (ICG 2004). De plus, au milieu des années 80, « Bujumbura et ses environs immédiats absorbaient 50 % de l'investissement total de la nation, tandis que la province du Bururi drainait à elle seule un autre 16 %.» (Gaffney 2000). C'est dans le secteur de l'éducation que le schéma d'investissement a probablement été le plus biaisé. Selon les estimations, vers la fin des années 80, « près de 60 % du total de l'aide extérieure destinée au financement de l'éducation est allée à Bururi, une province sur les 15 que compte le pays » (Jackson). En 2001, « les dépenses du gouvernement en faveur de l'enseignement supérieur représentaient 692 % du PIB par habitant contre 60 % pour l'enseignement secondaire et 12 % pour l'enseignement primaire » (Ndikumana, 2004). Le problème pour le gouvernement n'est pas seulement celui de la taille de la consom- mation de l'État (Figure 1.1.), la dépense publique constituant, en particulier dans les situa- tions d'après-conflit, un aspect vital de la construction de la paix. La question est de savoir comment un État soucieux du développement peut réaliser ces investissements de façon à promouvoir la croissance et redistribuer--plutôt qu'accaparer--les ressources. Secteur privé Le chapitre 2 traite de l'incapacité de l'État à encourager l'investissement privé en offrant une stabilité macroéconomique, en respectant le cadre légal et les droits de propriété, et en développant l'investissement public dans le sens de l'intérêt public. Le chapitre 5 évoque les faiblesses spécifiques du climat de l'investissement, soulignant notamment la nécessité d'une reforme de l'investissement et du code bancaire. À ce jour, le secteur privé burun- dais s'est essentiellement engagé dans le commerce, l'import-export, et a largement ignoré le secteur agricole, à l'exception de petits investissements dans la production en amont de cultures de rente. Le commerce est certes crucial--surtout dans un pays enclavé--et les relations commerciales dans la sous--région sont très importantes. Mais, il n'en faut pas moins motiver le secteur privé à investir dans les activités de production et de transforma- tion en plus du commerce. Communautés Au Burundi, le manque de ressources au niveau familial est plus simplement décrit par le niveau d'insécurité alimentaire détaillé au chapitre 3. Dans la région nord du pays, presque la moitié de la population ne bénéficie que d'un apport calorique journalier de 1.400 kcal alors que dans le sud, moins d'un cinquième de la population vit dans des ménages avec un apport calorique très faible. Le dernier Indice de la faim dans le monde (IFPRI, 2006) 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 6 6 Document de travail de la Banque Mondiale classe le Burundi comme le pays qui a les pires indicateurs au monde. La productivité agri- cole y est la plus faible de la sous-région. La filière café, dont il est question au chapitre 4, illustre la relation entre l'État et les communautés.Lesinstitutionsétatiquesontimposédespolitiquesagricolesàunepopulation rurale réticente, y compris la plantation de caféiers et l'utilisation d'engrais. Les communau- tés productrices de café y ont répondu par des actions évasives, telles que la fraude ou même une rébellion ouverte comme les feux de brousse. Historiquement, cela a souvent été résolu par une violente répression. (cf. Oxfam 2002, International Alert 2007). Nous notons également que les ménages burundais ne peuvent être traités comme une composante générique. Il y a de grandes différences géographiques entre les niveaux de pauvreté des différentes provinces, et dans la stratification selon les différents groupes basés sur les mêmes moyens de subsistance. Comme l'a mis en évidence une récente étude de CARE, il y a de graves différences liées au genre. Ce rapport relève une recrudescence de la violence sexuelle et une augmentation des risques de transmission du VIH/SIDA juste après la récolte du café, lorsque les hommes usent de tactiques sexuelles violentes pour contrôler l'argent le plus souvent gagné par les femmes pendant la récolte. Briser le cercle vicieux En regardant le modèle d'Addison, pour sortir du cercle vicieux du sous-développement le Burundi doit changer ses institutions étatiques et encourager des interactions fruc- tueuses entre l'État, le secteur privé et les communautés, afin de poser les bases d'une crois- sance et d'une paix durables. Il est crucial de relancer cette croissance après sept années de stabilité relative. L'expérience montre qu'il y a normalement une reprise de la croissance économique dans les économies post-conflit, du fait d'une plus grande sécurité et pro- ductivité. Cela n'a pas été le cas pour le Burundi (voir Figure 1.3 ci-dessous), ce qui met en évidence les contraintes structurelles imposées à la croissance en période de paix tout comme pendant le conflit armé. Figure 1.3. Comparaison des niveaux de croissance 40 35 30 25 20 15 % 10 5 0 -5 A0 A1 A2 A3 A4 A5 -10 -15 Années Burundi (A0=2000) Mozambique (A0=1992) Rwanda (A0=1995) Sierra Léone (A0=2000) Ouganda (A0=1987) Source : Addison 2003. 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 7 Rompre le cercle vicieux7 Prévenir les risques de conflit Depuis la signature des accords d'Arusha en 2000, le Burundi a été gagné par un optimisme jamais connu depuis les longues années de conflit armé. Les élections réussies d'août 2005 ont vu le transfert pacifique du pouvoir à un gouvernement de large coalition CNAA-FDD, avec à sa tête Pierre Nkurunziza. Elles ont été suivies par la signature en septembre 2006, d'un accord de paix totale entre le gouvernement et le FNL à Dar es Salam. Le cercle vicieux du sous-développement et des conflits a-t-il été rompu ou s'agit-il simplement d'une prolongation de la cessation des hostilités ? On a observé des tendances semblables au début des années 90 lorsque les élections démocratiques ont abouti à la mise en place d'un gouvernement orienté vers les réformes, mais celles-ci ont pris fin avec la reprise de la guerre civile en 1993. Au cours de l'année écoulée, un certain nombre de rapports1 ont dénoncé la poursuite des violations des droits de l'homme, la corruption et l'instabilité politique en tant qu'indica- teurs objectifs de fragilité et de risques de reprise des hostilités. Comme l'indiquent des études récentes, il peut s'avérer dangereux de considérer comme certaine la probabilité de résurgence d'un conflit (Suhrke et Samset 2007). La valeur ajoutée du travail de la Banque mondiale (Collier, 2003) n'a pas seulement été de mettre en évidence le risque de résurgence d'un conflit--26 % à 40 % en fonction des années qui se sont écoulées depuis l'accord de paix--mais aussi de souligner les types de risques qui pourraient y conduire. Ce travail a été réalisé de manière beaucoup plus rigoureuse au Burundi (Ndikumana 2004), surtout en ce qui concerne les facteurs de risques incluant la faiblesse des revenus, la dominance de certains groupes ethniques, l'exportation de produits primaires, la durée de la paix entre les conflits, et les niveaux d'éducation secondaire atteints par les garçons. Le défi pour les gouvernements et les partenaires internationaux est de voir comment réduire ces risques. Même si chaque situation post-conflit est spécifique au contexte, une expérience générique pour donner des orientations sur le type de politiques et de stratégies qui ont fonctionné ailleurs. Un certain nombre de facteurs clés se sont, en particulier, révé- lés cruciaux au cours de la période dite d'après-conflit. Assurer la sécurité L'ingrédient clé du succès du Burundi a jusqu'ici été la sécurité de la transition qui, malgré certains changements dans le calendrier, est restée d'actualité depuis Arusha et au-delà des élections de 2005. Le rôle des forces de maintien de la paix dans la réduction des risques en période de transition est de plus en plus décisif (Sambanis 2002). Cela a un effet multiplica- teur essentiel puisque « sans sécurité, la situation post-conflit risque d'être jugée trop précaire pour attirer les investissements nécessaires au développement économique » (Collier 2003). Favoriser une croissance pro-pauvres et l'emploi des jeunes La croissance économique est primordiale pour favoriser la relance post-conflit et résoudre les problèmes structurels profonds liés à la faiblesse du revenu par habitant. L'expérience 1. Rapports 2006 de ICG et Swiss Peace FAST 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 8 8 Document de travail de la Banque Mondiale montre qu'une reprise de la croissance du PIB constitue la norme immédiatement après la signature des accords de paix, du fait du retour d'une certaine stabilité. Dans les pays en tran- sition, une telle croissance doit en retour se faire clairement au profit des pauvres. « A moins que les politiques ne soient explicitement pro-pauvres, les efforts de relance risquent d'être limités et de ne profiter qu'à l'élite. Si les perspectives légitimes de travail et les salaires sont restreints, les ex-combattants démobilisés auront peu d'opportunités d'emploi en dehors de la guerre et du crime, tandis que les difficultés économiques offriront aux démagogues des occasions d'exploiter les rivalités ethniques et les tensions politiques, et de saper ainsi le processus de paix lui-même » (Elbadawi, Kaltani et Schmidt-Hebbel, 2007). Dans les pays comme le Burundi, où trois personnes sur cinq ont moins de vingt ans, il est également vital de promouvoir l'emploi des jeunes. Améliorer l'efficacité de l'aide internationale Les économies post-conflits représentent des opportunités de croissance et de reforme politique. En règle générale, il a été démontré dans les situations de conflit que « les bailleurs de fonds peuvent fournir trop d'aide trop tôt et réduire les flux d'aide trop rapidement, au moment même où les économies post-conflit sont prêtes à absorber un plus grand flux d'aide » (Elbadawi, Kaltani et Schmidt-Hebbel, 2007). Par ailleurs, « la fin d'une guerre civile créé une phase temporaire au cours de laquelle l'aide est particulièrement efficace pour le processus de croissance [ . . . ] pendant le premier épisode de paix totale, la capacité d'ab- sorption de l'aide atteint presque le double de son niveau normal. Tout comme pour l'aide dans des circonstances plus normales, la capacité d'absorption dépend des politiques, mais, en fonction de celles-ci, l'aide peut s'avérer considérablement plus efficace » (Aid, Policy and Growth in Post-Conflict Societies, Collier et Hoeffler 2002). L'intervention de l'aide a eu un certain impact sur les tendances au Burundi. Par le passé, l'assistance a plus souvent été utilisée pour contrôler la violence que pour s'attaquer à ses causes structurelles sous-jacentes (Ngaruko et Nkurunziza, 2004). À titre d'exemples, on peut citer : (a) la pression exercée par les bailleurs de fonds sur le gouvernement en faveur de la création d'une Commission nationale après les massacres de 1988 encourageant la mise en place d'un gouvernement de large ouverture ; (b) l'embargo commercial imposé en 1996 après le deuxième coup d'État de Buyoya ; et (c) les conditionnalités imposées au gouverne- ment pour qu'il commence à inclure le CNDD de l'après Arusha. Au mieux, l'aide peut être un instrument de stimulation mais, historiquement, elle a plutôt été un outil de réaction dans la mesure où elle s'opposait à toute contribution au maintien de la croissance. Mise en oeuvre immédiate des reformes politiques essentielles pour une paix durable L'expérience tirée d'autres transitions montre que les périodes d'après-conflit sont des moments particulièrement opportuns pour entreprendre les réformes nécessaires à la mise en cohérence de l'aide supplémentaire avec les stratégies de croissance. Même si les périodes de transition guerre-paix sont fragiles par nature, elles n'en offrent pas moins des opportu- nités de fédérer l'État et le secteur privé autour d'intérêts soutenant des objectifs de stabilité à long terme plutôt que des avantages personnels à court terme. 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 9 Rompre le cercle vicieux 9 Les élites peuvent manipuler les reformes politiques à des fins personnelles. C'est ce que Nkurunziza et Ngaruko (2004) appellent le « marché des reformes ». Les processus de reforme sont entrepris lorsque des oligopoles peuvent maximiser leurs opportunités de recherche de profit pendant que les bailleurs de fonds imposent le plus de conditions et de priorités possibles. Étant donné l'asymétrie de leurs informations, les bailleurs de fonds en sortent inévitablement perdants. En ce sens, « la reforme a fait partie intégrante d'un cercle vicieux où des politiques de distribution conçues de façon biaisée ont provo- qué la répétition de violents conflits. Ceux-ci ont façonné un leadership politique qui, à son tour, a conçu des reformes et des politiques de distribution biaisées en faveur des membres des classes dirigeantes » (Nkurunziza et Ngaruko, 2004). La croissance et la reforme politique sont des ingrédients clés dans les situations d'après-conflit. Les réformes politiques peuvent cependant souffrir de leur manque de connaissance de l'économie politique sous-jacente. Cela est particulièrement important dans les périodes de transition post-conflit où les risques de résurgence restent les plus éle- vés et où par le passé, la relance et les politiques économiques ont été traitées séparément de la prévention des conflits (Addison, 2001). Principales leçons tirées des pratiques modèles internationales Si on considère la difficile histoire du Burundi, il est évident que de nouvelles approches doivent être adoptées pour permettre au gouvernement d'être un instrument de change- ments positifs. Même si notre travail est orienté à court terme, il fait parti d'un effort à plus long terme qui implique l'application de quatre leçons dans le processus de consolidation de la paix et de la croissance. Leçon 1: Mettre en place un cadre cohérent de construction de la paix Il apparaît clairement dans la littérature et les bonnes pratiques2 que la tendance devait être d'assurer des stratégies d'édification de la paix cohérentes qui renforcent les liens entre les différentes composantes de sécurité, politiques et de développement. Le gouvernement burundais a clairement formulé sa stratégie globale pour le pays dans le Document de stra- tégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP) de septembre 2006. Le DRSP comprend les trois piliers essentiels au maintien de la paix : l'amélioration de la sécurité et de la gouver- nance ; la réalisation d'une croissance équitable et durable ; et le développement du capi- tal humain. En mai 2007, les bailleurs de fonds ont engagé 665,6 millions de dollars EU dans le financement du plan d'action de réduction de la pauvreté jusqu'en 2010--un signal fort de leur appui. L'une des composantes critiques de la stratégie--sécurité et gouvernance-- constitue l'élément majeur du plan d'action des Nations Unies pour la construction de la paix qui a bénéficié d'un appui de 50 millions de dollars EU de la toute nouvelle Commis- sion de consolidation de la paix des Nations Unies. Ce plan accorde une importance parti- culière à la réforme de l'armée et de la police, ainsi qu'au renforcement des capacités en 2. Directives de l'OCDE DAC sur les États fragiles 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 10 10 Document de travail de la Banque Mondiale matièrederespectdel'Étatdedroit,unélémentessentieldelastabilitéàlongterme.Dessignes récents venus du Timor oriental et le rôle joué par les militaires burundais dans le passé montrentquelareformedusecteurdelasécuritéestunélémentclédetoutepaixdurable.Son complément est l'accent sur la relance de la croissance économique. Leçon 2 : Concevoir des réformes pro-pauvres dans les pays en situation de post-conflit Le chapitre 3 confirme le sous-investissement dans certains secteurs économiques, l'éco- nomie rurale en particulier. Aussi, le secteur rural a-t-il été ciblé « étant donné qu'au Burundi, quand le secteur agricole va, tout va » (Ndikumana, 2004). L'expérience mondiale montre que les stratégies de croissance dans les pays en développement doivent avoir une forte composante agricole--« les stratégies agricoles ne peuvent à elles seules conduire au succès. Néanmoins, le contraire est vrai aussi : dans les pays les plus pauvres, la croissance économique et la réduction durable de la pauvreté ont peu de chances d'aboutir sans la sti- mulation préalable d'une croissance durable de la production agricole » (Agriculture and Achieving the MDGs, Banque mondiale, 2005). En plus d'être basée sur le secteur rural, la stratégie doit recadrer les investissements pour qu'ils profitent aux pauvres, et en particu- lier pour qu'ils assurent une distribution plus équitable de la croissance et des revenus par habitant entre les provinces burundaises. Leçon 3 : Renforcer les institutions pour permettre une absorption effective de l'aide Des montants d'aide élevés ne peuvent être efficacement utilisés que si les bailleurs de fonds ont une meilleure compréhension de la dynamique de l'économie politique et si les capacités de l'État sont renforcées. « L'impact de l'aide dépend de la qualité des institutions et des politiques de l'État » (Aid, Policies, and Growth: Revisiting the Evidence, Burnside et Dollar, 2004). De plus, « par le passé, l'aide n'a pas systématiquement entraîné d'améliorations des institutions et des politiques. L'expression `par le passé' est très importante. Par le passé, l'aide a été allouée sans tenir compte des institutions qui étaient critiques pour la croissance du pays » (Burnside et Dollar, 2004). Comme indiqué, les bailleurs de fonds sont prêts à enga- ger des financements importants dans les stratégies du gouvernement. Cependant, pour que cet effort soit durable, il sera essentiel de renforcer les institutions gouvernementales, en particulier dans des domaines tels que la gestion financière transparente et responsable, la mise en oeuvre des projets et le suivi-évaluation. Leçon 4 : Accorder des priorités aux reformes pour lever les contraintes les plus lourdes Les leçons tirées des années 90 montrent que pour catalyser la croissance, il faut identifier les principales contraintes et concevoir des investissements et reformes capables de les allé- ger. Il n'existe aucun ensemble formel de règles permettant de déterminer exactement quelles sont ces contraintes même si certains cadres, tels que celui de Hausmann, Rodrik et Velasco (2005), peuvent être utilisés lorsque des informations pertinentes sont disponibles. Mais, pour chaque cas, le pragmatisme et la spécificité du pays doivent être les principaux guides des décideurs politiques. 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 11 Rompre le cercle vicieux11 Dans les situations d'après-conflit, le cadre d'Addison constitue un moyen utile pour organiser les actions et s'assurer que les trois principales composantes de la société (com- munautés, secteur privé et État) bénéficient d'interventions de renforcement. Toutes trois sont des acteurs essentiels du secteur rural et surtout, dans le développement des cultures vivrières et de rente. Quelles actions faut-il pour promouvoir la croissance, s'attaquer à leurs faiblesses respectives et améliorer leurs forces ? Les sources de la stratégie de croissance rurale Sur la base des pratiques modèles internationales et de l'histoire burundaise, notre travail définit les interventions nécessaires au développement de relations constructives entre l'État, les communautés et le secteur privé dans le but de promouvoir une croissance durable. Ces interventions qui s'inscrivent dans l'objectif global de bonne gouvernance, comprennent des reformes et des investissements destinés à améliorer la capacité et la responsabilité de l'État, à relancer la production vivrière et à améliorer la contribution des cultures d'ex- portation à la croissance. Elles visent également à lever les contraintes les plus lourdes qui pèsent sur les infrastructures et le climat des affaires. Pilier 1 : Renforcer la gestion macroéconomique et améliorer les capacités de l'État Pour sortir du cercle vicieux de la violence et de la pauvreté, les institutions burundaises doi- vent être transformées pour les rendre capables de favoriser des engagements constructifs entre l'État, les communautés et le secteur privé. À terme, ces changements devraient per- mettre une utilisation plus efficace des fonds publics et la mise en place d'un cadre per- mettant au secteur privé de se développer dans le sens de l'intérêt public. De tels efforts devraient contribuer à réduire la prédominance de l'État tout en améliorant l'efficacité de la dépense publique, la gestion de la dette extérieure et la responsabilisation de l'État. Ces efforts devraient, enfin, aider les communautés pauvres à améliorer leurs revenus et leurs perspectives. Renforcer la gestion macroéconomique pour soutenir une croissance durable. Dans son analyse macroéconomique, le chapitre 2 associe la croissance instable du Burundi à une mauvaise gouvernance, à des dépenses gouvernementales élevées, inefficaces et mal ciblées ainsi qu'à un ratio d'endettement supérieur à la moyenne de l'Afrique subsaharienne. LafilièrecaféduBurundifaitpreuved'unefaiblegouvernance.Cettefilière,quibéné- ficie pourtant de la plus grosse part des investissements publics, ne montre aucun accroissement de compétitivité (Chapitre 4). Le cycle de la violence et le manque de transparence facilitent, dans tous les secteurs de l'économie, une mauvaise utilisation des fonds publics, depuis une faible conception et/ou exécution des dépenses jus- qu'à une corruption envahissante. L'économie est, donc, restée très dépendante de la filière café qui elle, continue à n'apporter qu'une piètre contribution à la croissance. Les principes de bonne gouvernance doivent maintenant être appliqués au Burundi pour fournir aux institutions étatiques la motivation et la capacité de mieux gérer les fonds publics et de mettre le pays sur la voie de la croissance durable. 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 12 12 Document de travail de la Banque Mondiale Tableau 1.1. Actions recommandées pour renforcer la croissance rurale Interventions ciblées Pilier 1 : Améliorer la gestion macroéconomique et la capacité de l'État 1 : Favoriser une reforme macroéconomique pour soutenir une croissance durable 1.1. Mettre en oeuvre les principes de gouvernance conformément aux pratiques modèles internationales ; 1.2. Renforcer la capacité et la responsabilisation de l'État en matière de conception et d'exé- cution efficaces des dépenses publiques ; 1.3. Améliorer la gestion de la dette extérieure. 2 : Renforcer les capacités de l'État à initier des politiques pro-pauvres 2. Développer et mettre en oeuvre une méthodologie de réalisation d'un recensement agricole 3. Réaliser une étude sur le droit foncier 4. Rechercher d'autres sources de croissance dans et en dehors du secteur agricole. 5. Réaliser une étude régionale de la compétitivité de la culture vivrière et de l'élevage au Burundi avant de concevoir la nouvelle génération d'investissements 6. Réaliser une enquête sur le trafic 7. Réaliser une étude sur les tarifs des services Pilier 2 : Renforcer les communautés en investissant dans le capital humain et physique 1 : Aider les communautés pauvres à améliorer leurs revenus et perspectives 8. Appuyer les organisations de producteurs et les services de vulgarisation 9. Aider les organisations de producteurs à devenir des acteurs des filières café et thé. 2 : Investir dans les routes rurales et la gestion de l'eau et des sols 10. Investir dans la gestion de l'eau et des sols afin d'intensifier la production agricole de manière durable 11. Financer la construction, la réhabilitation et l'entretien des routes, en accordant une prior- ité au réseau rural 12. Appuyer la création de 10 MW supplémentaires Pilier 3 : Développer le secteur privé à travers les chaînes de valeurs agricoles 1 : Choisir des options pour la privatisation des entreprises parastatales dans les filières café et thé 13. Lancer des programmes pilotes de petits investissements dans les infrastructures, l'intelli- gence des marchés, le transfert des connaissances et des compétences 14. Faire appel aux garanties de la MIGA pour les phases initiales de la privatisation à venir afin de réduire les risques perçus par les investisseurs étrangers et augmenter leur appétit et volonté de payer pour pénétrer les marchés burundais 2 : Mettre en place un cadre favorable au développement du secteur privé dans le sens de l'intérêt public 15. Améliorer le climat des affaires par la mise en place d'un cadre règlementaire et juridique conforme aux pratiques modèles et lancer un programme d'évaluation du secteur financier 16. Apporter une assistance à un système d'intrants viable Larelancedelacroissanceburundaisepasseparuneaméliorationdelacapacitéde l'État à concevoir et à mettre en oeuvre des reformes politiques et des investissements efficaces. Les domaines d'amélioration comprennent la mise en place d'un système opérationnel de gestion de la dépense publique, l'arrêt des allocations inadéquates des dépenses publiques, et la réduction au minimum des faiblesses de l'exécution du 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 13 Rompre le cercle vicieux13 budget. Ce système devrait améliorer la transparence de l'allocation budgétaire et l'efficacité de la dépense en permettant à la société d'accepter et de soutenir les orien- tations stratégiques de la dépense publique et des réformes qui y sont associées, de contrôler l'action du gouvernement, et de tenir celui-ci pour responsable des résul- tats obtenus. Enfin, le Burundi a une dette extérieure élevée (par rapport aux autres pays de l'ASS) qui demande à être gérée de manière à minimiser les externalités négatives sur les investissements et la croissance économique. Les obligations de service de la dette du pays peuvent éroder la confiance dans les réformes économiques en cours et participer à une dynamique politique néfaste fondée sur l'allègement de la dette plutôt que sur l'amélioration de la croissance. Finalement, des niveaux de dette éle- vés peuvent conduire à des lourdeurs administratives supplémentaires, aggravant ainsi les contraintes qui pèsent déjà sur les capacités et ralentissant le développement d'institutions publiques capables. Améliorer la capacité de l'État à entreprendre des politiques pro-pauvres. Nous sommes bien conscients que la croissance est une condition nécessaire mais pas suffisante pour réduire la pauvreté dans le Burundi d'après conflit. Les leçons tirées des pratiques modèles dans des contextes similaires montrent que la conception et la mise en oeuvre des stratégies doivent être explicitement pro-pauvres pour aider les communautés à améliorer leurs pers- pectives, restaurer la confiance et favoriser des relations constructives entre et au sein des communautés. Une analyse approfondie du profil de la pauvreté au Burundi a donc été réalisée pour identifier les vulnérabilités spécifiques et les opportunités potentielles à prendre en compte pour définir de solides reformes sectorielles et cibler efficacement les investissements. Cette analyse montre que les populations rurales et les jeunes font partie des groupes les plus vulnérables. À court terme, la stratégie de croissance devrait donc se focaliser sur le secteur rural et l'emploi des jeunes. Interventions recommandées. Dans un pays comme le Burundi, où les contraintes bud- gétaires sont extrêmement lourdes, les erreurs se payent particulièrement cher. Notre tra- vail recommande la conception et la mise en oeuvre d'un système transparent pour la gestion des fonds publics et la dette extérieure, ainsi que le renforcement de la capacité de l'État à concevoir des reformes politiques et des investissements pro-pauvres. À très court terme, une série d'études pourrait aider à renforcer les capacités de l'État à prévoir les tendances et opportunités du marché. Lafinalisationdurecensementagricoledevraitfournirlabaseindispensableàl'éla- boration d'une politique agricole efficace. Uneévaluationapprofondiedelacompétitivitérégionaledesproductionsvivrière et animale burundaises devrait aider le pays à comprendre où sont ses avantages concurrentiels pour servir de guide à des reformes efficaces et à des investissements durables. L'identificationd'autressourcesdecroissancedanslessecteursurbainsetdesservices devrait, à moyen terme, permettre de maintenir la croissance. Comme le souligne le chapitre 5, toutes les contraintes imposées à la croissance rurale ne sont pas spécifiques à l'agriculture. L'amélioration de la compétitivité de l'agriculture, par 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 14 14 Document de travail de la Banque Mondiale exemple, exige une maîtrise des coûts du transport et des services qui constituent la com- posante la plus importante du prix de vente. Aussi, pour le court terme, notre travail recom- mande également : Laréalisationd'uneenquêtesurlestarifspourorienterlesinvestissementsdansle réseau routier. Une réévaluation des tarifs des services pour arriver à un meilleur équilibre entre l'accessibilité et la soutenabilité financières des réseaux. Pilier 2 : Renforcer les capacités des communautés en investissant dans le capital humain et physique Pour renforcer les capacités des communautés, notre travail recommande un investisse- ment dans la capital humain et physique afin d'assurer la sécurité alimentaire et mieux développer le secteur agricole. La situation alimentaire du Burundi reste une grande pré- occupation (Chapitre 3). Cette année encore, certaines parties du pays ont été touchées par la famine. La production alimentaire est insuffisante mais elle pourrait être augmen- tée de manière significative pour satisfaire les besoins de la population. L'objectif le plus important est de sortir de la situation d'urgence, où la survie est prioritaire. Dynamiser la culture vivrière et l'élevage pourrait également augmenter de manière significative les revenus des exploitations agricoles et préparer le pays à la commercialisation des produits attendue de l'urbanisation qui se profile à l'horizon. L'extension de la production vivrière et animale exigera un investissement dans le capital tant humain que physique pour rendre possible une intensification soutenable de l'agriculture burundaise. Les principaux investissements dans le capital humain devraient comprendre l'appui aux organisations de producteurs et le renforcement des services de vulgarisation. Investir dans le capital physique va nécessiter le renforcement de la distribution des intrants dans le secteur agri- cole, l'amélioration de la gestion et de la préservation de l'eau et des sols, ainsi que le déve- loppement des services d'infrastructure dans les zones rurales pour permettre encore d'intensifier la production agricole et améliorer la compétitivité du secteur. Faiblesse des performances agricoles et manque de capital humain et physique. Les cul- tures vivrières et l'élevage constituent la principale source de revenus pour la majorité des foyers. Ils représentent 91 % du PIB agricole. La performance de ces filières est très faible et est à l'origine des déficits alimentaires chroniques qui sont à la base de l'extrême vulnéra- bilité de la population. Les importations de denrées alimentaires sont en constante aug- mentation, privant le pays de devises nécessaires à l'importation d'autres biens importants tels que les produits pharmaceutiques, les fertilisants ou les produits pétroliers. Les rende- ments stagnent et la production est faible. Les rendements des principales cultures vivrières ont très peu changé au cours des quarante dernières années. La production vivrière a consi- dérablement chuté et le cheptel a connu un déclin brutal depuis le début de la dernière période de troubles civils. Aujourd'hui, le cheptel est essentiellement composé de petits ani- maux. Les mauvais résultats du secteur agricole s'expliquent en partie par l'inefficacité des systèmes de production, la difficulté de l'accès aux intrants et le manque dramatique d'in- vestissements dans le capital humain et physique. La production alimentaire est dominée par 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 15 Rompre le cercle vicieux15 de petites unités agricoles familiales orientées vers la subsistance, et la plupart des intrants sont aujourd'hui hors de portée pour de nombreux agriculteurs. De plus, les conflits répétés ont découragé le stockage et orienté la production vers des produits plus sûrs mais moins profitables tels que les racines et les tubercules. Ces choix de production ont limité l'investissement dans la transformation des produits agricoles, contrariant ainsi la création d'une valeur ajoutée dans le secteur agricole. Au cours des quarante années de violence cyclique, l'État n'a fait aucun investissement dans le capital humain, laissant ainsi s'éroder son réservoir de cadres et d'ouvriers qualifiés. La recherche et la vulgarisation ont égale- ment été négligées, sapant le potentiel de développement du secteur. Aucun investissement majeur n'a été consenti dans l'irrigation, les infrastructures ni tout autre capital physique, faisant ainsi obstacle à l'accès aux marchés et entravant la compétitivité du secteur agricole. Avec une augmentation de 3 à 6 % par an de la demande de produits alimentaires, il est crucial que la culture de subsistance et l'élevage arrivent à contribuer davantage à la crois- sance. Reconstruire le capital humain par le renforcement des organisations de producteurs et le développement des connaissances. La relance du secteur agricole va nécessiter des investis- sements considérables dans le capital humain pour que des organisations durables de pro- ducteurs puissent être créées et pour encourager le développement du savoir-faire à travers de meilleurs services de recherche et de vulgarisation. Les organisations de producteurs ont encore des bases fragiles dans le Burundi d'après conflit, où les conflits répétés ont fracturé le capital social et sapé la confiance au sein et entre les communautés. Jusqu'ici, elles n'existent que dans les filières café et thé, où les bailleurs de fonds ont poussé à leur création afin de mieux préparer la mise en oeuvre du programme de privatisation. Étant donné que celui-ci prévoit le transfert de certaines pro- priétés aux agriculteurs, il était nécessaire de mettre en place des organisations qui représentent les devoirs et droits des producteurs et exprime leurs souhaits et leurs reven- dications. Dans les autres filières agricoles, où n'existe aucun agenda de ce type, il sera éga- lement important de créer de telles associations. Puisque les organisations de producteurs seront les principaux bénéficiaires des investissements, leur représentativité et leurs capa- cités seront essentielles. Les organisations de producteurs devront être transparentes, res- ponsables et s'engager à communiquer régulièrement avec tous les producteurs. Pour s'assurer que ces organisations fassent la différence pour les conditions de vie des agricul- teurs, il est impératif de renforcer leurs capacités, notamment dans les domaines de la ges- tion, du marketing et de la négociation. Atteindre une audience internationale et communiquer avec tous les acteurs du secteur sont les principaux défis pour ces associa- tions qui doivent défendre efficacement les intérêts de leurs membres et rechercher acti- vement de nouvelles opportunités de marché. La recherche et les services de vulgarisation auront également un rôle important à jouer dans la relance de l'agriculture. Ils auront un impact sur tous les aspects de la com- pétitivité : accroissement des rendements et des volumes, amélioration de la qualité et des prix, et réduction des coûts de production. Cela va cependant exiger des investissements importants dans l'éducation, et en particulier dans la formation professionnelle, le réta- blissement de la confiance entre les prestataires des services publics et privés et les pro- ducteurs bénéficiaires. 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 16 16 Document de travail de la Banque Mondiale Investissement dans le capital physique pour intensifier la production agricole. Des inves- tissements importants dans le capital physique sont nécessaires pour intensifier la pro- duction agricole de manière soutenable. Le Burundi se doit d'améliorer la préservation et la gestion de l'eau et des sols. L'in- tensification soutenable de la filière de la culture vivrière ne se fera pas sans une améliora- tion de la base des ressources naturelles. Au vu du taux élevé de dégradation des terres, de la réduction croissante de la fertilité des sols, de la limitation des terres irriguées, et du peu d'utilisation de meilleures pratiques de gestion des eaux, il est urgent d'augmenter les investissements dans la préservation et la gestion des sols et ressources en eau. Pour ren- verser la tendance de la perte des sols et de la réduction de leur fertilité, les efforts devraient se focaliser sur l'amélioration des technologies et pratiques en matière de gestion et de pré- servation tant des ressources en eau que des sols. Quelques projets d'irrigation à petite échelle ont été réalisés dans le secteur horticole et il y a une forte demande pour le déve- loppement d'autres projets de ce type. Étant donné les coûts associés aux infrastructures d'irrigation et les contraintes budgétaires du Burundi, il est important de promouvoir ce type d'investissements qui se sont avérés économiquement viables et correctement ciblés en termes d'emplacement et d'échelle. Dans le contexte des conflits récurrents, la fourniture des services d'infrastructure a évidemment été insuffisante. Étant donné ses ressources financières, son enclavement, et surtout sa nature rurale, le Burundi est confronté à des difficultés très importantes dans le développement de services d'infrastructure efficaces. Comme souligné au chapitre 5, la priorité à court terme est d'améliorer le réseau routier rural pour permettre l'accès aux marchés d'intrants et d'extrants. De meilleurs services de transport devraient accroître la compétitivité de la culture vivrière en allégeant la structure de ses coûts et en assurant une qualité et une fraîcheur de ses produits qui devrait permettre d'en augmenter les prix de vente. L'étape suivante consiste à apporter d'urgence une valeur ajoutée à la production agricole en développant les activités de transformation. Cela va nécessiter une rationalisa- tion de la production et de la distribution de l'énergie. Interventions recommandées. Le gouvernement burundais pourrait commencer à reconstruire son capital humain en appuyant la création et le renforcement d'organisations de producteurs et le renforcement de la recherche et des services de vulgarisation grâce à un prêt à l'assistance technique. La mise en place et le renforcement des organisations de producteurs doit s'appuyer sur les principes de représentativité. Le renforcement des capa- cités de ces associations devrait mettre l'accent sur les compétences de gestion, de marke- ting et de négociation. Le gouvernement du Burundi pourrait également utiliser l'appui des institutions financières internationales pour aider les organisations de producteurs à devenir des acteurs dans les filières café et thé où le processus de privatisation resté en sus- pens devrait bientôt être finalisé. Pour renforcer les capacités des communautés, le gouvernement pourrait également appuyer des investissements substantiels dans le capital physique, qui pourraient atténuer lesprincipauxgouletsd'étranglementdanslafournituredesservicesd'infrastructureetlages- tion des eaux et des sols. Le prêt à l'investissement sectoriel devrait aider à réaliser les inves- tissements les plus urgents requis dans la gestion de l'eau et des sols et dans d'autres capitaux physiques critiques pour l'intensification durable la production agricole. D'autres interventions pourraient viser les problèmes du réseau de transport en concevant et mettant 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 17 Rompre le cercle vicieux17 en oeuvre des prêts d'investissement appuyant la construction, la réhabilitation et l'entretien des routes, avec une priorité au réseau rural. Atout supplémentaire : de telles interventions sont à forte intensité de main d'oeuvre et pourraient ainsi générer des emplois rémunérés avec des effets multiplicateurs. Le gouvernement pourrait aussi soutenir la mise en place de 10 MW supplémentaires pour réduire ce qui est aujourd'hui un obstacle majeur au dévelop- pement d'activités de transformation, et créer des opportunités de nouveaux emplois. Pilier 3 : Développer le secteur privé à travers les chaînes de valeur agricoles Le gouvernement doit concevoir et mettre en oeuvre une stratégie de privatisation saine pour les filières café et thé. L'objectif n'est pas seulement d'accroître l'implication du sec- teur privé dans l'économie mais également d'augmenter sa contribution au partage de la croissance. C'est pourquoi, les schémas de privatisation doivent cibler les investisseurs potentiels apportant, en plus de leurs capitaux, une réelle capacité de gestion et un accès pri- vilégié aux meilleurs savoir-faire, technologies et équipement existants. Dans le Burundi d'après conflit, il est également crucial que les schémas de privatisation, tout comme toute autre reforme, soient taillés pour assurer une distribution équitable des richesses tout au long de la chaîne logistique. Le gouvernement doit également encourager un climat favo- rable aux affaires et l'accès au financement pour lancer le petit entreprenariat dans les activités liées à l'agriculture. Cultures de rente et faible implication du secteur privé. Les sections suivantes décrivent les performances actuelles des filières café, thé et horticulture. Elles discutent également les défis qui se présentent à ces secteurs et qui les empêchent de contribuer de manière signi- ficative à la croissance du pays. Café. En 2005/06, le café était cultivé sur plus de 70.000 hectares par de petits pro- ducteurs. Les niveaux de production diffèrent considérablement d'une campagne à l'autre-- 6.334 tonnes en 2005/06, 36.600 tonnes en 2004/05 et 5.673 tonnes en 2003/04 selon l'entreprise parastatale OCIBU. Ces fluctuations vont au-delà des variations cycliques et reflètent à la fois le manque de fiabilité de la production et la contrebande avec les pays voi- sins, tels que le Rwanda, où les prix sont beaucoup plus élevés. Les rendements sont parmi les plus faibles de la sous-région et la qualité est en nette déclin. Les prix à la production sont également restés les plus bas de la sous-région au cours des quatre dernières décennies. En 2005/2006, le prix des cerises de café était de l'ordre de 200 FBU par kilogramme. Cette performance est d'autant plus médiocre que le secteur a bénéficié des plus grands investissements publics. L'industrie du café burundaise est gérée par le plus grand organisme parastatal du pays et a été dotée, bien avant les pays voisins, de 136 postes de lavage et quatre installations de séchage. Le café burundais n'est vendu que sur les marchés de produits de base en dépit des changements considérables dans les tendances du marché et l'impor- tance croissante des branches d'activités liées aux spécialités et à la gastronomie. Même si deux petites usines de séchage appartiennent à des acteurs privés, le secteur privé n'est pré- sent que dans les activités d'exportation à travers l'ABEC, qui est décrite comme n'apportant aucune valeur ajoutée. La gestion globale de l'industrie a été très contestée pendant des décennies, justifiant ainsi le consensus sur la nécessiter de privatiser le secteur. Il est urgent d'améliorer la contribution du café à la croissance et donc d'accroître sa compétitivité.Laproductionducafénedevraitplusseulementciblerlesmarchésdesproduits 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 18 18 Document de travail de la Banque Mondiale de base mais également des marchés de niche. Les normes et standards imposés par la demande sont certes plus faciles à satisfaire pour les marchés des produits de base, qui requièrent essentiellement la compétitivité des coûts, mais des contraintes structurelles entravent la potentielle compétitivité des coûts du Burundi. En effet, le pays est enclavé et plus de 1.000 kilomètres le sépare des ports de l'est. Il est également vital de stimuler l'emploi dans le secteur. La performance du Burundi sur les marchés des produits de base pourrait s'améliorer s'il était détenu et géré par des investisseurs privés dotés des connaissances, du sens des affaires et de la capacité financière d'accroître sa compétitivité. En plus d'apporter des capi- taux, ces investisseurs pourraient également promouvoir de meilleures pratiques pour gérer les coûts, définir les stratégies de vente et augmenter les rendements afin de produire de plus grands volumes de produits. Étant donné la grande volatilité des marchés des pro- duits de base, il est essentiel que ces investisseurs soient capables d'utiliser le large éventail des contrats disponibles sur ces marchés, tant en direct qu'à travers les différents types de courtiers, de négociants et d'autres intermédiaires. La demande sur les marchés de niche est plus faible et exige de développer une intel- ligence du marché et de consentir des efforts pour améliorer la qualité et la transparence. Il est néanmoins crucial de cibler ces marchés parce qu'ils offrent des prix plus avantageux aux producteurs et n'impliquent pas une grande compétitivité des coûts. Cette stratégie est également un moyen de saisir les opportunités offertes par le développement du commerce équitable qui valorise les producteurs des états fragiles. L'histoire du Burundi pourrait deve- nir un atout pour l'accès à ces marchés. Enfin, le pays bénéficie de conditions agro-écolo- giques optimales pour produire un café de grande qualité pour lequel la demande est forte sur les marchés du commerce équitable et les autres marchés de niche. Thé. Le thé est produit dans cinq régions par des domaines et de petits exploitants. La plupart des aspects relatifs à la production, la transformation, le commerce, le marketing et la règlementation de l'industrie sont gérés par l'Office du Thé du Burundi, une entreprise parastatale. Entre 2001 et 2006, la production moyenne de thé était estimée à 7.500 tonnes, dont les deux tiers étaient produits par les petits exploitants et le reste par les domaines. Les ren- dements moyens de thé en feuilles étaient d'environ 4,0 tonnes par hectare dans les petites exploitations et de 4,8 tonnes par hectares dans les domaines des usines. En 2006, le revenu moyen d'un producteur burundais de thé était de l'ordre de 46 dollars EU. En dépit des conditions en perpétuelle évolution du marché mondial (comme la baisse des prix, la demande de diversification des qualités par exemple) et de la concurrence des boissons industrielles (les limonades en particulier), la structure de l'industrie du thé burundaise n'a pratiquement pas changé depuis ses débuts. Le secteur est confronté à de nombreuses contraintes, dont les insuffisances structurelles des usines et des plantations de thé, la faible motivation des petits exploitants et des ouvriers des domaines, l'utilisation limitée des intrants et des services de vulgarisation, et l'inexistence de la recherche. En plus de leurs équipements inférieurs aux normes, les usines de thé du Burundi n'utilisent que 41 % de leur puissance installée contre 70 % pour les pratiques modèles. Les rendements d'une tonne de thé transformé (le produit fini) par hectare représentent moins de la moi- tié de ce que réalisent les exploitations bien gérées de la région. Les petits exploitants et ouvriers des domaines sont peu motivés alors que l'utilisation des intrants (notamment les 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 19 Rompre le cercle vicieux19 fertilisants) est très limitée. La recherche et les services de vulgarisation sont inexistants. Ces contraintes ont conduit à une baisse considérable de la qualité et des prix du thé burun- dais. A titre d'exemple, au cours des années 2005 et 2006, le thé burundais a été vendu 30 % en dessous du prix du thé kenyan à vente aux enchères de Mombasa où la plupart du thé de l'Afrique de l'Est est vendu. Ces contraintes doivent être levées pour éviter à la filière d'être confrontée à d'autres difficultés qui pourraient marquer sa fin. Le gouvernement doit s'engager dans des reformes politiques profondes et des investis- sements ciblés pour inverser l'état de détérioration de l'industrie. À très court terme, la ges- tion des usines de thé devrait être déléguée à des entités professionnelles et une agence devrait être mise en place pour assumer la responsabilité de la réglementation. Ainsi, la propriété des usines de thé devrait être transférée à des entreprises privées capables d'ap- porter des capitaux, une meilleure capacité de gestion et un accès privilégié au savoir-faire, aux technologies et à l'équipement. Horticulture. A ce jour, la filière horticole reste peu développée. Les exportations de produits horticoles, qui avaient réussi à atteindre 1.100 tonnes en 1993, tournent depuis lors autour de moins de 100 tonnes par an et sont limitées aux fruits de la passion, aux roses et autres plantes ornementales. Trois obstacles entravent le développement de ce secteur: (i) le manque d'intelligence du marché qui a conduit à un mauvais positionnement stratégique sur les marchés horticoles. A titre d'exemple, le Burundi exporte une petite quantité de feuilles de manioc, de bananes figues pommes ou de gombo malgré la haute valeur ajoutée de ces produits sur certains marchés du commerce équitable, bio ou ethnique ; (ii) le peu de connaissance des normes et standards internationaux relatifs à la qualité et à l'hygiène, ainsi que les difficultés de s'y conformer ; (iii) l'insuffisance des infrastructures et du transport aérien. Pour exporter les produits périssables sur les marchés de l'Europe et du Moyen-Orient, il faut disposer de moyens de les livrer rapidement tout en préservant leur fraîcheur. Cependant, l'option actuelle qui consiste à recourir aux vols de passagers pour le transport des produits agricoles est mal adaptée. Les compagnies aériennes consacrent en priorité l'espace de fret aux besoins de leurs passagers et le reste aux produits commerciaux. De plus, elles ne disposent pas des équipements nécessaires pour la manutention et le stockage des produits périssables de manière à en préserver la fraîcheur et l'apparence. Le Burundi a le potentiel pour devenir à moyen terme un acteur clé des marchés à valeur ajoutée du commerce équitable, bio et ethnique. Pour y arriver, les contraintes mentionnées ci-dessus doivent être levées. La mise en oeuvre de programmes de renforcement des capa- cités devrait permettre de développer une intelligence des marchés et de promouvoir la dif- fusionetl'adoptiondesbonnespratiquesagricolesetindustrielles.LeBurundidoitégalement adopter les normes et standards internationaux qui constituent une contrainte obligatoire pour accéder à ces marchés. Finalement, la mise en place de vols charters essentiellement consacrés au fret de produits horticoles devrait résoudre la question du transport aérien. Toutefois, les exportations de produits horticoles à haute valeur ajoutée devront atteindre un volume critique pour pouvoir tirer profit d'une stratégie aussi onéreuse. La stratégie de développement du secteur horticole à court et moyen terme devrait : (i) encourager l'intelligence du marché et ses aptitudes connexes au Burundi ; (ii) cibler des marchés proches dotés de normes et standards plus flexibles, tels que ceux du Moyen-Orient ou de la sous-région de l'Afrique de l'Est ; (iii) mettre l'accent sur des produits comme la 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 20 20 Document de travail de la Banque Mondiale banane figue pomme, les fruits de la passion, ou les chérimoles, qui ont déjà atteint un niveau de production qui permettrait de couvrir le coût des charters. La mise en place de structures d'appui solides sera indispensable au développement de la filière horticole. Elles devraient favoriser la circulation des informations à travers la chaîne de valeur et faciliter la conception de stratégies futures au niveau de l'industrie. Privatisation des filières café et thé. Environ 850.000 foyers burundais sont concernés par la production du café et du thé, d'où la nécessité de promouvoir ces filières, à court terme, pour leur permettre de mieux contribuer à la croissance. Les récentes évolutions des ten- dances du marché montrent que ces industries peuvent effectivement être d'une grande contribution pour la croissance à condition d'opérer des changements radicaux au niveau de la gestion et des infrastructures. Étant donné la rareté des ressources du Burundi, les grands investissements devront être faits par le secteur privé. Les processus de privatisation des filières café et thé ne devraient pas se limiter au trans- fert de propriété entre le secteur public et le secteur privé mais s'assurer que ce transfert est un moyen d'améliorer la compétitivité du secteur et de contribuer au partage de la croissance. La privatisation de chaque filière nécessitera donc : L'identificationdelastructuredumarchéquipermettrad'atteindrelaplusgrande efficacité ; La spécification des règles de concurrence qui régiront l'organisation de la struc- ture de marché, et du processus de déréglementation qui conduira à cette structure de marché ; Ledétaildesmodalitésdutransfertdepropriétéentrel'Étatetlesinvestisseursprivés. Les pratiques modèles internationales suggèrent que les schémas de privatisation soient définis au cas par cas. Le café et le thé burundais semblent avoir un grand potentiel sur les marchés tant des produits de base que des spécialités. Une approche différentiée permettant de profiter pleinement du potentiel de ces deux marchés devrait faire intervenir des inves- tisseurs avec des profils différents. Dans le cas du café, par exemple, le développement d'un marché de spécialités peut être entrepris par les petits entrepreneurs ou les organisations de producteurs, alors que la pénétration des marchés des produits de base peut être l'affaire de plus gros investisseurs. En effet, les acheteurs de café de spécialité apprécient de mettre un visage sur les producteurs tandis que les marchés des produits de base tiennent beaucoup plus compte du rapport coût-efficacité. L'agenda de privatisation de la filière du thé n'est pas aussi avancé que celui du café, dont la mise en oeuvre apporte déjà des leçons intéressantes, y compris sur la prévention des conflits. Il est clair maintenant que les processus de privatisation doivent être conçus de manière à atténuer les risques d'une recherche du profit à tout prix. Leur mise en oeuvre efficace implique la création de forums de discussion qui permettraient au gouvernement d'entendre les préoccupations de tous les acteurs et d'y répondre en soutenant des processus susceptibles d'obtenir l'assentiment de la majorité. Il est particulièrement important de garantir que les principes d'équité soient respectés et que les droits longtemps bafoués des producteurs de café soient compris et pris en considération. Même si l'objectif est clair, le développement de ces processus de consultation n'a pas été perçu comme une action 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 21 Rompre le cercle vicieux 21 prioritaire par le gouvernement. Néanmoins, notre travail suggère qu'il soit une condition préalable à toute privatisation. Développer le petit entreprenariat dans la filière horticole. Accroître la contribution de l'horticulture à la croissance impliquera une approche très différente dans la mesure où il n'y a aucun bien public à privatiser. L'objectif sera ici d'encourager le petit entreprenariat en améliorant le climat des affaires et l'accès au financement rural. Le Burundi est classé 166ème sur 175 pays en ce qui concerne le climat des affaires (Doing Business 2007) et de grandes reformes sont nécessaires pour améliorer cet environ- nement. Pour améliorer le cadre règlementaire et judiciaire, le pays doit : (i) clarifier le droit commercial et les règles administratives de manière à éviter les dispositions ouvertes à l'interprétation ou à des décisions discrétionnaires ; (ii) réformer le système judiciaire pour réduire les retards excessifs observés au niveau des tribunaux commerciaux et promouvoir la médiation en tant que voie de règlement des litiges commerciaux ; et (iii) simplifier les formalités et diminuer le coût de création d'une entreprise. L'incitation à investir pourrait être renforcée par : (i) des garanties fournies aux inves- tissements nationaux et étrangers ; (ii) un accès réglementé à des avantages fiscaux accor- dés sur la base de critères objectifs et non discrétionnaires ; et (iii) la réduction des délais d'obtention des accords. La restructuration du système fiscal en vue de favoriser la créa- tion des petites entreprises (ou de les attirer hors du secteur informel) est également une stratégie clé dans les efforts visant à améliorer la contribution du secteur rural à la crois- sance. En plus d'améliorer l'accès aux crédits, une telle politique est susceptible de générer un accroissement significatif de l'emploi. Enfin, des institutions d'appui plus efficaces au secteur privé pourraient être mises en place à travers l'introduction d'éléments des modèles de gestion du secteur privé (tels que le fait de lier une partie de la rémunération du per- sonnel avec les performances), ce qui pourrait générer des résultats rapides dans la pro- motion du secteur privé. Améliorer l'accès au financement rural implique le renforcement des institutions de microfinance (améliorer la comptabilité, la gestion financière, les procédures, etc.) ainsi que le département de supervision de la microfinance de la Banque de la République du Burundi (BRB). Interventions recommandées. Le gouvernement doit d'urgence mettre en place un cadre pour développer le secteur privé. Dans la filière café, il doit également concevoir des stratégies pour faire rapidement intervenir des acteurs privés capables d'effectuer l'inves- tissement dans le capital humain et physique requis pour que le secteur apporte une meilleure contribution à la croissance. Dans la filière thé, la préférence à court terme devrait être accordée à l'externalisation de la gestion des quatre usines pour augmenter la volonté des investisseurs de payer pour leur future privatisation. Dans le deux cas, l'uti- lisation des garanties de la MIGA pourrait aider à réduire les risques perçus par les inves- tisseurs étrangers et augmenter leur envie de pénétrer les marchés3. Pour être efficaces, 3. La MIGA est enthousiaste à l'idée de promouvoir ses produits dans les pays post-conflits. Au Burundi, la MIGA n'a pas encore commencé à faire des affaires. Elle pourrait, donc, fournir des garanties pour les investissements étrangers pour plus de 400 millions de dollars EU. De telles garanties peuvent être offertes à tout investisseur international sans aucune exigence par rapport à la taille des investisse- ments. Il convient de noter que les investisseurs locaux ne sont pas éligibles à ces garanties. 11162-01_CH01.qxd:11162-01_CH01.qxd 6/9/08 3:26 PM Page 22 22 Document de travail de la Banque Mondiale ces garanties devraient être annoncées le plus tôt possible dans le processus d'appel d'offre. La problématique de l'horticulture est très différente parce que la filière est en train de se développer et qu'il n'y a pas de biens à transférer au secteur privé. Le gouvernement pourrait utiliser l'appui des institutions financières internationales pour développer le petit entreprenariat à travers des programmes pilotes dans les filières café, thé et horticulture. Ces programmes pourraient nécessiter des investissements dans les petites infrastructures, l'intelligence du marché ainsi que le transfert des connaissances et des compétences. Faire des affaires reste onéreux et risqué au Burundi. C'est pourquoi, il est important d'améliorer le cadre légal et règlementaire et de réduire les coûts tout en augmentant la dis- ponibilité des facteurs de production. Le gouvernement burundais pourrait avoir besoin d'une assistance pour réaliser une analyse globale de son secteur financier et identifier les principales vulnérabilités ainsi que les reformes nécessaires. 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 23 CHAPITRE 2 Croissance du Burundi La nécessité d'une performance de longue durée et stable Jean-Pascal Nguessa Nganou, Quentin Wodon, Jean-Paul Zoyem, Eric Mabushi et Ephraim Kebede A u cours des 40 années de violence cyclique, la croissance économique est restée bien inférieure à la moyenne de l'ASS, faisant aujourd'hui du Burundi le troisième pays le plus pauvre au monde. En 2005, le PIB réel par habitant a chuté à 105 dollars EU, un niveau jamais connu depuis le milieu des années 604. Si la tendance se maintient, il faudra au pays 225 ans pour réduire de moitié sa pauvreté. Ce statu quo est inacceptable et il est essentiel que le gouvernement conduise les changements nécessaires pour réaliser une croissance durable. Le présent chapitre donne un aperçu des macro-tendances passées et présentes de la croissance et décrit comment le profil de la pauvreté devrait influer sur les réformes stratégiques. L'analyse macroéconomique identifie les sources de croissance passées, les contraintes actives ainsi que la voie à suivre, tandis que l'analyse de la pauvreté aborde la relation entre l'agriculture--le principal secteur contribuant à la croissance--et la réduc- tion de la pauvreté. Il est généralement admis qu'à moins de favoriser explicitement les pauvres, les politiques profitent plus à l'élite. La faiblesse et la volatilité de la croissance du Burundi peuvent être en partie attri- buées à la très grande dépendance à l'égard du café. Bien que la filière ait bénéficié de l'es- sentiel des investissements publics, son rendement est resté médiocre. Le développement économique du pays a aussi été fortement entravé par les conflits récurrents, qui ont eu des conséquences dévastatrices sur les ressources naturelles, le capital humain et la cohé- sion sociale. Ces problèmes ont encore été aggravés par la fragilité de l'État, l'instabilité politique et la faible capacité de l'administration à gérer et développer l'économie natio- nale. Ce chapitre suggère qu'une attention soutenue soit accordée à la nécessité et aux 4. Tous les chiffres en dollars sont en dollars américains. 23 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 24 24 Document de travail de la Banque Mondiale moyens de renforcer et diversifier les secteurs contribuant à la croissance tout en atténuant les risques de conflit. Comprendre les schémas de croissance du Burundi Avec une population d'environ 6 millions d'habitants répartis sur plus de 27.834 km5, le Burundi a l'une des plus fortes densités de population de l'Afrique. Le pays est enclavé et est par conséquent tributaire des infrastructures routières et ferroviaires extrêmement dégra- dées de ses voisins pour ses échanges internationaux. Depuis l'indépendance en 1962, les querelles ethniques et politiques et un certain nombre d'autres facteurs ont conduit à cinq guerres (1965, 1972, 1988, 1991 et 1993) impliquant les deux principaux groupes eth- niques. Selon les estimations, au cours des quatre dernières décennies, plus de 500.000 vies ont été perdues et des centaines de milliers de Burundais ont été déracinés par la violence, cherchant refuge dans les pays voisins. Dans ce contexte difficile, le taux de croissance du PIB réel du Burundi n'a pas arrêté de chuter. Qui plus est, cette croissance a été assez instable, avec un niveau moyen bien inférieur à celui requis pour atteindre les objectifs de développement pour le millénaire (ODM). Malgré les troubles civils sporadiques des années 70 et 80, le PIB a grimpé à un taux plus élevé au cours de ces deux périodes. Cependant, les récentes performances économiques ont été molles et instables. La croissance du PIB était en moyenne de 4,3 % et 4,5 % respecti- vement dans les années 70 et 80, avant de chuter en moyenne de 1,4 % dans les années 90. De 2000 à 2005, la croissance annuelle du PIB n'a été que de 1,7 %--bien trop faible pour améliorer le niveau de vie d'une population qui n'a cessé d'augmenter à un taux annuel de 2,8 % au cours de la même période. Le revenu par habitant atteint aujourd'hui 17 % de moins que celui des années 70, après avoir chuté de 130 dollars en moyenne entre 1970 et 1979, jusqu'à 108 dollars entre 2000 et 2005.6 La croissance et les performances agricoles du Burundi ont été lamentables par rap- port à celles d'autres pays africains. Malgré la part importante de l'agriculture en termes de PIB et d'emplois, la productivité agricole a été volatile et la plus faible de celles des pays du G-11 et de l'ASS. En 2000, elle atteignait 97 dollars par habitant, avoisinant 317 dollars en ASS. Si les chapitres 2 et 3 évoquent des causes spécifiques au secteur pour la faible pro- ductivité agricole du Burundi, il faut noter le rôle important joué par l'instabilité politique et la dépendance vis-à-vis des précipitations. Le potentiel de développement du Burundi reste encore à explorer mais il est enlisé dans une dynamique qui confine le pays dans un équilibre de croissance faible et éphémère. Pour accélérer la croissance et s'engager dans un processus de transformation structurelle, il fau- dra dénouer ces mécanismes d'auto-renforcement. Changer la composition et le niveau des investissements publics tout en offrant des services publics qui amélioreront la performance devrait permettre d'y arriver. La diversification vers de nouvelles sources de croissance dans le secteur agricole et d'autres secteurs (industriel et services) serait également déterminante. Bien que ceci reste un grand défi compte tenu de l'absence de capital physique et humain du pays, l'élargissement des sources de croissance sera essentiel à l'amélioration du secteur des exportations. 5. Les chiffres en dollars sont en dollars américains. 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 25 Rompre le cercle vicieux 25 Figure 2.1. Agriculture et PIB réel (taux annuels de croissance, 1970 à 2005) 50 40 30 20 10 0 1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 -10 -20 GDP growth Agriculture Source : Banque mondiale. Indicateurs de développement dans le monde L'investissement dans les infrastructures devrait créer les conditions nécessaires à l'amé- lioration de l'intégration des marchés et encourager des taux de croissance plus élevés. La stratégie nationale devrait également prendre en compte les domaines où un renforcement du secteur privé est possible. Trois domaines ont été identifiés à ce stade : une meilleure compréhension de la dynamique capable d'entraîner un développement du secteur agricole (y compris les risques pour les agriculteurs) ; l'amélioration de l'environnement de déve- loppement du secteur privé ; et l'accession aux domaines prometteurs à travers d'impor- tants investissements. Une solide réforme de la politique macroéconomique devrait permettre d'accroître les effets de la stratégie de croissance. Au cours de la phase initiale de l'application de la stratégie à long terme et compte tenu de la limitation des ressources, l'in- tensification de l'aide étrangère jouera un rôle prépondérant, de même que des partenariats forts avec le secteur privé. L'économie et les performances du Burundi ont connu quatre périodes largement déterminées par la politique. 1962 à 1972--Les premiers progrès jusque dans les années 70. Les performances écono- miques du Burundi ont été remarquables au début de l'indépendance mais ont commencé à faiblir avec l'extension de l'instabilité politique au début des années 70. Après l'indépen- dance en 1962, le PIB réel a augmenté annuellement de 6,4 % en moyenne jusqu'en 1971. De 1962 à 1972, la croissance du revenu par habitant n'avoisinait que 2 % par an, avant d'enregistrer sa plus forte chute (moins 7,1 %) en 1972. La mollesse de la croissance consta- tée pendant cette période était essentiellement imputable à la baisse de l'agriculture à valeur ajoutée et à la faible productivité des autres secteurs. En 1972, une guerre civile dévasta- trice qui a fait jusqu'à 300.000 morts a fait reculer l'économie d'environ 7 %. Ces pertes en 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 26 26 Document de travail de la Banque Mondiale vies humaines et le déplacement massif des populations sont sans doute les causes majeures de l'affaiblissement de la productivité et des résultats, en particulier dans le secteur agri- cole. L'absence d'afflux de capitaux suffisants (probablement due à la situation laissée par le départ des Belges) peut également être citée comme l'une des contraintes à l'investisse- ment et à la croissance. 1973 à 1991--Moins de tensions politiques et une modeste croissance économique. La période allant de 1973 à 1991 a connu une certaine sérénité en dépit du conflit fatal de 1988. Elle est essentiellement marquée par un doublement des investissements, qui sont passés de 6,3 % du PIB en moyenne entre 1962 et 1972 à 13,8 % entre 1973 et 1991. La majeure partie de ces investissements provenait de l'extérieur, l'APD étant passée de près de 3,3 % à 17 %, pour une épargne nationale brute d'à peine 2,6 % du PIB. Même si l'éco- nomie burundaise y a connu une croissance moyenne de 4,1 %, cette période (en parti- culier le milieu des années 80) est caractérisée par un accroissement de la dette et une mauvaise gestion des ressources. A titre d'exemple, la dette extérieure, qui n'était que de 2.8 % en 1972, atteignait 82,5 % en 1991. Le pays a adopté un Programme d'ajustement structurel (PAS) à la fin des années 80 pour tenter de gérer son énorme dette extérieure. En 1988, le conflit entre l'armée et les Hutus a fait entre 5.000 et 20.000 victimes et 60.000 personnes ont fui au Rwanda, laissant l'économie, notamment le secteur agricole, dans l'instabilité et la fragilité. 1992 à 1999--Une guerre civile ouverte et de faible performances économiques. Le conflit armé consécutif à l'assassinat du président Ndadaye en 1993 a fait des dizaines de milliers de victimes et près de 2 millions de déplacés ou réfugiés au Rwanda. En 1995, suite à un sabotage, Bujumbura et d'autres zones urbaines du pays ont connu des cou- pures de courant prolongées. Cette situation a eu des conséquences graves pour l'éco- nomie. Les pénuries d'électricité ont interrompu les activités ou arrêté la production de plusieurs industries. Rien qu'en 1995, la production industrielle a chuté de 16,6 %, l'agri- culture de 6,8 % et les services de 3,6 %, avec un PIB global en recul de 7,9 %. L'État a été gravement affecté car une bonne partie de ses recettes fiscales provenait du secteur industriel. Le second coup d'État fomenté par Pierre Buyoya en 1996 a poussé la communauté internationale à imposer un embargo économique au Burundi. Le PIB a chuté d'environ 8 % suite à la baisse de près de 17 % de la production du secteur des services. Entre 1992 et 1999, le franc burundais a baissé de près de 15,6 % tandis que l'inflation atteignait 22,9 % (avec une pointe à 31 % en 1997) et que le PIB reculait de 5,3 % en moyenne. En 1999, la dette extérieure a atteint 140,4 % du PIB, soit environ 23 fois plus que son niveau de 1970 ou près de huit fois plus qu'en 1980. La pauvreté était à son maximum. La poursuite des sanctions, la guerre civile, le déplacement de la population à l'intérieur du pays, un budget militaire engloutissant près de la moitié de la dépense publique, et l'absence d'aide étran- gère (qui dans le passé était le principal moyen d'affronter les problèmes de balance des paiements) sont les principaux facteurs qui ont gravement compromis l'économie burun- daise entre 1992 et 1999. Pendant la période des sanctions, le gouvernement a dû rationner les carburants. La hausse considérable du prix du pétrole s'est traduite par une extension irrépressible du commerce illicite. 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 27 Rompre le cercle vicieux 27 Le taux de change était surévalué d'environ 80 %, avec un écart sans précédent entre les marchés officiel et parallèle dans les années 90. En l'absence d'un système financier bien éta- bli et régulé, cette situation a créé des possibilités d'arbitrage et une corruption rampante. 2000 à 2006--Transition, réforme et réhabilitation. Depuis 2000, les principaux conflits se sont apaisés à la suite de l'accord de paix signé à Arusha et le pays est entré dans une période de transition, de réforme et de réhabilitation tant politique qu'économique. Le gouvernement a procédé depuis à un certain nombre de réformes stratégiques, dont la stabilisation de l'économie et la promotion de la relance ont été les principales priorités.6 En 2004, le PIB réel était relativement plus fort à 4,8 %, porté par le seul secteur des ser- vices (qui a connu une croissance de 14,4 %)7, tandis que les secteurs agricole et industriel accusaient un recul de respectivement 0,2 % et 6,2 %. Une fois levées les sanctions en 2001, les activités de reconstruction financées par les bailleurs de fonds se sont multipliées de manière significative. Les sous-secteurs du commerce de gros et de détail se sont considé- rablement développés grâce au retour de la paix à Bujumbura (dotée d'une position his- torique de centre commercial régional) et dans les autres zones urbaines. Bien que le pays ait été plus ou moins stable sur le plan politique depuis 2000, la performance de l'agricul- ture est restée médiocre, reculant de 6,6 % en 2005 en raison d'une part, des conditions cli- matiques défavorables à la culture vivrière et d'autre part, des contraintes structurelles, telles que la grande fragmentation de la propriété terrienne, le déclin de la productivité des sols et le manque d'intrants. C'est par conséquent l'absence d'amélioration dans le secteur agricole qui a empêché le PIB d'atteindre ne serait-ce que 0,9 % en 2005, malgré l'embel- lie notée dans les sous-secteurs de la fabrication, de la construction et du commerce. Facteurs déterminants et contraintes de la croissance L'expérience du Burundi au cours des années 70 et 80 laisse penser que le pays est capable d'arriver à accélérer sa croissance économique. Néanmoins, son activité économique n'a pas été soutenue et s'est même montrée très volatile au cours de la même décennie en rai- son de l'instabilité politique et de la médiocrité de ses politiques économiques, caractéri- sées par des mesures fiscales et commerciales restrictives, des entreprises publiques monopolistiques et des dépenses publiques inappropriées qui ont été incapables d'accroître la capacité productive ou d'absorption du pays (Figure 2.2). Il convient également de noter que l'embargo imposé par les bailleurs de fonds a été l'un des facteurs qui ont affecté la per- formance économique du Burundi. Au tout début des années 2000, le pays a connu une croissance économique de courte durée dopée par une augmentation significative de l'aide extérieure, même si la croissance du PIB est restée extrêmement faible et a même été néga- tive au cours des dernières années. 6. La Banque mondiale a appuyé l'initiative du gouvernement en allouant à la relance économique d'urgence un crédit de 35 millions de dollars EU dont les principaux objectifs étaient d'améliorer l'accès du secteur privé aux devises et de fournir des fonds de contrepartie pour appuyer l'accroissement des dépenses du secteur social. La privatisation a été un autre objectif du gouvernement qui a envisagé de vendre les entreprises suivantes : la compagnie des télécommunications (Onatel), la manufacture de coton (Cotebu), l'entreprise parastatale de l'énergie (Regideso) et l'office de commercialisation du thé (OTB). 7. Il est également évident que l'accord de paix entre le gouvernement et la principale faction du CNDD-FDD y a grandement contribué. 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 28 28 Document de travail de la Banque Mondiale Des taux d'épargne et d'investissement très faibles. Les investissements bruts au Burundi se situaient en moyenne aux alentours de 9 % du PIB avec une épargne à moins 10 % du PIB. Ce taux d'épargne lamentable indique que la récente augmentation des investissements est en grande partie due aux financements extérieurs, éventuellement sous forme d'aide. Les investissements sont entièrement dictés par le secteur public. Le mouvement des investissements publics a déterminé le schéma d'ensemble des investis- sements totaux au cours de la période allant de 1980 à 2005, tandis que ceux destinés au secteur privé stagnaient. Il est cependant important de noter que les investissements dans ce secteur ont connu une tendance à la hausse au cours des dernières années, passant de 6 % du PIB en 2000 à 12 % en 2005. Cet indicateur est encourageant même s'il est encore très faible. En 2005, les investissements bruts en capital fixe se situaient à 11,8 % du PIB. Pour le seul secteur privé au cours de la même année, ils n'étaient que de 3 % du PIB, alorsqu'auRwandaetenOugandaonobservait12,2%et17,3%respectivement.Cecimontre que les investissements publics ont été quatre fois plus élevés que ceux du secteur privé. Figure 2.2. Croissance du PIB, dépense publique et APD, 1970 à 2005 35 60 30 50 25 Échelle droite Échelle gauche 20 40 15 30 10 5 20 0 10 -5 1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 -10 0 Croissance du PIB (annuelle, en %) Consommation de l'État (% du PIB) Investissements publics (% du PIB) APD (% du PIB) Source : Banque mondiale, indicateurs de développement dans le monde S'il veut maintenir une croissance ne serait-ce que moyenne, le Burundi doit arriver à des taux d'investissement brut en capital fixe comparables à ceux du Rwanda et de l'Ouganda (21 % et 22,3 % du PIB, respectivement). Les chiffres correspondants dans les pays asiatiques avec des taux de croissance élevés et soutenus sont de 42,3 % pour la Chine, 28,1 % pour l'Inde et 33,1 % pour le Vietnam. Les investissements étrangers directs sont en revanche décevants. Leurs flux vers le Burundi n'ont jamais dépassé 2 % du PIB, laissant penser que le climat des affaires, essentiel à la transformation structurelle, a besoin d'être considérablement amélioré. 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 29 Rompre le cercle vicieux29 En plus de l'instabilité politique et macroéconomique, l'absence d'un capital humain adéquat et la faiblesse des infrastructures constituent un frein majeur aux flux des IDE. La rentabilité des investissements est très faible au Burundi. Au cours des dernières années, le ratio marginal capital-production (RMCP)8 a beaucoup varié d'une année à l'autre. À titre d'exemple, il se situait en 2005 dans une fourchette de 14 à 15 alors qu'au cours des années précédentes, il était entre 2 et 39. Le RMCP de 14,8 de l'année 2005 indique qu'il fallait environ 15 dollars d'investissements bruts pour générer 1 dollar d'extrants addi- tionnel. C'est pratiquement trois fois l'investissement nécessaire au Rwanda et en Ouganda dont les RMCP sont de 3,2 et 4 respectivement. Il est préoccupant de constater que ce chiffre n'a cessé d'augmenter, ce qui signifie que la rentabilité des capitaux baisse et que par consé- quent, le Burundi a besoin de plus de capitaux pour arriver au même niveau de croissance. Une des raisons du problème pourrait être le délabrement croissant des infrastructures du Burundi qui rend encore plus difficile un fonctionnement efficace des entreprises. Une deuxième raison pourrait être la mauvaise gestion constatée dans le système. En supposant un RMCP de 4, pour atteindre un niveau de croissance significatif, de l'ordre de 8 % par exemple, le pays a besoin d'une formation brute de capital d'environ 32 % chaque année. Le chiffre affiché par le Burundi en 2005 était de 12 %--soit un déficit de 20 % du PIB par an. En d'autres termes, le Burundi accuse un manque de formation de capital d'en- viron 160 millions de dollars l'an. Un autre aspect intéressant est le fait que l'épargne inté- rieure brute en 2004 et 2005 était de 5,2 % et 0,4 % du PIB respectivement. Le secteur public, qui aurait dû être l'élément moteur le plus actif dans la formation de capital, accuse actuellement un manque d'épargne de 3,4 pour les deux années. En 2005, le Burundi a reçu près de 208 millions de dollars (26 % du PIB) de flux extérieurs sous forme de subventions et de prêts à l'État et au secteur privé. Cependant, compte tenu de l'ampleur du déficit, ces apports ne suffisent tout simplement pas à couvrir les besoins de l'économie. Il est égale- ment important de noter qu'une part significative de cet apport est affectée aux dépenses ordinaires et ne contribue pas à combler le déficit. Bien que les sources extérieures jouent un rôle important en finançant partiellement les investissements au Burundi et sont parmi les préférées, l'essentiel des financements devrait provenir du pays lui-même. Il est possible d'y parvenir grâce à un encouragement de l'épargne, une meilleure utilisation des capitaux par l'État, la réduction des déficits financiers à travers une meilleure rentabilité et des éco- nomies au sein du secteur public, et une amélioration de l'assiette des revenus du pays. Faire des affaires au Burundi n'est pas aisé. D'après l'enquête Doing Business 2007 de la Banque mondiale, le Burundi est classé 166e sur 175 pays.10 Y créer une entreprise est relativement moins complexe puisque le pays est 109e pour cet indicateur. Dans l'octroi 8. Le RMCP mesure l'investissement de capitaux différentiel requis pour générer une unité d'extra- nts supplémentaire. Il mesure la rentabilité des nouveaux investissements de capitaux. Il est donné par le rapport entre le taux d'investissement et le taux de croissance. Par l'exemple, si le taux d'investissement est de 24 % et le RMCP de 4, l'économie affichera 6 % de croissance. Par contre, si l'économie fait un meilleur usage des capitaux et arrive à un RMCP de 3, le taux d'investissement ne devra être que de 18 % pour réaliser une croissance de 6 %. Le RMCP peut être considéré comme une mesure de l'inefficacité avec laquelle les capitaux sont utilisés. Dans la plupart des pays, il est d'environ 3. 9. Pour les pays performants, le RMCP se situe généralement entre 3 et 4. 10. La République démocratique du Congo (RDC) est l'endroit du monde le plus défavorable aux affaires. 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 30 30 Document de travail de la Banque Mondiale des licences, le Burundi se classe nettement moins bien avec des exigences particulièrement ardues (302 jours en moyenne) qui placent le pays en 164e position. Un autre point noir, toujours d'après le rapport, est la difficulté d'obtention des prêts (159ème place), essentiel- lement liée au cadre juridique défavorable et au nombre insuffisant d'institutions offrant ce service. En ce qui concerne le paiement des impôts, les entreprises burundaises sont sou- mises à 40 taxes différentes et à un taux d'imposition total de 286,7 %, qui placent le pays au 123e rang. C'est du point de vue du commerce extérieur que le Burundi se classe le plus mal (171e place). Il faut 12 documents pour pouvoir exporter des produits contre 14 pour en importer. En moyenne, il faut 80 jours pour exporter et 124 pour importer. Avec des procédures et coûts aussi lourds, le commerce transfrontalier illégal est inévitable. Selon les normes internationales, la consommation de l'État du Burundi est la plus éle- vée. La consommation publique, qui était de 11,5 % du PIB dans les années 70, a légère- ment baissé au cours des années 80, à environ 9,3 %. Elle a ensuite augmenté de 7 points de pourcentage, passant à 17 % du PIB. Elle a encore grimpé au entre 2000 et 2005 pour atteindre 22 % du PIB. Par rapport au PIB, la consommation publique du Burundi est la plus élevée des pays du G-11 et de l'ASS. Au cours des dernières années, les dépenses publiques ont augmenté tandis que les recettes sont restées pratiquement constantes. Il fau- drait donc accroître les ressources publiques puisque les recettes sont fortement sollicitées et ont même diminué par rapport au PIB. Cette situation s'explique en partie par la baisse de l'APD et la nature incertaine et souvent instable des flux des capitaux extérieurs, mais aussi par des réformes macroéconomiques et de stratégie commerciale qui tendent à réduire les recettes fiscales. Flux de l'aide et croissance économique au Burundi. Au cours des dernières années, le Burundi a bénéficié d'un niveau de flux d'aide sans précédent : la formation brute de capi- tal est passée de 156 % en 1999 à 387 % en 2004. L'aide étrangère a légèrement baissé ces dernières années, tant en pourcentage du PIB qu'en investissement. Par exemple, l'APD représentait 45,6 % du PIB en 2005 contre 54,4 % l'année précédente (une baisse d'envi- ron 10 % du PIB ou 80 millions de dollars). L'aide publique n'en reste pas moins la prin- cipale source de financement d'une part significative du déficit public et même du déficit de la balance des paiements. Elle peut réduire trois déficits qui maintiennent l'investisse- ment national et la croissance en deçà de leur potentiel : les déficits de l'épargne, du change des devises et budgétaire. L'aide étrangère peut s'avérer très importante pour combler les déficits d'un pays, en particulier lorsque l'investissement privé est très bas et que l'inves- tissement public cherche à améliorer durablement la croissance économique globale, sinon un tel investissement peut conduire à des problèmes de balance des paiements ou causer une inflation intérieure s'il y a des contraintes d'approvisionnement. Elle joue en fait le rôle d'une épargne intérieure supplémentaire et permet à l'État de dépenser plus que les recettes mobilisées à travers la fiscalité et d'autres moyens. Elle permet ainsi une plus grande accu- mulation à travers l'investissement public dans les domaines essentiels, notamment les infrastructures et le secteur social avec des implications futures de productivité sociale dans la santé et l'éducation par exemple. L'aide et le syndrome hollandais au Burundi. Les flux d'aide peuvent également causer des problèmes, par exemple, en faisant grimper les taux de change, ce qui peut rendre les 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 31 Rompre le cercle vicieux 31 biens échangeables internationalement moins attractifs que ceux qui ne le sont pas, lorsque les prix intérieurs sont affectés. Si l'APD est utilisée pour accroître l'investissement public dans les domaines importants, alléger les contraintes d'approvisionnement et améliorer la productivité globale, elle ne causera pas d'inflation et pourra avoir des effets sur la relance. Ceux-ci peuvent inclure un impact positif sur la balance des paiements à travers une aug- mentation des exportations et une réduction des importations. Il est important de s'assu- rer que l'APD se traduise par des investissements publics plus élevés, de préférence dans les domaines où il y a des pénuries ou qui entravent la production, ou dans des domaines où les niveaux actuels de prestation sont socialement sous-optimaux11. Le syndrome dit hollandais se manifeste quand les taux de change réels augmentent en proportion de leur effet sur le marché des biens échangeables. Notre analyse souligne que le gouvernement doit se montrer attentif aux possibles risques macroéconomiques d'inflation associés à l'augmentation des flux d'aide. Le Burundi a un rapport dette-PIB plus élevé que la moyenne de l'ASS. Le Burundi doit environ 1,4 milliard de dollars à ses créanciers extérieurs. La dette extérieure atteignait en moyenne 36,4 % par an entre 1973 et 1988 contre 4,3 % au cours des dernières années (2000 à 2005). La dette extérieure élevée du Burundi fait baisser les investissements et affai- blit la croissance économique. En 2005, le rapport dette-exportations était de 1.422,8 %. Même avec un allégement de sa dette, il est difficile de croire que le Burundi atteindra ses objectifs globaux de réduction de la pauvreté. Il est l'un des pays pauvres très endettés (PPTE) du monde--sa dette extérieure a considérablement changé en importance, struc- ture et composition au cours des dernières décennies. En 1970, elle était d'environ 15 mil- lions de dollars, soit 6,2 % du PIB, et de 166 millions de dollars en 1980. Au début des années 90, ce chiffre est passé à 907 millions de dollars, soit près de 80 % du PIB. Son niveau le plus élevé a été atteint en 2005 avec 1,4 milliard de dollars ou 208,6 du PIB. L'accès du secteur privé au crédit a été relativement bon par rapport à celui des autres pays africains. En dépit de la récente reprise de l'aide, l'octroi de crédits au secteur privé a aug- menté, passant de 18 % du PIB en moyenne au cours de la période 1995­1999, à 25 % de 2000 à 2005. L'accroissement du crédit intérieur au secteur privé s'est également reflété dans le développement des investissements privés. En même temps, l'accès du secteur privé au crédit semble avoir été inégalement réparti entre les différents secteurs. En fait, comme le mentionne la stratégie de réduction de la pauvreté récemment publiée par le gouverne- ment, le manque d'accès au crédit reste un des principaux obstacles au développement de l'agriculture. L'engagement du gouvernement d'améliorer l'accès des agriculteurs au cré- dit mérite d'être souligné. Dans son discours à la nation de fin d'année, le chef de l'État a déclaré que l'intention du gouvernement de poursuivre la privatisation de plusieurs entre- prises publiques et des réformes radicales dans le sous-secteur bancaire est un effort déli- béré pour promouvoir la microfinance et élargir l'accès aux prêts des couches défavorisées. Dans le cadre de l'économie burundaise, ces mesures ou politiques doivent être centrées sur la promotion du développement d'un éventail d'intermédiaires financiers afin de satis- faire les demandes spécifiques d'une large gamme de clients, tels que les agriculteurs, les industries agricoles et autres entreprises du secteur rural. 11. Le prochain PER abordera certaines questions liées à l'efficacité de l'aide et aux dépenses sociales. 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 32 32 Document de travail de la Banque Mondiale Changement dans la structure de la croissance La part de l'agriculture dans le PIB a baissé de manière significative depuis 1970. Au cours des dernières années, le secteur des services est devenu un des piliers de l'économie, repré- sentant environ 45 % du PIB en 2005. Depuis 2000, le secteur a poursuivi son impression- nante croissance, atteignant 14,4 % en 2004 et 10,6 % en 2005. Sa contribution au PIB a doublé entre les périodes 1970­1979 et 2000­2005, passant de 21 % à 42 % (Tableau 2.1). En revanche, la part de PIB de l'agriculture a baissé de plus de 26 points de pourcentage. Celle du secteur industriel a légèrement baissé également d'environ 6 points.12 En moyenne, sur l'ensemble de la période considérée (1970 à 2005), l'agriculture est restée le secteur dominant tant du point de vue de sa contribution au PIB que de son nombre d'em- plois. La baisse de sa contribution au PIB est due à une faible productivité, aux consé- quences climatiques et les guerres civiles périodiques.13 À ce stade, il n'est pas raisonnable de supposer que le change- ment structurel apparent du Burundi sera durable. Bien Tableau 2.1. Contribution de trois secteurs à que le secteur des services ait l'économie, 1970­2005 connu une croissance de près Paramètre Agriculture Industrie Services Total de 11 % entre 2000 et 2005 (au Pourcentage du PIB moment où les autres secteurs 1970­1979 65,5 13,1 21,5 100 accusaient de faibles perfor- 1980­1989 58,1 15,1 26,8 100 mances), il doit en grande 1990­1999 50,8 18,7 30,5 100 partie son embellie au déve- 2000­2005 39,2 19,1 41,7 100 loppement des services publics et dans une moindre mesure 1970­2005 53,4 16,5 30,1 100 aux sous-secteurs des trans- Taux de croissance (%) portsetducommerce.Deplus, 1970­1979 6,8 6,3 2,2 4,5 l'augmentation de la valeur 1980­1989 3,0 5,3 1,8 4,3 ajoutée du secteur des services 1990­1999 -0,4 -1,0 4,1 -1,4 pourrait être portée par des 2000­2005 -2,5 -6,2 2,8 1,7 revenus du travail relative- 1970­2005 1,7 1,1 2,7 2,3 ment plus élevés et des profits Source: Prévisions établies par le personnel de la Banque meilleurs que ceux des années mondiale en se servant des Indicateurs de développement précédentes. dans le monde 12. Les données sur les parts sectorielles du PIB ont été tirées des Indicateurs de développement dans le monde de la Banque mondiale (2007) et ont été calculées en ventilant la valeur ajoutée par secteur. Celle-ci a été calculée séparément pour chaque secteur industriel et les montants obtenus ont été ensuite totalisé pour obtenir la valeur du PIB. Les chiffres de la part sectorielle du PIB peuvent différer de ceux d'études similaires telles que celles du FMI (2006). 13. Il ne fait aucun doute que cette situation découle de la baisse de productivité du secteur consécu- tive à la longue période de conflits ethniques et de coups d'État militaires (1976, 1987 et 1993). La période 1976­1989 a été marquée par deux putschs militaires--en 1976, Micumbero, arrivé au pouvoir en 1966, a été renversé par J. B. Bagaza, et ce dernier l'a été par Pierre Buyoya en 1987. De plus, 1988 a été marqué par des conflits ethniques avec leur cortège de morts dans les deux principaux groupes ethniques. 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 33 Rompre le cercle vicieux33 Comprendre la pauvreté pour mieux concevoir les réformes14 Tout au long des quarante années de violences cycliques de l'histoire burundaise, le déve- loppement économique du pays a été utilisé pour favoriser un groupe par rapport à l'autre, avec pour résultat des conséquences dévastatrices pour les ressources naturelles, le capital humain et la cohésion sociale. En formulant une nouvelle stratégie de croissance, toute l'at- tention nécessaire doit être apportée au profil de pauvreté du pays, qui identifie les vulnéra- bilités spécifiques et les opportunités potentielles à prendre en considération pour tailler sur mesure des réformes sectorielles solides. Dans cette section, nous passons en revue les prin- cipaux constats du profil de pauvreté du Burundi et discutons la relation entre croissance du secteur agricole et allégement de la pauvreté. Un accent particulier sera mis sur l'analyse des principales sources de revenus des exploitants agricoles, y compris la production de café. Pendant de nombreuses années, les conflits ont déplacé une grande partie de la popu- lation rurale et rendu difficile l'accès aux semences et autres intrants. Ils ont également détruit des infrastructures économiques et sociales importantes. Le bétail a été pillé ou tué, et les récoltes brûlées. D'autres facteurs ont également contribué à abaisser la productivité, notamment la fragmentation des terres, l'érosion des sols due au surpâturage, la contami- nation chimique (de nombreux champs sont contaminés par des niveaux élevés de fer et de toxines à base d'aluminium), l'expansion vers des terres peu productives, l'accès limité au crédit et aux services financiers, et l'utilisation de techniques agricoles rudimentaires. Certaines provinces ont été victimes de sécheresses ces dernières années. Le résultat, c'est une pauvreté massive et particulièrement répandue dans les zones rurales, qui abritent plus de 90 % de la population selon des estimations tirées d'enquêtes. Également important est le fait que le peuple burundais considère le maintien de la paix comme la priorité essen- tielle pour la réduction de la pauvreté. Principales caractéristiques de la pauvreté La pauvreté au Burundi est massive. Les nouvelles estimations de pauvreté fondées sur l'enquête QUIBB 2006 montrent qu'au niveau national, quelque 66,9 % de la population est pauvre, un niveau extrêmement élevé, même comparé à d'autres pays en situation de post-conflit en Afrique subsaharienne. Sur la base de l'évolution au cours du temps du PIB par habitant, on peut légitimement conclure que la part de la population vivant actuelle- ment dans la pauvreté est beaucoup plus élevée qu'avant le début du conflit en 1993. Selon l'enquête de perception de 2004, la plupart des personnes interrogées sont convaincues que la pauvreté a augmenté au cours des cinq dernières années, un sentiment qui est particu- lièrement ancré dans les populations pauvres. En ce qui concerne l'avenir, les perceptions sont plus nuancées, mais une grande partie de la population reste pessimiste. Ces percep- tions suggèrent que malgré les progrès accomplis ces quelques dernières années en matière de stabilisation et de relance économique, ce retournement de situation n'a pas encore réussi à changer de façon profonde les attentes de la population. Finalement, les scénarios 14. Ce chapitre s'appuie sur des contributions de Quentin Wodon (économiste principal Pauvreté, AFTPM, Banque mondiale) et Jean-Paul Zoyem (consultant, Casafrique) au profil de la pauvreté au Burundi, 2006. 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 34 34 Document de travail de la Banque Mondiale de croissance envisagés pour les trois à cinq prochaines années montrent que même avec un taux de croissance du PIB par habitant de plus de 5 % par an, qui serait très difficile à réaliser, le Burundi ne sera pas capable de diminuer de moitié la pauvreté pour 2015. Bien que la pauvreté soit massive, son intensité varie selon les groupes. Les ménages vivant en zones urbaines, dont le chef de ménage ou l'épouse sont mieux éduqués et ont un meilleur emploi, sont moins susceptibles d'être pauvres ou de se sentir pauvres. Il existe éga- lement d'importantes différences géographiques dans la pauvreté, avec des migrations temporaires liées à des gains de consommation, et des taux de pauvreté (et d'insécurité alimentaire) beaucoup plus élevés dans la partie nord du pays. De plus, lorsqu'elles sont confrontées à la pauvreté ou à un choc, la plupart des personnes cherchent à améliorer leurs revenus en travaillant plus et en réduisant leurs dépenses, tout en essayant en même temps de protéger les quelques actifs qu'elles possèdent. Malheureusement, ces stratégies d'adap- tation ne sont pas facilement accessibles à certains segments de la population. Même si une majorité de la population peut d'une façon ou d'une autre être considérée comme vulné- rable, une attention particulière doit être : (a) aux enfants en situation difficile, y compris les orphelins, enfants de la rue, enfants associés à des groupes armés, ou jeunes hors-la-loi ; (b) aux femmes en situation difficile, y compris les mères adolescentes, chefs de ménage avec de jeunes enfants, et victimes de la guerre ayant perdu la quasi-totalité de leurs biens ; (c) aux personnes affectées par le VIH/SIDA ; (d) aux personnes atteintes d'invalidité, y com- pris les handicapés physiques, sensoriels, et mentaux, et éventuellement les personnes âgées qui vivent seules ; et (e) aux personnes déplacées dans leur propre pays à cause du conflit. Le manque d'emploi pour les jeunes est un problème important au Burundi. Les données de l'enquête QUIBB 2006 montrent qu'au niveau national, 23 % de la jeunesse (de 15 à 24 ans) ont un emploi (voir tableau 2.2). Parmi ceux qui travaillent et vivent dans un ménage appartenant au quintile inférieur de la distribution de la consommation, trois-quarts (76 %) travaillent dans le secteur agricole (hors cultures d'exportation), tandis que cette propor- tion est de 46 % pour les jeunes ayant un emploi et appartenant au quintile supérieur de la consommation. Les cultures d'exportation constituent la seconde source d'emploi pour les jeunes, mais seulement à hauteur de 7 % des travailleurs. En zone urbaine, près de 36 % des jeunes travaillent comme domestiques, infirmiers/ères, chauffeurs, et dans d'autres occupa- tions à faible niveau de qualification. Quasiment aucun des jeunes qui ont un emploi n'a de contrat de travail, ce qui tend à suggérer que l'emploi des jeunes se situe presqu'entièrement dans le secteur informel. Près d'un tiers des jeunes au travail sont également aux études, et la proportion atteint près de la moitié en zone urbaine. Il y a également un grand nombre de jeunes qui semblent être inactifs. Le Tableau 2.2 fournit les pourcentages de jeunes selon leur statut professionnel par quintile, au niveau national, en zone urbaine ainsi qu'en zone rurale. Comme les jeunes peuvent combiner travail et études, la somme de ces pourcentages dépasse 100%. La catégorie des inactifs correspond aux jeunes qui n'appartiennent à aucune des trois autres catégories du tableau. Par conséquent, alors qu'un quart des jeunes travaille, et qu'un tiers est aux études, le groupe le plus important se compose de personnes qui n'ont pas d'emploi et ne font pas d'études (et qui également ne recherchent pas du travail de façon active). Par ailleurs, seulement 6,2 % des jeunes sont chefs de ménage, ce qui tente à mon- trer que, sans doute en partie à cause du manque de ressources dû à la limitation des oppor- tunités d'emploi, la plupart des jeunes n'ont pas les moyens de fonder une famille ni de se débrouiller seuls sans le support de leurs aînés. Étant donné la transition démographique en 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 35 Rompre le cercle vicieux 35 Tableau 2.2. Statut professionnel des jeunes au Burundi, 2006 (%) National Urbain Rural Q1 Q2 Q3 Q4 Q5 Aux études 34,5 51,7 31,6 32,2 34,0 34,8 36,7 34,6 Au travail avec emploi 23,2 15,5 24,5 26,2 24,1 24,8 20,4 21,4 rémunéré Á la recherche d'un 6,7 8,7 6,3 9,5 6,5 7,1 5,6 5,2 emploi Inactif (n'appartenant 40,4 27,7 42,6 38,2 41,0 38,5 42,0 41,8 à aucune des catégories ci-dessus) Source : Équipe de la Banque mondiale, utilisant les données QUIBB 2006. cours, qui devrait voir s'accroître encore la proportion des jeunes dans la population burun- daise, des politiques destinées à améliorer les opportunités d'emploi pour cette catégorie de la population sont donc extrêmement importantes. Le niveau de satisfaction par rapport aux services publics est faible. Selon les résultats de l'enquête de perception de 2004, les taux de satisfaction en matière de qualité des services publics sont faibles, et plus encore parmi les pauvres que dans l'ensemble de la population (Figure 2.3). Il est peu probable que ceci ait changé de façon significative au cours des trois dernières années. Les seuls services publics pour lesquels les utilisateurs expriment des niveaux modérément élevés de satisfaction sont les écoles primaires, les magasins de détail vendant les produits de première nécessité, l'eau potable et les transports publics. Les niveaux de satisfaction sont faibles (en dessous de 50 %), en particulier en ce qui concerne les mater- nités, les centres de santé, et les centres communautaires. Les taux de satisfaction des non pauvres sont systématiquement plus élevés en moyenne de 5 à 15 points de pourcentage que ceux des pauvres. La satisfaction des individus qui ne se considèrent pas comme pauvres est de 5 à 10 points de pourcentage plus élevée que celle de ceux qui se considèrent comme pauvres. Une partie de ce manque de satisfaction peut être due aux coûts élevés d'utilisation des services publics dans la plupart des secteurs, y compris l'éducation et la santé. Le manque de capacité financière est souvent cité comme une raison clé pour ne pas envoyer les enfants à l'école, par exemple, et il est frappant de constater que la décision en 2005 de rendre l'en- seignement primaire gratuit a eu pour résultat une augmentation énorme des inscriptions scolaires. En dehors de ce problème de moyens, la qualité de l'enseignement soulève elle aussi d'autres questions, mais pour ceux qui sont exclus du système, le manque de capacité finan- cière reste la clé. Le constat dans le domaine de la santé est identique à celui de l'éducation. Le manque de capacité financière limite la demande de soins de santé, d'autant plus que le niveau du financement public du secteur de la santé est très bas. Mettre fin au conflit et maintenir la paix sont la priorité numéro un de la lutte contre la pau- vreté. Les divers constats recueillis montrent que la population a été gravement affectée par la guerre, aussi bien en termes d'effets économiques, sociaux et sanitaires passés qu'en termes de bien-être psychologique actuel et de perceptions de l'avenir. Mettre fin à la guerre est un des moyenslesplusfréquemmentcitéspourréduirelapauvreté,etaccroîtrelasécuritéestunedes prioritéslesplussouventcitéespourl'État.Enplusdegarantirlasécurité,l'Étatdoitégalement consacrer son attention à l'éducation et à la santé. La tenue réussie d'élections communales et 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 36 36 Document de travail de la Banque Mondiale parlementaires en juin et juillet 2005, la transition présidentielle réalisée sans problèmes en août 2005, ainsi que l'entrée en fonction, le 1er septembre 2005, d'un nouveau gouvernement de post-transition sont des signes encourageants pour la stabilité future du pays. Figure 2.3. Satisfaction en matière de services publics chez les utilisateurs, Burundi 2004 80 non-pauvres 70 pauvres 60 pauvreté non perçue pauvreté perçue 50 40 30 20 10 0 Eau Magazins Transports Écoles Écoles Centres santé Maternités Centres Police produits 1ère publics primaires secondaires communautaires nécessité Source : Personnel de la Banque mondiale sur base de l'enquête 2004 de perception au Burundi. Les personnes préfèrent que leurs communautés donnent la priorité à l'encouragement des activités productives plutôt qu'à la prestation des services (Figure 2.4). La prestation des ser- vices de santé, l'éducation et la sécurité sont considérées comme relevant de la responsabi- lité de l'État. Pour la population, ces priorités existent d'abord et avant tout pour encourager les activités génératrices de revenus. Ceci contraste avec les priorités réelles des commu- nautés telles que les perçoit la population : selon elle, les autorités locales semblent donner plus de poids à la prestation des services, en particulier l'approvisionnement en eau. La crise du secteur agricole est liée à l'accent mis sur les activités génératrices de reve- nus. Plusieurs facteurs sont à la base des difficultés rencontrées dans le secteur agricole, notamment le déplacement des exploitants agricoles, les difficultés d'accès aux semences et autres intrants, la destruction d'infrastructures importantes, la perte de bétail due au conflit, la faible productivité et la fragmentation des terres, l'accès limité au crédit et aux services financiers, l'utilisation de techniques agricoles rudimentaires, et le fait que cer- taines provinces ont été frappées de sécheresse. Une autre difficulté majeure a trait à la crise affectant la filière café, qui a besoin d'être réformée. Alors que la libéralisation de cette filière devrait permettre d'augmenter les prix payés aux producteurs, elle va également accroître les risques qu'ils encourent. La section suivante discute plus en détail le lien entre la production de café et l'état de pauvreté des ménages. Secteur agricole, sources de revenus et pauvreté En identifiant des moyens de renforcer et diversifier les sources rurales de croissance, il est important de connaître les taux de pauvreté des différentes catégories socioéconomiques de ménages. Selon les données de l'enquête QUIBB 2006, plus de 90 % de la population du Burundi est rurale. Cela signifie qu'une majorité des ménages appartenant à ces différents groupes socioéconomiques vit en milieu rural, à l'exception des travailleurs qualifiés dans 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 37 Rompre le cercle vicieux 37 les secteurs privé formel et public. Les travailleurs qualifiés représentent moins de 5 % de la population et ont les taux de pauvreté les plus faibles. Figure 2.4. Que devraient être les priorités de votre communauté ? Burundi 2004 Encourager les activités génératrices de revenus Développer les services sociaux essentiels Aider la communauté à s'organiser Fournir un appui financier Encourager l'élevage Améliorer la sécurité Faciliter l'accès des PME au crédit Former la population Promouvoir la justice sociale pauvreté perçue Réduire les prix des biens de consommation pauvreté non perçue pauvre Faciliter la propriété foncière pour les pauvres non pauvre Désenclaver la communauté Améliorer l'accès aux marchés agricoles Autres 0 5 10 15 20 25 30 35 Source : Personnel de la Banque mondiale sur base de l'enquête 2004 de perception au Burundi. Dans l'ensemble, le groupe le plus pauvre est également le plus grand, à savoir les ménages dont la source principale de revenus est la culture vivrière (taux de pauvreté de 72,5 %, près de 40 % de la population). Les ménages considérés comme inactifs (aucune source de revenus identifiée) ont également une très haute probabilité d'être pauvre (71,5 %). D'autresménagesemployésdanslesecteuragricoleontdesprobabilitéslégèrementplusfaibles d'être pauvres : 68,3 % pour les ménages ayant une occupation principale d'élevage, et 68,2 % pour les ménages impliqués principalement dans les cultures d'exportation (en particulier le café). Le groupe suivant est composé de ménages dont la principale source de revenus pro- vient d'un travail non qualifié dans les secteurs public ou privé ainsi que dans le secteur des services informels, avec des taux de pauvreté légèrement supérieurs à 50 %. De manière géné- rale, cette analyse fait apparaître trois groupes importants : les ménages travaillant dans l'agri- culture, où 7 personnes sur 10 vivent dans la pauvreté ; les travailleurs non qualifiés et ceux employésdanslesservicesinformels,où1personnesur2vitdanslapauvreté;etlestravailleurs qualifiés des secteurs public et privé dont les taux de pauvreté sont beaucoup plus faibles. 11162-02_CH02.qxd:11162-02_CH02.qxd 6/9/08 3:27 PM Page 38 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 39 CHAPITRE 3 Relance agricole Sécurité alimentaire et plus Quentin Wodon, Michael Morris, Vincent Glaesner, Jean-Paul Zoyem, Patricia Larbouret, Marc Moens, Evalyne Dianga, Ba Mdaye et Alexandre Kavalec L e Burundi est encore confronté à une crise alimentaire majeure. Une réforme des politiques agricoles visant à soutenir une sécurité alimentaire durable sera un fac- teur important pour éviter de nouveaux épisodes de violence. La culture vivrière et l'élevage représentent 91 % du PIB agricole et le principal moyen de subsistance de la plupart des ménages. C'est pourquoi il est essentiel d'en promouvoir la production et la com- mercialisation. Les performances de ces filières sont actuellement médiocres et encoura- gent un déficit alimentaire chronique qui entretient l'extrême vulnérabilité de la population vis-à-vis des risques liés à la production. Avec l'augmentation de la demande à un taux annuel de 3 à 6 %, il devient urgent de renforcer la contribution des filières de la culture vivrière et de l'élevage. Le potentiel d'amélioration est énorme et, en plus d'une réforme bénéficiant à tous les secteurs, l'évo- lution requerra des investissements publics pour augmenter la productivité et accroître l'accès au marché. Les changements nécessaires à brève échéance incluent la promotion de l'utilisation de semences de qualité et de fertilisants ainsi que l'amélioration du petit élevage. À long terme, il faut renforcer les liens entre la recherche et la vulgarisation, encourager et soutenir les organisations de producteurs, et privilégier les pratiques de gestion durable des terres et de l'eau. Des investissements dans l'infrastructure et l'intelligence des marchés devront être consentis pour satisfaire la demande générée par le développement des centres urbains et pour dynamiser la compétitivité des produits agricoles de consommation courante du Burundi par rapport à ceux des autres pays de la région. Le présent chapitre expose la question de la sécurité alimentaire au Burundi et identifie les actions prioritaires à entreprendre pour aider à surmonter les principaux obstacles à la croissance et à l'amélioration des filières de la culture vivrière et de l'élevage. 39 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 40 40 Document de travail de la Banque Mondiale Sécurité et aide alimentaires15 La situation alimentaire au Burundi reste un sujet de préoccupation important. Durant plu- sieurs années, des crises alimentaires ont sévi dans certaines parties du pays en raison de plu- sieurs facteurs. Tout d'abord il y a dans certaines régions du pays, l'impact du conflit qui a duré jusqu'en 2005. Le deuxième de ces facteurs est la production insuffisante de nourriture. Le pays en a souffert non seulement pendant la période de conflit, mais aussi suite aux séche- resses qui se sont succédées à partir de l'an 2000, et en raison des maladies et parasites qui ravagent les cultures de manioc et de bananes. Un troisième facteur est la croissance rapide de la population due au taux élevé des naissances et au retour de réfugiés. Elle a entraîné une augmentation des besoins alimentaires et diminué la surface de terre cultivable par habitant. Sur la base d'une étude réalisée par Dianga, Wodon, et Zoyem (2007) et utilisant les données de l'enquête QUIBB 2006, la présente note se propose d'évaluer l'insécurité alimentaire au Burundi et d'analyser dans le cadre de cette situation, l'impact et l'efficacité de l'aide alimen- taire, en particulier le Programme alimentaire mondial des Nations Unies (WFP). La place du Burundi dans le classement établi selon l'indice de la faim dans le monde Le Burundi fait partie des pays où l'insécurité alimentaire est la plus répandue, un pro- blème qu'illustre l'indice de la faim dans le monde (IFM), constitué par la moyenne arith- métique des trois indicateurs suivants : Le pourcentage de la population sous-alimentée (population qui ne bénéficie pas de l'apport calorique minimum requis pour une bonne santé ou PSA) ; Lepourcentaged'enfantsdemoinsdecinqansdontlepoidsestinsuffisant(EPI);et Le taux de mortalité infantile (MI). Surles119paysenvoiededéveloppementpourlesquelsl'IFMaétécalculé,leBurundiseclasse en dernière position. L'IFM du Burundi est passé de 27,7 % en 1981 à 32,3 % en 1992, 39,7 % en 1997, et enfin à 42,7 % en 2003. Le diagramme de la figure 3.1 montre les valeurs de l'IFM pour d'autres pays de l'Afrique sub-saharienne classés par ordre décroissant pour 2003. Commel'illustrélafigure3.2lahaussedel'IFMauBurundiestessentiellementdueàuneaug- mentation du pourcentage de la population sous-alimentée, conséquence d'un approvision- nement inadéquat en denrées alimentaires, aussi bien produites localement qu'importées. Il se peut que la production nationale des denrées alimentaires ait été sous-estimée dans les calculs de l'IFM pour le Burundi, en particulier parce que l'autoconsommation des ménages a pu être sous-évaluée. Néanmoins, les données disponibles sur la production alimentaire nationale suggèrent un effondrement. En 2005, l'indicateur de production par habitant (en kilogrammes d'équivalents céréales) atteignait 55 % seulement de son niveau de 1993 (niveau d'avant-guerre). 15. Cette section a été rédigée par Quentin Wodon (Economiste en chef, AFTPM, Banque mondiale) et Jean Paul Zoyem (Consultant, Prem Poverty). 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 41 Rompre le cercle vicieux41 Typologie des ménages Figure 3.1. Indice de la faim, comparaison souffrant d'insécurité internationale alimentaire GHI 1981 1992 1997 2003 En 2004, le bureau du WFP 50 pour le Burundi a réalisé une enquête sur l'insécurité 45 alimentaire. Les résultats de 40 l'enquête QUIBB 2006 sur 35 les ménages peuvent être utilisés pour mettre à jour et 30 améliorer le travail réalisé 25 antérieurement dans ce domaine, notamment en 20 définissant une typologie 15 utilisant une analyse facto- 10 rielle à correspondance e i multiple. Sept catégories de RDC Niger Mal ménages (y compris une « Tchad Burundi Ethiopi Rwanda catégorie 0 » pour le capital) Tanzanie Ouganda République ont été identifiées avec centrafricaine. cette technique. La figure 3.3 donne le pourcentage de la Source : IFPRI population pour chaque catégorie. Les catégories 3 et 4 (29 % de la population) souffrent d'une insécurité alimentaire grave. Les catégories 2 et 5 (39 % de la population) connaissent des risques d'insécurité alimentaire. Nous nous concentrerons ici sur les caractéristiques principales des catégories 4 et 3 (les plus vulnérables). La catégorie 4 a le niveau d'apport calorique le plus faible (1.563 kcal par équivalent adulte et par jour, bien inférieur au minimum requis, qui varie entre 1.900 et 2.100 kcal), et l'un des scores les plus bas en termes de diversité alimentaire (faible variété des aliments consommés). Cette catégorie souffre d'un capital humain faible et 52 % des ménages qui en font partie comprennent au moins une personne handicapée--un taux quatre fois plus élevé que la moyenne nationale. Le taux d'emploi est bas, deux ménages sur trois affirmant que ni le chef de famille ni son épouse/époux ne travaille. En même temps, le chef d'une famille sur quatre est célibataire et responsable du bien-être de plus de trois autres personnes. En effet, la catégorie 4 comporte un grand nombre de femmes chefs de famille qui sont à la fois âgées et veuves mais ont des enfants à charge. L'âge avancé des chefs de famille de cette catégorie explique aussi le faible niveau de scolarité observé. Les individus de la catégorie 3 ont un apport calorique moyen de 1.714 kcal par équiva- lent adulte et par jour. Contrairement à la catégorie 4, nous y observons un faible pourcentage de personnes handicapées mais une présence particulière de personnes souffrant de maladies à long terme. La catégorie3estégalementmarquée par ses familles nombreuses--deux per- sonnes sur trois vivent dans des ménages comprenant au moins six membres. Le taux d'em- ploi des chefs de famille est élevé, mais les revenus sont insuffisants pour satisfaire les besoins 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 42 42 Document de travail de la Banque Mondiale des ménages. Cette catégorie est Figure 3.2. Indice de la faim dans le monde (IFM), marquée par un faible niveau Burundi de capital physique, résultant en partie des difficultés éprou- GHI PSA EPI MI vées par les anciens réfugiés et 45 les personnes déplacées qui se réinstallent. Ceux-ci sont surre- 40 présentées dans la catégorie 3-- neuf chefs de famille sur 10 sont 35 d'anciens réfugiés, dont beau- 30 coup ne se sont que récemment réinstallés. La population des 25 régions de Murmirwa et d'Imbo, y compris la province 20 rurale de Bujumbura, est surre- présentée dans cette catégorie. 15 10 Consommation 5 alimentaire et apport calorique des ménages 0 1981 1992 1997 2003 Afin de mesurer la capacité des ménages à satisfaire leurs Source : IFPRI besoins alimentaires, l'apport calorique alimentaire a été estimé à l'aide des données du QUIBB 2006. Au niveau national, l'apport calorique moyen est de 2.086 kcal par équiva- Figure 3.3. Part de la population (%) lent adulte et par jour, avec les catégories spé- cifiquessuivantes:(a)unapportcaloriquetrès Part de la population (%) faible (moins de 1.400 kcal), 34 % ; (b) un apport calorique faible (1.400 à 1.900 kcal), cat. 4 cat. 0 cat. 1 22 % ; (c) un apport calorique modéré (1.900 11% 4% 9% à 2.100 kcal), 7 % ; (d) un apport calorique acceptable (2.100 à 2.900 kcal), 18 % ; et (e) un cat. 3 apport calorique élevé (plus de 2.900 kcal), 18% cat. 6 19 %.Plusdelamoitié(56%)delapopulation 19% bénéficie donc ainsi d'un apport calorique inférieur à 1.900 kcal. L'apport calorique varie en fonction de la localisation. Le pourcentage de la population cat. 5 cat. 2 dont l'apport calorique est très faible est deux 24% 15% fois plus élevé en zone rurale qu'en zone urbaine. Dans les régions nord du pays, Source : Dianga, Wodon, et Zoyem (2007) presque la moitié de la population a un apport 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 43 Rompre le cercle vicieux 43 calorique journalier de 1.400 kcal. Dans le sud, moins d'un cinquième de la population appartient à un ménage dont l'apport calorique journalier est très faible. Ces observations sont très semblables lorsqu'un seuil de 1.900 kcal est utilisé pour identifier l'insécurité ali- mentaire. La carte de la figure 3.4 illustre la proportion d'individus appartenant à des ménages ayant un apport calorique journalier par équivalent adulte inférieur à 1.900 kcal. L'apport calorique est plus bas lorsque la famille est nombreuse et le niveau de scolarisa- tion bas, variant de 1.713 kcal pour les ménages de plus de six membres à 3.028 kcal pour ceux de moins de quatre membres. L'apport calorique est plus élevé quand le chef de famille est célibataire et a un emploi (en particulier salarié). L'apport calorique est plus bas pour les ménages ayant fui à l'étranger (réfugiés ou personnes déplacées), et attei- gnant 1.953 kcal contre 2.174 kcal pour ceux qui n'ont jamais quitté leurs domiciles pen- dant la guerre. Figure 3.4. Proportion des individus appartenant à des ménages ayant un apport calorique journalier inférieur à 1.900 kcal Source : Dianga, Wodon, et Zoyem (2007). 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 44 44 Document de travail de la Banque Mondiale Impact de l'aide alimentaire sur la pauvreté et l'insécurité alimentaire En 2005, le WFP a distribué de la nourriture à 1,8 millions de Burundais (soit 25 % de la population) victimes des pénuries alimentaires causées par la raréfaction des exploitations agricoles locales. Les activités du WFP incluaient essentiellement des actions d'urgence pour : (a) distribuer des rations aux groupes vulnérables, notamment les familles de fermiers pauvres et les personnes vivant dans des camps de réfugiés ; (b) satisfaire les besoins des enfants et des adultes souffrant de malnutrition ; et (c) accompagner les réfugiés, les per- sonnes déplacées et les rapatriés au cours du processus de réinsertion culturelle et profes- sionnelle dans leurs communautés d'origine. Les données du QUIBB 2006 nous permettent de mesurer le niveau des dons alimentaires (fournis essentiellement par le WFP) et des trans- ferts privés entre les ménages, à la fois en termes d'apport calorique et de valeur monétaire. Les dons constituaient 3,4 % de la valeur de la consommation alimentaire des ménages et les transferts privés 2,3 %. Pour mesurer l'impact du WFP sur la population, nous pouvons initialement adopter une approche « naïve »--c'est-à-dire calculer la pauvreté monétaire et l'insécurité alimen- taireensoustrayantlesaidesduWFPdelaconsommationmonétaireoudel'apportcalorique des ménages, et recalculer alors les mesures de la pauvreté et de l'insécurité alimentaire en utilisant ces nouvelles données. Le tableau 3.1 montre que, suivant cette approche naïve, les aides du WFP réduisent au niveau national, la pauvreté monétaire de 1 point de pour- centage et l'insécurité alimentaire de 2 points de pourcentage. Ces impacts sont probable- ment surestimés parce qu'ils ne prennent pas en compte les changements comportementaux des ménages après la réception des aides, mais ils donnent une idée générale de l'impact potentiel du programme au niveau national. Une manière plus appropriée d'estimer l'impact des dons alimentaires du WFP utilise des techniques d'appariement économétriques--pour mesurer l'impact du WFP, nous Tableau 3.1. Impact du WFP sur la population (approche statistique naïve) Population totale Bénéficiaires Paramètre Sans aides Avec aides Différence Sans aides Avec aides Différence Dépenses par 528,08 536,3 8,22 400,93 508,9 107,97 adulte (FBu) Calories par 2.016,2 2.076,91 60,71 1.547,71 2.345,43 797,72 adulte (kcal) Taux de pauvreté 67,91 66,85 -1,06 77,07 63,05 -14,02 monétaire (%) Taux d'extrême 48,59 47,36 -1,23 61,62 45,45 -16,17 pauvreté (%) Taux d'insécurité 58,11 56,3 -1,81 73,97 50,19 -23,78 alimentaire (%, 1,900 cal) Taux d'insécurité 36,57 34,35 -2,22 58,17 28,89 -29,28 alimentaire aiguë (%, 1,400 cal) Source : Dianga, Wodon, et Zoyem (2007). 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 45 Rompre le cercle vicieux 45 avons comparé les ménages qui bénéficiaient des aides du WFP aux ménages similaires qui n'en profitaient pas. L'avantage de ces techniques est qu'elles considèrent implicitement les changements comportementaux des ménages, tels que l'effet de substitution dans les dépenses des ménages dépensant pour des besoins non alimentaires lorsqu'ils reçoivent une aide alimentaire importante, les incitations à la revente de l'aide alimentaire, ou d'autres changements comportementaux (par exemple, la mise à disposition de main d'oeuvre) qui peuvent réduire l'impact des aides. Le tableau 3.2 montre que l'impact estimé par la méthode d'appariement est plus faible que celui estimé par l'approche naïve, même s'il reste signi- ficatif pour les ménages bénéficiant des rations du WFP. Efficacité du ciblage (performance du ciblage) du WFP Les études qualitatives du ciblage du WFP au Burundi ont révélé que de nombreux obs- tacles tendent à restreindre l'efficacité du ciblage, ce qui est peu surprenant dans un pays émergeant d'un conflit prolongé. Pour lever ces obstacles, le WFP a, depuis 2000, introduit des comités locaux de distribution alimentaire ayant pour but de rendre la méthode de ciblage plus participative et d'assurer un meilleur ciblage des pauvres. L'introduction de ces comités semble avoir amélioré le ciblage en 2000 et 2001, mais en 2002, une fois encore, les observateurs ont vu des membres vulnérables de la population se plaindre d'être exclus du programme. De plus, la vente des provisions du WFP était apparemment redevenue monnaie courante en 2002, surtout près des villes. Par conséquent, le WFP a pris des mesures supplémentaires : (a) un renforcement de la sensibilisation des autorités administratives et des communautés afin d'améliorer le ciblage de l'aide et obtenir l'assistance de l'administration pour décourager la vente des rations ; (b) l'institutionnalisation de l'approbation publique des listes des bénéficiaires afin de per- mettre aux communautés d'identifier les personnes non vulnérables ciblées par erreur ou frauduleusement ; (c) un renforcement du rôle des organisations caritatives dans le processus de ciblage suite à la crise alimentaire subie par le nord du pays en 2004/05 ; et (d) une révision Tableau 3.2. Impact du WFP sur les populations (approche économétrique) Approche par appariement* Approche naïve Limite Limite Impact Impact inférieure de supérieur de Paramètre estimé estimé l'impact l'impact Dépenses par adulte (FBu) 107.97 67.4 36.2 98.7 Calories par équivalent adulte (kcal) 797.72 420.4 228.6 612.2 Taux de pauvreté monétaire (%) -14.02 -10.1 -16.4 -3.8 Taux d'extrême pauvreté (%) -16.17 -8.6 -14.5 -2.8 Taux d'insécurité alimentaire -23.78 -9.7 -15.7 -3.8 (%, 1.900 cal) Taux d'insécurité alimentaire -29.28 -7.0 -12.5 -1.6 complète (%, 1,400 cal) *Les résultats de la méthode d'appariement incluent une mesure statistique des limites inférieure et supérieure de l'impact (intervalle de confiance à 95 % de l'impact estimé). Source : Dianga, Wodon, et Zoyem (2007). 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 46 46 Document de travail de la Banque Mondiale de la méthode de distribution afin d'encourager le « scooping » (des rations distribuées individuellement aux ménages) plutôt que le « grouping » (rations allouées à des groupes) dans le but de réduire la vente des rations du WFP sur le marché. En plus de ces mesures, le budget et les ressources alloués aux partenaires de la distribution ont été revus à la hausse depuis2005defaçonàcequecespartenairespuissentmieuxassisterlescomitéslocauxdurant le processus de ciblage et à leur rendre plus simple la mise en oeuvre de la procédure de scooping, en particulier dans les zones reconnues par le WFP comme des « zones difficiles ». En dépit de ces initiatives, selon certains observateurs, le ciblage des bénéficiaires reste pro- blématique au Burundi. Les données du QUIBB 2006 nous ont permis de mesurer l'efficacité du ciblage du WFP. Deux indicateurs ont été utilisés. Le premier, oméga (), est la proportion des dons alloués aux pauvres divisée par la proportion de pauvres dans la population totale. Une valeur de 1 pour cet indicateur suggère que le ciblage est neutre. Une valeur supérieure à 1 implique qu'en moyenne, les pauvres reçoivent plus de dons que l'ensemble de la population, tandis qu'une valeur inférieure à 1 implique que les pauvres reçoivent moins de dons que l'ensemble de la population. Le second paramètre, gamma (), représente la part de subven- tions reçues par les pauvres, qui dépend du taux de pauvreté (plus le nombre de pauvres est petit, plus la part de subventions qu'ils reçoivent est petite). Les valeurs des paramètres omégaetgammacalculéespourleWFPontétécomparéesauxvaleursobtenuespourd'autres types de subventions. Le tableau 3.3 montre que la valeur d'oméga fluctue entre 0,84 et 0,93 en fonction des critères utilisés pour identifier les pauvres. Quatre critères ont été utilisés : (a) la pauvreté monétaire ; (b) l'extrême pauvreté monétaire ; (c) l'insécurité alimentaire (seuil de 1.900 kcal par équivalent adulte et par jour) ; et (d) l'insécurité alimentaire grave (seuil de 1.400 kcal par équivalent adulte et par jour). Quels que soient les critères considérés, les pauvres ont reçu légèrement moins en termes de dons WFP que la population dans son ensemble, oméga étant légèrement inférieur à 1. Ce résultat est décevant parce que nous espérions que le WFP ciblait les plus pauvres en priorité. Néanmoins, cela n'est pas surprenant compte tenu des difficultés de ciblage rencontrées dans un pays comme le Burundi. En ce qui concerne la part des ressources du WFP bénéficiant aux personnes vivant dans la pau- vreté ou l'extrême pauvreté et aux personnes souffrant d'insécurité alimentaire ou d'insé- curité alimentaire grave, elle fluctue plus que le paramètre oméga parce que les pourcentages de la population appartenant à ces catégories fluctuent également. Il faut noter que la valeur d'oméga inférieure à 1 est aussi due au fait qu'au moment de l'enquête, l'aide fournie par le WFP se concentrait en grande partie sur des rations destinées à éviter que les fermiers ne mangent les semences qu'ils devraient utiliser pour la prochaine récolte. Cela signifie que certains ménages dépourvus de terres et hautement vulnérables pourraient ne pas avoir bénéficié du programme au moment de l'enquête, mais avoir bénéficié d'une composante différente du programme à un autre moment. De plus, même si le ciblage du programme n'est pas nécessairement pro-pauvres, comme cela a été mesuré lors du sondage, le pour- centage de personnes pauvres (ou souffrant d'insécurité alimentaire) qui bénéficient de l'aide est supérieur à la proportion de l'aide consacrée aux personnes pauvres (ou souffrant d'insécurité alimentaire). Pour plus de détails sur l'impact du programme en nombre de bénéficiaires (par opposition à l'impact en termes d'avantages accordés), voir Dianga, Wodon et Zoyem (2007). 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 47 Rompre le cercle vicieux 47 Enfin, bien que les ressources du WFP ne soient pas particulièrement bien ciblées, l'efficacité de ce programme est néanmoins meilleure que celles d'un certain nombre d'autres programmes de dépenses publiques. Le tableau 3.3 donne les valeurs des para- mètres oméga et gamma liées à l'éducation dans les écoles d'Etat (primaire, secondaire, et enseignement supérieur), aux soins de santé dans les structures publiques, et aux sub- ventions implicites destinées à la structure tarifaire de l'eau et de l'électricité. L'impact de la distribution du WFP est similaire à celui des services de santé et se situe à un niveau intermédiaire entre les résultats obtenus pour l'éducation primaire et le secondaire. L'im- pact est bien meilleur que celui de l'enseignement supérieur et des subventions implicites destinées aux infrastructures de base. Dans ce dernier cas, les très basses valeurs des para- mètres sont dues au fait qu'une très faible proportion de la population a accès aux réseaux d'électricité et d'eau courante. Une analyse plus détaillée de l'efficacité du ciblage du WFP suggère que l'une des limites du programme est le fait qu'en 2006, le WFP n'a pas semblé cibler de façon spécifique les zones du pays où l'insécurité alimentaire était la plus aiguë. Dans le nouveau document du programme pour 2007­2008, le mécanisme de ciblage géo- graphique du WFP doit être amélioré et nous pouvons dès lors espérer que l'efficacité du ciblage sera meilleure. Tableau 3.3 : Efficacité du ciblage du WFP et des autres transferts publics en 2006 Extrême Insécurité Insécurité Pauvreté pauvreté alimentaire alimentaire monétaire monétaire (1,900 kcal) (1,400 kcal) Paramètre a b a b a b a b Transferts de nourriture Transferts privés 0,82 0,56 0,75 0,37 0,92 0,54 0,97 0,36 Transferts du WFP 0,89 0,60 0,84 0,41 0,87 0,51 0,93 0,34 Education Tous les cycles 1,08 0,72 0,77 0,51 0,90 0,60 0,55 0,37 Primaire 1,10 0,73 0,79 0,53 0,91 0,61 0,55 0,37 Secondaire 0,79 0,53 0,52 0,35 0,71 0,48 0,45 0,30 Supérieur 0,49 0,32 0,13 0,09 0,66 0,44 0,66 0,44 Santé Toutes consultations 0,89 0,60 0,60 0,40 0,78 0,52 0,47 0,32 Hôpitaux publics 0,81 0,54 0,54 0,36 0,70 0,47 0,40 0,27 Dispensaires publics 0,91 0,61 0,62 0,41 0,79 0,53 0,49 0,33 Infrastructure Subventions pour 0,10 0,06 0,06 0,03 0,24 0,12 0,16 0,05 l'électricité Subventions 0,15 0,09 0,12 0,05 0,28 0,14 0,19 0,05 pour l'eau a. Part des dons alloués aux pauvres divisée par la proportion de pauvres dans la population totale b. Part des subventions reçues par les pauvres. Source : estimations des auteurs selon l'enquête QUIBB 2006 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 48 48 Document de travail de la Banque Mondiale Une nouvelle direction pour l'aide alimentaire au Burundi-- de l'urgence à la relance En février/mars 2006, le WFP et l'efficacité de son ciblage avaient un impact significatif sur ses bénéficiaires, mais les membres les plus pauvres de la population n'en bénéficiaient pas nécessairement plus que les autres. Nous décrivons plus loin de nouvelles directions pour le programme de 2007 et 2008 et montrons pourquoi ces orientations sont plus appro- priées compte tenu de l'évolution de besoins du pays et des résultats présentés ci-dessus. Selon les documents du WFP, le programme fournira un total de 145.948 tonnes de denrées alimentaires en 2007 et 2008, pour un coût de 118 millions de dollars EU, incluant 50 millions de dollars EU pour l'achat des denrées. Les objectifs du programme sont de : (a) fournir une aide humanitaire aux victimes des sécheresses et des conflits ; (b) protéger et renforcer les ressources de subsistance et augmenter la résistance des ménages vulné- rables aux crises subies par les zones souffrant le plus d'insécurité alimentaire ; (c) améliorer le statut nutritionnel et la santé des enfants, des mères, des groupes touchés par le VIH/Sida, et des autres groupes vulnérables ; (d) promouvoir l'accès à l'éducation, des filles en par- ticulier. De manière générale, l'objectif est de passer progressivement des actions d'urgence à des actions de relance, et de contribuer ainsi de façon plus significative au développement à moyen et long terme du pays et de sa population. Etant donné que les besoins d'urgence ne disparaîtront pas du jour au lendemain, le premier domaine d'intervention restera les programmes d'aide aux ménages vulnérables à travers une distribution ciblée des rations (70 % de l'aide alimentaire) dans les provinces du nord et du nord-est, qui souffrent le plus d'insécurité alimentaire. Ce ciblage géogra- phique devrait permettre d'améliorer l'efficacité du programme. La distribution des rations aura lieu pendant les saisons maigres, d'octobre à décembre et de mars à mai. Ces rations soulageront la faim jusqu'aux prochaines récoltes, aidant vraisemblablement les ménages à ne pas consommer leurs propres semences et évitant ainsi des actes de survie aux conséquences négatives à long terme, tels que la vente hâtive des avoirs de la famille et des biens de production. Un second volet d'intervention concernera les programmes de « relance » dans les zones souffrant d'insécurité alimentaire. Ces activités fourniront un filet de sécurité aux populations souffrant d'insécurité alimentaire chronique, en particulier au moyen de projets « nourriture contre travail » (NCT), de repas scolaires, et d'activités nutritionnelles. Les activités NCT préserveront et créeront des biens de production en augmentant la produc- tivité, améliorant les terres, protégeant l'environnement et réparant les routes rurales. Des projets pilotes seront entrepris pour démontrer les avantages d'une mise en valeur et préser- vation générale des terres. Les zones d'activité seront sélectionnées au niveau local en fonc- tion de critères sociaux, agro-écologiques et environnementaux. Une troisième section de l'activité du WFP sera consacrée aux programmes de santé et de nutrition. Le WFP distribuera des rations aux enfants de moins de cinq ans souffrant de malnutrition et à leurs mères dans 200 centres d'alimentation supplémentaire et 20 centres d'alimentation thérapeutique dirigés par des ONG internationales. Cette aide complétera la distribution ciblée mise en place dans les provinces du nord et du nord-est souffrant d'insé- curité alimentaire grave, et est également destinée à combattre la malnutrition modérée à aiguë dans les ménages vulnérables des autres régions. Le WFP soutiendra également le trans- fert graduel de responsabilité de ces centres vers les autorités de santé provinciales. 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 49 Rompre le cercle vicieux49 Un quatrième aspect de l'activité du WFP inclura une aide humanitaire aux réfugiés et aux rapatriés (l'aide alimentaire représente la source principale de nourriture des réfugiés). Le WFP fournira également des rations alimentaires aux demandeurs d'asile enregistrés au Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, qui prévoit que 70.000 réfugiés burundais vivant en Tanzanie retourneront dans leur pays en 2007 et 55.000 autres en 2008. Un cinquième aspect du programme ciblera les programmes nourriture contre scolarisation (NCS). Quelque 20.000 élèves de 180 écoles primaires bénéficient déjà de cette activité (qui offre un repas chaud par jour), et les chiffres devraient atteindre 320.000 élèves dans 250 écoles primaires en 2007 et 2008. Avec le retour de la paix, la sécurité alimentaire va graduellement gagner du terrain et il est assez naturel que le WFP mette moins l'accent sur les opérations d'urgence au profit de programmes de prévention des crises alimentaires, et de projets de relance nationaux. Ce raisonnement a conduit le WFP à mettre également en place des programmes alimen- taires dans les établissements d'enseignement et les centres de formation professionnelle ou traditionnelle, ainsi qu'à introduire les projets NCT. Le but du WFP est désormais d'in- troduire un nombre plus important de projets de réinsertion sociale qui aideront à briser les cycles de pauvreté et de faim au lieu de continuer de s'appuyer essentiellement sur les opérations d'urgence. Les nouvelles directions prises par le WFP sont plus que bienvenues au vu de l'évolu- tion des besoins de la population et des résultats décrits dans cet article sur l'impact du programme et l'efficacité de son ciblage. Les risques d'un ciblage inadéquat sont moins significatifs dans les programmes NCT ou lorsque la distribution de nourriture cible les zones les plus pauvres du pays. Les risques d'abus sont également diminués lorsque l'aide cible les écoles ou les centres de santé et de nutrition. En même temps, la diversification des méthodes de fonctionnement du WFP exigera attention et considération afin de réduire les coûts administratifs et de transports, par exemple en testant, dès que les conditions le permettront, des programmes pilotes fournissant des dons en argent plutôt qu'en nourri- ture. Il faudra également repenser les procédures de ciblage et d'amélioration de l'impact pour les rendre appropriées à chaque sous-programme mis en oeuvre (les programmes de cantines scolaires étant très différents des projets de distribution du WFP). Enfin, il faudra effectuer de nouvelles enquêtes sur les ménages pour évaluer si les nouvelles directions pro- posées par le WFP pour ses programmes augmentent véritablement l'impact du programme sur le bien-être des populations, et améliorent en particulier le ciblage des groupes les plus dans le besoin. Filière de la culture vivrière16 Vue d'ensemble L'agriculture burundaise est constituée de façon prédominante par de petites exploitations familialespratiquantuneagriculturedesubsistance.De90à95%des1,2millionsdeménages du pays vivent dans des zones rurales et produisent l'essentiel de la nourriture qu'ilsconsom- ment. La quasi-totalité des ménages cultive plusieurs produits vivriers, parfois associés à des 16. Cette section a été rédigée par Michael Morris (Economiste en chef, AFTS3, Banque mondiale) avec le support de Vincent Glaesener (FAO), Patricia Larbouret (FAO) et Alexander Kavalec (FAO). 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 50 50 Document de travail de la Banque Mondiale cultures de rente, et élève des animaux. La diversification et le développement autocentré sont de bonnes réponses stratégiques aux différentes pressions exercées sur le monde rural : l'intensification (due à la pénurie de terres agricoles), le manque de fiabilité des marchés alimentaires (hérité de la récente guerre civile), et le peu d'activités susceptibles de générer desrevenusendehorsdusecteuragricole(résultatducaractèresous-développédel'économie rurale non agricole). Les cultures vivrières occupent une importante proportion des terres agricoles du Burundi(28%delasuperficietotaledesterres,et85%delasurfacecultivéetotale).Entermes de production, les principales cultures sont les bananes, les racines et tubercules, les légu- mineuses, les céréales, les fruits et légumes et les graines oléagineuses. Ces cultures tiennent une place considérable dans l'économie nationale (Figure 3.5). Elles représentent 46 % du PIBet80%duPIBagricole.Encomparaison,lesproduitsagricolesd'exportationreprésentent seulement 4 % du PIB, alors que les cultures de rente génèrent 90 % des recettes d'expor- tation. L'élevage du bétail représente 5 % du PIB, et les pêcheries 2 à 3 %. L'importance économique des cultures vivrières au niveau national se reflète au niveau du ménage : environ 95 % de la population vivent dans des zones rurales et se livrent à l'agriculture de subsistance, et pour eux, les cultures vivrières sont donc la principale source d'emplois et de revenu. Les cultures vivrières et le bétail produits pour l'autoconsommation représentent environ 73 % du revenu total des ménages ruraux, les 27 % restants provenant de la vente de leurs cultures de rente et d'emploi de main-d'oeuvre. L'essentiel des cultures vivrières produites au Burundi sont consommées par les membres du foyer qui les produit. La part de la production autoconsommée varie d'une denrée à l'autre, mais toutes cultures vivrières confondues, cette part est comprise entre 70 et 80 %. Les cultures vivrières autoconsommées représentent 70 % de la ration alimentaire totale dans les zones rurales (mais seulement 1 % dans les zones urbaines), et 40 % de la consommation totale de protéines, 22 % de la consommation de lipides, et 100 % de la consommation de glucides. Figure 3.5. Composition du PIB agricole, 1980­2003 200,000 180,000 160,000 140,000 120,000 100,000 80,000 60,000 40,000 20,000 0 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 Food crops Export crops Livestock Fisheries and forestry 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 51 Rompre le cercle vicieux 51 Performances de la filière de la culture vivrière Systèmes de production. Les systèmes de production vivrière au Burundi ont évolué en réponse à la forte densité de population et à la grave pénurie de terres agricoles qui lui est liée. Les possibilités d'expansion de la mise en culture de terres étant depuis longtemps épuisées, les gains de production enregistrés ces dernières années ont été réalisés par l'intensification de la production sur les terres déjà exploitées. Le processus d'intensification implique habi- tuellement : (a) l'introduction de cultivars à cycle court dans les rotations des cultures, afin d'augmenter effectivement la zone cultivée totale ; (b) l'adoption de pratiques d'agrofores- terie pour faciliter l'exploitation des pentes raides, permettre la diversification des sources de revenu, offrir une protection contre l'érosion des sols et contribuer à la restauration de sa fertilité ; (c) une culture accrue des racines et des tubercules qui sont moins exigeantes en matière de fertilité du sol, moins vulnérables aux ravageurs et aux maladies, qui peuvent être laissées dans le sol pendant de plus longues périodes et récoltées en dehors des périodes normales de récolte ; et (d) la pratique systématique de cultures associées sur plusieurs niveaux, qui optimisent l'utilisation des sols et de la main d'oeuvre, tous deux limités. Les caractéristiques associées aux différents stades d'intensification sont résumées dans le tableau 3.4. Rendements. Les rendements des principales cultures vivrières du Burundi ont peu changé durant les 40 dernières années, comme si gains de productivité générés par l'intro- duction de meilleures pratiques culturales avaient été effacés par les pertes de fertilité du sol. Lesrendementsdesculturesvivrièressontfaibles.Sil'oncomparelesrendementsduBurundi à ceux d'autres pays, il est clair que l'agriculture burundaise est confrontée à une crise de pro- ductivité. Les comparaisons, établies à l'aide des données FAOSTAT qui permettent d'assurer la cohérence, montrent que les rendements moyens des principales cultures vivrières du Burundi sont à la traîne derrière les moyennes de l'Afrique subsaharienne. Production. La production vivrière au Burundi a fortement baissé depuis le début de la dernière période de troubles civils (Figure 3.6). Exprimée en équivalents céréales (EC) pour faciliter la comparaison sur le plan nutritionnel, la production des cultures vivrières en 2005 s'établissait à seulement 62 % de son niveau avant le conflit. Par habitant, cette chute est encore plus dramatique : la production vivrière par habitant en 2005 représentait seule- ment 45 % du niveau de 1993. Intrants agricoles. Les données sur l'utilisation des intrants agricoles sont rares. Suite au retrait de l'Etat du secteur des engrais, l'usage d'engrais dans toutes les cultures a chuté, y compris dans les cultures vivrières. Ajusté pour l'inflation, le prix de l'engrais a quasiment doublé durant les dix dernières années, ce qui le met aujourd'hui hors de portée de beaucoup d'agriculteurs non seulement à cause du faible pouvoir d'achat de la plupart des ménages ruraux, mais aussi de sa disponibilité limitée dans les zones rurales. Le peu d'engrais utilisé est principalement destiné aux cultures de rente, en particulier le coton et le thé. La produc- tion et la distribution de semences améliorées a plus ou moins cessé durant le conflit. La pro- duction de semences de base a en partie repris, mais en raison d'un sévère manque de capacités à développer ces semences, les semences commerciales restent inaccessibles aux agriculteurs, pour la plupart des cultures. 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 52 52 Document de travail de la Banque Mondiale Tableau 3.4 : Typologie simplifiée des systèmes de production, d'après les pratiques de gestion de la fertilité des sols Exploitations situées dans zones Exploitations situées Exploitations situées de densité moyenne dans zones de forte dans zones de très forte de population densité de population densité de population Paramètre (100­400 hab./km2) (400­800 hab./km2) (>800 hab./km2) Systèmes de cultures Culture extensive Culture intensive Cultures permanentes de : céréales, légu- utilisant des asso- sur plusieurs mineuses, racines ciations com- niveaux : arbres et tubercules plexes : bananes, fruitiers, bananes, Pâturage facilemen céréales, racines racines et tuber- disponible et tubercules, cules, légumineuses, légumineuses céréales Création de marais Création de marais Systèmes d'élevage Animaux paissant Pâturage de plus en Pâturage non librement pen- plus rare disponible dant le jour et Pâturage libre limité Majorité des animaux ramenés à l'ex- restent dans les ploitation la nuit Majorité des ani- maux attachés ou stalles gardés dans les Fourrage et eau stalles apportés aux animaux Pratiques de gestion Transferts latéraux Baisse des transferts Importance majeure de la fertilité de fertilité des latéraux de fertil- des bananiers et pâturages vers les ité des pâturages autres espèces terres cultivables vers les terres arborescentes dans via le bétail cultivables via le l'amélioration de la Pas d'usage d'en- bétail fertilité grais minéral Rôle croissant des Usage de légumineuses Usage limité de la bananiers et pour fixer l'azote mise en jachère autres arbres Usage d'engrais dans la protection minéraux des sols et la ges- tion de la fertilité (agroforesterie) Certain usage des engrais minéraux Gestion des arbres Terres défrichées Usage de haies vives Culture sur trois et agroforesterie Arbres à peine inté- Plantage d'arbres niveaux : arbres grés dans le fruitiers forestiers, arbres système d'ex- fruitiers, cultures ploitation agricole associées Rentabilité. La rentabilité de sa production vivrière pour différents niveaux de gestion (traditionnelle ou améliorée) a été analysée en détail dans le document de référence sur les culturesvivrières(Figure3.7).Labananeestactuellementlaculturelaplusrentable,suiviepar la pomme de terre, le manioc, le riz, le maïs et les haricots. L'analyse de rentabilité des dif- férentes cultures offre un aperçu des décisions des agriculteurs, mais il serait risqué d'en tirer des conclusions simplistes sur les choix probables de cultures par les agriculteurs. Ces 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 53 Rompre le cercle vicieux53 derniers déterminent en effet la rotation de leurs cultures à partir d'un ensemble complexe de considérations, notamment les objectifs de production, les dotations en ressources, la dis- ponibilité de la main-d'oeuvre, le risque et l'incertitude. Stockage. Traditionnellement, la plupart des ménages ruraux au Burundi stockent les produits vivriers qu'ils cultivent afin d'assurer leur approvisionnement alimentaire durant toute l'année. Mais avec la récente guerre civile, de nombreux foyers ont réduit les stocks de nourriture qu'ils conservaient, voire arrêté tout stockage de nourriture, par crainte de devoir la donner aux combattants. Aujourd'hui, le calendrier des plantations (et des récoltes) pour la plupart des cultures vivrières est conçu pour permettre leur consommation au cours d'une période relativement brève après la récolte, et les commerçants, en particulier les gros- sistes des grandes villes, sont presque les seuls à stocker de la nourriture (surtout des céréales et des haricots). Transformation. La plupart des produits vivriers sont consommés avec peu ou pas de transformation. Une transformation limitée a lieu dans les foyers, avec pour objectif d'amé- liorer la qualité de consommation (décorticage du riz), de prolonger le stockage (transfor- mation du manioc en farine et amidon) ou d'ajouter de la valeur (brassage de la banane et du sorgho). Cette transformation, fondée sur des méthodes traditionnelles, prend beaucoup de temps, est fastidieuse, et ne prolonge que peu le stockage pour la plupart des récoltes. La transformation industrielle des produits vivriers est presque inexistante aujourd'hui, en raison de l'effondrement de l'agro-industrie pendant le conflit et de l'absence continue de demande en produits transformés due à un pouvoir d'achat limité. Commercialisation. Au Burundi, les marchés d'alimentation sont sous-développés. La commercialisation des denrées locales est informelle et souvent segmentée, avec de mul- tiples changements de main entre l'exploitation agricole et le consommateur final. La lon- gueur des chaînes de commercialisation dépend du caractère périssable des produits. De nombreux produits vivriers sont commercialisés sur des marchés locaux souvent dominés par quelques grands com- merçants qui peuvent y Figure 3.6. Tendances de la production de culture régner en maitre grâce à vivrière par habitant, 1990­2005 leurs réseaux et leurs entre- pôts. La plupart des 350 ménages ruraux ont adopté 300 une stratégie de subsistance 250 : les quantités de produits vivriers qu'ils commerciali- 200 sent sont modestes (Figure 150 3.8), Ce qui leur permet une commercialisation irrégu- 100 lière, pour répondre à des 50 opportunités qui s'offrent ou à des besoins d'argent. 0 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 Les agriculteurs sont mal organisés et possèdent peu 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 54 54 Document de travail de la Banque Mondiale Figure 3.7. Rentabilité des principales cultures vivrières au Burundi (rendement de la terre, travail) Milliers 2,500 12,000 Collines Collines 10,000 2,000 Marécages Marécages 8,000 1,500 6,000 1,000 4,000 500 2,000 - - (500) (2,000) Sorgho Maïs Riz Haricot Pomme Manioc Banana Banana Sorgho Maïs Riz Haricot Pomme Manioc Banana Banana de terre (cuisine) (bière) de terre (cuisine) (bière) d'informations sur les prix et les opportunités de marchés et disposent donc souvent d'une capacité de négociation limitée. Commerce. Les produits vivriers font l'objet d'un commerce actif entre le Burundi et ses voisins. Toutefois, on connait mal les quantités précises qui traversent les frontières puisque ce commerce est presque entièrement informel. Le Burundi souffre actuellement d'un déficit alimentaire structurel, et on peut affirmer que le pays est un importateur ali- mentaire net. Les exportations de produits vivriers peuvent être considérées comme négli- geables. A en juger d'après la différence entre la demande alimentaire (calculée comme étant les besoins notionnels de consommation de la population nationale) et l'offre alimentaire (production alimentaire nationale), le déficit alimentaire national net, après fourniture de l'aide alimentaire, est estimé entre 100 000 et 350 000 tonnes d'EC, selon les méthodes de calcul, déficit qui est sans doute couvert par les importations. Les données du trafic rou- tier aux principaux points de passage des frontières, indiquent que ces importations sont essentiellement constituées de maïs, de haricots et de riz d'Ouganda, de Kenya et de Tanza- nie, ainsi que de pommes de terre du Rwanda. Une quantité importante de bétail est aussi acheminée dans le pays en provenance de Tanzanie. Les seules cultures vivrières importées en quantités substantielles de zones extérieures à la région sont le blé et le riz. Défis auxquels est confrontée la filière de la culture vivrière La croissance de la filière de la culture vivrière au Burundi est soumise à de nombreuses contraintes importantes, avec pour effet une faible rentabilité, tant au niveau de l'exploita- tion qu'au niveau post-récolte, qui décourage l'investissement dans l'amélioration de l'outil technologique, et entretient une faible productivité de la filière. Cette dernière n'évolue donc pas de façon dynamique, comme elle pourrait le faire sous l'effet d'une croissance tirée par la productivité. Un recours limité aux meilleures pratiques de gestion. Le secteur agricole du Burundi a un potentiel de croissance considérable, mais ce potentiel n'est pas concrétisé. La produc- tivité est faible et stagnante. Les systèmes d'exploitation sont encore majoritairement des 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 55 Rompre le cercle vicieux55 systèmes de subsistance, fortement soumis aux caprices climatiques. Le potentiel d'irriga- tion du pays demeure en grande partie sous-exploité. La plupart des ménages ruraux cul- tivent le vivrier en pratiquant surtout la culture extensive, tandis que l'agriculture commerciale, basée sur des techniques modernes et l'achat d'intrants, reste sous-dévelop- pée. Les capacités de la recherche agricole et des systèmes de vulgarisation se sont érodées ces dernières années, si bien que même lorsque de meilleurs paquets technologiques deviennent disponibles, ils n'atteignent généralement pas les agriculteurs. Figure 3.8. Proportion des cultures vivrières commercialisées, Burundi, début des années 2000 70 60 50 40 30 20 10 0 Sorgho Maïs Riz Haricot Pomme Manioc Banana Banana de terre (cuisine) (bière) Un recours limité à l'achat des intrants. La faiblesse des systèmes de distribution des intrantslimitentladisponibilitéentempsopportundesemencesaméliorées,d'engrais,depro- duits agrochimiques et de machines. Lorsque ces intrants sont disponibles, la capacité des agriculteurs à les utiliser est souvent compromise par un manque de crédit, dû au faible déve- loppement des institutions financières rurales. L'insuffisance de l'offre au niveau de l'achat des intrants, associée à la faiblesse de la demande, entraîne une utilisation très limitée de ces intrants, pourtant vitaux pour la production. Moins de 5 % de la surface consacrée aux cul- tures vivrières est plantée de variétés améliorées. Les cultures vivrières utilisent en moyenne 10 à 15 kg/ha d'engrais, alors que 250 à 300 kg/ha sont recommandés. Dans les cultures vivrières, l'usage de produits agrochimiques est négligeable. Un approvisionnement en eau incertain. Le Burundi jouit d'une pluviosité plus impor- tantequebeaucoupd'autrespaysafricains.Pourtantsonsecteuragricolesouffredefréquentes perturbations du système d'approvisionnement en eau. Les sécheresses localisées sont cou- rantes et durent parfois pendant plusieurs années consécutives ; les inondations dans les marais de basse altitude et dans les bassins hydrographiques déciment fréquemment les cultures en maturation. Le recours à l'irrigation pourrait réduire les pertes de cultures cau- sées par les irrégularités de l'approvisionnement en eau. Cependant, le potentiel considérable d'irrigation du pays demeure en grande partie sous-exploité. Moins de 10 % des superficies potentiellement irrigables du pays, soit moins de 5000 hectares, sont irrigués. 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 56 56 Document de travail de la Banque Mondiale Prix élevés des intrants. Le faible recours à l'achat d'intrants s'explique non seulement par leur disponibilité limitée, mais aussi par leur coût élevé. Lesprixdesintrantsachetés(semences,engrais,produitsagrochimiques)sontélevés parce qu'en l'absence de capacités locales de fabrication, ces produits doivent être importés. Le transport et les coûts de manutention représentent plus de 50 % du prix finaldeventeaudétaildel'engrais,quiestinhabituellementélevé,d'aprèslesstandards mondiaux. Une autre raison de ce prix élevé a trait au manque d'économies d'échelle dans l'approvisionnement et la distribution d'engrais dû à la petite taille du marché national. Leprixdelaterreàvocationagricoleaugmenteaussiconstamment,faceàunepres- sion démographique accrue sur une ressource déjà surexploitée. Il y a peu de mar- chés structurés de location de la terre au Burundi, donc ce coût est difficile à observer directement, mais de nombreux ménages ruraux disent que le temps, les efforts (et les paiements non officiels) nécessaires pour obtenir et maintenir l'accès à la terre continuent d'augmenter. Le prix du capital est élevé, principalement parce que peu de programmes de cré- dit formel ciblent le secteur agricole. Lorsque le crédit formel est disponible, il est presque toujours dirigé sur les cultures de rente : café, thé, huile de palme, fruits et légumes. Manquant d'accès au secteur du crédit formel, de nombreux producteurs vivriers financent leurs coûts de production variables en empruntant sur le marché informel, où les taux d'intérêt sont extrêmement élevés. Des prix de production bas et variables. Malgré les prix des intrants élevés, les prix per- çus par les agriculteurs pour leurs productions sont bas et variables. LesproducteursvivriersduBurundisontconfrontésausous-développementdessys- tèmesdecommercialisationsous-développésdupays.Laplupartdesculturesvivrières sont caractérisées par de faibles ratios entre la valeur et le poids, ce qui rend leur trans- portnonrentablesurdelonguesdistances,lescoûtsdetransportrongeantrapidement les marges bénéficiaires. Les producteurs doivent donc vendre leur production à un niveau très local, où la demande peut être faible et imprévisible. Le manque d'instal- lations de stockage de long terme pour les cultures vivrières, associé dans certains cas à leur caractère périssable, a pour conséquence de forcer beaucoup d'agriculteurs à vendre pendant la période post-récolte, lorsque les prix sont au plus bas. LasaisonnalitédesprixdesculturesvivrièresauBurundisembleêtreanormalement forte, d'après les standards mondiaux. La variabilité des prix alimentaires est en géné- ral plus élevée dans les zones rurales, car tout excédent disponible est habituellement envoyé vers les zones urbaines, où la demande est plus forte et les prix plus hauts. Par conséquent, après la récolte, les prix en zones rurales chutent généralement bien en- dessous des prix des zones urbaines ; mais pendant la « période de soudure» qui pré- cède la récolte, cette relation peut s'inverser, et les prix dans les zones rurales peuvent dépasser ceux des zones urbaines, qui disposent de stocks résiduels de nourriture. Contraintes post-récolte. Les facteurs contribuant à la faible rentabilité de la filière de la culture vivrière au niveau de la post-récolte sont notamment : un cadre défavorable à l'ac- 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 57 Rompre le cercle vicieux 57 tivité économique, une faible demande en produits agroalimentaires, et le manque de fia- bilité de l'approvisionnement en matières premières. Uncadredéfavorableàl'activitééconomique.LecadreéconomiqueduBurundi,peu favorable aux affaires, sape la rentabilité, en augmentant le coût des affaires et en compromettant la capacité des entrepreneurs à contrôler la rentabilité de leurs investissements. Une faible demande de produits agroalimentaires. Le faible niveau de revenus de la population limite son pouvoir d'achat effectif. Desmatièrespremièrespeufiables.Pourêtrerentables,lesentreprisesagroalimen- taires doivent pouvoir compter sur un approvisionnement fiable en matière pre- mières de haute qualité, de préférence à des prix attractifs et abordables. Au Burundi, où la production vivrière est principalement pluviale, et où les marchés sont étroits et sous-développés, la disponibilité et le coût sont très variables. À ces factures généraux s'ajoutent des facteurs propres au secteur, qui expliquent la faible rentabilité au niveau post-récolte : la disponibilité limitée et le coût élevé des services liés aux infrastructures, l'insuffisance des services financiers et le manque de capacité humaine et de savoir-faire technique. Coût élevé des services liés aux infrastructures. Le réseau routier rural est peu déve- loppé, ce qui rend coûteux la collecte et le transfert des produits de base vers les usines de transformation centralisées. Le réseau électrique rural a une couverture limitée, ce qui restreint la possibilité pour les dirigeants d'entreprises agroalimen- taires d'installer des usines dans les zones de production ; quant aux réseaux élec- triques urbains, ils sont peu fiables, et créent de fréquentes perturbations dans les usines de transformation situées en zone urbaine. Les capacités nationales en technologies de l'information et de la communication (TIC) demeurent sous- développées, le coût des communications téléphoniques est élevé, même par rapport aux normes régionales, et la couverture Internet est extrêmement limitée. Services financiers coûteux. Les services financiers ouverts aux entreprises agroali- mentaires sont limités en nombre, et coûteux, en comparaison de ceux offerts aux autres secteurs économiques. Manque de capacités humaines et de savoir-faire technique. Il n'est pas surprenant que vu le sous-développement du secteur agroalimentaire, on trouve peu d'entre- preneurs expérimentés possédant les connaissances techniques et les compétences commerciales nécessaires pour créer et faire fonctionner des entreprises agroali- mentaires viables. Perspectives d'avenir de la filière de la culture vivrière Quelles pourraient être, dans quelques années, l'importance et la composition de la demande en cultures vivrières, et qu'est-ce que cela implique pour le secteur agricole du Burundi ? La future demande sera façonnée par trois facteurs principaux : (a) la croissance de la popu- lation, (b) l'augmentation des revenus, et (c) les changements de goûts et de préférences du consommateur. Les projections de croissance de la population du Burundi sont d'environ 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 58 58 Document de travail de la Banque Mondiale 3 % par an d'ici à 2015. On peut s'attendre à une croissance de la demande alimentaire d'au moins le même pourcentage. Cependant, l'augmentation des revenus provoquera des chan- gements dans l'importance et la composition de la demande alimentaire. On s'attend à ce que les consommateurs se détournent de certaines racines (patate douce, manioc) et céréales ordinaires (sorgho, maïs), ainsi que des bananes et des haricots, pour consommer davantage de riz, de blé et de pommes de terre. La consommation de fruits et légumes devrait également augmenter. Hormis les changements de la demande alimentaire liés à la croissance de la population et aux hausses de revenus, il est probable que la composition de la demande devrait aussi refléter un changement des goûts et des préférences des consommateurs. Les plus importants de ces changements proviendront de l'urbanisation, car un nombre croissant de personnes quittent les campagnes pour les villes à la recherche d'un emploi. Cette modification démo- graphique alimentera une demande d'aliments prêts-à-servir, en particulier le pain de blé, les pâtes, le riz et les en-cas. Parallèlement, les consommateurs seront aussi plus soucieux de la qualité, et les choix de consommation seront de plus en plus influencés par des considéra- tions de santé et de sécurité, les aspects nutritionnels, le goût et l'apparence. Quels sont les principaux facteurs qui détermineront la capacité de la filière de la culture vivrière à répondre à ces changements dans l'importance et la composition de la demande? Sur le plan positif, le Burundi jouit de conditions agro-climatiques favorables : sols fertiles et bien drainés, précipitations abondantes et bien réparties, températures modérées, qui permettent la culture d'une large gamme de produits vivriers. En raison de la petite taille du pays, les zones de production rurales sont généralement situées près des centres de consommation urbaine, ce qui donne aux producteurs un accès facile aux marchés. Sur un plan moins positif, la pénurie de terres agricoles va s'aggraver à mesure que la population continue de croître, créant une pression supplémentaire sur une ressource capi- tale qui est déjà surexploitée. Bien que les ressources en terres arables puissent être encore étendues en développant de nouveaux marais pour l'irrigation, il n'est pas réaliste de penser que la superficie cultivée puisse être augmentée de plus d'un % par an. De plus, il est probable que les surfaces des cultures vivrières diminuent à mesure que les agriculteurs se tournent vers des cultures à forte valeur ajoutée, comme les fruits et les légumes, les graines oléagi- neuses et les cultures spécialisées industrielles. Exception notable, le riz, qui peut générer d'attrayants profits, particulièrement quand il est cultivé sous irrigation, en utilisant les meilleures pratiques et des niveaux d'engrais optimaux. La pénurie continue de terres agricoles implique que la future croissance de la produc- tion vivrière pourrait découler de l'intensification. Les perspectives d'une intensification réussie des systèmes de cultures vivrières semblent prometteuses, en raison des rendements actuels, extrêmement bas, et des possibilités très réelles de les augmenter, par un recours accru à de meilleurs intrants (semence, engrais, produits agrochimiques) et par l'adoption généralisée de meilleures pratiques de gestion des cultures, des sols et de l'eau. L'introduc- tion d'une technologie améliorée devra être soutenue par des investissements stratégiques visant à rehausser la dotation en ressources dont l'agriculture dépend (par exemple, implan- tation de systèmes d'irrigation et de drainage, développement de cultures étagées sur les coteaux, restauration des terres dégradées). Comment l'évolution future de l'offre et de la demande de cultures vivrières au Burundi sera-t-elle affectée par les événements ayant lieu à l'extérieur du pays ? Le fait que le Burundi soit enclavé et assez peu lié aux marchés extérieurs a des conséquences à la fois positives et 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 59 Rompre le cercle vicieux 59 négativespourlafilièredelaculturevivrière.Parmileseffetspositifs,lasituationgéographique du pays, ajoutée à un sol essentiellement montagneux, offre une protection naturelle aux pro- ducteurs du Burundi sur leur marché intérieur, car les coûts élevés du transport augmentent fortement les prix des marchandises importées dans le pays. Cependant ces mêmes facteurs qui protègent naturellement le producteur burundais sur son marché intérieur posent un défi majeur à ceux qui voudraient vendre sur les marchés régionaux ou internationaux. Le coût élevé du transport des marchandises du Burundi vers les marchés régionaux ou internatio- naux doit être absorbé, pour que ces biens puissent être compétitifs hors du pays. La protection naturelle dont a longtemps profité la filière de la culture vivrière au Burundi pourrait bientôt être érodée. Le gouvernement a commencé à encourager une plus largeintégrationrégionale,réduisantunilatéralementlesdroitsdedouanesurdenombreuses catégories d'importations, entrant dans les zones franches du COMESA et de la CAE, et adoptant le système de tarif extérieur commun de la CAE. Ces mesures vont entraîner une réduction de la protection dont a longtemps bénéficié le secteur agricole, même si à court terme, la protection sera conservée pour certains produits considérés comme stratégiques (par exemple, le lait, le maïs, le blé et la farine de blé, le riz, le tabac et le coton). A plus long terme, il est probable que l'abaissement de barrières commerciales ait des effets différents selon les catégories de marchandises. L'effet sera probablement minimal pour les aliments de base les plus communs mais de faible valeur, comme les racines, les tubercules et les bananes, qui ont toujours été échangés de manière informelle, et ont donc rarement été soumis à une réglementation commerciale formelle. Au contraire, les effets pourraient être importants pour les céréales (blé, riz, maïs) et les haricots, qui sont déjà importés en quantités impor- tantesdemarchésinternationaux,situéshorsdelarégion,etquitendentàutiliseràdescanaux formels où ils sont soumis à des réglementations commerciales. Les producteurs de cultures vivrières au Burundi seront-ils capables de demeurer concurrentiels si les frontières sont de plus en plus ouvertes ? L'analyse des avantages com- parés entreprise dans le cadre de l'étude SORG pour le riz, le maïs, le blé et les haricots montre que les producteurs de ces marchandises au Burundi subiront une pression concurrentielle sévère des producteurs des pays voisins. La difficulté majeure du Burundi face à la concur- rence de la Tanzanie, de l'Ouganda et du Kenya, est que ces pays ont sous-utilisé la terre et que cette dernière peut être mise en production à un coût relativement faible. Si les pro- ducteurs du Burundi veulent rester concurrentiels, ils devront baisser leur coût de pro- duction unitaire en élevant la productivité par le recours à des systèmes de culture intensifiés. Ceci constituera un défi au regard du coût élevé des engrais et des autres intrants impor- tés. Même si le Burundi parvient à mettre en place une stratégie d'intensification, il est peu probable qu'il reste concurrentiel pour la production de céréales à faible valeur, qui peuvent être produites à un coût inférieur par des systèmes extensifs. Interventions prioritaires requises dans la filière de la culture vivrière. Le gouvernement a fixé un objectif de croissance soutenue de l'agriculture de 6 %. Sur la base de l'analyse conduite pour l'étude SORG, et reconnaissant les contraintes identifiées ci-dessus, les priorités immédiates du gouvernement devraient concerner les contraintes sectorielles et les interventions transsectorielles. Une croissance rapide et durable de la filière de la culture vivrière au Burundi n'est réa- lisable qu'en améliorant sa productivité, sa rentabilité et sa compétitivité. Les interventions suivantes ont une priorité immédiate. 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 60 60 Document de travail de la Banque Mondiale Renforcer les systèmes de distribution des intrants. Une intensification durable de la filière de la culture vivrière du Burundi ne sera pas possible sans une augmentation importante de l'usage par les agriculteurs d'intrants achetés, particulièrement de semences de variétés amé- liorées, d'engrais chimiques et de produits chimiques pour la protection des cultures, comme les pesticides, les herbicides et les fongicides. Ces intrants ne seront disponibles de façon opportune et à des prix abordables que si les marchés d'intrants fonctionnent bien. Le ren- forcement des systèmes d'approvisionnement en intrants est donc une priorité. Les efforts visant à renforcer la distribution des intrants doivent se concentrer dans deux domaines. Semences et matériel végétal. Les entreprises privées sont peu incitées à investir dans la recherche sur la sélection des plantes et la multiplication des semences pour les cultures vivrières ; par conséquent, l'investissement public est justifié. Le gouvernement doit donc revitaliserlescapacitéslocalesdesélectiondesplantes,quidanslaplupartdescasnedevraient pas viser à produire de nouvelles variétés, mais plutôt à importer et à sélectionner les variétés développées en dehors du pays. Les centres publics de recherche devraient aussi avoir pour mandat la multiplication des semences et du matériel végétal, et leur mise à disposition des agriculteurs à des prix que ceux-ci sont prêts et capables de payer. Des opportunités de ces- sion de certaines activités à des entreprises privées doivent être identifiées (par exemple, la production de semences hybrides). Engrais. Le gouvernement doit stimuler de façon urgente et prioritaire la création d'une industrie de l'engrais viable, en renforçant la demande et augmentant l'offre. Les engrais sont actuellement très chers, à cause des coûts très élevés de l'importation de petites quantités, mais aussi parce qu'un nombre limité d'acteurs du marché y occupent une posi- tion de force. Le gouvernement doit développer une stratégie nationale de l'engrais, visant à encourager l'émergence d'une distribution durable des engrais par le secteur privé. Pendant les premières étapes de la mise en oeuvre, un soutien ciblé peut être nécessaire pour assister les distributeurs et rendre les engrais plus accessibles et meilleur marché pour les agricul- teurs. Le soutien ne doit pas seulement être accordé par des subventions uniformes conçues pour réduire le prix de vente au détail de l'engrais, mais plutôt sous la forme de subventions faisant preuve d'une intelligence du marché et ciblant les points clé de celui-ci. Ameliorer la gestion et la conservation des sols et des ressources en eau. Une intensification durable de la filière de la culture vivrière du Burundi ne sera pas possible sans améliorations de la dotation en ressources naturelles dont dépend la production vivrière. Au vu du taux actuel élevé de dégradation de la terre, de l'accélération des pertes de fertilité des sols, de la superficie limitée sous irrigation et du faible usage des meilleures pratiques de gestion des res- sourceseneau,ilesturgentderevoiràlahaussel'investissementdanslaconservationetlages- tion des sols et des ressources en eau. Les efforts doivent porter sur trois domaines en priorité. Conservation et gestion des sols. De meilleures pratiques de gestion et de conservation des sols ralentiront, voire inverseront la perte et l'épuisement des sols : par exemple, la confection de bourrelets de niveau, l'usage de paillis et de cultures de couverture, d'engrais verts et d'engrais organiques, l'améliorations des rotations et associations de cultures, l'in- tégration de cultures et les activités d'agroforesterie. Sur les pentes de coteaux raides, où les pratiques de culture ne pourront, à elles seules, être empêcher les pertes de sols, il faudra envisager des investissements pour la contribution de terrasses. Gestion et conservation des ressources en eau. Parmi les pratiques qui ralentiront, voire inverseront les pertes en eau, figurent l'établissement de diguettes suivant les courbes de 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 61 Rompre le cercle vicieux 61 niveau et de billons cloisonnés, la mise en place de structures simples de détournement et de rétention de l'eau, comme les barrages de correction et les mini-réservoirs, et l'utilisation de pratiques de récolte de l'eau. Ces pratiques sont généralement à la haute intensité de main-d'oeuvre, mais nécessitent peu d'apports de capitaux, si bien qu'elles peuvent être entreprises par des agriculteurs travaillant seuls ou en groupes, sans qu'il soit besoin d'im- portants investissements publics. Irrigation et drainage. Il est possible de développer considérablement l'irrigation au Burundi. Cependant, l'expérience a montré qu'il ne suffit pas que l'irrigation soit techni- quement faisable pour qu'elle soit économiquement rentable ou durable sur le plan insti- tutionnel. Un développement du potentiel d'irrigation va demander (i) un ciblage correct des investissements en termes d'emplacement et d'échelle, (ii) des politiques et procédures qui assurent une gestion efficace et équitable des ressources en eau, et (iii) la formation des responsables, des associations d'usagers de l'eau et des agriculteurs pour leur permettre de mettre en oeuvre ces politiques et procédures avec l'efficacité voulue. Il faut donc formuler unepolitiquenationaledel'eauquifixelesgrandesprioritésdudéveloppementdel'irrigation, coordonne les activités des multiples intervenant en matière hydraulique, assure un envi- ronnement propice et encourage la fourniture de biens et services collectifs nécessaires à un développement réussi. Renforcer le developpement et le transfert technologiques. La croissance de la filière de la culture vivrière au Burundi requiert une hausse de la productivité grâce à un apport tech- nologique. Actuellement, l'exploitant agricole n'utilise pas de technologies améliorées, avec pour résultat une stagnation des rendements de la plupart des cultures principales et de faibles niveaux de rentabilité. Pour assurer des progrès technologiques grâce à des impor- tations et à des adaptations locales, il faut d'abord réformer les services de recherche et de vulgarisation. Les efforts porteront en priorité sur deux domaines. Recherche agricole. Le système de recherche nationale agricole du Burundi, très endom- magé par la guerre civile, est en cours de reconstruction ; mais beaucoup reste encore à faire : il faut non seulement reconstruire des laboratoires, mais aussi remettre en place des équipes de chercheurs formés. Il est peu probable que la recherche sur les cultures vivrières n'attire les investissements privés. Il va donc falloir un engagement à long terme du gouvernement danslarecherchesurcescultures,etsonappuiaudéveloppementd'unestratégieglobalepour la recherche nationale agricole à long terme. Trouver un équilibre approprié entre recherche fondamentale et appliquée sera particulièrement important. En raison de la petite taille du pays, la recherche fondamentale sera difficile à justifier, si bien que la stratégie la plus effi- cace sera d'importer et peut-être de modifier les technologies développées ailleurs dans la région. Il sera également important de s'assurer que la recherche sur les cultures vivrières reste pilotée par la demande, cette demande n'étant pas seulement définie en termes de préférences des producteurs de vivrier, mais aussi des différents intervenants de la com- mercialisation et des consommateurs finaux. Vulgarisation agricole. Il est indispensable que le Burundi dispose d'un service de vul- garisation efficace, non seulement pour assurer le transfert des connaissances et technologies des laboratoires aux producteurs, mais aussi pour garantir un flux d'information permet- tant aux chercheurs de mieux comprendre les besoins des producteurs et des consomma- teurs. Dans le contexte des mesures prises par le gouvernement pour reconstruire l'ancien système,danslequellaresponsabilitédutransfertdetechnologieétaitconfiéàdes«moniteurs 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 62 62 Document de travail de la Banque Mondiale agricoles » locaux, il est essentiel de renforcer l'efficacité de ces derniers, en les formant beau- coup mieux que par le passé en leur fournissant un soutien opérationnel et en améliorant leur accès à l'information. Alors qu'aujourd'hui, ils ne sont que de simples vecteurs servant à transmettre les directives officielles en matière de cultures et des pratiques à utiliser, il faut permettre à ces moniteurs de devenir des personnes-ressources pouvant fournir infor- mations et conseils, afin d'aider les agriculteurs à prendre de meilleures décisions dans la gestion de leurs cultures. Dans ce contexte, le mode de financement du service de vulgarisa- tion agricole est une question majeure. Il est pensable de privatiser la prestation de services de vulgarisation agricole pour des cultures comme le thé et le café, mais il est probable qu'à court terme, un soutien continu des pouvoirs publics sera nécessaire. Investir dans le capital humain au niveau de l'exploitation, et au-delà. L'émergence d'une filière de la culture vivrière dynamique nécessite un capital humain adéquat. Les efforts de renforcement des capacités doivent porter sur deux domaines. Renforcer les organisations de producteurs. Des organisations de producteurs plus solides seront nécessaires pour passer d'une orientation traditionnellement axée sur la sub- sistance à une orientation plus axée sur le marché. La réussite de cette transformation dépendra de la capacité des agriculteurs à identifier les opportunités de marchés réelles et potentielles, à accéder à des technologies de pointe, à s'approvisionner en facteurs de pro- duction essentiels, à produire des produits de haute qualité qui satisfassent les critères du marché de plus en plus soucieux de qualité, et à négocier efficacement avec les fournisseurs d'intrants et avec les acheteurs. Des efforts doivent être faits pour renforcer directement les compétences techniques des agriculteurs (par exemple, en établissant des parcelles de démonstration dans tous les districts et en finançant des activités d'apprentissage durant le salon agricole national). Il faut également renforcer les fondements institutionnels des organisations de producteurs en finançant des projets appuyant la création d'associations d'agriculteurs, de coopératives de producteurs et d'autres organisations communautaires, visant à accroître des connaissances, ressources (notamment financières), les capacités techniques et les compétences en gestion nécessaires pour fonctionner avec efficacité. Créer une population active compétente et motivée. La disponibilité d'une main-d'oeuvre qualifiée est une condition préalable à l'adoption de nouvelles technologies destinées à réduire les coûts de main-d'oeuvre, à relever fortement la productivité et à renforcer la compétitivité. Si les entreprises privées sont bien placées pour offrir des formations tech- niques spécialisées, requises par des applications particulières, mais la responsabilité pour l'éducation de base de la main-d'oeuvre restera celle de l'État, en raison de sa nature de bien public. Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour étendre la portée des programmes d'éducation publique, en particulier pour accroître le nombre de filles scolarisées, pour améliorer la qualité de l'instruction, élargir la gamme des choix éducatifs offerts aux étu- diants, notamment de cours centrés sur les compétences professionnelles. Créer une classe de gestionnaires qualifiés. Les compétences entrepreneuriales et de ges- tion restent encore trop rares au Burundi, en partie à cause de l'héritage d'un passé où la commercialisation et la gestion était dominées par des entreprises publiques et parapu- bliques, et où le commerce était limité aux produits non transformés. Des programmes de formation et d'assistance technique devront être mis en place pour renforcer les compétences en matière de conduite d'entreprise, avec pour objectif d'aider les entreprises à améliorer la qualité de leur production, à réduire leurs coûts et à étendre leurs opérations. 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 63 Rompre le cercle vicieux 63 Renforcer les capacités locales en analyse des politiques. Une filière de la culture vivrière dynamique ne pourra émerger au Burundi sans un soutien continu du gouvernement, sous la forme de politiques agricoles bien pensées, correctement conçues et efficacement mises en oeuvre. Cette qualité des politiques impose au gouvernement de disposer des compétences susceptibles de conduire les recherches qui forment les fondements de saines politiques. Le renforcement des capacités locales en matière d'analyses des politiques nécessite des inter- ventions dans deux domaines. Capacités analytiques. Avec le soutien de ses partenaires de développement, le gou- vernement doit réaliser rapidement les investissements nécessaires pour renforcer les capa- cités analytiques au ministère de l'Agriculture et dans les autres agences et organisations publiques concernées. Cela implique de rehausser les compétences des personnels en place en leur fournissant une formation interne, et d'attirer de nouveaux collaborateurs possé- dant les compétences nécessaires pour combler les lacunes actuelles. Mais la formation et le recrutement devront s'accompagner d'autres mesures. Il faudra aussi conserver les personnels compétents en leur offrant les incitations adaptées, pas seulement sous la forme de salaire et d'avantages compétitifs, mais aussi par un environnement de travail attractif et stimulant et les ressources nécessaires pour réussir. Information et statistiques. La collecte et la communication des statistiques agricoles ont été sévèrement perturbées durant la guerre civile, et les décideurs se trouvent donc dans la position inconfortable de dépendre pour leurs décisions d'un ensemble très limité d'infor- mations. Reconstruire la collecte statistique et les systèmes de communication des informa- tions dans le secteur agricole est urgent. L'objectif pourrait être de passer à un système dans lequel des recensements périodiques ordinaires (conduits, par exemple, tous les cinq ou dix ans) et des enquêtes agricoles annuelles ordinaires peuvent être complétés par des enquêtes ciblées ponctuelles, mises en place en réponse à des questions d'actualité particulières. Interventions transsectorielles. Les interventions sectorielles devront s'accompagner d'efforts importants, pour améliorer les services associées aux infrastructures, l'accès aux produits financiers et le climat des affaires. Cette section aborde les contraintes transsec- torielles qui seront analysées plus amplement dans le chapitre 4. Investir dans l'infrastructure rurale. Les enquêtes dans le milieu des affaires désignent systématiquement la faiblesse de l'infrastructure comme l'un des facteurs capitaux de res- triction de la croissance. Transport. Le renforcement des routes rurales, pour faciliter l'approvisionnement en intrants et l'accès des productions aux marchés, est la plus importante inter- vention pour le développement de la filière de la culture vivrière. Energie. L'accès à l'électricité n'est pas un problème majeur pour la production vivrière, qui consomme peu d'électricité, mais le manque, ou le caractère peu fiable, de la fourniture en électricité entrave le développement d'un secteur agroindustriel. Technologiesdel'informationetdelacommunication.Desprogrammesradiopho- niques spécialisés pourraient être organisés à destination des producteurs de cultures vivrières (informations commerciales, programmes de vulgarisation). Améliorer l'offre de services financiers au secteur rural. De nombreux investissements conçus pour relever la productivité agricole (au niveau de l'exploitation et au niveau 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 64 64 Document de travail de la Banque Mondiale post-récolte) dépendent de l'accès à des services financiers appropriés. Le renforcement des systèmes financiers ruraux est important pour l'agriculture du Burundi. Améliorer le climat des affaires. La priorité finale du gouvernement doit être la création d'un climat des affaires prévisible et stable, permettant aux personnes et aux entreprises de ne plus vivre dans l'incertain et de retrouver la confiance nécessaire pour investir dans les améliorations de productivité, la recherche de nouveaux marchés, et la conduite d'activités qui ajoutent de la valeur tout au long de la chaîne de valeur. Filière de l'élevage17 Vue d'ensemble Les animaux sont une composante importante du paysage rural burundais. Entre 40 et 60 % des 1,2 millions de foyers ruraux que compte le pays possèdent et élèvent des animaux. Parmi ces foyers, 10 à 20 % élèvent du bétail, 40 à 60 % élèvent des chèvres et/ou des moutons, 5 à 10 % élèvent des porcs, et environ 25 % élèvent de la volaille. La production animale a tendance à être étroitement liée à la production végétale, reflétant l'accent mis par les stra- tégies de subsistances rurales sur la diversification et l'autonomie. En plus de jouer un rôle important en tant que source de revenu, de nourriture, et de purin, les animaux sont aussi importants pour des raisons sociales. La production animale contribue de manière significative à l'économie rurale, mais cette contribution n'est pas toujours reconnue ou appréciée, parce que la plupart des pro- duits d'origine animale sont vendus sur les marchés locaux ou consommés à la maison. La filière de la production animale représente environ 8 % du PIB total et 17 à 23 % du PIB agricole. En terme d'importance économique, la production animale se classe deuxième derrière la culture vivrière, mais devant la culture de rente. Au sein de la filière de la pro- duction animale, les activités à valeur ajoutée sont concentrées sur la production primaire à l'extrémité de la chaîne de valeur. Les industries de transformation et de commercialisation des animaux d'élevage sont relativement sous-développées et ne représentent qu'environ un tiers de la valeur ajoutée. La production animale est une activité multifonctionnelle dont les finalités sont aussi bien économiques et financières que sociales. Les animaux, les bovins en particulier, sont estimés pour différentes raisons: Lerevenu.Laplupartdesfoyersquiélèventdesanimauxtireunrevenudelavente du lait, des oeufs, et occasionnellement de la viande. La vente des produits d'origine animale n'est généralement pas la source principale de revenu d'un foyer, mais en est une source régulière qui peut compléter le revenu généré par d'autres activités plus rémunératrices. Le fait que ces produits d'origine animale peuvent être ven- dus tout au long de l'année veut dire que le revenu qu'ils génèrent protège les foyers contre le caractère saisonnier d'autres d'activités lucratives. 17. Cette section a été rédigée par Michael Morris (Economiste en chef, AFTS3, Banque mondiale) avec le support de Marc Moens (FAO). 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 65 Rompre le cercle vicieux65 Nourriture.Lesanimauxd'élevagesontunesourceimportantedenourriturepour les foyers qui les possèdent. Si la plupart des foyers ruraux consomme régulièrement du lait et des oeufs, leur consommation de viande reste modeste, et environ 5 % seulement d'entre eux mangent de la viande une fois par semaine ou plus. Purin.Enproduisantdupurinquipeutêtreétendudansleschampscultivés,lesani- mauxd'élevagecontribuentdemanièreimportanteaumaintiendelaproductivitédes systèmes de culture. Toute une palette de sous-produits agricoles (paille, foin, balle de céréales, son, épluchures) peut être utilisée pour nourrir les animaux d'élevage, ce qui contribue à la soutenabilité générale des systèmes intégrés culture-élevage. Richesse.Dansuneéconomieoùpeudefoyersrurauxutilisentdesservicesfinanciers officiels tels que des comptes d'épargnes, les animaux d'élevage servent de réserve de richesse pratique et facilement convertible en liquide. Les économies accumulées par les foyers ruraux sont souvent investies dans des animaux qui sont vendus lorsque les foyers ont besoin d'argent liquide. Les animaux ont l'avantage supplémentaire d'être mobiles, ce qui est important dans une économie qui a été marquée par un conflit civil et dans laquelle les familles ruraux ont souvent été déplacées. Statutsocial.Traditionnellement,lesanimaux,surtoutlesbovins,onttoujoursété un symbole important du statut social dans la société burundaise. Même si cet aspect de la possession d'animaux d'élevage est peut être moins important aujourd'hui que par le passé, être propriétaire d'animaux confère toujours du prestige, et les dons d'animaux gardent une importance symbolique lors de certaines occasions sociales, les mariages en particulier. Les systèmes de production animale du Burundi peuvent être classés selon le type d'animal et l'intensité des méthodes de production. Au niveau des foyers, les modèles de propriété des animaux d'élevage sont associés à la richesse, qui à son tour, est souvent liée à la pos- session et à l'accès aux terres. Lorsque par chance les foyers pauvres en possèdent, il s'agit généralement de petits animaux tels que de la volaille, des lapins, et des cochons d'Inde. Les foyers modestes élèvent les mêmes espèces, mais aussi des chèvres, des porcs, et des moutons. Les plus riches, c'est à dire 10 à 15 % des foyers, possèdent du bétail, générale- ment en plus des autres espèces. Lesméthodesd'élevagedépendentbeaucoupdeladisponibilitédesterres.Dansleszones rurales où la densité de population est relativement faible, le bétail, les chèvres et les mou- tons sont élevés suivant des méthodes extensives où ils paissent en pleine campagne. Dans les aires périurbaines et suburbaines où la densité de population est plus élevée, les ani- maux sont élevés suivant des méthodes semi-intensives, c'est à dire qu'ils sont mis au pré une partie de la journée, et passent le reste du temps en étable où ils se nourrissent de four- rage coupé ou ensilé et de céréales. Les méthodes semi-intensives sont utilisées par certains agriculteurs progressistes même dans des zones où il y a des pâturages. Ces agriculteurs sont généralement mieux intégrés au système de marché : ils achètent du fourrage, des ali- ments industriels et d'autres intrants (y compris des produits et des services vétérinaires), et vendent la plus grande partie de leur production. Les caractéristiques génétiques de leurs animaux ont aussi tendance à être meilleures. Les méthodes les plus intensives sont utilisées dansetautourdeszonesurbaines,oùladensitédepopulationestlaplusélevée,etoùlespâtu- rages ont complètement disparus. Dans ces endroits, les éleveurs se comportent comme de petits chefs d'entreprise : ils emploient de la main d'oeuvre, achètent tous les intrants, et 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 66 66 Document de travail de la Banque Mondiale vendent pratiquement la totalité de leur production. Ces systèmes de production se concentrent sur les produits laitiers, les oeufs et l'engraissement du bétail et des porcs. Le tableau 3.5 résume les caractéristiques des systèmes d'élevage les plus communé- ment rencontrés au Burundi. Performance de la filière de la production animale Production et productivité. En l'absence d'un recensement officiel des animaux d'éle- vage, des données fiables concernant la taille et la composition du cheptel national font défaut. Mais même si les chiffres exacts ne sont pas disponibles, les tendances générales sont bien connues. Durant la récente période de conflit civil, la population de la plupart des principales espèces animales--bovins, chèvres, moutons, porcs et volaille--ont subi un brusque déclin, les animaux ayant été tués pour être mangés, tant par les combattants que par les populations rurales déplacées dont les activités de culture avaient été inter- rompues. Plus récemment, il semble que les troupeaux se soient bien rétablis, et en 2005 les chiffres concernant la plupart des espèces avaient augmenté substantiellement, et dans certains cas, avaient même dépassé les chiffres de 1999 (Figure 3.9). Les données officielles sur l'élevage publiées par le ministère de l'Agriculture et de l'É- levage ont été examinées et jugées trop prudentes en raison des paramètres obsolètes uti- lisées pour estimer les taux de reproduction et de productivité de lait et de viande. Les données officielles ont été mises à jour à l'aide de paramètres plus plausibles et plus conformes aux normes industrielles actuellement acceptées (pour plus de détails, voir Moens, 2007). Les chiffres ainsi obtenus pour l'élevage sont plus élevés que ceux rappor- tés par le ministère. Par exemple, alors que les statistiques de production officielles indi- quent que 9.700 tonnes de viande et 16,5 millions de litres de lait ont été produits en 2005, les chiffres ajustés suggèrent que la production était en fait plus proche de 16.000 tonnes de viande et 48 millions de litres de lait. Rentabilité. Dans le cadre de l'étude du contexte du secteur de la production animale préparée pour SoRG, des budgets représentatifs ont été préparés pour un certain nombre de systèmes habituels de production animale. A l'aide de ces budgets, la rentabilité de ces systèmes a été évaluée et comparée. Plusieurs mesures alternatives de rentabilité ont été cal- culées, comme les taux de rendement interne (TRI), les rendements annuels nets par femelle reproductrice, et les rendements nets par jour de travail (Tableau 3.5). Les mesures de rentabilité figurant dans les trois dernières colonnes du Tableau 3.5 présentent diffé- rents points de vue sur l'attrait financier des activités de production animale. Lerendementannuelnetparfemellereproductriceconstituelamesurederentabilité la plus pertinente du point de vue des foyers ruraux au Burundi, parce qu'il reflète ce qui est souvent le facteur restrictif de la production--le capital. Selon cette mesure, les systèmes plus intensifs sont les plus rentables. Lerendementnetparjourdetravailreprésentelamesurederentabilitéquialaplus grande pertinence pour les foyers confrontés à des contraintes de travail. Selon cette mesure, les systèmes extensifs sont les plus rentables. Les taux internes de rendement sont plus élevés pour les entreprises élevant des petits ruminants, des porcs, et de la volaille, et ils sont aussi plus élevés parmi les 11162 -03 _CH03 Tableau 3.5 . Caractéristiques des systèmes d'élevage au Burundi .qxd:11162 Indicateurs de productivité Taille du Coût des Indicateurs de rentabilité cheptel aliments/ Rendement Rendement -03 (en nombre Composition Viande Lait Purin coût annuel net journalier _CH03 Espèces Races de têtes) du cheptel (%) (kg) (l/année) (tonnes) total (%) (000 BIF) net (en BIF) TRI (%) Bovins 395.741 18 74 1.860 19 .qxd Extensive Race locale [Ankole] 178.083 45 32 149 0,4 19 131 2.631 29 Extensive Race croisée [Ankole × 118.722 30 42 294 0,9 68 228 1.897 31 6/9/08 Sahiwal] Culture- Race croisée métissée 79.148 20 53 891 5,9 69 359 599 31 élevage [Ankole × Sahiwal] × exotique 3:28 Laitière semi- Race croisée 7/8 [Ankole × 19.787 5 90 1.871 6,2 intensive Sahiwal] × exotique PM Chèvres 1.245.680 0 11 2.223 67 Page Extensive Races locales 242.933 100 5,0 0,3 Moutons 169.572 0 19 2.341 86 67 Extensive Races locales 100 10 0,4 Porcs 39 128 3.895 75 Traditionnelle Races locales 168.724 99,5 238 0,5 67 510 8.780 34 Semi-intensive Race améliorée [Locale × 0 0,0 702 1,7 importée] Intensive Race importée 848 0,5 1.691 3,8 Lapins 26 1.050 40 Extensive Race locale 316.351 100 11 0,7 Volaille 901.496 OEufs.(n) 0 11 -- 327 Traditionnelle Race locale 860.929 95,5 4,6 35 0,00 50 3,9 2.231 18 Domestique en cages Races croisées 9.015 1,0 0,7 104 0,03 69 4,1 4.817 25 Intensive Race importée de type 31.552 3,5 0,7 128 0,03 en cages « strate » Source : Taille des troupeaux (ISTEEBU). Productivité : calculs de la mission 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 68 68 Document de travail de la Banque Mondiale Figure 3.9. Population 2005 des animaux d'élevage, en pourcentage de la population de 1999 70 60 50 40 30 20 10 0 Sorgho Maïs Riz Haricot Pomme Manioc Banana Banana de terre (cuisine) (bière) systèmes plus extensifs malgré les niveaux de productivité généralement bas dus à la faiblesse des investissements initiaux et des coûts récurrents. L'analyse de sensibilité a révélé que les systèmes plus intensifs génèrent des rendements très inférieurs à leur potentiel effectif à cause des pratiques sous-optimales des éleveurs. L'ana- lyse de sensibilité a aussi révélé que les systèmes extensifs et intensifs sont caractérisés par différents niveaux de risque. Les systèmes plus intensifs qui génèrent les taux de rendement interne les plus élevés ont aussi tendance à être les plus sujets à des changements dans les quantités d'intrants achetés utilisées et dans les prix payés pour ces derniers. Ressources alimentaires. Au Burundi, la filière de la production animale est confron- tée à une crise causée par la diminution des sources d'alimentation animale. La croissance de la population a causé une expansion de la surface cultivée, qui s'est principalement faite au détriment des pâturages. Entre 1991 et 2002, les pâturages ont diminué au rythme moyen de 6 % par an. Ce qu'on appelle l'équilibre pastoral a ainsi été rompu, et la quantité de pâtu- rages disponibles est maintenant trop réduite pour subvenir aux besoins de la population animale nationale au moyen du seul pâturage extensif. La pression exercée sur les terres du pays est en train de remodeler la filière de la pro- duction animale en altérant la disponibilité et le coût des aliments. Les pâturages de bonne qualité venant à manquer pour nourrir leur troupeau, les éleveurs d'animaux réagissent de manière rationnelle en ayant recours à des méthodes de production intensive. Ils enferment leurs animaux dans une étable et choisissent decultiver du fourrage(seulement 5% des terres nécessaires à l'entretien d'un animal en pâturage sont nécessaires pour nourrir un animal engraissé à l'étable). Cette transition vers l'intensification affecte aussi la composition du cheptel national. Au cours des dernières années, beaucoup d'éleveurs ont commencé à délaisser les bovins (qui exigent de larges quantités d'aliments de bonne qualité) au profit de ruminants plus petits (qui consomment moins d'aliments, et de moins bonne qualité). 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 69 Rompre le cercle vicieux 69 L'intensification des pratiques de production soutiendra la croissance continue de la filière de la production animale, au moins à court et moyen terme, parce qu'elle permet non seulement d'utiliser moins de terres, mais aussi d'exploiter une gamme plus large de sources d'aliments. Le côté offre de l'équilibre mondial de l'alimentation animale peut être aug- menté de manière significative par l'addition de sous-produits agricoles et agroindustriels, de fourrage dérivé de l'agroforesterie, et d'aliments industriels. Les calculs effectués dans le cadre de l'étude du contexte suggèrent que si 30 % des sous-produits agricoles et agroin- dustriels disponibles dans le pays étaient injectés dans la chaîne alimentaire des animaux d'élevage, les besoins nutritionnels du cheptel national pourraient être satisfaits. La quan- tité de matière azotée digestible qui en résulterait, le facteur le plus restrictif, suffirait à nourrir environ 80.000 vaches laitières génétiquement améliorées supplémentaires (ce qui correspond à une production annuelle de lait de 300 millions de litres). Commercialisation. Lesmarchésd'animauxd'élevageauBurundi,bienquerelativement petits, semblent bien organisés et extrêmement dynamiques. Ce dynamisme semble avoir pour origine la petite taille du pays, le réseau assez dense de routes primaires, et le petit nombre de marchés d'animaux d'élevage importants. Plus des deux tiers de toutes les tran- sactions concernant les animaux d'élevage sont concentrés dans six marchés majeurs. Les deux marchés les plus importants, Cankuzo et Kayanza, sont situés près de la frontière, ce qui facilite la participation des négociants étrangers. Le système de commercialisation des animaux d'élevage au Burundi passe par deux canaux principaux : Les canaux commerciaux longs livrent les animaux (principalement des bovins, des chèvres,desporcsetdesmoutons)àl'abattoirdeBujumbura.Quatreimportantsmar- chés de gros participent en tant qu'intermédiaires: Gitega, Matana, Rwibaga, et Ngozi. Lescanauxcommerciauxcourtsdominentlecommercedulait,desoeufs,delavolaille et de la viande de lapin. Ces produits passent généralement directement de l'éleveur au boucher-détaillant qui abat l'animal et vend la viande au consommateur final. Le nombre d'intermédiaires, même dans les réseaux longs, est limité comparé aux autres pays. Ces intermédiaires ont tendance à être spécialisés par produits. Les relations entre et au sein des intermédiaires sont généralement traditionnelles et informelles, et parce que les négociants ont tendance à faire affaire avec le même petit groupe de partenaires, les nou- veaux venus doivent surmonter des obstacles considérables. Le système de commercialisation des cuirs et peaux est distinct et spécialisé. Les peaux provenant du bétail, des moutons et des chèvres sont ramassées par des tanneries indivi- duelles chez les éleveurs voisins, qui sont encouragés à les déposer dans des centres de col- lecte locaux. Les exportations de cuirs et peaux s'élèvent actuellement à environ 400 tonnes par an, comparées aux presque 1.500 tonnes d'avant le récent conflit civil. Plus de 90 % des exportations de cuirs et peaux du Burundi consistent en cuir sec de qualité inférieure ; moins de 10 % consistent en bleu humide de haute qualité. Les principales destinations sont Hong Kong, le Pakistan, le Kenya, et l'Italie. Abattage et transformation. Les installations d'abattage burundaises ont besoin d'être rénovées et la plupart des abattages se fait selon les méthodes traditionnelles. Seules trois 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 70 70 Document de travail de la Banque Mondiale villes sont équipées d'abattoirs modernes, propriété du secteur public qui les exploite éga- lement, puisque la loi interdit qu'un abattoir soit une propriété privée. Les abattoirs publics sont fonctionnels, mais vétustes et antihygiéniques. Dans les nombreuses régions du pays où il n'y a pas d'abattoir, les animaux sont abattus en plein air, et peu d'attention est accor- dée aux normes d'hygiène. Les risques sanitaires sont donc très élevés. La transformation industrielle de la viande et du lait est rare au Burundi. A part les abattoirs, un petit nombre de boucheries « modernes », une tannerie et une poignée de lai- teries locales, il n'existe aucune installation de transformation industrielle dans le pays. A cause de cette absence de capacités de transformation, la majorité des produits d'origine animale (viande et lait) doit être vendue rapidement pour éviter qu'elle ne se gâte. Cela réduit la rentabilité de la production de l'élevage en restreignant la capacité des éleveurs et des marchands à faire coïncider les ventes avec des prix favorables. Commerce transfrontalier. Le commerce transfrontalier d'animaux d'élevage et de produitsd'origineanimaleestdifficileàquantifierparcequelesdonnéesofficiellessurlecom- merce sont rares. Les données disponibles suggèrent un certain nombre de faits: Les importations d'animaux d'élevage et de produits d'origine animale dépassent largement les exportations. Lesimportationsdelaitsontplusimportantesquecellesdeviande.Ellesreprésen- tent environ 62 % du total des importations de produits d'origine animale, les 38 % restants étant constitués d'animaux vivants et de viande. Lesimportationsofficiellesdeviandesontnégligeables,représentantmoinsde2% du montant total de l'approvisionnement en viande de juillet 2005 à septembre 2006, la période la plus récente pour laquelle des données sont disponibles. Très peu de viande ou de lait est exporté. Les seuls produits d'origine animale qui soient exportés en quantités significatives sont les cuirs et peaux. Les défis auxquels est confrontée la filière de la production animale La croissance du sous-secteur de la production animale au Burundi est freinée par cinq contraintes clés, qui contribuent toutes à une faible productivité et à une faible rentabilité. Une faible qualité génétique. Au Burundi, l'élevage est caractérisé par sa faible qualité génétique. L'utilisation de races génétiquement modifiées est très limitée, et les animaux améliorés sont à la fois difficiles à trouver et extrêmement chers. Il n'existe aucun éleveur d'animaux génétiquement améliorés dans le pays, et l'absence de vols aériens directs depuis l'Europe rend l'importation d'animaux chère et peu aisée. Quelques entreprises ont com- mencé à proposer des services d'insémination artificielle, en particulier pour les bovins, mais ces services restent coûteux et peu fiables. Les pénuries d'aliments et d'eau. Les éleveurs du Burundi sont confrontés à une menace grandissante sous la forme de pénuries de plus en plus fréquentes d'aliments de bonne qua- lité. La quantité de pâturages disponibles est maintenant trop limitée pour subvenir aux besoins des populations de bovins, caprins et ovins du pays mises en pâturage extensif, ce qui forceleséleveursdecestroisespècesàrechercherd'autressourcesd'alimentation.Cependant, 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 71 Rompre le cercle vicieux71 la compétition s'intensifie autour de celles-ci, ce qui fait augmenter le prix des aliments et érode la rentabilité au sein du secteur de la production animale. Les éleveurs du Burundi ont aussi de plus en plus de mal à accéder à suffisamment d'eau pour leurs animaux. L'amenuisement des pâturages force beaucoup d'éleveurs à adopter des méthodes intensives, même si enfermer les animaux à l'étable impose la charge sup- plémentaire de leur apporter de l'eau. Celle-ci n'est pas toujours facilement accessible, et des ressources considérables doivent souvent être investies dans son transport depuis des sources lointaines. Problèmes de santé animale. Les trop fréquents problèmes de santé animale représentent un fléau pour la filière burundaise de la production animale. Les maladies sont communes parmi toutes les espèces et les taux de mortalité sont élevés, entrainant des pertes écono- miques significatives et un affaiblissement de la rentabilité. Ces taux élevés de maladie et de mortalité ont pour origine plusieurs facteurs, comme l'absence presque totale de vétérinaires dans le pays ; l'absence de législation spécifique aux activités vétérinaires ; la disponibilité limitée, la mauvaise qualité et le coût élevé des produits phytosanitaires ; l'absence de suivi, de contrôle et de surveillance des nuisibles et des conditions sanitaires le long de la chaîne de valeur ; l'utilisation d'installations surpeuplées, désuètes, et souvent antihygiéniques pour l'élevage, le transport, et la commercialisation des animaux vivants ; et l'utilisation d'ins- tallations antihygiéniques pour l'abattage et la transformation. Des exigences de travail toujours plus élevées. L'intensification des systèmes de produc- tion animale augmentera de manière significative les exigences de travail. Par exemple, le bétail élevé en étable consomme quotidiennement entre 50 et 60 litres d'une eau qui dans la plupart des cas, doit être transportée depuis des sources éloignées. Le transport de l'eau étant une tâche traditionnellement assurée par les femmes au Burundi, l'élevage intensif pourrait leur infliger une lourde charge de travail supplémentaire. Les foyers confrontés à un manque d'argent liquide pourraient ne pas être capables d'acquérir tous les intrants nécessaires, et ceux confrontés à des contraintes de travail ne pourront peut-être pas assumer toutes les activités associées à l'intensification. Gouletsd'étranglementdanslatransformationetlacommercialisation. Lesgouletsd'étran- glement dans l'abattage et la transformation affaiblissent la rentabilité des entreprises de pro- duction animalière en limitant la quantité et la qualité des produits commercialisés. En l'absence d'abattoirs et de laiteries modernes et bien équipés, les animaux sont abattus dans desconditionspeuhygiéniquesetvendusrapidementsurlemarchélocalpouréviterlespertes liées à l'altération des produits, et le lait est vendu non traité. Les éleveurs n'ont généralement pas,oupeu,l'opportunitéd'ajouterdelavaleuràleursproduitsenlesmettantsousuneforme qui leur permettrait de cibler des niches de marché où les prix sont plus élevés. Ils ne sont que rarementcapablesdeconserverleursproduitspendantunepériodesuffisammentlonguepour leur permettre de tirer avantage de mouvements de prix favorables sur le marché. Perspectives d'avenir de la filière de la production animale Comment la force et la composition de la demande de produits d'origine animale vont- elles évoluer au cours des prochaines années, et quelles seront les implications pour la filière 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 72 72 Document de travail de la Banque Mondiale de la production animale burundaise ? A l'avenir, la demande de nourriture en général sera conditionnée par trois facteurs principaux: (a) l'accroissement de la population ; (b) l'aug- mentation des revenus ; et (c) les changements dans les goûts et les préférences des consom- mateurs. Ces trois facteurs valables pour l'ensemble de la future demande de nourriture s'appliquent aussi à celles des produits d'origine animale en particulier, et il est essentiel de noter l'importance pour le secteur de la production animale du second vecteur de croissance--l'augmentation des revenus. Les produits d'origine animale sont des produits supérieurs, pour lesquels l'élasticité de la demande par rapport au revenu est très élevée, ce qui veut dire qu'une augmentation des revenus devrait provoquer une augmentation de la demande bien plus forte pour ces produits que pour la plupart des autres catégories alimentaires. Quelles sont les principales forces qui affecteront la capacité de la filière à réagir à l'évo- lution de l'ampleur et de la composition de la demande ? Le facteur le plus important est la rareté grandissante des terres et la pression qu'elle induit en faveur d'une intensification des systèmes de production animale. Elle impliquera de réduire le cheptel tout en augmentant la productivité grâce à l'amélioration génétique, à une meilleure nutrition et des soins vétéri- naires améliorés. L'intensification peut également être accompagnée par un changement dans la composition du cheptel national, avec un remplacement des bovins par des espèces plus petites. L'intensification s'accompagnera aussi d'une plus grande spécialisation, dans la mesure où les éleveurs d'animaux compteront de plus en plus sur des producteurs d'aliments spé- cialisés. Pour que cette spécialisation réussisse, la filière devra être beaucoup plus axée sur le marché. La spécialisation et la commercialisation grandissantes ouvriront la porte à de nouvelles opportunités économiques pour les producteurs d'aliments et de jeunes animaux (veaux, chevreaux, poussins et porcelets) ; pour les agents de vulgarisation, les prestataires de services vétérinaires et d'assistance commerciale ; et pour ceux qui proposent des opé- rations spécialisées telles que l'engraissement et la finition. La compétitivité future de la production animale au Burundi dépendra en partie du développement des politiques commerciales. L'entrée récente du Burundi dans la CAE a exposéleséleveursàunecompétitionplusgrandeauseindelarégion,maisleuraaussiapporté une meilleure protection vis-à-vis des concurrents internationaux (non-régionaux). Cette protection supplémentaire pourrait être particulièrement importante pour le secteur laitier puisque beaucoup de pays de l'OCDE produisent régulièrement des excédents de produits laitiers (lait, beurre, fromage), qui sont souvent vendu à perte sur les marchés mondiaux ou distribué en tant qu'aide alimentaire. Interventions prioritaires à réaliser pour le sous-secteur de la production animale Les actions suivantes sont nécessaires pour permettre au Burundi d'atteindre l'objectif de croissance agricole de 6 %. Interventions spécifiques Améliorer et assurer les ressources alimentaires et en eau. La gestion efficace de l'ali- mentation et de l'eau sera un défi majeur, puisqu'on peut s'attendre à ce que la compétition 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 73 Rompre le cercle vicieux 73 grandissante autour de ces ressources critiques s'intensifie face à la pression exercée par l'accroissement de la population et l'amenuisement des terres disponibles. Le gouverne- ment peut jouer un rôle important : En introduisant, mettant en oeuvre, et faisant respecter de manière effective des politiques adéquates qui encouragent l'utilisation efficace, équitable et durable des terres cultivables et des pâturages ; Enfinançantlarecherchesurl'améliorationdelaproductivitédespâturages; Enfinançantlesactivitésdevulgarisationafind'assurerquelestechnologiesamé- liorées soient efficacement transmises aux éleveurs ; et En augmentant le nombre de points d'eau pour les animaux d'élevage. Promouvoir et soutenir les méthodes de production intensive. La relance de la croissance du secteur de la production animale dépendra de la capacité des éleveurs à remplacer leurs actuelles méthodes extensives par des méthodes plus intensives. Le gouvernement peut jouer un rôle important en supportant cette transition, en rendant plus disponibles et abordables : lesracesgénétiquementaméliorées.Leschercheursontidentifiélesracesaméliorées qui sont bien adaptées aux conditions locales, mais ces races ne sont pas largement disponibles, et lorsqu'elles le sont, elles sont généralement très chères. Le secteur public a un rôle à jouer dans le soutien de la production des races améliorées. Ces fonctions ne doivent pas forcément être accomplies directement par les agences d'État, mais pourraient être confiées à des prestataires de services privés sous contrat. les intrants achetés. Le soutien du secteur public est nécessaire afin d'encourager l'émergence de systèmes de distribution d'intrants actifs et durables entraînés par le marché. Ce soutien pourrait comprendre la formation des distributeurs à la ges- tion d'entreprise, la prestation de services financiers et d'assistance aux entreprises, et la fourniture de garanties de crédit aux distributeurs d'intrants. Le gouvernement pourrait aussi réglementer la distribution de certains intrants afin d'en assurer le contrôle qualité. lesservicesvétérinaires.L'intensificationgénèrerainévitablementuneaugmentation de la demande de services vétérinaires. Le soutien du secteur public sera nécessaire afin d'assurer que ceux-ci soient disponibles, abordables et sûrs. Le gouvernement devra réglementer la distribution des produits phytosanitaires afin d'en assurer le contrôle qualité. Améliorer les étapes de transformation et de commercialisation dans la chaîne de valeur de la production animale. La filière de la production animale ne pourra pas réaliser complètement son potentiel de croissance si les améliorations de l'étape primaire de la pro- duction ne sont pas complétées par des améliorations en aval dans la chaîne de valeur (transformation et commercialisation). Le gouvernement peut jouer un rôle important en soutenant ces améliorations complémentaires en: Améliorantl'accèsaumarchédesproducteurs.Lacapacitédesproducteursàtirerun rendement adéquat de leurs élevages est freinée par leur faible taux de participation 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 74 74 Document de travail de la Banque Mondiale au marché. Leur ouvrir un meilleur accès au marché exigera d'investir dans des ins- tallations physiques de marché, ainsi que dans des infrastructures de transport. Améliorant les systèmes d'information sur le marché de l'élevage. Il est difficile pour les éleveurs d'obtenir des renseignements sur le marché, ce qui les empêche de cibler les marchés où les prix sont les plus favorables. Les avancées récentes réali- sées dans le domaine des technologies de l'information et de la communication (TIC) ayant fait baisser de manière significative les coûts de collecte, stockage et dis- sémination de l'information, le gouvernement pourrait se charger de cette fonction à des coûts relativement bas. Rénovantlesinstallationsd'abattageetdetransformation.Investirdansdesinstallations d'abattage et de transformation modernes, efficaces et hygiéniques est nécessaire et urgent afin d'améliorer la qualité et la sécurité de la viande et des produits laitiers. En principe, ce sont les activités qui devraient attirer le capital privé, en particulier dans les zones urbaines où une demande de viande et de produits laitiers forte et fiable est assurée. Dans les villes plus petites et dans les zones rurales moins aptes à attirer l'in- vestissement privé, des installations détenues par la communauté et fonctionnant grâce à une taxe payée par les utilisateurs pourraient constituer une alternative. Renforcer le soutien institutionnel de la filière de la production animale. La capacité du DGE a subi un déclin sévère et n'est plus capable aujourd'hui de fournir que quelques-uns des services attendus d'une agence d'une telle importance potentielle. Il est nécessaire d'agir rapidement sur plusieurs fronts afin de rectifier cette situation. Recentrer la recherche sur la production animale. Ce recentrage devrait porter une plus grande attention aux espèces autres que bovines, et sa portée devrait être élar- gie pour inclure non seulement les problèmes techniques mais aussi les questions sociales, économiques et environnementales. La demande devrait jouer un plus grand rôle dans l'élaboration du programme de recherche afin d'assurer que les besoins des éleveurs sont abordés, et le programme devrait être lié plus étroitement aux services de vulgarisation. Reconstruirelescapacitésd'analysedesstratégies.L'analysedesstratégiesdeproduc- tion animale doit aller au-delà du thème récurrent de la réglementation sanitaire pour envisager un programme bien plus large. Les analystes doivent beaucoup plus interagir avec les acteurs de l'industrie pour s'assurer que la demande tient une plus grande place dans le programme de recherche des stratégies et que celui-ci répond aux besoins des clients. Renforcer les services de vulgarisation dans le domaine de la production animale.Les services de vulgarisation dans le domaine de la production animale ont besoin d'être renforcés, non seulement via l'embauche de « moniteurs agricoles » recrutés localement, mais aussi en déployant sur le terrain des spécialistes techniques cor- rectement formés et étroitement supervisés. Les activités de vulgarisation de la pro- duction animale devraient se montrer plus réactives à la demande que par le passé, où elles appliquaient une inefficace approche allant du haut vers le bas et basée sur la communication de recommandations standard le plus souvent inappropriées. Améliorerlaprestationdesservicesvétérinairesetdesoinsdesantéanimale.Lafilière de la production animale ne réussira pas à se développer sans d'importantes amé- 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 75 Rompre le cercle vicieux 75 liorations des services vétérinaires et des soins de santé animale. La prestation de ces services peut souvent être privatisée ou confiée à des partenariats public-privé, mais un cadre règlementaire strict sera nécessaire afin d'en assurer la qualité et la sécurité. Améliorerlesrenseignementsetlesstatistiques.Unrecensementnationalducheptel devrait être organisé pour obtenir des renseignements à jour sur le nombre et le type d'animaux élevés, les caractéristiques des foyers qui pratiquent l'élevage, les méthodes de production animale appliquées, les activités de commercialisation, les modèles de consommation des produits d'origine animale, etc. Interventions intersectorielles. Le développement de la filière de la production animale devrait tirer profit des interventions intersectorielles destinées au sous-secteur de la cul- ture vivrière. 11162-03_CH03.qxd:11162-03_CH03.qxd 6/9/08 3:28 PM Page 76 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 77 CHAPITRE 4 Cultures d'exportation Vers une contribution significative à la croissance Dan Clay, Anne Ottawa, Luis Flores, Paul Delucco, Eric Kacou, James Foster, John Baffes et Tania Rajadel L es performances médiocres de la filière du café sont largement responsables de la croissance faible et volatile de l'économie burundaise, en dépit du fait qu'elle a béné- ficié de manière substantielle des investissements publics. A l'avenir, toute stratégie de croissance devra renforcer et diversifier les exportations agricoles. Si le pays bénéficie de conditions agro-écologiques optimales pour la production de cultures d'exportation de qualité supérieure, le renforcement de leur contribution à la croissance exige une amélio- ration radicale de la gestion des principales industries agricoles et un accès optimisé aux marchés des produits à valeur ajoutée. La compétitivité des cultures d'exportation pourrait bénéficier de la promotion de pratiques modèles de gestion des coûts et de l'élaboration de stratégies de vente. Parmi les améliorations possibles figurent l'augmentation des rendements, la réduction des coûts, l'augmentation de la fiabilité de la production, et l'amélioration des revenus. Ceci peut être réalisé par la mise en oeuvre de stratégies de vente basées sur une protection des coûts respec- tantleseuilderentabilité,soitenmaximisantlesbénéficeslorsquecescoûtssontdépassés,soit en minimisant les pertes lorsque les résultats restent en deçà--en fonction des conditions du marché. Cela entraînerait l'adoption d'un large éventail de contrats pour les différents mar- chés de produits de base, ainsi que de nouvelles techniques de vente. Essentiellement, l'amé- liorationdesventesexigedeciblerlesmarchésetd'exploiterlesopportunitésquiseprésentent sur les nouveaux marchés. Des quantités importantes des productions du café, du thé et hor- ticole pourraient pénétrer les marchés du commerce équitable et d'autres marchés de niche où la production des pays fragiles est valorisée. L'histoire du Burundi pourrait devenir un avantage pour l'accès à ces marchés. Ce chapitre est consacré à la manière dont le café, le thé et l'horticulture pourraient pénétrer les marchés de niche à haute valeur. Même si d'autres cultures d'exportation sont elles aussi en mesure de contribuer à la croissance, l'équipe examine ces domaines d'amélioration au vu des données disponibles, des contraintes de temps, et de l'importance de ces trois filières. 77 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 78 78 Document de travail de la Banque Mondiale Filière du café18 Bref historique Le café est produit par environ 800.000 ménages et représente 85 % des revenus d'expor- tation du pays. Très tôt dans l'histoire du Burundi, il est devenu sa culture de rente domi- nante, sa première industrie, et sa principale source de revenus d'exportation. Même si les risques liés à cette dépendance sont importants aujourd'hui, il était cependant logique pour le Burundi de s'appuyer sur le café lorsque les prix à l'exportation étaient fixés par des accords internationaux et permettaient de générer des revenus à la fois élevés et prévisibles. Par ailleurs, le bien-être des élites de l'Etat dépendait tellement du café que le secteur béné- ficiait de la plus grande part des investissements et des efforts. La création et la gestion des entreprises d'État ont joué un rôle déterminant dans la redistribution du profit au sein de la classe dirigeante. Dans ce contexte, l'État a fait des efforts considérables pour augmenter les surfaces consacrées au café et en forcer la culture à travers le pays. La phase d'expansion la plus importante de la culture du café s'est déroulée dans les années 80 dans le cadre d'un pro- gramme de plantation massive de caféiers destinée à augmenter la production annuelle de 30.000 à 50.000 tonnes pour le début des années 90 (Figure 4.1). Entre 1980 et le début des années 90, le nombre des caféiers a augmenté de 90 millions à plus de 220 millions, et les surfaces consacrées au café sont passées de 40.000 à plus de 85.000 hectares. Le café est l'une des cultures qui nécessite le plus de main d'oeuvre, et cette expansion s'est appuyée sur la contrainte, les agriculteurs étant forcés de planter et de s'occuper des arbres avec interdiction formelle de les déraciner. En dépit de ces interventions radicales, Figure 4.1. Production de café du Burundi (1.000 sacs de 60 kg) 18. Cette section a été rédigée par Dan Clay (MSU) avec le support d'Anne Ottawa (MSU), Ilhem Baghdadli (Economiste, TTL, AFTS3), Paul Deluco (MSU) et Tania Rajadel (Economiste, AFTS3). 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 79 Rompre le cercle vicieux79 la production a stagné en dessous des 35.000 tonnes au début des années 90, pour forte- ment diminuer par la suite. La baisse considérable des rendements est le reflet d'une poli- tique autoritaire qui offrait peu d'encouragements. Une illustration des carences de cette politique a été la plantation d'arbres sur des sols considérés comme inadaptés à la cul- ture du café. La faible compétitivité du secteur du café burundais est devenue une cause d'in- quiétude majeure quand, suite à la suspension de l'Accord international sur le café en 1989, les prix ont baissé de manière significative (Figure 4.2)19. Afin de surmonter une partie des plus importantes faiblesses de la filière, l'accent a été déplacé, au début des années 90, vers l'amélioration de la gestion et de la qualité du café. La fixation d'un prix minimum garanti pour les producteurs devait stimuler la production, et l'introduction d'un système d'enchères et encourager des pratiques de vente efficaces et transparentes. Même si la restructuration et la réorganisation de la filière ont été jugées décisives à cet égard, les projets réformes étaient inadaptés et n'ont pas permis d'améliorer la perfor- mance. Cette politique a par ailleurs échoué--la qualité a baissé de manière régulière, les prix des producteurs sont restés parmi les plus faibles au monde, et le système d'en- chères a encouragé une collusion importante en raison du peu d'enchérisseurs déten- teurs d'une licence. Le conflit dévastateur de 1993 a mis un terme aux tentatives de réformes et les arbres ont été négligés en raison de l'insécurité. De plus, dans certaines régions les agriculteurs se sont soulevés, en s'attaquant aux arbres à café, contre des élites dirigeantes à la recherche du profit. Même si les tentatives de réforme ont repris après les accords d'Arusha, la compétitivité de la filière du café burundais reste extrê- mement faible, et il reste beaucoup à faire pour qu'il contribue de manière effective à une croissance partagée. Figure 4.2. Prix annuels de l'Arabica (dollars EU/kg) 19. Tous les chiffres en dollars sont en dollars EU. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 80 80 Document de travail de la Banque Mondiale Réformes passées et en cours La réforme de 1992 a entraîné certaines restructurations et réorganisations de l'industrie. Aprèslarécolte,lescerisesdecafé20étaienttransportéesjusqu'àl'unedes136stationsdelavage gérées par les Sociétés de gestion des stations de lavages (SOGESTAL), pour être transformées en Arabica lavé. Certains agriculteurs choisissaient encore de laver leur café sur site pour pro- duire du café semi-lavé. En général, les trois quarts de la production étaient de type lavé, pour unquartdecafésemi-lavé.Aprèslavage,lecaféétaitlivréàl'unedesusinesdetraitement,dont deuxétaientexploitéesparlasociétéparastataleSODECO(Sociétédedéparchageetdecondi- tionnement), les deux autres par des sociétés privées (la SONICOFF et la SIVCA). Jusqu'en mai 2007, l'OCIBU (Office des cultures industrielles du Burundi), le parastatal qui chapeaute lesystème,vendaitlecaféauxexportateursàtraverslesventesauxenchèresinstituéesen1992. Seuls les acheteurs détenteurs d'une licence qui étaient membres de l'ABEC (Association burundaisedesexportateursdecafé)étaientautorisésàyparticiper.UnefoislivréauxSOGES- TAL, le café était la propriété de l'OCIBU. Les services de la SODECO et des SOGESTAL étaient rémunérés sur la base d'une commission fixe et les prix du café étant fixés pour toutes les saisons et toutes les régions. Les producteurs de café commençaient à livrer leur produc- tion aux stations de lavage au mois de mars et étaient payés en juillet. Quand, à de rares occa- sions, les prix étaient favorables, il arrivait qu'ils reçoivent un deuxième paiement. Même si la crise politique de 1993 et l'effondrement économique qui en a résulté ont mis un terme à ce programme, il est important de souligner ses principales faiblesses et son incapacité à encourager la nécessaire amélioration des performances. La vente aux enchères n'a pas permis d'améliorer la transparence, ni d'augmenter les prix à l'exportation. Comme le système d'octroi des licences n'acceptait que les acteurs présentant un risque de contrepartie raisonnable, le nombre d'enchéris- seurs était tellement limité que la collusion est devenue inévitable. Par ailleurs, les enchérisseurs agréés appartenant souvent aux élites dirigeantes, il est difficile de dire si la gestion du risque était bien l'unique facteur d'octroi des licences. En outre, le système canalisait la production vers les seuls marchés des produits de consom- mation courante, au moment où émergeait un marché du café de spécialité où les prix étaient mieux valorisés. Lesrevenusducaféétaientpartagésenfonctiond'unerègledefixationdesprixpas- sablementinefficace.LesystèmedesRedevancesconnuesd'avance(RCA)n'offraitpas suffisamment d'incitations aux acteurs de la chaîne de valeur pour qu'ils augmentent la qualité et le volume. Lesréformesn'ontréussiniàencouragerlaconcurrence,niàdévelopperl'inves- tissement privé aux différents niveaux de la chaîne. L'intervention de l'État est res- tée trop importante pour attirer les nouveaux venus du secteur privé disposant 20. La cerise est le fruit du caféier. Cueilli lorsqu'il devient rouge, il contient généralement deux grains, les « fèves », enveloppés chacun dans une mince membrane (la pellicule argentée), puis d'une coque (la parche), elle-même entourée d'une fine couche d'une substance mucilagineuse. Le tout est recouvert par la pulpe et la peau de la cerise. La peau, la chair et la substance mucilagineuse sont enlevées pendant le processus de dépulpage. Le café dépulpé toujours enveloppé du parche est appelé « café parche ». Celui-ci est libéré de la parche et de la pellicule argentée au cours du processus de déparchage pour devenir du « café vert ». Le café vert est celui qui est échangé sur le marché international, avant d'être soumis à la torréfaction. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 81 Rompre le cercle vicieux 81 d'une expertise et des moyens financiers appropriés pour augmenter de manière substantielle les performances de la filière. Tenant compte de ces carences, les réformes ont repris en 2005, avec la publication d'une série d'ordonnances adoptées dès le 14 janvier 2005 pour libéraliser la fixation des prix et les activités de commercialisation sur l'ensemble de la chaîne, et supprimer les taxes sur les vergers. L'étape suivante a vu la suppression de la garantie de l'État pour le financement du sous-secteur, et la création le 30 mars 2006, d'une Commission pour la réforme du café chargée de piloter les préparatifs de la privatisation. Des tentatives ont été faites pour amé- liorer le système de ventes aux enchères, mais la structure de commercialisation est claire- ment restée inefficace, du fait des considérables quantités de café commercialisées en dehors du circuit officiel de l'OCIBU, apparemment à travers le Rwanda. Les avis diffèrent sur la quantité de café qui part vers le Rwanda, mais les représentants de l'industrie l'estiment de 10 à 15 %. Au cours de la saison 2004­2005, pas moins d'une moitié (voire les deux tiers) de la production de café aurait été commercialisée à travers le Rwanda. Les chiffres de la production sont d'ailleurs tout à fait compatibles avec cette estimation. La récolte officielle, estimée à 150.000 sacs, n'a jamais été aussi basse depuis 1963. Même si, par rapport aux 600.000 sacs enregistrés lors de la précédente récolte, une partie du déclin peut être attri- buée à la nature cyclique du produit, et même en tenant compte d'un tel comportement (à comparer avec les minima précédents), la récolte aurait dû être d'au moins 300.000 sacs (c'est-à-dire le double du chiffre réel de la production). L'évolution actuelle souligne d'autres insuffisances. Aucune modification n'a été enre- gistrée dans la structure, l'organisation ou l'identité des propriétaires de l'industrie, si bien que les ordonnances n'ont pas réussi à mettre en place le moindre changement ni aucune des améliorations envisagées. Lors de récentes visites de torréfacteurs de café de spécialité, ceux-ci ont fait preuve d'un véritable appétit pour la conclusion de contrats de vente directe avec les producteurs de café burundais. Mais l'ordonnance autorisant les ventes directes de café n'était que théorique puisque l'OCIBU reste propriétaire de la production et que les ventes directes doivent par conséquent être autorisées par l'Etat ! Pour y remé- dier, le Président du Burundi, Pierre Nukurunziza, a annoncé dans un communiqué de presse daté du 1er mai 2007 que les producteurs étaient désormais propriétaires du café lavé et du café vert. Mais ces changements n'ont pu se concrétiser du jour au lendemain, ils exi- gent en effet un renforcement des capacités des producteurs pour qu'ils soient en mesure de commercialiser effectivement leur café, et un cadre juridique et réglementaire définis- sant les droits et devoirs de toutes les parties intéressées. Dans ce contexte assez confus, les producteurs ont été amenés à conclure un contrat de vente pour l'intégralité de la pro- duction nationale avec un courtier unique basé à New York, ce qui a fait baisser leur revenu escompté et compromis leur futur accès aux marchés de spécialité. Un autre facteur aggra- vant a été le manque de transparence dans la négociation de ce contrat, qui n'a pas été révisé par un avocat spécialisé dans le droit international. Performances actuelles et principaux défis Une autre preuve de la faible performance de la filière café burundaise est apportée par la comparaison avec les prix payés aux producteurs des autres pays d'Afrique de l'Est (voir Figure 4.3). Les six pays producteurs de la région ont certes atteint leur plus bas niveau de 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 82 82 Document de travail de la Banque Mondiale production dans les quatre années qui ont suivi la fin de l'Accord international sur le café en 1989, mais les prix de la production au Kenya, en Ouganda, en Ethiopie et en Tanzanie se sont améliorés avec le gel subi par le Brésil en 1994 qui a entraîné une augmentation des prix du café sur l'ensemble des marchés des produits de consommation courante. Confrontés à des difficultés politiques importantes, le Rwanda et le Burundi n'ont enregistré aucune variation dans les prix de leur production au cours de la période. En 1999, les prix à la production dans cessixpaysétaientànouveauenchutelibre,sansaucunsignederemontéejusqu'à2004.Entre 1994 et 2004, le Rwanda et le Burundi avaient les prix à la production les plus bas de toute la région. Cette performance est désormais l'apanage exclusif du Burundi, du fait de la réussite récente du secteur du café au Rwanda, où les prix payés aux agriculteurs ont rebondi en 2003. Figure 4.3. Comparaison des prix payés aux producteurs dans les pays d'Afrique de l'Est 250 200 livre)/ 150 E.U. 100 (cents Prix 50 0 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 Année Burundi Éthiopie Kenya Rwanda Tanzanie Ouganda Après 40 années de violence cyclique et d'instabilité politique, le Burundi doit s'enga- ger dans des changements importants de sa filière café, et développer sa capacité à partici- per à des marchés mondiaux du café en pleine évolution. A l'importance croissante des marchés de spécialité s'ajoute le fait que ceux-ci se distinguent des marchés traditionnels où le café est un produit de consommation courante, en ce sens qu'ils se définissent essentiel- lement en fonction de la qualité du produit ou d'autre caractéristiques de différentiation. Cette situation est particulièrement encourageante pour le Burundi, dont l'agro-écologie et l'infrastructure caféière bien développée peuvent soutenir la production d'« arabicas doux » très recherchés, et où il semble exister une volonté politique de créer l'environnement institutionnel nécessaire à l'exploitation de ce remarquable potentiel. Pour que le Burundi devienne un acteur important dans ce nouvel environnement de marché, il lui faudra se doter d'une vision identifiant à la fois les tendances des marchés mon- diaux et les changements nécessaires pour pouvoir entrer en compétition avec d'autres pays producteurs de café de la région ou d'autres continents, déjà en avance de 10 à 15 ans. La pre- mière étape est de projeter sur 10 années ou plus, la vision de la manière dont les producteurs, 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 83 Rompre le cercle vicieux83 letraitement,lesexportateursetlesdifférentesinstitutionsd'appuiduBurundis'organiseront pourréussiràentrerd'abordetàsemaintenirensuitesurcesmarchésmondiaux.Ladeuxième étape consiste à adopter une stratégie progressive mais bien définie de transformation de la filière café, incluant les questions prioritaires liées au transfert des avoirs de l'État. Même si l'infrastructure propriété de l'État et le cadre réglementaire restrictif régissant aujourd'hui la filière café du Burundi étaient initialement censés protéger les petits exploi- tants, leur conséquence inattendue dans l'environnement actuel, post-Accord internatio- nal sur le café (AIC), a été d'étouffer l'innovation et le progrès. Avec plus de 140 stations de lavage réparties à travers l'ensemble des régions productrices de café, le Burundi est bien placé, avec la privatisation, pour capitaliser sur ses avantages comparatifs et commencer à introduire directement une part importante de ses cafés sur les marchés de spécialité mieux valorisés. La vive curiosité pour son café exprimée par l'industrie du café de spécialité est un plus énorme pour le Burundi, comme l'a clairement démontré en 2000 la réussite du « N'Goma Mild » burundais à l'association américaine des cafés de spécialité (Specialty Coffee Association of America, SCAA), ou encore les récentes visites au Burundi, en février et avril 2007, d'acheteurs de cafés de spécialité. Le concept de café de spécialité offre les meilleures opportunités aux petits pays producteurs, et l'industrie est prête à travailler avec le Burundi comme elle l'a fait avec le Rwanda. Vision de ce que le secteur pourrait devenir dans dix ans La privatisation doit opérer le transfert de la propriété du secteur public vers le secteur privé, tout en s'assurant que cette opération améliore la compétitivité et contribue à une croissance partagée. Le conception du plan de privatisation doit : (a) identifier la structure de marché qui permettra la plus grande efficacité possible ; (b) préciser les règles de concur- rence qui s'appliqueront à l'organisation de la structure du marché et au processus de déré- gulation dont doit résulter cette structure de marché ; et (c) détailler les modalités du transfert de la propriété de l'Etat vers les investisseurs privés. Tant que le gouvernement n'aura pas conçu un plan de privatisation pour attirer des investisseurs sérieux à long terme, la privatisation ne pourra pas résoudre la question de la faiblesse de la gestion des ventes, et des risques pour les finances publiques qui en décou- lent. Etant donné que les investisseurs en question pourraient ne pas être trouvés au niveau local, il pourrait être utile de cibler au niveau régional des investisseurs qui cumulent exper- tise et solidité financière. Ceux-ci pourraient apporter avec eux les pratiques modèles du sec- teur, à condition que le gouvernement fournisse les incitants qu'il faut pour garantir que l'optimisation de la production locale et de son traitement ne souffre pas des intérêts mon- diaux des investisseurs. L'une des stratégies possibles pour aligner les incitants offerts aux investisseurs étrangers avec ceux dont disposent les principales parties prenantes nationales serait d'envisager une participation minoritaire des associations de producteurs La stratégie de croissance du gouvernement doit prévenir les conflits, et le processus de privatisation doit donc être conçu pour atténuer les risques liés à la recherche du profit. La création de forums devrait permettre au gouvernement d'entendre les préoccupations de l'ensemble des parties prenantes et de trouver des solutions par le biais de processus sus- ceptibles de recueillir l'approbation du plus grand nombre. Il est particulièrement impor- tant de s'assurer que les principes d'équité sont respectés et que les droits trop longtemps bafoués des cultivateurs de café sont entendus et pris en considération. Le renforcement des 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 84 84 Document de travail de la Banque Mondiale capacités d'examen et de négociation des organisations de producteurs de café sera une disposition clé pour atteindre cet objectif. Changements dans la commercialisation, la production et le traitement Développer une stratégie de commercialisation et une capacité de mise en oeuvre ciblées. Le Burundi doit développer une stratégie globale de commercialisation de son café incluant des outils de commercialisation tels qu'un kit destiné aux médias présentant l'histoire du Burundi. Un spécialiste du marketing devra intervenir pour entretenir les contacts néces- saires et les relations potentielles sur les marchés nord-américain, japonais, ou européen et alternatifs ; superviser l'organisation ainsi que la diffusion d'échantillons de café ; orga- niser les réunions et les présentations ; développer et gérer la participation à des salons commerciaux ainsi que les outils de marketing. Développer la capacité d'organiser des visites stratégiques du pays pour les acheteurs et tor- réfacteurs. La capacité du Burundi à accueillir des acheteurs potentiels exige des compé- tences en matière de coordination, ainsi qu'une coopération entre les stations de lavage, installations de séchage, associations ou fédérations de producteurs de café, ministère de l'Agriculture et autres organes gouvernementaux. Les acheteurs doivent avoir la possibi- lité de visiter les régions productrices du café, d'observer le fonctionnement des stations de lavage, de rencontrer les cultivateurs et les propriétaires et directeurs de stations de lavage, d'observer tous les aspects du séchage et de procéder à des dégustations d'une sélection de cafés de premier choix. Pour assumer ce rôle, le Burundi pourrait envisager une approche d'équipe au niveau des fédérations, en s'appuyant sur des représentants des diverses régions productrices pour qu'ils organisent et accueillent des visites d'acheteurs potentiels. Cette activité consisterait à préparer des brochures, des cartes et des fiches de renseignements, ainsi qu'un itinéraire détaillé à distribuer aux acheteurs à leur arrivée. Il est aussi essentiel de planifier et organiser les présentations prévues dans les stations de lavage et lors d'autres réceptions, en s'assurant que les représentants clés de la filière et du gouvernement sont présents. Les représentants de la filière café et des médias doivent aussi être invités à ce type de rencontres. Pendant la préparation de la présente évaluation, deux visites d'acheteurs ont été organisées cette année au Burundi, elles donneront aussi lieu à un suivi. Le gouvernement prépare actuellement une déclaration pour une rencontre importante qui doit se tenir à Portland, dans l'état de l'Oregon aux Etats-Unis, avec un large public d'acheteurs de cafés de spécialité. Cette déclaration devrait permettre de mieux sensibiliser ces acheteurs à l'his- toire du Burundi, de les assurer de la détermination du gouvernement à mieux comprendre les inquiétudes qui les font hésiter à acheter leur café au Burundi, et de présenter aux médias un plan d'action pour s'attaquer à ces préoccupations. Ce plan d'action doit réaffirmer l'objectif d'une libéralisation des ventes directes à tous les niveaux de la chaîne de com- mercialisation du café, ainsi que l'engagement du Burundi à faire progresser le processus actuel de privatisation. La mise en oeuvre de ce processus permet déjà de tirer de précieuses leçons à partager avec d'autres secteurs comme l'industrie du thé. Promouvoir la qualité du café burundais à travers des formations à la dégustation. Il est essentiel d'améliorer les capacités de contrôle de la qualité en développant des compétences 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 85 Rompre le cercle vicieux 85 de dégustation aux niveaux national, régional, et des stations de lavage. Logiquement, la première étape consiste à réagir aux observations formulées par les dégustateurs du Coffee Corps, qui ont récemment tenu des sessions de formation à la dégustation. L'East Africa Fine Coffee Association travaille de concert avec les torréfacteurs afin de mobiliser des for- mateurs bénévoles pour le programme Coffee Corps et est une intéressante ressource à exploiter en termes d'organisation. Amélioration et création des laboratoires de dégustation. Le laboratoire national de dégustation (actuellement hébergé par l'OCIBU) doit être amélioré pour atteindre un niveau de pointe. Des plans doivent également être envisagés pour trouver une place stra- tégique à des laboratoires de dégustation dans les régions productrices du Burundi, au niveau soit des fédérations de producteurs de café, soit des SOGESTAL. La privatisation et les incitants offerts aux cultivateurs pour améliorer la qualité devraient augmenter les besoins en laboratoires de dégustation pour évaluer les qualités du café. A terme, il est envi- sageable que chaque station de lavage dispose d'un laboratoire de dégustation. Les oppor- tunités de ventes directes de café de spécialité de qualité supérieure exigent ce niveau de compétence, et les stations de lavage bien gérées réaliseront rapidement le bénéfice qu'elles peuvent en tirer. En rendant disponibles ces laboratoires de dégustation à un niveau centralisé (national ou régional), le Burundi sera en mesure d'améliorer le contrôle de qualité pour des volumes plus importants de café de qualité, et d'arriver à une reconnaissance internationale de la qua- lité de son café. Initiative pilote de relations directes. Dans le cadre d'un modèle de relations directes, le Burundi pourrait mettre en oeuvre un projet pilote impliquant une station de lavage et une installationdeséchage.Cetteinitiativedémarreraitparunevisited'ungroupedetorréfacteurs et d'importateurs de café de spécialité. Les avantages d'un tel programme de test sont multiples. En premier lieu, il permet d'en- gager la nécessaire diversification de la commercialisation des exportations pour y inclure des marchés de premier plan actuellement absents du petit éventail des acheteurs de café burun- dais. En deuxième lieu, le fait de comprendre comment les primes à la qualité sont payées aux cultivateurs dans le cadre de relations commerciales directes rendra d'autant plus réelle la notion que la « qualité paie ». Enfin, l'étude du projet pilote aidera le Burundi à préciser son très important plan de privatisation des infrastructures du café. Étant donné l'histoire du secteur du café, le choix de ce pilote devra être effectué de manière prudente, s'appuyer sur des critères objectifs et éviter de bénéficier à la classe diri- geante ou de promouvoir celle-ci. Attention accordée à la production et au traitement du café. Le Burundi est plus avancé dans la production et le traitement qu'il ne l'est dans la commercialisation, mais il reste encore de nombreux domaines qui exigent une attention particulière pour que la qualité du café soit suffisamment améliorée pour attirer un éventail large et durable d'acheteurs et/ou torréfacteurs de café de spécialité. Du point de vue de la production par exemple, il est important d'utiliser des techniques de culture appropriées pendant le cycle végétatif, en particulier pour le paillage et l'utilisation d'engrais et de pesticides. Du point de vue du traitement, une attention supplémentaire doit être accordée à l'évolution des processus de fermentation. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 86 86 Document de travail de la Banque Mondiale Réformes politiques et voie à suivre La manière dont la filière café sera libéralisée et privatisée aura un impact décisif sur la capacité du pays à accéder aux marchés de spécialité de qualité supérieure et doit donc faire l'objet d'un examen prudent. La libéralisation et la privatisation de la filière café au Burundi devrait réduire de manière significative les quantités de café vendues aux enchères, au profit du développement de liens de marché directs avec les acheteurs. Les installations de séchage agréées devraient pouvoir traiter librement le café parche lavé de n'importe quel producteur. Les propriétaires et direc- teurs des stations de lavage et leurs organes de coordination devraient être en mesure de déterminer la qualité des lots de café qu'ils veulent sélectionner pour la commercialisation et l'exportation. Pour commercialiser leur café, les vendeurs burundais doivent comprendre comment identifier, présenter et promouvoir la qualité de leur café, et récompenser les cultivateurs qui le produisent. Des licences devraient être octroyées aux producteurs et exploitants d'installations de séchage et des échantillons de café doivent être entreposés, dégustés et expédiés aux acheteurs potentiels. Le développement du marché, la formation à la dégus- tation de la tasse et l'introduction de technologies de l'information et autres améliora- tions de type commercial sont eux aussi essentiels. L'industrie peut elle-même prendre en charge plusieurs de ces activités par le biais des fédérations de producteurs de café. Les autres activités nécessiteront une coordination publique, notamment dans les domaines de la réglementation et des politiques de l'industrie. L'ensemble de ces responsabilités exige qu'une attention particulière soit accordée à la tenue de débats autour de la réforme de la filière du café. Filière du thé21 Bref aperçu Le thé a été introduit au Burundi en 1931 à la station de recherche de Gisizi. Il a pris de l'envergure quand l'institut de recherche agricole ISABU (Institut des Sciences agrono- miques du Burundi) a créé les premières plantations de thé à Teza en 1963 et à Rwegura en 1966. Les petits exploitants ont commencé à en produire dans les années 70 et 80, à la suite de plusieurs projets financés par des bailleurs de fonds. La Banque d'investissement européenne, la branche d'investissement de l'Union européenne, a financé quatre usines de thé, tandis qu'une cinquième était financée par la Caisse centrale de coopération économique (CCEE), l'agence d'aide française qui a précédé l'Agence française de développement (AFD). La production du thé s'est intensifiée de façon constante et a dépassé 6.000 tonnes au début des années 90. Elle a cependant connu une baisse au cours des deux années qui ont suivi la guerre civile, passant de 7.000 tonnes à 4.200 tonnes. Cette baisse de production est attribuée à 50 % à l'usine de Teza. Après le café, le thé est aujourd'hui la deuxième culture de rente du Burundi avec des recettes à l'exportation d'environ 10 millions de dollars EU, soit 12 % des exportations 21. Cette section a été rédigée par Eric Kacou (OTF) et James Foster (OTF). 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 87 Rompre le cercle vicieux 87 totales du pays. Entre 2001 et 2006, la production annuelle de thé du Burundi a atteint une moyenne de 7,500 tonnes, dont environ 30 % étaient produites par quatre grandes plan- tations et le reste par plus de 50.000 petits exploitants. Ces derniers occupent 75 % des sur- faces réservées à la théiculture mais leur rendement n'atteint que 71 % de la production totale du secteur. Le rendement moyen par hectare des petits producteurs est de 4,0 tonnes de feuilles vertes tandis que celui des grands domaines est de 4,8 tonnes.22 En 2006, un théi- culteur burundais type produisait 400 kg de thé sec sur une surface de 0,1 ha, et avait gagné 46,00 dollars US. Comme le thé est cultivé à haute altitude, souvent dans des régions montagneuses aux pentes abruptes, il est rarement en compétition avec les cultures vivrières ou les autres cul- tures de rente. Il y a au Burundi, cinq régions théicoles dotées chacune d'une usine--Teza, Rwegura, Tora, Ijenda et Buhoro. L'usine de thé d'Ijenda est la seule à n'être approvision- née que par des petites exploitations, les quatre autres usines sont approvisionnées en feuilles vertes à la fois de grandes plantations et des petites exploitations. Le chef d'orchestre de l'in- dustrie du thé est l'Office du thé du Burundi (OTB), un organisme parastatal qui possède et gère les cinq usines, s'occupe de la production des grandes plantations, du marketing et de la commercialisation ainsi que de la réglementation de l'industrie. L'Union Européenne est en train de promouvoir l'aménagement d'une sixième zone théicole dans la province de Mwaro. Le projet « Promotion de la théiculture en province de Mwaro » (PROTHEM) a démarré en 2002 avec un budget d'environ un million d'euros. Il occupe 845 hectares et concerne quelque 6.540 théiculteurs sur des superficies moyennes de 0,13 hectare par exploitation. Une société privée construit actuellement à Gisozi une usine de transformation qui devrait être opérationnelle en septembre 2007. Elle est supposée pro- duire 1.000 tonnes de thé sec la première année et 2.000 tonnes la quatrième année, après une extension. Les théiculteurs vendent la feuille verte aux usines voisines au prix fixé par l'OTB. Celui-ci est le même pour tous les planteurs dans les cinq zones théicoles. Malgré les fluc- tuations considérables du prix de vente de son thé, l'OTB change rarement le prix d'achat des feuilles vertes. Pendant la période 1993­1999 par exemple, celui-ci n'a changé que deux fois. Pendant les trois dernières années, les petits exploitants ont perçu approximativement un tiers du prix atteint par le thé burundais à la vente aux enchères de Mombassa. Presque tout le thé burundais (95 %) est exporté, 70 % à travers le marché de Mombassa et le reste par vente directe, une pratique adoptée par la plupart des pays africains producteurs de thé. La production annuelle d'environ 7.500 tonnes du Burundi est minime comparée à la pro- duction mondiale et à la production africaine, en moyenne de 3,01 et de 0,46 millions de tonnes respectivement. Malgré les conditions changeantes du le marché mondial, la chute des prix en parti- culier, la demande de qualités différentiées et la concurrence des boissons industrielles (en particulier les boissons non alcoolisées), la structure de l'industrie du thé au Burundi n'a 22. Il faut noter que ces rendements ne sont pas vraiment comparables car les zones en question peu- vent inclure des surfaces allouées en principe à la culture du thé mais qui peuvent avoir été abandonnées. Selon un rapport de la Banque mondiale (1993, p. 20), les plantations ont un rendement supérieur à celui des petites exploitations parce qu'elles cultivent les terres les plus fertiles des zones théicoles. Une raison peut-être plus vraisemblable est que les usines payant moins pour les feuilles vertes provenant de leurs propres exploitations, arrêtent ou prolongent les intervalles entre les cueillettes sur les petites exploitations tout en continuant la cueillette sur les leurs. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 88 88 Document de travail de la Banque Mondiale pratiquement pas changé depuis ses débuts. Le secteur est confronté à de nombreuses contraintes qui incluent les déficiences structurelles des usines et des plantations, les faibles incitations à la production destinées aux petits exploitants et aux travailleurs des planta- tions, l'utilisation restreinte des intrants et des services de vulgarisation, et l'absence de pro- grammes de recherches. Ces contraintes ont provoqué une baisse considérable dans la qualité du thé et par conséquent dans le prix de vente sur le marché aux enchères de Mom- bassa. Si aucune action n'est prise pour y remédier, le secteur théicole aura à faire face à de plus grandes difficultés qui pourraient causer son effondrement. Réformes passées et en cours Avant 1981, chaque usine de thé était autonome dans la mesure où elle achetait, transformait et vendait son propre thé. Chaque usine jouissait ainsi d'une autonomie considérable. En 1980/81, l'usine de Tora a connu de sérieux problèmes financiers. Dans le but de la sauver, le gouvernement a décidé de centraliser la gestion de toutes les usines. Cela a permis d'utiliser aux usines performantes de couvrir les pertes d'une usine non rentable. Depuis lors, les usines ont perdu leur autonomie. L'OTB contrôle toutes les finances et exige que toutes les déci- sions de gestion passent par le bureau central, ce qui a conduit à une déresponsabilisation des cadres et les a démotivé à améliorer leurs usines. Des réformes stratégiques, incluant la privatisation du secteur agricole du Burundi, ont été envisagées dès 1988 à la suite de l'évolution notable du rôle du gouvernement, de pro- ducteur et vendeur à celui de régulateur. Au début, les progrès ont cependant été très lents à cause de la vision étriquée du gouvernement pour qui les réformes ne devaient pas aller au delà d'une restructuration de la gestion des entreprises parastatales. Des réformes plus profondes, comme la privatisation des entreprises parastatales, devaient être entreprises quatre ans plus tard dans le cadre d'un crédit de 4.2 millions de dollars pour la promotion de l'agro-industrie. Dans le secteur du thé, ces réformes envisa- geaient en premier lieu la suppression du monopole de fait de l'OTB afin de maximiser le retour sur les investissements existants grâce à : (a) une meilleure gestion des plantations de thé, incluant des contrats de performance ; (b) l'établissement de relations contrac- tuelles avec les petits exploitants et un appui aux associations de développement ; (c) la réduction des coûts de transformation ; (d) la gestion efficace des usines de thé ; et (e) le renforcement du marketing. Une étude a ensuite été proposée pour envisager la privatisa- tion de l'OTB dans son ensemble ou usine par usine. A cause de la guerre civile, le proces- sus de réforme a été interrompu et des 4,2 millions de dollars de financement prévus par les bailleurs de fonds, seul 0,3 million a été déboursé. Performances actuelles et principaux défis L'industrie du thé au Burundi est aujourd'hui dans une situation périlleuse. Dans toutes les usines, un certain nombre d'équipements clés sont sur le point de rendre l'âme, et la qualité du thé a dramatiquement chuté depuis le début des années 90 où les prix étaient bons. Entre 2000 et 2006, le prix moyen d'un kilo de thé burundais sur le marché aux enchères de Mombassa était de 0,20 dollar en dessous de la moyenne. De 2001 à 2006 il était vendu à 0.25 dollar en dessous du prix moyen du thé Rwandais, un pays connaissant des conditions similaires. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 89 Rompre le cercle vicieux 89 Les ressources naturelles ne suffisent pas à assurer la prospérité, il faut aussi que l'envi- ronnement fournisse une base favorable à un haut niveau de productivité. Pour envisager la prospérité dans un plus large contexte, il peut être utile, comme le suggère le prix Nobel Amartya Sen,23 de distinguer sept types de capitaux capables de « donner une meilleure idée de la capacité d'une nation à produire dans le futur ». De ces sept formes de capitaux, les trois premières représentent le capital tangible, physique--les ressources naturelles, les infra- structures et les moyens de financement. Les quatre dernières, supérieures, sont les formes sociales du capital. Bien que ces dernières soient plus difficiles à mesurer, elles ont aussi le plus grand impact sur la création de la prospérité. Les ressources naturelles sont propices à la production d'un thé de grande qualité. Elles ne sont toutefois pas utilisées de façon optimale au Burundi à cause d'une faible produc- tivité et parce que tout au long de la chaîne logistique aucune attention n'est accordée à la qualité. (Tableau 4.1.) Cette faible productivité est due au manque d'engrais et à la lon- gueur du cycle de la cueillette qui dure normalement près de dix jours mais est prolongée au Burundi pour éviter un sur-approvisionnement des usines en feuilles vertes. A Rwegura par exemple, le cycle de la cueillette atteint 18 jours, alors qu'à Buhoro elle est occasion- nellement arrêtée pour permettre la transformation du surplus de feuilles vertes. Le manque d'attention à la qualité fait que les petits producteurs et les cueilleurs de thé des plantations reçoivent les mêmes prix quelle que soit la qualité de leurs feuilles vertes, ce qui ne les incite pas à accorder à la production les soins supplémentaires qui garantiraient la qualité des feuilles. Puisque les zones boisées ne sont pas suffisamment replantées pour répondre à la demande, la majorité des usines de thé dépendront, dans les prochaines années, de four- nisseurs de bois privés coûteux. Si le taux actuel de reboisement persiste, non seulement le coût du bois va augmenter, ce qui détériorera encore plus la rentabilité des usines, mais l'industrie du thé du Burundi deviendra un facteur important de déboisement avec toutes les conséquences négatives que cela impliquera pour la nation. Il faut absolument éviter d'en arriver là. L'infrastructure s'est détériorée au point qu'elle pourrait s'effondrer à tout moment. Les lignes installées dans les usines de thé du Burundi n'ont jamais été remplacées et certaines sont inutilisables et exigent d'urgence une réhabilitation. Seuls 41 % de la capacité installée sont utilisés. De même, des parties du réseau des routes rurales sont parfois impraticables, entrainant des coûts de transport local élevés, des retards considérables et une moindre qua- lité des feuilles vertes. A cause de l'état des routes, une industrie privée ne trouverait proba- blement pas rentable la cueillette de feuilles vertes produites en petites quantités dans les champs d'un petit exploitant situé loin des usines de transformation. Le transport des feuilles vertes est coûteux, irrégulier et affecte leur qualité. A l'exception de Buhoro, le transport des feuilles vertes a été privatisé en 2004 sans que l'efficacité n'en ait été améliorée. Les camions sont en général surchargés et l'excès de pression abime les feuilles vertes. Les usines interrompent souvent la cueillette pour ne pas être sur-approvisionnées en feuilles vertes. Afin de maintenir la qualité, les petits exploitants et les plantations ne font 23. Fairbanks, Michael, 2000. Changing the Mind of a Nation: Elements in a Process for Creating Prospe- rity. In Culture Matters: How Values Shape Human Progress (Lawrence Harrison et Samuel Huntington, eds.). New York: Basic Books. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 90 90 Document de travail de la Banque Mondiale Tableau 4.1. Production de thé sec au Burundi (en tonnes) Année Teza Rwegura Tora Ijenda Buhoro Total 1991 1.407 1.608 1.043 1.265 139 5.462 1992 1.392 1.995 1.063 1.451 48 5.949 1993 1.416 1.959 829 1.096 223 5.523 1994 1.647 2.313 1.052 1.480 372 6.864 1995 1.716 2.033 1.192 1.673 380 6.994 1996 998 1.761 1.128 1.712 116 5.715 1997 376 1.583 949 1.138 124 4.170 1998 1.378 2.081 1.183 1.628 399 6.669 1999 1.343 1.743 1.425 1.919 434 6.864 2000 1.403 2.213 1.447 1.589 467 7.119 2001 1.634 2.790 1.652 2.190 743 9.009 2002 1.603 1.789 1.156 1.485 604 6.637 2003 1.701 2.044 1.516 1.608 507 7.376 2004 1.759 2.140 1.516 1.544 711 7.670 2005 1.934 1.811 1.711 1.764 603 7.823 2006 1.593 1.704 1.109 1.521 435 6.362 Source : Office du Thé du Burundi plus la cueillette de manière régulière et répandent leur surplus sur le sol pour en conserver l'humidité. L'électricité est un autre problème. Il n'y pas assez de groupes électrogènes en bon état et les redresseurs de courant ne sont pas utilisés pour en réduire l'usage. La situation financière de l'OTB s'aggrave et les petits exploitants n'ont qu'un accès limité au crédit. L'OTB est confronté à d'importantes dettes à long terme en devises imputables principalement aux deux usines les moins performantes, Buhoro et Ijenda. Entre 2005 et 2006, ces dettes à long terme, réparties entre Buhoro (53 %) et Ijenda (35 %), sont passées de 5,6 à 6,5 milliards de FBu, soit une augmentation de 14 %. Les banques locales ne sont pas en mesure de financer la construction d'une usine de thé et les petits exploitants n'ont pas accès au crédit étant donné qu'ils n'ont pas de statut formel et que les institutions finan- cières ne font pas preuve d'une grande coopération. Les institutions ne sont pas seulement inefficaces, il leur manque un cadre. La structure de l'OTB est hautement inefficace24, sans contrat de performance pour ses cadres, ni objec- tifs par rapport auxquels mesurer les progrès réalisés, mais avec une responsabilité limitée en cas de succès ou d'échec. Le prix fixe des feuilles vertes réduit l'incitation à produire un thé de meilleure qualité. Mais d'autres institutions sont également inefficaces. Les théi- culteurs ne sont pas organisés en associations et celles qui existent sont faibles. Seulement 29 % des petits exploitants sont membres d'associations. Celles-ci sont relativement nou- 24. Une enquête (OTF Group survey May 2007, n=84) indique que seulement 22 % des parties prenantes interrogées pensent que l'OTB est un organisme efficace. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 91 Rompre le cercle vicieux 91 velles et n'ont pas de statut légal formel, d'où des difficultés d'accès au crédit et des systèmes de gestion ou de coopération passablement faibles. De plus, le secteur privé formel n'est pas d'une grande aide, en particulier au niveau de la transformation et du marketing mais cela n'empêchera pas la libéralisation de fait de l'industrie du thé de se faire en 2007, sans organisme de réglementation. L'usine privée de Gisozi sera opérationnelle en 2007 et s'approvisionnera auprès des nouveaux théiculteurs de la région mais pourra aussi transformer des feuilles vertes provenant des zones théicoles de Teza et d'Ijenda. Cela pourrait créer des conflits si, avant cela, des accords légaux ne sont pas conclus. Il y a un manque de connaissance technique et d'intelligence du marché à tous les niveaux de l'industrie. Une production burundaise de 1.000 kg de thé par hectare correspond à moins que la moitié de la production d'une plantation ou d'une usine bien gérée. Le rap- port de transformation de la feuille verte en thé sec d'environ 5:1 est un signal clair qu'il y a de sérieux problèmes au niveau du processus de transformation. Un rapport de trans- formation normal de 4,2:1 réduirait de près de 20 % le coût de l'approvisionnement en feuille verte. Toutes les usines utilisent des méthodes inférieures aux normes et un équi- pement mal entretenu. Ainsi, par exemple, si les barreaux de grille des chaudières étaient nettoyés toutes les demi-heures plutôt que toutes les semaines, leur productivité et leur durée de vie augmenteraient. Le fait qu'un tel entretien ne se fasse pas et que les usines ne disposent d'aucun outil de nettoyage révèle un manque total de connaissance de la main- tenance des chaudières. Malgré la taille de l'effectif de vulgarisation (9 agronomes et 50 agents rien qu'à Ijenda), seules des formations limitées sont organisées tous les mois, sans aucun impact apparent sur la qualité ou la quantité de feuilles vertes produites. Aucun programme de recherche n'est financé pour identifier de meilleures variétés de thé ou des engrais et leur méthode d'utilisation. L'ISABU a publié au début des années 90 d'excellents documents de recherche sur la manière de soigner les théiers pour en maximiser la productivité et la qualité. L'OTB a malheureusement arrêté le financement de cette recherche en 2000 car il n'était pas satisfait des résultats. Depuis 2004 il n'y a eu aucune recherche dans le sec- teur du thé. La connaissance des acheteurs internationaux et de leurs exigences est également limitée, les ventes aux enchères de Mombassa étant préférées aux ventes directes. La disponibilité de la main-d'oeuvre est aussi un problème. Les plantations de Buhoro et de Tora manquent de main d'oeuvre alors qu'il y a trop d'employés au bureau central et dans les usines (122 au bureau central et 300 à Rwegura). Une usine de transformation effi- cace traitant 30.000 tonnes de feuilles vertes par an (la production totale du Burundi en 2006) devrait utiliser 100 travailleurs et les usines devraient donc avoir suffisamment de travailleurs disponibles. Les bas salaires sont sans doute à l'origine de ce manque de main d'oeuvre. Les journaliers des usines et des plantations reçoivent une paye extrêmement basse, 350 FBu dans les plantations et 400 FBu à l'entretien des routes. Les cueilleurs sont généralement mieux payés, ils reçoivent en moyenne 900 FBu par jour (30 FBu/kg avec une moyenne de 30 kg cueillis par jour). Parmi les autres causes, on peut évoquer les dangers pour les femmes et le manque de logement adéquat25. 25. John Baffes, Burundi's Tea Sector, janvier 2007. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 92 92 Document de travail de la Banque Mondiale Les principaux acteurs du secteur du thé ne tiennent pas compte de la compétitivité. Seu- lement 70 % d'entre eux pensent, par exemple, que le gouvernement devrait subvention- ner la rentabilité des usines de thé. De plus, 55 % croient que la clé de la compétitivité c'est une main-d'oeuvre et des ressources naturelles bon marché. Finalement, alors que 53 % des intervenants estiment que la privatisation est importante pour la réussite du secteur, seulement 22 % pensent que le gouvernement est en prêt à assumer la supervision de ce processus pour la filière du thé. Il y a quand même un aspect très positif : les acteurs sont prêts à coopérer et à accepter la concurrence entre eux. Pour que la réforme de l'industrie du thé et sa privatisation aboutissent, il faut absolument que ces problèmes de perception soient abordés. La migration vers un modèle durable et compétitif passe par un change- ment de mentalité. Vision de ce que le secteur pourrait être dans dix ans Les conditions préalables à une relance de l'industrie du thé du Burundi sont présentes. Les intervenants du secteur, le gouvernement et la communauté internationale s'entendent sur la nécessité d'un modèle différent. Le thé burundais doit redevenir l'un des meilleurs du monde. OTF Group estime que vers 2016, cette industrie pourrait générer des recettes de plus de 32 millions de dollars par an. Une telle métamorphose exige des investissements ciblés dans les usines et les services de vulgarisation, une gestion professionnelle, et une focalisation sur la qualité à toutes les étapes de la production ainsi qu'une stratégie de ventes directes. La figure 4.4 montre l'impact potentiel de ces actions clé sur les recettes de l'industrie du thé. Figure 4.4. Impact potentiel des actions prioritaires sur les recettes de l'industrie du thé $35 Entamer la vente de thés $4.9 Augmenter spéciaux à concurrence de 10 % de la $30 l'efficacité des usines pour que le rapport production $2.9 feuilles vertes- thé EU) sec descende de 5 à $3.0 $25 4, 2 $2.9 dollars de $20 $7.2 Production de thé sec des nouvelles usines et plantations atteint $31.9 $15 Élever la qualité du 3.000 tonnes par an (millions thé sec jusqu'à celle du prix moyen des ventes aux enchères $10 $10.6 de Mombasa Recettes Transformer toutes les feuilles vertes et $5 augmenter de 60% le rendement des feuilles vertes $0 Moyenne Élever les Améliorer Améliorer Thés de Nouvelles 2016 00-06 rendements et l'efficacité la spécialité usines la capacité des des usines qualité privées usines Sources : Estimations basées sur l'analyse d'OTF Group, mai 2007. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 93 Rompre le cercle vicieux 93 Changements dans la production et la transformation La figure 4.5 met en évidence les 12 activités clés de la relance de la compétitivité du thé burundais. Pilier stratégique 1--L'amélioration de la production de feuilles vertes demande des efforts pour augmenter à la fois la quantité et la qualité. Restructurerlesusinespourfournirdelamain-d'oeuvreauxplantationset,augmenter les salaires. Cette action assurerait une meilleure productivité dans les plantations, à Buhoro par exemple où seulement 65 % des feuilles vertes peuvent être cueillies. Entreprendre des recherches et fournir aux théiculteurs un appui financier pour une utilisation efficace des fertilisants. Une utilisation adéquate des fertilisants devrait augmenter la productivité de façon spectaculaire. Offrirauniveaulocaldesservicesdevulgarisationplusréguliersetplusefficaces.Ilfaut offrir aux petits exploitants des sessions de formation plus nombreuses et plus régu- lières sur la façon de maximiser le rendement et la qualité de leurs théiers. Les services de vulgarisation existants sont inefficaces. Assurerlecontrôledelaqualitéetchangerlesystèmedesprixpourfournirlesincita- tions appropriées. Il n'existe pour le moment aucune incitation à fournir aux usines des feuilles de thé de grande qualité, ni pour les cueilleurs sur les plantations ni pour les petits exploitants. En faisant respecter une norme minimale où les feuilles de moindre qualité seraient rejetées et celles de qualité supérieure récompensées, la qualité de la feuille verte devrait s'améliorer. Pilier stratégique 2--L'amélioration du processus de transformation des feuilles passe par la réhabilitation et une meilleure gestion des usines. Laprivatisationdelagestiondesusinesestcrucialesionveutassurerunprocessusde transformation efficace et de qualité. Si la mentalité des cadres supérieurs des usines et des plantations ne change pas radicalement, les autres recommandations ne por- teront pas de fruits. Les gestionnaires des usines doivent être des professionnels engagés avec des contrats de performance, et recevant incitants pour accroître le rendement et la qualité de la production. La réparation des équipements vétustes mais utilisables et l'achat de nouveaux équi- pements lorsque nécessaire. Les équipements des usines sont en grande partie vétustes mais pourrait être utilisables s'ils étaient mieux entretenus et réparés. L'achat de nouvelles chaudières par exemple occasionnerait une très grande dépense, alors celles qui sont déjà installés mais ne fonctionnent plus, pourraient être réparées à des coûts relativement bas et servir pendant encore un certain nombre d'années. Un programme de formation à la maintenance des machines et un entretien plus régulier devraient aller de pair avec la réparation des équipements. Changements au niveau du marketing Pilier stratégique 3--Le marketing devrait se focaliser sur la qualité, et éventuellement sur les thés de spécialité par le biais des ventes directes. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 94 94 Document de travail de la Banque Mondiale Etablir des systèmes de contrôle de la qualité pour la renforcer à touts les stades de la chaîne de valeur. La qualité dans la tasse commence sur l'arbre. L'histoire a prouvé que le Burundi est capable de produire l'un des meilleurs thés du monde, mais le contrôle de la qualité doit être restauré pour que le thé retrouve sa qualité d'autrefois. Etablir des liens commerciaux et des systèmes d'information. Le marketing du thé burundais n'implique pas seulement une solide compréhension des demandes du consommateur, mais aussi la capacité de réagir de façon dynamique à ces demandes. Il faut pour cela établir des relations avec les acheteurs et connaître leurs exigences. Développer une stratégie compétitive globale pour l'industrie du thé du Burundi. Une refonte complète des mentalités et des plans directeurs s'impose si l'industrie aspire à produire un thé de qualité et de grande valeur. Cette analyse identifie les initiatives prioritaires initiales, mais il faudra développer une stratégie globale pour concrétiser cette vision. Investissements nécessaires à la concrétisation de cette vision La privatisation du secteur du thé devrait attirer des investisseurs disposant de moyens suf- fisants pour entreprendre les changements d'équipement, de technologies et de savoir-faire dont le secteur a besoin pour libérer son potentiel. Comme mentionné plus haut, il faudra injecter des sommes considérables dans la transformation, la production et les services de vulgarisation. Ces changements radicaux pourraient décourager certains investisseurs potentiellement sérieux qui pourraient être tentés d'investir dans des pays, régions ou sec- teurs plus faciles. Dans cette perspective, il serait raisonnable que le gouvernement du Burundi consente certains investissements limités pour réhabiliter les équipements de base des usines et ouvrir d'autres chaînes de production qui permettraient la transformation d'une plus grande quantité de feuilles de thé. Des investissements substantiels seraient requis pour améliorer les infrastructures, en particulier les routes rurales et l'approvision- nement en électricité, et pour financer une évaluation du potentiel de microcentrales hydro-électriques. Il faudrait déterminer si ces investissements seront faits par l'Etat ou le secteur privé. La figure 4.5 montre comment un budget de 12,7 millions permettrait d'aider à remettre le secteur du thé sur la voie de la croissance. Réformes stratégiques et route à suivre Les réformes de l'industrie du thé au Burundi doivent inclure ses institutions, en particu- lier la restructuration de l'OTB et la privatisation des usines après leur réhabilitation. Ces réformes constituent le quatrième pilier stratégique. L'exécution de ces activités nécessi- tera une nouvelle structure institutionnelle--menée par le secteur privé, selon des règles fixées par le gouvernement et avec son appui. Pour y parvenir, il faudra tenir compte de deux aspects importants : la restructuration de l'OTB et la création d'un cadre institutionnel plus robuste. L'OTB détient actuellement le monopole de la réglementation, production, trans- formation et marketing de l'industrie du thé, une situation clairement préjudiciable à l'industrie. Il est essentiel que le mandat de l'OTB soit redéfini. Une option serait de le réorienter vers la réglementation et l'appui des petits exploitants, mais un nouvel orga- 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 95 Rompre le cercle vicieux 95 nisme de réglementation indépendant pourrait être tout aussi efficace. Ensuite, pour com- bler le vide créé par la disparition de l'OTB de la production, de la transformation et du marketing, il faudrait que le secteur privé et les petits exploitants élargissent leurs champs d'activité, améliorent leur compétence et étendent leur portée. Comme l'ont démontré les actuels investisseurs du secteur, il est possible d'attirer de nouveaux entrepreneurs dans l'in- dustrie si un appui adéquat leur est fourni, en particulier en termes de financement, d'accès au marché et de compétences. Pour ces entrepreneurs comme pour les petits exploitants, la priorité sera d'accorder à leurs associations l'appui dont elles ont grand besoin. Figure 4.5. Douze actions de relance clé pour améliorer la compétitivité de l'industrie du thé au Burundi Estimation du budget total : $12,7 millions (hors refinancement des dettes) · Renforcer le personnel des · Lancer un processus de plantations industrielles ($1,5 m) compétitivité à moyen terme · Revoir la structure des coûts pour ($0,1 m) Profit mettre en place des incitants à la · Mettre en place un système de contrôle de la qualité ($0,1 m) qualité ($1,0 m) · Fournie de l'information sur le · Effectuer des recherches sur les marché ($0,3 m) techniques et les fertilisants ($0,1m) · Effectuer les réparations urgentes marketing · Appuyer les associations de & ($0,5 m) producteurs de thé ($0,4 m) Production · Introduire une gestion privée des · Réhabiliter le réseau routier rural Transformation usines et plantations ($1,2 m) Ventes ($4,0 m) · Si nécessaire, remplacer Infrastructure · Lancer un programme pour l'équipement ($1,8 m) Physique et institutionnelle l'amélioration de l'accès à l'énergie ($1,7 m) Principes 1. Augmenter la capacité et améliorer la gestion des usines de thé clés de la 2. Restructurer l'OTB réforme 3. Privatiser l'industrie du thé avec la participation des producteurs Note : Les budgets sont estimés en millions de dollars EU. Parallèlement à la restructuration de l'OTB, il est très capital que le processus de pri- vatisation soit mis en oeuvre de manière progressive. Dans un premier temps les usines exis- tantes pourraient être transférées par le biais de contrats de gestion privés semi-autonomes. Ces contrats contribueront non seulement à accélérer le processus de réhabilitation mais aussi à préparer la vente des avoirs. Nous estimons que cette phase pourrait s'étendre sur trois ans. Cette période transitoire sera importante si on veut laisser aux petits théiculteurs le temps de s'organiser en associations plus solides et capables financièrement. Elle don- nera aussi l'occasion de démontrer l'impact qu'une gestion privée peut avoir sur la perfor- mance et renforcera l'engagement du secteur privé dans l'industrie du thé. Après cette première étape de trois ans maximum, les usines de thé pourraient être entièrement privatisées à d'acheteurs intéressants. Un faible pourcentage des actions serait réservé aux associations de petits théiculteurs et au personnel des usines. Nous sommes convaincus que les usines rénovées auront une meilleure chance d'attirer des investisseurs 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 96 96 Document de travail de la Banque Mondiale adéquats à un prix raisonnable. Finalement, la privatisation devrait aider le gouvernement à payer sa dette actuelle de 17.4 millions de dollars et à étendre l'accès à la propriété aux zones rurales. Le délai mis à privatiser devrait aussi contribuer à stabiliser tout le pays. Filière de l'horticulture26 Aperçu de la filière Au cours de la période d'après conflit, le Burundi a renouvelé ses efforts pour renforcer l'horticulture en élargissant les chaînes de valeur des fruits et légumes qui alimentent les marchés tant nationaux urbains que d'exportation (Figure 4.6). Sa longue histoire de pro- duction de fruits et légumes destinés à la consommation des ménages et aux marchés ruraux locaux constitue pour le pays une base essentielle de relance de la croissance. La pro- duction horticole des 1,4 millions de petites exploitations du Burundi est diversifiée, et tant la qualité des produits que de l'éventail cultivé sont très variables, mais les quantités sont presque toujours petites. En 2005, la production de légumes frais au Burundi était estimée à 250.000 tonnes et celle desfruitsfraisà85.000tonnes.Dansl'ensemble,lesproduitshorticoles(bananesexclues)sont le quatrième produit agricole le plus précieux du Burundi (plus de 60 millions de dollars EU en 2005), après la banane (bananes plantain et à bière), le haricot sec, et la patate douce. Figure 4.6. Exportations horticoles du Burundi, 1987­2002 3000000 (Kg) 2500000 2000000 1500000 1000000 500000 Exportations 0 Dragonnier Fruit de la Haricot Papaye Autres fruits Produits passion vert frais ethniques Produits Performance de la filière et principaux avantages et défis Tendances et indicateurs actuels. L'exportation des produits horticoles du Burundi remonte au milieu des années 80 et a connu un essor dans les années 90 pour culminer à environ 1.100 tonnes en 1993. La guerre civile qui a suivi et l'embargo régional imposé en 1996 ont rapidement inversé cette tendance, réduisant les exportations du pays à moins de 100 tonnes par an. Plus récemment, une analyse des données 2006/07 liées aux certificats phytosanitaires montre un flux petit mais régulier d'exportations, essentiellement de fleurs et plantes ornementales (dragonnier), principalement vers les Pays-Bas. On y constate éga- 26. Cette section a été rédigée par Dan Clay (MSU) et Luis Flores (MSU). 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 97 Rompre le cercle vicieux97 lement des exportations de fruits de la passion et de produits ethniques (incluant les feuilles de manioc et la banane figue pomme). Cette analyse montre également un possible déplacement dans l'intérêt porté aux pro- duits avec des exportations en croissance de fleurs coupées (principalement les roses). Les roses constituent actuellement la production végétale nationale ayant la plus grande valeur à l'exportation. Les exportations de dragonnier sont également importantes, mais celle des fruits et légumes n'a pas rebondi depuis l'embargo de 1996. Une comparaison depuis 1990 des exportations des produits horticoles du Burundi avec celles d'autres pays d'Afrique de l'Est conforte la domination du Kenya avec des volumes de l'ordre de 10.000 tonnes par an en 2004, en croissance rapide. L'Ouganda occupe la seconde place, loin derrière le Kenya, suivie par l'Éthiopie et la Tanzanie. Le Rwanda et le Burundi se retrouvent en queue de peloton, en raison en partie de leur taille plus petite mais surtout des ravages causés dans les deux pays par les conflits civils intervenus au cours de cette période. Ceux-ci ont empêché le Burundi de faire les investissements nécessaires pour tirer profit de ses avantages comparatifs et mettre sa filière horticole sur la voie de la croissance. Avantages comparatifs. Au sortir de plus d'une décennie de guerre civile, les producteurs et exportateurs de la filière horticole burundaise partagent un optimisme mesuré quant à une possible rentabilité de leurs exportations. Le pays dispose du potentiel pour devenir un acteur hautement compétitif sur ces marchés de plus en plus lucratifs. Un certain nombre de condi- tions de base majeures permettent au Burundi de réaliser cet objectif : (i) une large diversité agro-écologique qui rend possible la culture d'une vaste gamme de produits horticoles depuis les basses terres jusqu'aux montagnes ; (ii) une pluviométrie et des sources d'eau abondantes ; (ii) un réseau de routes revêtues reliant toutes les zones de production aux installations aéro- portuaires ; (iii) de courtes distances jusqu'aux points d'expédition intérieurs ; (iv) l'expé- rience des exploitants en matière de modalités de paiement flexibles de la part des acheteurs (café et thé) ; (v) un passage facile à la production biologique et au commerce équitable (grâce à la faible utilisation des intrants) ; (vi) un traitement préférentiel de l'accès aux marchés de l'UEetdesEtats-Unis;et(vii)unsoutiendanslecadredelaConventiondeLoméetdel'Africa Growth and Opportunity Act (AGOA). Cette combinaison de conditions constitue un avan- tage important pour les exportations horticoles du Burundi. Défis. La compréhension actuelle du potentiel des exportations horticoles du Burundi est différente de ce qu'elle était il y a 10 à 15 ans. Les débouchés et les systèmes d'approvi- sionnement alimentaire ont radicalement changé au cours de cette période. Les marchés sont devenus mondiaux et se sont étendus régionalement en Afrique, tout comme en Amé- rique latine et en Asie. Ils n'ont pas seulement crû en volume de manière exponentielle au cours des deux dernières décennies, ils se sont également diversifiés en termes de demande du consommateur et de sources d'approvisionnement. Le nombre des concurrents est de loin plus élevé, surtout sur les marchés développés. On peut s'attendre à ce que les marchés émergents connaissent la même évolution d'ici peu de temps. Au Moyen Orient, de redoutables concurrents tels que l'Afrique du Sud, le Maroc, l'Égypte, le Kenya et même la Thaïlande et les Philippines, géographiquement plus éloignés, sont en train d'évaluer leurs stratégies d'extension aux marchés émergents de leur marché horticole. Dans cette bataille entre différents pays pour le partage du marché horticole, les avantages procurés par la proximité et la diversité du climat sont utiles mais non suffisants 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 98 98 Document de travail de la Banque Mondiale pour consolider la pénétration du marché. Le Burundi a reculé au cours de la dernière décennie et doit maintenant évoluer rapidement pour reconquérir le terrain perdu. L'amélioration de la compétitivité du pays sur ces marchés passe par des changements à grande échelle à différents niveaux. De la production au marketing, des changements seront nécessaires dans la manière dont les horticulteurs sont organisés, dans les technolo- gies qu'ils utilisent, ainsi que dans la logistique et les systèmes de transport des produits hor- ticoles hautement périssables. Un autre changement nécessaire a trait à la manière dont sont pris en charge le marketing et l'intelligence des marchés. Ce dernier point est particulière- ment important étant donné l'évolution radicale que les marchés des fruits et légumes frais (FLF) ont connue au cours de la dernière décennie. Une concentration exclusive sur les mar- chés européens ne sert plus le meilleur intérêt du Burundi. Aujourd'hui les marchés de FLF sont plus grands et plus diversifiés que jamais, tant géographiquement qu'en termes de pro- duits. D'ici dix ans, on peut s'attendre à ce que cette évolution du marché soit même plus intense. La demande de produits tropicaux exotiques à haute valeur--fruits et légumes pré- lavés, pré-coupés, préemballés, prêts à consommer--que nous retrouvons actuellement n'en sont qu'à leur début. Ils sont en passe de devenir la tendance principale des marchés haut de gamme du monde. À la lumière de cette dynamique du marché, un des défis les plus aigus auquel est confrontée la filière horticole du Burundi est sa capacité à rompre avec la mentalité traditionnelle et à se positionner sur les marchés d'aujourd'hui et de demain. Le défi le plus significatif et immédiat qui se pose à l'exportation des produits horticoles du Burundi est celui du « dilemme de la poule et de l'oeuf » en ce qui concerne la logistique du transport aérien. Le dilemme doit être résolu avant que le Burundi puisse devenir plus qu'un acteur occasionnel et de seconde zone sur les marchés mondiaux des fruits, légumes, fleurs et plantes ornementales. Il tient au fait que, d'une part, l'espace de fret sur les vols pas- sagers est limité et que les compagnies aériennes n'en mettront pas plus à disposition parce que les volumes expédiés sont faibles, et que d'autre part, les exportateurs et fournisseurs n'augmenteront pas les volumes parce que l'espace de fret aérien est limité et présente les risques inhérents au transport des denrées périssables sur les vols passagers. Politique et environnement institutionnel La création d'un climat d'affaires favorable aux exportations horticoles constitue l'un des domaines où le gouvernement peut se montrer proactif en renforçant le potentiel de crois- sance de la filière. La mise en place d'une politique et d'un environnement réglementaire appropriés est une première étape importante, incluant des mesures visant à trouver des solu- tions au besoin de financement des investissements dans l'horticulture à tous les niveaux. Des améliorations sont également nécessaires pour les institutions d'appui à la recherche et les services de vulgarisation financés par l'État, et pour la mise en place d'un réseau de techni- ciens et gestionnaires qualifiés nécessaires au fonctionnement satisfaisant de la filière. Services commerciaux. Il faut des services de développement des affaires (dont certains ont été proposés par le STABEX) qui comprendront une formation des exploitants agri- coles à la façon d'exporter, des voyages sur le terrain à leur intention, l'organisation de ren- contres avec les acheteurs, etc. Ces services sont particulièrement nécessaires au Burundi. Il faudra en plus créer un cadre managérial et opérationnel pour les exportations--une équipe de professionnels expérimentés allant des techniciens de terrain aux managers des usines 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 99 Rompre le cercle vicieux99 de conditionnement doit être mise en place pour organiser et superviser la production et le processus d'exportation. Services de gestion sanitaire et phytosanitaire. En se projetant dans l'avenir, le gouver- nement doit s'engager à renforcer la capacité pour les besoins SPS identifiés par les acteurs de la filière. La réalisation de cet objectif nécessitera un renforcement à plusieurs niveaux, incluant : (a) une campagne de sensibilisation du public visant à susciter une « culture de la qualité et de la sécurité » chez les acteurs de l'horticulture et à comprendre les conditions imposées aux pays exportateurs qui souhaitent devenir des partenaires commerciaux pri- vilégiés ; (b) la promotion, au sein des groupes de producteurs et autres acteurs de la chaîne de valeur, des bonnes pratiques agricoles (GAP) se rapportant à la protection des plantes, et en particulier aux organismes nuisibles et aux pesticides ; et (c) l'élaboration d'un cadre réglementaire et de son système de mise en oeuvre, incluant une capacité d'analyse interne des risques, de surveillance, de diagnostic (organismes nuisibles, maladies, sols), la gestion des quarantaines et des urgences, tous les domaines qui permettront aux groupes de pro- ducteurs horticoles et aux industries agroalimentaires de réussir sur les marchés d'expor- tation hautement compétitifs d'aujourd'hui. Formation professionnelle. Le soutien aux infrastructures et aux services pour l'expor- tation nécessite un solide réservoir de mécaniciens, constructeurs de serre, menuisiers, sou- deurs, techniciens frigoristes, et tout un éventail de personnes dotées de différentes qualifications professionnelles. Ils sont les travailleurs de première ligne qui maintiendront en bon état les installations de production de semis, d'emballage, de réfrigération et autres installations destinées à l'exportation. Services de vulgarisation. Ce qui manque le plus à l'actuel système de vulgarisation de l'horticulture et autres nouveaux produits d'exportation à haute valeur c'est un mécanisme de compilation et de diffusion de l'information sur les marchés, la certification, la nouvelle production, les techniques post-récolte (exemples : l'emballage et l'étiquetage), le finance- ment et autres services commerciaux. La demande de ces services a été faible dans le passé et le service officiel de vulgarisation n'est donc pas bien préparé à les offrir aux associations et producteurs désireux de s'engager dans l'exportation. Le Burundi doit prendre des mesures pour assurer la prestation de meilleurs services, techniques et pratiques agricoles non seulement pour les cultures vivrières traditionnelles mais également pour un ensemble très différent de produits d'exportation à haute valeur. Une orientation vers l'exportation à haute valeur nécessitera indubitablement un mode de livraison réactif et efficace ainsi que de tirer des leçons des meilleurs systèmes à travers le monde. Des modèles alternatifs devront être envisagés pour toucher les groupes de producteurs et les entreprises rurales de la filière de l'horticulture et d'autres marchés à haute valeur. Services de recherche. La recherche horticole est minimale et concentrée à l'ISABU, la première institution de recherche agricole du Burundi. Ces activités de recherche ont été limitées au Burundi, principalement pour des raisons budgétaires. Les fournitures et équipements de recherche sont difficiles à obtenir et des chercheurs supplémentaires devraient être formés. Actuellement, les chercheurs de l'ISABU s'intéressent principale- ment à la sélection de bons cultivars pour des fruits et légumes ciblés. Ils participent égale- ment aux efforts de production et de distribution du matériel de propagation des végétaux. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 100 100 Document de travail de la Banque Mondiale Parmi les cultures horticoles ciblées par l'ISABU figurent le fruit de la passion, banane pomme figue, la mangue et la papaye. L'accès à un nouveau matériel végétal est une des principales priorités. Peu de choses sont proposées aux producteurs en termes de parcelles de démonstra- tion, d'écoles expérimentales et autres. Une possibilité pour dynamiser la filière de l'horti- culture est de louer certaines terres non exploitées des cinq centres de recherche de l'ISABU à des « exploitants modèles » pour qu'ils en fassent des champs de démonstration pour des cultures horticoles bien choisies. Vision du potentiel de la filière de l'horticulture à moyen terme (10 à 15 ans) D'énormes avantages sont revenus aux pays qui se sont engagés sur les marchés alimentaires et agricoles mondiaux et ont réalisé les investissements nécessaires pour y réussir. Sur le ter- rain de l'horticulture, le Maroc, l'Égypte, le Nicaragua et le Vietnam sont de bons exemples de pays qui sont récemment entrés avec succès sur le marché mondial des fruits et légumes et sont entrés en concurrence avec des pays dotés de plus de 20 ans d'expérience dans la pénétration du marché des FLF, tels que le Kenya, l'Afrique du Sud, le Chili, le Brésil, le Mexique, le Guatemala et le Pérou. Les producteurs et exportateurs burundais caressent l'espoir de devenir à moyen terme des acteurs émergents du marché. Au cours des 10 à 15 prochaines années, rendre compétitives les exportations horti- coles du Burundi requerra : (a) un investissement soutenu dans l'établissement de relations commerciales et la collecte d'informations sur les chaînes de valeur où les conditions de production du Burundi offrent la plus forte probabilité de réussite ; (b) une amélioration des points critiques des chaînes de valeur clés de la production horticole pour petit à petit répondre aux normes de plus en plus rigoureuses de qualité, de coût, de sûreté, de volume et de fiabilité de la production et de la transformation des fruits/légumes ; et (c) la création d'un environnement propice aux exportations en termes de politique gouvernementale, SPS, ainsi que d'autres systèmes réglementaires, et la mise en place de solides institutions d'appui à la recherche, la vulgarisation et le capital humain. L'expérience récente d'autres pays a prouvé que, même s'il est difficile de travailler au développement de la chaîne de valeur de l'horticulture avec de petits exploitants agricoles, des initiatives d'exportation réussies et durables peuvent être entreprises lorsque les mesures adéquates sont prises dans les domaines critiques mentionnés ci-dessus. Le Burundi a ce qu'il faut pour atteindre le même niveau de succès, à condition qu'un plan stratégique soit adopté à tous les niveaux pour le développement de la filière de l'horticulture, et que les investissements requis soient consentis pour le mettre en oeuvre. À moyen terme, le pays a le potentiel pour devenir un acteur hautement compétitif sur ces marchés de plus en plus lucratifs, et pour, finalement, arriver à concurrencer son rival, l'Ouganda, et pourquoi pas à plus long terme le géant régional qu'est le Kenya. Interventions requises pour réaliser la vision--une approche d'action Surmonter « l'engorgement de la logistique ». Pour que les exportations du Burundi arrivent à croître et à s'appuyer sur des volumes compétitifs et des économies d'échelle, il leur faut d'abord surmonter « l'engorgement de la logistique » causé par la limitation et la rigidité de l'espace de fret et les faibles volumes expédiés. Les informations récoltées au 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 101 Rompre le cercle vicieux101 Burundi auprès des agents d'expédition, des compagnies aériennes et des exportateurs per- mettent d'obtenir une projection du coût de vols charters de différentes capacités (avions facilement disponibles sur le marché de l'affrètement), et de comparer le coût par kilo- gramme affrété par rapport aux vols passagers régulièrement programmés (en supposant qu'aucune charge n'est prise au retour) (Tableaux 4.2 et 4.3). Ces chiffres indiquent que l'affrètement est de loin une solution plus rentable pour les exportateurs du Burundi que l'expédition sur des vols réguliers de passagers. En effet, l'affrètement permettrait aux exportateurs du Burundi d'accroître leur compétitivité et leur « capacité à rester sur le mar- ché ». Il leur permettrait de rester rentables même avec une baisse des prix des produits ou de réaliser des profits plus importants même si le prix de leurs produits décline ou de réa- liser des profits plus intéressants s'il reste stationnaire. Une fois que l'engorge- ment de la logistique aura Tableau 4.2. Projection de la capacité d'affrètement et été surmonté, les portes de des coûts l'exportation s'ouvriront, Avion Palettesa Tonnes Total $EU $EU/kg avec à la clé de nouvelles B747-400F/ERF 30 149,5 120.000 0,803 réductions des coûts d'expé- (pont principal) dition réalisées grâce à des DC 8 13 64,8 70.000 1,081 économies d'échelle obte- B727-200F 12 59,8 60.000 1,003 nues à travers des volumes exportés de plus en plus a. 1 palette = charge payante de 4.983 kg grands. Les investisseurs y répondront en apportant ou Tableau 4.3. Comparaison des frais d'expédition par augmentant les flux de capi- vols charters par rapport aux vols taux destinés au Burundi. La passagers réguliers ($EU/kg) stratégie la plus rapide et la Avion Charter Régulier Différence plus réaliste pour résoudre B747-400F/ERF 0,803 N/D N/D ce dilemme de la logistique (étage principale) estlamiseenoeuvreprudente DC 8 1,081 1,80­2,00 0,72­0,92 d'un programme de vols B727-200F 1,003 1,80­2,00 0,80­1,00 charters destiné à réduire le risque pour les producteurs, les exportateurs et les agents d'expédition. Cette solution poussera les producteurs horticoles directement et rapidement vers les marchés ciblés. Identification des marchés potentiels. Dans un certain nombre d'économies en déve- loppement en quête d'expansion de leurs marchés d'exportation horticole, la mentalité tra- ditionnelle était de se concentrer sur les marchés des économies développées tels que l'Amérique du Nord ou l'Europe de l'Ouest qui étaient historiquement les seuls marchés pour les exportations de FLF à haute valeur. Une telle approche offre d'importantes oppor- tunités, mais comporte en même temps des défis particuliers et, en réalité, peut être le résultat de l'ignorance des réalités des marchés mondiaux d'aujourd'hui. Le tableau 4.4 détaille les principales contraintes et opportunités des marchés des économies développées, en particulier les marchés de l'Union Européenne et ceux dits émergents/régionaux, avec une attention particulière aux éventuels débouchés pour le Burundi au Moyen Orient. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 102 102 Document de travail de la Banque Mondiale Tableau 4.4. Marchés, contraintes et opportunités pour le Burundi Marché Contraintes pour le Burundi Opportunités pour le Burundi Marchés des économies Faible tolérance pour le Énorme marché de plusieurs développées en manque de concurrence en millions de consommateurs. (particulier l'Union matière de coût, de qualité, Nombreuses populations européenne) de volume, de respect des ethniques avec une demande délais et de flexibilité plus forte de produits exo- Distance plus longue, exige des tiques. normes de qualité plus Forte demande de produits bio élevées, plus de sécurité et et respectueux de l'environ- des matériaux d'emballage. nement. Les marchés de l'UE sont plus Capacité à personnaliser la pro- stricts sur les réglementations duction de petites commandes environnementales relatives (en comparaison avec d'autres aux matériaux d'emballage. produits) de spécialités Banalisation des produits horti- Organisation du commerce de coles ordinaires, par exem- détail fortement centrée sur ple les mangues, les papayes la gestion des catégories. Cela Normes élevées de qualité dif- signifie une préférence aux ficiles à atteindre par le fournisseurs offrant plusieurs Burundi à court terme ou tous les produits d'une (exemple les réglementa- même catégorie (exemple les tions Eurep-GAP) produits tropicaux ou les Rétrécissement des fenêtres de légumes verts à feuilles) au marché pour les pays expor- lieu d'un seul produit. tateurs des mêmes produits Accès direct aux supermarchés et aux principaux grossistes Marchés émergents/ Marchés orientés vers les coûts Les distances relativement cour- régionaux Les voies de desserte des tes dans le pays favorisent le (pays environnants) grands axes du Burundi ne transport des produits périss- sont pas suffisantes pour ables. rassembler/contrôler les pro- Plus grande tolérance vis-à-vis duits à travers les différentes de la qualité, des volumes, du zones de production. respect des délais et de la flex- Le transport par camion est ibilité également limité, en partic- L'apparition de supermarchés ulier les conteneurs frigori- dans plusieurs pays voisins fiques nécessaires pour tels que le Kenya représente atteindre les marchés assez une opportunité naissante importants situés à 2­10 pour conclure des contrats de jours de route, tels que fourniture à long terme. Kigali, Mombassa, Kampala, Début de critères de gestion des Nairobi, etc. catégories Les produits peuvent concur- rencer la production locale si aucune différenciation en matière de qualité n'est réalisée (continued) 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 103 Rompre le cercle vicieux 103 Tableau 4.4. Marchés, contraintes et opportunités pour le Burundi (Continued ) Marché Contraintes pour le Burundi Opportunités pour le Burundi Marchés émergents, De plus en plus exigeants en Fort potentiel pour des pro- pays du Moyen- matière de coût grammes de fourniture gérée Orient orientés vers Les catalogues de vente doivent par catégories avec les super- le libre commerce inclure plusieurs produits marchés et le secteur du (Bahreïn, Koweït, d'une catégorie au lieu d'un tourisme d'accueil. Oman, Qatar et ou deux produits. Temps de vol plus court que vers Émirats arabes unis) Manque de services de trans- les marchés de l'UE port direct Aucune restriction de quantité Difficulté de négociation des sur les barrières tarifaires ou prix non tarifaires sauf pour les huiles végétales. Exigence d'une qualité élevée Ces pays importent 90 % de leurs Les acheteurs peuvent ne pas besoins alimentaires être fiables, ce qui nécessite une supervision étroite et Une seule plaque tournante de une gestion intensive des redistribution (Dubaï) vers les comptes autres nations du Moyen Orient Difficulté à trouver des grossistes solides Plus de tolérance pour la qual- ité, la sécurité alimentaire et Les pays voisins tels que le les normes d'emballage. Kenya ont déjà commencé à développer ces marchés avec Les paiements sont effectués à des produits de climat tem- l'arrivée et à l'acceptation des pérés et tropicaux. Avec le livraisons concours de l'USAID, Forte demande pour les produits l'Afghanistan a démarré un tropicaux et semi-tropicaux. programme agressif d'expor- Prix plus élevés que sur les tation de légumes de spécial- marchés européens ité et de légumes verts à feuilles L'étude de ce tableau permet « d'enlever les oeillères » et d'avoir une idée d'une plus large palette de débouchés pour les exportations de FLF du Burundi. La dernière vague de mondialisation des produits horticoles était caractérisée par la banalisation des anciens produits de niche. Une fois devenus des produits de consomma- tion courante, leur taux de croissance a eu tendance à se stabiliser ou à baisser au profit d'autres produits de niche tels que les fruits et légumes tropicaux exotiques. Toutefois, il serait difficile d'élaborer une ambitieuse stratégie d'exportation horticole en s'appuyant exclusivement sur les produits de niche parce que seul un petit nombre de producteurs est capable de fournir les volumes nécessaires. Dans un futur proche, il faudra combiner les marchés de niche de volume moyen avec une sélection prudente de produits de niche dont les volumes sont capables d'augmenter rapidement. Si on considère par exemple la caté- gorie des fruits de spécialité, la banane figue pomme ou la mangue cueillie à maturité pour- raient se démarquer dans les rayons des supermarchés en tant que nouveaux produits, par rapport aux bananes traditionnelles et à la mangue traitée à l'eau chaude. En même temps, on pourrait promouvoir d'autres fruits produits en faibles volumes comme la chérimole ou la groseille du Cap en attendant que leurs volumes augmentent et que plus d'exploi- 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 104 104 Document de travail de la Banque Mondiale tants agricoles s'y impliquent. Le tableau 4.5 résume les avantages et les inconvénients du ciblage des produits ordinaires par rapport aux produits de niche dans le cadre de la stra- tégie d'expansion de l'horticulture au Burundi. Identification des initiateurs de marché potentiels. Un certain nombre de produits peu- vent être identifiés en tant qu'initiateurs de marché potentiels, ou produits à succès probables pour le Burundi. Ils sont identifiés sur la base : (a) du volume potentiel de chaque produit ; (b) du degré d'expérience déjà acquis dans la production par les producteurs burundais ; (c) de la faisabilité d'un transport aérien des produits vers le marché avec des seuils de ren- tabilité acceptables ; et (d) de la disponibilité immédiate des cultures ciblées grâce à un cycle de production court ou à un volume de départ déjà disponible dans les exploitations. Parmi les produits de « démarrage » prometteurs figurent : Les légumes de spécialité des microclimats tempérés tels que les petits pois à écosser, les mini légumes (mini brocolis, baby aubergines et aubergines chinoises, carottes, choux-fleurs, féviers sunburst, mini-courge zucchini, etc.), les légumes verts à feuilles, et certaines racines et tubercules; et Lesfruitsdespécialitételsquelabananefiguepommedestinéeàl'exportationvers l'Europe et le Moyen Orient (Dubaï) ; le fruit de la passion vers l'Ouganda et ailleurs dans la région et en Europe ; la chérimole pour la création d'un créneau sur les marchés d'Europe et du Moyen-Orient. Tableau 4.5 Avantages et inconvénients des marchés ordinaires et des marchés de niche Marché Contraintes Opportunités Principaux marchés Grands volumes de produits exigés ; Acheminement rapide d'impor- ordinaires Exige plus de qualité, de sécurité tants volumes pour pouvoir alimentaire et de connaissance atteindre une certaine dimen- dans l'emballage ; sion, réaliser des économies d'échelle et des coûts plus bas Prix plus faibles ; Nécessite de vastes installations d'emballage très efficaces ; Requiert des infrastructures de grande capacité pour l'expédi- tion et la logistique, telles que des grandes routes, des ports, des aéroports, l'électricité et l'eau, les communications, etc. Marchés de niche Habituellement des marchés de Forte demande de produits exo- transition avec de faibles tiques, bio, respectueux de volumes ; l'environnement, de com- Des exigences spéciales de produc- merce équitable ; tion, de traitement post-récolte, Prix plus élevés d'expédition et de distribution exigeant des niveaux plus élevés de technicité tout au long de la chaîne logistique 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 105 Rompre le cercle vicieux105 Plan d'action. Un plan d'action conçu pour propulser les chaînes de valeur horticole au Burundi comprendra un large éventail de mesures et d'investissements avec une atten- tion particulière à ce qui suit : Stratégie de développement de la filière de l'horticulture. L'important élément de cette stratégie sera l'engagement des intervenants--groupements de producteurs, exporta- teurs, agents d'expédition, représentants du gouvernement, bailleurs de fonds et insti- tutions d'appui à la recherche, à la vulgarisation et aux services commerciaux. La stratégie prévoira une évolution graduelle organisée et avec le consensus et la participa- tion de toutes les parties concernées. L'appropriation du projet par tous et à tous les niveaux sera essentielle. La stratégie identifiera également les marchés et produits spéci- fiques qui serviront de cible aux actions et investissements des intervenants. Un autre élément important de la stratégie sera l'élaboration d'une vision collective de la croissance à moyen terme. Évaluation de la compétitivité. Un second investissement à très court terme qui sera cru- cial pour l'élaboration d'une stratégie de l'horticulture au Burundi est la mise en oeuvre d'une évaluation de la compétitivité sur la base des seuils de rentabilité qu'offrent les marchés pro- metteurs. L'évaluation de la compétitivité est un des éléments d'une plateforme à partir de laquelle pourra être lancée l'industrie d'exportation du Burundi. Elle se penchera non seule- ment sur les produits à fort potentiel en tant « qu'initiateurs de marché » ou probables pro- duits à succès, mais également sur les produits frais dont la demande est en croissance rapide, tout en mettant l'accent sur les fruits et légumes de spécialité à haute valeur ainsi que sur les produits biologiques et du commerce équitable qui procurent des avantages complémen- taires au Burundi. Une fois qu'une stratégie bien pensée et la voie vers la croissance seront définies, les efforts pourront se concentrer sans tarder sur la résolution de l'actuel dilemme transports- production. Cette étape ouvrira la voie à l'exportation de plus grandes quantités de pro- duits horticoles à des coûts compétitifs, en particulier pour les produits déjà exploités au Burundi et qui ont des marchés extérieurs garantis. Mesures de production de l'horticulture. L'accélération de la production pour satisfaire la demande des marchés à fort volume, surtout après le lancement des vols charters, nécessitera un programme d'approvisionnement basé sur les exploitations des fruits, légumes, fleurs et plantes ornementales ciblés. Ce programme sera le fer de lance de l'effort de développement des exportations à travers les mesures pratiques ci-après : Apporteruneassistancetechniquepouraccroîtrelevolumedesproduitshorticoles d'exportation et améliorer leur qualité et leur sécurité ; Renforcerlescapacitésdegestionsanitaireetphytosanitaire; Renforcer les capacités de gestion des coopératives de producteurs ciblées et des entreprises exportatrices horticoles ; Créerunfondsdepetitsinvestissements(SIF)poursatisfairelesbesoinsde«capi- tal semence » des producteurs/exportateurs et réduire les risques liés à l'émergence de la filière de l'horticulture. Les mesures liées à la chaîne logistique de l'horticulture. Actuellement, le Burundi est confronté au grand défi de développer des chaînes logistiques efficaces reliant le marché à 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 106 106 Document de travail de la Banque Mondiale la base de production à travers le flux régulier des produits horticoles vers les centres de distribution régionaux et mondiaux. Les solutions pratiques spécifiques les plus immédiates qui appuieront et compléteront les mesures visant à résoudre le dilemme transport-production sont : Les infrastructures post-récolte, de logistique et de transport. Parmi les mesures clés figurent : (a) une capacité accrue de stockage au froid à l'aéroport par l'ajout d'au moins un conteneur frigorifique de 40 pieds. Cette mesure facilitera le charge- ment/service des avions fournissant une extension de l'espace de fret, en étendant de façon adéquate la capacité de stockage nécessaire pour garantir la durée de conservation des produits frais à exporter ; (b) la construction d'au moins deux ins- tallations de collecte/emballage des produits, répondant aux normes IPPC SPS. Une d'elle pourrait être située dans les montagnes pour les produits tempérés et l'autre dans les basses plaines le long du Lac Tanganyika pour les produits des zones plus chaudes. Miseàdispositiond'intrantsagricolesetdematériauxd'emballage.Parmicesmesures figurent : (a) l'utilisation du fret au retour des vols charters pour permettre au Burundi d'importer des quantités suffisantes d'intrants agricoles et de matériaux d'emballage ; (b) l'exploration des sources régionales d'intrants disponibles et com- pétitives (Kenya, Moyen-Orient) ; et (c) l'extension et l'amélioration de l'actuel effort de manutention et de distribution du matériel de propagation des végétaux pour répondre aux besoins en cultures et variétés du marché, afin d'atteindre plus d'exploitants impliqués dans la production pour l'exportation. Environnement politique et institutionnel favorable. Des mesures sont nécessaires pour créer un climat d'affaires favorable qui facilitera et catalysera les chaînes de valeur horticoles. Les mesures initiales à prendre pour améliorer l'environnement de l'exportation du Burundi comprennent : (a) le renforcement des systèmes de gestion sanitaire et phytosanitaire visant à rassurer les partenaires commerciaux quant au fait que les produits burundais sont exempt d'organismes nuisibles, de maladies, et de résidus de pesticides ; (b) la mise en oeuvre d'une politique d'ex- portation et de mesures incitatives à l'exportation (par exemple, réduction des coûts de déchargement des frets aériens, allègements fiscaux pour l'importation d'intrants liés à l'exportation) ; (c) prestation accrue de services d'appui aux affaires à travers des mécanismes tels que la Maison de l'Hortofruticulture (initiative du STABEX) ; (d) développement d'un réservoir de gestionnaires formés aux exporta- tions l'horticoles ; (e) renforcement des institutions d'appui à l'horticulture (ISABU, système de vulgarisation, etc.) ; et (f) développement des marchés du crédit et baisse du coût du financement. Programme de développement d'une chaîne de valeur basée sur les exploitations. Les mesures visant ces besoins immédiats et à très court terme peuvent être mises en oeuvre à travers un programme basé sur les exploitations, conçu pour assurer le succès des expor- tations horticoles du Burundi dans les années à venir. Il s'agit d'un programme qui doit aborder les principaux éléments de la stratégie et du plan d'action pour l'horticulture. Le plus important est qu'il soit orienté vers le marché, garantisse l'accès à celui-ci aux petits et moyens exploitants agricoles, et établisse des alliances avec des sociétés du secteur privé 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 107 Rompre le cercle vicieux107 à l'intérieur et à l'extérieur du Burundi, les groupes de producteurs, les coopératives, les ONG, les agences gouvernementales et les bailleurs de fonds internationaux. Les principales composantes de ce programme incluent : (a) un cadre orienté vers le marché de promotion des exportations ; (b) une présence engagée sur le terrain afin d'aider les exploitants agricoles et les exportateurs ; (c) une large gamme de produits horticoles offerts aux marchés locaux, régionaux et extérieurs en fonction de solides évaluations des débouchés ; (d) une formation personnalisée et un renforcement des capacités en matière de pénétration des marchés et de développement de la chaîne logistique ; (e) des alliances très larges avec différents intervenants impliqués dans l'exportation des produits horticoles, y compris les grandes sociétés multinationales et les supermarchés régionaux qui sont en position de mobiliser des ressources, de l'expérience et du savoir-faire ; et (f) un fonds de petits investissements (SIF) qui permette le partage des risques avec les producteurs et les exportateurs, créant des partenariats commerciaux de facto avec le programme. 11162-04_CH04.qxd:11162-04_CH04.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 108 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 109 CHAPITRE 5 Surmonter les principaux obstacles à la croissance Daniel Benitez, Antonio Estache, Elke Kreuzwieser, Vincent Fruchart, Tania Rajadel, Guillemette Jafrin, Susana Carillo et Déo-Marcel Niyungeko A u Burundi, tous les obstacles au développement rural ne sont pas spécifiques à l'agriculture : la sécurité des biens et des personnes constitue une entrave majeure à la relance économique ; l'insuffisance des infrastructures bloque la compétiti- vité et la création d'emplois ; et le mauvais climat d'investissement freine l'intérêt que les investisseurs tant nationaux qu'étrangers pourraient avoir pour l'économie burundaise. Le présent chapitre recherche les moyens de surmonter ces trois principaux obstacles à la croissance. La sécurité des biens et des personnes est une condition essentielle pour une croissance durable--la sécurité et la justice doivent être améliorées en même temps que sont réduites les inégalités et la discrimination. Des solutions doivent être apportées de toute urgence aux problèmes du système foncier et de la sécurité qui attisent les tensions sociales, com- promettant ainsi la paix, réduisent directement les investissements productifs et affectent les incitations à améliorer la compétitivité. L'inadéquation des infrastructures constitue un problème étant donné l'énormité des besoins et la rareté des ressources. En particulier, le Burundi est un pays essentiellement agricole qui dépend largement des systèmes de transport des pays voisins. La qualité des réseaux d'infrastructures exige des efforts spécifiques d'entretien étant donné la géogra- phie et le climat du Burundi. La priorité à court terme est l'amélioration du réseau routier rural et le développement du capital physique au niveau des communautés, qui sont deve- nues particulièrement vulnérable après quatre décennies de violence. L'augmentation de la production alimentaire est une préoccupation majeure et impose de mettre l'accent sur le transport, même si la transformation n'en est qu'à ses débuts. La rationalisation de la production et de la distribution d'énergie en vue d'une meilleure utilisation des installa- tions existantes serait un appui à une croissance durable. Le développement de la produc- 109 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 110 110 Document de travail de la Banque Mondiale tion et de la distribution d'électricité permettrait d'encourager la transformation agricole et d'accroître la valeur ajoutée. La communication est capitale pour la croissance, mais actuellement, le pays ne dispose pas d'un réseau internet touchant toutes les provinces et permettant des connexions avec les autres pays de la région. Le climat d'investissement affecte les risques et le coût de l'investissement et de l'exploi- tation d'entreprise. Au-delà de la sécurité et des infrastructures, d'autres facteurs importants y contribuent, comme la législation et réglementations ainsi que leur application ; le coût et la disponibilité des facteurs de production, y compris l'accès au financement, le capital humain, et le marché du travail. Un autre élément crucial du climat d'investissement est la manière dont les institutions publiques soutiennent les entreprises privées. En suivant les pratiques existantes, le Burundi pourrait considérablement améliorer la contribution du secteur privé à la croissance. Assurer la sécurité des biens et des personnes27 Le conflit est un phénomène social naturel que connaissent toutes les sociétés. Il peut être défini comme un processus social et politique dynamique impliquant deux ou plusieurs groupes qui ont des intérêts divergents et poursuivent des objectifs incompatibles. Les sys- tèmes politiques sont établis pour affronter et arbitrer les conflits, mais lorsque le système politique ne réussit pas à trouver les compromis nécessaires, les acteurs sont tentés d'avoir recours à la violence pour essayer d'obtenir les résultats qu'ils souhaitent. Les conflits vio- lents sont le résultat d'un échec de la gouvernance. Conflit et gouvernance En absence d'institutions et de processus capables de régler pacifiquement les conflits, les élites politiques du Burundi ont utilisé la polarisation ethnique, la méfiance et la peur pour servir leurs propres intérêts politiques et économiques. La pauvreté généralisée, les inéga- lités entre les groupes sociaux, et la compétition pour les terres dans un petit pays en forte croissance démographique étaient les sources principales de tension. Au cours des 45 der- nières années, les conflits qui en ont résulté avaient essentiellement pour objectif de contrô- ler l'État en tant que principal moyen de parvenir au pouvoir et à la richesse. Les principaux facteurs qui présentent toujours un risque majeur au Burundi sont : Lamauvaisegouvernance,leclientélismeetunecorruptionenvahissante; Lapauvretégénéraliséeetlapressiondémographiquesurlesraresterresproductives; L'exploitation politique les profondes divisions inter et intra ethniques existant entre et au sein des clans, régions et élites politiques et économiques ; Lecapitalhumain,physiqueetsocialaffaibliparunconflitincessant; Une population croissante de personnes vulnérables et de jeunes privés du droit de vote ; 27. Cette section a été rédigée par Vincent L. Fruchart (Spécialiste Conflits, DVS) et Tania Rajadel (Economiste, AFTS3). 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 111 Rompre le cercle vicieux111 Unpassédeviolenceetd'impunité;et Les séquelles des conflits dans la région des Grands Lacs que sont les réfugiés, la migration, le commerce des armes, le manque de ressources et les bases de rebelles. Pour atténuer ces facteurs de conflit, et particulièrement leurs effets négatifs sur le déve- loppement rural et la croissance, le Burundi doit améliorer sa gouvernance, et en particu- lier trouver des solutions aux problèmes de sécurité, de justice, de stabilité politique, d'inégalité et de régime foncier. Sécurité Dans le cas du développement rural, la sécurité est particulièrement nécessaire pour pro- téger les cultures, prévenir ou réagir aux conflits violents déclenchés par les litiges fonciers locaux, entretenir les systèmes de communication et de transport, et assurer la sécurité de toutes les transactions économiques connexes. L'insécurité se paie à un prix élevé, entre le coût direct de la criminalité et de la vio- lence (dépenses de santé, perte de productivité, dépenses publiques pour la sécurité) et le coût socioéconomique indirect (affaiblissement du capital humain et social, diminution de la main-d'oeuvre, réduction des salaires et revenus) qui produisent des effets multipli- cateurs négatifs sur la croissance et la réduction de la pauvreté. Au Burundi, « tout ce que la population implorait les politiciens de lui assurer c'était la paix, la condition minimale qui leur aurait permis de travailler » (Nkurunziza et Ngaruko, 2002). La sécurité s'est améliorée au Burundi depuis la fin de la guerre civile, et une meilleure intégration ethnique des forces de défense et de police a certainement aidé à renforcer la confiance de la population dans ces groupes. Toutefois, la criminalité violente sévit tou- jours et la police continue à jouer un faible rôle dans la protection publique. En outre, les péages non officiels installés sur les routes par une police et des forces de sécurité corrom- pues font partie du quotidien de quiconque voyage ou transporte des biens. Par ailleurs, en dépit de quelques efforts, la très large circulation des armes de petit calibre reste un risque majeur pour la sécurité. Une mobilisation massive étant toujours possible, la facilité d'accès aux armes continue à représenter une menace permanente pour la paix, de même que l'accroissement des actes de banditisme et de violence criminelle. L'amélioration de la sécurité dans les zones rurales, capitale pour leur développement économique, passera par une réforme du secteur de la sécurité plus profonde que les amé- liorations qu'on peut déjà observer. Les questions de sécurité étaient au coeur de l'Accord de paix et de réconciliation d'Arusha pour le Burundi (2000). Elles incluaient des éléments clés pour la réforme de la sécurité, tels que le désarmement, la démobilisation et la réinté- gration des ex-combattants ainsi que l'intégration des anciens groupes rebelles aux forces de sécurité. Les acteurs internationaux, y compris la Mission des Nations Unies pour le maintien de la paix au Burundi (ONUB) et la Banque mondiale28, ont apporté leurs concours à la mise en oeuvre de ces aspects de l'accord. Même si une stratégie complète de réforme doit encore être élaborée pour le secteur de la sécurité, quand bien même la Stratégie de l'État pour la réduction de la pauvreté29 a 28. À travers le Programme multinational de démobilisation et de réintégration (MDRP) 29. Le Document stratégique de réduction de la pauvreté a été adopté en septembre 2006. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 112 112 Document de travail de la Banque Mondiale déjà identifié pour les secteurs de la sécurité et de la justice, des objectifs et des actions sus- ceptibles d'encourager le développement économique. Le premier pilier du DSRP, relatif à l'amélioration de la gouvernance et de la sécurité, comprend des objectifs liés à la pro- fessionnalisation des services de sécurité, y compris ceux assumant les fonctions liées à l'ap- plication du droit, et à la détermination de niveaux de personnel compatibles avec les besoins de sécurité et les ressources financières du pays. La prochaine étape nécessitera l'élaboration d'un plan de mise en oeuvre raisonnable et cohérent pour les objectifs proposés dans le DSRP, y compris un cadre de contrôle. Justice Au Burundi, la méfiance par rapport au système judiciaire est profonde et généralisée et la justice est considérée par la plupart des Burundais et des observateurs externes comme le département le plus corrompu du gouvernement30. Aux yeux des gens, le système judiciaire formel n'est ni impartial ni efficace. Nombre de citoyens ont perdu confiance en la capacité du système à assurer une protection ne serait-ce qu'élémentaire ; ils pensent que les tribunaux ont toujours été en faveur des intérêts des puissants. On peut identifier plusieurs facteurs majeurs responsables de la méfiance actuelle vis- à-vis du système judiciaire : impunité, corruption du personnel judiciaire, absence d'in- dépendance, complexité et longueur des procédures, et la question non résolue du statut du système judiciaire traditionnel (Bashingantahe). Au Burundi, l'impunité revêt deux aspects différents : (a) impunité pour les crimes commis au cours du conflit armé ; et (b) impunité pour les délits de corruption et autres crimes. En l'absence de principes juridiques, les parties lésées réclament souvent justice et réparation par leurs propres moyens, un phénomène rendu encore plus dangereux par le nombre d'armes de petit calibre en circulation. Le système traditionnel de justice (Bashingantahe) est plus proche des communautés locales que le droit formel, cependant, il a perdu un peu de sa légitimité à cause de sa poli- tisation au cours des dernières décennies. En raison de la pauvreté généralisée dans le pays, les pauvres ne sont plus en mesure de fournir le don traditionnel en nature (bière locale) nécessaire pour que leur cause soit entendue, et les allégations de corruption des « sages » sont plus fréquentes. Par ailleurs, les limites entre les systèmes traditionnel et moderne de justice sont devenues floues à mesure que le Bashingantahe est intervenu dans l'arbitrage des litiges supposés être traités par le système judiciaire officiel. En dépit du sentiment général d'échec de la justice au Burundi, peu de choses ont jus- qu'ici été entreprises pour redresser la situation. Le gouvernement doit encore organiser des États généraux de la justice et seules quelques mesures timides, comme la réforme en cours du Code pénal, ont été prises pour identifier et mettre en oeuvre les réformes nécessaires. Le gouvernement a pris certaines initiatives pour combattre la corruption, telles que la création d'une brigade anti-corruption et la transformation de l'Inspection des finances 30. Comme observé au cours des réunions des groupes focaux organisées en avril 2007 dans le cadre d'un diagnostic de la gouvernance réalisé par l'Institut de la Banque mondiale, et comme indiqué dans une enquête sur le phénomène de corruption au Burundi, réalisée par le GRADIS avec le concours de International Alert et DAI--mai 2007. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 113 Rompre le cercle vicieux113 en une Inspection générale de l'État. Un effort plus systémique est nécessaire parce que l'instauration de l'État de droit et la mise en place d'institutions judiciaires crédibles sont des conditions essentielles pour une paix durable au Burundi, ainsi que pour la création d'un cadre institutionnel propice au développement socioéconomique et à la croissance. Instabilité politique Le passé d'assassinats politiques, coups d'État et soulèvements du Burundi témoigne de la mauvaise qualité de sa gouvernance et de sa faiblesse institutionnelle. Depuis l'indépen- dance, l'autoritarisme, la corruption et le népotisme ont taillé les institutions et les rela- tions entre le gouvernement et les citoyens sur un arrière-fond de régions, de clans et de politiques autant que sur les lignes de faille ethnique. Même si le gouvernement actuelle- ment élu constitue sans doute un changement bienvenu, la tentation d'une reprise de l'au- toritarisme n'est jamais bien loin, comme en témoigne la crise politique de l'automne 2006 (ICG, 2006). Il existe un gouffre important entre les leaders nationaux et le peuple burundais. Des décennies de conflit et une guerre civile brutale à laquelle la population civile a payé un lourd tribut ont causé une aliénation et un cynisme profonds au sein de la population, qui considère généralement ses leaders comme égoïstes, corrompus et amorphes. Le rétablis- sement de la confiance dans les institutions publiques demandera du temps et des efforts considérables et nécessitera une volonté politique constante et cohérente. Un point nettement positif à signaler est l'émergence, au cours de la dernière décen- nie, d'une société civile plus vivante : groupes de défense des droits de l'homme, organisa- tions de jeunes et de femmes dynamiques, institutions religieuses actives, et organisations non gouvernementales populaires centrées sur la réconciliation et le développement com- munautaire. L'émergence de nouveaux media relativement indépendants est venue conso- lider cette tendance à la démocratisation (en particulier la radio, avec la Radio publique africaine qui plaide pour la réconciliation et le dialogue). Dans le cadre du développement rural, la création d'une fédération des associations des planteurs de café est également un signe très encourageant. Depuis l'introduction de la cul- ture du café au Burundi, les planteurs de café ont été durement exploités, d'abord par le sys- tème colonial et depuis l'indépendance, par les pouvoirs publics. Le mouvement, né vers la fin des années 90 de la création de groupements de planteurs de café dans les montagnes, est la première apparition d'organisations de paysans revendiquant leurs droits économiques face aux intérêts de la bureaucratie centrale et d'autres opérateurs économiques privés. Inégalité et discrimination Même après 40 années d'une violence organisée utilisant l'appartenance ethnique comme justification, la division entre Hutus et Tutsis reste l'un des nombreux clivages sociaux et économiques, dont la plupart ne répond à aucun critère ethnique. Il y a : (a) de profondes divisions au sein de chaque groupe ethnique entre modérés et extrémistes ; (b) des divi- sions entre clans ; (c) de très anciennes divisions entre les régions (domination, depuis les années 60, de la province du Bururi dont sont issus trois présidents et l'intelligentsia mili- taire) ainsi que des écarts de pauvreté (le pourcentage de ménages vivant en dessous du seuil de pauvreté dans la province de Karuzi représente trois fois celui de la province de 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 114 114 Document de travail de la Banque Mondiale Cankuzo) ; (d) des divisions entre l'élite et la population, qui n'incluent pas seulement les différences entre le monde rural et le monde urbain mais aussi celles entre instruits et non instruits ; (e) la discrimination juridique et sociétale à l'égard des femmes, notamment les lois de succession discriminatoires, les pratiques en matière de crédit, et la violence conju- gale largement répandue ; (f) des tensions dans les zones rurales entre les réfugiés et IPD revenues au pays, et leurs communautés d'accueil, sur des problèmes fonciers et de loge- ment ; et (g) la minorité Batwa a toujours été marginalisée sur le plan économique, social et politique (beaucoup sont complètement isolés, sans aucun accès aux services sociaux). Au cours des dernières décennies, ces tensions sociales et les disparités économiques entre groupes ont été gravement exacerbées par le déclin économique brutal du pays, lorsque le PIB par habitant est passé d'environ 188 dollars EU au début des années 90 à 90 dollars EU en 2005. L'accès au gouvernement est devenu le principal moyen de s'emparer du pouvoir et de la richesse. L'investissement public a essentiellement profité aux régions où les élites au pouvoir avaient de la famille (Beleli, 2001). La population a tendance à mal accepter ceux qui semblent vivre beaucoup mieux que les autres, quelle que soit leur appar- tenance ethnique, l'élite vivant à Bujumbura en particulier. De son côté, « une part de plus en plus grande de la paysannerie a progressivement réalisé que le système de cultures de rente d'exportation l'emprisonnait dans une situation qui bloquait complètement l'accès de ses enfants à toute promotion sociale et économique. De même, ces enfants ont réalisé qu'ils ne peuvent sortir d'une économie agricole dont la rémunération n'arrêtait pas de diminuer » (Ndarishikanye, 1994). Dans cet environnement social fortement chargé, le risque est élevé de voir l'aide acca- parée par l'élite et d'assister à une accentuation de la concentration déjà exceptionnelle du pouvoir économique et politique. Des signes indiquent que les zones géographiques dotées de meilleures infrastructures et d'un personnel plus expérimenté peuvent être des endroits « privilégiés » pour les services d'assistance. Régime foncier et croissance économique L'incertitude sur les droits de propriété foncière retarde la résolution des litiges liés aux terres. L'environnement juridique favorise cette incertitude. Le premier obstacle à la mise en oeuvre d'un système juridique foncier au Burundi vient de la coexistence du droit cou- tumier et de la loi. Par exemple, selon le droit coutumier, les paysans qui ont cultivé et exploité des parcelles de terre pendant un certain temps acquièrent des droits de propriété sur elles. Cela a entraîné un conflit grave à propos du statut de certaines terres appartenant à l'État, en particulier les zones marécageuses. En outre, dans certaines régions, le droit coutumier fait la différence entre la propriété des terres et celle de ce qui se trouve dessus, alors que la loi ne reconnaît pas une telle distinction. Cela a alimenté d'amères disputes à propos des plantations de café et de palmier à huile. L'accès des femmes à la propriété est une autre cause de grande préoccupation parce que, selon le droit coutumier, les terres familiales ne peuvent être transmises aux filles, même si cette disposition est entièrement contraire à la loi. Enfin, les problèmes liés à la réinstallation des réfugiés de longue date sont un autre exemple saisissant de la contradiction entre les cadres juridiques. Confor- mément aux Accords d'Arusha, les réfugiés de longue date devaient récupérer leurs droits de propriété, ou--si c'était impossible--recevoir une juste compensation. Toutefois, la loi burundaise stipule qu'une prescription de 30 ans s'applique aux réclamations foncières. La 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 115 Rompre le cercle vicieux 115 situation est encore compliquée par les réponses plutôt confuses fournies par le droit cou- tumier. Il ne reconnaît pas la prescription de 30 ans, mais reconnaît que les occupants de longue durée ont acquis certains droits sur la terre où ils vivent. Par ailleurs, l'efficacité des systèmes judiciaire et institutionnel est sérieusement affec- tée par la répartition peu claire des responsabilités et le chevauchement des fonctions. En matière de litiges fonciers, le système judiciaire s'appuie sur trois entités : (i) le Bashingan- tahe ; (ii) les autorités locales qui arbitrent les litiges en utilisant la loi comme référence ; et (iii) les tribunaux de résidence qui rendent des verdicts sur base de la loi. Le niveau insti- tutionnel est tout aussi confus dans la mesure où pas moins de quatre ministères différents sont impliqués dans les questions foncières et où le manque de définition claire des fonc- tions et prérogatives engendre une confusion inutile31. C'est pourquoi, les autorités locales ont pris l'habitude d'apporter des solutions ponctuelles aux litiges fonciers--surtout lorsque les réfugiés étaient concernés--sans consultation ni coordination préalable avec les entités gouvernementales. La pléthore d'organisations impliquées dans la réinstallation des réfugiés soulève aussi des questions de légitimité. Les Accords d'Arusha prévoyait la création de la CNRS (Com- mission nationale pour la réhabilitation des réfugiés) pour régler les problèmes liés aux réfu- giés, et sa sous-commission Terres et autres biens est plus particulièrement chargée des litiges liés à la terre. Mais les ONG, les organisations religieuses, et les institutions locales, telles que les autorités provinciales, les tribunaux locaux et le Bashingantahe, arbitraient chacune des litigesfonciersetontparfoismisenplacedesprogrammespourréglercesproblèmes.Cesnom- breuses approches autorisent souvent une interprétation souple de lois contradictoires et parce que leur statut ne leur permet pas toujours de faire appliquer les accords qu'elles ont contribué à concevoir, elles pourraient être remises en question à l'avenir. L'incertitude sur les droits fonciers et l'insécurité qu'elle engendre affectent la pro- ductivité des exploitations de deux manières. Premièrement, elles réduisent la motivation à investir dans la propriété. La littérature économique met l'accent sur l'importance de la sécurité foncière (exemple : Besley, 1995) et des droits de succession terrienne pour des investissements à long terme (Deininger et Yamano, 2006). Deuxièmement, on estime généralement que la délivrance de titres de propriété favorise l'accès aux services financiers, même si sa portée et les mécanismes par lesquels elle y parvient ne sont pas toujours bien connus (exemple : de Soto, 2000 ; Field, 2005 ; Galiani et Schargrodsky, 2005). Une atten- tion particulière devrait ainsi être accordée à la sécurité de la propriété foncière dans le Burundi d'aujourd'hui si le pays veut améliorer sa production agricole à travers le café, le thé, et l'horticulture. En outre, l'insécurité du système foncier réduit l'intérêt que les inves- tisseurs tant nationaux qu'étrangers ont pour l'économie, étant donné qu'elle induit des risques élevés et sape la fiabilité et la crédibilité des opérateurs économiques burundais. Enfin, l'élaboration de politiques de gestion foncière soutenables pour lutter contre la dégradation dramatique des terres au Burundi demandera un renforcement des droits de propriété foncière. Une gestion foncière soutenable prend du temps, elle est onéreuse, et constitue un processus de longue haleine que seuls les paysans assurés de leurs droits de propriété seront désireux d'entreprendre. 31. Le ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement, le ministère des Travaux publics et de l'Équipement, le ministère de la Solidarité nationale, des Droits de la personne humaine et du genre, et le ministère de la Justice. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 116 116 Document de travail de la Banque Mondiale En raison de la complexité des questions foncières, et parce qu'elles sont susceptibles de faire naître des tensions dans une société déjà fragile et d'ainsi menacer la paix, des solu- tions ad hoc sont mises en oeuvre au jour le jour par les communautés locales partout dans le pays. La position adoptée par la plupart des acteurs être en faveur de l'accès direct à la propriété foncière. Toutefois, une redistribution à grande échelle de la terre semble une solution à courte vue. L'attribution aux personnes de petites parcelles de terre, essentielle- ment exploitables par des cultures de subsistance, n'améliorera pas la croissance écono- mique et compromettra la cohésion sociale à moyen et long termes. Une réflexion globale sur les questions foncières est indispensable pour déterminer comment le système foncier peut le mieux contribuer au partage de la croissance. Il faudra en particulier réfléchir aux moyens d'améliorer les salaires pour réduire les tensions liées à l'accès à la propriété fon- cière, notamment par une diversification des sources de croissance autres que le secteur agricole, qui pourraient être liées au développement des centres urbains. Encourager le développement des infrastructures32 L'encouragementdelacroissancenécessitedesurmonterlescontrainteslesplusimportantes. Même si le développement économique ne peut être envisagé sans garantir la sécurité des biens et des personnes, la fourniture efficace des services d'infrastructure reste néanmoins primordiale. En effet, les infrastructures ne constituent peut-être qu'une partie du défi de développement, mais leurs effets sont parmi les plus importants. Inversement, la croissance de l'approvisionnement à travers l'amélioration des infrastructures nécessite des dépenses importantes et efficaces. Plus précisément, pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement,lesdépensesdel'Afriquedoiventatteindreaumoins9%duPIBannuelentre 2005 et 2015. Le défi est probablement plus difficile pour le Burundi, qui se situe loin der- rière la moyenne de la région. Les infrastructures sont un activateur clé d'une croissance par- tagée, notamment parce qu'elles relient les producteurs aux marchés et qu'elles exigent une main-d'oeuvre importante. Dans un pays comme le Burundi, où l'agriculture est le facteur de croissance le plus important, les infrastructures sont d'autant plus essentielles. Les transports représentent un problème majeur pour un pays enclavé comme le Burundi, principalement rural et largement dépendant du réseau de transports des pays voisins. Les prix à l'exportation sont influencés par différents facteurs, parmi lesquels la cherté du transport et une mauvaise qualité causée par les difficultés d'accès aux intrants et aux marchés. Pour les produits agricoles, les coûts de transport représentent en moyenne 35 % des prix à l'importation et 40 % des prix à l'exportation. Autre illustration du pro- blème de compétitivité lié au transport : le café et le thé, les principales sources de revenus d'exportation, doivent être transformés quelques heures après leur récolte. La géographie et le climat du pays rendent le défi du transport encore plus difficile à relever. Le terrain est escarpé et montagneux, avec une altitude de 772 à 2.670 mètres, chutant vers un plateau et quelques plaines à l'est. Des ponts sont nécessaires pour relier les villages dans les régions montagneuses. Bien que la pluviométrie soit inférieure à la moyenne de l'ASS, les routes de campagne sont difficilement praticables pendant les deux saisons de pluie, car seule une petite partie du réseau bénéficie d'un revêtement. 32. Cette section a été rédigée par Antonio Eustache (Conseiller Senior, SDNVP) et Daniel Alberto Benitez (Economiste, FEU). 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 117 Rompre le cercle vicieux 117 Au Burundi, l'énergie est une contrainte majeure à la croissance. La population subit quotidiennement des coupures de courant. Alors que le pays dispose d'abondantes res- sources en eau qui pourraient fournir jusqu'à 250 mégawatts, il dépend actuellement de groupes électrogènes alimentés au mazout qui sont largement sous-exploités, en raison du coût élevé du carburant. Jusqu'à présent, la pénurie et le manque de fiabilité de la produc- tion et de la distribution d'énergie ont freiné le développement des activités de transfor- mation qui pourraient apporter une valeur ajoutée très utile à la production agricole. Dans les situations d'après conflit, l'accroissement de l'étendue et de la fiabilité des réseaux de TIC agit également comme un outil favorisant les communications et les mesures d'atténuation. La restauration de la confiance, à travers une meilleure transpa- rence et un dialogue continu, est une condition essentielle pour réduire la fracture sociale. Elle est également primordiale pour recueillir l'assentiment et le soutien de la population aux réformes indispensables. Enfin, le développement d'un réseau de télécommunications de qualité serait capital pour l'accès aux informations commerciales, ce qui est fondamen- tal pour atteindre les marchés spécialisés et convoités du café, du thé et de l'horticulture. Les services d'infrastructure nécessitent d'importants investissements et des réformes profondes, mais la faiblesse et l'instabilité du PIB par habitant les rendent très difficile. Les erreurs coûtent cher. Au Burundi, où les contraintes budgétaires sont extrêmement fortes et où les investissements financés à l'époque par l'APD ne se sont pas avérés efficaces, il est très important de s'assurer qu'aujourd'hui le gouvernement dispose bien d'une capacité d'absorption efficace de l'aide. En effet, la création d'infrastructures au Burundi est tribu- taire d'un passé politique marqué par « une bataille autour de la question de qui bénéfi- ciera des considérables avantages des services d'infrastructure et qui devra en supporter les coûts. Les gouvernements, les consommateurs et les prestataires de services (tant publics que privés) y ont tous un intérêt ».33 Toute l'attention doit donc être apportée au respect des principes de bonne gouvernance, qui elle est une garantie essentielle pour la réalisation d'investissements productifs. Les tarifs des services doivent également être repensés avec soin, car ils constituent un moteur décisif pour un maintien soutenable des infrastructures. La conception de tarifs bien pensés dans le sens d'un équilibre entre viabilité et capacité financières constitue le prochain défi pour les décideurs politiques du Burundi. Importance des infrastructures--dépenses et perceptions Les dépenses d'infrastructure sont très différentes d'un secteur à l'autre.34 Dans le secteur agricole, qui représente la principale source de croissance, la majeure partie des dépenses budgétaires d'infrastructure va aux transports, aux télécommunications et à la poste (TT&P). Dans le secteur des services, les TT&P bénéficient de la plus grande part des dépenses d'infrastructure, même si les dépenses d'énergie, d'eau et des mines restent importantes. La structure est radicalement différente pour le secteur industriel, qui accorde la plus grande part de ses dépenses à ces dernières. 33. ADB, WB et JBIC, Connecting East Asia. A new framework for Infrastructure 2005 34. Il n'existe pas d'informations récentes sur la consommation d'infrastructures par le secteur éco- nomique. Le bureau des statistiques a publié en 1998 une matrice entrée-sortie incluant les infrastructures (Institut de Statistiques et des Etudes économiques du Burundi, ISTEEBU, 1998). Il est important de noter que les données ne distinguent que deux groupes de services d'infrastructures : l'énergie, l'eau et les mines, et les transports, les télécommunications et la poste. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 118 118 Document de travail de la Banque Mondiale Paradoxalement, une Figure 5.1. Dépenses d'infrastructure par secteur récente enquête réalisée auprès des investisseurs décrit l'élec- En pourcentage du coût des intrants intermédiaires tricité comme l'un des dix 30% Total obstacles majeurs à l'investis- sement au Burundi, alors 25% TT&P: Transports, Télécommunications et Postes TT&P que les transports figurent 20% seulement en septième place. Eau Eau L'échantillon des personnes 15% et et interrogées était limité aux Eau 10% et Total TT&P Total entreprises de transforma- Energie Energie 5% tion et l'on pouvait donc s'at- TT&P Energie tendre à cette prépondérance 0% de l'énergie. Il est également Agriculture Industrie Services important de se souvenir que le secteur de la transforma- tion est en expansion, alors que la production agricole est la pierre angulaire de l'éco- nomie burundaise. Diagnostic des infrastructures et recommandations Énergie. Le bois, la tourbe et le charbon de bois fournissent 87 % de l'énergie du Burundi, alors que le pétrole ne fournit que 11 % du total et l'électricité seulement 2 %. Ces chiffres révèlent la très mauvaise utilisation des 250 MW de capacité hydroélectrique (BEN, 2006), ainsi que le problème plus général de la déforestation, qui met en danger une croissance durable (Global Forest Resources, 2005). Le secteur de l'eau et de l'électricité est structuré en entreprise nationale. La Régie de production et de distribution d'eau et d'électricité (Regideso) est l'organisme public qui produit, transporte et distribue l'eau et l'électricité dans les zones urbaines. La Direction générale de l'Hydraulique et des Énergies rurales (DGHER) fournit l'eau et l'électricité dans les zones rurales. L'autorité de l'eau et de l'énergie (Direction générale de l'Eau et de l'Énergie), qui fait partie du ministère de l'Energie et des Mines, est la principale institu- tion qui régit les deux activités. La Regideso doit faire face à des pics de demande qui dépassent la capacité de pro- duction disponible. Par exemple, en 2005/06, la capacité réelle était d'environ 20 MW, alors que la demande culminait à 42 MW. Le portefeuille de production comprend de petites unités hydroélectriques, conçues pour une capacité d'environ 32 MW et une centrale ther- mique de 5,5 MW (Figure 5.2). Cette dernière n'a presque jamais été utilisée, en raison des prix élevés du carburant. De plus, les tarifs sont inférieurs aux coûts d'opérations et maintenance, et les pertes d'énergie sont très importantes. En effet, le nombre de jours sans électricité (137 jours par an) et les pertes sur les ventes au secteur de la fabrication (9 %) qui en résultent, sont supé- rieurs aux moyennes mondiales et à celles de l'ASS (52 jours par an avec coupure du cou- rant et 4,8 % des pertes sur ventes). Les pertes techniques sont également supérieures, même pour les normes de la région (28 % au Burundi contre 10 à 14 % dans les pays déve- loppés) (Tableau 5.3). 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 119 Rompre le cercle vicieux 119 Figure 5.2. Electricité--Capacité installée et demande de pointe (2006), production, ventes et pertes (2002­2006) Capacité installée et Production, ventes et pertes (GWh) de pointe en 2006 (MW) 45 Site 2002 2003 2004 2005 2006 40 Rwegura 67.7 48.5 43.5 49.2 49.2 35 Thermique Mugere 46.7 44.4 39.6 41.7 41.7 Ruvyironza 3.3 3.6 1.2 2.7 2.7 30 Déficit Ruzizi II* 12.3 30.9 42.3 50.9 50.9 25 Ruzizi I 28.0 26.1 30.3 20.3 20.3 20 Production isolée 8.8 7.7 6.5 5.9 5.9 15 Hydro Productio 166.9 161.1 163.3 170.7 149.9 10 Hydro Ventes 118.9 124.1 124.8 119.8 105.1 5 Losses** Pertes** 28.8% 23.0% 23.6% 29.8% 29.9% 0 Note Capacité Disponible Demande * Y compris une grande partie des importations à partir de SINELAC de pointe ** Pertes commerciales et techniques Figure 5.3. Comment les investisseurs perçoivent la qualité des infrastructures Pertes dues aux coupures d'énergie Nombre de jours de coupures en pourcentage des ventes 10% 160 8% 140 120 6% 100 Burundi 80 4% 60 Burundi Région Burundi Région 40 Monde 2% Monde 20 Région Monde 0 0% Electricité Eau Source: Enterprise Surveys--Exploring economies, SFI. L'écart entre les tarifs et les coûts a diminué au cours des quatre dernières années (Figure 5.4), suite à une tentative du gouvernement pour arriver à un recouvrement des coûts.35 Les tarifs restent néanmoins inférieurs à ceux des pays voisins, comme le Rwanda, et doivent être redéfinis pour être plus efficaces. À cet effet, des tarifs binômes pourraient être des instruments utiles. Par ailleurs, le nombre de jours nécessaires pour obtenir un rac- cordement au réseau se situe dans la moyenne mondiale, mais le manque de fiabilité et de capacité de production réduit considérablement ce résultat. En 2006, la Banque mondiale a lancé un projet pour redynamiser la viabilité finan- cière de la Regideso, en augmentant la capacité de production, en rationalisant la 35. Ces efforts ont été récemment renforcés, comme l'indique la révision complète des tarifs com- manditée par le Gouvernement du Burundi en 2005 et finalement mise en oeuvre en mai 2007 (Note expli- cative de la méthode de calcul de la nouvelle grille tarifaire d'eau et d'électricité proposée pour application en 2006. Ministère de l'Énergie et des Mines et Regideso). 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 120 120 Document de travail de la Banque Mondiale demande à travers l'encoura- Figure 5.4. Tarifs électriques gement d'une utilisation plus (dollars EU/MW) efficace de l'éclairage, et en 100 améliorant la gestion globale Coût de l'entreprise. Coût Coût 80 Malgré l'augmentation 60 f du nombre de raccordements Tarif Tari au cours des dix dernières 40 Tarif Tarif années, seulement 2 % de Coût la population bénéficie d'un 20 Surplus accès à l'électricité qui est Déficit Déficit Déficit 0 très inégalement distribuée. 2003 2004 2005 2006 Bujumbura, par exemple, -20 compte 62 % du total des -40 raccordements et sa consom- mation moyenne par habi- tant est bien supérieure à celles des autres régions. Les gros utilisateurs consomment un tiers de l'énergie produite. Le réseau à haute tension est plus développé dans la région du nord-ouest et bénéficie d'une interconnexion avec la République démocratique du Congo et le Rwanda (SINELAC). Il existe un projet d'extension de la capacité de transmission, avec une ligne à haute tension vers le sud du pays, près de la frontière avec la Tanzanie. Les réseaux à moyenne et basse ten- sion atteignent la principale zone urbaine. Si le projet de gaz méthane du Lac Kivu est fina- lement mis en oeuvre, l'interconnexion avec le Rwanda compensera le manque de capacité de la production installée. Le besoin d'améliorer l'efficacité du secteur de l'énergie au Burundi est considérable, entre autres, par une amélioration de la gestion et une réduction des raccordements illé- gaux. La réduction des pertes techniques et le renforcement du système de répartition pourraient accroître un peu plus les gains, mais impliqueraient des investissements coû- teux. À court terme, une solution pour accroître la capacité de production pourrait être de réhabiliter la centrale thermique de 5,5 MW, ainsi que les petites centrales hydrauliques. A long terme, la mise en oeuvre du projet Kabu 16 de 44 millions de dollars doit permettre de produire 20 MW supplémentaires. Des projets plus ambitieux pourraient être entrepris à travers la coopération régionale. Le renforcement de l'interconnexion avec la RDC et le Rwanda permettrait de réduire les risques de pénurie, tout en permettant une utilisation plus efficace des ressources régionales. Le Tableau 5.1 présente les résultats d'une étude récente du secteur de l'énergie au Burundi (BEN 2006). Transports. Les transports comprennent les routes, le rail, le lac et l'air, mais les routes en constituent de loin la part la plus importante. Comparé aux pays d'Afrique de l'est, le Burundi possède un réseau routier maillé, mais sur ses 11.300 kilomètres, seuls 1.209 bénéficient d'un revêtement (Tableau 5.2.). La den- sité du réseau de transports routiers est parmi les plus élevées de la sous-région, avec 294 kilomètres par millier d'habitants (Tableau 5.3.). L'entretien des routes est un véritable défi au Burundi, car 90 % du réseau n'a pas de revêtement et est donc difficilement praticable pendant les deux saisons de pluie. L'Office 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 121 Rompre le cercle vicieux 121 Tableau 5.1. Actions requises dans le secteur de l'énergie Actions urgentes Actions à court terme Actions à long terme Bois et charbon ­ Enquête sur la ­ Etude des zones ­ Recherche et promotion consommation des forestières de substituts pour le foyers ­ Améliorer l'efficacité bois et le charbon ­ Production de char- des techniques bon à partir d'or- ­ Encourager le dures ménagères reboisement Electricité ­ Remise en service de ­ Nouvelle centrale ­ Réhabilitation des cen- la centrale de thermique (10 MW) trales hydrauliques 5,5 MW ­ Analyse des sources ­ Importations d'énergie ­ Mise à jour du « Plan d'inefficacité dans de RDC (Bendera) par directeur national la consommation une ligne d'intercon- d'électrification » électrique nexion Bendera-Uvira- ­ Amélioration de ­ Lampes à faible Bujumbura l'efficacité, réduc- consommation ­ Nouveaux projets tion des pertes ­ Achat de compteurs hydroélectriques d'électricité électriques ­ Améliorer la coopéra- ­ Révision complète tion régionale (Chutes des tarifs du Rusumo, Ruzizi III, Interconnexion du bas- sin du Nil, projet de gaz méthane du Lac Kivu) Pétrole ­ Réglementation des ­ Développer la capa- ­ Recherche et explora- normes et du niveau cité de recherche sur tion pétrolières dans le de pollution les carburants en Lac Tanganyika et la général et les carbu- plaine de l'Imbo rants alternatifs ­ Utilisation et analyse de (biodiesel) la production d'éthanol ­ Production et stations de distribution d'éthanol Source: adapté de BEN (2006) Tableau 5.2. Le réseau routier au Burundi Tableau 5.3. L'accès au réseau routier Juridiction Juridiction nationale locale km par millier de Km de routes (classé) (non classé) Total Pays km2 habitants Nationales 2.418 2.418 Burundi 565 294 ­ Revêtues 1.209 1.209 Kenya 112 6 ­ Non revêtues 741 741 Ouganda 137 1460 Provinciales 2.500 2.500 Rwanda 486 366 Communales 280 280 Tanzanie 100 43 Total 5.198 6.150 11.348 Source: FAO 2007 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 122 122 Document de travail de la Banque Mondiale Figure 5.5. Fonds d'entretien des routes Revenus, dépenses réelles et besoins Origine des recettes (millions de dollars EU) 14.0 Réel Prévu carb. véhic. 12.0 Année Péages Total Permis Taxe conduire Taxes 10.0 2003 51,7 18,3 29,0 1,0 100,0 8.0 2004 51,7 16,3 31,1 0,9 100,0 2005 51,0 14,3 34,4 0,3 100,0 6.0 2006 62,7 9,9 26,5 0,9 100,0 4.0 Source: Office des routes 2.0 - 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 Demande Réel Revenus des Routes (OdR) utilise le Fonds d'entretien des routes pour les routes nationales. Ce fonds est financé à 50 % par les taxes sur les carburants (Figure 5.5). En 2006, le fonds ne pou- vait couvrir qu'une partie des besoins estimés par l'OdR, et le gouvernement du Burundi a été en conséquence fortement encouragé à augmenter les taxes jusqu'à ce qu'un équilibre puisse être atteint entre les recettes et les dépenses en 2012. En pratique, le fonds pourrait couvrir 824 dollars/km, alors que les besoins vont de 1.300 dollars/km à 2.500 dollars/km, selon la surface des routes (Carruthers et Krishnamani, 2006)36. Le déficit annuel de l'en- tretien des routes nationales est de 3,5 à 8,7 millions de dollars. La Banque africaine de développement et la Banque mondiale travaillent sur un projet conjoint qui pourrait aider le Burundi à améliorer l'entretien de ses routes nationales. Trois principaux couloirs relient le Burundi aux ports d'Afrique de l'Est : celui du nord vers Mombasa, celui du sud vers Durban et le couloir central qui mène vers Dar es Salam. La capitale tanzanienne se trouve à environ 1.400 kilomètres de Bujumbura et peut être rejointe par trois itinéraires, deux d'entre eux impliquant un transport combiné, compre- nant le transport par le lac et par rail. Kigoma est le principal port, utilisé pour les exportations du Burundi ; il est relié au réseau ferroviaire tanzanien. Le coût du transport jusqu'à Dar es Salam est faible, mais le manque d'installations portuaires et la faible capacité ferroviaire s'ajoutent aux nombreux problèmes commerciaux rencontrés en Tanzanie, qui peuvent retarder les livraisons jus- qu'à deux mois. Cet itinéraire ne peut être utilisé pour transporter des denrées périssables ou pour atteindre les marchés pour lesquels une livraison fiable est importante, comme c'est le cas pour le café ou les thés de spécialité. Une utilisation plus efficace du couloir Kigoma-Dar es Salam impliquerait d'améliorer l'entretien des installations portuaires qui ne permettent d'accueillir actuellement que des petits navires. Le nombre de wagons et de locomotives constitue un autre goulet d'étranglement qui empêche de continuer à utiliser cet itinéraire multimodal (Tableau 5.4). 36. Les 2.500 dollars/km proviennent d'un calcul théorique qui correspond à un réseau routier de qua- lité, en supposant un coût unitaire de 2.000 dollars/km pour les routes interurbaines revêtues (1.209 km) et de 3.000 dollars/km pour les routes interurbaines en terre/gravier (3.521 km). 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 123 Rompre le cercle vicieux 123 Dans ce contexte, le transport routier s'est développé de façon plus importante que le rail et le lac (Figure 5.6). La route vers Mombasa (Rwanda-Ouganda-Kenya) est de plus en plus empruntée pour diversifier les couloirs commerciaux, même s'il faut 14 jours pour atteindre ce port et que le coût est élevé étant donné le prix du carburant. La perspective d'un nouveau projet minier pourrait apporter l'incitation nécessaire à l'amélioration de l'interconnexion avec le réseau ferroviaire tanzanien (Tableau 5.4). Dynamiser le potentiel de cultures d'exportation à forte Figure 5.6. Trafic routier en pourcentage du valeur, tels que les fruits et trafic terrestre légumes de spécialité, nécessi- 50% terait des améliorations spec- taculaires du transport aérien. 40% Exportations En avril 2007, SN Brussels Airlines a repris ses vols heb- 30% domadaires directs Bruxelles- 20% Bujumbura. L'Airbus 300 de Importations SN Brussels Airlines peut 10% charger jusqu'à cinq palettes 0% de fret (environ 10 tonnes par 2001 2002 2003 2004 2005 2006 palette). Cependant, la com- pagnie consacre en priorité l'espace de fret aux besoins des passagers et réserve seulement l'espace restant aux produits commerciaux, rendant ainsi la situation trop peu fiable pour les producteurs de ces fruits et légumes. De plus, les compagnies aériennes ne possèdent pas l'équipement nécessaire pour manipuler et stocker des denrées périssables. Comme indiqué au chapitre 3, le développement de vols charters dédicacés aux marchandises horticoles pourrait débloquer la production et la vente de ces cultures à forte valeur destinées à l'exportation (Tableau 5.4). Les multiples taxes informelles, qui augmentent les coûts déjà élevés de transport, constituent une autre entrave au développement du réseau. Il est vital de concevoir une stratégie à l'échelle nationale pour réduire la corruption, car celle-ci freine les opportuni- tés de développement du secteur privé. Eau et assainissement. La production, le transport et la distribution de l'eau sont assu- rés par la Regideso dans les zones urbaines et par la DGHER dans les zones rurales. La Direction de l'Eau et de l'Énergie du ministère de l'Énergie et des Mines a en charge la régle- mentation du secteur. Le Burundi est confronté à deux défis pour son approvisionnement en eau. Les per- formances de l'organisme parastatal en charge du réseau urbain, doivent être améliorées et nécessitent des réformes (pour restructurer l'entreprise et améliorer les tarifs) et des investissements importants (pour au moins réhabiliter le réseau). D'autre part, l'accès à l'eau potable dans les zones rurales est inférieur aux normes africaines et a besoin d'être renforcé par d'importants investissements (Figure 5.7).37 De tels investissements devraient 37. Les importations en provenance de SINELAC (Burundi-RDC-Rwanda) réduisent en partie l'écart. Regideso, Rapport annuel d'activités, Exercice 2005 et 2006. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 124 124 Document de travail de la Banque Mondiale Tableau 5.4 . Actions requises pour le secteur des transports Actions urgentes Actions à court terme Actions à long terme Stratégie politique ­ Diagnostic du trafic ­ Identification des ­ Accords régionaux par mode, incluant axes routiers les plus pour réduire la lour- les pays voisins efficaces pour deur des formalités ­ Concertation avec atteindre les ports administratives les pays voisins pour d'Afrique de l'Est ­ Négociations pour une stratégie com- (coût et temps) faciliter les formal- mune des transports ­ Analyse de la diver- ités douanières dans (NEPAD) sification des princi- les pays voisins ­ Besoin d'une vision paux axes de stratégique (à long transport, y compris terme) l'Asie et l'Europe ­ Identification des ­ Négociation avec les options pertinentes principaux trans- porteurs ­ Diagnostic de la Routes qualité des routes ­ Augmenter les (en cours) recettes du Fonds d'entretien des ­ Identification des routes principales routes rurales, en fonction ­ Augmentation des de la croissance taxes sur les carbu- rurale rants (en cours) ­ Réhabilitation des principaux axes nationaux et inter- régionaux ­ Réhabilitation des principales routes rurales Transport aérien, ­ Analyse de la capac- ­ Augmenter la capac- ­ Intégration des dif- maritime et ité de fret (modal et ité du fret aérien férents modes de ferroviaire intermodal) ­ Négocier la réduc- transport, dans une tion des escales de vision stratégique à correspondance dans long terme le transport aérien ­ Etude de faisabilité du transport mar- itime dans le lac Tanganyika ­ Etude de faisabilité de l'interconnexion ferroviaire avec le réseau tanzanien permettre de réduire l'écart considérable qui existe entre les zones rurales et urbaines pour l'accès à l'eau sous conduite. Cet écart est encore aggravé par les conditions des zones rurales, où l'accroissement de la densité de population, la pollution et la sécheresse du cli- mat de ces dernières années, ont réduit la quantité et la qualité de l'eau saine provenant tra- ditionnellement de sources naturelles. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 125 Rompre le cercle vicieux 125 En 2001, seule une Figure 5.7. Eau potable : production, ventes et pertes moitié de la population 40.0 100.0% avait accès à une source 35.0 d'eau de meilleure qualité 80.0% 30.0 (réseau et bornes fon- 3 m 25.0 taines), avec des diffé- 60.0% de 20.0 rences importantes entre Pertes 15.0 40.0% les zones urbaines et Millions 10.0 rurales : plus de 75 % de la 20.0% 5.0 population urbaine avait - 0.0% accès à l'eau potable 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 (Figure 5.8). Malgré les Production Ventes Pertes efforts de la Regideso pour augmenter les raccorde- ments, ce chiffre a sans doute chuté depuis le Figure 5.8. Accès à l'eau potable dans les zones urbaines retour des réfugiés. Dans et rurales, 2001 les zones urbaines, où les communautés refusent de 80% payer (ou de forcer les uti- 70% lisateurs à payer) pour les 60% 50% raccordements aux bornes 40% 75.8% fontaines, la Regideso ne 30% 46.5% 45% développe pas ses infra- 20% 43.1% 29.3% structures. La compagnie 10% 0% dispose de ressources limi- tées pour entretenir cor- Total rectement le réseau. Les Réseau Bornes fontaines pertes sont principalement Urbaines Rurales Total dues à des déficiences tech- niques et représentent 40 % de la production totale. L'eau potable est souvent coupée : le nombre de jours sans accès à l'eau potable est de 94 environ au Burundi, alors que la moyenne en ASS se situe autour de 34 jours. L'électricité nécessaire pour pomper l'eau est peu fiable et limitée, et la faiblesse du sous-secteur élec- trique accentue ainsi la gravité du problème dans le secteur de l'eau qui a nettement besoin d'être amélioré. Des réformes aideraient à se diriger vers le recouvrement des coûts. L'écart entre les tarifs et les coûts d'opérations et maintenance a déjà diminué au cours des dernières années, mais le gouvernement doit encore consentir des efforts pour améliorer l'efficacité des tarifs (Figure 5.9). Une autre source possible d'efficacité est le remaniement des subventions. Le subven- tionnement de l'accès à l'eau sous conduite est une pratique modèle qui évite de financer la consommation des clients à revenus élevés qui y ont déjà accès. Il arrive que les consomma- teurs refusent de payer s'ils ne trouvent aucune valeur au service, comme au Rwanda. Les services d'assainissement sont également insuffisants dans tout le pays, en particulier les égouts dans les zones urbaines ainsi que le traitement des eaux usées qui est inexistant. Il 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 126 126 Document de travail de la Banque Mondiale n'existe pas de chiffres Figure 5.9. Tarifs de l'eau fiables sur la couverture du (dollars EU/m3) réseau d'assainissement. Environ 70 % des foyers 0.25 ruraux disposent de latrines qui n'atteignent pas le 0.15 Coût Tarif Coût Tarif Coût niveau minimal d'hygiène Tarif Tarif Coût recommandé et 10,6 % n'en possèdent même pas 0.05 Surplus (Tableau 5.5). Dans les Déficit Déficit Déficit zones rurales, les latrines 2003 2004 2005 2006 -0.05 traditionnelles à fosse sont mal entretenues, mais la plupart des écoles et des -0.15 centres de santé possèdent des installations d'assainis- sement convenables.38 TIC. Le Burundi dispose de faibles infrastructures de télécommunications. Le réseau national compte environ 500 kilomètres de liaisons hertziennes PPI, de capacité relativement faible, et tout le trafic international vers le Burundi se fait par satellite. Il existe quelques liaisons transfrontalières de faible capacité avec le Rwanda et la Tanzanie, mais pas de tra- fic important (Tableau 5.6). Tableau 5.5. Actions requises pour les secteurs de l'eau et de l'assainissement Actions urgentes Actions à court terme Actions à long terme Eau ­ Améliorer l'accès dans ­ Garantir l'accès dans ­ Soutenabilité à long les zones urbaines et les nouvelles ban- terme de la Regideso périurbaines lieues urbaines, en ­ Le subventionnement fonction du besoin des des raccordements nouveaux usagers aux bornes fontaines ­ Assurer la viabilité de est à reconsidérer la Regideso et la révi- ­ Etude de la couverture sion nécessaire des par région tarifs. La capacité et la volonté de payer ­ Estimation de la sont les éléments clés volonté de payer de l'étude ­ Réduction des pertes techniques Assainissement ­ Etude des services ­ Améliorer le service et ­ Davantage d'efforts d'assainissement et la gestion des égouts sur l'accès aux des sources d'eau réseaux d'assainisse- souterraines (quantité ment et qualité) 38. D'après Ventura Bengoechea (2007). 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 127 Rompre le cercle vicieux 127 Tableau 5.6. Développement du secteur des télécommunications Fixes 2001 2002 2003 2004 Capacité de commutation 27.836 31.384 31.834 39.136 Lignes en service 20.543 22.084 23.895 27.744 Lignes en service à Bujumbura 17.577 19.208 21.136 14.470 Lignes en service en zones urbaines 17.625 17.708 24.174 Téléphones publics 10 10 10 3.277 Lignes en attente 4.692 6.627 10.000 15.000 Pannes pour 1000 lignes et par an 72,0 60,0 Taux de pannes sur appels internationaux 39,1 28,2 20,0 50,0 entrants (%) Mobiles 2001 2002 2003 2004 Nombre de liaisons internationales directes 3 3 4 4 Pays avec autorisations d'itinérance 5 69 69 69 Pays africains avec autorisations d'itinérance -- 23 23 23 Deux sociétés se partagent le segment traditionnel et la téléphonie cellulaire : le four- nisseur public ONATEL, et Telecel qui est privé. Africell et Econet sont deux opérateurs privés du marché du téléphone cellulaire en plein développement. Bien que Telecel soit le plus gros opérateur, ses tarifs sont les plus élevés (Tableau 5.7). L'une des raisons en est que les consommateurs privilégient la couverture par rapport au prix dans leur choix d'un fournisseur. Ceci est confirmé par une étude récente effectuée dans les pays voisins comme le Rwanda et la Tanzanie (Gray). Alors que la plupart des pays d'Afrique possèdent trois ou quatre opérateurs cellu- laires, la taille du marché Burundais ne permet pas à ses quatre opérateurs de profiter d'une économie d'échelle. Il est intéressant de noter que trois opérateurs ou plus sont régis par des règlements antitrust, qui stipulent que toute compagnie possédant plus de 30 % de parts de marché peut profiter de sa position dominante. Cependant, pour une meilleure efficacité, la structure du marché doit être examinée au cas par cas. Tableau 5.7. Tarifs en centimes de dollars EU/minute Les marchés tant local que et nombre d'abonnés39 régional progressent réguliè- rement et la compétitivité Ver n'implique pas forcément Onatel une augmentation du De Africell Econet Telecel Mobile Abonnés nombre d'opérateurs. Africell 23.3 29.1 29.1 27.4 13 000 La privatisation de Econet 20,4 17,8 20,4 20,4 55 000 l'ONATEL est prévue pour Telecel 43,3 43 3 27,1 30,5 103 000 dynamiser le secteur, en par- Onatel 12,1 12,1 12,1 12,1 50 000 ticulier dans le segment de Mobile l'Internet. Les connexions 39. Dans le cas de Telecel et Spacetel, les tarifs sont la moyenne (simple) des montants prépayés et de ceux payés suivant un plan mensuel. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 128 128 Document de travail de la Banque Mondiale par satellite sont très onéreuses et une liaison par fibres optiques pourrait être la solution, à condition que les conflits régionaux ne l'affectent pas. La connectivité au réseau Inter- net mondial se fait actuellement par VSAT, tandis que l'accès direct peut se faire par WiFi, WiMAX, GSM ou par le réseau téléphonique. Les autorités prévoient une connexion à un réseau à haut débit dans la région de l'Afrique de l'Est. Le gouvernement a également lancé un partenariat public-privé pour financer le déve- loppement d'un réseau Internet à haut débit. Ce projet contribuera de façon importante à ouvrir l'accès aux zones rurales et à relier plus efficacement le Burundi à la région. La prin- cipale caractéristique de ce partenariat est que le secteur privé initiera l'investissement et aura la charge de la gestion financière et commerciale, tandis que le gouvernement com- plètera les investissements et garantira des prix abordables pour les usagers. D'autres inves- tissements seront nécessaires dans le secteur des technologies de l'information et des communications, particulièrement dans le domaine de la formation. Investissements publics et privés et plan d'actions prioritaires du CLSP Des investissements et des réformes majeurs sont nécessaires pour atténuer les contraintes d'infrastructure qui handicapent la croissance du monde rural. Même si l'encouragement des relations public-privé est vital pour atteindre cet objectif, l'État prendra très probable- ment en charge la plus grande part des investissements à très court terme. Pour devenir un moteur de croissance efficace, il lui faudra néanmoins promouvoir une meilleure gestion et réformer les tarifs. Le programme d'actions prioritaires du CSLP a établi des priorités d'investissement dans les infrastructures pour la période 2007­2010. Ce programme de quatre années a été au centre des discussions au cours de la dernière table ronde qui s'est tenue en mai 2007. Il a été reconnu que 355 millions de dollars, dont 65 % ont déjà été obtenus, doivent être alloués aux infrastructures (Tableau 5.8). Une moitié de ce budget est destinée aux trans- ports (routes), et l'autre à l'eau et à l'énergie. Les TIC restent marginales, car le gouverne- ment prévoit d'importants investissements de la part du secteur privé. Un quart du budget total est affecté à l'entretien et à la réhabilitation, ce qui est conforme au diagnostic précédent. Les investissements dans les transports sont largement dominés par la réhabilitation des routes. La majeure partie du financement pour l'électri- cité est consacrée à l'augmentation de la capacité de production et à la couverture du réseau. Les interventions dans le domaine de l'eau impliquent une réhabilitation et une extension des réseaux. Améliorer le climat d'investissement40 Dans un pays aussi densément peuplé que le Burundi, le secteur privé en milieu rural peut offrirdebonsmoyensdesubsistancedansbeaucoupd'activitésautresquelaproductionagri- cole de base. Même si l'État a un rôle important à jouer dans le développement économique du pays, le secteur privé est le principal moteur de la croissance et de la création d'emplois. Il ne peut jouer ce rôle que dans un environnement favorable à la conduite des affaires. C'est pourquoi, l'amélioration du climat d'investissement contribue à augmenter la croissance et réduire la pauvreté. 40. Cette section a été rédigée par Elke U. Kreuzwieser (Expert Senior, DSP). 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 129 Rompre le cercle vicieux 129 Des réformes majeures Tableau 5.8. Besoins en investissements par année seront nécessaires pour rendre Par année (2007­2010) plus favorable le climat éco- en % du PIB 2005 nomique. Le cadre judiciaire Dépenses Financements Besoins de et réglementaire peut être Secteur totales existants financement amélioré en : (a) clarifiant le Energie 2,2% 1,0% 1,3% droit commercial et les règles O & M 0,2% 0,0% 0,2% administratives de manière à Investissement 2,0% 1,0% 1,1% éviter les dispositions ouvertes Transport 5,7% 3,9% 1,8% à l'interprétation ou aux déci- O & M 2,2% 1,6% 0,5% sions discrétionnaires ; (b) Investissement 3,5% 2,3% 1,2% réformant l'appareil judiciaire TIC 0,4% 0,0% 0,4% de façon à réduire les retards O & M 0,0% 0,0% 0,0% excessifs observés au niveau Investissement 0,4% 0,0% 0,4% des tribunaux commerciaux Eau 2,8% 2,4% 0,4% et à promouvoir la médiation en tant que voie de règlement O & M 0,4% 0,3% 0,1% des litiges commerciaux ; et Investissement 2,3% 2,1% 0,3% (c) en simplifiant les formali- Total 11,1% 7,2% 3,9% tés et en réduisant le coût de O & M 2,9% 2,0% 0,9% création d'une entreprise. Investissement 8,2% 5,3% 3,0% Les mesures d'incitation à Source: d'après le programme d'actions prioritaires de mise l'investissement pourraient en oeuvre du CSLP 2007­2010 être renforcées par : (a) des garanties données aux investis- seursnationauxetétrangers;(b)unerestrictiondel'accèsauxprivilègesfiscauxquidevraient être accordés sur la base de critères objectifs et non discrétionnaires ; et (c) le raccourcisse- ment de la durée des accords. La restructuration du système financier dans le but de favori- ser la création des petites entreprises (ou de les sortir du secteur informel) est également indispensablesionveutrenforcerl'apportdusecteurruralàlacroissance.Enplusd'uneamé- liorationdel'accèsaucrédit,unetellepolitiquedevraitdébouchersurunaccroissementsigni- ficatif de l'emploi. Enfin, des institutions efficaces d'appui au secteur privé pourraient être mises en place en y introduisant des éléments des modèles de gestion du secteur privé (tels que la liaison d'une partie de la rémunération du personnel avec les performances). Cela devrait rapidement produire des résultats au niveau de l'encouragement du secteur privé. Cadre juridique et réglementaire des affaires Selon le rapport Doing Business 2007, sur les 175 pays classés, le Burundi occupe la 166ème, ce qui constitue un recul par rapport à 2005 où le pays occupait la 160ème place.41 Le tableau 5.9 41. Dans la première publication de Doing Business en 2006 (classement 2005, publié en septembre 2005), le Burundi occupait la 143ème. place sur 155 pays. Ce classement de 2005 a été plus tard recalculé pour traduire les changements de méthodologie introduits en 2006 ainsi que l'extension de la couverture à 20 nouveaux pays. Par conséquent, dans le classement réajusté de 2005, le Burundi est passé de sa 143ème. place sur 155 pays à la 166ème. sur 175 pays. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 130 130 Document de travail de la Banque Mondiale donne le classement du Burundi pour cha- Tableau 5.9. Classement du climat cun des dix indicateurs à partir desquels le économique du Burundi classement global est obtenu. Facilité de . . .a Rang sur 175 Chaque indicateur est calculé à partir Création d'entreprise 109 d'unesériedesous-indicateurs.L'indicateur Octroi des licences 164 de « création d'entreprise », par exemple, Embauche des travailleurs 132 inclut le nombre d'étapes nécessaires (11 au Transfert de propriété 132 Burundi), le temps requis (43 jours) et le Obtention des prêts 159 coût en pourcentage du revenu par habi- Protection des investisseurs . . tant (222 % ou deux fois le revenu par Paiement des impôts 123 habitant du Burundi). Commerce extérieur 171 D'autres sources confirment la mau- Respect des contrats 137 vaise performance du Burundi en termes Fermeture d'entreprise 121 de conduite des affaires : une enquête réa- liséeen2006auprèsdesentreprises42indique aHypothèses standardisées pour permettre des comparaisons entre les pays. La méthodologie que les cadres supérieurs d'une entreprise peut être consultée sur www.doingbusiness.org passent en moyenne environ 5,7 % de leur temps à satisfaire les exigences liées aux réglementations de l'État ; que les paiements non officiels d'une entreprise type pour « faire avancer les choses » atteignent en moyenne 4,5 % des ventes ; et que plus spécifiquement, 23 % des entreprises indiquent qu'elles doivent effectuer ce type de paiements (ou « cadeaux ») lors des rencontres avec les inspecteurs des impôts. Lois commerciales et tribunaux de commerce. Le niveau de sécurité juridique offert par un pays affecte les décisions d'investissement prises par les investisseurs aussi bien locaux qu'étrangers. Ces décisions prennent en compte l'existence de lois commerciales appro- priées, mais plus encore, le fonctionnement du système judiciaire du pays, en particulier les tribunaux de commerce en charge des litiges commerciaux. Lois commerciales. Les spécialistes du droit remarquent que l'état actuel des lois com- merciales manque de cohérence d'ensemble et de textes d'application appropriés. Le Code commercial de 1993 n'est plus adapté à la réalité du monde des affaires marquée par la mon- dialisation de l'économie, et il est supposé être en cours de révision. L'actuelle approche mosaïque de révision du droit commercial adoptée par le Burundi pourrait rendre les efforts très dispersés pour la capacité limitée de l'État et détourner l'attention des mesures urgentes à prendre pour améliorer le fonctionnement de l'appareil judiciaire, et surtout du tribunal de commerce. L'absence de loi commerciale cohérente, moderne et crédible du point de vue international pourrait décourager les investisseurs (surtout étrangers). Le Burundi pourrait engager un processus--bien préparé et documenté, associant l'É- tat, la communauté judiciaire et le secteur privé, y compris le secteur bancaire--au cours duquel pourraient être analysés les avantages et inconvénients de l'adoption progressive d'un ensemble de lois commerciales africaines modernes éprouvées et conformes à la tra- dition juridique du Burundi. Cette approche aurait l'avantage supplémentaire d'offrir au pays une jurisprudence africaine substantielle qui pourrait accélérer de façon significative les procédures légales. 42. http://www/enterprisesurvey.org 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 131 Rompre le cercle vicieux 131 Fonctionnement du tribunal de commerce. L'unique tribunal de commerce se trouve à Bujumbura, la capitale, mais il manque des installations, équipement et capacités adéquats. Ces insuffisances affectent considérablement la durée des procédures du tribunal--pour une affaire moyenne, il faut quatre ans pour qu'une décision de justice soit rendue (une affaire est restée en suspens pendant 25 ans !). La productivité (en termes de décisions ren- dues et d'affaires closes) des juges du tribunal du commerce est irrégulière et ne permet pas de réduire les quelque 400 affaires de l'arriéré judiciaire, dans la mesure où tous les ans, le nombre d'affaires closes est presque équivalent à celui des nouvelles affaires. Pour tenter d'au moins réduire quelque peu l'arriéré judiciaire, l'État envisage d'introduire une loi contre les tactiques dilatoires dans les procédures de justice. En plus de cette situation inac- ceptable, plusieurs rapports soulignent un degré élevé de corruption dans le système judi- ciaire, surtout au niveau du tribunal de commerce où les enjeux financiers sont plus importants. L'application des décisions une fois qu'elles sont enfin rendues est un autre des problèmes du système judiciaire. Le gouvernement doit opérer d'importants changements pour améliorer l'environne- ment judiciaire. Une augmentation significative des salaires des magistrats représenterait déjà un pas vers l'avant. Il doit plus que jamais tenir les « assises de la justice » longtemps reportées et adopter un plan d'action cohérent incluant des mesures visant à combattre la corruption généralisée au sein de l'appareil judiciaire. Centre burundais d'arbitrage et de conciliation. Ouvert récemment (en décembre 2006) et rattaché à la Chambre de Commerce et d'Industrie du Burundi (CCIB), le centre dis- pose d'une structure très allégée (juste un secrétariat permanent), de procédures d'arbi- trage et d'une liste d'arbitres agréés. À ce jour, il n'a encore eu aucune affaire à régler, étant donné le délai qui sépare le moment où une clause d'arbitrage est incluse dans un contrat commercial (ou bien où celui-ci est amendé) et le moment où un litige apparaît. Le Burundi doit continuer à encourager et à soutenir l'arbitrage comme moyen de règlement des litiges commerciaux. Il doit également s'engager à assurer l'exécution rapide des décisions d'arbitrage à travers son système judiciaire (exequatur) dans les affaires où cela est exigé, étant donné que l'exécution des décisions est une condition de la confiance dans le système d'arbitrage. Système fiscal des sociétés. Dans le cadre des enquêtes réalisées sur les entreprises afri- caines, le système fiscal est généralement mentionné comme étant un obstacle majeur au développement du secteur privé. La réalité est plus complexe, surtout en termes de compa- raisons internationales. La pression fiscale varie considérablement entre les entreprises qui bénéficient de diverses formes de statuts spéciaux (par exemple, code d'investissement et autresexonérationsfiscales)etcellesquipaientdesimpôtsstatutaires,entrelesgrandesentre- prises et les PME, entre les entreprises légalement constituées et les activités semi- formelles. Les sociétés se plaignent souvent moins du niveau des impôts que du contrôle fis- cal, voire du « harcèlement », exercé par les inspecteurs des impôts et de l'extorsion de des- sous de tables. Au Burundi, l'assiette fiscale est très réduite à cause de la prépondérance du secteur informel. Environ 3.300 contribuables ont été enregistrés et ont obtenu un numéro d'im- matriculation fiscale (NIF) en 2006. Parmi eux, 323 sont classés comme « grandes entre- prises » et génèrent 92 % des recettes fiscales du pays. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 132 132 Document de travail de la Banque Mondiale Impôt sur les bénéfices des sociétés. Le taux d'imposition sur les bénéficies des sociétés a été réduit de 45 % à 35 % en janvier 2004, bien après que la plupart des autres pays africains l'aient abaissé à ce niveau au cours des années 9043. Le Burundi discute actuelle- ment une autre réduction à 25 % combinée avec une exonération fiscale de trois ans qui pourrait aider à compenser les nombreux handicaps entravant la compétitivité interna- tionale du pays. Cette exonération ne doit surtout pas entraîner un surcroît de bureaucra- tie (études de faisabilité, etc.) qui défavoriserait les PME et les empêcherait de sortir du secteur informel. Système fiscal pour les petites entreprises. L'État doit s'efforcer de restreindre le sec- teur informel et d'élargir son assiette fiscale. Il doit proposer aux petits entrepreneurs des mesures incitatives pour les amener à faire enregistrer leurs affaires et par la suite à se conformer aux réglementations (fiscalité, travail, etc.). A cet effet, il pourrait être efficace de les sensibiliser au coût de l'informalité, que les entrepreneurs sont rarement en mesure de bien évaluer. Le code fiscal du Burundi comporte une option fiscale, le « forfait », destinée aux petites entreprises enregistrées. Elle permet aux entreprises éligibles de ne pas devoir se conformer aux réglementations comptables. Le forfait est calculé en pourcentage d'une estimation antérieure du chiffre d'affaires effectuée par les inspecteurs des impôts. Cette estimation est généralement imparfaite et finalisée après beaucoup de marchandages, sou- vent accompagnés de dessous de table. Une réforme du système fiscal des petites entre- prises devrait promouvoir une imposition forfaitaire directe basée sur des indicateurs objectifs. L'introduction de l'imposition forfaitaire est habituellement combinée avec une simplification des systèmes d'auto-évaluation. Impôt minimum. L'État les soupçonnant d'être capables de fraude, le paiement d'un impôt minimum de 1 % de leur chiffre d'affaires est imposé aux entreprises affichant des pertes. Le gouvernement doit réévaluer le bien-fondé de cette taxe et revoir les secteurs aux- quels l'appliquer. Système fiscal pour les exportateurs. Étant donné la petite taille du marché intérieur burundais, l'accélération de la croissance économique devra venir des marchés d'exporta- tions, comme cela est largement démontré dans les parties traitant du café, du thé et de l'horticulture. Les exportateurs de produits non traditionnels44 bénéficient d'un système fiscal favorable. Le code fiscal général prévoit une exonération fiscale de 10 ans pour les exportateurs et une réduction de 50 % pour les années suivantes. Le régime de la zone franche prévoit également une exonération de 10 ans suivie d'une réduction de 15 % de l'impôt sur les bénéfices. Avec le taux d'imposition actuel de 35 % sur les bénéfices, le sta- tut de zone franche est légèrement plus avantageux que les dispositions statutaires du code fiscal et offre également d'autres avantages. 43. En d'autres termes, il y a eu une inertie inexplicable des autorités, de l'administration des impôts en particulier, avant qu'il ne soit admis que le taux de 45 % était excessif dans un pays en situation de post- conflit engagé dans la reconstruction, et qu'un tel taux n'était pas propice à la réalisation des objectifs de développement économique. 44. La taxation du café et du thé, les principaux produits d'exportation du pays, nécessitera une éva- luation plus détaillée après que les décisions les plus importantes de libéralisation de ces secteurs auront été prises, et de préférence avant que les détails ne soient mis en oeuvre, pour permettre aux entreprises privées d'en tenir compte dans leurs modèles économiques. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 133 Rompre le cercle vicieux133 Autres aspects de la réforme fiscale. Un code des procédures fiscales fixant clairement les règles régissant les relations entre l'administration des impôts et le contribuable (notamment le contrôle fiscal, le paiement, etc.) est en cours d'élaboration et doit être adopté sous peu. Même si certaines raisons plaident en faveur d'un report des mesures de réforme jus- qu'à l'harmonisation avec la législation de la Communauté est-africaine (CEA), il est important de souligner que la récente adhésion du Burundi à la CEA n'affecte pas sa sou- veraineté en matière de fiscalité nationale. Réduire l'envergure des impôts indirects comme la TVA n'est en aucun cas indispensable pour réaliser une union douanière. L'organisation qui a précédé l'Union européenne--le plus grand marché unique au monde--est, depuis 1958, une union douanière complète, ce qui n'empêchait pas les membres de l'UE d'ap- pliquer des taux différents de TVA et d'impôt sur les sociétés jusqu'en 2007. Centres de gestion agréés. Le Burundi a déjà créé par décret le cadre réglementaire de ces centres de manière à ce qu'ils puissent être effectivement rendus opérationnels parallèle- ment à la réforme fiscale. Les PME devraient bénéficier de l'accès à une assistance comp- table dans la mesure où la préparation professionnelle de leurs dossiers fiscaux leur évitera pas mal de tracasseries de la part de l'administration des impôts. Elles auraient également un meilleur accès au financement et aux marchés publics qui requièrent souvent des états comptables solides. Des centres de ce type existent dans plusieurs pays africains, tous ne sont pas une réussite, mais comme toujours, les dispositions de mise en oeuvre sont cruciales. Procédures douanières Tarif douanier. Avec l'adhésion du Burundi à la CEA, effective depuis le 1er juillet 2007, la structure tarifaire à trois niveaux de la Communauté sera mise en oeuvre de façon pro- gressive sur une période de trois ans--0 % pour les matières premières, les biens d'équipe- ment, les intrants agricoles, certains médicaments et équipements médicaux ; 10 % pour les produits semi-finis et autres intrants industriels essentiels ; et 25 % pour les produits finis. Impôts et tarifs d'exportation appliqués aux intrants utilisés pour les exportations. Grâce à l'application éventuelle du tarif douanier à taux zéro de la CEA aux intrants agricoles et aux biens d'équipement, les exportateurs devraient pourvoir utiliser plus facilement les intrants importés sans avoir à recourir à des exonérations fiscales ou procédures de rem- boursement complexes. Cependant, une fois que la TVA aura été introduite, la question des crédits de TVA aux exportateurs devra être réglée de façon satisfaisante à moins que les intrants agricoles et les biens d'équipement ne soient exonérés de TVA. Le code douanier burundais prévoit le remboursement des droits de douane payés sur les intrants utilisés pour les exportations. Mais les procédures sont complexes et doivent être simplifiées (par exemple, en utilisant des coefficients de remboursement fixes) de manière à ne pas péna- liser les exportateurs nouveaux ou occasionnels. Dédouanement et évaluation des procédures de l'administration des douanes. Des opé- rations douanières efficaces sont cruciales pour un pays enclavé comme le Burundi. Les procédures se sont améliorées depuis l'introduction d'un système informatisé mais d'autres améliorations sont nécessaires pour simplifier et accélérer les procédures. Système d'incitation--Code d'investissement et loi sur la zone franche. Le Burundi est en train de réviser son code d'investissement de 1987.45 Celui-ci reste beaucoup trop 45. Loi 1/005 du 14 janvier 1987 sur le code d'investissement 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 134 134 Document de travail de la Banque Mondiale conforme aux codes des années 70 et 80, malgré une amélioration de beaucoup de ses pra- tiques introduite dans les années 90. Celle-ci visait essentiellement les dispositions géné- rales relatives à la non-discrimination, à la protection des investisseurs (garanties contre l'expropriation), à la libre circulation des capitaux et aux transferts de dividendes. Le code révisé ne doit pas inclure des mesures d'encouragement fiscales, qui relèvent du code fis- cal et du système tarifaire des douanes. Les mesures incitatives doivent être transparentes, automatiques (fondées sur des critères clairement définis) et non dérogatoires. Pour les investissements inférieurs à un plafond fixe, les procédures d'approbation doivent être simples et automatiques, accordées sur présentation d'informations standardisées (pas d'étude de préfaisabilité). Pour les investissements supérieurs à un certain niveau, une documentation plus détaillée et une approbation par un comité seraient exigées. Lesrecommandationsinitialesformuléespourlarévisionducodede1987sontbaséessur les mêmes principes. Malheureusement, l'avant-projet de code d'investissement révisé ne suit pas ces recommandations. Il est actuellement mis en attente pour garantir sa compatibilité avec le code modèle d'investissement de la CEA, et cela pourrait être une occasion de faire un inventaire des bonnes pratiques et de le reformuler entièrement en accord avec celles-ci. Création d'entreprises--procédures et coût. Pour la création d'entreprises, le Burundi occupe la 160ème place sur 175 pays dans le classement de l'enquête Doing Business 2007 (données de 2006). Un cadre légal établissant un système de guichet unique rassemblant des représentants des différents ministères et agences impliqués dans le processus d'ins- cription au registre du commerce a donc été créé par décret. L'énorme réticence des ministères à déléguer complètement le pouvoir de signature au guichet unique a transformé celui-ci en un guichet unique à étapes multiples. Une façon plus efficace de faciliter la création d'entreprises serait d'en simplifier les étapes en accord avec les pratiques modèles. Facteurs de production--coût et disponibilité En dehors du cadre juridique et réglementaire, le coût et la disponibilité des facteurs de production déterminent dans une large mesure la compétitivité des entreprises. Nous ana- lyserons ici plus en détail le financement et la main-d'oeuvre/capital humain, tandis que la question foncière et les infrastructures/services seront abordées dans des chapitres séparés. Accès au financement en milieu rural. L'absence d'accès aux services financiers en milieu rural, en particulier pour l'agriculture, est un obstacle majeur au développement rural. Les institutions de microfinance (IMF) offrent leurs services à environ 300.000 clients au Burundi. Contrairement aux banques, elles mettent l'accent sur les ménages à faible revenu dans les zones urbaines et rurales. Elles pourraient cependant jouer un rôle important au niveau du financement destiné au monde rural et à l'agriculture. Elles sont toutefois incapables d'exploiter ce potentiel. Seules les IMF viables et bien gérées pourront offrir une gamme de services financiers adaptés au monde rural et à l'agriculture. La priorité est donc de renforcer les IMF (la gestion comptable et financière, les procédures, etc.) ainsi que le département chargé de la supervision de la microfinance à la Banque de la République du Burundi (BRB). Entretemps, il pourrait s'avérer utile de mettre en oeuvre une assistance techniqueetfinancièreenfaveurdesIMFpourleurpermettredediversifierleurbasedeclien- tèle et de concevoir des produits financiers adaptés au monde rural et à l'agriculture. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 135 Rompre le cercle vicieux 135 Encadré 5.1. Points saillants du nouveau décret sur la microfinance Le décret sur la microfinance a été approuvé en juin 2006. Il distingue trois catégories d'IMF : Les coopératives d'épargne et de crédit (Coopec). Aucun capital minimum n'est exigé, un minimum de 300 membres est requis. Entreprises de microfinance. Un capital minimum de 200.000 dollars EU est requis. Projets de microfinance Seules les IMF des catégories 1 et 2 sont autorisées à mobiliser les dépôts. La date limite accordée aux IMF pour soumettre une demande de licence était fixée au 22 janvier 2007. En avril 2007, 22 IMF avaient obtenu une licence (trois avaient été rejetées et un certain nom- bre étaient encore en cours de traitement). Les trois IMF rejetées n'ont pas encore démarré leurs activités. Les banques commerciales se focalisent sur les riches entreprises et clients urbains burundais. Elles ne s'impliquent actuellement dans le financement de l'agriculture qu'à tra- vers l'industrie du café (et dans une moindre mesure celle du riz). En raison des difficultés financières de l'OTB, les banques n'ont accordé aucun financement à l'industrie du thé depuis 2004. Le secteur agricole est considéré comme à haut risque par les banques (en par- ticulier à cause des risques liés aux intempéries et à la fluctuation des prix) et elles sont par conséquent réticentes à le financer. Promouvoir le développement rural nécessite un accès renforcé au financement. Le capital humain et le marché du travail Formation technique. Conscient que les techniques modernes de production dépen- dent de la qualité du capital humain, le Burundi a fait de l'éducation une grande priorité. Mais à cause de la guerre civile, l'enseignement général et technique et la formation pro- fessionnelle doivent être modernisés de toute urgence pour répondre aux exigences des industries à forte intensité de main-d'oeuvre qualifiée. Encadré 5.2. les taux d'intérêt sont-ils trop élevés ? Les taux d'intérêt nominaux du secteur bancaire se situent entre 15 % et 22 %, ce qui semble élevés et soulève de vives plaintes de la part du secteur privé. Le taux d'intérêt moyen est de 18 % (données de la BRB). Les taux d'intérêt réels (différence entre le taux d'intérêt en vigueur et le taux d'inflation) étaient élevés en 2001, 2002 et 2004, mais ont considérablement baissé en 2005 (pour atteindre 2,1 %). Les marges sur les taux d'intérêt (différence entre les taux des prêts et des dépôts) s'élèvent à environ 10 %, ce qui n'est pas courant dans les économies africaines. Cela reflète toutefois l'état actuel du secteur financier au Burundi--sa petite taille réduit les économies d'échelle et contribue au coût élevé du crédit ; le nombre élevé des prêts non productifs explique en par- tie les taux d'intérêt nominaux relativement élevés. Un secteur financier mieux développé et marqué par une plus forte concurrence aiderait à réduire les marges sur les taux d'intérêt. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:29 PM Page 136 136 Document de travail de la Banque Mondiale Heureusement, pour le moment, l'État a laissé au secteur privé le soin de combler les lacunes dans les domaines où il n'a pas pu offrir des services adéquats. Dans l'enseigne- ment technique, les structures de formation privées accueillent environ la moitié de la population estudiantine totale, mais certaines disciplines sont encore presque exclusive- ment du domaine de l'enseignement public. L'Institut des techniques agricoles (ITAB) offre une formation en technologie agro- industrielle et alimentaire aux techniciens de niveau A2. L'Institut supérieur de l'Agricul- ture (ISA) forme des ingénieurs industriels de niveau universitaire. Un atelier s'est tenu en juillet 2007, avec la participation du secteur privé, pour discuter de l'adaptation de l'en- seignement technique aux besoins de l'industrie, et pour aider à organiser des stages en entreprises pour les diplômés de l'université. Le Burundi aura besoin d'aide pour porter le niveau de l'enseignement technique, en particulier en sciences alimentaires, aux niveaux rigoureux exigés par les exportations vers le marché mondial. D'après l'enquête de 2006 sur les entreprises, seulement 11 % environ des entreprises du Burundi offrent une for- mation professionnelle formelle, contre 35 % en moyenne dans les autres pays africains. Marché du travail. Dans le classement de Doing Business 2007, le Burundi est 132ème (sur 175 pays) pour « l'embauche des travailleurs » qui mesure la souplesse des lois du tra- vail. Sur une échelle de 1 à 100 (le plus rigide), la difficulté de l'indice d'embauche est de 78 au Burundi, la rigidité de l'indice des horaires de travail est de 60, et la difficulté de licen- ciement d'un employé en surnombre est de 40. Les licenciements sont très coûteux pour l'employeur--26 semaines de salaire par année de service, à moins que la faute profes- sionnelle de l'employé puisse être prouvée. Cette disposition doit être réformée car elle pourrait dissuader les investisseurs potentiels. D'autre part, le coût non-salarial est très bas (6,9 % du salaire) parce que le Burundi n'a pas d'assurance médicale obligatoire pour les travailleurs. Les conflits portés devant le Tribunal du travail (un juge et deux assesseurs représentant les employeurs et les syndicats) sont réputés pour leurs décisions en faveur de l'employé dans 90 % des cas. Cette rigidité du marché du travail est partiellement com- pensée par les bas salaires, qui peuvent rendre le Burundi très compétitif pour les produc- tions à forte intensité de main-d'oeuvre si les énormes insuffisances relevées dans la législation du travail viennent à être corrigées. Institutions publiques d'appui et services de promotion des entreprises privées Métrologie, normalisation, essai et qualité (MSTQ). Le respect des normes et le contrôle de qualité deviennent de plus en plus importants dans le commerce international, mais un système MSTQ efficace et fiable manque encore au Burundi. Si le pays doit diversifier ses exportations et devenir moins dépendant du café et du thé, il lui faudra mettre en place des laboratoires agréés qui pourront assurer le respect de normes de qualité et d'exigences de traçabilité de plus en plus rigoureuses46. Centre d'information sur le commerce. La nouvelle agence d'investissement et d'ex- portation qui sera créée devra mettre en place un système d'information sur le commerce dans le but de fournir aux entreprises locales, aux investisseurs étrangers et aux importa- 46. Les exigences de traçabilité pour le « commerce équitable » du café figurent dans la section concer- née du présent rapport, mais la traçabilité de l'origine des importations dans l'Union européenne sera de plus en plus exigée à l'avenir. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:30 PM Page 137 Rompre le cercle vicieux137 teurs des données sur les normes techniques et commerciales, la disponibilité et la qualité des produits locaux, un annuaire contenant des informations pertinentes sur les entre- prises locales par secteur, un site sur les opportunités d'affaires, etc. Le centre d'informa- tion sur le commerce doit être bien conçu pour être à même de fournir cette information au plus faible coût possible et de rester soutenable sur la durée. En effet, beaucoup de centres d'information tombent à court de financement après le démarrage de leurs activi- tés. Résultat : l'information n'est plus mise à jour en temps réel et devient rapidement trop obsolète pour être utilisée par le monde des affaires. Le modèle d'entreprise du centre doit inclure un mélange d'informations ouvertes au public et d'informations sur-mesure disponibles pour les abonnés et/ou sous forme d'un service facturé. Le modèle d'entreprise ne doit donc pas être basé sur un accès physique au centre, mais plutôt sur l'accès à distance à travers les micro-ordinateurs des utilisateurs. Il faut également noter que les informations relatives aux normes et marchés étrangers mises à disposition ne doivent pas être rassemblées à partir de rien dans la mesure où dans la plu- part des cas, elles sont déjà disponibles sur Internet. Le centre d'information sur le com- merce du Burundi devra proposer des liens ou s'abonner à des bases de données externes. Par ailleurs, la base de données des produits et des fournisseurs locaux devra être créée et maintenue à jour. Il est clair qu'un tel centre ne peut être autosuffisant dans un pays comme le Burundi où le secteur privé est encore jeune et qu'il aura besoin de l'appui finan- cier du secteur public ou des bailleurs de fonds pendant les premières années. Institutions de promotion des investissements et des exportations. L'expérience avec ce type d'institutions est au mieux mitigée dans les pays africains, avec quelques exceptions biens connues. En bref, elles ne sont potentiellement utiles que dans les pays où le climat des affaires est déjà raisonnablement favorable. Leur performance est particulièrement médiocre lors- qu'elles ne sont pas financées de manière appropriée. Celles qui ont réussi sont souvent gérées par du personnel contractuel ayant des objectifs de performance et rémunérés sur la base des résultats, plutôt que par des fonctionnaires. Il serait de l'intérêt du Burundi de chercher une assistance pour la conception et le déploiement d'une telle institution, et de tenir compte des leçons apprises (parfois dans la douleur) ailleurs en Afrique pour éviter de commettre des erreurscoûteusesetd'êtreinefficaceàcemomentcrucialdesondéveloppementéconomique. Disponibilité et qualité d'un réseau de prestataires de services d'appui aux affaires. Les entreprises ne pourront pas fonctionner efficacement sans un réseau de prestataires de ser- vices d'appui aux affaires, en particulier dans les domaines suivants : Logistique(transport,transitaires,commissionnairesagréésendouanes,etc.); Juristes,expertscomptables,auditeurs,consultantsengestion; Professionnelsdumarketingetdesexportations; Technologiedel'information;et, Ingénierie, services de réparations, etc. Même s'il n'a pas été possible de faire une évaluation détaillée de la disponibilité, du coût, de la qualité de ces services au Burundi, il est important que l'environnement général des affaires soit propice à la mise en place de ces services vitaux, à travers notamment des dispositions du code fiscal favorables aux nouvelles petites entreprises constituées dans ces domaines. 11162-05_CH05.qxd:11162-05_CH05.qxd 6/9/08 3:30 PM Page 138 11162-06_App.qxd:11162-06_App.qxd 6/9/08 3:30 PM Page 139 ANNEXE Méthodologie C ette étude sur les sources de croissance rurale est basée sur les principales con- statations faites au cours de six visites de l'équipe au Burundi ainsi que sur une analyse de documents et notes stratégiques choisis. Pendant les visites sur le terrain, l'équipe a pu rencontrer un éventail très complet de représentants d'ONG, de la société civile, du secteur privé, du monde académique ainsi que d'autres parties intéressées. Elle s'est également efforcée d'avoir un contact direct avec des cueilleurs de thé, des producteurs de café et d'autres acteurs importants de la croissance burundaise. Sur la base des informations recueillies, l'équipe du projet a pu: Évaluer les stratégies et initiatives du gouvernement liées au développement agri- cole et dans quelle mesure elles favorisent une augmentation de la productivité et stimulent la réduction de la pauvreté ; Identifier les réformes politiques en attente et les investissements prioritaires nécessaires au développement agricole, telles que la réforme de la filière café et la privatisation de celle du thé. Au cours des douze derniers mois, ce travail a permis d'entretenir des échanges construc- tifs et fructueux avec le Comité de réforme du café et d'autres secteurs qui ont pu utiliser l'équipe chargée de réaliser l'étude sur les sources de croissance rurale comme un réservoir ponctuel d'expertise. Trois aspects du processus SORG sont intéressants à relever : 1. Le gouvernement du Burundi a appuyé l'étude et y a largement participé tout au long de sa réalisation Deux ateliers, accueillis par le Président de l'État ainsi que le second Vice-président, se sont tenus en janvier et mai 2007. Ces ateliers, auxquels participaient les ministres techniques, 139 11162-06_App.qxd:11162-06_App.qxd 6/9/08 3:30 PM Page 140 140 Document de travail de la Banque Mondiale ont aidé à identifier les principaux obstacles à la croissance liés à la prévention des conflits, à l'agriculture, au cadre macroéconomique, au profil de la pauvreté, à l'infrastructure et au climat des affaires. Ils ont également contribué à établir une solide communication avec tous les Burundais. En effet, les deux événements ont été couverts par les radios et la presse locales et ont été largement commentés dans le pays. Un résultat clé de ces ateliers a été de pouvoir discuter de manière ouverte des ques- tions de gouvernance touchant à la gestion des principales sources de revenu comme le café, de mieux faire connaître et d'encourager les processus de développement et de con- sultation indispensables à une mise en oeuvre équitable et efficace des réformes et des investissements. Le gouvernement avait désigné douze comités techniques pour dialoguer avec l'équipe SORG sur les différents rapports de contexte, garantir que le travail s'appuie sur les connaissances existantes et aider à définir des priorités pertinentes. Ils ont passé en revue et commenté de manière très complète les rapports de contexte préparés par l'équipe du projet. En mai 2007, le gouvernement a réaffirmé son intention d'utiliser cette étude en tant que cadre pour la préparation de ses États généraux de l'agriculture, c'est-à-dire pour la formulation de ses stratégies et de son programme. 2. L'analyse a directement alimenté le processus de privatisation de la filière café L'équipe a aidé le gouvernement à s'engager dans d'importantes initiatives pour dévelop- per la production et la vente de cafés de spécialité. Deux visites au Burundi ont été organ- isées cette année à l'intention d'acheteurs potentiels, le suivi et le renforcement de ces initiatives commerciales est déjà planifié. Le gouvernement est en train de préparer une déclaration à présenter au cours d'un important événement qui se tiendra à Portland en Oregon USA (où se trouvent la plupart des acheteurs américains de café de spécialité) et qui bénéficiera d'une large couverture médiatique et d'une vaste audience d'acheteurs de café de spécialité. Cette déclaration devrait aider à accroître leur sensibilisation à l'histoire du Burundi, les assurer de l'engagement du gouvernement à comprendre et à prendre en charge les inquiétudes qui pourraient les empêcher d'acheter du café burundais, et présen- ter aux médias un plan d'action s'attaquant à ces questions. Celui-ci confirmera la libéral- isation des ventes directes à tous les niveaux de la chaîne de commercialisation du café, ainsi que l'engagement du Burundi à faire progresser le processus de privatisation en cours. Un kit de documentation a été préparé pour soutenir la communication avec les médias et acheteurs de café de spécialité internationaux. Un site web dédié au café burundais a été développé. 3. Le rapport complet résume douze rapports de contexte Les rapports suivants ont été discutés au cours des ateliers qui se sont tenus au Burundi et au cours des déjeuners-débats organisés au siège de la Banque mondiale : Analyse macroéconomique, réalisé par MM. Jean Pascal Nguanou, économiste pays pour le Burundi, et Eric Mabushi, économiste 11162-06_App.qxd:11162-06_App.qxd 6/9/08 3:30 PM Page 141 Rompre le cercle vicieux141 Profildelapauvreté,réaliséparMM.QuentinWodon,spécialisteenchefPauvreté et Jean-Paul Zoyem, consultant Case-d'Afrique Sécuritéalimentaire,réaliséparMM.QuentinWodon,spécialisteenchefPauvreté, Jean-Paul Zoyem, consultant Case-d'Afrique et Mme Evaline Dianga spécialiste technique, Programme mondial Alimentation Culturevivrière,réaliséparMM.MichaelMorris,économisteenchefAgriculture et Vincent Glaesener, agroéconomiste (FAO) Élevage,réaliséparMM.MichaelMorris,économisteenchefAgricultureetMarc Moens, spécialiste Élevage (FAO) Pêche,réaliséparM.BaMbaye,spécialistePêcheries(FAO) Cafédespécialité,réaliséparM.DanielClay,professeur(MSU) Horticulture,réaliséparM.DanielClay,professeur(MSU) Réformedelafilièrethé,réaliséparM.EricKacou,DirecteurOntheFrontier(OTF) Infrastructure,réaliséparM.AntonioEstache,conseillersenior,DanielBenitezet Déo-Marcel Niyungeko, spécialistes municipaux senior Ingénierie Diagnostic de la gouvernance, réalisé par Mme Susan Carillo, spécialiste senior Gouvernance Étudeduclimatd'investissement,réaliséparMmeElkeKreuzwieser,spécialiste senior Secteur privé Les rapports de contexte sur le café, le thé et l'horticulture ont été financés par le gou- vernement du Burundi au titre du projet d'appui à la gestion économique. Les rapports sur la culture vivrière, l'élevage et la pêche ont été réalisés grâce au Fonds FAO-CP. Les consultants locaux engagés pour appuyer l'équipe FAO ont été pris en charge par le gou- vernement du Burundi, à travers le projet de réhabilitation de l'agriculture et de gestion durable des terres. Le Partenariat de la Belgique pour la réduction de la pauvreté a apporté un concours financier à l'élaboration du profil de la pauvreté ainsi qu'à l'analyse de la sécurité alimentaire. 11162-06_App.qxd:11162-06_App.qxd 6/9/08 3:30 PM Page 142 11162-07_Ref.qxd:11162-07_Ref.qxd 6/9/08 3:32 PM Page 143 Références bibliographiques Abdulai, A., X. Diao, and M. Johnson. 2005. Achieving Regional Growth Dynamics in Africa Agriculture. Washington, D.C.: International Food Policy Research Institute. Addison. 2001. "Reconstruction from War in Africa: Communities, Entrepreneurs, and the States." Working Paper, CSAE Conference 2001. AFCO/AGRIFOR. 2002. Diagnostic de la Filière Café du Burundi. 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In 2007, the printing of these books on recycled paper saved the following: Trees* Solid Waste Water Net Greenhouse Gases Total Energy 264 12,419 96,126 23,289 184 mil. * Pounds Gallons Pounds CO2 Equivalent BTUs 40" in height and 6-8" in diameter Rompre le cercle vicieux fait partie de la série des documents de tra- vail de la Banque mondiale. Ces documents sont publiés pour diffuser les travaux de recherche de la Banque mondiale et contribuer au débat public. Au cours des quarante dernières années, la croissance économique du Burundi a plafonné en dessous de la moyenne subsaharienne. Marqué par des coups d'État, assassinats de chefs d'État et massacres, le pays a été entrainé dans un cycle de violence et de sous-développement entrecoupé de brèves périodes de paix suivies d'une répression étatique encore plus sévère et de conflits armés. Les accords de paix d'Arusha de 2000, l'accord de Pretoria signé fin 2003 avec le Conseil national pour la défense de la démocratie- Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD), les élections pacifiques de 2005 et le dernier accord de paix de Dar-es-Salaam conclu avec les Forces nationales de libération (FNL) ont ouvert la voie à une période de stabilité relative. Ce fragile processus politique n'a cependant pas connu en parallèle la reprise de la croissance économique constatée dans les pays africains sortant d'un conflit. La présente étude vise à identifier les domaines de l'économie rurale burundaise présentant le plus fort potentiel immédiat de stimulation de la croissance et de consolidation de la paix au cours des trois prochaines années. En tant que premier défi, il s'agit de prendre appui sur les bonnes pratiques internationales et l'histoire burundaise pour développer une base agricole solide, capable de soutenir une croissance durable. Elle se focalise sur les besoins à court terme et propose des réformes de politiques et d'investisse- ments pour relancer la croissance et augmenter la sécurité alimentaire, à travers l'augmentation de la production alimentaire et le renforcement de la compétitivité des cultures d'ex­ portation. Les documents de travail de la Banque mondiale sont disponibles à l'unité ou par souscription, en format imprimé ou en ligne sur Internet (www.worldbank.org/elibrary). ISBN 978-0-8213-7563-1 BANQUE MONDIALE 1818 H Street, NW Washington, DC 20433 USA Teléphone: 202 473-1000 Site web: www.worldbank.org SKU 17563 E-mail: feedback@worldbank.org