L’UTILISATION DE DONNÉES COMPORTEMENTALES POUR AMÉLIORER LES MÉCANISMES DE PRÉPARATION AUX DÉSASTRES, D’ALERTE PRÉCOCE ET DE RÉPONSE EN HAITI TAB LE DE S M AT IÈ R E S 1 Introduction 6 2 Méthodologie et description des données 10 3 Historique et contexte 15 4 Gestion des risques et désastres en Haïti 23 4.1 Modèle opérationnel 23 4.2 Répartition des rôles et acteurs clés 25 4.3 Processus de préparation 25 4.4 Supports de communication 26 4.5 Le processus d’évacuation 26 5 Découvertes essentielles au sujet des obstacles à l’évacuation 29 5.1 Obstacle 1 : Les messages SAP ne sont pas transmis 30 5.2 Obstacle 2 : Les personnes ne comprennent pas les messages d’alerte précoce (SAP) 31 5.3 Obstacle 3 : Les personnes ont des difficultés à intérioriser le niveau de risque 34 5.4 Obstacle 4 : Les personnes ne disposent pas de ressources ou d’abris pour procéder à l’évacuation 35 5.5 Obstacle 5 : Les personnes préfèrent ne pas évacuer 36 6 Propositions pour encourager les personnes à évacuer vers un endroit sûr et en temps voulu. 39 7 Conclusion 44 Bibliographie 46 Annexe 1 – Méthodologie de l’étude de terrain et diagnostic 48 Annexe 2 – Classification des ouragans 50 RE M E RC IE M E NTS C e rapport a été préparé grâce à une équipe de la Banque mondiale composée de Jimena Llopis (Béhavioriste, Pratique globale Pauvreté et équité), Émilie Perge (Économiste, Pratique globale Pauvreté et équité), Zeina Afif (Sociologue Sénior, Pratique globale Pauvreté et équité GP), Claudia Soto Orozco (Spécialiste en Gestion des risques et désastres, Pratique globale de Développement social, urbain, rural et de résilience), Lace Padilla (Consultante, Pratique globale Pauvreté et équité), Jessica Hsu (Consultante, Pratique globale Pauvreté et équité) avec la participation de Cécile Lorillou (Consultante, Pratique globale de Développement social, urbain, rural et de résilience); Ali Alwahti (Consultant, Pratique globale de Développement social, urbain, rural et de rési- lience), Roland Bradshaw (Spécialiste Sénior en Gestion des risques et désastres, Pratique globale de Développement social, urbain, rural et de résilience), et Giovanni Michele Toglia (Consultant, Pratique globale de Développement social, urbain, rural et de résilience) ain- si que sous la direction générale de Oscar Calvo-Gonzalez (Gestionnaire de programme, Pratique globale Pauvreté et équité), Raju Singh (Responsable du Programme, LCC8C) et Pierre-Xavier Bonneau (Responsable du Programme, LCC8C). L’équipe souhaite également remercier Oscar Anil Ishizawa (Spécialiste Sénior en Gestion des risques et désastres, Pra- tique globale de Développement social, urbain, rural et de résilience) pour ses commen- taires sur une version précédente de ce rapport. Ce projet de recherche, y compris la collecte des données qualitatives, a été financé par le Programme Afrique Caraïbes et Pacifique – Union Européenne de Prévention des Risques liés aux Catastrophes Naturelles (ACP-EU NDRR), piloté par la Facilité Mondiale pour la Prévention des Catastrophes et le Relèvement (GFDRR). Ce rapport a bénéficié des échanges entre les membres du gouvernement, les partenaires de développement et les membres de la communauté, y compris des représentants de la Direction de la Protec- tion Civile (DPC) au sein du Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales (MICT), du Ministère de l’Éducation (MNEFP), des municipalités de Paillant et Les Cayes ; du Pro- gramme des Nations unies pour le développement (PNUD), du Bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA), de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) ainsi que de l’Agence des Etats-Unis pour le développement international (USAID). La collecte des données qualitatives a été réalisée par l’équipe avec le soutien de Jessica Hsu, Donald Antoine, James-son Vamblain, Manouchka Justin et Reginald Milfort. L’équipe souhaite remercier les personnes ressources et les participants qui ont pris part aux groupes de discussion et aux entretiens semi-directifs situés à Les Cayes et Paillant dans le département du Sud. Les constatations, interprétations et conclusions exprimées dans cet ouvrage ne reflètent pas nécessairement les opinions du Groupe de la Banque mondiale, de ses administrateurs ou des gouvernements qu’ils représentent. Photo: UPC-DPC 1 Introduction Étant donné la forte vulnérabilité d’Haïti face aux ca- tastrophes naturelles, s’assurer que les mécanismes adéquats de préparation et de réponse aux désastres sont bien établis peut sauver des vies. Durant ces der- nières années, les systèmes tels que les Comités Com- munaux de Protection Civile (CCPC) ont joué un rôle important dans la réduction du nombre de victimes de catastrophes naturelles. Cependant, des obstacles struc- turels et comportementaux ont empêché l’adoption des comportements attendus en matière d’évacuation en Haïti. Ce rapport souligne l’importance des sciences com- portementales dans l’identification des points essentiels d’amélioration des systèmes d’alerte précoce (Early War- ning System – SAP) pour permettre ainsi à chacun d’être évacué vers un lieu sûr avant le passage de phénomènes climatiques extrêmes, comme les ouragans. L’approche comportementale permet de détecter les obstacles psy- chologiques et sociaux qui dépassent les seules notions d’accès ou de coûts. L’objectif de ce rapport est de comprendre, à travers une approche comportementale, les obstacles structurels et comportementaux en Haïti qui ralentissent la prise de décision d’évacuation vers les abris. Notre objectif est d’identifier les points d’entrée essentiels d’amélioration du système d’alerte précoce (SAP) et de permettre ainsi à chacun d’être évacué vers un lieu sûr en prévision du passage d’un ouragan. Ce type d’ap- proche est fondé sur le constat suivant : les personnes pensent de manière automatique et sociale ainsi qu’en fonction de modèles mentaux (Banque 1. Introduction 7 mondiale, 2015). Le cadre d’une problématique, le contexte de la prise de décision ainsi que les détails de la conception de l’intervention jouent un rôle si essentiel dans la détermination du comportement que le fait de ne pas les prendre en compte conduit à une intervention inefficace. Par consé- quent, l’identification des obstacles à la fois structurels et comportemen- taux suppose d’examiner un éventail élargi de facteurs d’influence et de prê- ter attention aux facteurs sociaux, psychologiques ainsi qu’économiques qui ont un effet sur la manière dont les personnes pensent et agissent. À travers une recherche documentaire et des données qualitatives pri- maires (entretiens et groupes de discussion), ce rapport cartographie les décisions et les actions qui influencent les habitants d’Haïti. Il identifie les obstacles qui empêchent les personnes de suivre les systèmes d’SAP et de se mettre à la recherche d’abris sécurisés. Les obstacles sont les suivants : 1. Communication et diffusion des alertes : les messages du SAP ne parviennent pas toujours à la population en raison de ressources et de fonds limités. Lorsque les messages atteignent la population, les personnes souvent ne les comprennent pas en raison d’un langage confus qui n’énonce pas clairement les informations en lien avec le comportement souhaité. De plus, la population ne fait parfois pas confiance au messager. 2. Capacité de préparation et de réponse : les messagers n’ont par- fois pas reçu la formation nécessaire pour procéder à l’évacuation des personnes et les plans de contingence ne sont pas toujours disponibles ni mis à jour. De plus, les personnes manquent d’expé- rience en termes de préparation. La population ne dispose pas des ressources nécessaires pour évacuer et rencontre des difficultés pour accéder aux abris. Leurs expériences antérieures en matière d’abris d’évacuation sont souvent mauvaises. Certains perçoivent les abris comme des lieux peu sûrs puisque les structures ne ré- pondent pas toujours aux obligations ni aux normes de construc- tion, ce qui les amène parfois à choisir de ne pas évacuer vers un abri. 3. Connaissance et intériorisation du risque  : les personnes ont du mal à intérioriser le niveau de risque. Elles ont tendance à le sous-estimer en raison d’un état de déni ou d’une attitude fata- liste. Elles sont également parfois victime d’une certaine myopie puisqu’elles préfèrent rester avec leurs possessions (gains à court terme) plutôt que d’évacuer vers un abri (gains à long terme). Dans un contexte compliqué comme celui d’Haïti, les solutions pos- sibles sont variées  : simplification des messages transmis et des moyens de communication  ; formation des messagers afin qu’ils transmettent des messages concis et persuasifs ; conception de messages clairs afin de 8 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI contrer les attitudes fatalistes ou encore recours au principe d’aversion du risque de perte pour encourager les personnes à intérioriser la notion de risque et à évacuer. Afin de maintenir des abris préservés et de promouvoir des codes de bonne conduite, une personne reconnue par la communauté pourrait être nommée gestionnaire d’abri. Le document qui suit est organisé de la manière suivante : la Section 2 décrit la méthodologie tandis que la Section 3 souligne l’historique et le contexte de situation. La Section 4 détaille le fonctionnement du système de gestion des risques et désastres. La Section 5 explique les obstacles au processus d’évacuation vers des lieux sûrs. La Section 6 transmet les idées essentielles à prendre en compte lors de la conception des interventions. Enfin, la Section 7 donne les points de conclusion. Des informations détail- lées sur la classification des ouragans et le diagnostic des actions conduites sont à retrouver au sein des annexes. Photo: UPC-DPC 2 Méthodologie et description des données Les éléments de preuves fournis par ce diagnostic s’appuient sur une recherche qualitative : revue docu- mentaire, entretiens des personnes ressources clés et travail sur le terrain qualitatif. Le diagnostic a débuté par une revue documentaire approfondie des rapports et documents de recherche existants sur (i) les systèmes d’alerte précoce présents sur le territoire d’Haïti, (ii) une recherche empirique sur les comportements en matière d’évacuation et (iii) des études de cas au sein des pays en développement. Le rapport a permis d’enrichir la section relative à l’historique de même que notre compréhension approfondie du fonctionnement du système actuel de gestion des risques et désastres en Haïti. Une méta-ana- lyse comprenant divers travaux de recherche (Huang, Mi- chael K., & Prater, 2016) nous a permis d’observer qu’à tra- vers le monde les personnes sont plus à même d’évacuer lorsqu’elles possèdent une compréhension précise de la sévérité de la tempête. La sévérité d’un événement de la sorte comporte différentes facettes comme son intensité, les dommages, son point de chute et sa formation sou- 2. Méthodologie et description des données 11 daine. De plus, les personnes ont recours à des règles em- piriques pour déterminer leur niveau personnel de risque, y compris le fait que leurs voisins évacuent ou non et si les commerces de leur communauté ferment leurs portes. Certaines études ont montré que les femmes avec enfants sont plus susceptibles d’évacuer. De nombreuses études de cas d’expériences d’évacuation à Marikina aux Philip- pines, Mumbai en Inde, en Ouganda et en Indonésie ru- rale montrent que la perception du degré de probabilité et d’intensité d’une catastrophe est l’un des facteurs clés d’anticipation du niveau de préparation au risque. Afin de compléter les conclusions des recherches antérieures et de mieux comprendre la nature complexe de ces pro- blématiques autour de la préparation aux désastres, des systèmes d’alerte précoce (SAP) et des mécanismes de réponse en Haïti, l’équipe a interrogé des personnes res- sources essentielles comme la Direction de la Protection Civile (DPC), les parties prenantes à l’échelon national qui collaborent avec la DPC, les partenaires internatio- naux qui travaillent sur la gestion des risques de désastres (GRD) en Haïti (PNUD, USAID, OCHA) ainsi que les ONG. Au total, neuf entretiens ont été menés à Port-au-Prince et ses environs. Des études de terrain qualitatives ont ensuite été menées afin de recenser les expériences, les choix et les perceptions de chacun face au processus d’évacuation en Haïti. L’objectif des études de terrain était de comprendre les obstacles existants au système d’alerte précoce (SAP) ainsi que les facteurs limitant la capacité des personnes à évacuer vers un lieu sûr pendant un ouragan. Les méthodes retenues pour cette étude s’appuient sur 6 groupes de discussion d’utilisateurs ciblés (Focus Group Discussions - FGD) et 16 entretiens semi-directifs (Semi-Structured Interviews - SSI) au sein d’un éventail d’acteurs choisis expressément parmi les 3 catégories suivantes : (i) les CCPC, (ii) les chefs de la communauté et (iii) la population dans sa globalité. Les chefs de la communauté comprennent les enseignants, les équipes salariées et bénévoles de la Croix Rouge, les pasteurs, les cheffes de groupe de femmes, les délégués départementaux et autres (cf. l’Annexe 1 pour davantage de détails). La population globale inclut des hommes et des femmes qui par le passé ont ou n’ont pas procédé à l’évacuation. La diversi- té des personnes interrogées est essentielle en recherche qualitative afin de rassembler des informations plus détaillées sur les comportements et les obstacles face à la nécessité d’évacuer. Les consultants locaux ont transcrit 12 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI en créole les enregistrements audio des groupes de discussion FGD et des entretiens. Les données ont été codées sous Excel. Les sites et les personnes interrogées ont été choisis de manière intentionnelle afin de répondre de la meilleure manière possible aux questionnements de cette recherche. Le choix des sites s’est fait à l’aide d’un processus en deux temps. Nous avons d’abord examiné les sections communales localisées au sein des zones à risque et qui avaient un accès relativement facile vers un abri. La seconde étape a été de vérifier les perfor- mances passées (bonnes ou mauvaises) ainsi que leur localisation (rurale ou urbaine). L’équipe GRD de la Banque mondiale a fourni une liste de 5 sections communales qui remplissaient les critères retenus et les exigences logistiques. Elle a aidé à choisir les municipalités de Paillant (16 000 habi- tants) et de Les Cayes (86 780 habitants), situées respectivement dans le département des Nippes et du Sud. Paillant a été retenu parce qu’il s’agit d’un site rural et en tant que déviant positif1. L’équipe y a visité le Centre d’Études Classiques Théophile.2 Les Cayes (département du Sud) a été choisi parce qu’il s’agit d’un site urbain. L’équipe a visité l’abri situé au sein du Lycée P. Guerrier profitant ainsi d’un accès à un établissement scolaire pour discuter avec les professeurs qui enseignent aux élèves comment réagir en cas d’alerte précoce (SAP). L’analyse des données qualitatives fournit des données approfon- dies sur les diverses expériences, attitudes et perceptions. L’analyse des données qualitatives permet aux chercheurs de découvrir des thématiques inattendues (Fusch et Ness 2015, Tracy 2010). Même si l’analyse des don- nées qualitatives ne privilégie pas la quantité des constats au détriment de leur richesse et de leurs détails, le principe d’un point de saturation a été retenu et suivi. Selon cette règle, le chercheur exploitera les données et ce tant qu’aucune nouvelle thématique ne puisse être identifiée (Fusch et Ness 2015). De même, l’échantillon n’est pas, ni ne prétend être, représentatif de l’ensemble de la population. L’objectif n’est pas de tester les liens de cau- salité ou de généraliser les découvertes mais de recenser les visions et les expériences des personnes, de même que la façon dont elles s’expriment. La stratégie de recrutement a suivi un ensemble de principes is- sus des bonnes pratiques lors du recrutement des profils souhaités. La mobilisation a été mise en place une semaine avant la date prévue grâce 1 Paillant est connue pour ses bonnes pratiques en termes de préparation et de performance des CCPC. L’approche de la déviance positive est une approche des changements comportementaux et sociaux fondée sur le constat que dans toute communauté il existe des personnes dont les comportements et les stratégies inhabituels mais porteurs de succès leur permettent de trouver de meilleures solutions à un problème que leurs paires et ce même s’ils doivent affronter les mêmes défis et ne disposent pas de ressources ou de connaissances supplémentaires ni de stratégies (Wikipédia, 2018). 2 L’équipe avait prévu initialement de visiter l’abri de l’École Note Dame de la Victoire mais l’école n’était pas accessible puisqu’en fonctionnement durant la visite. 2. Méthodologie et description des données 13 à l’aide du Coordinateur technique départemental de la DPC et aux admi- nistrateurs du Conseil d’Administration de la Section Communale (CASEC). Une fois sur le terrain, l’équipe a poursuivi son effort de mobilisation en dis- tribuant des brochures en porte à porte et en étant accompagnée par un membre de la communauté. Comme souvent lors de recherche qualitative, notre étude a rencon- tré un certain nombre d’obstacles lors de sa mise en œuvre. Les dates initialement prévues pour la recherche sur le terrain ont été repoussées en raison des manifestations qui ont gagné l’ensemble du territoire du 15 au 22 octobre 2018. De plus, le CASEC de Paillant a mal interprété certaines instructions de sorte que lors de la première journée de travail des groupes de discussion FGD dans les CCPC, de nombreux membres étaient égale- ment des chefs de la communautés comme des pasteurs, des enseignants ou encore des représentants des services de santé publique. Par consé- quent, l’équipe n’a pas été en mesure d’obtenir leur point de vue en lien avec les autres fonctions qu’ils occupent au sein de la communauté mais uniquement en tant que membres bénévoles des CCPC. Suite au groupe de discussion initial FGD des CCPC, l’équipe de terrain a travaillé en collabora- tion avec le CASEC afin de recruter de nouveaux chefs de la communauté. À Les Cayes, la personne désignée pour aider à la mobilisation n’a sollicité que des chefs de la communauté dont il était proche et n’a pas participé à la mobilisation de la population en général, introduisant ainsi un possible biais au sein des données. L’équipe sur le terrain a fait de son mieux pour mobiliser davantage et dans un court délai la population globale afin de réduire les effets possibles de ce biais. Photo: UPC-DPC 3 Historique et contexte Haïti est un pays fortement exposé aux catastrophes naturelles. Plus de 93% de sa superficie et plus de 96% de sa population sont exposés au risque de deux catastrophes naturelles ou plus et principalement aux ouragans, inon- dations, tremblements de terre et glissements de terrain mais également aux tsunamis et aux sécheresses.(Banque mondiale, 2018). Le pays est fortement sujet aux tremble- ments de terre, créés par l’interaction entre les plaques tectoniques caraïbes et nord-américaine. D’autres catas- trophes naturelles secondaires touchent Haïti tels que les glissements de terrain, les coulées de débris, la liqué- faction du sol et les tsunamis. Le Grand-sud qui inclut les départements de la Grand’Anse, des Nippes et du Sud est plus vulnérable aux risques d’ouragan et les départe- ments du Nord et du Nord-Ouest sont fortement exposés aux risques d’inondation et de tsunami. Les conséquences humaines et économiques de ces désastres ont été particulièrement sévères en raison de l’exposition d’Haïti aux ca- tastrophes, de la grande vulnérabilité de ses infrastructures, de son ex- pansion urbaine non planifiée et de sa fragilité institutionnelle. Entre 1961 et 2012, le pays a été frappé par plus de 180 désastres qui ont causé la mort de plus de 240 000 personnes (Banque mondiale, 2018),3 dont près de 220 000 suite au tremblement de terre de 2010 (Banque mondiale, 2015). En ce qui concerne les conséquences économiques, le tremblement de terre 3 Un événement est considéré comme un désastre selon la base de données EM-DAT si (i) il a causé au minimum 10 décès ; (ii) touché au moins 100 personnes et (iii) fait l’objet d’une déclaration d’état d’urgence ou (iv) conduit à un appel à l’aide internationale. 16 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI de 2010 a détruit l’équivalent de 120% du PIB et l’ouragan Matthew a oc- casionné des pertes et dommages estimés à environ 32% du PIB. De plus, on estime les futures pertes maximales susceptibles d’être causées par des ouragans et des tremblements de terre avec une période de retour de 250 ans à respectivement 1,6 milliards de dollars US (13,3% du PIB 2016) et 2,41 milliards de dollars US (27,5% du PIB 2016) (Banque mondiale, 2018). Le changement climatique augmentera la fréquence et aggrave- ra les effets de ces événements météorologiques extrêmes. En 2017, l’indice Maplecroft a classé Haïti parmi les trois pays au monde les plus vulnérables face au changement climatique (Maplecroft, 2018). Au regard des prévisions d’augmentation des températures allant de 1,2ºC à 2,3ºC d’ici 2100, Haïti devra certainement faire face à une augmentation de la fré- quence et de l’intensité des ouragans ainsi qu’à une multiplication par 2 des périodes de sécheresse (Banque mondiale, 2018). La fréquence accrue des ouragans est déjà évidente lorsque l’on examine l’historique des données (Graphique 1). GRAPHIQUE 1. LES OURAGANS EN HAÏTI (1950-2018) Source : National Hurricane Center https://www.nhc.noaa.gov/aboutsshws.php De plus, Haïti n’a pas été en mesure de diminuer la vulnérabilité de ses infrastructures (bâtiments publics et privés) et de ses bâtiments rési- dentiels à travers une mise en application et un renforcement des lois en matière de construction. Les données disponibles indiquent que les zones de construction en Haïti sont particulièrement vulnérables. La plupart des Haïtiens vivent dans des maisons qu’ils ont construites eux-mêmes sans ex- pertise des techniques adéquates et parmi lesquelles 51% sont exposées 3. Historique et contexte 17 aux phénomènes d’inondation et 60% concentrées dans des zones à fort risque sismique (Banque mondiale, 2017). L’impact de l’ouragan Matthew a mis en évidence la vulnérabilité des infrastructures ; 59% des dommages et pertes causés par l’ouragan ont affecté des infrastructures et des bâtiments résidentiels dont 31% pour le secteur du logement à lui seul. De plus, la fréquence des catastrophes naturelles complique encore da- vantage le relèvement du pays. En 2018, seulement deux ans après le pas- sage de l’ouragan Matthew, un tremblement de terre de magnitude 5,9 a secoué Haïti et causé la mort de 11 personnes (The New York Times, 2018). L’ouragan Matthew (2016) est considéré comme l’ouragan le plus dévastateur qui ait touché Haïti récemment. Lorsque l’ouragan Matthew, alors de catégorie 4, a touché la péninsule ouest d’Haïti, il a occasionné des pertes équivalentes à environ 32% du PIB, causé environ 600 décès et touché plus de deux millions de personnes, tout particulièrement dans les régions au sud d’Haïti (Gouvernement d’Haïti; Nations Unies; Union Euro- péenne; Banque Interaméricaine du Développement et Banque mondiale, 2017) (Carte 1). Même si le nombre de victimes était élevé, les décès asso- ciés au passage de l’ouragan Matthew étaient significativement inférieurs à ceux liés à l’ouragan Jeanne de 2004 (environ 3 000 morts) et à l’ouragan Fay, Gustav, Hanna et Ike de 2008 (environ 800 morts) (Banque mondiale, 2018). Les provinces les plus affectées par l’ouragan Matthew - Grand’Anse, Nippes et Sud – comptent presque 1,6 millions d’Haïtiens (14,5% de la po- pulation nationale, estimée à 10,9 millions en 2015). CARTE 1. RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE ET IMPACTS DE L’OURAGAN MATTHEW 1. Vitesse (mph), par commune 2. Estimation des dommages (USD) sur les infrastructures par commune Source: National Hurricane Center/University College London/ Source: Haiti Rapid Post-Disaster Buildings Economic Loss CNIGS Spatial Team, October 2016 Assessment D-RAS, World Bank 18 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI Un rapport, rédigé dans le cadre du Projet de reconstruction et de gestion des risques et désastres (PRGRD), fait le lien entre la réduction du nombre de pertes humaines et la mise en place des CCPC (Banque mon- diale, 2018). Un CCPC est un comité d’échelon municipal composé de bé- névoles issus de la communauté qui coordonne les premières interventions d’urgence et qui alerte la population du passage des tempêtes et aide les personnes à trouver un abri dans le cadre du système d’alerte précoce (SAP) (Encadré 1). ENCADRÉ 1. COMITÉS COMMUNAUX DE PROTECTION CIVILE (CCPC) Source: DPC Les Comités Communaux de Protection Civile (CCPC) ont en charge l’évacuation des per- sonnes en situation de risque et sont essentiels pour parvenir à sauver des vies. Le rôle des CCPC est crucial au sein du Système National de Gestion des Risques et des Désastres (SNGRD) puisqu’ils se trouvent au plus près de la population et peuvent effectuer du porte-à-porte pour ex- pliquer le système d’alerte précoce (SAP), transmettre les alertes et organiser l’évacuation de leur communauté lorsque le désastre est sur le point d’arriver. Les CCPC sont composés de bénévoles. Ils se sont attaqués avec succès aux événements climatiques les plus sévères, y compris l’ouragan Fay et les tempêtes tropicales Gustav, Hannah et Ike de 2008, le tremblement de terre de janvier 2010, l’ouragan Tomas de 2010 et Matthew en 2016. Dans les zones rurales avec un accès limité aux moyens de communication (téléphones, radio, journaux), les bénévoles peuvent atteindre les populations isolées. 3. Historique et contexte 19 Structure des CCPC Les CCPC sont dirigés par la DPC, à travers les Comités Départementaux de Protection Civile (CDPC). Ils travaillent tout au long du SNGRD : préparation, réponse et relèvement. Il y a un CCPC par municipalité, soit 140 CCPC composés de 3 100 bénévoles qui sont au service de l’ensemble de la population d’Haïti. Les responsabilités des CCPC recouvrent la diffusion des alertes pré- coces, l’évacuation des populations vers des abris et havres sécurisés, la conduite des activités de recherche et de sauvetage, l’offre des premiers secours à la suite d’un désastre et la conduite des premières évaluations de pertes humaines et matérielles. Une fois par an, ils bénéficient d’une série de formations uniformisées dispensées par la DPC sur la manière dont ils doivent effectuer leur travail et qui recouvre les thématiques suivantes  : management interne  ; planification de l’urgence et des interventions, y compris l’alerte précoce, l’évacuation et la protection des po- pulations ; la communication de crise ; la gestion des abris et la cartographie du risque. En plus de cette formation annuelle, les CCPC sont actifs au sein de leur communauté tout au long de l’année. Ils organisent des exercices de simulation et conduisent des campagnes d’information à destination de leur communauté sur l’ensemble des aspects liés à la capacité de préparation. Ils aident aussi la municipalité à préparer et à mettre à jour les plans de contingence. Le caractère bénévole des membres des CCPC les rend vulnérables en raison d’une forte rotation du person- nel. Les bénévoles de CCPC ne sont pas éligibles aux bénéfices, assurance ou remboursement de leurs frais. Évaluation des CCPC La capacité des CCPC s’est notablement améliorée depuis 2013 grâce aux formations standardi- sées proposées par la DPC avec le soutien de différents partenaires. La capacité d’un CCPC est évaluée par la DPAC et chaque CCPC se voit attribuer une note allant de 1 à 4 (excellent à faible), selon la combinaison de facteurs organisationnels et factuels au sein d’un index de performance. Cet index comporte des facteurs en lien avec les institutions représentées au sein des comités, le nombre et la nature des formations proposées (management interne ; planification des réponses d’urgence, y compris les alertes précoces, l’évacuation et la protection des personnes ; la commu- nication de crise ; la gestion des abris et la cartographie du risque) ; la présence ou non d’un plan d’urgence et de contingence ainsi que sa mise à jour ; le nombre d’années d’activité du CCPC ; le niveau d’implication du maire de la municipalité et le niveau de coordination avec la DPC dépar- tementale (Carte 2). 20 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI CARTE 2. NOTATION DES CCPC (1-4) EN 2016 ET 2018 Source : World Bank analysis based on data from the Disaster Risk Management and Reconstruction Project (P126346). Note. CCPC of Category 1 are deemed “Excellent”, those of Category 2, 3 and 4 are evaluated as “Good”, “Average” and “Weak” respectively. Même si la diminution du nombre de victimes des ouragans est en- courageante, Haïti peut encore améliorer sa capacité de résilience aux chocs ainsi que son degré d’exposition. De nombreux obstacles structu- rels ralentissent le gouvernement, la population locale et les ONG dans leur progression en matière de capacité de résilience face aux catastrophes na- turelles. Les bâtiments sont mal construits et les normes de construction sont peu appliquées, rendant les bâtiments des infrastructures haïtiennes vulnérables face aux forces des vents des ouragans (Banque mondiale, 2018). Le système SAP est faible et mis en place de manière incohérente. Selon le Comité Thématique Évacuation et Gestion des Abris Provisoires (CTEGAP), le nombre d’abris d’urgence est insuffisant pour répondre aux besoins de la population d’Haïti, en particulier dans les zones rurales. Une étude approfondie de la présence d’abris accessibles à la popu- lation située dans les régions fortement exposées aux risques d’inonda- tion dans les départements du Sud, de Grand’Anse et des Nippes (Grand Sud) a révélé la nécessité d’étendre et d’améliorer le réseau d’abris. Il y a actuellement 314 abris d’urgence dans le Grand Sud pour une population de 1,6 millions de personnes, dont 447 589 qui vivent spécifiquement dans des régions fortement exposées au risque d’inondation (avec une période de retour de 100 ans). La méthodologie d’analyse multicritère développée par la DPC pour évaluer les besoins en matière d’abris et la hiérarchisation des interventions combine des données de SIG et des champs d’information 3. Historique et contexte 21 qui prennent en compte : (i) le risque d’inondation4 ; (ii) l’accessibilité (rayon de 3 km ou environ 45 minutes de marche) ; (iii) le nombre de personnes à risque au regard de la couverture existante en matière d’abris ; et (iv) les ca- ractéristiques de construction existantes telles que la taille, la disponibilité du terrain et le niveau de destruction post-Matthew ; parmi d’autres. Selon l’étude sur le taux de couverture en matière d’abri menée par la DPC pour le Grand Sud, la capacité additionnelle en matière d’abris est très élevée dans l’ensemble des trois départements. De plus, alors que les données structurelles de vulnérabilité ne sont pas systématiquement disponibles concernant les abris, les expériences tirées suite au passage de l’ouragan Matthew ainsi que les éléments de preuve collectés sur le terrain en amont par la DPC et le Centre National de l’in- formation Géo-Spatiale (CNIGS) ont démontré la faiblesse structurelle et fonctionnelle de la plupart des abris qui n’ont pas été construits pour ré- sister à des événements avec une période de retour de 100 ans. Dans un même temps, les comportements associés à la préparation aux désastres et à l’évacuation peuvent empêcher le pays d’améliorer sa résilience aux chocs (World Bank, 2019). Par conséquent, la DPC travaille à renforcer et à étendre son réseau d’abris d’urgence avec l’aide de la Banque mondiale. 4 Des inondations avec une période de retour de 100 ans ont été utilisées puisqu’associées à des inondations provoquées par un ouragan de forte catégorie. Photo: UPC-DPC 4 Gestion des risques et désastres en Haïti 4.1 Modèle opérationnel L’organisation du Système national de gestion des risques et désastres en Haïti repose sur une structure complexe. Au sein du Ministère de l’In- térieur et des Collectivités Locales, la DPC supervise la conception et la mise en œuvre du Système national de gestion des risques et des désastres (SNGRD) et coordonne les réponses face aux désastres ainsi que la gestion des risques (Graphique 2). La plus haute unité au sein du SNGRD est le Comi- té National de Gestion des Risques et des Désastres (CNGRD), qui rassemble les plus hautes autorités étatiques (y compris la plupart des ministres) et la société civile (Croix rouge). Le CNGRD supervise la planification, l’orga- nisation et la coordination de l’ensemble des actions destinées à réduire les risques et à réagir face aux désastres. Le Secrétariat permanent est en charge de coordonner l’ensemble des actions techniques devant être mises en œuvre durant la catastrophe par le Centre d’opérations d’urgence (COU). Le SNGRD a créé des comités thématiques chargés d’établir des plans de gestion des risques et désastres, un comité consultatif issu de la société ci- vile et un comité international constitué d’organisations internationales et non-gouvernementales qui soutiennent les actions de GRD. GRAPHIQUE 2. PLAN ORGANISATIONNEL DU SNGRD Comité National de Gestion des Risques et Désastres (CNGRD) Présidé par le Premier ministre. Il est constitué de l’ensemble des Ministres et du Président de la Croix rouge en Haïtii Secrétariat permanent pour la GRD Constitué de l’ensemble des points focaux sectoriels Réduction des risques dans les Préparation, réponse et relèvement secteurs d’urgence Comités sectoriels Comité de préparation, de réponse et de relèvement d’urgence Actions de réduction des risques à l’échelon territorial Centre d’Opérations d’Urgence National (COUN), Départemental (COUD), Municipal (COUC) et Local (COUL) Source : Adaptation du Plan National de Gestion des Risques et des Désastres 2019-2030 du Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales, page 43. Les bénévoles au sein des CCPC sélectionnent et soumettent aux maires locaux les bâtiments qui devraient être utilisés en tant qu’abris d’évacuation d’urgence. Le CCPC négocie les conditions d’utilisation de ces structures et s’assure que ces abris répondent bien aux critères suivants établis par la DPC selon son « Guide de Gestion des Abris d’Évacuation » (Se- crétariat Permanent de Gestion des Risques et des Désastres, 2013). 1. Les abris d’évacuation d’urgence ne doivent pas se situer dans des zones inondables ; 2. Ils doivent être proches des personnes vulnérables et des services sociaux de base, y compris les hôpitaux ou les centres de santé ; 3. Ils doivent être accessibles aux personnes handicapées ; et 4. Ils doivent être sécurisés. Parmi les quelques 1 500 abris d’urgence publics identifiés dans le pays par la DPC (constitués d’écoles, de bâtiments municipaux et autres bâti- ments publics comme les tribunaux et les mairies, les centres communau- 4. Gestion des risques et désastres en Haïti 25 taires de même que certains bâtiments privés), plus de 90% sont des écoles. Lorsque les abris d’évacuation d’urgence sont des centres multifonction- nels comme les auditoriums, les églises ou les gymnases, ils doivent être en mesure d’interrompre leur activité en temps et en heure pour être utilisés comme des lieux d’évacuation.5 4.2 Répartition des rôles et acteurs clés Lorsqu’un événement climatique est sur le point de se produire, le Sys- tème d’alerte précoce (SAP) transmet l’information par étapes succes- sives et par le biais de différents agents (Graphique 3). Lorsqu’un ou- ragan approche, les prévisions sont interprétées par les experts de l’Unité Hydrométéorologique d’Haïti (UHM). En cas de situation d’urgence, le Pre- mier ministre déclenche l’état d’urgence et le Bureau du secrétaire devient un Centre d’Opérations d’Urgence National (COUN). Le COUN en informe les délégués départementaux qui à leur tour activent le Centre d’Opération d’Urgence Départemental (COUD). Le COUD en informe les maires qui ac- tivent alors le Centre d’Opération d’Urgence Communal (COUC), dans le- quel théoriquement les maires transmettent l’information au CCPC. Enfin, ce dernier diffuse les informations liées au climat en direction de la popu- lation et procède à l’évacuation des personnes vers les abris nécessaires. GRAPHIQUE 3. VUE D’ENSEMBLE DE LA STRUCTURATION DU SYSTÈME D’ALERTE PRÉCOCE SAP EN HAÏTI COUN COUD COUC Population (activé par le (activé par les (activé par les CCPC globale Premier mnistre) délégués dép.) maires) 4.3 Processus de préparation Des exercices de simulation ont lieu à l’échelon départemental mais ils restent insuffisants pour répondre aux besoins réels. Chaque année, un département sur trois participe à un exercice de simulation organisé par la DPC. Les participants passent deux ou trois jours à simuler les mécanismes qui devront être mis en œuvre durant le passage de l’ouragan de même que le processus global d’évacuation, y compris la gestion de l’évacuation et les opérations. Cependant, ces exercices de simulation restent insuffisants étant donné le degré d’exposition d’Haïti aux catastrophes naturelles. Il 5 Les exigences minimales en matière de facilités comprennent une installation sanitaire pour 50 personnes, une douche pour 30 personnes, 2m par personne (en position debout), 3,5 m par personne (en position assise) et de l’eau en quantité suffisante. 26 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI n’existe pas non plus de compte-rendu standardisé faisant suite aux exer- cices de simulation. Les enseignements tirés de ce processus ne sont pas toujours enregistrés sous forme de documents et des améliorations ne sont pas suggérées de manière systématique pour de futurs exercices de simu- lation.6 4.4 Supports de communication Divers supports de communication sont utilisés pour diffuser les messages d’urgence auprès de la population : 789 Support Processus Les messages SAP sont transmis par la radio nationale d’Haïti de même que par des radios Radio commerciales et communautaires, en FM tout comme en AM. AGERCA7 et CONATEL8 envoient des SMS sur les téléphones portables et par le biais des SMS médias sociaux. Annonces au sein Les chefs des communautés sont encouragés à diffuser les messages SAP dans les écoles, les des espaces publics églises et les marchés. Les bénévoles circulent à travers la communauté, équipés de mégaphones ou de sirènes. Ils Mégaphones communiquent les informations au sujet de la tempête. Dans les zones à haut risque9, les bénévoles rendent visite aux personnes à leur domicile et Porte-à-porte leur annoncent l’approche d’une tempête tout en les incitant à évacuer rapidement et avant l’arrivée de la catastrophe. Dans certaines zones éloignées dans lesquelles toute forme de communication est impossible, un système de drapeau a été mis en place pour transmettre l’alerte. Les drapeaux Système de de trois couleurs différentes (rouge, jaune et vert) sont levés pour indiquer l’intensité de drapeaux la tempête. Les drapeaux peuvent être installés dans les marchés, les montagnes et les principales intersections. 4.5 Le processus d’évacuation Dans l’idéal, le processus d’évacuation commence bien avant que la tempête, l’ouragan ou l’inondation ne frappent les habitants des com- munautés. Les communautés et les foyers sont encouragés à posséder un plan d’évacuation de manière à ce que les familles sachent quelles actions 6 Entretiens avec les personnes ressources, Octobre 2018. 7 L’AGERCA est une institution qui représente le secteur privé ainsi que techniquement la société civile au sein du secrétariat qui gère les catastrophes dans le pays (SNGRD). 8 CONATEL est l’institution nationale en charge des questions réglementaires en lien avec la stratégie de communication du pays. 9 Il n’existe aucune définition précise des zones à haut risque mais elles sont en général définies comme des zones susceptibles d’être sujettes à au moins une fragilité. 4. Gestion des risques et désastres en Haïti 27 entreprendre, ce qu’il faut préparer et où aller dans l’éventualité d’un évé- nement climatique. Une fois que l’information SAP est reçue, les personnes sont encouragées à regagner un abri familial (c’est à dire une maison plus solide appartenant à un ami, voisin ou membre de la famille, etc.). Si les foyers ne disposent pas d’un abri familial, il leur est demandé de chercher refuge au sein d’un abri d’évacuation d’urgence avant l’arrivée de l’ouragan. Les personnes ne sont pas censées rester dans ces lieux d’évacuation plus de 72h après le passage de la tempête. Ils doivent alors retourner à leur do- micile. 28 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI Photo: UNDP 5 Découvertes essentielles au sujet des obstacles à l’évacuation Les recherches démontrent que de nombreuses victimes peuvent être épargnées si les personnes évacuent vers un lieu sûr en temps voulu. Le principal problème que nous nous efforçons de résoudre en Haïti est que les personnes ne procèdent pas à l’évacuation suffisam- ment tôt lorsqu’un ouragan approche. Cinq principaux obstacles entravent l’évacuation des personnes en temps et en heure. Nous avons analysé les obstacles comporte- mentaux et structurels puisque tous deux peuvent être surmontés à l’aide d’une approche comportementale. Les conclusions de cette section ont également été identifiées dans les recherches comportementales qui traitaient de la perception du risque (Milch, Broad, Meyer, et Robert, 2018) et (Kunreuther et Meyer, 2017). 30 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI 5.1 Obstacle 1 : Les messages SAP ne sont pas transmis Sur le papier, le plan de communication d’Haïti fonctionne. Mais en pra- tique, il n’existe aucune méthode efficace et sûre pour transmettre l’infor- mation d’une tempête en approche à l’ensemble de la population. Comme le mentionnait un des participants : « Je ne savais pas que l’ouragan Mat- thew approchait… » (Groupe de discussion FGD, Femme, Paillant). L’équipe a relevé un manque d’efficacité à chaque niveau de l’ensemble des canaux de communication, tout particulièrement en ce qui concerne les zones rurales qui sont en général les plus vulnérables. Facteur 1. Des ressources et des financements limités pour l’ensemble des niveaux • La DPC dispose d’un budget opérationnel limité, ce qui entrave sa capacité à remplir certaines tâches comme la formation, la coor- dination globale, la communication, l’accompagnement, les ré- ponses et le soutien dans les situations d’urgence. • Les bénévoles disposent d’un accès limité à l’équipement ou aux ressources nécessaires pour exécuter leur rôle. Souvent, ils em- pruntent des véhicules privés ou financent eux-mêmes les coûts de transport. S’ils ne disposent pas d’un accès constant à des motos, ils ne peuvent pas accéder de manière rapide et efficace dans les zones de terrain plus difficile. • La population souffre du manque d’appareils nécessaires pour faire circuler les messages d’alerte SAP. La plupart des personnes ont accès à leur propre téléphone ou radio ou à ceux d’un voisin mais il n’est pas garanti que le réseau fonctionne. La plupart n’ont pas les moyens pour acheter des batteries ou un forfait de commu- nication et comme l’expliquait un bénévole : «  Nous pouvons faire plein de choses avec les téléphones mais fréquemment, durant les catastrophes, les réseaux de Natcom et Digicel cessent de fonction- ner. S’il y avait une autre manière de communiquer, peut-être par des téléphones par satellite, cela nous aiderait beaucoup. » (Groupe de discussion FGD, CCPC, Les Cayes). Facteur 2. L’absence de standardisation des moyens de transmission des alertes SAP • Il n’existe pas toujours un niveau de communication élevé entre les différents ministères sectoriels, ce qui affecte la coordination entre l’ensemble des niveaux. 5. Découvertes essentielles au sujet des obstacles à l’évacuation 31 • Certaines confusions persistent sur l’identification de la CCPC comme responsable d’une zone donnée. Ainsi comme l’expliquait cet homme : « À chaque fois qu’un ouragan est supposé arriver, une personne de la protection civile passe en moto et arrive juste à l’in- tersection. Lorsqu’ils arrivent à la dernière intersection, ils arrêtent de parler et de faire sonner la sirène puis ne vont nulle part ailleurs. » (Groupe de discussion FGD, Homme, Paillant). • L’absence de standardisation rend difficile l’identification des régions ayant reçu les messages d’alerte et de celles qui doivent encore être informées. Avant l’ouragan Matthew, certains foyers recevaient plusieurs visites de bénévoles alors que d’autres n’en recevaient aucune. • Les moyens de communication de l’information varient selon les régions. Dans de nombreux cas, elle est transmise par le biais des ONG internationales en contournant la DPC. De plus, les ONG ne sont pas toujours présentes sur le terrain. • L’information véhiculée par de multiples canaux de communica- tion tout particulièrement dans les zones urbaines peut devenir confuse. Facteur 3. Des messagers inexpérimentés • Les CCPC sont composés de bénévoles non rémunérés. Cela créé une importante rotation du personnel et donc un besoin régulier de formation. Les nouveaux membres n’ont aucune expérience lorsqu’ils commencent. Les maires ne comprennent pas toujours leur rôle dans la gestion des désastres. Ils manquent de formation et de compréhension quant au rôle de protection civile. Cela pose des difficultés puisqu’il est de la responsabilité du maire d’activer le COUC et de travailler en étroite collaboration avec le CCPC. Comme le disait le Directeur général de Les Cayes : « Personnellement, ce n’est pas un rôle que je suis en mesure de jouer. Je ne suis qu’un membre de la municipalité de Les Cayes. Laissez-moi vérifier parce que je ne suis pas en mesure de m’exprimer en mon nom propre mais c’est la direction civile qui est responsable. » (Interview, Le Maire, Les Cayes). 5.2 Obstacle 2 : Les personnes ne comprennent pas les messages d’alerte précoce (SAP) Lorsque l’information arrive, les messages ne sont pas toujours adaptés de manière à ce qu’une personne lambda en Haïti puisse les comprendre. De 32 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI plus, ils sont rarement confirmés par des sources fiables. Par conséquent, les personnes ne savent pas toujours où aller ni quoi faire ni ne ressentent l’urgence de la situation. Facteur 4. Des messages peu clairs • Les messages ne sont pas toujours adaptés aux niveaux locaux d’éducation et d’alphabétisation. Par exemple, l’échelle de Saf- fir-Simpson qui permet de classifier les cyclones tropicaux selon une échelle d’intensité des vents allant de la catégorie 1 à la ca- tégorie 5 (Annexe 2) n’est de manière générale pas explicite pour la population d’Haïti. Comme le suggérait le Directeur général  : «  Les différentes catégories devraient être plus facilement compré- hensibles par les personnes. Elles devraient être présentées d’une manière qui permette aux personnes de les comprendre, à travers un langage qu’elles comprennent. Peut-être, à travers des mots comme plus lourd, plus léger ou plus violent. » (Interview, Maire, Les Cayes). • Même si certaines personnes semblent être familières avec le sys- tème de drapeaux, la population ne sait pas vraiment ce que les trois couleurs signifient. Ces personnes n’ont parfois pas vu les dra- peaux même si elles connaissent l’endroit où ils sont supposés se trouver. Facteur 5. Méfiance envers les messagers • Il existe un sentiment global de méfiance envers l’État et ses re- présentants. Les négligences passées ont conduit la population à les percevoir comme des personnes qui privilégient avant tout leur propre intérêt et leur porte-monnaie. C’est ainsi qu’un délé- gué nous expliquait  : «  Si tu attends après l’État, tu peux toujours attendre ! » (Interview, Délégué, Les Cayes). • Même si les bénévoles au sein des CCPC sont des membres de la communauté, ils peuvent être perçus comme des représentants de l‘État ou des ONG. La population ne saisit pas toujours pleinement le rôle de bénévole. Comme l’un d’eux nous l’expliquait : « Certaines personnes peuvent penser que tu ne dis pas la vérité et qu’il s’agit d’une fausse alarme. ». (Groupe de discussion FGD, CCPC, Les Cayes). • La probabilité et les conséquences d’un désastre ne peuvent pas être prédites avec exactitude en raison des changements de tra- jectoire de la tempête. Par conséquent, de fausses alertes peuvent être transmises aux personnes qui ne subiront au final aucun dom- mage. On court alors le risque de connaître un effet « cry wolf » (crier au loup, fausse alerte) (Kunreuther & Meyer, 2017), ce qui vient ter- nir la crédibilité du messager. 5. Découvertes essentielles au sujet des obstacles à l’évacuation 33 Facteur 6. Manque d’expérience et d’exercices de simulation antérieurs au passage d’un ouragan • Même si l’ouragan Matthew est maintenant gravé dans la mémoire des gens, particulièrement dans la Péninsule sud-ouest, les per- sonnes avaient jusqu’alors peu d’expérience en matière d’ouragan avant qu’il ne frappe leur pays. Comme le mentionnait un ensei- gnant  : «  Nombreux sont ceux qui comprenaient les alertes, mais quant aux autres… Laissez-moi vous raconter, c’est un peuple qui a besoin de voir pour croire. En ce qui me concerne, j’ai connu le pas- sage de l’ouragan Allen et je ne veux pas revivre cette expérience ! ».” (Interview, Enseignant, Les Cayes). Certaines personnes souffrent d’amnésie, une tendance à oublier trop rapidement les leçons ti- rées des désastres passés. (Kunreuther & Meyer, 2017). • La population n’accorde peut-être pas assez d’importance aux ac- tions de préparation comme les exercices de simulation annuels en raison des biais suivants  : les actions de préparation ont un coût immédiat pour des bénéfices futurs incertains. • Même si des exercices de simulation sont menés chaque année, ces exercices sont insuffisants pour former de manière adéquate l’en- semble des acteurs impliqués dans le système d’alerte précoce SAP ainsi que la population dans sa globalité, le tout étant aggravé par l’absence d’actions de préparation au sein des écoles. Facteur 7. Des informations faibles, erronées ou inadéquates concernant les meilleurs comportements à adopter dans le cas d’un désastre. • Les messages demandent en général aux personnes de retirer leurs animaux des ravines, sans explication quant à la raison ou les conséquences possibles s’ils ne suivent pas cette recommandation. • Les messages transmis demandent de se tenir éloigné des fenêtres alors que la plupart des personnes ne possèdent pas de fenêtres vitrées. • On a observé que certaines personnes emmènent leurs animaux dans la montagne pour les attacher près des rivières, en dépit du risque de montée des eaux ou de crue des rivières. • La population ne sait pas qu’elle réside dans une zone à haut risque ni d’ailleurs ce qui définit une zone à haut risque. De plus, la DPC ne détient pas de définition précise de ces zones ce qui peut conduire à davantage de confusion. 34 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI 5.3 Obstacle 3 : Les personnes ont des difficultés à intérioriser le niveau de risque Même dans le cas où l’information leur parvient et qu’elle est comprise, les personnes ne réalisent pas ou n’acceptent pas le réel niveau de risque. La plupart refusent d’intégrer l’information reçue (état de déni) juste parce qu’elles ne veulent pas y croire. D’autres pensent qu’elles ne peuvent pas faire grand-chose pour se sauver (attitude fataliste) et préfèrent donc rester avec leurs possessions plutôt que d’essayer de sauver leur vie. Facteur 8. Sous-estimation du niveau de risque • État de déni : Les personnes tendent à sous-estimer la probabi- lité des événements négatifs en raison de l’absence de références historiques ou d’expériences antérieures. La religion est également fortement présente au sein de la société haïtienne. D’un point de vue culturel, la plupart ne croient que ce qu’ils voient et pensent que Dieu ne laisserait pas un tel désastre se produire. D’après son expérience, une femme nous disait : « J’ai entendu parler de Mat- thew à la radio et lorsque j’en ai parlé à différentes personnes autour de moi, elles m’ont dit que je mentais parce que Dieu ne laisserait jamais une telle chose arriver et tout le monde disait que c’était entre les mains de Dieu. Ils dirent de se mettre à prier et ils commencèrent à prier… », (Groupe de discussion FGD, Femme, Les Cayes). • Attitude fataliste : En raison de la lutte quotidienne à laquelle la plupart des Haïtiens doivent faire face, ils développent une attitude fataliste quant aux chocs possibles liés aux catastrophes naturelles. La plupart pensent que Dieu les protégera ce qui provient probable- ment de leur foi mais également des conditions socioéconomiques qui ne leur laissent pas d’autres choix que de s’en remettre à Dieu. Comme l’expliquait une femme interrogée : « Tu te prépares comme tu le peux, en fonction de tes moyens. Si tu n’as rien, tu es à la merci de Dieu car sans ressource, tu ne pourras probablement pas rester en vie.», (Groupe de discussion, FGD, Femme, Paillant). Facteur 9. Myopie temporelle et spatiale • Lorsqu’elles se retrouvent face à la décision d’évacuer, les per- sonnes se focalisent sur leurs possessions plutôt que sur leur vie, expérimentant le phénomène de myopie – c’est à dire la tendance à prendre des décisions qui privilégient les gains à court terme lors- qu’elles évaluent les coûts immédiats, au dépend des gains à long terme. Les bénévoles ont remarqué qu’ils avaient besoin de rappe- 5. Découvertes essentielles au sujet des obstacles à l’évacuation 35 ler aux personnes que la chose la plus importante était de sauver leur vie et que tout le reste ne venait qu’en seconde position. Cela est sûrement dû à une combinaison de leurs conditions socioéco- nomiques et de leur ressenti face à la menace créée par la catas- trophe. • Les abris d’urgence n’acceptent pas le bétail, ce qui suppose donc pour les personnes de le laisser derrière eux. Le bétail (chèvres, ânes, chevaux) reste la principale source d’activité et de revenus pour les foyers. Beaucoup craignent la présence de pillards immé- diatement après le passage de l’ouragan, et tout particulièrement s’ils n’avaient pas les moyens de sécuriser leur domicile (portes ou verrous solides). Pratiquement aucune patrouille de police suscep- tible de décourager les voleurs ne circule dans les rues. C’est pour- quoi, leur préférence va vers le fait de rester à la maison, espace familier et protégé. 5.4 Obstacle 4 : Les personnes ne disposent pas de ressources ou d’abris pour procéder à l’évacuation Même lorsque les personnes intègrent les niveaux de risque, elles ren- contrent des problématiques structurelles qui les empêchent d’évacuer. La plupart des personnes ne disposent pas d’un abri près de leur maison, ce qui rend impossible d’obéir aux messages d’alerte. Dans les zones ru- rales en particulier, le manque d’abris d’évacuation en mesure de résister aux forces des vents d’ouragan est étendu. Les personnes peuvent égale- ment souffrir d’une absence de transports ou ne peuvent simplement pas rejoindre les abris d’évacuation. Facteur 10. Absence des ressources nécessaires à l’évacuation. • La qualité des véhicules et des routes ainsi que l’accès limité freinent la capacité de chacun à évacuer. • La localisation des personnes vulnérables (personnes avec une mo- bilité réduite, enfants, personnes âgées) n’est pas répertoriée sur une carte et de ce fait reste inconnue des bénévoles. Facteur 11. Absence d’accès vers les abris • Certains abris sont fermés avant que les désastres n’arrivent. Comme la plupart des abris sont des écoles, il est de la responsabi- lité du Ministère de l’Éducation Nationale en collaboration avec le 36 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales de s’assurer que les écoles sont ouvertes une fois l’alerte donnée par la DPC. Dans certains cas, des personnes ont été obligées de partir à la re- cherche de la personne détenant les clés de l’école. Obstacle 5 : Les personnes préfèrent ne pas évacuer Etant donné que les personnes ne sont pas forcées d’évacuer, certaines préfèrent rester à leur domicile en espérant pouvoir attendre la tempête et en pensant que regagner un abri serait bien plus dangereux que de rester (biais d’omission). Les participants ont mentionné préférer trouver refuge chez des amis ou de la famille plutôt que de regagner un abri d’évacuation d’urgence. Facteur 12. Expériences insatisfaisantes dans les abris d’évacuation d’urgence • Non géré. Les bénévoles ou membres de la société civile qui ont bénéficié d’une formation adéquate sont supposés administrer et établir les règles des abris. Mais, ces règles et codes de conduite ne sont pas garantis. Leur présence et leur capacité de supervision limitées sont susceptibles de créer des espaces peu sûrs, souvent surpeuplés et avec des problématiques d’hygiène. • Insécurité. La DPC a mis en place des consignes précises afin de garantir la sécurité au sein des abris (Secrétariat Permanent de Gestion des Risques et des Désastres, 2013), mais le manque de ressource rend la supervision aléatoire. Les abris d’évacuation d’urgence ne disposent pas de zones réservées pour les femmes et les enfants. Les jeunes hommes boivent souvent de l’alcool, fument et écoutent de la musique forte dans les abris. Il n’y a pas d’intimité et les personnes sont responsables de leur propre sécu- rité ainsi que de celle de leurs affaires. Les bénévoles ont rapporté des cas d’agression sexuelle, tout particulièrement dans les zones urbaines : « Il y a parfois des cas d’agression sexuelle et de viol qui ne sont pas reportés au sein des abris. » (FGD, CCPC, Les Cayes). De nombreux cas restent non déclarés en raison de la stigmatisation et parce que le coupable est parfois connu de la victime. Dans d’autres cas, les hommes bénéficient d’aide humanitaire et utilisent cette aide pour exercer un chantage (sexe transactionnel). Il y a égale- ment des cas de vol. • Des ressources insuffisantes. La plupart des personnes ne voient pas pourquoi elles devraient se rendre dans un abri d’évacuation 5. Découvertes essentielles au sujet des obstacles à l’évacuation 37 d’urgence étant donné le manque de ressources comme l’eau, la nourriture, les fournitures de premier secours ou de soin, la pré- sence de lits et de draps. Il n’existe pas de liste recensant ce qui doit être stocké dans l’abri en préparation au désastre. Environ 90% des abris ne disposent pas d’installations sanitaires EAH adéquates (eau, assainissements et hygiène) comme des toilettes, des latrines et de l’eau courante. La plupart des abris d’évacuation d’urgence n’ont pas d’électricité ni de lumière ni de lampe de poche. Ils ne disposent d’aucun matériel de nettoyage ni d’ustensiles de cuisine. Lorsque les distributions de matériels ont lieu, elles restent peu fré- quentes et insuffisantes. Facteur 13. Les abris ne respectent pas les codes ni les normes de construction • Les abris d’évacuation d’urgence dans les municipalités les plus touchées par l’ouragan Matthew ont été soit endommagés soit détruits. La plupart sont restés en très mauvais état : « Heureuse- ment et grâce à Dieu, nous n’avons pas subi de nouvel ouragan après Matthew. Nous n’aurions pas pu survivre à un nouvel ouragan pour l’instant, surtout que nous ne nous sommes toujours pas remis du passage de Matthew. En octobre, nous n’avons connu que 7 à 8 jours de pluie, ce qui a supprimé notre récolte de pois d’Angole qui sert d’habitude à payer les frais de scolarité. C’est comme si on ajoutait encore et toujours un abcès sur la plaie. » (Interview, CASEC, Paillant). • Les abris familiaux sont encore moins respectueux des normes et des codes de construction, souvent en raison des réglemen- tations non appliquées ou de conditions socioéconomiques dif- ficiles. Comme l’expliquait une responsable  : «  Haïti a un énorme souci avec ses dirigeants et l’État ne joue pas son rôle. Les personnes construisent n’importe comment et n’importe quand.  » (Interview, Responsable féminine, Les Cayes). Photo: UNDP 6 Propositions pour encourager les personnes à évacuer vers un endroit sûr et en temps voulu L’équipe suggère de concevoir des mesures afin d’antici- per les biais et les obstacles qui contribuent à empêcher les personnes d’évacuer. Les recommandations compor- tementales (Tableau 2, Colonne 4, en gras) incluent la simplification et la visibilité des informations et des pro- cédures essentielles, la diffusion en temps et en heure des messages, le changement des mentalités en matière de perception du risque et de l’évacuation ainsi qu’un ren- forcement du sentiment de confiance envers les membres des CCPC. 40 TABLEAU 2. OBSTACLES ET PROPOSITIONS D’INTERVENTIONS Obstacles Obstacles Cible (par l’intermédiaire de la Propositions d’intervention (en gras, éventuelles comportementaux et DPC) recommandations comportementales conseillées) structurels 1. Ressources et financements • S’assurer que les financements limités sont utilisés de manière Acteurs SAP limités à tous les échelons efficace et transparente et ce à tout échelon 2. Manque de standardisation • Simplifier les canaux de communication et créer un plan unique de Les messages SAP ne de la manière dont les Canaux de communication messagers contingence sont pas transmis informations SAP sont SAP • Constituer une cartographie du degré de vulnérabilité et des transmises ressources (Diffusion et communication des messages d’alerte) • Former les messagers aux messages conçus de manière Messagers SAP, population globale comportementale 3. Messagers inexpérimentés • Mesures d’incitation non monétaire (reconnaissance sociale potentielle) pour les CCPC pour éviter une forte rotation de l’emploi • Simplifier les messages SAP à travers des graphiques participatifs (Groupe de discussion FGD), y compris par la Les personnes ne création et le test de visuels pour illustrer les différents types et comprennent pas les niveaux de menace Messages et messagers SAP et messages SAP 4. Messages confus population globale • Campagne de communication détaillant et expliquant les différents types et niveaux de menace (visuels simplifiés et marquants) (Diffusion et communication des • Travail avec les ONG sur le terrain messages) • Campagne de communication visant à promouvoir la fonction 5. Défiance envers les de bénévole au sein des CCPC Population globale messagers • Impliquer les chefs religieux dans la communication des messages EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, HAITI Obstacles Obstacles Cible (par l’intermédiaire de la Propositions d’intervention (en gras, éventuelles comportementaux et DPC) recommandations comportementales conseillées) structurels • Liste ordonnée pour aider les personnes à se préparer et à utiliser les médias sociaux pour circuler • Mener des exercices locaux de simulation avec les enfants 6. Absence d’expérience (concevoir des protocoles accompagnés de visuels) antérieure en matière Acteurs SAP, population globale Les personnes ne d’ouragan • Campagnes de communication juste en amont de la saison comprennent pas les des ouragans (comme des feuilletons télévisés) qui incluent la messages SAP possibilité d’utiliser la transmission de messages se rapportant à des expériences localisées (comme l’ouragan Matthew), et d’en communiquer la sévérité (# décès) (Diffusion et communication des • Réglementation du zonage qui améliore la communication sur les messages) risques et adapte les messages au contexte local 7. Information insuffisante, erronée ou inadéquate • Transmission de messages adaptés à chaque localité sur les meilleurs Acteurs SAP, population globale comportements en cas de • Travailler avec les CCPC à l’élaboration de messages spécifiques désastre selon les régions • Plan d’action selon le niveau de risque (1,2, 3, etc.) • Expliquer clairement les conséquences des catastrophes et avoir 6. Propositions pour encourager les personnes à évacuer vers un endroit sûr et en temps voulu 8. Sous-estimation du niveau recours aux médias sociaux de risque Les personnes • Transmettre des messages clairs et simples pour contrer les éprouvent des Population globale • État de déni attitudes fatalistes (accentuer le taux de survie pour ceux qui ont difficultés à été précautionneux) intérioriser le risque • Attitude fataliste • Concevoir des plans avec le voisinage (résilience communautaire) (Connaissance • Construire des abris d’évacuation d’urgence disposant d’un espace du risque et pour le bétail intériorisation) 9. Myopie temporelle et Acteurs SAP, population globale • Messages d’alerte plus clairs centrés sur le sauvetage de vies en spatiale priorité, le reste étant secondaire (comme les messages autour de l’aversion pour la perte) 41 42 Obstacles Obstacles Cible (par l’intermédiaire de la Propositions d’intervention (en gras, éventuelles comportementaux et DPC) recommandations comportementales conseillées) structurels Les personnes n’ont pas 10. Manque de ressources Population globale, CCPC • Encourager les familles à mettre en place des plans d’urgence en suffisamment accès aux nécessaires pour évacuer amont des catastrophes ressources et aux abris • Cartographier les zones avec personnes vulnérables • Coordination par le CCPC à l’avance des véhicules disponibles (Capacité de préparation 11. Accès insuffisant aux abris Population globale • Identifier un champion au sein de la communauté en charge d’ouvrir et de réponse) d’évacuation d’urgence chaque abri • Reconnaissance sociale du CCPC (ou de quelqu’un au sein de la communauté) afin de les encourager à gérer les abris • Envisager d’utiliser les Églises qui sont mieux gérées et pour 12. Expériences insatisfaisantes lesquelles les personnes ont un plus grand respect lors d’évacuation vers des abris d’urgence • Séparer les espaces réservés aux femmes et aux enfants Les personnes Population globale, CCPC et • Absence de gestion • Avoir recours à des images culturelles pour promouvoir un préfèrent ne pas gouvernement d’Haïti code de bonne conduite au sein des abris (comme des citations évacuer • Insécurité religieuses imprimées sur le sol) • Ressources insuffisantes • Créer une appropriation des abris et s’assurer de distribuer les (Capacité de soins de manière équitable préparation et de • Maintenir les personnes occupées au sein des abris et rendre ces réponse) abris plus joyeux (encadrée comme un gain’) 13. Les abris ne respectent • Renforcer la loi sur les codes et les normes de construction pas les codes et normes de Gouvernement de Haïti • Prix de reconnaissance sociale attribués aux abris qui construction répondent aux exigences des codes et normes de construction EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, HAITI Photo: UNDP 7 Conclusion De nombreux obstacles interfèrent avec la prise de déci- sion des Haïtiens lorsqu’ils se trouvent face à une catas- trophe naturelle. Pour être en mesure d’évacuer vers un lieu sûr, la population a besoin de recevoir l’information en temps voulu, de comprendre le message transmis par le messager et d’y accorder sa confiance, d’intérioriser le risque et de savoir quoi faire et où aller. Ce rapport souligne que ce n’est pas souvent le cas. La plupart du temps, la po- pulation ne reçoit pas les messages d’alerte en raison de freins organisationnels et financiers, par ailleurs évitables. Parfois les messages arrivent mais ils sont peu clairs ou la population ne dispose pas d’une expérience suffisante en matière de préparation pour savoir comment réagir. Cette recherche a également constaté la présence de nombreux obsta- cles qui contribuent au choix exprimés des personnes de rester à la maison. Non seulement il est difficile de croire que l’ouragan va frapper votre mai- son mais il est également aisément compréhensible d’avoir peur de laisser son bétail derrière soi. De plus, les personnes qui ont eu une mauvaise ex- périence avec les abris d’évacuation d’urgence peuvent préférer désormais les éviter. Enfin, elles n’ont souvent pas accès ni aux ressources nécessaires pour évacuer ni à un abri d’évacuation d’urgence, ces deux obstacles empê- chant toute évacuation. Les interventions suggérées n’ont pas besoin d’être onéreuses ni com- plexes. La plupart des recommandations ajustent, améliorent et simpli- fient les systèmes existants en utilisant une approche centrée sur l’humain. L’équipe propose d’adopter une approche itérative et adaptative pour concevoir et tester des solutions avant de les mettre en œuvre à plus grande échelle. Cette approche garantira des solutions conçues en fonction de la 7. Conclusion 45 réalité sur le terrain et qui tiennent compte de l’état d’esprit, des croyances et des obstacles actuels au sein de la population ciblée. Nous comptons ti- rer profit des raccourcis ou des règles empiriques connus pour simplifier les décisions en présence d’une catastrophe. Ceci étant dit, l’équipe recon- naît également l’importance des obstacles structurels et recommande à l’équipe GRD de la Banque mondiale ainsi qu’au gouvernement d’Haïti de s’adresser à la population d’une manière plus globale si l’on veut parvenir à un système d’alerte précoce SAP plus efficace. Les conclusions de ce rapport ont été intégrées à la conception du Pro- jet de renforcement de la gestion des risques et désastres et de résilience climatique (P165870) de 35 millions de dollars US. Ce projet vise à amélio- rer (i) la capacité d’alerte précoce et d’évacuation d’urgence dans les muni- cipalités sélectionnées parmi les zones à fort risque climatique et (ii) la mise à disposition et l’accessibilité des abris d’évacuation d’urgence ou « havres sécurisés ». Le projet s’articule autour de 4 composantes : renforcement de la capacité de préparation aux désastres et de réponse d’urgence en insis- tant sur le renforcement des CCPC et la promotion d’une réglementation de la construction et de pratiques de construction résilientes ; construction et réhabilitation des « havres sécurisés » ; réponse de contingence et d’ur- gence ; et aide à la gestion de projet et à leur mise en œuvre. Le Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales, à travers la DPC, sera respon- sable de la mise en œuvre du projet. Diverses institutions seront les bénéfi- ciaires directs des actions de ce projet, y compris le BTB/MTPTC, le CNIGS et le Ministère de l’Éducation (MENFP). PRINCIPAUX AUTEURS Claudia Soto Orozco, Spécialiste en GRD (SLCUR) Émilie Perge, Économiste (ELCPV) Jessica Hsu, Consultante (ELCPV) Jimena Llopis, Béhavioriste (eMBeD) (EPVGE) Lace Padilla, Consultante (ELCPV) Zeina Afif, Chercheuse Sénior en Sciences sociales (eMBeD) (EPVGE) PRINCIPAUX CONTRIBUTEURS Ali Alwahti, Consultante (SLCUR) Cecile Lorillou, Consultante (SLCUR) Giovanni Michele Toglia, Consultant (SLCUR) Roland Alexander Bradshaw, Spécialiste Sénior en GRD (SLCUR) 46 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI B IB LIOG RAPHIE Banque mondiale. (2015). Systematic Country Diagnostic. Haiti. Toward a New Narrative. Washington DC: The World Bank Group. Banque mondiale. (2015). World Development Report: Mind, Society and Be- havior. Washington DC: WBG. Banque mondiale. (2017). Haitian Cities: Actions for today with an eye on to- morrow. Washington DC: World Bank Group. Banque mondiale. (2018). Haiti Country Risk Profile. Washington, D.C.: World Bank Group. Banque mondiale. (2018). Lessons Learned from the Response of Municipal Civil Proteccion Committes to Hurricane Mathew Haiti (not published). Haiti Disaster Risk Management and Reconstruction Project. Washing- ton DC. Banque mondiale. (2018). Strengthening DRM and Climate Resilience Project (P165870). Washington, D.C.: World Bank Group. Fusch, P., & Ness, L. (2015). Are We There Yet? Data Saturation in Qualitative Research. The Qualitative Report, 20(9), 1408-1416. Retrieved from http://nsuworks.nova.edu/tqr/vol20/iss9/3 Gouvernement d’Haïti; Nations Unies; Union Européenne; Banque Intera- méricaine du Développement et Banque mondiale. 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En amont de la visite sur le terrain, une équipe de la Banque mondiale composée de Émilie Perge, Jimena Llopis et Jessica Hsu (du département Pauvreté et de l’eMBeD) a mené, entre le 9 et le 10 octobre 2018, 9 entretiens semi-dirigés avec les principales personnes ressources des institutions gouvernementales (DPC, MSPP, MENFP) et des organisations internationales (OCHA, OIM, PNUD) à Port-au-Prince (voir Ta- bleau 2). TABLEAU 1. ENTRETIENS MENÉS AVEC LES PRINCIPALES PERSONNES RESSOURCES ET LEUR LOCALISATION DURANT LE TRAVAIL DE DIAGNOSTIC Date Lieu Personne interviewée Rôle et Institution Contact 9 octobre DPC Jerry Chandler Directeur de la DPC chandler.jerry@gmail.com Marcus Cadet Coordinateur, point focal 9 octobre DPC GRD pour le MSPP Coordinateur GRD, point 9 octobre DPC Jean-Henry Telemanque focal GRD pour le MNEFP 9 octobre DPC Marie Lita Descolines DPC Rose Luce Cadot Prevot USAID, DPC 9 octobre DPC jeanelieg@yahoo.fr German Jean Elie Responsable de l’unité 10 octobre UNDP Adeline Carrier adeline.carrier@undp.org résilience Alix Nijimbere Évaluatrice de l’aide internationale, 10 octobre OCHA Nadege Nodji Coordinatrice de l’action Mbairaroau humanitaire, OCHA 10 octobre OIM Giuseppe Loprete Chef de mission, OIM gloprete@iom.int Annexe 49 Travail de Diagnostic. Entre le 22 et le 26 octobre 2018, une équipe de la Banque mondiale composée de 5 consultants locaux - Jessica Hsu, Donald Antoine, James-son Vamblain, Manouchka Justin et Reginald Milfort – a mené un travail de diagnostic à Paillant et Les Cayes à travers 6 groupes de discussion FGD et 16 entretiens semi-dirigés dans l’objectif d’identifier les obstacles qui limitent la prise de décision d’évacuer (voir tableau 3). TABLEAU 2. ENTRETIENS ET GROUPES DE DISCUSSION FGD ET LEUR LOCALISATION DURANT LE TRAVAIL DE DIAGNOSTIC Date Agent Instrument Lieu 22 octobre CCPC FGD Paillant 22 octobre CCPC Entretien Paillant 22 octobre CASEC Entretien Paillant 23 octobre Homme FGD Paillant 23 octobre Professeur Entretien Paillant 23 octobre Prêtre vaudou Entretien Paillant 23 octobre Femme FGD Paillant 23 octobre Femme n’ayant jamais évacué Entretien Paillant 23 octobre Femme n’ayant jamais évacué Entretien Paillant 23 octobre Femme Leader Entretien Paillant 24 octobre Croix-Rouge Entretien Les Cayes 24 octobre Enseignant Entretien Les Cayes 24 octobre Maire Entretien Les Cayes 25 octobre Délégué départemental Entretien Les Cayes 25 octobre DPC Entretien Les Cayes 25 octobre Pasteur Entretien Les Cayes 25 octobre Officier de police Entretien Les Cayes 25 octobre Femme Leader de groupe FGD Les Cayes 25 octobre Femme leader Entretien Les Cayes 26 octobre CCPC FGD Les Cayes 26 octobre Directeur général Entretien Les Cayes 26 octobre Femme FGD Les Cayes 50 USING BEHAVIORAL INSIGHTS TO IMPROVE DISASTER PREPAREDNESS, EARLY WARNING AND RESPONSE MECHANISMS IN HAITI ANNE XE 2 CLASSIFICATION D E S O U RAGANS TABLEAU 3. OURAGAN : CATÉGORIES ET IMPACTS Catégories Vents Dommages 5 157 mph ou plus Dommages catastrophiques à prévoir 4 130 - 156 mph Dommages catastrophiques à prévoir 3 111-129 mph Dommages dévastateurs à prévoir 2 96 - 110 mph Vents extrêmement dangereux qui causeront des dommages étendus 1 74 - 95 mph Vents très dangereux qui produiront un certain nombre de dommages Source : Centre national des ouragans - National Hurricane Center https://www.nhc.noaa.gov/aboutsshws.php