L’ÉQUIPE DE RECHERCHE Comité National de Lutte contre le Sida Équipe terrain — Afrique en Marche Dr. Jean Bosco Elat Nfetam Dr. Georges Nguefack-Tsague (Chef d’équipe, Chercheur Principal) Dr. Serge Clotaire Billong Dr. Sylvie Kwedi Raoul Anderson Fodjo Toukam Dr. Jerome Ateudjieu Banque mondiale Dr. Nsounfon Abdou Wouoliyou Elizabeth N. Mziray (Leader de l’equipe operationnelle, Dr. Laure Vartan Moukam Co-Chercheuse) Anastasie Mapassion Mvogo Nga Dr. Zara Shubber Blaise Dupont Minkemdefo Tekougang Nejma Cheikh Denise Ngatchou ONUSIDA Sandrine Nankia Djoumetio Dr. Vincent Koubagnine Tapka Stephanie Nouetchognou Thomas Tchetmi Martin Yakum Soutien technique-Université du Manitoba Tigeoh Eric Ndi Dr. Faran Emmanuel (Co-Chercheur) Ebile Akoh Walter Dr. Shajy Isac Mbah Philemon Ngoh Dr. James Blanchard Ghislain David Dongmo Kemkeng Roger Nguefack Estelle Eloumou Makamte Hermine Sonna Teumo Marie Nicole Ngoufack François Dimitri Mbarga Descartes Mbogning Joseph Mounchipou Chantal Ngo Sende –2– REMERCIEMENTS Cette étude a été menée à la demande du Gouvernement du Cameroun qui souhaitait renseigner davantage sa riposte nationale au VIH. Elle a été conduite et financée par la Banque mondiale et a bénéficié du soutien de l’Université du Manitoba (partenaire au soutien technique mondial) et d’Afrique en Marche (partenaire local de mise en œuvre). L’étude a été effectuée en collaboration avec le Gouvernement du Cameroun, le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) et l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID). Les auteurs tiennent à exprimer leur profonde gratitude au Gouvernement du Cameroun et souhaitent mentionner tout particulièrement les rôles prédominants du Dr Jean Bosco Elat Nfetam (Secrétaire Permanent, Comité National de la Lutte contre le Sida) et du Dr Serge Clotaire Billong (Chef Section Planification, suivi, et évaluation, Comité National de la Lutte contre le Sida). Les auteurs voudraient également remercier toutes les organisations qui ont pris part aux travaux, particulièrement le Comité de Pilotage de l’étude, qui a participé à la définition du protocole de recherche et à la conception de l’instrument, facilité la conduite des opérations sur le terrain et validé les résultats. L’étude a été menée en collaboration avec ONUSIDA et les auteurs tiennent à souligner le soutien accordé par le Dr Leopold Zekeng (Directeur adjoint de l’Équipe Régionale ONUSIDA de soutien à l’Afrique centrale et de l’Ouest) ; la Dre Claire Mulanga Tshidibi (Directrice Pays d’ONUSIDA pour le Cameroun) ; le Dr Amadou Moctar Mbaye (Ancien Directeur Pays d’ONUSIDA pour le Cameroun); le Dr Hugues Lago (Conseiller aux interventions stratégiques, Équipe Régionale ONUSIDA de soutien à l’Afrique centrale et de l’Ouest) ; Thomas Tchetmi (Agent aux interventions stratégiques, Cameroun) ; et le Dr Vincent Koubagnine Tapka (Conseiller aux informations stratégiques, Cameroun). L’étude a également été réalisée avec le concours de l’USAID et les auteurs sont reconnaissants des appuis que leur ont accordé Tisha Wheeler (Conseillère Principale en VIH sida auprès des populations clés) ; Peter Wondergem (Conseiller principal en santé) et Laurent Kapesa (Conseiller principal régional sur le VIH sida). Enfin, les auteurs tiennent à remercier les hommes et les femmes qui ont participé à cette recherche. La forte mobilisation des travailleuses du sexe [TSfem] a été déterminante pour la réussite de l’étude. Il est certain que sa réalisation n’aurait pas été possible sans la collaboration et la prééminence de cette communauté. Ainsi, nous sommes tout particulièrement reconnaissants aux associations telles que Horizon Femmes, l’Association d’Assistance au Développement [ASAD], et la Cameroon Medical Women’s Association [CMWA], sans lesquelles la collecte des données n’aurait pu être effectuée. Nous voudrions aussi souligner la contribution de Marelize Gorgens (Banque Mondiale), Shiyong Wang (Banque Mondiale), Paul Jacob Robyn (Banque Mondiale) et Sosthene Mboudou Ngono (Afrique en Marche). –3– –4– SOMMAIRE Contexte Avec une prévalence de 36,5 pour cent, les travailleuses du sexe (TSfem) du Cameroun agissent comme principal moteur de l’épidémie au VIH-sida dans le pays. Le Gouvernement du Cameroun leur a d’ailleurs accordé la priorité dans sa riposte nationale et offre actuellement un paquet minimum de services liés au VIH destiné aux TSfem, une intervention qui a pu être mis en place avec le concours du Fonds mondial, du Gouvernement des États-Unis — à travers l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) — et du Continuum Prévention, Soins et Traitement du VIH auprès des populations les plus à risque (CoPST). Dans le Rapport mondial d’avancement de la lutte contre le sida (GARPR/ Global AIDS Response Progress Report) de 2014, seul le tiers des pays a rapporté la conduite de programmes de réduction des risques impliquant les travailleuses du sexe, interventions par ailleurs largement variables en termes de qualité et de portée (ONUSIDA, 2014). En outre, la plupart des programmes d’Afrique subsaharienne ont une échelle, une ampleur et une couverture limitées. Par exemple, la revue de 54 projets menés à travers l’Afrique a permis de constater que la plupart d’entre eux relevaient de petits efforts locaux de distribution de préservatifs et, occasionnellement, de dépistage du VIH (Ashar, 2014). Très peu de pays ont procédé à des investissements suffisants dans des programmes de riposte au VIH s’adressant spécifiquement aux travailleuses du sexe et, parmi ceux qui rapportent investir dans la prévention du VIH chez les TSfem, il est possible qu’aucun fonds n’aille à la conduite d’interventions effectivement basées sur des données probantes (ONUSIDA, 2014). Plusieurs études ont démontré que la stratégie la plus efficace et la plus efficiente de lutte contre l’épidémie au VIH consistait à cibler les moteurs épidémiologiques. En ce sens, les directives concrètes émises par le Programme Commun des Nations Unies sur le VIH sida (ONUSIDA) en matière d’intensification de la prévention du VIH recommandent à la fois l’utilisation d’informations stratégiques pour la définition des groupes populationnels clés et l’identification des paramètres de risque et leur correspondance avec les mesures de prévention, notamment à travers la répartition des ressources et la localisation des interventions en conséquence (ONUSIDA, 2007). Ces aspects sont cohérents avec l’approche par « Science programmatique » qui utilise systématiquement « les connaissances scientifiques théoriques et empiriques pour l’amélioration de la conception, de la mise en œuvre et de l’évaluation de programmes de santé publique » (Université du Manitoba, 2015). Dans une perspective de prestation de services, il est essentiel de procéder tout d’abord à la quantification des groupes populationnels clés, à la compréhension de leurs différents sous-types et à l’identification des lieux où l’on peut les trouver, ceci avant la conduite de toute intervention aux niveaux macro (national/régional/ville) ou micro (local/zone administrative la plus basse/points chauds). Au Cameroun, les tentatives d’estimation de la taille des populations de TSfem effectuées jusqu’à maintenant ont été axées sur un nombre limité de zones situées dans des villes présélectionnées et réalisées à un niveau macro — avec estimation subséquente des données relatives à la ville concernée. Une étude récente a par exemple estimé à 98 102 (59 914-135 978) le nombre de TSfem (âgées de 15 à 49 ans) actives au Cameroun, avec 38 352 (23 563- 53 477) en zone urbaine seulement (Papworth et al., 2014), une extrapolation effectuée à partir de 7 villes de 7 régions. Bien que ces études soient utiles, pour l’établissement de cibles nationales ou municipales par exemple, la programmation de la prévention du VIH efficace demande en outre la quantification, la classification et la cartographie concrète des groupes populationnels clés tels que les TSfem, ceci sur une base à la fois agrégée et locale (avec un accent sur la dénomination administrative la plus basse de la ville). L’étude s’est donc attaquée dans cette optique à la cartographie et à l’estimation du nombre comme de la typologie des TSfem du Cameroun actives sur les points chauds, soit au niveau micro, ce qui allait permettre de renseigner la planification et la prestation de services liés au VIH, mais aussi d’assurer leur alignement sur le contexte local. Enfin, pour les fins opérationnelles de l’exercice de cartographie, les TSfem ont été définies comme : « toute femme qui a un rapport sexuel avec un homme en échange d’argent ou de bénéfices, quel que soit le lieu d’activité (par ex. rue, bar, domicile, hôtel, etc.) ». –5– L’étude a été alignée sur la Stratégie Nationale de Lutte contre le VIH-sida du Cameroun et entreprise dans le cadre d’une Initiative conjointe de soutien technique de la Banque mondiale/d’ONUSIDA/et de l’USAID pour l’Afrique centrale et de l’Ouest qui entend : (i) appuyer les pays prioritaires dans l’évaluation et l’identification des goulots d’étranglement à la prestation de services afin d’assurer une mise en œuvre efficace des programmes à l’endroit des TSfem ; (ii) soutenir les pays prioritaires dans la planification, la conception et la mise en œuvre de solutions susceptibles d’améliorer la qualité, l’ampleur et la couverture des prestations de services ; et (iii) recueillir et diffuser à travers le monde les bonnes pratiques et enseignements tirés en matière de prestation de services liés au VIH. L’étude a privilégié la cartographie géographique programmatique. Afin de comprendre les dynamiques en cause, celle-ci s’attache tout d’abord à recueillir des données — sur le nombre d’individus, les endroits de rassemblement, et les typologies (sous-groupes) respectives — auprès des TSfem actives dans des lieux publics accessibles. En ce sens, la cartographie programmatique et l’estimation de l’ampleur des populations de TSfem serviront à renseigner directement la conception et la mise en œuvre de programmes de riposte au VIH. Par ailleurs, les objectifs de l’étude relatifs au renforcement des programmes de prévention du VIH ont été pris en compte à travers l’estimation du nombre total de TSfem (taille des populations) ; le profilage des typologies en présence ; et, l’examen de la disponibilité de services liés au VIH sur les lieux fréquentés par les TSfem et dans la communauté environnante. Les résultats de cette étude devraient d’ailleurs être utilisés à très court terme dans la planification et la mise en œuvre des interventions. Méthodologie Le Comité National de Contrôle du sida du Cameroun et ses partenaires ont convenu qu’une approche par cartographie programmatique complète des TSfem était essentielle à la riposte nationale au VIH et ont identifié plusieurs critères de priorisation des villes devant être cartographiées. Parmi ces derniers, il faut mentionner : (i) la taille de la ville (soit des villes à la fois importantes et de petite taille) ; (ii) l’importance de la ville en termes de contribution à la transmission du VIH ; (iii) les considérations d’ordre politique (ville francophone et anglophone) ; et (iv) la présence de programmes existants à l’intention des TSfem susceptibles d’être mis à profit. Ainsi, sur la base des critères susmentionnés, les villes de Bafoussam, Bamenda, Bertoua, Buea, Douala, Kribi, Limbé, et Yaoundé ont été retenues. La méthode de cartographie programmatique utilisée par cette étude a été développée par l’Université du Manitoba (UM) et adaptée au contexte camerounais (résumée à la Figure 1). Elle a comporté, suite à une phase de préparation, la conduite de 2 étapes successives d’identification des lieux où l’on pouvait trouver et dénombrer les groupes populationnels clés : au Niveau 1 (N1), l’équipe a procédé auprès d’informateurs clés secondaires —soit d’individus en contact direct avec les TSfem ou qui avaient accès aux groupes populationnels clés en vertu de leurs activités professionnelles— à la collecte systématique d’informations susceptibles de permettre l’identification des « points chauds » de sollicitation de partenariats sexuels et de pratique de rapports sexuels entre les TSfem et leurs clients, notamment leurs principales caractéristiques respectives en termes de typologie, d’heures de pointe de fréquentation et de nombre estimatif de TSfem présentes. À partir des réponses fournies, il y a eu ensuite élaboration d’une liste d’identification les différents lieux mentionnés indiquant le nombre d’informateurs en cause dans chacun des cas. Le Niveau 2 a été consacré à la validation et au profilage des points chauds identifiés, surtout à travers la conduite d’entrevues directes et de discussions de groupe avec les TSfem. L’estimation de la taille des populations cartographiées au niveau des quartiers a été ajustée en fonction de la mobilité des TSfem et appliquée aux quartiers n’avaient pas été enquêtés à l’aide du modèle de régression de Poisson. L’autorisation en matière d’éthique a été obtenue auprès du Comité National d’Éthique de la Recherche pour la Santé Humaine (N0 2015/07/617/CE/CNERSH/SP). Les autorisations administratives ont été obtenues auprès des représentants locaux du Ministère de la Santé Publique de chacune des villes concernées. –6– Figure 1. Résumé de la méthode de cartographie programmatique –7– Résultats L’étude a identifié 2194 points chauds (lieux fréquentés par les TSfem) : Yaoundé (622), Douala (760), Bamenda (263), Bafoussam (194), Kribi (154), Bertoua (140), Limbé (35), et Buea (26). Le nombre total (fourchette) de TSfem a été estimé à 21 124 (16 079 – 26 170) : Yaoundé 6 596 (4 712-8 480), Douala 7 557 (5 550-9 364), Bafoussam 2 458 (1 994-2 923), Bamenda 1 975 (1 605-2 345), Kribi 1 121 (832-1 408), Bertoua 1 044 (891-1 198), Buea 225 (185-266), et Limbé 148 (110-148). La variabilité des estimations entre villes s’observe également au sein des différentes subdivisions urbaines. Ainsi, le nombre de TSfem au niveau national a pu être estimé à 112 580 (103 446 – 121 723), une donnée qui englobe l’ensemble des quartiers urbains du Cameroun. L’étude a également évalué à environ 2 pour cent (1,91 pour cent : 0,47 pour cent – 3,36 pour cent) la population féminine adulte du Cameroun qui pratiquerait le travail du sexe. Les points chauds identifiés peuvent être répartis selon les différentes typologies opérationnelles suivantes: [bars/bars avec chambres] (45,3 pour cent) ; établissements/hôtels/bordels (21,1 pour cent) ; [rue/espaces publics] (13,8 pour cent) ; et, boîtes de nuit/casinos (13,5 pour cent). L’étude a constaté que plupart des points chauds étaient actifs après 9 heures du soir et que la majorité des TSfem des villes enquêtées fréquentaient les points chauds les vendredis, samedis et dimanches. Cependant, seuls quelques-uns des points chauds avaient bénéficié de services de prévention du VIH gratuits au cours des 6 derniers mois et les TSfem de Buea et Limbé n’avaient eu accès à aucun lubrifiant ou service-conseil sur le VIH. D’ailleurs, très peu de services médicaux de consultations et de gestion des infections sexuellement transmissibles (IST) étaient dispensés sur les points chauds dans le cadre de la conduite d’activités préventives liées au VIH. Par contre, alors que la distribution de préservatifs a pu être constatée sur tous les points chauds enquêtés, l’étude a révélé que d’autres services, notamment la communication pour le changement de comportement et l’éducation sur le VIH ; le référencement et le lien avec d’autres établissements de santé ; le soutien nutritionnel ; la planification familiale ; et, l’information sur prévention de la transmission mère enfant (PTME) étaient rarement disponibles sur les points chauds. En outre, les services de traitement du VIH n’étaient généralement pas dispensés sur les points chauds (zéro pour cent – 10,2 pour cent). Discussion Cette étude a permis non seulement d’identifier les points chauds fréquentés par les TSfem et leurs typologies respectives dans les 8 villes du Cameroun ciblées, mais aussi de procéder à une estimation de la taille des populations de TSfem dans chacune des villes. À notre connaissance, il s’agit de la première analyse du genre au –8– Cameroun. Alors que les études antérieures estimaient la taille des populations de TSfem à un niveau macro, la base de données produite ici comprend des détails de niveau micro sur les points chauds, ce qui permettra la mise en œuvre d’interventions de lutte contre le VIH à l’endroit des TSfem du Cameroun planifiées avec efficacité et efficience. En outre, les cartes élaborées pour chaque quartier présentent une répartition des points chauds et leurs typologies respectives. Ces informations favoriseront la conception et la réalisation d’interventions ciblées sensibles aux besoins d’une communauté spécifique en prenant en compte les modalités de service les plus appropriées. Les données cartographiques permettront aux décideurs et planificateurs de programmes de s’assurer que les interventions de prévention du VIH sont appropriées et réparties de façon optimale entre les différents points chauds, ce qui n’exclut pas la priorisation de certains d’entre eux si nécessaire. Les données cartographiques aideront également les décideurs à coordonner la riposte au VIH afin d’éviter les duplications d’efforts entre partenaires à la mise en œuvre, mais aussi à identifier les lacunes à combler. Cette étude met en lumière la nécessité de comparer la répartition géographique des points chauds avec les lieux et l’ampleur des autres services dispensés aux TSfem, y compris en matière de prévention et de traitement du VIH et de prestations en santé. Ceci aidera à évaluer dans quelle mesure les services sont accessibles et pertinents face aux besoins des TSfem. Les informations sur la typologie opérationnelle des différents points chauds pourront être utilisées pour identifier les modalités de mise en œuvre les plus adéquates et les paquets d’interventions à dispenser dans des endroits spécifiques, comme d’ailleurs le moment idéal de prestation de services pour assurer un large accès par la population cible. La cartographie programmatique peut par ailleurs renseigner la planification, la mise en œuvre et l’évaluation de programmes à l’endroit des TSfem puisqu’elle fournit : (i) les dénominateurs permettant d’établir les cibles de couverture, la portée du programme et la répartition des pairs éducateurs sur les sites d’intervention  ; (ii) les informations devant être introduite aux termes de référence des agences d’exécution (par ex. nombre attendu de TSfem couvertes par les services ; typologie des TSfem et meilleures stratégies pour les rejoindre ; quartiers à prioriser sur la base de la densité des populations de TSfem ; etc.) ; et (iii) un cadre d’échantillonnage pour les recherches planifiées (des informations détaillées sur les points chauds et les informateurs clés peuvent s’avérer déterminantes dans l’obtention d’échantillons représentatifs). Finalement, l’information sur les services liés au VIH au niveau micro, — ou leur absence —peut être utilisée pour renseigner les décisions sur programmes prioritaires; s’assurer que les interventions et modalités de prestation de services sont alignées sur les densités de population et typologies opérationnelles des TSfem ; et, informer la mise à l’échelle d’un programme. De façon plus spécifique, résultats de l’étude pourront renseigner la mise en œuvre des interventions planifiées dans le cadre du Fonds Mondial et des projets de l’USAID et faciliter l’identification des zones prioritaires comme le choix des organisations à base communautaire (OBC) qui seront responsables de la mise en œuvre. En outre, dans le cas des 8 villes cartographiées, les constats viendront compléter l’enquête intégrée de surveillance biologique et comportementale (EISBC) en cours. En termes d’interventions prioritaires identifiées, il faudrait intégrer les lubrifiants et l’appui-conseil sur le VIH au paquet d’activités de prévention, particulièrement à Limbé et Buea. À Douala et dans d’autres villes, il faudrait également renforcer la disponibilité sur les points chauds des services de consultation médicale ; de communication pour le changement de comportement et d’éducation sur le VIH ; de référencement à d’autres établissements de santé ; de soutien nutritionnel ; de planification familiale ; et de PTME. Les stratégies d’intervention devraient prioriser les lieux de pratique suivants : bars/bars avec chambres ; établissements/hôtels/bordels ; rue/espaces publics ; et, boîtes de nuit/casinos. Puisque les TSfem ont tendance à être mobiles, les interventions planifiées devraient être initiées dès que possible. En outre, la cartographie devrait se poursuivre sur une base régulière au cours de la mise en œuvre et les estimations devraient être mises à jour de façon constante dans le cadre du suivi du programme, ce qui aidera à guider et améliorer la prestation de services. Les résultats de cette étude soulignent également la nécessité d’impliquer les TSfem et autres parties prenantes clés au niveau communautaire – notamment les propriétaires, gestionnaires et gardiens de bars – dans la –9– planification et la conception des interventions, comme dans la mise en relation et le référencement vers des services liés au VIH. Parmi les limites de cette étude, il faut mentionner l’exclusion des TSfem qui travaillent à partir d’Internet ou celles qui sont rattachées à des services d’escorte principalement contactés par téléphone ou via les médias sociaux. Le nombre de TSfem « clandestines » en cause n’est pas connu. Cependant, il reste important de mieux comprendre ce type de TSfem et d’élaborer des interventions ciblées susceptibles de les rejoindre. Il faudra peut- être pour cela procéder à une combinaison d’approches plus conventionnelles, notamment par pairs éducateurs, et de recours à des innovations technologiques et aux médias sociaux. Conclusion Cette cartographie et le dénombrement des TSfem actives dans 8 villes du Cameroun fournissent des informations importantes, à la fois aux niveaux macro et micro, qui permettront aux planificateurs de programmes et décideurs de prioriser la mise en œuvre et l’intensification des programmes de prévention du VIH à l’endroit des TSfem. En outre, l’étude, la première du genre au Cameroun, fournit une base de référence importante pour le suivi et l’évaluation des programmes de riposte au VIH s’adressant aux TSfem. RÉFÉRENCES Ashar D., Luchters S., Moore L., Lafort Y., Roy A., Scorgie F., Chersich M. (2014). “Systematic Review of Facility-based Sexual and Reproductive Health Services for Female Sex Workers in Africa”. Global Health. 10:46. Papworth E., Grosso A., Ketende S, Wirtz A., Cange C., Kennedy C., Lebreton M., Ky-Zerbo O., Anato S., et Baral S. (2014). Examining Risk Factors for HIV and Access to Services among Female Sex Workers (FSW) and Men who have Sex with Men (MSM) in Burkina Faso, Togo, and Cameroon. Baltimore: Projet de recherche USAID : recherche pour la prévention. http://www.jhsph.edu/research/centers-and-institutes/research-to-prevention/publications/WA_FinalReport.pdf ONUSIDA (2014). Rapport mondial d’avancement de la lutte contre le sida (2014). http://www.unaids.org/en/dataanalysis/knowyourresponse/globalaidsprogressreporting ONUSIDA (2007). Guidelines for Intensifying HIV Prevention. Genève. http://data.unaids.org/pub/Manual/2007/20070306_prevention_guidelines_towards_universal_access_en.pdf Université du Manitoba (2015). Program Science Concept Note http://umanitoba.ca/faculties/medicine/units/community_health_sciences/departmental_units/cgph/cgph_sci_concept.h tml). Accès le 11 décembre 2016. –10–