;;! 擠華 LE DEVELOPPEMENT EN MARCHE D ê-centralisation de l'enseignement Financements axés sur la demande Harry Anthony Patrinos David Lakshmanan Ariasingam Banque mondiale Washington © 1998 Banque internationale pour la reconstruction et le développement / BANQUE MONDIALE 1818 H Street, N.W. Washington, D.C. 20433 Tous droits réservés Imprimé aux États-Unis d'Amérique Première édition anglaise: juin 1997 Première édition française: septembre 1998 Les opinions, interprétations et conclusions présentées ici n'engagent que les auteurs et ne doivent être attribuées en aucune manière ni à la Banque mon- diale, ni à ses institutions affiliées, ni aux membres du Conseil des Administrateurs et aux pays qu'ils représentent. Photo de couverture par Curt Carnemark, Banque mondiale. Harry Anthony Patrinos, économiste au département du Développement humain de la Banque mondiale, a écrit de nombreux articles sur les aspects économiques de l'éducation. Il est co-rédacteur (avec George Psacharopoulos) de Indigenous People and Poverty in Latin America: An Empirical Analysis et prin- cipal auteur de Priorités et stratégies pour l'éducation : une étude de la Banque mondiale. David Lakshmanan Ariasingam, consultant au département de l'Environnement de la Banque mondiale, a travaillé pour la Banque mondiale, l'Agence pour le développement international des Etats-Unis et d'autres organisations sur les problèmes d'éducation, notamment le financement com- munautaire, la décentralisation, l'élaboration des programmes, les investisse- ments du secteur privé dans l'éducation. Il s'occupe actuellement de projets concernant l'éducation, la sensibilisation et la formation écologiques. ISBN 0-8213-4273-8 La Bibliothèque du Congrès des États-Unis a catalogué comme suit l'édition anglaise de ce document: Patrinos, Harry Anthony. Decentralization of education : demand-side financing / Harry Anthony Patrinos, David Lakshmanan Ariasingam. p. cm. - (Directions in development) Includes bibliographical references. ISBN 0-8213-3930-3 1. Education-Developing countries-Finance. 2. Federal aid to education-Developing countries. 3. Educational vouchers-Developing countries. I. Ariasingam, David Lakshmanan, 1963- . II. Title. III. Series: Directions in development (Washington, D.C.) LB2826.6.D44P38 1997 379.1'2'091724-dc2l 97-15317 CIP Table des matières Avant-propos v Remerciements vii 1 Définition des financements axés sur la demande 1 Mécanismes de financement axés sur la demande 3 De la théorie à la pratique 5 Débat sur la question du libre choix aux États-Unis 8 Éducation, valeurs et choix 13 Éducation, ethnicité et politique 14 Le fonctionnement des mécanismes de financement axés sur la demande: difficultés liées à la situation propre aux différents pays 15 Analyse de projets financés par la Banque mondiale 18 2 Instruments de financement axés sur la demande 22 Définition des différents mécanismes 22 Exemples provenant de différents pays 25 3 Enseignements tirés de ces projets 52 Recommandations particulières 52 Décaissement et suivi 55 Nécessité de procéder à une évaluation rétrospective 55 Références 57 iii Avant-propos E n collaboration avec des ministères de l'éducation et des ministères des finances, la Banque mondiale, a mis à l'essai des mécanismes inédits de financement axés sur la demande dans le cadre de projets exécutés récemment dans le secteur de l'éducation. Le présent ouvrage, qui s'inscrit dans le cadre d'un effort plus large mené au sein du groupe Education du département du Développement humain pour analyser d'autres manières de financer l'enseignement dans les pays en déve- loppement, passe en revue des projets lancés entre 1993 et 1996 avec l'aide de la Banque mondiale. Cette analyse se limite à des projets com- portant des éléments de financement axés sur la demande et repose sur les rapports d'évaluation des services de la Banque mondiale. Par finan- cements axés sur la demande, on entend ici l'octroi direct de fonds publics à des particuliers, des institutions et des communautés sur la base de la demande exprimée. Ce terme peut aussi signifier la mobili- sation de ressources par les bénéficiaires pour des besoins spécifiques. Les financements axés sur la demande représentent un choix prag- matique pour introduire des réformes nécessaires en fonction des besoins locaux et des ressources disponibles. Le présent ouvrage a pour objet d'aider les décideurs et les professionnels des pays en dévelop- pement ainsi que les membres du personnel des organisations interna- tionales qui souhaitent envisager d'autres mécanismes de financement. J'espère que cette analyse de projets d'éducation fera un peu mieux connaître le rôle approprié que jouent les financements axés sur la demande dans le secteur de l'éducation, mais surtout qu'elle encoura- gera la recherche sur cette question dans les pays en développement. David de Ferranti Directeur du Réseau du développement humain de la Banque mondiale v Remerciements P our pouvoir réaliser la présente étude, les auteurs ont passé en revue les projets de la Banque mondiale comportant un élément de financements axés sur la demande et ont pris contact avec les différents chefs de projet afin d'obtenir des renseignements complémentaires. À l'issue de ces premières consultations, les auteurs ont choisi certains projets afin de réaliser une étude qui reprenne l'ensemble des différents mécanismes de financement axés sur la demande auxquels il a été fait appel dans des projets d'éducation financés par la Banque mondiale. Les auteurs tiennent en particulier à remercier Albert Aime, Ivar Andersen, Jill Armstrong, Halsey Beemer, Penelope Bender, Ernesto Cuadra, Alfonso de Guzman, Makha Ndao, Guilherme Sedlacek, Eleanor Schreiber, Manuel Vera, Eduardo Velez, Joel Reyes et Ana Jeria qui ont partagé avec eux leurs conseils, de précieux renseignements et leurs observations sur le terrain. Ils remercient Maris O'Rourke, Conseiller principal, Éducation, de leur avoir fait part de ses orienta- tions générales et Marlaine Lockheed qui a inclus le présent ouvrage dans la série « Décentralisation de l'enseignement ». De nombreuses personnes ont fait des remarques sur les différentes versions du texte et échangé des idées avec les auteurs. Parmi elles figurent Mark Bray, Jack Maas, Soniya Carvalho, Stephen Heyneman, Jacques van der Gaag, Vicente Paqueo, Estelle James, Charles Griffin, Marlaine Lockheed, Vicente Fretes-Cibils, George Psacharopoulos, Peter Moock, Meskeram Mulatu, Yang-ro Yoon, Nicholas Prescott, Paul Shaw, Donald Winkler, Minh-Chau Nguyen, Emmanuel Jimenez, Elizabeth King, Laura Rawlings, Nicholas Burnett, Kari Marble, Indermit Gill, Sverrir Sigurdsson, Andrew Mason, Jee-Peng Tan, Xiaoyan Liang, Ralph Harbison et Joanne Salop. Les auteurs remercient tout particulièrement Eluned Roberts-Schweitzer, qui a supervisé les différentes étapes de cette publication, et Ian Conachy, Anca Novacovici, et Timothy Scanlon qui ont assuré le traitement du texte et les diverses recherches. L'édition et la mise en page du texte ont été réa- lisées par l'American Writing Corporation. vii 1 Définition des financements axés sur la demande L a plupart des États reconnaissent combien l'éducation est impor- tante pour le développement économique et social et lui consacrent de ce fait une part croissante de leurs ressources budgétaires (Banque mondiale, 1995). Il ne fait aucun doute que les efforts engagés pour mettre en place un système d'éducation de base ont donné des résultats remarquables. Il est cependant, tout aussi évident, qu'il reste beaucoup à faire en matière d'accès à l'éducation, d'égalité des chances et d'effi- cacité. Chaque État détermine et finance dans une large mesure l'enseigne- ment dispensé sur son territoire, la puissance publique nationale inter- venant dans les systèmes régionaux et locaux d'éducation. Cette politique a eu pour principal résultat un gigantesque essor de la scola- risation à l'échelle nationale, en grande partie sous l'effet de l'expan- sion de l'offre. En d'autres termes, l'État bâtit les écoles et rémunère les enseignants. Toutefois, cette expansion n'a pas profité de manière égale à tous les membres de la société et, dans bien des cas, le type d'ensei- gnement proposé est inadapté aux enfants issus de certains milieux. En sont exclus, dans une large mesure, les filles, les populations autoch- tones, les groupes tribaux, les minorités défavorisées et les pauvres. Qui plus est, les besoins des enfants ayant des difficultés d'apprentis- sage, de ceux qui connaissent des problèmes physiologiques ou psy- chologiques ou des sans-foyer n'ont pas été satisfaits. Les écarts entre les filles et les garçons sur le plan des taux de scola- risation et d'achèvement des études primaires sont vertigineux. En 1990, une fillette de 6 ans d'un pays à revenu faible ou moyen pouvait, en moyenne, espérer aller à l'école pendant 7,7 ans, contre seulement 6,7 ans en 1980 ; de son côté, un garçon du même âge pouvait, en moyenne, compter sur 9,3 ans d'école. L'écart entre garçons et filles est le plus marqué en Asie du Sud où, en 1990, une fille pouvait espérer aller à l'école pendant 6,0 ans et un garçon 8,9 ans, et au Moyen-Orient, où les chiffres correspondants étaient de 8,6 ans pour les filles et de 10,7 ans pour les garçons (Banque mondiale, 1995). L'écart est également important en ce qui concerne les services d'en- seignement offerts aux populations urbaines et rurales. En Indonésie, 1 2 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE 3 % des enfants des zones urbaines en âge d'aller à l'école primaire ne recevaient aucun enseignement contre 10 % dans les zones rurales (Banque mondiale, 1995). Les différences entre les sexes sont très sen- sibles en milieu rural. Au Pakistan, la proportion de filles et de garçons âgés de 7 à 14 ans ayant été scolarisés, à un moment quelconque, était de 73 % et 83 % dans les zones urbaines, contre 40 % et 70 % dans les zones rurales. Nombreuses sont les minorités linguistiques et les populations autoch- tones qui ne bénéficient pas d'un enseignement suffisant. Au Guatemala, 80 % des indigènes des zones rurales sont analphabètes et les hommes indigènes de la population active ont été, en moyenne, scolarisés pendant moins de 2 ans. Dans les régions rurales du Pérou, 70 % des indigènes par- lant le quechua et âgés de 5 ans et plus, ne sont jamais allés à l'école, contre 40 % des Péruviens non indigènes (Psacharopoulos et Patrinos, 1994). Par ailleurs, les dépenses publiques d'éducation sont souvent ineffi- caces en raison de leur mauvais ciblage. Alors que les pays qui n'ont pas encore atteint le stade de la scolarisation quasi-universelle des enfants dans le primaire et les premières années du secondaire devraient consacrer en priorité leurs dépenses à l'éducation de base, nombreux sont ceux qui continuent à subventionner de façon excessive l'enseignement supérieur. C'est ainsi qu'en Afrique, les dépenses par élève sont environ 44 fois plus élevées dans l'enseignement supérieur que dans l'enseignement primaire, et la part de l'enseignement supé- rieur dans le total des dépenses publiques d'éducation est aujourd'hui plus grande que dans toute autre région du monde. L'essor de la scolarisation axé sur l'offre s'est récemment heurté à de nouvelles difficultés, les pouvoirs publics étant de moins en moins capables de supporter le coût croissant de l'expansion des systèmes d'enseignement public. Les questions qui méritent d'être posées sont les suivantes : qui devrait supporter le coût de la scolarisation, qui devrait appuyer l'enseignement public et privé, et quelle devrait être la part du coût total couverte par les contribuables plutôt que par les bénéficiaires directs (Cohn et Geske, 1990) ? Ces questions amènent à se demander si des subventions publiques, au cas où elles se justifieraient, devraient être accordées aux établissements d'enseignement ou aux élèves par le biais de mécanismes de type chèque-éducation. Actuellement, ce sont les fonds publics qui financent en grande partie l'éducation. Dans beaucoup de pays, même les écoles privées sont for- tement tributaires de l'aide publique. DÉFINITION DES FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE 3 Mécanismes de financement axés sur la demande Dans certains pays, les pouvoirs publics s'efforcent de faire face à ces problèmes en envisageant de nouvelles méthodes d'affectation des res- sources disponibles. L'une d'elles est l'octroi de financements axés sur la demande, qui consiste à accorder des fonds publics de manière directe à des individus ou des institutions sur la base de la demande exprimée. En d'autres termes, l'argent suit les élèves. Le recours à des mécanismes de financement axés sur la demande, tels que les chèques- éducation, les allocations et les subventions forfaitaires par élève, n'im- plique pas nécessairement une diminution des financements publics. Ces mécanismes sont fréquemment utilisés dans le secteur de l'éduca- tion dans les pays membres de l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) et dans certains pays en déve- loppement (tableaux 1 et 2). Un chèque-éducation est une somme d'ar- gent qu'un organisme public verse directement aux élèves et que ces derniers utilisent dans l'établissement d'enseignement de leur choix. Les allocations sont versées aux élèves ou à leurs familles pour payer les frais d'études. Des explications plus détaillées sur ces mécanismes et sur d'autres types de financements axés sur la demande sont four- nies ci-dessous. Le cadre théorique du financement axé sur la demande dans le secteur de l'éducation est lié en partie à la question du libre choix. L'accent est mis sur l'individu (ou sur les parents, dans le cas de l'éducation de base). En fait, les appels lancés en faveur d'un choix parental sont en général directement liés à des efforts visant à amé- liorer les résultats scolaires. D'après The World Bank Participation Sourcebook (Banque mondiale, 1996), les efforts déployés pour mieux adapter l'enseignement dispensé aux besoins communautaires devraient consister notamment à accorder des chèques-éducation aux familles. L'importance d'une amélioration des résultats scolaires est soulignée dans l'étude de la Banque mondiale sur le secteur de l'éducation, Priorités et stratégies pour l'éducation (Banque mondiale, 1995), qui lance en outre un appel en faveur d'une participation accrue au financement et à la gestion de l'enseignement ainsi qu'au processus décisionnel. Les questions liées à l'introduction du libre choix sont traitées dans le présent document sans prendre partie sur un sujet qui est maintenant devenu brûlant. Pour beaucoup de gens, 4 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE le financement axé sur la demande constitue un choix pragmatique permettant d'entreprendre les réformes requises en fonction des res- sources et des besoins locaux. À titre d'exemple, alors que les États- Unis se heurtent à un problème de qualité, le Yémen doit, quant à lui, faire face à un manque de capacité et le Chili, à des problèmes au niveau de l'égalité des chances. Il est important de considérer le pays Tableau 1. Financements axés sur la demande dans le secteur de l'éducation dans les pays en développement (projets n'ayant pas bénéficié de l'aide de la Banque mondiale) Pays Mécanisme Belize Partenariat de l'État avec les églises (les pouvoirs publics appuient financièrement les écoles religieuses en fonction des besoins). Brésil Mécanismes de subventions de contrepartie et subventions forfaitaires par élève basées sur le nombre d'élèves, leur statut socio-économique et leur lieu de résidence. Botswana Mécanismes de subventions de contrepartie (les pouvoirs publics couvrent les dépenses d'investissement dans les écoles secondaires du premier cycle). Chili Système de chèques-éducation pour les élèves pauvres, subventions forfaitaires par élève pour tous les élèves. Chine Mécanismes de subventions de contrepartie. Gambie Système de chèques-éducation pour les élèves pauvres, subventions forfaitaires par élève pour tous les élèves. Ghana Mécanismes de subventions de contrepartie (formule selon laquelle la subvention de contrepartie est équivalente au montant des ressources mobilisées par les associations de parents d'élèves). Guatemala Allocations ciblées pour les filles dans 13 communautés. Inde Mécanismes de subventions de contrepartie et nombreuses mesures d'incitation (uniformes, manuels, indemnités de présence). Lesotho Partenariat de l'État avec les églises (les pouvoirs publics appuient financièrement les écoles religieuses en fonction des besoins). Maroc Bourses d'études pour les filles des zones rurales. Maurice Mécanismes de subventions de contrepartie. Mozambique Bourses d'études pour les filles des zones rurales. Myanmar Écoles financées à l'échelon communautaire. Pologne Aide accordée aux écoles privées. Tanzanie Mécanismes de subventions de contrepartie. Thaïlande Bicyclettes pour les écoliers pauvres dans les zones rurales (en fonction des besoins de transport). Zimbabwe Subventions forfaitaires par élève. Source: Bray 1996; Fiske 1996; West 1996; Banque mondiale 1995. DÉFINITION DES FINANCEMENTS AXES SUR LA DEMANDE 5 Tableau 2. Exemples de financements axés sur la demande dans le secteur de l'éducation dans les pays de l'OCDE Pays Mécanisme Australie Formules de partage des recettes pour contrebalancer les inégalités budgétaires entre les différents gouvernements d'État ; subventions forfaitaires en fonction du degré de pauvreté et du nombre d'élèves; aide aux écoles privées, montant basé sur les besoins. Canada Subventions forfaitaires par élève et aide aux écoles privées. États-Unis Expériences basées sur l'utilisation de chèques-éducation. Japon Aide aux écoles privées. Nouvelle-Zélande Niveau unitaire de financement plus élevé pour les élèves pauvres (80 % des financements liés au nombre d'élèves et 20 % à la situation socio-économique des élèves). Pays-Bas Subventions forfaitaires par élève. Royaume-Uni Aide aux écoles privées (places réservées à des élèves des couches sociales à faible revenu). Suède Subventions forfaitaires par élève. Source: OECD 1994; West 1996. dans son ensemble et d'introduire des mécanismes de financement en fonction des ressources et des besoins locaux. Au Bangladesh, par exemple, il convenait d'accorder des allocations aux écolières du secondaire, alors qu'aux États-Unis, la « G.I. Bill », qui faisait bénéfi- cier les soldats démobilisés de facilités financières pour les inciter à suivre des études supérieures, a connu un grand succès en donnant aux anciens combattants les moyens de recevoir une formation uni- versitaire. De la théorie à la pratique Il est généralement admis que le libre choix peut se justifier en théorie, mais il est plus difficile de déterminer comment l'utiliser au mieux dans la pratique. On avance souvent l'argument selon lequel les chèques-édu- cation et le choix de l'établissement amélioreront l'accès vital à l'infor- mation et contribueront de ce fait à promouvoir l'égalité des chances. Toutefois, nous ne connaissons guère l'impact du libre choix sur l'ap- prentissage, sur les questions pratiques liées à l'exercice du choix ni sur le niveau d'enseignement auquel le choix est le plus approprié, ou encore sur la façon d'administrer ces démarches. Nous ne savons pas non plus 6 DECENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE quelles seront les réactions de l'offre à des interventions basées sur la demande. On peut se demander, par exemple, si les prestataires de ser- vices d'enseignement privé vont se multiplier ou prendre de l'impor- tance sous l'effet des chèques-éducation ou si les établissements publics vont se réformer afin d'attirer des élèves de première qualité ? L'égalité des chances constitue l'argument principal en faveur des financements publics, mais il n'y a aucun consensus sur la question de savoir si cette équité a trait aux ressources, aux résultats scolaires ou au montant du revenu futur, ou si le but recherché est l'égalité des chances entre les personnes, les régions ou les États. Les chèques-éducation, d'après leurs partisans, sont des fonds publics qui doivent être versés directement aux élèves ou à leurs familles, qui décideront alors où s'inscrire. Ces mêmes partisans affirment que les chèques-éducation rendront le système éducatif plus efficace, amélioreront sa qualité, en faciliteront l'accès et renforceront l'égalité des chances. Ceux qui s'op- posent à ces propositions se concentrent sur les pauvres, en soulignant que ces derniers ne seront pas en mesure de faire les bons choix et qu'un système de financement de l'enseignement basé sur des chèques-édu- cation ne fera que renforcer la stratification sociale. Toujours selon ces critiques, la question du choix ne se pose pas dans le cas des pays pauvres ou des zones rurales: un village ne peut avoir, disent-ils, qu'un nombre limité d'écoles et il est par conséquent inutile d'instituer un système de chèques-éducation. Cependant, même lorsqu'il n'existe qu'une seule école, les parents font des choix. S'ils vivent dans une extrême pauvreté et si l'enseigne- ment est de mauvaise qualité, ils peuvent choisir de ne pas envoyer leurs enfants à l'école. Dans certains pays, le nombre d'enfants scolari- sés ne cesse de baisser (Banque mondiale, 1995). Malgré cela, les ensei- gnants des écoles publiques continuent en général à percevoir leur salaire, même s'ils ne viennent pas assurer leurs cours. Par conséquent, la question du choix n'est pas sans pertinence dans les zones rurales. Les mécanismes de financement axés sur la demande peuvent encourager les choix, même lorsque l'argent est versé aux communau- tés plutôt qu'aux individus. Dans ce cas de figure, il appartient à la communauté de s'assurer que des investissements scolaires sont faits pour attirer les parents. Les communautés peuvent décider d'instaurer unilatéralement une sorte de programme de chèques-éducation. Un manque de clarté caractérise néanmoins ce débat, d'autant qu'il existe des définitions fort différentes des chèques-éducation. La figure 1 montre à quel point ceux-ci diffèrent et fait apparaître les effets variés qu'ils peuvent avoir sur des enfants dont les familles ont des revenus limités. Même dans ces conditions, Blaug (1984) prévient ses lecteurs que la liste des chèques-éducation ne rend pas toutes les nuances propres à telle ou telle interprétation du concept de chèque-éducation. DÉFINITION DES FINANCEMENTS AXES SUR LA DEMANDE 7 Il existe une grande variété de systèmes qui peuvent être différents de trois points de vue : finances, réglementation et information (Levin, 1980, 1991). Si, en haut de la liste, on trouve un cas extrême, celui d'un chèque à usage restreint, à l'autre extrémité on note un chèque-éduca- tion non soumis à restrictions, qui englobe les frais de scolarité, divers coûts et frais de transport, et dont le montant est lié au niveau de revenu. Un chèque-éducation à usage limité permet aux parents de choisir entre plusieurs écoles publiques. Dans la pratique, cela revient simple- ment à sortir les écoles de la carte scolaire. Dans le cas d'un chèque sans restriction d'usage, les parents peuvent choisir entre des écoles publiques, privées et religieuses. Toutefois, la plupart des écoles privées font payer des frais de scolarité qui peuvent dépasser les coûts unitaires du système public. Par conséquent, les parents doivent être autorisés à compléter la valeur du chèque-éducation. Dans bien des cas, les coûts varient sensiblement, même entre écoles publiques. Si l'État autorise les écoles publiques à facturer des frais de scolarité pour couvrir leurs coûts et permet aux parents de compléter le montant des chèques-éducation Figure 1. Les différents types de chèques-éducation Usage limité valeur fixe • frais uniformes soumis à restriction Usage illimité • complément possible frais uniformes • soumis à restriction Usage illimité • complément possible coûts et frais • transport inclus • soumis à restriction Usage illimité • complément possible • coûts et frais transport inclus • basé sur le revenu • soumis à res- triction Usage illimité • complément possible • coûts et frais transport inclus • basé sur le revenu • sans restrictions Source: Blaug 1984, 164. 8 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE dans les écoles aussi bien publiques que privées, il s'agit alors d'un sys- tème de chèques-éducation couvrant à la fois les frais de scolarité et les coûts divers. Toutefois, un système de chèques-éducation sans restric- tions, dont le montant peut être complété et qui couvrent à la fois les frais de scolarité et les coûts divers, n'élargirait pas le choix offert à tous les parents à moins que les frais de transport ne soient eux aussi cou- verts. Qui plus est, pour accroître l'égalité des chances, il faut aussi que la valeur du chèque soit fonction du revenu de la famille. Pour ce faire, on peut soit soumettre le chèque à l'impôt, soit réduire sa valeur en pro- portion directe du revenu déclaré. Si les chèques sont accompagnés de restrictions, l'école n'a pas le droit de refuser d'accueillir un élève pour quelque motif autre que son niveau scolaire. Dans le cas contraire, les chèques-éducation entrent dans la catégorie des chèques non soumis à restrictions. L'évaluation des chèques-éducation peut se faire selon six critères libre choix des parents, rapport coût-efficacité, diversité, esprit d'inno- vation, montant total des frais de scolarité et égalité des chances en matière d'enseignement. Le débat sur ces critères n'a débouché sur aucune conclusion définitive. En fait, les interlocuteurs ne parviennent même pas à se mettre d'accord sur ce que signifient le libre choix, l'ef- ficacité, la diversité et l'égalité des chances (Blaug, 1984). Compte tenu des dispositions constitutionnelles en vigueur, les expériences menées sur le libre choix de l'école aux États-Unis n'ont pas englobé les écoles religieuses. La question du choix est envisagée essentiellement dans le cadre des écoles publiques. Cela élimine la pré- férence que pourraient exprimer des parents en faveur de certains types d'influences et de valeurs, en particulier chez les familles plus pauvres qui ne peuvent pas sortir du système des écoles publiques. Cependant, comme on le verra ci-dessous, des expériences récentes lancées pen- dant l'année scolaire 1996/97 permettront enfin aux parents de choisir des écoles privées ou religieuses. Débat sur la question du libre choix aux États-Unis Étant donné que la Constitution des États-Unis s'oppose à l'interférence de l'église et de l'État - une contrainte qui n'existe pas dans certains pays en développement - le transfert à d'autres pays d'enseignements tirés de l'expérience des États-Unis est sujet à caution. On espère cepen- dant que l'analyse de certains ouvrages sur les systèmes de chèques- éducation utilisés aux États-Unis permettra de clarifier quelque peu le débat en cours. DEFINITON DES FINANCEMENTS AXES SUR LA DEMANDE 9 Dans bien des cas, ce sont les pauvres qui bénéficieraient le plus de la possibilité de choisir une école. Une étude réalisée en 1992 sous les auspices de la Reason Foundation en Californie (Beales, 1992) a montré que 52 % des personnes interrogées utiliseraient un chèque-éducation de 2 600 dollars pour envoyer leurs enfants dans une école privée. C'est au sein des minorités, et notamment chez les Noirs américains, que le concept de chèque-éducation a été reçu avec enthousiasme: deux tiers des Noirs américains ayant des enfants d'âge scolaire et 58 % environ de toutes les minorités, y compris chez celles originaires d'Amérique latine et d'Asie, ont indiqué qu'ils utiliseraient les chèques-éducation. Il est également à noter que ce sont les ménages ayant un revenu infé- rieur à 25 000 dollars par an qui se sont montrés les plus favorables à un tel programme (Beales, 1992 ; voir également Hoxby, 1996). Selon ses partisans, le libre choix intensifiera la concurrence et amé- liorera de ce fait l'efficacité et les résultats des écoles. L'une des ques- tions fondamentales est le coût énorme de la perception des impôts, de l'ordre de 50 à 80 cents par dollar, ce qui fait pencher le débat sur l'effi- cacité en faveur des écoles privées (West, 1991). La plupart des études aboutissent à la conclusion que l'enseignement public est plus coûteux que l'enseignement privé (voir par exemple Lott, 1987). En fait, l'argu- ment selon lequel les écoles publiques ont limité le choix en évinçant les concurrents potentiels par la monopolisation de l'enseignement a même été avancé (Peterson, 1990). Selon une autre conclusion de l'étude réali- sée pour le compte de la Reason Foundation, si 52 % des personnes qui se disent prêtes à utiliser un chèque-éducation pour envoyer leurs enfants dans des écoles privées passaient à l'acte, les économies réali- sées par l'État de Californie atteindraient 3 milliards de dollars, soit l'équivalent de près de 14% du budget de l'État pour l'éducation (Beales, 1992). De ce fait, toujours selon la même étude, il suffirait que 17 % des élèves s'inscrivent dans une école privée pour qu'un programme de chèques-éducation parvienne au seuil de rentabilité. Il faut cependant préciser que les économies sont toutes réalisées au niveau de l'État, pas à celui des districts. Pour qu'un programme de chèques-éducation soit rentable à l'échelle du district, il faut que le nombre d'élèves qui quittent les écoles du district pour aller dans des écoles privées soit suffisant pour réduire les frais fixes (bâtiments, trans- ports, bibliothèques et remboursement des dettes). Dans l'un des scénarios envisagés, le libre choix remplacerait le mode actuel de stratification par revenu et par race (qui favorise également l'homogénéité et l'exclusivité des zones résidentielles) par une stratifi- cation basée sur les performances et le comportement des élèves (Coleman, 1992). Les établissements d'enseignement supérieur et les universités basent leur politique d'admission sur ces critères. Coleman 10 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE soutient que les parents devraient avoir le droit de choisir le type d'en- seignement qui convient le mieux à leurs enfants, en particulier du point de vue des valeurs philosophiques et religieuses. Même lorsqu'on leur propose l'école qui correspond le mieux à leurs préférences, les familles devraient quand même pouvoir choisir l'école la mieux adaptée aux besoins précis de l'élève en matière d'enseignement (Coleman, 1992). L'impact probable du choix du marché ne fait cependant pas l'unani- mité. Levin (1992) souligne que le marché dans le secteur des écoles indé- pendantes est limité et que rares sont ceux qui ont les moyens de payer. Il soutient qu'il n'y a que deux options possibles: soit on s'en remet au marché, soit on s'en remet à l'État. Dans un système de choix du marché, qui peut s'accompagner de crédits d'impôt sur les frais scolaires ou de chèques-éducation, les écoles publiques et privées sont en concurrence pour attirer des élèves. Chaque enfant reçoit un chèque-éducation qu'il peut utiliser pour payer un montant donné de ses frais de scolarité. Par contre, dans un système fondé sur l'enseignement public, l'État paie tou- jours les écoles dont il est également le gestionnaire, même si certaines fonctions peuvent être sous-traitées. On estime que la formule du mar- ché procure des avantages privés plus importants tandis que celle qui est axée sur l'enseignement public s'accompagne d'avantages plus marqués sur le plan social. La formule du marché satisfait les exigences privées et donne des résultats scolaires légèrement supérieurs. Lorsque la question du libre choix est examinée non plus en théorie mais sur le plan pratique, la situation se complique (Boyd et Kerchner, 1988). Même les partisans du libre choix, comme William Bennett, ancien Secrétaire d'État américain à l'éducation, et ses disciples, s'ex- priment avec tout autant de conviction sur la nécessité d'un programme d'étude normalisé pour les écoles élémentaires et secondaires. Les appels à une plus grande liberté de choix des écoles aux États-Unis sont lancés par les mêmes personnes qui citent l'Allemagne et le Japon en exemples de réussite en matière d'enseignement, alors même que les systèmes d'enseignement de ces deux pays offrent moins de possibili- tés de choix qu'aux États-Unis. On constate également un désaccord quant aux objectifs de l'éduca- tion. Les partisans du libre choix supposent que l'objectif sociétal de l'éducation est atteint lorsque les familles choisissent le type d'ensei- gnement en fonction de leurs goûts et jugements propres. La scolarisa- tion revêt néanmoins une importance fondamentale dans les sociétés démocratiques : elle protège et soutient les institutions politiques, sociales et économiques et permet les changements démocratiques. Les élèves doivent par conséquent avoir une expérience éducative com- mune, plutôt qu'une expérience fondée sur des choix individuels ou familiaux. C'est là que le dilemme touche à son paroxysme : l'éducation DÉFINITION DES FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE il se situe à la croisée de deux intérêts opposés, à savoir le droit des parents de choisir certaines expériences, influences et valeurs pour leurs enfants et les impératifs d'une société démocratique. Le problème consiste donc à fournir une expérience commune tout en permettant un certain degré de choix (Levin, 1991). Face à ce défi, Levin (1980) soutient que la promotion de différentes formules d'enseignement public constitue peut-être un meilleur moyen d'aborder la question du libre choix. Des différences peuvent exister entre les systèmes de chèques-éducation dans trois domaines, à savoir les finances, la réglementation et l'information, qui, selon leur combi- naison, peuvent avoir des effets différents sur les pauvres. À titre d'exemple, les indemnités de transport peuvent aider les pauvres, tan- dis que les « suppléments » tels que les propose Friedman (1962) peu- vent avoir un impact négatif sur eux. Ces suppléments sont des fonds privés qui s'ajoutent à la valeur des chèques-éducation fournis par un organisme public - des chèques « complétables », suivant le vocabu- laire de Blaug (1984). L'information concernant ces suppléments devrait être fournie de manière égale à chacun pour assurer un choix équitable. Les règlements devraient être adaptés en ce qui concerne les pro- grammes d'étude, le personnel et, ce qui est important, les admissions. De nombreuses améliorations peuvent être apportées à ce système en instaurant un degré considérable de gestion parentale pour per- mettre aux écoles de mieux répondre aux besoins précis des élèves. Ces améliorations peuvent consister à pratiquer un système d'inscriptions ouvert, créer des écoles « phares » pour réduire la ségrégation, ouvrir des mini-écoles à l'intérieur de bâtiments scolaires existants, permettre aux lycéens de suivre des cours dans des établissements locaux d'en- seignement supérieur, et fournir des « mini-chèques-éducation » que les élèves pourraient utiliser pour un nombre restreint de cours, comme par exemple des programmes de perfectionnement dans les domaines de la musique, de la poterie et du tissage. Les choix axés sur le marché peuvent exiger un ensemble excessif de règlements qui seraient coûteux et difficiles à appliquer et à faire respecter (Murnane, 1986). Il est possible que le coût des écoles privées soit sous-estimé, car les enquêtes réalisées ne tiennent pas compte des services fournis gratuitement par le clergé ni des contributions recueillies par des collectes de fonds (Sullivan, 1981). Certains sou- tiennent que les écoles privées recrutent des enseignants moins expé- rimentés et leur versent des salaires moins élevés (Chambers, 1985). Pour assurer des résultats scolaires satisfaisants, la société devra éga- lement absorber un coût supplémentaire (Krashinsky, 1986) lié à la nécessité d'informer. Dans le contexte du système de marché, davan- tage d'informations sont nécessaires en raison des changements, et la 12 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE diffusion de ces informations sera coûteuse. Le coût global des activi- tés d'information et de réglementation et des autres aspects du sys- tème de marché parallèlement à la fourniture d'un minimum de protection sociale pourrait s'avérer très élevé par rapport à celui d'un système basé sur le choix du public (Levin, 1991). Certaines décisions juridiques et législatives prises récemment sem- blent indiquer qu'un choix plus large sera bientôt proposé aux élèves des écoles publiques. Dans l'Ohio, le Cleveland Scholarship Program a mis de côté des fonds publics pour permettre à 2 000 élèves de condi- tion modeste d'entrer dans des écoles privées et religieuses à partir de l'automne 1997. À Milwaukee, où l'on a observé une amélioration des résultats scolaires chez les élèves qui participaient au premier pro- gramme de libre choix lancé aux États-Unis, les autorités législatives du Wisconsin ont approuvé l'extension de ce programme aux écoles reli- gieuses. Cependant, les deux principales barrières à une telle expéri- mentation, à savoir l'obstacle juridique (constitutionnel) et l'obstacle politique (que représentent les syndicats d'enseignants) n'ont pas encore été levées. Milwaukee a financé le premier programme de choix d'écoles lancé aux États-Unis à l'aide de fonds publics. Grâce à ce programme, les parents à faible revenu reçoivent des chèques-éducation qu'ils peu- vent utiliser pour envoyer leurs enfants dans des écoles privées laïques. Dans son évaluation de cette expérience de choix d'écoles, Witte (1996) a constaté que jusqu'à présent le choix n'avait pas débou- ché sur une plus grande efficacité au niveau des écoles. Rien n'indique que les résultats scolaires aient progressé. Toutefois, une seconde ana- lyse des données recueillies a poussé Greene et autres (1996) à conclure « qu'un séjour de trois ans ou davantage dans une école choisie libre- ment améliore les résultats scolaires, ces derniers étant mesurés sur la base des notes obtenues aux tests normalisés d'aptitude aux mathé- matiques et à la lecture. » Les données utilisées sont tirées d'une expé- rience naturelle dans laquelle les élèves ont été placés, au hasard, dans des groupes témoins. Les auteurs de cette étude récente soutiennent que Witte et son équipe de chercheurs n'ont pas employé les tech- niques analytiques appropriées et se sont au contraire concentrés sur des comparaisons entre des élèves ayant choisi librement leur école et un échantillon beaucoup moins défavorisé d'élèves d'écoles publiques. Greene et autres (1996) affirment qu'aucune conclusion valide ne peut être tirée des comparaisons effectuées par Witte. Le débat se poursuit, mais on peut également se référer à Rouse (1997) qui, après un nouvel examen des données disponibles, vient de conclure que le libre choix de l'école se traduisait par des progrès en mathématiques mais pas en lecture. DÉFINITION DES FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE 13 Éducation, valeurs et choix Trois pays - l'Australie, le Danemark et les Pays-Bas - offrent un choix à leurs élèves depuis de nombreuses années, tandis que plusieurs autres (dont la Belgique, le Canada, l'Espagne, la France, l'Irlande et le Japon) apportent une aide publique aux écoles privées (Doyle, 1984). À l'inverse des États-Unis, la question de l'interférence de l'église et de l'État est réglée en fournissant une assistance financière aux écoles pri- vées et religieuses, et non pas en leur refusant toute aide. Avant de tirer des enseignements de ces systèmes, nous devons ana- lyser les méthodes utilisées pour permettre le libre choix de l'école dans le système scolaire public de la plupart des pays industrialisés et des pays en développement. En règle générale, le choix est donné par le biais de la réussite à des examens passés à différentes étapes du par- cours scolaire. La difficulté de ces examens augmente progressivement à mesure que le nombre de places disponibles diminue, c'est-à-dire devient plus limité en raison de préoccupations budgétaires réelles. Le système comprend donc des écoles publiques d'élite qui proposent ensuite des choix à leurs élèves. Au début du XIXe siècle, l'enseignement public gratuit a suscité un regain d'intérêt au Danemark. En 1814, le gouvernement a imposé sept années de scolarité obligatoire, l'adjectif « obligatoire » signifiant que les parents étaient libres d'éduquer leurs enfants comme bon leur sem- blait dès lors que ces derniers recevaient une instruction dans les matières principales. Aujourd'hui encore, n'importe quel groupe de parents peut solliciter une aide financière de l'État pour créer une école privée à condition qu'elle accueille au minimum 28 enfants. Les Danois préservent la liberté religieuse en octroyant des financements publics à toutes les écoles, qu'elles soient religieuses ou laïques (Doyle, 1984 OCDE, 1985). En Australie, où l'article de la Constitution portant sur la liberté reli- gieuse a été repris textuellement du premier amendement de la consti- tution américaine, cette question est traitée dans les écoles d'une façon qui ne rappelle en rien les États-Unis. La Cour suprême australienne a confirmé le bien-fondé du programme gouvernemental d'aide aux écoles religieuses à condition que le Gouvernement australien reste strictement neutre et traite toutes les religions de façon égale. De nos jours, toutes les écoles privées australiennes bénéficient d'une aide de l'État, sous une forme ou une autre, mais les plus pauvres en reçoivent davantage. Les écoles privées ne sont pas réglementées mais astreintes aux mêmes normes que les écoles publiques. Toutes les écoles sont tenues à un certain niveau de résultats. Les écoles publiques ont pris 14 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXES SUR LA DEMANDE des mesures radicales pour attirer davantage les élèves. L'une des mesures prises à cet égard est l'adoption d'une politique globale d'ins- cription libre couvrant tout l'État, qui laisse un certain degré de choix aux élèves. Aux Pays-Bas, il y a un siècle, un tiers des enfants néerlandais allaient à l'école publique et aujourd'hui, ils fréquentent les écoles privées dans les mêmes proportions. Dans ce pays, celles-ci sont le plus souvent des établissements religieux, les écoles privées laïques constituant l'excep- tion. Les écoles reçoivent une aide de l'État, qui pose cependant trois conditions à l'allocation de ces fonds : les enseignants doivent être agréés, un programme précis de cours doit être suivi et les résultats sco- laires des élèves doivent atteindre un niveau donné. Éducation, ethnicité et politique La nécessité de réformer l'enseignement primaire et secondaire aux États- Unis est due aux carences du système actuel et aux révolutions techno- logiques et politiques de ces dernières décennies (Friedman, 1995). Ces révolutions s'accompagnent non seulement de la promesse d'une formi- dable progression de la production mondiale mais aussi de la menace de voir se produire de graves troubles sociaux liés à l'élargissement du fossé séparant les personnes hautement qualifiées de celles qui n'ont pas de qualifications. Friedman voit dans l'éducation le moyen d'éviter ces troubles sociaux. Il est nécessaire de procéder à une refonte radicale du système éducatif, seule grande force capable de faire obstacle à une stra- tification sociale accrue. Selon Friedman, cette réforme ne pourra se faire qu'en privatisant une grande partie du système d'enseignement, ce trans- fert progressif et néanmoins substantiel des responsabilités de l'État au secteur privé étant réalisé grâce à l'instauration d'un système de chèques- éducation. Un tel mécanisme donnera aux parents une certaine liberté de choix. Le cas des pays de l'ex-Union soviétique, et notamment la Russie, montre bien les limites auxquelles se heurte le choix d'une école. Les groupes ethniques marginalisés, comme les Coréens, les Allemands, les Juifs, les Cosaques, les Bouriates et les Géorgiens ont maintenant la possibilité de faire entendre leur voix. Ces groupes minoritaires sou- haitent, entre autres priorités, que soit mentionnée dans les pro- grammes de cours l'oppression dont ils ont été les victimes. Une telle mention ne manquera pas de déclencher un débat sur les auteurs poten- tiels de crimes contre leur communauté, ce qui risque sérieusement de susciter des conflits ethniques (Heyneman, à paraître). Ce danger DÉFINITION DES FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE 15 potentiel peut être considéré comme l'une des difficultés pratiques associées à l'élargissement des choix en matière d'enseignement. Les différences ethniques peuvent être un facteur de déstabilisation eth- nique. Le choix de l'école n'est pas uniquement une question d'ensei- gnement. On peut dire, pour conclure, qu'il convient de replacer les choix en matière d'enseignement dans un contexte social, politique et économique plus large. Le fonctionnement des mécanismes de financement axés sur la demande: difficultés liées à la situation propre aux différents pays La liberté de choix et les chèques-éducation, tels qu'ils sont habituelle- ment définis dans la plupart des pays industrialisés, ne constituent pas nécessairement des instruments de financement appropriés dans la majorité des pays en développement. Il est toutefois de la plus haute importance d'influencer la demande - autrement dit d'agir sur les variables qui sous-tendent les décisions individuelles et familiales en matière de demande d'enseignement - par différents moyens, y com- pris financiers. Des facteurs économiques, politiques, sociaux et culturels influent sur la demande de scolarisation. Dans bien des cas, la seule existence d'une école ne suffit pas. Même un enseignement « gratuit » ne tente pas nécessairement les familles pauvres. Les ménages et les particuliers définissent leurs demandes en matière de scolarisation au travers d'une analyse implicite des coûts et des avantages. Les parents n'enverront pas leurs enfants à l'école si les avantages escomptés ne sont pas supé- rieurs aux coûts, directs et indirects, liés à leur scolarité. Les avantages de la scolarisation sont fonction de nombreux facteurs. Les politiques en matière d'enseignement ou les méthodes utilisées pour le financer ne permettent pas de résoudre tous les problèmes. La situation macroéconomique, par exemple, joue un rôle très important, tout comme le niveau de revenu personnel disponible et le taux de chômage. Même lorsque les avantages que comporte le fait d'envoyer un enfant à l'école sont grands, certaines familles démunies peuvent être dans l'incapacité d'assumer les coûts directs ou indirects en jeu. Les coûts directs sont les frais de scolarité, les manuels et les fournitures scolaires. Les coûts indi- rects sont notamment le manque à gagner. Bien que les avantages de l'éducation sur le plan social puissent être considérables, beaucoup de familles pauvres peuvent être dans l'impossibilité de faire face à des frais de scolarité trop élevés pour elles. C'est peut-être ce qui se produit dans 16 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE des pays tels que El Salvador, le Guatemala, le Nigeria et l'Ouganda, où le taux de rentabilité sociale de l'enseignement primaire est jugé élevé mais où tous les enfants ne sont pas scolarisés au niveau primaire (Banque mondiale, 1995; Psacharopoulos, 1994). Des mécanismes de financement axés sur la demande peuvent être utilisés pour aider les familles pauvres à investir dans l'éducation de leurs enfants. On peut y parvenir, dans une large mesure, en diminuant le montant officiel des frais de scolarité, mais d'autre mesures peuvent s'avérer nécessaires. À titre d'exemple, de nombreux systèmes scolaires facturent d'autres frais liés à la scolarité. Les mécanismes axés sur la demande peuvent indemniser les familles pauvres pour couvrir ces frais (tableau 3). Qui plus est, en cas d'insuffisance des compensations directes, certains coûts d'opportunité peuvent être pris en charge. Il est par exemple possible de donner aux familles démunies des chèques- éducation qu'elles peuvent encaisser à condition que leurs enfants soient scolarisés. Dans certains cas, les incitations financières ne sont pas suffisantes. Les parents peuvent continuer à sous-estimer l'importance de l'éduca- tion de leurs enfants, notamment celle de leurs filles. En pareil cas, il peut s'avérer utile d'associer aux incitations financières des mesures d'incitation sociale telles que le marketing social des avantages que présente l'éducation des filles. Ce marketing social, qui vise à susciter la demande, peut avoir une rentabilité sociale très élevée pour la com- munauté. Parmi les autres actions du même type, il faut citer l'ensei- gnement bilingue pour les minorités linguistiques et la modification du programme scolaire pour des groupes de population jusque-là exclus du système. Certains instruments financiers sont mieux adaptés que d'autres à chaque étape du cycle scolaire (tableau 4). Il convient d'étudier les méca- nismes de financement axés sur la demande dans le contexte du système d'éducation global d'un pays : ces mécanismes ne constituent pas une panacée. Le niveau d'enseignement doit également être pris en compte. De ce fait, les mécanismes qui encouragent le libre choix doivent être envisagés de façon pragmatique comme un outil parmi tant d'autres, permettant d'entreprendre des réformes réalisables sur le plan pratique dans le domaine de l'enseignement et adaptées à la fois au niveau sco- laire et aux ressources et besoins locaux. À l'instar d'autres outils, les mécanismes qui encouragent le libre choix peuvent être utilisés à bon escient ou de manière irréfléchie (Henig, 1994). La « G.I. Bill » des États- Unis constitue un exemple d'utilisation réussie d'un instrument de finan- cement axé sur la demande : elle a en effet répondu aux besoins spécifiques des soldats de retour de la guerre, qui souhaitaient faire des études supérieures pour avoir davantage de chances de trouver un emploi dans la vie civile. Le programme « Head Start », mis en place aux DÉFINITION DES FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE 17 Tableau 3. Utilisation de mécanismes de financement axés sur la demande et mesures d'incitation pour susciter la demande Financements axés sur la demande et incitations destinées Questions à examiner Problème à susciter la demande durant la mise en oeuvre Coûts directs Dispense de frais d'études/ Les écoles pourraient exemption de frais scolaires; faire payer d'autres frais Prêts pour études Mise en place nécessaire d'un système de collecte des remboursements Combinaison de financements Cette combinaison ne privés et subventions de l'État doit pas avoir d'impact négatif sur les élèves pauvres Coûts indirects Chèques-éducation Politique d'admission (d'opportunité) sélective, ce qui peut créer des divisions sociales ; frais de transport Bourses d'études Les bourses peuvent ne pas être bien utilisées; l'école peut augmenter le coût des études et les frais de scolarité Allocations Les allocations peuvent ne pas être bien utilisées ou ne pas atteindre le groupe cible pour des questions de politique locale Infrastructures Financements communautaires Durabilité Faible valeur Marketing social Ce marketing doit des investissements toucher la population scolaires (en faveur cible des filles, par exemple) Langues Enseignement bilingue Certaines langues peuvent être négligées, ce qui peut créer des clivages sociaux Distances Subventions communautaires Durabilité Exclusion Changements de programme Édulcoration du programme ou éloigne ment du programme de base; peut créer des divisions sociales Source: Tableau élaboré par les auteurs. 18 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE Tableau 4. Liste partielle des différentes méthodes de financements axées sur la demande, par niveau d'enseignement Enseignement Enseignement Enseignement Problème primaire secondaire supérieur Qualité Chèques-éducation Chèques-éducation Bourses ciblées Bourses ciblées Compétences Financements Financements et Aide étrangère en matière communautaires subventions de gestion publiques Subventions communautaires Aide étrangère Aide étrangère Combinaison Combinaison de financements de financements privés et de privés et de subventions subventions publiques publiques Efficacité Financements Financements Financements par les parents par les parents par les parents Chèques-éducation Chèques-éducation Égalité des Aide aux écoles Chèques-éducation Prêts aux études privées Allocations Redevances des usagers Allocations Bourses Bourses Bourses Impôts Bourses ciblées Redevances des usagers Financement des Impôts d'affectation déficits spéciale Impôts Impôts d'affectation spéciale Source: Tableau établi par les auteurs. États-Unis en faveur de la petite enfance, est un autre exemple de méca- nisme axé sur la demande: ces 30 dernières années, près de 15 millions d'enfants de familles à faible revenu en ont bénéficié (Young, 1996). Analyse de projets financés par la Banque mondiale Les clients de la Banque mondiale ont fait appel à des mécanismes inédits de financement axés sur la demande dans le cadre de récents DÉFINITION DES FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE 19 projets d'éducation. L'analyse qui suit porte sur des projets d'éducation financés par la Banque mondiale et mis en oeuvre entre 1993 et 1996. Elle se limite aux projets contenant des éléments de financements axés sur la demande. Plutôt qu'une critique ou une évaluation, c'est une vue d'ensemble que nous proposons ici, pour démontrer que les financements axés sur la demande sont utilisables et qu'ils existent dans certains pays en développement. Des études de cas plus détaillées sur les projets réali- sés au Bélouchistan, au Pakistan et au Bangladesh figurent dans l'ou- vrage de Patrinos, Ariasingam et Liang (à paraître). Cet ouvrage reprend également les questions d'évaluation rétrospective des projets de manière plus approfondie. Après avoir procédé à une évaluation rétrospective d'expériences de libre choix de l'école menées dans plusieurs pays, l'OCDE a conclu que les gouvernements devraient peut-être promouvoir la diversité des écoles tout autant que le libre choix afin d'éviter les pièges qui accom- pagnent le libre choix. En se basant sur une étude du libre choix de l'école en Angleterre, en Australie, aux États-Unis, en Nouvelle- Zélande, aux Pays-Bas et en Suède, l'OCDE (1994) conclut que le libre choix peut renforcer la stratification sociale en constituant un avantage pour les groupes favorisés de la société, qui sont mieux préparés à exer- cer ce choix. Cependant, ce système ne donne pas de bons résultats lorsque de nombreux choix ne peuvent pas être satisfaits parce que les préférences sont concentrées sur un nombre restreint d'écoles. L'étude de l'OCDE conclut en outre que les gouvernements peuvent faire beau- coup pour que le libre choix fonctionne bien, notamment en injectant des capitaux dans des écoles cotées pour qu'elles puissent s'agrandir et fournir davantage d'informations et des ressources supplémentaires aux groupes défavorisés. La liste (tableau 5) des projets discutés dans le présent document n'est pas complète. Pendant l'élaboration de ce rapport, plusieurs pro- jets novateurs ont été lancés dans le domaine de l'enseignement, entre autres en Indonésie et en Tanzanie, et dans celui de la formation, au Kenya (voir Patrinos, Ariasingam et Liang, à paraître). 20 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE Tableau 5. Financements axés sur la demande dans les projets d'éducation inclus dans la présente étude Coût total Pays et année Projet (USD millions) Bangladesh, 1993 Aide aux écoles secondaires de filles 88 Chine, 1994 Éducation de base dans les régions pauvres et minoritaires 192 Colombie, 1993 Second projet d'éducation 150 Jamaïque, 1996 Prêts pour études 38 Mexique, 1994 Second projet d'éducation primaire 617 Pakistan, 1993 Enseignement primaire au Bélouchistan 330 Pakistan, 1995 Enseignement primaire dans la province frontalière du Nord-Ouest 539 République dominicaine, 1995 Second projet d'éducation de base 100 Tchad, 1993 Éducation de base 34 DÉFINITION DES FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE 21 Coût unitaire annuel de la composante Coût des financements Mécanisme de financements axés axés sur la Crédit financement axé sur la demande demande (USD millions) sur la demande (USD millions) (USD) 68 Allocations pour les filles 42 12-36 100 Bourses ciblées pour les enfants 30 79 pauvres et minoritaires, et manuels gratuits 90 Bourses ciblées, système de chèques-éducation 8 143 29 Prêts pour études 29 300 412 Bourses ciblées pour populations pauvres et autochtones 412 n.a. 106 Bourses pour communautés et mécanismes proches des chèques-éducation 1 4 150 Subventions aux écoles privées accueillant des écolières rurales à faible revenu 1 3 89 Aide aux écoles privées accueillant des élèves à faible revenu 4 n.a. 19 Financements communautaires ,1 240 (par enseignant) n.d: non disponible. Source: rapports d'évaluation. 2 Instruments de financement axés sur la demande L a première partie du présent chapitre est consacrée à la présentation des instruments de financement axés sur la demande utilisés dans les projets financés par la Banque mondiale, qui font l'objet de cette analyse. Elle a pour objet de cerner les caractéristiques essentielles de ces outils à l'aide de définitions de travail simples. Des cas précis sont ensuite décrits à titre d'exemples dans la seconde partie du chapitre. Définition des différents mécanismes Aux fins de la présente analyse, une allocation est une somme d'argent que verse un organisme public à une famille pour compenser les dépenses liées à la scolarisation d'un enfant. Sont couvertes les dépenses de base comme les manuels, les frais d'études et de transport et les dépenses accessoires telles que les fournitures, les cotisations pour les activités récréatives et les vêtements. Une allocation sert éga- lement à dédommager la famille du travail que ne peut fournir l'enfant du fait qu'il est scolarisé. En d'autres termes, elle peut couvrir le coût d'opportunité. Dans de nombreux cas, elle ne s'accompagne d'aucune liberté de choix de l'école et devient plutôt un mécanisme donnant aux enfants pauvres la possibilité d'aller à l'école. C'est en permettant aux filles des familles rurales pauvres d'aller à l'école que ce mécanisme s'avère particulièrement efficace. Il a notamment été utilisé dans le cadre du projet d'aide aux élèves de sexe féminin de l'enseignement secondaire au Bangladesh (Patrinos, Ariasingam et Liang, à paraître). Parfinancements communautaires, on entend soit des contributions moné- taires, soit un appui autre que financier sous forme de terrains, de main- d'oeuvre ou de fournitures scolaires et de marketing social des avantages que présente l'enseignement. Dans le projet d'éducation de base du Tchad, le financement communautaire sert à créer des associations de parents d'élèves, qui jouent un rôle vital dans les villes et les villages. Les bourses ciblées sont des sommes d'argent qui peuvent être versées directement à des écoles, des municipalités ou des provinces et qui pour- 22 INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXÉS SUR LA DEMANDE 23 suivent des objectifs précis comme améliorer les programmes ou per- mettre aux enfants de minorités ou de groupes indigènes ou pauvres d'ac- céder plus facilement à l'enseignement. Elles ne sont pas attribuées aux élèves ou à leurs familles mais mises à la disposition du responsable des services financiers ou de l'économe concerné. Dans le cadre du projet d'éducation de base exécuté dans les régions pauvres de Chine, et celles où vivent des minorités, les fonds en question sont versés aux économes de ces zones dans le but précis de répondre aux besoins des pauvres et des minorités en matière d'enseignement. Dans le cadre du second projet d'enseignement primaire au Mexique, ces bourses sont destinées à aider les élèves indigènes à payer le coût des manuels et autres supports péda- gogiques. Les fonds d'amélioration des écoles, dont le concept est proche de celui des bourses ciblées, sont utilisés dans des projets d'éducation en Arménie, au Chili, en Inde et au Paraguay. Ils servent en général à finan- cer, sur la base de concours, des initiatives conçues localement pour encou- rager une participation et une autonomie scolaires accrues. On atteint ces objectifs en permettant aux écoles de décider en faveur de qui, où et quand elles investiront des ressources supplémentaires. Un chèque-éducation est une somme d'argent en espèces qu'un orga- nisme public (dans la plupart des cas) verse directement aux élèves. Toutefois, les définitions en sont extrêmement variées. À la différence des allocations, les chèques-éducation comportent un élément de choix de l'école. Les écoles peuvent faire payer des frais de scolarité supé- rieurs au montant des chèques en question ou utiliser ces derniers comme seule forme de paiement. Elles peuvent aussi imposer des règle- ments en ce qui concerne l'admission de nouveaux élèves, les pro- grammes et le personnel, et il doit y avoir égalité d'accès à l'information au sujet des options de scolarité offertes pour que le marché puisse fonctionner correctement. Les élèves peuvent remettre leurs chèques à l'école de leur choix. Dans certains cas, ils ont la possibilité de les utili- ser pour aller dans une école spécialisée, par exemple, dans la musique ou les arts. Grâce au mécanisme des chèques-éducation, un élève issu d'un milieu défavorisé peut éviter d'aller dans une médiocre école de quartier ou s'inscrire dans une école qui correspond davantage à ses caractéristiques culturelles. Un système de chèques qui tient compte de paramètres tels que les transports, l'accès à l'information et les critères d'admission et qui modifie le montant des chèques en fonction du revenu familial aidera les pauvres, car chacun de ces ajustements est conçu spécialement pour atténuer les problèmes que pose leur scolari- sation. Le projet d'enseignement secondaire en Colombie est un pro- gramme de chèques-éducation qui renforce les chances et élargit les choix des enfants pauvres en leur donnant des ressources financières directes sous forme de chèques-éducation. 24 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE L'accès aux écoles privées constitue un important élément de choix. Le fait de donner cet accès aux pauvres favorise l'égalité des chances. Par conséquent, l'aide publique aux écoles privées peut élargir la gamme des choix et améliorer l'égalité des chances si elle s'accompagne de mesures destinées à faciliter l'accès des pauvres aux écoles privées. Ce mécanisme de financement est similaire à celui des chèques-éducation, si ce n'est que l'argent est versé aux institutions privées en fonction du nombre d'élèves pauvres qu'elles accueillent. De ce fait, ce mécanisme s'apparente également à une allocation forfaitaire par personne. L'aide publique fournie aux écoles privées peut prendre des formes très variées. Dans certains pays, elle sert à rémunérer les enseignants et le personnel ; dans d'autres, il s'agit de subventions pour l'achat de four- nitures, les travaux d'entretien, les transports et le matériel. Dans le cadre du second projet d'éducation de base en République domini- caine, les pouvoirs publics subventionnent les écoles privées qui accueillent des enfants de familles à faible revenu. Pour l'essentiel, l'État finance la prestation privée d'une scolarité axée sur les pauvres. Les prêts pour études servent à aider à rembourser les frais engagés par l'État et également à aider un plus grand nombre d'élèves à pour- suivre des études supérieures. Il peut s'agir de prêts commerciaux pri- vés ou de prêts garantis par l'Etat. Ce dernier peut jouer un rôle actif en sélectionnant les candidats ou en fixant une réglementation. Dans le cadre du projet de prêts pour études en Jamaique, l'État met des fonds à la disposition des élèves en faisant appel au concours de banques commerciales, et il fournit en outre les garanties de crédit requises. Les subventions communautaires sont accordées, sous forme de somme forfaitaire, à un groupe d'élèves mais ces derniers doivent, en contrepar- tie, être scolarisés dans un établissement créé à l'échelon communautaire. On dit parfois de ce système qu'il est voisin de celui des chèques-éduca- tion car la somme versée dépend du nombre d'élèves et cette méthode inclut un élément de libre choix: ce sont en effet les parents qui choisis- sent d'envoyer leurs enfants à l'école de la communauté, permettant ainsi à celle-ci de remplir les conditions requises pour recevoir des subventions en espèces. Ces sommes peuvent couvrir une partie des dépenses ou la totalité des frais de scolarité. Au Bélouchistan, les versements prennent la forme de subventions permettant aux filles d'aller à l'école locale. Dans ce cas, les subventions permettent de s'attaquer aux problèmes d'égalité entre les sexes puisqu'elles sont versées sous forme de sommes forfaitaire aux écoles qui accueillent ces filles. Lesfonds sociaux, qui sont des organismes spéciaux dotés de certains pouvoirs en matière de programmation des investissements, s'appa- rentent à cette définition des subventions communautaires. Les fonds sociaux encouragent les groupes publics, privés ou locaux à leur sou- INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXES SUR LA DEMANDE 25 mettre des propositions. Par définition, une telle philosophie du déve- loppement est axée sur la demande. Certains fonds sociaux sont spé- cialement conçus pour susciter une certaine demande. Ils donnent à leurs clients le choix parmi une série d'options, leur fournissent des informations pour les aider à faire des choix éclairés et exigent des preuves d'engagement et d'intérêt, en règle générale au travers de contributions en espèces ou en nature ou en faisant assumer à leurs clients la gestion des opérations. Cet accent mis sur la demande fournit un gage de durabilité, au même titre que les preuves d'engagement (Carvalho, 1997). Le Fonds bolivien d'investissement social a appuyé les efforts que mènent les organisations non gouvernementales (ONG) et les organismes bénéficiant de l'aide de l'église pour installer des écoles et d'autres services sociaux dans un grand nombre de zones rurales isolées (van der Gaag, 1995). Dans certaines régions, les fonds sociaux fournissent des financements en faveur de l'enseignement et d'autres services sociaux ; c'est notamment le cas du Fonds d'investis- sement social en Arménie et du Fonds de réinsertion sociale et de déve- loppement en Éthiopie. Exemples provenant de différents pays La partie suivante du présent rapport décrit les différents instruments de financement axés sur la demande à l'aide d'exemples de projets d'éducation financés par la Banque mondiale. Les mécanismes, les résul- tats obtenus et les problèmes qui restent posés sont passés en revue. Allocations au Bangladesh Le Bangladesh consacre 2,2 % de son produit national brut (PNB) à l'éducation (alors que la moyenne s'établit à 3,8 % pour les pays en développement et à 5,8 % pour les pays industrialisés). En 1992, le montant total des crédits de l'État en faveur de l'éducation a représenté 12,5 % du budget national. L'enseignement primaire a reçu 55 % de ces crédits contre 22 % pour l'enseignement secondaire et supérieur. Le taux de scolarisation féminine au Bangladesh est parmi les plus faibles du monde. À l'échelon national, seules 20 % des Bangladaises âgées de 5 ans et plus sont alphabétisées. En 1991, 1,9 million de filles âgées de 6 à 10 ans n'étaient pas inscrites à l'école primaire et 6,9 millions de filles âgées de 11 à 16 ans ne poursuivaient pas d'études secondaires. Le but du Projet d'aide aux élèves féminines du secondaire est de permettre à un nombre accru de filles de suivre des études secondaires. 26 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE L'enquête sur la population active menée en 1989 montre qu'en milieu rural, 91 % de l'ensemble des filles travaillent à des tâches ménagères, ce qui permet de conclure à un coût d'opportunité très élevé de l'en- seignement, clairement lié à la pauvreté. Le projet, d'un coût total de 88 millions de dollars, est financé à hauteur de 68 millions de dollars par un crédit de l'Association internationale de développement (IDA). Ce projet intéresse 118 subdivisions administratives. Sans allocations, l'accès à l'examen du certificat d'études secondaires est limité aux élèves qui ont les moyens de payer les frais d'inscription à l'examen, les fournitures scolaires et les cours particuliers. En 1991, les filles qui se sont présentées à cet examen n'ont représenté qu'un tiers environ des 475 261 élèves inscrits. Une allocation destinée aux filles aptes à se présenter, qui couvre les frais de pension, la préparation à l'examen et le coût des fournitures scolaires, encourage un plus grand nombre de filles à se présenter à l'examen. Après avoir obtenu leur cer- tificat, celles-ci peuvent poursuivre leurs études ou trouver un emploi. D'une durée de 7 ans, le projet comprend une enveloppe de 42 mil- lions de dollars pour le financement de la composante allocations et vise à accroître le nombre de filles inscrites dans une école secondaire sur un quart environ du territoire du pays en fournissant des alloca- tions pour 1,5 million de filles-année d'enseignement secondaire. Il couvre les six premières années du plan de 13 ans établi par les pou- voirs publics pour favoriser l'accès des filles à l'enseignement secon- daire. L'exécution du projet a débuté en janvier 1994. Outre les allocations destinées aux écolières du secondaire, le projet sert à finan- cer les salaires d'enseignants supplémentaires dans le secondaire, des cours de formation professionnelle destinés aux filles en âge de suivre des études secondaires et qui quittent l'école, des campagnes de sensi- bilisation du public aux avantages de l'enseignement, des cours d'hy- giène à l'école et l'aménagement d'un nombre accru de latrines et de puits tubulaires, et le renforcement institutionnel de l'administration publique responsable de l'enseignement secondaire. La structure de gestion de l'ensemble du projet comprend plusieurs centres de décision. Un comité directeur interministériel se réunit chaque trimestre pour formuler et examiner les stratégies, prendre les décisions de politique générale requises à l'échelon interministériel et résoudre les problèmes rencontrés dans l'exécution du projet. Un groupe consultatif se réunit une fois par mois pour étudier les difficultés liées au projet et recommander des mesures correctives. Une unité chargée de l'exécution du projet, dirigée par une directrice de projet bénéficiant de l'assistance voulue, élabore les plans de travail et les budgets, coor- donne l'assistance technique et en établit le calendrier, assure la coordi- nation et le suivi des activités, informe la Direction de l'enseignement INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXES SUR LA DEMANDE 27 secondaire et supérieur des problèmes survenant dans l'exécution du projet, recommande les interventions nécessaires et sous-traite l'assis- tance technique, les services, les études et la formation. FONCTIONNEMENT DU SYSTÈME. L'antenne du projet installée dans chaque subdivision assure les liaisons indispensables entre l'unité char- gée de l'exécution du projet et les écoles. Elle appuie également les acti- vités qui inciteront les écoles à signer l'accord de coopération et aide ces dernières à réaliser l'ensemble des activités prévues dans le cadre de l'école. Chaque antenne s'efforce en outre de renforcer les liens entre les associations de parents d'élèves et les comités de gestion des écoles. Elle est par ailleurs chargée de mettre en place le comité consultatif de la subdivision pour l'éducation des filles. Le directeur ou la directrice de chaque école incluse dans le projet désigne au sein de son établissement, un coordonnateur du projet dont la fonction essentielle est d'assurer une bonne coopération en ce qui concerne l'exécution et la gestion du projet au niveau de l'école. Ce coordonnateur aide les écolières à surmonter leurs problèmes scolaires ou personnels en leur fournissant avis et conseils. Le comité consulta- tif de la subdivision pour l'éducation des filles participe activement à l'exécution du projet dans les subdivisions concernées. Parmi ses nom- breuses tâches, il doit fournir des conseils et des recommandations quant aux difficultés rencontrées par le projet et encourager la partici- pation à l'échelon communautaire. Les allocations sont versées directement aux écolières en deux paie- ments par an. Un programme à grande échelle a été lancé pour ouvrir, dans les succursales d'une banque commerciale, l'Agrani Bank, situées dans les districts couverts par le projet, des comptes personnels sur les- quels sont versées les allocations en question. Le choix de l'Agrani Bank s'explique par sa connaissance du système bancaire scolaire dans les zones urbaines, son vaste réseau de succursales dans les subdivi- sions visées par le projet et l'excellente qualité de ses services à la clien- tèle. L'Agrani Bank recouvre ses frais grâce aux intérêts que rapporte le compte spécial du projet. En faisant participer cette banque commer- ciale au projet, ce dernier a reçu l'appui du secteur privé et de person- nalités influentes. Dans les zones qui comptent plusieurs écoles de filles, les élèves sont amenées jusqu'à la banque la plus proche pour y ouvrir un compte per- sonnel et recevoir un livret conçu pour le projet. Les allocations sont ver- sées sur les comptes bancaires des écolières et le montant des frais de scolarité est versé sur le compte bancaire de l'école. Les allocations sont retirées de la banque en mars et en octobre - mois de saison sèche pro- pices au déplacement des écolières. Ces opérations bancaires donnent 28 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE aux filles la possibilité de gérer leur propre argent et de se familiariser avec le système bancaire, et elles renforcent leur mobilité au sein de la communauté. Pour qu'une fille puisse bénéficier de ces allocations, ses parents doi- vent accepter qu'elle suive les cours pendant 75 % au moins de l'année scolaire, qu'elle obtienne au minimum des notes de seconde catégorie (entre 45 et 59 %) à l'examen final et qu'elle ne se marie pas avant d'avoir obtenu son certificat d'études secondaires. Le montant des allocations a été fixé sur la base des conclusions de la phase préparatoire du projet et à l'issue de consultations avec le minis- tère de l'Education. Les bénéficiaires habitent des zones rurales (on compte en général deux subdivisions par district) identifiées en fonction de trois critères : appauvrissement économique, faible taux d'alphabé- tisme féminin et faible taux de présence des écolières en classe. Le choix s'est porté sur une incitation monétaire plutôt que sur tout autre type d'encouragement pour réduire l'écart entre les sexes. Trois facteurs principaux ont présidé à ce choix. Le premier a été le succès d'un programme pilote, le projet de bourses pour la scolarisation des filles, qui fonctionne depuis 1982 sous forme d'initiative locale et qui bénéficie de l'appui de l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), de l'Asia Foundation et de l'Organisme norvé- gien de développement international. Ce projet a servi de modèle pour l'octroi d'allocations (financements des frais de scolarité et des dépenses personnelles liées à l'enseignement). Le second facteur a été les résultats d'une enquête sur les dépenses des ménages qui ont confirmé la nécessité d'apporter un soutien spécial à la scolarisation des filles. Le troisième et dernier facteur a été les conclusions d'une expérience de suppression des frais de scolarité pour les filles. L'introduction de critères de sélection en fonction du revenu des ménages a été envisagée au début de la phase de conception du projet, mais la plupart des ruraux étant pauvres et incapables de supporter le coût de la scolarisation des filles, le principe de ces critères n'a pas été retenu. En outre, le projet financé par l'USAID s'est heurté à des diffi- cultés liées à la classification des revenus. Du fait que les filles de membres influents et un peu plus aisés de la communauté ont été exclues, cette communauté a cessé d'apporter son soutien au projet. Il a donc été décidé que toutes les filles qui avaient réussi leur cinquième année pourraient automatiquement avoir droit à une allocation. MONTANT DES ALLOCATIONS. En 1994, le ministère de l'Éducation, sou- cieux de rester solvable, a abaissé le montant des allocations de 30 % environ par rapport aux estimations initiales pour les filles inscrites en sixième, septième et huitième années, de 14 % pour celles de neuvième INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXÉS SUR LA DEMANDE 29 année et de 18 % pour celles de dixième année. On a révisé les montants pour couvrir entre 30 et 54 % des dépenses scolaires entre la sixième et la dixième année (contre une fourchette de 44 à 66 % prévue au départ), tout en augmentant progressivement le montant des allocations de la sixième à la dixième année pour tenir compte à la fois de l'augmenta- tion des coûts dans les classes supérieures et de la nécessité d'y offrir des incitations plus grandes pour compenser les taux d'abandon (sous forme d'une indemnité pour les manuels la neuvième année et d'une allocation pour les frais d'inscription à l'examen la dixième année). Le montant des allocations équivaut à 12 dollars la sixième année, 13,50 dollars l'année suivante, 15 dollars la huitième année, 30,25 dollars la neuvième année et 36,25 dollars la dixième année. Ces allocations cou- vrent les frais de cours, les frais de scolarité, les uniformes, les chaus- sures, les parapluies, les goûters, le pétrole, les transports, et les dépenses liées au développement personnel. D'après les estimations de la mission d'évaluation, le coût annuel direct de l'enseignement secon- daire s'élève à près de 54 dollars par élève. Au cours de l'année scolaire 1994/95, quelque 1,3 million de filles réparties en six groupes devaient recevoir des allocations. Une grande priorité avait été accordée pendant la préparation du projet à un système de suivi et d'évaluation rétrospective qui devait devenir opérationnel pendant la première année scolaire de l'exécution du projet. Ce dernier s'est avéré si populaire que le Gouvernement du Bangladesh a décidé d'élargir le concept d'allocations pour en faire un programme national en faveur des élèves de sexe féminin du secon- daire dans l'ensemble des 460 subdivisions rurales. L'État aide 282 sub- divisions (avec ses propres ressources), tandis que l'IDA intervient dans 118, la Banque asiatique de développement dans 53 et l'Agence norvégienne de développement international dans sept. Le Gouvernement a demandé - ce que l'IDA a accepté - que le projet soit modifié en 1994 pour s'harmoniser avec le programme national. La mise en oeuvre de ce programme respecte les paramètres fixés pour le projet. Un système unifié d'information de gestion est en cours d'éla- boration et les premiers résultats sont maintenant disponibles. Le Gouvernement a récemment annoncé que le programme serait étendu aux subdivisions urbaines. La participation et l'appui des bénéficiaires expliquent en partie la réussite de ce projet. Si l'on n'avait pas trouvé un compromis avec les membres influents de la communauté en accordant également les allo- cations à leurs filles, le projet aurait été un échec. Le partenariat établi avec les bénéficiaires a permis de détecter ce problème bien avant que les animosités ne deviennent insurmontables. Qui plus est, grâce à ces consultations avec les bénéficiaires, le Gouvernement bangladais a 30 DECENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE compris qu'il lui fallait faire preuve de flexibilité, en procédant notam- ment à des évaluations rétrospectives périodiques pour déterminer le montant approprié des allocations. Enfin, ce programme pilote est né d'une initiative locale, ce qui explique dans une large mesure son suc- cès et sa transformation en programme national. Financements communautaires au Tchad Il existe un grand nombre d'écoles primaires communautaires sur tout le territoire tchadien. Près de 400 communautés locales ont créé des écoles primaires appelées écoles spontanées, qui sont gérées pra- tiquement sans aucun appui de l'État. Elles accueillent environ 10 % de tous les enfants inscrits dans le primaire à l'échelon national. Malgré cela, 1 % seulement des enfants de ces écoles spontanées sont encore inscrits la dernière année du primaire et environ 90 % dans les trois premières années. Il convient de noter que même dans les écoles primaires reconnues par l'État, ce sont les associations locales de parents d'élèves (APE) qui assument essentiellement la responsabilité du financement de la construction et de l'entretien des écoles, et du recrutement de maîtres supplémentaires. Environ 81 % des écoles pri- maires tchadiennes reçoivent des contributions des communautés et 21 % sont entièrement financées par ces dernières. Le Tchad se heurte à une multitude de problèmes dans le secteur de l'éducation. Il doit notamment faire face à de graves contraintes finan- cières qui se traduisent par un accès réduit et inéquitable à l'école et par des résultats très médiocres (au cours de l'année scolaire 1994/95, le taux de redoublement a atteint en moyenne 35 % dans le primaire). La mauvaise qualité de la gestion et de l'encadrement ne fait qu'aggraver ce problème. Afin de surmonter ces difficultés, les autorités tchadiennes ont élaboré, dans le domaine de l'éducation, pour la période 1990-2000, une stratégie d'enseignement-formation-emploi qui reçoit l'appui du projet. L'enveloppe du projet comprend au total un crédit de l'IDA de 19 millions de dollars et un financement de 5,6 millions de dollars du Gouvernement allemand. La composante du projet qui vise à renforcer les compétences des associations de parents d'élèves en matière de gestion et d'organisation, dont le coût est d'environ 1 million de dollars, a pour objectif de conso- lider les connaissances des communautés dans le domaine de la gestion des écoles afin d'améliorer la qualité de l'enseignement et d'en faciliter l'accès. Ces associations participent à la prise de décisions importantes concernant par exemple, la sélection des maîtres, la construction de salles de classe, et l'appui des écoles communautaires. Le mécanisme de mise en oeuvre de cette composante a été conçu pour être axé sur la INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXÉS SUR LA DEMANDE 31 demande. Les autorités espèrent qu'à long terme, ces mesures amélio- reront l'efficacité et la qualité de l'enseignement primaire. Au cours de l'année scolaire 1994/95, on estime que les communau- tés locales ont apporté, par l'intermédiaire de leurs associations de parents d'élèves, une contribution de 1,4 million de dollars en faveur de l'enseignement primaire, ce qui représente quelque 47% du budget hors salaires. Les efforts de ces associations ont notamment permis le recru- tement de 4 267 maîtres supplémentaires (qui ne font pas partie de la fonction publique), soit l'équivalent d'environ 48 % du corps enseignant du primaire à l'échelon national. Le montant des salaires versés aux enseignants des écoles communautaires est très variable, mais ces der- niers reçoivent en moyenne 20 dollars par mois en espèces ou en nature. Le fait que l'État ne paie pas régulièrement les enseignants pose un grave problème. Leurs salaires sont parfois payés avec huit mois de retard, comme ceux de tous les autres fonctionnaires. Ce problème, par- ticulièrement critique en dehors de N'djamena, la capitale, a provoqué des grèves et des fermetures d'écoles un peu partout dans le pays. La situation va cependant en s'améliorant en raison, essentiellement, du décaissement du crédit d'ajustement structurel à partir de 1996. Il est prévu, dans le cadre de cette composante, que les inspecteurs scolaires, les directeurs d'école et le personnel des ONG locales exer- cent des fonctions de consultation et de supervision. Ces ONG offrent des cours de comptabilité, de gestion et d'alphabétisation fonctionnelle pour aider les associations de parents d'élèves à renforcer leurs com- pétences gestionnelles et à s'attaquer aux grands problèmes de l'ensei- gnement, tels que le faible taux de scolarisation des filles. Le montant moyen de la subvention accordée à chaque école est inférieur à 2 000 dollars. C'est l'Office allemand de coopération tech- nique (GTZ) qui, en collaboration avec les délégations préfectorales du ministère de l'Éducation coordonne ce sous-projet, en gère les res- sources et choisit les ONG locales chargées des diverses activités. Ces organisations sont sélectionnées sur la base de leur expérience du ter- rain et de leur savoir-faire en matière d'exécution de projets. Ce projet comprend deux éléments dont dépendent largement sa réus- site et sa durabilité. En premier lieu, il implique, comme toute stratégie d'exécution de projet, la formation des responsables et des participants et le renforcement des institutions existantes. La formation des membres des associations de parents d'élèves aux techniques de gestion financière et d'administration institutionnelle avant la mise à disposition des fonds, a joué un rôle fondamental dans le bon déroulement du projet. Le projet fonctionne directement avec les parents, les membres de la communauté, les écoles et le personnel du ministère qui ont été et continueront à être les principaux artisans de l'amélioration de la qualité de l'enseignement. 32 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE En second lieu, le projet a fait appel avec succès à une ONG locale ayant une expérience dans ce secteur. Les bourses ciblées en Chine Les statistiques globales de la Chine ne font pas apparaître les diffé- rences marquées qui existent entre régions et groupes ethniques en matière de résultats scolaires. Malgré la mise en place, par les pouvoirs publics, d'un système d'enseignement obligatoire pendant neuf ans dans la plupart des grandes villes et des zones côtières, un grand nombre de régions pauvres et isolées restent à la traîne. Dans presque tous les cas, les enfants de ces régions n'ont pas même terminé leurs six années d'enseignement primaire. Ce sont essentiellement des minori- tés nationales qui habitent ces zones pauvres et isolées. Des facteurs historiques, géographiques et culturels font que le niveau de dévelop- pement économique et d'éducation dans ces régions où vivent des minorités reste inférieur à la moyenne nationale. Le revenu par habi- tant dans les régions pauvres peuplées de minorités est 2,6 fois infé- rieur à la moyenne nationale. Les régions isolées doivent se contenter de locaux scolaires insuffi- sants, délabrés et dangereux. En outre, beaucoup d'enseignants ne sont pas qualifiés et disposent d'outils pédagogiques de mauvaise qualité, ce qui explique en partie la forte proportion d'abandons d'études ou de redoublements. La mauvaise gestion des écoles et leur difficulté d'ac- cès ne font qu'aggraver ce problème. Une enquête réalisée par la Commission nationale de l'éducation dans 25 circonscriptions où vivent des minorités, révèle que le taux brut de scolarisation des enfants d'âge scolaire est inférieur d'environ 20 points de pourcentage à la moyenne nationale et que ce taux est particulièrement faible chez les filles. L'enseignement bilingue, considéré comme déterminant pour aider les minorités nationales à poursuivre des études jusqu'à la fin du secondaire et au-delà, se heurte aussi à de nombreuses difficultés. Le manque d'enseignants qualifiés et la mauvaise qualité des outils péda- gogiques représentent un problème grave, tout comme le peu d'atten- tion accordée à la recherche dans les domaines de la pédagogie, de la linguistique et du contenu des programmes dans le contexte de l'en- seignement bilingue. Le Projet d'éducation de base dans les régions de Chine pauvres et peuplées de minorités couvre six provinces et régions autonomes (Guangxi, Mongolie intérieure, Jiangxi, Sichuan, Xinjiang et Ningxia), et a pour but d'améliorer l'éducation de base qui y est dispensée. Ce projet, qui bénéficie d'un crédit de l'IDA de 100 millions de dollars, vise à scolariser tous les enfants au niveau primaire et à encourager une meilleure fréquentation des premières années du secondaire dans les INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXES SUR LA DEMANDE 33 régions pauvres et celles où vivent des minorités. L'un des principaux aspects de ce projet est l'appui fourni à la publication et à l'édition de livres (en particulier dans les langues des minorités). Le coût total du projet s'élève à 192 millions de dollars, dont 92 millions pris en charge par le Gouvernement chinois. Environ cinq millions d'enfants vivant dans des régions pauvres et où vivent des minorités devraient bénéfi- cier de ce projet. Lors du choix des sites concernés par le projet, l'accent a été mis sur les communautés comprenant un pourcentage plus élevé de minorités ethniques. Le projet cherche à faciliter l'accès des minorités à l'école en finançant la modernisation des installations et du matériel et l'achat de manuels. Il finance également l'élaboration de manuels bilingues et la formation d'enseignants bilingues. En outre, le projet a créé un centre de formation à l'éducation des minorités qui se consacrera à la définition de stratégies et à la formation de gestionnaires pour l'éducation des minorités. Il sert enfin à financer des cours de langue chinoise destinés aux enseignants appartenant à des minorités ainsi que des études sur les techniques effi- caces d'enseignement et d'apprentissage et sur l'enseignement en classe unique à l'intention des minorités, et en particulier des filles. La politique des pouvoirs publics reconnaît la nécessité de se concentrer sur les régions où vivent des minorités pour tenter d'atté- nuer la pauvreté, et notamment celle qu'engendrent les mauvais résul- tats scolaires, les taux élevés de redoublement et d'abandon, et les taux inférieurs de passage à l'école secondaire. Le problème est particuliè- rement grave si l'on y ajoute les taux sensiblement plus faibles de sco- larisation des filles. C'est pourquoi les autorités chinoises accordent des crédits spéciaux pour le paiement des frais de scolarité, les manuels, les repas dans les pensionnats et les frais de transport dans les régions particulièrement pauvres des provinces. Parmi les mesures prises par l'Etat figure également la distribution gratuite de manuels aux enfants pauvres. Les bourses ciblées au Mexique Des niveaux de capital humain relativement bas et l'existence d'une pauvreté généralisée freinent le progrès économique et social au Mexique. Selon une enquête réalisée en 1989, 18 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté (Psacharopoulos et al., 1993). Plus des trois quarts des plus démunis vivent dans les zones rurales. Cette couche de la population est constituée de familles nombreuses caracté- risées par les pourcentages les plus élevés de personnes à charge et par les niveaux d'éducation les plus faibles. L'enseignement primaire est assuré par trois méthodes distinctes: l'en- seignement primaire classique, destiné à 93 % des élèves, l'enseignement 34 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE dispensé aux indigènes, qui couvre les besoins de 46 groupes ethniques dans 23 États et s'adresse à 6,3% des élèves, et enfin le Conseil national de développement scolaire (CONAFE), conçu pour surmonter les problèmes que pose la pénurie de salles de classe et d'enseignants dans les zones rurales les plus reculées et qui s'adresse à 1 % des élèves. Le Mexique est le pays d'Amérique latine qui compte le plus d'au- tochtones (près de 9 millions). Ce groupe représente environ 8 % de la population du pays. Près de 78 % des autochtones habitent dans un tiers seulement des municipalités du pays, ce qui constitue un grave pro- blème, car ce sont les Etats les plus pauvres, où sont concentrés le plus grand nombre de pauvres et d'autochtones, qui sont les moins capables de compléter les financements des autorités fédérales. Dans ces États, les salles de classe souffrent d'une grave pénurie d'outils pédagogiques et notamment de manuels pour les enfants autochtones. Le projet mentionné ici couvre dix États et appuie la stratégie des pouvoirs publics qui vise à atténuer la pauvreté en investissant davan- tage dans l'enseignement primaire. Il concerne les États et leurs régions les plus défavorisées, afin de répondre aux besoins des pauvres et de contribuer à une plus grande égalité des chances du point de vue du parcours scolaire et des débouchés économiques. Il s'attache à obtenir des concessions pour les populations minoritaires et autochtones et a ciblé les bourses qu'il propose pour corriger véritablement les inégali- tés existantes. Le coût total du projet s'élève à 617 millions de dollars. Le prêt de la Banque mondiale, d'un montant de 412 millions de dollars, permettra d'accorder des bourses aux municipalités les plus pauvres et donc, indi- rectement, aux enfants autochtones. Le premier et le deuxième projets d'éducation visaient quatre des États les plus pauvres. Néanmoins, étant donné que même les Etats les plus pauvres comprenaient des municipa- lités aux niveaux de développement différents, les pouvoirs publics ont voulu renforcer encore davantage l'efficacité de l'investissement en concentrant la plupart des activités du projet dans les 511 municipalités les plus pauvres (sur un total de 934 municipalités) dans les dix États classés les plus pauvres après les quatre mentionnés plus haut. Une composante spéciale du projet prévoit l'affectation de 125 mil- lions de dollars (soit l'équivalent de 22 % du coût du projet) en faveur de l'enseignement des enfants autochtones et couvre à cet effet le coût de la formation pédagogique et de mesures d'incitation en faveur des maîtres, ainsi que celui de manuels, d'outils pédagogiques, de coins de lecture et de travaux de construction, de rénovation et d'entretien des écoles. Grâce à son mécanisme de ciblage précis, cette composante spéciale a un impact positif sur les zones autochtones. On estime que 31 900 ensei- gnants autochtones seront formés ou participeront au programme d'in- INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXÉS SUR LA DEMANDE 35 citations mis en place en leur faveur. Au total, 43 % des bénéficiaires de ces mesures d'incitation sont des enseignants autochtones. Les écoles qui accueillent principalement des enfants autochtones bénéficient égale- ment de programmes de construction, de rénovation et d'entretien. La Direction générale de l'éducation indigène (Dirección General de Educación Indigena) élabore des documents pédagogiques autochtones destinés aux coins de lecture dans les écoles pour autochtones. Des manuels et des documents sont en cours d'élaboration dans les 17 langues principales parlées dans les zones du projet, couvrant ainsi près de 90 % de tous les groupes ethniques vivant dans les États concernés par le projet. Le contenu des manuels est établi à la suite de recherches eth- nolinguistiques sur le terrain. Des techniques de conception participa- tive des textes ainsi que diverses méthodes de présentation et de communication visuelles ont été en outre élaborées. Des manuels et des documents rédigés dans des langues autochtones et destinés aux coins de lecture ont été élaborés pour six années d'en- seignement primaire. Un groupe technique, composé d'un coordonna- teur de la Direction et d'un représentant de l'État pour chacune des 17 langues, est responsable de la sélection et de la préparation des textes en langue autochtone. Chaque groupe autochtone comprend un représen- tant qui dirige un groupe de travail de quatre personnes directement responsable de l'élaboration des manuels et autres documents pédago- giques dans la langue en question. Le coordonnateur de la Direction supervise le travail et veille à ce que les normes pédagogiques natio- nales soient respectées. Au cours de la première année du projet, une expérience pilote a permis de tester sur le terrain les premières versions des manuels, des cahiers d'exercices des élèves et des guides destinés aux enseignants pour les classes de première et deuxième années. Les résultats de cette expérience et les recommandations en découlant ont été pris en compte dans la version finale des guides qui ont ensuite été imprimés et distribués. Environ 126 000 manuels, 126 000 cahiers d'exer- cices et 5 000 guides destinés à des enseignants bilingues ont été impri- més. Les pouvoirs publics ont également introduit une méthode d'enseignement d'autres langues non couvertes par le projet. Les parents, la communauté et les élèves participent à cette initiative. Les élèves de quatre niveaux d'enseignement primaire ont reçu des manuels, et des coins de lecture ont été mis à la disposition des élèves de tous les niveaux. Chèques-éducation en Colombie Bien que la Colombie ait réalisé ces dernières années des progrès éco- nomiques et sociaux, ces bons résultats n'ont pas profité également à 36 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE l'ensemble de la population. Tous les indicateurs sociaux ou presque font apparaître des disparités énormes entre les régions du pays et aussi entre les zones rurales et urbaines. En 1990, les dépenses publiques par élève à différents niveaux d'enseignement étaient conformes aux grandes tendances constatées dans les pays d'Amérique latine: elles penchaient en faveur des familles à revenu élevé, comme l'indiquent les montants enregistrés cette même année : 62 dollars par élève au niveau du primaire, 125 dollars dans le secondaire et 666 dol- lars dans le supérieur. Les élèves venant de familles plus aisées sont en nombre disproportionné dans l'enseignement secondaire et supérieur, ce qui signifie qu'une part plus importante des crédits destinés à l'édu- cation profite aux couches aisées de la population. Le secteur privé joue un rôle de tout premier plan dans l'enseigne- ment. À titre d'exemple, dans les 87 municipalités couvertes par le projet, on dénombre 2 124 écoles secondaires privées contre 1 248 écoles secondaires publiques. Le manque de places dans les écoles publiques ne constitue pas un problème pour les familles disposant de revenus plus élevés. La plupart de ces familles préfèrent l'enseigne- ment secondaire privé et acceptent - et ont les moyens - d'en payer le coût. À l'inverse, les familles pauvres n'ont pas le choix. Les places à l'école publique sont plus rares dans le secondaire que dans le pri- maire. Cependant, lorsque leurs enfants ne peuvent pas être accueillis dans l'enseignement public, les familles pauvres sont confrontées à un sérieux dilemme. Il leur faut en effet choisir entre consacrer les res- sources extrêmement limitées dont elles disposent au paiement des frais de scolarité dans un enseignement secondaire privé ou renoncer à faire des études secondaires à leurs enfants. Environ 14 % des élèves de cinquième année abandonnent leurs études, alors qu'un certain nombre d'entre eux les poursuivraient s'il y avait de la place pour eux dans une école publique ou si les frais de scolarité dans un établisse- ment privé étaient abordables. Dans les municipalités où les enfants de milieu modeste ne peuvent pas entrer dans une école secondaire publique, le risque est grand de voir ces élèves abandonner leurs études. C'est pourquoi le projet cité ici en exemple leur fournit des chèques-éducation pour leur permettre de s'inscrire dans certaines écoles privées disposant d'un excédent de places. Ce programme de distribution de chèques-éducation a été lancé en 1991 dans le cadre du processus de décentralisation engagé dans les années 80 et inscrit dans la nouvelle constitution colombienne en 1991. Cette nouvelle constitution prévoit l'élection de responsables locaux et attribue les responsabilités liées à la gestion des affaires locales à 33 départements et territoires et à près d'un millier de municipalités. Elle contraint le pouvoir central à transférer une part croissante de ses res- sources budgétaires aux autorités régionales et locales pour contribuer INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXÉS SUR LA DEMANDE 37 à couvrir le coût de la prestation de services sociaux. L'État propose en outre des cofinancements aux collectivités locales pour stimuler les investissements locaux dans les services sociaux d'une importance nationale. Le développement de l'enseignement secondaire et l'amé- lioration de sa qualité à l'échelon municipal ont pris de l'importance dans la stratégie de l'État. Le programme de chèques-éducation, que cofinance le Gouverne- ment central, a été conçu dans le but d'apporter aux municipalités une solution à court terme, économique et efficace pour offrir un meilleur accès à l'enseignement secondaire. Ce programme fournit des chèques-éducation aux élèves des familles à faible revenu, ce qui leur permet d'entrer dans des écoles secondaires privées disposant de places en surnombre. Ce projet a pour but d'accroître les chances d'accès à l'enseignement secondaire d'un nombre d'élèves estimé à 90 000 qui ont achevé leurs études primaires, et de donner la possibilité de poursuivre des études secondaires à un maximum de 22 000 élèves issus de familles à faible revenu. Le projet vient compléter les 25 000 chèques-éducation de l'État en finançant un maximum de 5 500 chèques pour les 87 municipalités couvertes par le projet. Grâce à ces chèques supplémentaires, les collec- tivités locales espèrent faire baisser les taux d'abandon scolaire. Le coût total du projet s'élève à 150 millions de dollars. Celui du programme de chèques-éducation s'est élevé, quant à lui, à 7,9 mil- lions de dollars pour la période 1994-97, cette somme correspondant à l'octroi de 55 000 chèques-éducation. La contribution de l'État a atteint 80 % et celle des municipalités 20 %. La composante du projet qui visait à élargir l'accès aux études secondaires a coûté 8 millions de dol- lars. Ce montant devait financer 55 000 chèques-année tout au long de 1997 à un coût annuel moyen de 143 dollars par chèque-année aux prix de 1991 et sur la base d'un taux prévu d'abandon scolaire de 5 % en moyenne chez les bénéficiaires de ces chèques. DISTRIBUTION DES CHEQUES-ÉDUCATION. Tous les chèques-éducation sont répartis entre les 87 municipalités pilotes en fonction de leurs besoins exprimés et dans les limites d'un plafond fixé pour chacune d'elles d'après le nombre total de chèques disponibles chaque année. Il appartient à chaque municipalité de programmer ses besoins en chèques-éducation sur la base de ses prévisions au niveau de l'ensei- gnement secondaire et de vérifier le nombre de places demandées et disponibles dans les écoles secondaires privées. Pour pouvoir bénéficier de ce programme, les élèves et les écoles secondaires doivent répondre à des normes strictes. Les élèves doivent être issus des deux couches socio-économiques les plus défavorisées, avoir achevé leurs études primaires dans une école publique ou une 38 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE école privée sans but lucratif et être âgés de 15 ans au plus. De leur côté, les écoles secondaires privées doivent prouver qu'elles sont en mesure d'offrir un niveau d'enseignement acceptable. Elles doivent en particu- lier être en possession d'un permis (licensia de aprobaciôn), délivré par le Secrétaire d'État à l'Éducation, pour décerner un diplôme de fin d'études (bachillerato), et les notes obtenues les deux années précédentes par ses élèves à l'examen de l'Instituto Colombiano para el Fomento de la Educación Superior doivent être au moins égales aux notes moyennes d'examen obtenues dans les écoles publiques et privées (exception faite des écoles privées d'élite) de la municipalité. Les écoles privées nouvel- lement créées qui n'ont pas ces qualifications doivent prouver qu'elles possèdent une autorisation de fonctionnement (licensia de funciona- miento), des enseignants qualifiés et des installations sanitaires jugées appropriées par le Secrétaire d'État à l'Éducation. Le ministère de l'Éducation nationale a signé avec chaque munici- palité participante, un accord dans lequel sont précisés les conditions et modalités d'octroi des chèques-éducation ainsi que les arrangements financiers et administratifs. Les municipalités déterminent le nombre de chèques dont elles ont besoin, certifient que les écoles privées répon- dent aux critères de participation et contrôlent le déroulement du pro- gramme avec l'Institut de crédit d'études et de formation. Celui-ci reçoit 2,5 % de la valeur des chèques attribués pour couvrir ses frais administratifs liés aux réunions entre élèves et écoles, aux campagnes de publicité, à l'application du système de chèques-éducation et au suivi du programme. Lorsque leur plan en matière d'éducation a été approuvé, les municipalités mettent au point les modalités de mise en oeuvre de la composante « chèques-éducation » avec l'Institut de crédit d'études et de formation. L'Institut administre le programme actuel aux termes d'un accord passé avec la Banque centrale hypothécaire pour la gestion des fonds correspondant à la valeur des chèques-édu- cation. Un comité national de coordination, composé du vice-ministre et de représentants des institutions mentionnées ci-dessus, fournit des conseils quant à la marche du programme. MÉTHODE DE PAIEMENT. Dans un premier temps, le ministère de l'Édu- cation et les municipalités déposent auprès de l'agence nationale de la banque centrale hypothécaire, les sommes affectées au programme de chèques-éducation. Les sommes versées par l'État correspondent à 80 % du coût total du programme, tandis que la contribution des municipali- tés en couvre le solde (20 %). Ces contributions sont déposées en même temps. Les services centraux de l'Institut de crédit d'études et de forma- tion communiquent ensuite à l'agence nationale de la Banque centrale hypothécaire la liste des villes et des écoles retenues pour l'octroi de chèques-éducation, afin que les succursales régionales de cette banque INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXES SUR LA DEMANDE 39 puissent ouvrir des comptes bancaires au nom des écoles privées parti- cipant au programme. L'Institut de crédit d'études et de formation dis- tribue ensuite aux parents une liste de toutes les écoles de la ville qui participent au programme. Enfin, les écoles en question ouvrent un compte à la succursale régionale de la Banque centrale hypothécaire. Les élèves reçoivent trois chèques de la part de l'Institut de crédit d'études et de formation, qu'ils remettent le moment venu au directeur de leur école pour que ce dernier l'encaisse à la Banque centrale hypo- thécaire. Le premier chèque leur est donné en début d'année scolaire et sert à payer les frais d'enseignement et trois mensualités, le second couvre les quatre mensualités suivantes et le troisième les trois dernières mensualités. Les élèves sont autorisés à changer d'école entre deux ver- sements. La durabilité du programme de chèques-éducation dépend de l'en- gagement des municipalités participantes à fournir leur part du coût total du programme, mais malheureusement, certaines municipalités n'honorent pas leurs obligations financières. Cela compromet l'avenir scolaire de milliers d'élèves qui poursuivent leurs études grâce à des chèques-éducation et revient à confier à l'État l'entière responsabilité financière de leur éducation. Projet d'aide aux écoles privées qui accueillent des enfants pauvres en République dominicaine En République dominicaine, le secteur de l'éducation a fait l'objet de graves négligences au niveau de la couverture, de la qualité et de l'effi- cacité de l'enseignement dispensé. En 1991, seule la moitié des enfants inscrits dans les écoles primaires publiques pouvaient espérer achever le premier cycle et moins d'un quart d'entre eux pouvaient espérer ter- miner la huitième année - la dernière de l'éducation de base. Les taux les plus faibles de participation et d'achèvement des études sont enre- gistrés chez les 65 % de la population qui vivent en zone rurale et dans des établissements urbains pauvres. La plupart des enfants fréquentent des écoles primaires publiques dépourvues des locaux et des ressources pédagogiques nécessaires. Les écoles publiques, situées pour la plupart en zone urbaine, accueillent environ 20 % des élèves de l'enseignement primaire et 30 % des élèves du premier cycle du second degré. Ces écoles privées ont récemment augmenté leur nombre d'inscriptions pour faire face à la crise du secteur public. La majorité des 1 500 écoles privées du primaire et du premier cycle du second degré qui opèrent dans des zones urbanisées accueillent des élèves issus de familles à faible revenu. L'augmentation du nombre d'inscriptions dans les écoles privées, liée à la demande et au fait que les parents étaient disposés à payer, a permis de maintenir un 40 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXES SUR LA DEMANDE taux de scolarisation relativement élevé dans l'éducation de base entre 1985 et 1991. Cependant, beaucoup de ces écoles s'adressent à des élèves de milieux plus modestes et manquent donc de ressources : il leur est donc difficile d'offrir un enseignement d'une qualité acceptable. La majorité des écoles privées fonctionnent à un niveau de qualité comparable, voire légèrement supérieur, à celui des écoles publiques. En 1994, les élèves de 4e et 8e années d'école publique ont obtenu des résultats de 71 % et 63 % lors de la nouvelle évaluation effectuée à l'échelon national, contre 76 % et 74 % pour les élèves des écoles pri- vées. Cependant, près de 800 écoles privées ne répondent pas aux cri- tères d'accréditation et manquent d'enseignants formés et d'autres ressources. Quelques écoles fonctionnent de façon informelle dans des zones dépourvues d'écoles publiques ou d'écoles privées agréées. Les renseignements recueillis pendant l'exécution du projet sur les écoles dépourvues d'accréditation et d'autorisations officielles laissent penser que celles-ci constituent un moyen économique de renforcer et d'amé- liorer l'éducation de base, notamment dans les zones urbaines pauvres en pleine expansion. Face à ce problème, le plan décennal (lancé en 1990) de l'État dans le secteur de l'éducation vise à renforcer les écoles privées (mais aussi publiques) pour essayer d'améliorer la qualité de l'éducation de base. Quelque 750 établissements privés accrédités par le secrétariat à l'Édu- cation, aux Arts et à la Culture participent à ce plan qui prévoit notam- ment la formation d'enseignants et l'achat de supports pédagogiques. Le coût total du projet s'élève à 100 millions de dollars. La compo- sante du projet dont il est question ici vise à aider les écoles privées qui accueillent des élèves de milieux à faible revenu. Le programme pilote d'appui aux écoles privées qui aident les populations à faible revenu (dont le coût s'élève à 3,7 millions de dollars) sera à l'origine d'une aide publique en faveur des écoles privées qui accueillent des élèves venant de familles à faible revenu. Il sera placé sous la direction du départe- ment des écoles privées qui relève du secrétariat à l'Éducation, mais sera exécuté par l'intermédiaire d'ONG locales. Ce programme pilote montre que les pouvoirs publics ont pris conscience du rôle important que le secteur privé peut jouer pour atténuer les problèmes liés à l'ac- cès à l'enseignement. L'une des sous-composantes du projet prévoit l'apport de fourni- tures scolaires et l'augmentation du nombre de places dans les écoles maternelles pour les enfants des zones les plus pauvres des districts. Le choix des sites se fait en fonction du revenu moyen. Un autre de ces volets concerne l'apport de supports pédagogiques complémentaires pour toutes les écoles à classe unique situées au sein de communautés pauvres, tandis qu'un autre volet vise à renforcer les programmes d'ali- mentation scolaire le long de la frontière haïtienne et dans les zones INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXÉS SUR LA DEMANDE 41 urbaines marginales. Le choix des sites se fait essentiellement à partir de données actualisées sur l'état nutritionnel des enfants, auxquelles s'ajoutent des données sur le niveau de revenu. Un dernier volet porte sur le renforcement et l'amélioration des installations scolaires dans les districts qui font partie des 40 % les plus pauvres. Il fournit également une assistance technique et financière aux écoles privées situées dans des zones urbaines pauvres qui accueillent des enfants de familles appartenant aux deux quintiles les plus pauvres. En ce qui concerne l'attribution d'aides aux écoles, le secrétariat fait appel à des ONG locales possédant une expérience en matière d'assis- tance communautaire afin d'identifier les écoles qui ont besoin d'être mises à niveau. Les associations de parents d'élèves et les directeurs des écoles concernées élaborent des plans de développement de l'école qui sont ensuite soumis à l'examen des ONG et du secrétariat à l'Édu- cation. Les écoles reçoivent les mêmes aides pédagogiques que les écoles publiques, à savoir des supports pédagogiques et des fourni- tures scolaires pour les élèves et les enseignants, ainsi qu'une formation donnée aux enseignants. Dans le cas des écoles privées, cependant, l'amélioration des installations se limite à des travaux mineurs de répa- ration et à une assistance technique portant sur l'utilisation de la venti- lation et de l'électricité et les travaux de maintenance. La composante du projet liée au soutien institutionnel sert à assurer l'exécution, la surveillance et le suivi appropriés de l'assistance tech- nique et de la formation fournies par le département des Écoles pri- vées. Un nouveau système de gestion de l'information sur les écoles privées est actuellement intégré au système actuel dont dispose le secré- tariat, afin d'en renforcer les capacités. Il permettra de procéder à de meilleurs recensements et de collecter davantage de données de base et d'autres renseignements connexes dans le secteur de l'éducation afin de faciliter la tâche des décideurs. Les critères retenus pour l'octroi d'une assistance sont basés sur le nombre d'élèves qui changent d'école pour entrer dans une école pri- vée, et non pas sur le nombre d'inscrits dans chaque école. Bien que le projet présente des avantages pour l'ensemble des élèves qui vont à l'école publique, la composante décrite ici a pour cible les enfants de familles à faible revenu habitant les régions les moins bien desservies, à savoir les zones urbaines et rurales pauvres. Projet d'assistance aux écoles privées qui accueillent des enfants pauvres au Pakistan Le taux d'alphabétisme dans la province frontalière du Nord-Ouest du Pakistan est de 22 %, soit près des deux tiers seulement de la moyenne nationale, qui est déjà faible. De plus, ce chiffre ne révèle pas les graves 42 DECENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE inégalités existant entre districts, entre zones urbaines et rurales et entre hommes et femmes. Le taux d'alphabétisme atteint 34 % chez les hommes et 8 % chez les femmes. Le taux brut de scolarisation témoigne également de vastes inégalités entre les garçons (71 %) et les filles (36 %) de cette province. Les problèmes rencontrés dans le secteur de l'éducation dans la pro- vince frontalière du Nord-Ouest sont l'accès limité à l'enseignement, en particulier chez les filles, le pourcentage élevé d'abandon et la médio- crité des conditions d'étude. Le faible taux de réussite scolaire s'ex- plique par l'absentéisme des enseignants, le caractère inapproprié des programmes de cours, la médiocrité des manuels, la disponibilité limi- tée de supports pédagogiques complémentaires, et le faible niveau de compétence des enseignants. La gestion du secteur est inefficace et les compétences en matière de programmation et de budgétisation sont insuffisantes. Le caractère imprévisible des décaissements de res- sources et le fonctionnement et la gestion médiocres du système d'en- seignement primaire ne font qu'aggraver la situation. Des mesures doivent être prises immédiatement pour améliorer la situation dans les zones rurales où les taux de scolarisation des filles sont très faibles. L'enseignement et l'éducation des filles y ont toujours été négligés, en partie en raison des facteurs déjà mentionnés ci-dessus et de la mise à disposition d'un nombre insuffisant d'enseignants qua- lifiés et notamment de femmes. Plus de 40 % des 8 673 villages de la province n'ont pas d'école publique de filles et un quart sont dépour- vus d'école de garçons. Seules 4 395 des 20 317 écoles primaires publiques que compte la province frontalière du Nord-Ouest, soit 22 % d'entre elles, sont destinées aux filles. Le projet dont il est question ici fait partie du programme d'action sociale lancé par l'État. Le projet d'éducation primaire, qui constitue la composante éducation de ce programme au niveau de la province, bénéficie d'une ligne de crédit de 150 millions de dollars. Il vise à amé- liorer l'accès aux études, ainsi que l'égalité des chances et l'efficacité de l'enseignement primaire, notamment pour les filles. Il a également pour but d'améliorer les conditions d'étude dans toutes les écoles ainsi que le cadre organisationnel et les compétences en matière de programma- tion, gestion, évaluation et suivi du système éducatif de la province. Il vise enfin à renforcer la participation des bénéficiaires à l'échelon des villages à toutes les phases de l'enseignement primaire. DIvERSITÉ DES MÉCHANISMES. Créée en 1993 par les autorités provinciales pour promouvoir l'enseignement privé, la Frontier Education Foundation (« la fondation ») est dirigée par un directeur général assisté d'un direc- teur technique, d'un directeur financier, d'un conseiller juridique et d'un INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXES SUR LA DEMANDE 43 personnel de soutien. À l'échelon divisionnel, les comités régionaux reçoi- vent l'appui d'antennes animées par des coordonnateurs à plein temps et un personnel administratif qui examine les demandes et les commente avant de les transmettre au siège de la fondation. Le projet vient appuyer les efforts que déploient les autorités pour renforcer le rôle du secteur privé dans l'enseignement. Il subventionne avant tout les écoles privées qui accueillent les enfants des couches sociales à faible revenu et les filles des zones rurales. L'objectif fonda- mental des autorités est de soutenir financièrement les efforts du secteur privé pour créer des écoles destinées aux enfants des milieux modestes dans les zones urbaines et rurales, où les recettes assurées par les frais de scolarité ne permettent pas à elles seules de réaliser un bénéfice. La fondation appuie une série de projets pilotes et de sous-projets, y compris par le biais de prêts et de subventions pour la création de nou- velles écoles, en particulier dans les zones rurales. Une aide financière est disponible pour permettre à des élèves à faible revenu, vivant en milieu urbain, d'étudier dans une école privée et pour rechercher et aider des donateurs privés qui sont prêts à financer des écoles privées. Des aides sont également accordées pour la recherche-développement visant à améliorer la qualité de l'enseignement privé. Dans toutes ces activités, l'accent est mis sur les écoles gérées par les communautés. Un certain nombre d'études sont réalisées sur les écoles privées situées dans les zones rurales et les zones urbaines à faible revenu, sur la dis- position des parents à payer l'éducation de leurs enfants, et sur les entrepreneurs et les ONG potentiels dans ce secteur. La fondation apportera une aide aux écoles qui accueillent des filles vivant dans des taudis ruraux et urbains. Dans ces zones, les écoles de filles et les écoles mixtes qui comptent au moins 50 % de filles dans leurs classes pourront bénéficier de ce programme. Les écoles aux- quelles la fondation vient en aide sont constituées en sociétés. Les petites organisations communautaires (comme les comités villageois d'éducation non agréés) peuvent participer à ce programme en s'asso- ciant à des ONG agréées. OPÉRATIONS FUTURES. À l'avenir, le programme pourrait comprendre des prêts assortis de subventions pour contribuer à la création d'écoles privées dans les zones rurales et les zones urbaines pauvres, ainsi que des aides pour la création d'écoles communautaires dans ce même type de zones. Parmi les autres interventions envisagées, il faut citer l'octroi d'allocations ou de subventions de contrepartie à des élèves de milieux à faible revenu et la conception de modes de fonctionnement flexibles pour permettre à la fondation d'essayer différentes méthodes d'inter- vention et de rechercher celles qui s'avèrent les plus rentables. On 44 DECENTRALISATION DE LENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE espère en outre que la fondation fournira une assistance technique, mais non financière, aux écoles accueillant des élèves qui ne font pas partie des couches sociales défavorisées. Si elle est retenue, la composante prêts assortis de subventions contri- buera à la création de nouvelles écoles en apportant une aide financière représentant la moitié des frais encourus, à raison de 25 % sous forme de prêts (plan de remboursement sur trois ans) et de 25 % sous forme de subventions. Ce concept pourrait donner de bons résultats dans les zones urbaines mais il risque de ne pas être suffisamment séduisant pour attirer des entrepreneurs privés dans les zones rurales où les chances de réaliser un bénéfice sont maigres. Compte tenu de la nécessité urgente d'attirer des investisseurs vers les zones rurales où l'enseignement fait défaut, cette formule a été modi- fiée de sorte que les coûts sont couverts à hauteur de 50 % par des prêts et de 20 % par des subventions, l'investisseur devant apporter les 30 % restants. La construction de l'école pourra être financée après une période probatoire de deux ans au cours de laquelle les inscriptions sco- laires devront être contrôlées. Pendant la période en question, il sera possible de couvrir une partie des frais de fonctionnement de l'école. Une autre possibilité pour l'avenir consisterait à aider les écoles pri- maires privées, gérées par des communautés rurales. La fondation aidera les organisations communautaires à identifier des enseignants agréés par le département de l'Éducation et les comités villageois d'édu- cation. Un minimum de 25 filles devront être prêtes à s'inscrire avant qu'une école de filles puisse être ouverte dans le village. C'est aux auto- rités villageoises qu'il appartiendra de mettre sur pied un comité villa- geois d'éducation et de s'assurer de la disponibilité d'un site permanent pour l'école et du paiement des salaires des enseignants. La troisième possibilité consisterait à financer un consortium de deux à dix villages ou d'accorder un financement séparé aux différents vil- lages. Dans le cadre de ce programme, une subvention de 3 dollars par écolière serait mise directement à la disposition du comité villageois d'éducation à hauteur d'un maximum de 25 écolières par classe afin de fournir des subventions groupées de 83 dollars par mois pendant une période initiale de trois ans. La limite de 83 dollars par enseignant et par classe a été calculée sur la base du salaire que verse actuellement l'Etat aux maîtres travaillant dans des écoles communautaires. En réalité, le comité villageois d'éducation serait autorisé à utiliser une partie seule- ment de ces 83 dollars pour payer l'enseignant. Il devrait alors utiliser le solde pour des travaux de réparation et d'entretien. Au cas où le comité villageois d'éducation disposerait de ses propres ressources, il pourrait décider de verser un salaire plus élevé aux enseignants. Ceux-ci devront avoir obtenu un certificat d'aptitude avec une note minimale de B- et avoir en outre satisfait aux normes de qualification de la fondation. INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXES SUR LA DEMANDE 45 Le comité villageois d'éducation pourra, en accord avec la commu- nauté, décider d'accepter des garçons à condition que ces derniers ne bénéficient d'aucune subvention et que, si les filles doivent payer des frais scolaires en plus de leur subvention, les garçons payent une somme égale ou supérieure. Les élèves ne pourront cependant pas comprendre plus de 50 % de garçons et chaque classe devra accueillir entre 15 et 50 élèves. À l'avenir, le programme d'allocations et de subventions de contre- partie permettra à des filles de suivre des études dans des écoles privées en leur accordant une allocation de 3 dollars. Pour ce faire, la Frontier Education Foundation a réussi à obtenir des contributions financières de banques privées. Prêts pour études à la Jamaïque Au cours des années 70 et 80, la Jamaïque a connu une période de déclin économique. À la fin des années 80, le PIB par habitant avait chuté de quelque 20 % en valeur réelle et l'inflation dépassait 20 % par an. Le secteur public était hypertrophié et la dette extérieure cumulée absor- bait plus de la moitié des dépenses publiques. En 1989, soucieux de s'attaquer efficacement à ces problèmes, les pouvoirs publics ont adopté un programme de réformes portant tout à la fois sur la stabilisation macroéconomique, l'ajustement structurel, la privatisation et la ratio- nalisation du secteur public. L'affectation de ressources supplémen- taires aux secteurs sociaux, par la mise en place du Programme de développement des ressources humaines, faisait partie intégrante de ce processus d'ajustement. Le secteur de l'éducation a souffert de la diminution des crédits bud- gétaires. En valeur réelle, le budget de l'État pour l'éducation en 1994/95 était pratiquement le même qu'en 1982/83. Les dépenses consacrées à l'enseignement ne représentaient plus, selon les estimations, que 4,7 % du PIB en 1994/95 contre 7 % en 1981. En 1992/93, on estimait que 25 000 étudiants au total étaient inscrits dans des établissements d'enseigne- ment supérieur, soit l'équivalent de 9,5 % environ de la cohorte d'âge. Le petit nombre de places disponibles et le coût élevé de l'enseignement privé limitent l'accès à l'enseignement supérieur. L'aide financière dont disposent les étudiants inscrits dans des établissements d'enseignement supérieur provient de financements privés (famille, parents, économies personnelles), de prêts pour études, de bourses d'études, de bourses ciblées et de subventions. Depuis 1970, les prêts pour études ont contribué à couvrir le coût de l'enseignement supérieur. Un organisme public, le bureau de Prêts pour études, assure la gestion d'un fonds renouvelable de prêts aux étudiants. Le capital de ce fonds a cependant diminué rapidement 46 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE sous l'effet de taux d'intérêt réels négatifs, de taux de défaut de paie- ment élevés et de frais administratifs considérables. Le bureau n'étant pas en mesure de faire face à la demande de prêts pour études, un nou- veau mécanisme complémentaire de prêt a été lancé à la rentrée de l'année scolaire 1993/94 sous les auspices de l'Association des ban- quiers jamaïcains (Jamaican Bankers' Association) et avec les encoura- gements des pouvoirs publics. L'appui des milieux d'affaires a joué un rôle crucial à cet égard. Suivant les dispositions mises en place par les pouvoirs publics, les étudiants ne peuvent financer au maximum que 40 % de leurs frais d'études. L'insuffisance de ces mécanismes empêche probablement les élèves les plus démunis de poursuivre des études supérieures. À mesure qu'un nombre grandissant d'élèves issus de familles à faible revenu se qualifient pour suivre des études supérieures, il devient nécessaire d'améliorer l'accès à ce type d'études, et à mesure que le système d'enseignement supérieur s'oriente vers des financements plus diversifiés, les élèves demanderont davantage d'options finan- cières souples pour payer leurs frais d'études, y compris des pro- grammes de bourses basés à la fois sur le mérite et les besoins. Le projet dont il est ici question porte sur un programme de prêts ciblés destinés aux étudiants de l'enseignement supérieur. Il donne aux étudiants jamaïcains (notamment aux plus défavorisés d'entre eux) des possibilités de financement appropriées pour payer leur part de leurs études supérieures de manière progressive, il assure un accès équitable à l'enseignement supérieur et il permet de mieux cibler les besoins. Ce programme établira en outre un fonds de bourses d'études pour les étudiants les moins capables de prendre en charge leurs frais d'études et organisera une campagne de sensibilisation du public pour informer les étudiants et leurs familles des changements intervenus quant à la politique de recouvrement des coûts et des options que leur offre le mécanisme élargi de prêts pour études. FINANCEMENT DU PROGRAMME DE PRÊTS POUR ÉTUDES. Le projet finan- cera une injection de fonds destinée à élargir le programme de prêts pour études. Il envisage également de renforcer les moyens dont dis- posent les banques commerciales pour recouvrer leurs prêts. À l'avenir, le rôle du bureau de Prêts pour études consistera à traiter les demandes de prêts, tandis que toutes les opérations de décaissement et de recou- vrement seront confiées aux principales banques commerciales pri- vées. Le bureau recevra et examinera les demandes d'aide financière consignées sur un formulaire unique portant à la fois sur l'octroi de bourses et de subventions. Ce formulaire lui permettra de déterminer si l'étudiant remplit les conditions requises et si sa situation correspond INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXES SUR LA DEMANDE 47 bien à sa déclaration. Lorsque des subventions substantielles sous la forme de faibles taux d'intérêt seront en place, les prêts auront pour cible les étudiants issus de milieux modestes, qui représentent un tiers environ des étudiants de l'enseignement supérieur. L'enquête sur les conditions de vie servira à déterminer l'admissibilité des demandeurs. À cet effet, le coût prévu de l'enseignement de chaque demandeur (frais d'enseignement, manuels et, dans certains cas, une partie des frais de subsistance) ainsi que les frais liés à l'enseignement de leurs frères et soeurs et des personnes à leur charge inscrits dans des établissements d'enseignement secondaire ou supérieur seront déduits du revenu glo- bal. Après avoir vérifié l'admissibilité du demandeur, le bureau trans- mettra une recommandation à l'institution financière choisie par l'étudiant tendant à ce qu'une somme égale à 100 % de ses frais d'études lui soient versée sous forme de prêt. Cette institution financière versera alors le montant convenu à l'établissement où est inscrit l'étudiant en question. Les institutions financières regrouperont les sous-prêts et obtien- dront à leur tour du bureau des Prêts pour études un prêt intermédiaire assorti de conditions similaires à celles liées aux sous-prêts des étu- diants. L'État jouera le rôle de garant de tous les sous-prêts en cas de décès ou d'invalidité de l'emprunteur pendant la durée de ses études et pendant la période de différé d'amortissement de six mois. La durée maximale de la période de remboursement est fixée à sept ans. Les banques commerciales prendront une marge de 3,5 % pour couvrir les frais d'administration des prêts et traiteront l'ensemble des prêts accor- dés aux étudiants, qu'ils soient assortis ou non de la garantie de l'État, comme n'importe quelle autre dette commerciale. En ce qui concerne les prêts pour études bénéficiant de la garantie complète de l'État, les banques commerciales devront suivre des procédures de recouvrement bien déterminées avant de demander une compensation à l'État. Les banques commerciales pourront recourir à divers types de mesures pour minimiser les cas de défaut de paiement, y compris des prélèvements sur salaires. Elles pourront également demander une dérogation à la règle du secret bancaire pour fournir le nom des étu- diants aux institutions de crédit lorsque les intéressés signent des billets à ordre. Le taux d'intérêt exigé pendant la durée des études de l'em- prunteur et pendant les six mois de différé d'amortissement s'élèverait à 15 % par an, mais serait capitalisé. Au commencement de la période de remboursement, ce taux sera remplacé par le taux d'épargne moyen majoré de cinq points de pourcentage et ajusté chaque année au 1er jan- vier. Le bureau des Prêts pour études s'accordera également avec les établissements d'enseignement supérieur pour que les fonds soient uti- lisés efficacement et prudemment. 48 DECENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE Le bureau des Prêts pour études sera restructuré pour renforcer le traitement automatisé des demandes de prêt, en ce qui concerne en par- ticulier l'évaluation des ressources et le ciblage des bénéficiaires. Ces modifications pourraient réduire la durée d'obtention d'un diplôme. La communication entre le bureau et les banques commerciales sera elle aussi améliorée pour faciliter le transfert des fonds et contrôler l'évolu- tion du taux de défaillance. AUTRES AVANTAGES. Deux autres composantes sont à signaler. Le bureau coopère avec les établissements d'enseignement supérieur pour mener la campagne de sensibilisation du public au sujet du système des prêts. En outre, il lancera pour les étudiants à plein temps de l'University of the West Indies et de l'University of Technology, un programme de subventions ciblées pour lequel on suivra les mêmes procédures mais qui sera réservé aux couches les plus pauvres de la population. Pour les étudiants à plein temps de première année, ces subventions couvriront les frais de subsistance qui dépassent largement les frais de scolarité. Dans ce cas, les besoins de chaque étudiant s'élèvent au total à 300 dol- lars environ. Les deux universités (University of the West Indies et University of Technology) seront consultées lors du choix des étudiants de deuxième et de troisième années. Ces derniers recevront des sommes représentant au maximum 50 % de leurs frais de logement et d'alimen- tation. Les universités seront responsables des décaissements et les étu- diants devront signer un accusé de réception de leurs subventions. Subventions communautaires au Pakistan Le Bélouchistan couvre près de la moitié de la superficie du Pakistan mais n'est peuplé que de 5 % environ des 120 millions d'habitants du pays. La densité moyenne est de 16 habitants au kilomètre carré. Quelque 84 % de ces habitants vivent en zone rurale dans près de 9 000 établissements humains. Pratiquement toutes les écoles (91 %) sont situées hors des zones urbaines. Cette province, où le taux de scolarisation atteint 34 %, enre- gistre le plus faible taux brut d'inscription dans le primaire. Au Bélouchistan, 15 % seulement des filles vont à l'école primaire. Près de 3800 villages n'ont pas d'école. Les handicaps géographiques ne font qu'amplifier et aggraver ces problèmes. Le contexte peu propice à l'enseignement ne fait qu'ajouter aux carences classiques telles que le manque de possibilités d'accès à l'éducation, l'absence d'égalité des chances et l'inefficacité du système d'enseignement. La situation est d'autant plus grave que l'organisation, la programmation et la gestion de l'éducation laissent à désirer. La province du Bélouchistan a mis en oeuvre un Programme d'action sociale, d'un montant de 330 millions de dollars, dont la composante INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXÉS SUR LA DEMANDE 49 « éducation », à savoir le Projet d'éducation primaire, est dotée au total de 106 millions de dollars de crédit. Ce projet est dirigé par le directeur adjoint des services d'éducation, secondé par un conseiller local à plein temps pour les questions liées à l'enseignement privé, et par un agent administratif. L'élément du projet qui intéresse la présente étude a trait au pro- gramme de bourses pour écolières. Dans le cadre du premier projet de bourses destinées à des écolières, financé par l'USAID et appelé Projet de développement de l'enseignement primaire, une communauté four- nissait le terrain et le premier bâtiment de l'école et s'assurait de la sécu- rité des lieux et du bon fonctionnement de l'école. Une fois la viabilité et l'engagement de la communauté et de l'école démontrés, la propriété du terrain était cédée aux autorités du Bélouchistan pour y bâtir une école, nommer officiellement un enseignant et lui assurer une formation sur le terrain. En 1993, une ONG appelée Association d'appui communautaire à l'enseignement primaire au Bélouchistan a été créée pour devenir l'or- ganisme d'exécution du projet dans le cadre d'un accord conclu avec le Gouvernement du Bélouchistan, le Fonds des Nations Unies pour l'en- fance (UNICEF), la Banque mondiale et d'autres organismes de finan- cement. L'association entretient de bonnes relations de travail avec le Gouvernement. PROGRAMME DE BOURSES EN MILIEU RURAL. Alors que le projet initial se poursuit, deux nouveaux projets pilotes, appelés Programmes de bourses en milieu rural et urbain ont démarré depuis près d'un an, l'un dans les zones rurales et l'autre dans les zones urbaines. Dans le cadre du programme de bourses en zones rurales, les autori- tés provinciales ont décidé, au lieu de verser directement les salaires aux enseignants, de fournir les fonds au comité villageois d'éducation com- prenant généralement cinq à sept pères ou mères (il peut y avoir un comité masculin et un comité féminin) de filles qui vont à l'école du vil- lage. Ce comité gère ces fonds et recrute un enseignant, de préférence une femme, au sein ou à l'extérieur de la communauté. (Il est possible de recruter un instituteur à la retraite si la communauté le juge accep- table). Ces groupes de gestion représentatifs et dirigés par les bénéfi- ciaires conditionnent le succès de ce projet. La communauté gère le fonctionnement de l'école et doit payer le coût de son entretien (services collectifs). Elle fournit également le terrain sur lequel est installée l'école. Le Gouvernement ne deviendra pas propriétaire de ces écoles qui reste- ront la propriété de la communauté, qui continuera d'en assurer la res- ponsabilité. La subvention est accordée à la communauté et non pas directement aux écolières. Dans le projet pilote rural, des fonds sont fournis à 30 50 DÉCENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE écoles en fonction du nombre d'inscriptions. Le montant de cette sub- vention est d'une centaine de dollars, soit le salaire annuel d'un ensei- gnant pour chaque groupe de 25 élèves (il doit y avoir au minimum 25 inscriptions). Une petite subvention supplémentaire est fournie pour l'achat de manuels et d'autres supports pédagogiques. L'octroi des bourses à chaque parent ayant suscité de graves inquié- tudes quant à la possibilité de contrôler et de suivre les enseignants et les parents, les autorités ont décidé de regrouper l'ensemble des bourses en une seule somme. Chaque village ne dispose alors que d'un seul compte bancaire, bien que différentes banques participent à ce projet. L'association gère ces comptes-chèques pendant une période proba- toire de trois ans, à l'issue de laquelle le comité villageois d'éducation gère son propre compte. Ce comité vérifie que l'enseignant assure ses cours tandis que l'association contrôle la présence des élèves. PROGRAMME DE BOURSES EN MILIEU URBAIN. Le programme de bourses en milieu urbain a pour objet de faire appel au secteur privé pour dis- penser un enseignement dans les quartiers pauvres dépourvus d'école publique. Ce programme appuie le développement d'un secteur de l'éducation privé qui fait payer des frais de scolarité peu élevés dans les quartiers pauvres, afin d'accroître le nombre d'enfants scolarisés où la capacité d'accueil des écoles publiques est limitée. On a établi une carte des quartiers pauvres de Quetta, capitale du Bélouchistan, et on les a divisés en dix secteurs, après quoi un îlot d'ha- bitations a été sélectionné dans chacun de ces secteurs. Le choix s'est porté sur Quetta car cette ville abrite plus d'une dizaine de grands groupes ethniques et il fallait s'assurer que tous les groupes ethniques pauvres étaient ciblés dès lors qu'il n'existait aucune école publique. Les écoles doivent compter au minimum 100 filles inscrites (contre 25 dans les zones rurales) pour obtenir la totalité de la subvention. Les dix écoles sélectionnées reçoivent, en gros, 100 subventions chacune. Une somme forfaitaire est accordée au comité des parents d'élèves pour recruter quatre enseignants (sur la base de 25 élèves par enseignant). Le comité des parents d'élèves passe ensuite un contrat (avec l'aide d'en- tités gouvernementales et non gouvernementales) avec un opérateur privé ou une ONG, qu'il charge de créer et de diriger une école. Le prestataire privé est assuré d'un nombre minimum de 100 écolières. Une fois ce chiffre atteint, l'école peut accepter des garçons mais peut aussi faire payer des frais de scolarité plus élevés aux garçons et filles venant d'autres quartiers. Le montant maximum de la subvention est fixé à 600 dollars pour les 12 premiers mois. Il est ensuite ramené à 540 dollars la deuxième année et à 400 dollars la troisième année. Suivant le nombre d'enfants inscrits, des subventions partielles peuvent aussi INSTRUMENTS DE FINANCEMENT AXES SUR LA DEMANDE 51 être versées. L'opérateur est garanti de les percevoir pendant cinq ans à condition qu'il satisfasse le comité des parents d'élèves qui est habi- lité à résilier son contrat. Les parents doivent encore payer environ 1 dollar par enfant dans les zones urbaines et quelque 0,33 dollar par enfant en milieu rural. À long terme, on tiendra compte de leur dispo- sition à payer en s'efforçant de déterminer dans quelle mesure la struc- ture des frais de scolarité empêche les enfants les plus démunis d'aller à l'école. 3 Enseignements tirés de ces projets A ucune évaluation rétrospective officielle n'est disponible pour la plupart des projets décrits plus haut. Des études de cas contenant des données sur ces évaluations existent cependant pour les projets réa- lisés au Bélouchistan et au Bangladesh (voir Patrinos, Ariasingam et Liang, à paraître). Au Bangladesh, le programme de bourses d'études pour les filles, réalisé avec un financement de l'USAID, a publié les résultats de son évaluation rétrospective, d'où il ressort que les écoles participantes ont enregistré une nette augmentation du nombre de filles inscrites à l'école. En fait, le nombre de celles-ci était proportionnelle- ment deux fois supérieur à celui des garçons. Le taux de présence des écolières en classe était également plus élevé. Il était proche de 80 % dans les écoles participantes contre seulement 67 % dans les autres écoles. Une baisse générale des taux d'abandon d'études a également été enregistrée dans les écoles participantes par rapport aux autres écoles, mais les projets ne semblent pas avoir eu une quelconque inci- dence sur les taux de redoublement. Recommandations particulières Tous les projets décrits plus haut encouragent l'accès à l'éducation, avec pour objectif principal d'accroître les taux de scolarisation. Dans de nombreux cas, des efforts sont faits pour favoriser l'égalité des chances, par exemple en ciblant des groupes précis de population. L'amélioration des résultats constitue un autre indicateur de perfor- mance. Certains projets recourent à un mécanisme axé sur la demande pour réaliser des économies sur la prestation de l'enseignement. Enfin, la plupart des projets tentent d'améliorer la qualité de l'enseignement donné aux élèves. Les principaux enseignements tirés de ces différents projets sont les suivants : • Participation et appui des bénéficiaires. Parmi les méthodes qui permet- tent le mieux d'exécuter les composantes de projets d'éducation liées à des financements axés sur la demande, la participation et l'appui 52 ENSEIGNEMENTS TIRÉS DE CES PROJETS 53 des bénéficiaires s'avèrent être les plus importantes pour assurer la viabilité et la durabilité des projets en question. Le projet bangladais en est l'illustration parfaite. En effet, tant que l'on a pas trouvé un compromis avec les membres influents de la communauté en accor- dant des allocations à leurs enfants (même si les règles fixées au départ les excluaient de ce mécanisme), ce projet était voué à l'échec. Une bonne liaison avec les bénéficiaires a également contribué à déterminer le montant approprié des allocations. Le fait que le pro- jet pilote bangladais soit né d'une initiative locale n'est pas étranger à Son succès et à sa transformation en programme national. • Participation active des parents. La participation active des parents constitue aussi un pas dans la bonne direction. Au Bélouchistan, la création de comités villageois d'éducation a joué un rôle fondamen- tal dans le succès de ce projet de bourses d'études accordées aux filles de cette province pakistanaise. • Participation du secteur privé. Lorsqu'il s'agit d'aider les pouvoirs publics à résoudre les problèmes d'accès à l'éducation, la participa- tion du secteur privé peut avoir un effet déterminant. En République dominicaine, les écoles privées reçoivent des fonds publics pour devenir accessibles à des enfants vivant à la périphérie d'établisse- ments urbains, qui n'auraient sans cela aucun moyen d'accès à l'édu- cation. Dans le cadre du projet d'éducation primaire de la province frontalière du Nord-Ouest du Pakistan, on a apporté une aide aux écoles privées qui accueillent des filles et des enfants de familles à faible revenu afin d'améliorer la situation de ces deux groupes d'élèves. • Partenariat avec des entreprises commerciales. Les partenariats avec des entreprises commerciales peuvent jouer un rôle crucial dans l'ob- tention d'appuis et de ressources pour l'exécution de projets. Au Bangladesh, grâce à son savoir-faire et à sa bonne réputation au sein de la communauté, l'Agrani Bank a permis d'obtenir le concours du secteur influent des affaires. La Banque centrale hypothécaire a joué le même rôle en Colombie. À la Jamaïque, le programme de prêts aux étudiants bénéficie du soutien de l'Association des banquiers, qui donne au bureau des Prêts d'études la possibilité de procéder aux réformes indispensables et de renforcer sa crédibilité. • Souplesse. Lors de la conception d'un programme d'incitations finan- cières, le choix d'une méthode souple qui prévoit l'évaluation pério- dique du montant des bourses, subventions ou allocations en fonction des besoins des bénéficiaires permet d'atteindre le but recherché. Au Bangladesh, les autorités ont ajusté le montant des allocations en fonction de l'âge des élèves afin de réduire le pour- centage d'élèves qui abandonnent leurs études les dernières années de leur scolarité. 54 DÉCENTRALISATION DE LENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE • Renforcement des compétences. Toute stratégie d'exécution de projet exige la formation d'administrateurs et de participants et le renfor- cement des institutions existantes. Au Tchad, les membres des asso- ciations de parents d'élèves ont reçu une formation à la gestion financière et à l'administration des établissements - mesure d'une très grande portée compte tenu de l'importance du rôle que jouent ces associations dans la prestation et le financement de l'enseigne- ment primaire. • Participation. Si l'on veut obtenir des résultats sur le terrain, il ne faut pas hésiter à faire appel à des ONG locales et à des organisa- tions de bénévoles privées pour accéder aux régions isolées, notam- ment lorsque ces organisations entretiennent des relations de longue date avec l'une des communautés ciblées et ont des compé- tences qui peuvent être utiles. Au Tchad, les ONG ont contribué à fournir aux membres des associations de parents d'élèves la forma- tion dont ils avaient vraiment besoin en matière de comptabilité, de gestion et d'alphabétisation fonctionnelle. • Adéquation culturelle. Dans certaines régions de beaucoup de pays vivent des populations qui ont besoin d'une aide spéciale pour avoir accès à l'éducation à un coût abordable. A cette fin, les auto- rités peuvent parvenir à atténuer sensiblement les inégalités exis- tantes en accordant des concessions aux populations minoritaires et autochtones et en encourageant l'octroi de bourses ciblées. Au Mexique, la mise en place de coins de lecture, la formation spé- ciale d'enseignants de classes autochtones et la construction d'écoles dans les régions en question ont donné au projet toute sa raison d'être. • Égalité des chances. Nombreuses sont les questions qu'il faut résoudre en matière de réglementation, de financement et d'infor- mation pour concevoir et appliquer un programme d'octroi direct de chèques-éducation aux élèves les plus démunis. En Colombie, des efforts ont été déployés pour faire en sorte que seuls les élèves réellement défavorisés en bénéficient pour poursuivre leurs études dans une école privée. • Transparence. La conception d'un mécanisme de subventions forfai- taires par étudiant doit reposer sur des formules de transfert de fonds précises, simples et transparentes. Dans le cas du troisième projet d'éducation et de formation des Îles Salomon (voir Patrinos, Ariasingam et Liang, à paraître), les pouvoirs publics souhaitent créer et appliquer une formule logique, transparente et juste afin de lutter contre les inégalités et de rationaliser les ressources. ENSEIGNEMENTS TIRÉS DE CES PROJETS 55 Décaissement et suivi Bien que soumis aux mêmes procédures d'exécution de projet que pour tout autre prêt de la Banque mondiale, les projets de financements axés sur la demande se caractérisent par une complexité plus grande. Ils s'accompagnent notamment d'un ensemble particulier de difficultés liées aux opérations de décaissement et de suivi. En effet, la question fondamentale est de savoir comment assurer un suivi et un apport de fonds réellement adaptés aux besoins exprimés. Les projets de financements axés sur la demande doivent comporter des mécanismes permettant de s'assurer que le montant des bourses, par exemple, parvient aux bénéficiaires et est utilisé aux fins prévues. Dans le cadre de nombreux projets d'éducation financés par la Banque mondiale et comportant des éléments de financements axés sur la demande, ce sont des banques commerciales, aidées en cela par une petite ONG chargée d'assurer les tâches de suivi et de présentation de rapports, qui sont le plus souvent sollicitées pour assumer cette fonc- tion. Il est possible de contrôler les décaissements réellement effectués par le biais des comptes bancaires ouverts au nom des bénéficiaires. Les banques peuvent également effectuer les tâches de traitement des données dont a besoin l'unité d'exécution du projet. Elles peuvent, à intervalles réguliers, fournir à cette unité un bilan des décaissements effectués. Ces renseignements peuvent trouver leur utilité dans le cadre du système de suivi du projet. Il est possible de faire appel à des ONG pour contribuer au système de suivi et de présentation de rapports. Ces organisations constituent un lien entre les écoles, les unités d'exécution de projets et les banques. Elles vérifient l'identité des élèves qui devraient recevoir des subven- tions et assurent le suivi des dossiers auprès des écoles et des banques. Elles relèvent du bureau d'exécution du projet. Nécessité de procéder à une évaluation rétrospective Compte tenu du peu d'expérience dont nous disposons en ce qui concerne la mise en oeuvre de financements axés sur la demande dans le cadre de projets d'éducation, il nous faudra encore un certain temps avant de pouvoir juger de l'utilité générale de cette méthode. Dans l'in- tervalle, il est important de prendre, dans le cadre de projets nouveaux 56 DECENTRALISATION DE L'ENSEIGNEMENT: FINANCEMENTS AXÉS SUR LA DEMANDE ou d'expériences pilotes, des mesures qui permettront d'évaluer rétrospectivement l'efficacité des mécanismes de financement axés sur la demande. La plupart des programmes de bourses s'accompagnent d'un système d'information de gestion destiné à contrôler des indica- teurs clés tels que le nombre d'inscriptions, le taux de présence aux cours, les résultats, les redoublements, le nombre d'élèves qui aban- donnent leurs études, les promotions, le nombre de diplômés et les ver- sements d'allocations. Très rares, par contre, sont les programmes qui évaluent l'impact des projets d'octroi de bourses en comparant les indi- cateurs de résultats de boursiers et de non-boursiers présentant des caractéristiques similaires. Cette lacune s'explique en grande partie par la somme d'efforts requise pour rassembler des données sur les élèves qui ne reçoivent pas de bourses. Un tel effort est néanmoins crucial pour aboutir à une évaluation de l'impact réel de ces programmes. Reffrences Banque mondiale. 1993a. << Bangladesh: Female Secondary School Assistance Project. >> Rapport no 11386-BD. R6gion Asie du Sud, D6partement-pays I, Washington. . 1993b. << Tchad : Projet d'enseignement fondamental. > Rapport no 11680-CD. R6gion Afrique, Dpartement-pays III, Washington. . 1993c. << Colombia: Second Education Project. > Rapport no 11834-CO. R6gion Am6rique latine et Caraibes, Dpartement-pays III, Washington. - 1993d. << Pakistan: Balochistan Primary Education Program Project. n Rapport no 11403-PA. 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