Evaluation avec le Cadre d'Analyse de la Gouvernance Foncière (CAGF) Sous la coordination de Louis-Marie Nindorera en co-rédaction avec Gilbert Bigirimana, Jean Marie Habwintahe, Charles Nihangaza, Espérance Ninahaze, René Claude Niyonkuru, Dieudonné Ntibatingeso, Salvator Ruzima, Seth Sindayigaya Bujumbura, Septembre 2017 ABREVIATIONS APDH : Association pour la Paix et les Droits de l’Homme CAGF : Cadre d’Analyse de la Gouvernance Foncière CF : Code foncier CFN : Commission Foncière Nationale CFPJ : Centre de Formation Professionnelle de la Justice CNTB : Commission Nationale des Terres et autres Biens CSLP : Cadre Stratégique pour la Lutte contre la Pauvreté CSTB : Cour Spéciale des Terres et autres Biens DDC : Direction du Développement et de la Coopération suisse DGAT : Direction Générale de l’Aménagement du Territoire DIM. : Dimension ECOSAT : Encadrement des Constructions Sociales et Aménagement des Terrains EIE / EIS : Etude d’Impact sur l’Environnement / la Santé FAO : Food and Agriculture Organization of the United Nations FBU : Francs Burundais GPS : Global Positioning System GSF : Groupe Sectoriel Foncier Ha : Hectare HCR : Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés IGEBU : Institut d’Etudes Géographiques du Burundi IGF : Indicateur de Gouvernance Foncière INCN : Institut National pour la Conservation de la Nature INECN : Institut National pour la l’Environnement et la Conservation de la Nature ISABU : Institut des Sciences Agronomiques du Burundi ISTEEBU : Institut national de Statistiques et d’Etudes Economiques du Burundi MEEATU : Ministère de l’Eau, de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme OBPE : Office Burundais pour la Protection de l’Environnement OBR : Office Burundais des Recettes OGR : Opération Groupée de Reconnaissance ONG : Organisation Non Gouvernementale PABG : Projet d’Appui à la Bonne Gouvernance PAGE : Projet d’Appui à la Gestion Economique PAGGF : Projet d’Amélioration de la Gestion et de la Gouvernance Foncière au Burundi PTF : Partenaires Techniques et Financiers PTPCE : Projet des Travaux Publiques et de Création d’Emplois PTPGU : Projet des Travaux Publics et de Gestion Urbaine PV : Procès-verbal SDAU : Schéma Directeur d’Aménagement Urbain SFC : Service Foncier Communal SIG : Système d’Information Géographique SIP : Société Immobilière Publique SNPAB : Stratégie Nationale et Plan d'Action sur la Biodiversité SPAT : Schémas Provinciaux d’Aménagement du Territoire TVA : Taxe sur la Valeur Ajoutée UE : Union Européenne 2|Page TABLE DES MATIERES Résumé exécutif ..................................................................................................................................... 5 Chapitre I - Introduction au Cadre d’Analyse de la Gouvernance foncière ........................................ 15 Chapitre II – Méthodologie .................................................................................................................. 16 Chapitre III – Contexte .......................................................................................................................... 18 Aux origines du droit foncier ............................................................................................................. 19 Le tournant clé de la gestion décentralisée des terres ..................................................................... 22 Un couvert forestier en régression sous la poussée démographique .............................................. 23 Une population urbaine marginale en croissance continue ............................................................ 28 Une fiscalité foncière en longue hibernation, réveillée par la nécessité .......................................... 31 Les conflits fonciers, leur typologie et mécanismes de résolution ................................................... 33 Chapitre IV – Résultats de l’évaluation de la gouvernance foncière .................................................. 38 Panel 1 : Reconnaissance de la tenure foncière .............................................................................. 38 1.1) Eléments de contexte additionnels ................................................................................... 38 1.2) Evaluation notée du Panel n° 1 ......................................................................................... 39 Panel 2 : Droits sur les terres forestières et communautaires et réglementation de l'utilisation des terres rurales .............................................................................................................................. 54 2.1) Eléments de contexte additionnels ........................................................................................ 54 2.2) Evaluation notée du Panel n° 2 .............................................................................................. 55 Panel 3 : Utilisation du sol, planification et développement urbains............................................. 67 3.1) Eléments de contexte additionnels ........................................................................................ 67 3.2) Evaluation notée du Panel n° 3 .............................................................................................. 68 Panel 4 : Gestion des terres domaniales.......................................................................................... 79 4.1) Eléments de contexte additionnels ........................................................................................ 79 4.2) Evaluation notée du Panel n° 4 .............................................................................................. 80 Panel 5 : Transparence des procédures et avantages économiques du transfert des terres publiques à un usage privé ............................................................................................................... 97 5.1) Eléments de contexte additionnels ........................................................................................ 97 3|Page 5.2) Evaluation notée du Panel n° 5 .............................................................................................. 98 Panel 6 : Accès public aux informations foncières : Registre et Cadastre .................................... 114 6.1) Eléments de contexte additionnels ...................................................................................... 114 6.2) Evaluation notée du Panel n° 6 ............................................................................................ 115 Panel 7 : Estimation de la valeur des terres et fiscalité foncière .................................................. 133 7.1) Eléments de contexte additionnels ...................................................................................... 133 7.2) Evaluation notée du Panel n° 7 ............................................................................................ 134 Panel 8 : Résolution des litiges ....................................................................................................... 138 8.1) Eléments de contexte additionnels ...................................................................................... 138 8.2) Evaluation notée du Panel n° 1 ............................................................................................ 138 Panel 9 : Examen des modalités institutionnelles et des politiques générales ............................ 146 9.1) Eléments de contexte additionnels ...................................................................................... 146 9.2) Evaluation notée du Panel n° 9 ............................................................................................ 146 Chapitre V – Matrice d’Actions .......................................................................................................... 163 Chapitre VI – Conclusion finale .......................................................................................................... 180 4|Page Résumé exécutif Depuis près de dix ans, le Burundi est engagé dans une réforme foncière articulé autour des enjeux de prévention des conflits. Jugé précaire et source de nombreux conflits, le mode coutumier de tenure foncière est appelé à faire progressivement place à un système de gestion décentralisée des terres qui place les 119 communes du pays aux avant-postes de la réforme. Les unes après les autres, celles-ci sont peu à peu entrain d’ouvrir des services fonciers habilités par la loi à délivrer un « certificat foncier » au terme d’une procédure participative impliquant le voisinage concerné et des responsables locaux. A terme, espère-t-on, le faible coût exigé pour l’obtention de ces certificats et la relative rapidité de la procédure convaincront une large majorité de Burundais à se placer sous la protection juridique de ce certificat pour jouir d’une possession paisible et tranquille de leurs terres. Au 1er août 2017, 50 communes (40,6%) étaient dotées d’un service foncier. Néanmoins, des problèmes liés à la pauvreté aigue des ménages, à la faiblesse des ressources économiques et financières disponibles au niveau des communes et de l’Etat central, ainsi qu’à la capacité technique du personnel des communes soulèvent des questions sérieuses quant à la qualité et à la pérennité des services fonciers livrés à l’échelle locale. Vu l’importance de soutenir, équilibrer et dynamiser cette réforme, ces problèmes soulignent surtout l’importance de concevoir la problématique de la gestion des terres et des droits liés avec une perspective large, incluant et connectant entre eux plusieurs enjeux et facteurs tels que :  le statut des droits fonciers des diverses catégories de la population et les principes sous- jacents ;  les revenus et la rentabilité économiques et financiers des politiques foncières ;  les stratégies d’aménagement du territoire ;  l’organisation ordonnée et la mise à jour régulière de la documentation foncière ;  l’organisation de l’administration foncière et la coordination des politiques qui s’y rapportent. Tout se regroupe sous la notion de « gouvernance foncière » qui donne lieu, de la part du gouvernement burundais, à plusieurs politiques et mesures qui dépassent le simple cadre de la prévention des conflits fonciers. L’Etat burundais a marqué des avancées perceptibles sur plusieurs fronts de la gouvernance foncière mais il est reste confronté à de nombreux défis. Par ailleurs, ces avancées elles- mêmes ne s’inscrivent pas toujours consciemment et délibérément dans le cadre d’une « politique foncière » articulée, planifiée, assumée et maîtrisée, ce qui pose en soi de leur pérennité. Le Cadre d’Analyse de la Gouvernance Foncière (CAGF) dont ce rapport est l’objet évalue la gouvernance foncière au Burundi dans son ensemble, en la visitant sous ses différents aspects, pilier par pilier. La qualité de la gouvernance foncière au Burundi est appréciée sous neuf thèmes spécifiques. Ceux-ci sont examinés sous l’angle de 24 Indicateurs de Gouvernance Foncière (IGF) et 115 sous-indicateurs, appelés « dimensions ». Pour chacun de ces 115 sous- indicateurs, une note de performance entre A, B, C ou D est attribuée, qui correspond à une description préétablie de la qualité de la gouvernance. 5|Page 1) Thème n° 1 : Reconnaissance de la tenure foncière  Au sens du Code foncier (CF) du Burundi, les droits exercés sur la plupart des propriétés foncières du Burundi ne sont enregistrés ni par le conservateur des Titres fonciers, ni par les services fonciers communaux (SFC) en cours d’ouverture et d’expansion. Cependant, ces propriétés bénéficient d’une certaine protection de la loi. En effet, le Code foncier stipule que la loi reconnait et protège « tous les droits réels exercés par toute personne physique ou morale de droit privé en vertu de la coutume ou d’un titre d’occupation délivré par l’autorité compétente sur des terres non domaniales, se traduisant par une emprise personnelle ou collective, permanente et durable, selon les usages du moment et du lieu et selon la vocation du terrain » (CF, art. 380). Néanmoins, pour jouir de la protection de la loi sous le régime des droits privatifs coutumiers, les terres doivent être effectivement exploitées (CF, art. 381).  S’agissant des rapports de droits entre hommes et femmes, bien qu’en droit ils soient proclamés égaux, ils ne jouissent pas des mêmes droits en pratique. La femme, a fortiori quand elle a des frères, n’hérite pas sur un pied d’égalité avec l’homme. Il ne lui est reconnu qu’un droit d’usufruit sur la ou les terres qui lui sont confiées. La veuve sans progéniture est aussi vulnérable dans ses droits. Il est difficile d’établir dans quelle mesure le programme en cours de gestion décentralisée des terres qui fait délivrer des certificats fonciers par les services communaux a fait évoluer les droits de la femme. Toutefois, il est clairement établi que sur l’ensemble des certificats fonciers délivrés jusqu’à récemment, les certificats enregistrés sous le nom de propriétaires femmes ne dépassaient pas les 6%, quelle que soit la source d’enquête prise.  La minorité des Batwa, dont la population est estimée entre 78.000 et 100.000 personnes, soit 1% de la population, ne fait l’objet d’aucune protection spécifique par la loi, au même titre que les autres composantes ethniques du pays. Historiquement, leurs droits ont régressé avec la mise en culture progressive des forêts puis avec leur mise sous protection environnementale. En pratique, les Batwa habitent toujours les environs de boisements et aires protégées. Malgré les interdictions de la loi, ils continuent de vivre des ressources se trouvant dans ces espaces, profitant des faibles capacités de surveillance des administrations publiques chargées de leur gestion.  Les exploitants des marais sont soumis à un statut juridique qui pose des problèmes de mise en œuvre sur terrain, en raison des interprétations multiples pouvant être faites de la loi. Les marais couvrent une superficie totale d’environ 117.993 ha dont 81.403 (69%) fait l’objet d’une exploitation en agriculture.  A la faveur du code foncier de 2011, les terres dites de paysannat, exploitées et supervisées comme parties du patrimoine domanial depuis la fin de la décennie 1940, sont passées sous la propriété de ceux qui les ont occupées « de manière régulière et légale » (CF, art. 455). Cependant, en pratique, l’Etat a subordonné la jouissance effective de ces terres à la délimitation préalable des terres connexes dites « hors paysannat », qui n’est toujours pas accomplie. 6|Page 2) Thème n° 2 : Droits sur les terres forestières et communautaires et réglementation de l'utilisation des terres rurales  Le Burundi compte quinze aires protégées réparties en trois parcs nationaux, cinq réserves naturelles, deux « monuments naturels » et cinq « paysages protégés ». Dans l’ensemble, les aires protégées du Burundi ont une superficie d’environ 157.923 ha soit 5,6% du total du territoire national et 31% du total des 504 116 ha d’écosystèmes naturels disponibles (Stratégie Nationale et Plan d'Action sur la Biodiversité ou SNPAB 2013-2020). Face à la double nécessité de protéger et conserver le patrimoine forestier tout en tenant compte de la pression foncière et des besoins humains multiformes visant ces forêts et leurs ressources, le CAGF a analysé entre autres la manière dont l’Etat burundais s’organise pour définir et appliquer un compromis de gestion qui tienne en équilibre ces deux intérêts.  Le CAGF a relevé une évolution positive des lois burundaises pour prendre plus en considération les populations riveraines, pour les associer à la gestion de ce patrimoine à travers des accords avec des Groupements de Gestion Forestière (GGF). Cela s’est notamment manifesté à travers la loi sur les aires protégées (mai 2011) le nouveau code forestier (juillet 2016). Cependant, en pratique, cette évolution accuse des faiblesses. Sur le terrain, les autorités ont du mal à techniquement proposer et appliquer des solutions concrètes de gestion participative. De ce fait, les populations riveraines persistent à livrer les espaces protégés à une exploitation sauvage et nuisible à la conservation et à la reproduction des ressources naturelles qu’ils renferment.  Même lorsqu’elles apparaissent a priori nécessaires pour des raisons notamment environnementales ou d’aménagement économique du territoire, les restrictions sur l’utilisation des terres rurales demeurent souvent inapplicables. Cela est dû à plusieurs facteurs. Par exemple, il n’existe pas de schémas d’aménagement du territoire ou plans fonciers communaux de référence pour les appliquer. Les textes d’application de certaines lois qui auraient permis d’appliquer ces restrictions n’ont pas encore été élaborés et/ou promulgués. A titre d’exemple, « l’autorité de gestion des marais » prévue à l’article 447 du CF n’a pas encore émis ses directives sur l’utilisation des marais. Enfin, l’Etat accuse quelques faiblesses dans ses obligations de contrôle des restrictions imposées. A ce sujet, citons pour exemple les contrats de bail sur son domaine qui ne font pas l’objet d’un suivi rigoureux. 3) Thème n° 3 : Utilisation du sol, planification et développement urbains  La revue de ce volet de la gouvernance foncière relève la difficulté croissante des institutions et des services publics à faire face à la pression foncière dans les milieux urbains, après une longue phase de gestion ordonnée du développement urbain à l’aide de plans et schémas d’aménagement et règles de zonage globalement respectés. Les difficultés actuelles sont illustrées par une expansion croissante de l’habitat spontané qui représente 39% de l’habitat à Bujumbura. Toutefois, de nouveaux Schémas Directeurs d’Aménagement Urbains (SDAU) pour Bujumbura, Gitega, Ngozi et Rumonge s’apprêtent à prendre la relève des schémas anciens, dont l’horizon temporel a expiré depuis parfois plus de dix ans, sans que cela n’empêche une certaine continuité dans le respect de ses règles. 7|Page 4) Thème n° 4 : La gestion des terres domaniales  Au Burundi, on distingue le domaine foncier public et privé de l’Etat des terres appartenant aux personnes privées, physiques et morales. Selon un inventaire des terres domaniales libres et habitables effectué entre mars et octobre 2001 par le gouvernement du Burundi et le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), celles-ci recouvraient une superficie de 141.266 ha, soit environ 5 % du territoire ou la superficie de la province de Karusi. C’était le seul inventaire du genre effectué jusqu’à là. Toutefois, depuis octobre 2014, sous l’impulsion du Projet d’Amélioration de la Gestion et de la Gouvernance Foncière au, Burundi (PAGGF) financé par l’Union Européenne (UE) et mis en exécution par l’organisation GiZ, une vaste opération d’identification, délimitation, bornage et mesurage des terres domaniales est en cours. Grâce à ce programme, la documentation relative aux inventaires antérieurs des terres domaniales, longtemps inaccessible au public et difficile à exploiter faute de conservation et méthode technique adéquate, a pu finalement être rendue plus exploitable.  Avec le code foncier promulgué en août 2011, le gouvernement burundais a eu le mérite d’introduire pour la première fois une instance collégiale chargée de contrôler et donner un avis préalable à toute cession ou concession de terre domaniale, quelle qu’en soit la superficie. Mais bien que ce code soit clair sur les pouvoirs et les compétences en matière de gestion des cessions et des concessions des terres domaniales, en pratique, il existe encore des problèmes notables. En province surtout, certaines autorités locales (ex. : chefs de collines, autorités communales) persistent à exercer de facto des pouvoirs de cession ou concession, bien qu’elles n’en aient pas la compétence. Celle-ci est désormais concentrée, selon les superficies en question, entre les mains du Président de la République après avis du conseil des Ministres, ou entre celles du Ministre ayant les terres dans ses attributions, après avis de la Commission Foncière Nationale (CFN). Mais les ressources publiques allouées pour la gestion de ces terres sont modiques et disproportionnées par rapport aux superficies à couvrir et surtout, aux enjeux de cette gestion.  Le CAGF s’est également intéressé également aux lois et aux pratiques effectives observées en matière d’expropriation pour cause d’utilité publique. Au Burundi, cette question revêt une importance d’autant plus grande que le patrimoine foncier de l’Etat étant en raréfaction, le recours à l’expropriation promet d’être de plus en plus fréquent à l’avenir. A ce sujet, l’examen des lois permet de relever des règles et des procédures légales en la matière dont l’utilité est reconnue mais dont l’application est très lâche. En règle générale, les grands projets de développement (ex. : infrastructures publiques), en particulier ceux soutenus par des institutions multilatérales de financement et des partenaires bilatéraux, prévoient des indemnisations et les versent, selon des modes de calcul et des procédures qui demeurent entachées d’opacité et d’irrégularités. Les initiatives locales de développement entraînant des expropriations sont beaucoup moins respectueuses des procédures légales. En général, l’opacité des procédures d’expropriation suivies ouvre à de sérieux risques d’abus. A titre d’exemple, depuis 2012 et jusqu’au 1er janvier 2017, la CFN, censée donner son avis préalable sur toute mesure d’expropriation, n’avait jamais été saisie d’un cas. En outre, il n’existe toujours pas de « répertoire général des terres expropriées et de leur destination » dressé et conservé par l’autorité compétente, comme exigé par la loi (CF, art. 437). 8|Page 5) Thème n° 5 : Transparence des procédures et avantages économiques du transfert des terres publiques à un usage privé  Ce thème de la gouvernance foncière s’applique à examiner les principes et l’organisation qui sous-tendent les transactions portant sur de vastes étendues du domaine foncier de l’Etat passant entre les mains de personnes et d’opérateurs économiques privés. Le but est entre autres d’encourager les transactions transparentes, effectuées sur des tarifs du marché fixés de manière libre et raisonnable, économiquement rentables, avec un gain visible pour le public. La CFN reste l’organe habilité pour contrôler les actes de cession et concession foncières du Président de la République et du Ministre ayant les terres dans ses attributions, seuls compétents en la matière. Composée de 22 membres, elle compte en son sein des délégués de services quasi exclusivement étatiques, en provenance de divers ministères et secteurs. Certains, telle l’Agence pour la Promotion des Investissements (API, public) et la Chambre Fédérale de Commerce et d’Industrie du Burundi (CFCIB), paraissaient a priori avoir été nommés pour y siéger afin de défendre l’intérêt des investisseurs et des opérateurs économiques en quête (acquisition, prêt, etc.) de biens immobiliers et fonciers. En pratique, ils ne jouent pas ce rôle au sein de la CFN. Il ne ressort aucune politique ou règlement clair, appliqué sans ambiguïté et de façon transparente pour identifier les terres qui peuvent être mises à disposition des investisseurs privés. La CFN a du mal à assurer son rôle de conseil sur les décisions de cessions ou concessions domaniales, faute d’ instruments de gestion référentiels à sa disposition tels que des schémas d’aménagement du territoire, un questionnaire ou formulaire-standard à soumettre spécifiquement aux investisseurs pour évaluer la nature et l’envergure des bénéfices à tirer des projets d’investissement qui requièrent des espaces fonciers. Un rapport produit en 2009 fait état de nombreuses terres sous bail emphytéotique dont, pour beaucoup, les termes du contrat ne sont pas respectés. Le PAGGF s’occupe aussi de la collecte, du scanning et de l’archivage des dossiers des terres concédées et s’applique à améliorer les performances du gouvernement en la matière. 6) Thème n° 6 : Accès public aux informations foncières  Au Burundi, il existe un processus clair pour reconnaître formellement l'occupation et la possession d’une terre ou d’une parcelle mais il n’est pas encore mis en œuvre de manière efficace, uniforme et transparente. Ce processus est principalement réparti entre (i) le Ministère ayant l’urbanisme dans ses attributions, (ii) la direction des Titres fonciers et (iii) les services fonciers communaux. La direction des Titres fonciers a son siège à Bujumbura mais ne dispose que de deux bureaux provinciaux, à Gitega et à Ngozi.  Les terres urbaines sont attribuées par les services de l'Urbanisme, au sein du Ministère ayant l’urbanisme dans ses attributions. Leur acquisition définitive arrive au bout d’une procédure qui mène le requérant tour à tour auprès des services de l’urbanisme, de la direction des titres fonciers et la direction du cadastre national pour une série d’autorisations, d’attestations et de frais divers à acquitter (frais de viabilisation, taxes de bâtisse, service de cadastrage, etc.). Le coût de l'enregistrement des terrains ruraux est calculé sur base de la superficie et en fonction de leur usage (agricole, résidentiel, etc.). Pour un terrain acheté, l'attestation de possession est subordonnée au paiement de la taxe de transaction de 3% du prix d'achat. Ce taux n'est pas uniforme pour toutes les communes, certaines appliquent des taux plus élevés. 9|Page  Au 19 juin 2017, les registres des conservateurs fonciers à Bujumbura, Ngozi et Gitega indiquaient respectivement 69.200, 7.800 et 6.000 titres fonciers enregistrés, soit 83.000 au total. Pour sa modernisation, la Direction des Titres fonciers reçoit l’appui du PAGGF qui s’est fixé comme résultats à atteindre (i) de saisir et indexer 12.921 titres et (ii) d’en scanner et archiver 2.230. A la fin du mois de février 2017, le PAGGF rapportait avoir saisi et indexé 23% et scanné et archivé 3% des quantités totales ciblées. Même mené jusqu’au bout, ce travail de la PAGGF laisserait 82% des Titres fonciers non digitalisés et maintenus dans leur classement manuel, par fardes empilées et non suspendues. Outre les problèmes de conservation posés, toute recherche d’un dossier dans ce type de classement, quoi que donnant des résultats de délai relativement décents, n’est pas à l’abri d’impasse à terme. Les mouvements d’entrée et de sortie ne sont pas rigoureusement répertoriés. La disparition et/ou la détérioration des documents constituent des risques certains et d’ores et déjà subis. Dans ces conditions de classement et au regard des faibles ressources financières publiques allouées aux Titres fonciers, la mise à jour des registres elle-même pose de sérieux problèmes.  Le coût total d’enregistrement d’un transfert de propriété aux services urbains compétents est compris entre 2% et moins de 5% de la valeur de la propriété.  Les informations contenues par les registres conservés par la direction et les bureaux des Titres et par les SFC ne sont pas incorporées dans les cartes. 7) Thème n° 7 : Estimation de la valeur des terres et fiscalité foncière  Au Burundi, l'impôt foncier est perçu par la mairie de Bujumbura et les communes rurales. Il est déterminé par la superficie des surfaces bâties et non bâties et il est tarifé au mètre carré dont le coût varie selon les zones. La qualité des matériaux de construction utilisés sur la surface bâtie détermine aussi les tarifs d'imposition. Les tarifs de calcul appliqués sont relativement bas. La surface non bâtie n'est imposable qu'à Bujumbura. Depuis la loi du 3 mars 2016 portant réforme de la fiscalité communale au Burundi, l'impôt sur les revenus locatifs est collecté par l'Office Burundais des Recettes (OBR). Il fut créé en 2009 notamment pour centraliser les opérations de collecte des recettes fiscales. Cet impôt avait été cédé aux communes par une loi de janvier 1987 modifiée en juillet 1989, ce afin de financer les besoins de la population, en particulier la santé et l’aménagement urbain. L’impôt sur les revenus locatifs est basé (i) sur le revenu locatif des bâtiments et des terrains donnés en location et (ii) sur le profit de la sous-location totale ou partielle des mêmes propriétés. L’article 39 de la loi n°1/20 du 31 décembre 2016 portant fixation du budget général de l’Etat pour l’exercice 2017 a déterminé que les recettes issues de cet impôt reviendraient à 60% et 40% respectivement aux communes et au Trésor public.  Globalement, la fiscalité foncière est indexée sur les tarifs du marché au sens où pour certains de ses mécanismes (ex. : taxe sur les mutations, impôt sur les plus-values, Taxe sur la Valeur Ajoutée - TVA, etc.), elle se calcule par l’application d’un taux fixe sur des prix librement négociés et établis entre les parties d’une transaction foncière. La taxe sur les mutations immobilière est à 6% et 3%, l’impôt sur les plus-values à 15%, la TVA est à 18%. En revanche, l’impôt foncier ne se base pas sur le prix du marché car il est calculé sur base de tarifs établis par des décrets changeant après de très longs délais, et selon l’emplacement des biens fonciers et leur superficie. 10 | P a g e  Jusqu’à la fin de l’année 2016, l’impôt foncier, notamment dans la capitale Bujumbura où il s’applique de droit et avec le plus fort potentiel de revenus, faisait l’objet d’une procédure de collecte très lâche et occasionnelle par les services de la mairie. En 2014, des calculs effectués par le Projet des Travaux Publics et de Création d’Emplois (PTPCE, financé par la Banque Mondiale) avait estimé à 37% l’écart entre le montant des impôts perçus et le montant potentiel perceptible à Bujumbura. Au premier trimestre de l’année 2017, la mairie de Bujumbura a lancé une grande campagne de communication publique pour collecter l’impôt foncier pour l’exercice 2016 et les arriérés antérieurs. Elle a abouti à un mouvement massif sans précédent de paiement dudit impôt. Il n’existe pas encore de données disponibles sur le volume des recettes perçues par la mairie à l’occasion, ni sur les procédés par lesquels les services de la Mairie entendent enregistrer et conserver les nombreuses données foncières et financières recueillies à l’occasion de cette collecte. 8) Thème n° 8 : Résolution des litiges  Face à la lourdeur du contentieux lié au foncier (69,3% du total des dossiers civils devant les Tribunaux de Grande Instance), le Burundi offre à ses habitants deux principales voies parallèles et parfois concurrentes pour les résoudre. Il existe une voie coutumière, à travers les « conseils collinaires » habilités par la loi communale (art. 46) à « assurer sur la colline ou au sein du quartier l’arbitrage, la médiation, la conciliation ainsi que le règlement des conflits de voisinage ». De fait, ces conseils sont appuyés ou complétés par les « Bashingantahe », ou conseil des sages, reconnus comme tels par la communauté. En milieu rural, ce sont des structures de prédilection en raison de la diligence de leur procédure. Leur popularité tient aussi à leur référence méthodologique à des normes de culture, des principes de cohabitation et des préceptes d’éducation largement connus et partagés. Ces structures ne sont pas exemptes de critiques, liées notamment à la dépravation des mœurs ou à la politisation d’un nombre croissant de sages présumés. En général, c'est lorsque la médiation des litiges au niveau de la famille et des structures communautaires échoue que les cas sont transférés vers la deuxième voie d’arbitrage que sont les juridictions de droit écrit, en particulier les tribunaux de résidence. Ceux-ci sont institués au niveau de chaque commune et sont également proches des usagers.  Pour réduire la durée de la procédure judiciaire dans les affaires foncières, une loi datant de mai 2014 a supprimé les pourvois en cassation devant la Cour Suprême pour toutes les affaires relatives aux terres rurales. Elle a attribué cette compétence aux quatre Cours d’Appel du Burundi. Au niveau des deux Cours administratives du Burundi qui connaissent des contentieux impliquant l’Etat, la durée moyenne de la procédure est estimée à 39,5 mois à partir de la première audience jusqu’au prononcé de l’arrêt . Le contentieux foncier impliquant des rapatriés ou des déplacés est porté devant la Commission Nationale des Terres et Autres Biens (CNTB) qui applique une procédure relativement rapide devant la CNTB. A quelques nuances et exceptions près, ses décisions sont exécutoires.  L’exécution des jugements est l’un des domaines où la justice semble avoir fait le plus de progrès. En janvier 2016, lors d’un atelier de validation de la politique de ce Ministère pour 2016-2020, un officiel déclarait que le taux d’exécution des jugements était passé de 14% en 2010 à 83,2% en 2014. Eu égard à la proportion qu’occupent les affaires foncières dans les contentieux judiciaires, il est fort probable que les jugements rendus dans le domaine des conflits fonciers aient bénéficié de cette évolution. 11 | P a g e 9) Thème n° 9 : Examen des modalités institutionnelles et des politiques générales  Dans le cadre de la réforme foncière en cours, on observe une multiplicité des acteurs et des institutions qui interviennent dans la gestion et l’administration du foncier au Burundi. Leurs attributions ne sont par clairement définies et ne permettent pas de coordonner et d’optimiser les interventions. Au niveau central, la coordination de l’action du Gouvernement en matière foncière reste faible. Le comité interministériel mis en place en 2012 pour coordonner la réforme foncière et sa mise en œuvre demeure quasi inactif et ne se montre pas efficace dans l’arbitrage entre les différentes priorités de la réforme foncière.  La Commission foncière nationale (CFN) prévue par le Code foncier révisé en 2011 (art. 452-453) et régie par le Décret n° 100/15 du 30 janvier 2017 n’assure pas encore le leadership nécessaire dans la mise en œuvre de la réforme foncière. A côté de l'insuffisance des moyens qui lui sont alloués pour la mise en œuvre des missions qui lui sont confiées, la composition de la commission souffre d'un certain déséquilibre. Vingt-et- un de ses 22 membres émanent de droit de services ministériels ou d’établissements à caractère public. En outre, les avis de la CFN sont fortement influencés par le Ministère de l’Eau, de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme (MEEATU). Longtemps placée sous l’autorité du MEEATU, la CFN a été placée par le décret de janvier 2017 qui la réorganise sous la coordination de la deuxième vice- présidence.  Enfin, en termes de transparence, beaucoup de progrès restent à accomplir. Il n’existe pas de rapports rendus public ni par le MEEEATU, ni par la CFN, l’Ombudsman, la CNTB ou l’OPEB pour informer des actes publics qu’ils posent, de leurs résultats atteints et ou des progrès enregistrés dans l’accomplissement des mandats publics leur confiés en matière de gestion foncière. Impulser le changement dans la gouvernance foncière : comment ? Les pistes d’actions pour améliorer la gouvernance foncière au Burundi sont nombreuses. Une matrice proposée en fin de rapport (cfr. page 172) détaille une série d’actions à mener par thème de gouvernance. Les propositions d’actions recommandées soient multiples mais le bon usage de cette matrice encourage le suivi d’un ordre de priorités intelligible, logique et réaliste. Cet ordre de priorités devrait prendre notamment en compte (i) les logiques d’intérêt des acteurs à mobiliser et (ii) les bonnes pratiques, en commençant par celles qui existent ou ont été déjà été amorcées chez soi.  Transformer la lecture par les acteurs-clés des enjeux de la gouvernance foncière : Les pratiques de gouvernance foncière au Burundi ne connaîtront sans doute pas d’impulsion nouvelle, nette et positive si la lecture et la compréhension des enjeux de celle-ci ne sont réévaluées et le cas échéant, remises en question. Il conviendrait donc d’abord de redéfinir les enjeux de la gouvernance foncière et, au besoin, les illustrer, les exposer et les quantifier en avantages et préjudices comparés, en cas de bonne ou de mauvaise gouvernance. 12 | P a g e  Les logiques d’intérêt : Tenir dûment compte des logiques d’intérêt pour stimuler une dynamique réelle et continue dans l’action publique en matière foncière si gnifie notamment s’ajuster aux besoins et aux intérêts palpables de l’acteur central qu’est le Gouvernement. Cela signifie évaluer dans quelle mesure une action d’impulsion d’une gouvernance foncière améliorée peut être redéfinie avec ces besoins et intérêts comme point d’entrée. Par exemple, un point d’entrée pour améliorer la gouvernance foncière par l’Etat burundais pourrait bien être son action par rapport à la fiscalité foncière. Elle a le potentiel de transformer les institutions et les services de l’Etat en acteurs dynamiques et proactifs d’une gouvernance foncière améliorée, reconçue et rendue plus cohérente et effective. Pour ainsi dire, puisque l’Etat est logiquement et légitimement en quête de ressources accrues pour financer son action publique, il devrait être encouragé et soutenu dans ses efforts pour organiser et améliorer la collecte de ses recettes fiscales foncières. Le fait est qu’il l’a même déjà commencé. Mais il est important qu’il y ait un encadrement technique à pourvoir pour éviter que l’Etat se jette dans la collecte des impôts de type foncier sans autre perspective que de prendre et ponctionner, sans donner en retour en biens et en services, avec la vision et le planning nécessaires pour rendre dynamique et productif ce travail de collecte des impôts. Dans son cadre légal et dans ses pratiques, une réforme de la fiscalité foncière est déjà en cours depuis environ 15 mois. A partir d’elle, il est possible de reconstruire une architecture de la gouvernance foncière avec tous les piliers revus dans le CAGF interconnectés. En effet, il faudrait penser à la chaine d’action et à ses maillons pour que tout se tienne en un édifice unique. Pour organiser une action de collecte de l’impôt qui lui apporte des revenus continus et croissants, l’Etat devrait inscrire son action dans la durée, en intégrant tous les facteurs et les conditions de réussite à cette opération, tels que : (a) disposer d’un bon système d’information foncière (registres, inventaires, etc.), bien mis à jour ; (b) repenser et appliquer ses plans et schémas d’aménagement du territoire pour mieux diriger son réinvestissement des recettes des impôts en services et biens public ou aux collectivités locales ; (c) donner aux organes fonciers de contrôle et de supervision des ressources sensiblement réévalués, en fonction des missions et des résultats attendus, qui méritent eux-mêmes d’être redéfinis ; Etc. 3 2 Documentation Utilisation des terres Droits fonciers foncière urbaines, rurales, Hommes vs Femmes Mieux elle est organisée, domaniales Batwa et exploitants forestiers plus les revenus sont Réglementer et planifier Marais / Paysannats assurés l’utilisation des terres [Renégocier les statuts et accords 4 dans une optique de rentabilité et avec une optique de production économique en rentabilité économique, investissant dans les moyens pour Fiscalité foncière en intégrant les facteurs les servi ces de supervision et Soutenir les efforts (1) à (3) comme sine qua d’accompagnement] d’amélioration des recettes none 1 13 | P a g e Ci-après certaines des plus importantes pistes d’actions recommandées dans la matrice d’actions, tous thèmes de gouvernance foncière confondus : Indicateurs, Moyens de Recommandations Services vérification 1) Capitaliser et poursuivre les diverses études menées sur la MEEATU  Les rapports d’études soutenabilité financière des SFC CFN  Nbre et diversité en y associant des acteurs et (multidisciplinarité) des sources experts de la décentralisation, de PTF de données recueillies pour ces la fiscalité et de la promotion du GSF et OSC études Genre. 2) Engager et organiser le secrétariat de la CFN en faveur de pratiques et d’une procédure écrite et  Avec des cas rapportés et organisée de (i) contrôle de la analysés, le monitoring effectué gestion des terres domaniales et MEEATU / CFN permet de documenter les défis des expropriations et (ii) de suivi- Ministère de l’Intérieur financiers, de formation évaluation des SFC pour relever et Ministère du professionnelle, de qualité et soutenir les bonnes pratiques, Développement communal quantité dans la gestion des terres anticiper les défis et aider au domaniales, des expropriations et redressement et à la correction des de suivi des services des SFC. problèmes ou des phénomènes négatifs émergeant. 3) A l’échelle locale (collinaire ou Ministre des Droits  Nbre et proportions de certificats communale), amorcer un projet Humains, des Affaires fonciers inscrits aux noms de pilote à caractère économique femmes pour rendre plus visible le rôle Sociales et du Genre  Nbre de terres dont le commerce d’acteur économique de la femme Ministère de l’Intérieur et le bénéfice des produits sont et favoriser l’octroi ou la Administrations effectivement contrôlés par des reconnaissance des droits de communales pilotes propriété foncière de la femme femmes 4) Promouvoir la constitution et la mise à jour régulière d’une base Présidence de la République  Le nbre et la diversité des intégrée de données numériques 1ère VP de la République « entrées » de la base de données sur le foncier, incluant les titres et 2ème VP de la République  Les données recueillies les certificats fonciers délivrés, les informations géo-spatiales MEEATU permettent de produire des cartes attachées aux terres domaniales CFN foncières fiables et précieuses à la Bureau Central de planification de l’occupation et de cédées, concédées ou non (y Géomatique l’exploitation des espaces compris les marais), les terres appropriées certifiées, etc. 5) Organiser des consultations avec les autorités centrales et locales  Nbre, noms, fonctions et genre concernées ainsi que les acteurs des personnes ayant participé aux privés impliqués pour développer consultations une stratégie, revoir et rééquilibrer  Une stratégie fiscale adoptée à la loi de mars 2016 sur la réforme Ministère des Finances l’issue des consultations soutient de la fiscalité communale, ce afin MEEATU l’introduction d’un impôt foncier de ruraliser l’impôt foncier (terres Mairie de Bujumbura sur les terres rurales, bâties et non non bâties) avec souplesse et créer Conseils communaux bâties des rapports productifs de PNUD / BAD / BM / UE  La loi sur la réforme de la réciprocité de services entre d’une fiscalité communale est amendée part les entités locales et introduit un impôt foncier sur décentralisées ou déconcentrées et les terres rurales, bâties et non d’autre part les citoyens et leurs bâties communautés respectives. 14 | P a g e Chapitre I – Introduction au Cadre d’Analyse de la Gouvernance foncière Le Burundi est un des pays les plus densément peuplés d’Afrique et sa population vit en majorité de l’agriculture. De ce fait, l’accès et l’exploitation de la terre, en raréfaction, sont sources d’une compétition féroce. Dans son diagnostic sans complaisance de la « crise foncière », la « Lettre de politique foncière » publiée en avril 2010 par le Gouvernement du Burundi relève naturellement les rapports entre croissance démographique et pression foncière. Elle épingle aussi :  une demande de sécurisation foncière croissante de la population confrontée à une procédure d’enregistrement « inadéquate » ;  la défaillance des services de l’Etat dans la gestion des procédures de cessions et concessions domaniales ;  le morcellement et l’exiguïté accrue des terres ;  la dégradation et la surexploitation des terres ;  la prolifération des conflits fonciers et la surcharge des tribunaux ;  l’inadaptation du statut des marais et des paysannats ;  l’inefficacité des services fonciers centralisés (Titres fonciers, Cadastre) ;1 La « gouvernance foncière » est définie comme « le processus de prise de décisions relatives au droit foncier, à l’accès à et l’utilisation des terres et ressources naturelles, à la façon dont ces décisions sont appliquées et dont les intérêts divergents sont réconciliés »2. A cet égard, le « Cadre d’Analyse de la Gouvernance Foncière » (CAGF) est un processus systématique et standardisé d’analyse et d’évaluation de la gouvernance foncière qui permet à la fois de promouvoir et de mesurer de manière objective le rôle, la responsabilité, la capacité et l’efficacité des pouvoirs publics à agir et impacter positivement sur les statuts théorique et effectif des droits et du développement, par le biais de leur gestion de plusieurs piliers de gouvernance. L’approche CAGF permet d’établir un consensus et de définir des actions prioritaires. La mise en œuvre du CAGF dans divers pays montre que l’utilisation de ce cadre cohérent facilite l’échange de bonnes pratiques entre ces pays. Le CAGF est un instrument qui sera d’autant plus utile au Burundi qu’il devrait permettre de poursuivre le vaste effort déjà déployé pour la réforme foncière en cours depuis plus de dix années avec des objectifs et des critères d’évaluation plus larges que la résolution et la prévention des conflits. En effet, bien qu’elle se soit peu à peu étendue sur des superficies de plus en plus grandes du territoire, la réforme foncière en cours au Burundi, telle que présentée officiellement et mise en pratique, est polarisée sur les enjeux de réduction des conflits fonciers. L’organisation institutionnelle est conçue conséquemment. Elle est peu regardante d’une multitude d’autres dimensions de la gouvernance foncière touchant à d’autres problématiques essentiels : environnement, développement urbain, fiscalité foncière, dynamique des marchés fonciers et reconversions professionnelles, etc. 1 Décret n°100/72 du 26 avril 2010 portant adoption de la lettre de politique foncière au Burundi. 2 Palmer et al., 2009 ; Deininger et al., 2011, cités par Banque Mondiale, Décentralisation fiscale et gouvernance locale. Gérer les compromis pour promouvoir des réformes durables, Octobre 2014, p. 75 15 | P a g e En pratique, les structures institutionnelles formellement mises sur pied pour piloter la « réforme foncière » tendent à ne pas considérer les initiatives de réforme foncière en cours, hors de celles qui sont prises dans le cadre de la sécurisation foncière. Le CGAF pourrait donc aider à élargir les vues et la portée de cette réforme foncière en jetant les bases d’une réorganisation conséquente de l’administration foncière. Chapitre II – Méthodologie Le CAGF est une expérience lancée en 2010 par un consortium d’organisations conduit par la Banque Mondiale1 pour stimuler et coordonner à l’échelle planétaire un effort de gouvernance foncière harmonisée, sur base de standards internationaux reconnus en matière de bonne gouvernance. La nécessité d’une évaluation systématique de la gouvernance foncière découle de trois facteurs :  Compte tenu de l’utilisation peu productive des terres dans beaucoup de régions, de l’explosion de la demande de terres pour la production d’aliments, de carburants et de fibres, la production de services environnementaux etc., les modalités institutionnelles de gestion des terres se sont imposées comme un facteur clé pour une croissance durable et la réduction de la pauvreté.  La responsabilité en matière de gouvernance foncière se trouve souvent dispersée entre un grand nombre d’institutions gouvernementales souvent mal coordonnées et le constat a souvent été dressé qu’en la matière, il existe un énorme fossé entre les dispositions juridiques et leur application concrète.  Dans une multitude de cas, le domaine de la gestion foncière appelle à des réformes auxquelles tentent souvent de résister et s’opposer des individus, des compagnies et des multinationales qui tirent profit du statu quo dans le domaine. Du coup, les progrès dépendent beaucoup de la capacité des experts et des parties prenantes, les organes habilités de l’Etat en premier lieu, à arriver à un consensus sur les termes et le processus d’une gouvernance foncière. Ceux-ci requièrent un dialogue et des consultations de tout instant avec le public et les milieux sociaux et professionnels concernés par les changements nécessaires à opérer. Le CAGF donne une vision d’ensemble de plusieurs aspects de gouvernance foncière qui font trop souvent l’objet par les services publics d’un traitement individuel, autonome l’un vis-à- vis de l’autre et incoordonné. 1 Le Cadre d’Analyse de la Gouvernance Foncière (CAGF) a été élab oré par un partenariat de la Banque mondiale, la FAO, ONU-Habitat, le FIDA, l’IFPRI, l’Union africaine et quelques agences de développement bilatérales. La méthodologie-pilote du CAGF fut lancée en 2010 et publiée pour la première fois en 2012. Elle fit l’objet d’une première évaluation en 2014. 16 | P a g e Mené dans plus de 35 pays répartis en Afrique, en Amérique latine, en Asie, en Europe centrale et au Moyen Orient, le CAGF est conduit à l’aide d’une grille d’indicateurs et de sous-indicateurs de performance qui couvrent les neuf thématiques suivantes : 1) Reconnaissance de la tenure foncière ; 2) Droits sur les terres forestières et communautaires et réglementation de l'utilisation des terres rurales ; 3) Utilisation du sol, planification et développement urbains ; 4) Gestion des terres domaniales ; 5) Transparence des procédures et des avantages économiques du transfert des terres publiques à un usage privé ; 6) Accès public aux informations foncières ; 7) Estimation de la valeur des terres et fiscalité foncière ; 8) Résolution des litiges fonciers ; 9) Examen des modalités institutionnelles et des politiques générales. Des experts locaux sont sélectionnés en fonction de leurs connaissances académiques, pratiques et/ou professionnelles de chacune de ces neuf matières. Ils effectuent un travail de collecte et de traitement des données et des informations déjà disponibles renseignant sur les politiques, les lois, l’exercice effectif des droits, les pratiques de gestion et l’organisation qui caractérisent chacun de ces différents domaines. Le rapport produit par ces experts sur ces neuf thématiques (“background reports”) sert de référence pour des notes de A à D à attribuer à la qualité de la gouvernance, mesurée à l’aide de 24 indicateurs (IGF) et 115 sous-indicateurs (appelés « dimensions ») de gouvernance foncière. Pour ces 115 dimensions, il est donc proposé au choix quatre notes (A, B, C ou D) à chacune desquelles correspond une description préétablie de la qualité de la gouvernance. Le rapport des experts ainsi que les notes attribuées font ensuite l’objet de discussions au cours de « panels d’experts ». Un panel est organisé sur chaque thème et rassemble un groupe de 7 à 12 cadres et agents du gouvernement et des services publics, d’académiciens et praticiens de la société civile, d’opérateurs du secteur privé, etc. Selon les sujets traités, le profil des participants aux panels peut varier mais il y figure toujours les responsables publics concernés par le secteur. C’est délibérément que le nombre de personnes qui participent à ces panels est limité car l’expérience a prouvé que cela avait des conséquences positives sur l’ouverture et la franchise des débats et la qualité de leurs conclusions. Le CAGF se réfère aux bonnes pratiques internationales consacrées en matière de bonne gouvernance foncière et amène à des conclusions concernant : i) les données manquantes pourtant pertinentes pour la gouvernance foncière; ii) les domaines susceptibles de faire l’objet d’une réforme réglementaire ou institutionnelle, les pilotes de nouvelles approches, et les interventions visant à améliorer la gouvernance foncière à une plus grande échelle (par exemple en renforçant les droits fonciers et en améliorant leur application) ; iii) les indicateurs permettant d’évaluer l’efficacité de ces mesures. En Afrique, le CAGF est appuyé par un secrétariat qui supervise et coordonne le processus dans plusieurs pays. 17 | P a g e Au Burundi, le processus CAGF a été réalisé avec l’appui de sept experts nationaux1. Les rapports d’expertise par thématique contiennent entre autres des données et des informations renseignant sur tous les indicateurs de gouvernance qui doivent faire l’objet d’évaluation notée. Ils reprennent l’essentiel de la recherche et des réflexions produits et publiés sur les sujets revus, qu’ils ont complétés par leurs propres analyses et conclusions. Le 15 février 2017, un atelier de validation des données du rapport du CAGF a été organisé au King Conference’s Centre de Bujumbura, sous les auspices du Ministère de l’Eau, de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme (MEEATU. Après une présentation synthétique dudit rapport, des échanges en plénière sur chaque rapport thématique soumis ont permis des clarifications et apporté d’ultimes compléments d’informations. Ils ont été suivis de travaux en groupes et de recommandations reprises en annexe du présent rapport final. Chapitre III – Contexte Situé au carrefour de l’Afrique centrale et de l’Est, le Burundi, avec ses 27.834 km 2 de superficie pour environ 10.300.000 habitants, est l’un des trois pays d’Afrique avec les plus fortes densités démographiques. Selon les projections faites à partir du dernier recensement de la population effectué en 2008, le taux de densité démographique passera entre 1981 et 2030 de 161 à 515 habitants/km2 soit un triplement en un demi-siècle. L’Institut national de Statistiques et d’Etudes Economiques du Burundi (ISTEEBU) tire la sonnette d’alarme : « Il n y a aucun doute que la croissance continue de la population fera pression sur le territoire et par conséquent un impact direct sur l’environnement. Si l’Etat ne prend pas des mesures appropriées pour désengorger le secteur primaire en développant le secondaire et le tertiaire, les gros problèmes actuels liés à la pression démographique sur les terres ne feront que s’aggraver. En effet, si le niveau de la population burundaise reste constant (90%) dans l’agriculture de subsistance, la pression sur la terre cultivable ne fera que s’accentuer avec ses conséquences corollaires.» Cette menace est aggravée par “la persistance d’une agriculture intensive aux techniques traditionnelles peu avancées, sur des terres de plus en plus exiguës et qui perdent en fertilité, et ce, dans un contexte de faible urbanisation et de croissance démographique élevée” . La population exploite des terres d'une superficie moyenne de 30 ares par ménage alors que selon la FAO, une exploitation économiquement viable doit être supérieure à 0,90 ha. A cela s’ajoute le fait que les changements climatiques, entre autres causes, créent des chocs et des épreuves de plus en plus fréquentes (sécheresses, inondations, épidémies végétales, etc.) face auxquels, faute de moyens et de capacités pour s’en protéger, les plus pauvres et les plus vulnérables sont durement et régulièrement frappés. 1 Voir Annexe I pour les noms et les affectations des experts par panel 18 | P a g e La maîtrise de la démographie et la réforme structurelle de l’économie recommandées comme solutions au problème de la pression foncière sont longs et difficiles à matérialiser. Ils pourraient ne pas avoir de résultat avant un long terme alors que les conséquences de la pression foncière se multiplient jour après jour et sont visibles, entre autres, sur la conservation de l’environnement, le niveau des conflits et de la sécurité, les injustices sociales et le développement économique. Entre le contrôle de la croissance démographique et les mesures pour désengorger le secteur primaire au profit des secteurs secondaire et tertiaire, la gouvernance foncière s’intéresse à l’éventail des mesures pouvant être prises pour agir à la fois sur la pression foncière et prévenir ses multiples conséquences, tout en créant les conditions d’un développement économique et social, juste et dynamique. Cela suppose que cette gouvernance soit prise dans l’ensemble large de ses dimensions et actionnée avec un certain niveau de planification et de coordination. Aux origines du droit foncier Le droit foncier burundais actuel est l’évolution d’un droit qui remonte aux années précoloniales. Durant la période précoloniale et jusqu’en 1966, le Burundi était un Etat unitaire multiséculaire de régime monarchique. Avant la colonisation, l’accès et l’exploitation des terres étaient déterminées par le Mwami (Roi) qui était propriétaire de toutes les terres, qu’elles fussent vacantes ou exploitées. Tous ceux qui exerçaient des pouvoirs sur la terre ne le faisaient que par délégation, au nom de ce dernier et ceux qui exploitaient la terre ne le faisaient qu’en usufruitiers»1. Le pouvoir du Roi ou de ses délégués s’étendait à la confiscation, l’expropriation et la redistribution. En tout état de cause, ainsi que l’exprima un arrêt d’avril 1948 du Tribunal Territorial de l’Urundi : « La question foncière était intimement liée au pouvoir politique. C’est de la terre - champ, friche ou pâture - que provenaient les principaux revenus des chefs et c’était dans leur faculté d’en dispenser ou d’en priver que résidait en grande partie leur pouvoir »2. C’est sans doute ce qui fait douter du caractère arbitraire prêté par A. Verbrugghe aux mesures d’expropriation et redistribution des terres prises par le Roi et ses Représentants territoriaux, en son nom : « Ce droit de propriété privé du sol a été dénié aux Burundais par certains anthropologues, qui prétendaient que toutes les terres appartenaient au Mwami qui les donnait à qui il voulait et en expropriait qui il voulait. Le Mwami, en tant que chef d’Etat et chef de la justice du pays, détenait pour le pays entier les terres vacantes qu’il distribuait administrativement à ses représentants dans l’administration du domaine privé de l’Etat. Le Mwami ainsi que les autorités du pays avaient leurs propriétés privées comme tous les habitants du Burundi. Il n’expropriait jamais si ce n’est pour punir les malfaiteurs. Mais il protégeait tous les propriétaires dans leurs droits, puisque celui qui se sentait lésé pouvait porter plainte devant les tribunaux, y compris le tribunal du Mwami ».3 1 A.Verbrugghe, « Le régime foncier au Burundi » in Revue juridique du Rwanda et du Burundi, cinquième année, deuxième trimestre 1965, n° 2, p.59 2 Louis De Clerck, « Le régime foncier au Burundi », op.cit., p.6 3 Joseph Bukera, « Les droits fonciers coutumiers au Burundi » in Revue juridique et politique-Indépendance et coopération, Vingt-quatrième année, n°4, octobre-décembre 1970, p.1209, cité par Me Gilbert Bigirimana, Mémento du Droit foncier burundais, Décembre 2013, Bujumbura, p. 8 19 | P a g e Durant la période coloniale, le droit foncier a évolué. La période coloniale (1898-1962) a connu deux administrations : allemande (1898 à 1919) et belge (1919 à 1962). Il existe très peu d’information et de document aidant à établir l’influence de l’administration coloniale allemande sur le droit foncier burundais. En revanche, la période sous la tutelle de la Belgique est plus documentée sur le sujet, notamment sur les lois nouvelles qui furent nombreuses à réorganiser le foncier. Sous la puissance tutélaire belge, le droit foncier imposera une distinction de droits dichotomique entre, d’un côté les Belges et les autres étrangers occidentaux, et de l’autre, les “indigènes et assimilés”. Les premiers étaient soumis aux dispositions du code civil 1 tandis que les seconds étaient régis par le droit coutumier. Ils étaient renvoyés respectivement devant les juridictions de droit écrit et les juridictions coutumières2. Les Belges étendirent au Ruanda-Urundi (ex-nom des territoires du Rwanda et du Burundi, sous tutelle commune) une règle fondamentale du droit foncier appliqué à leur colonie du Congo en décrétant que « les terres occupées par des populations indigènes, sous l’autorité de leurs chefs, continuent d’être régies par les coutumes et les usages locaux 3». Les actes législatifs et réglementaires les plus saillants des autorités belges visèrent principalement les objectifs suivants :  Rendre obligatoire le recours à un officier public et la couverture par celui-ci de tout acte pour toute forme d’accession ou de transaction sur la terre, y compris l’occupation d’une terre vacante.  Encourager l’enregistrement des droits fonciers, en permettant que des terres régies par le droit coutumier passent sous régime du droit écrit si elles suivent la procédure d’enregistrement prescrite par le droit écrit.  Préserver les droits fonciers contre l’arbitraire des Chefs : L’autorité tutélaire belge a notamment mis fin aux nombreuses corvées sur les terres et tributs levés sur les produits de la terre que les Chefs imposaient à leurs populations, en octroyant des revenus aux Chefs et en prévoyant et en appliquant des sanctions disciplinaires sur ceux qui persisteraient à exiger des corvées ou à exercer des pouvoirs abusifs sur les biens fonciers des individus ;  Placer sous le domaine privé de l’Etat toutes les terres vacantes et les terres non enregistrées, tout en protégeant les terres occupées coutumièrement contre l’expropriation sans indemnité et en leur offrant la possibilité légale de les faire enregistrer en leur nom sous une procédure de droit écrit. C’est un édit du Roi datant de 1960, renforcé en 1961, qui consacra la domanialité des terres vacantes et substitue l’Etat au « Mwami » comme propriétaire de ces terres ;  Affirmer le principe de la prescription sur les terres coutumières : celle-ci fut appliquée par jurisprudence et une succession de décisions judiciaires et non par une loi4. 1 Article 4 de la loi du 18 octobre 1908, rendue exécutoire au Burundi par la loi du 21 août 1925. 2 Ibidem, p.33 3 Article 2 du Décret du Roi-Souverain du 14 septembre 1886 rendu exécutoire au Burundi par l’ordonnance du Ruanda-Urundi n° 9 du 8 mars 1927 in R. Bellon et P. Delfosse, Codes et lois du Burundi, p.97 4 Ces objectifs et ces principes sont énoncés par M. Louis de Clerck, Le Régime foncier au Burundi, in Revue administrative et juridique du Burundi, premier trimestre 1971, p.4. cité par Me Gilbert Bigirimana, Mémento du droit foncier burundais, Bujumbura, Décembre 2013 20 | P a g e A l’avènement de l’indépendance du Burundi, les principales caractéristiques du droit foncier tel que bâti par la tutelle coloniale belge ne connurent pas ou peu de modification majeure jusqu’au premier Code foncier, promulgué en septembre 1986. La propriété foncière individuelle fut consacrée par la Constitution de 1962. En juin 1977, un décret-loi abolit l’« Ubugererwa » par lequel un propriétaire foncier employait à tous services un individu en contrepartie d’une concession foncière qu’il pouvait lui reprendre à tout moment. Deux nouvelles circonscriptions foncières seront créées à Gitega et Ngozi, sous le département des Titres fonciers pour faciliter le processus moderne d’enregistrement des droits fonciers. Enfin la période d’avant la promulgation du Code foncier de 1986 vit aussi promulgués les premiers codes minier et forestier, respectivement en 1976 et 1985, un décret datant d’avril 1985 instituant des périmètres de reboisement d’intérêt public sur les sols du domaine de l’Etat, etc. En pratique également, on aura aussi vu une tendance de la part de l’Etat burundais, qui se confirmera plus tard et actuellement encore, à vouloir récupérer son domaine privé, irrégulièrement attribué. Un décret-loi datant de 1976 porta « retour au domaine de l’Etat des terres irrégulièrement attribuées ». Le premier « Code foncier » promulgué au Burundi, le 1er septembre 1986, marqua surtout la volonté du législateur de rassembler dans une seule loi plusieurs dispositions éparses régissant le foncier. Il fut complété par une série de décrets-lois et lois tels que le décret-loi n° 1/40 du 26 novembre 1992 portant délimitation du périmètre urbain de Bujumbura, le décret-loi n°1/41 du 26 novembre 1992 portant institution et organisation du domaine public hydraulique45, la loi n°1/010 du 30 juin 2000 portant code de l’environnement de la république du Burundi. En pratique, aucun changement majeur n’est perceptible. La dualité du droit foncier resta de mise et les modes d’enregistrement des droits fonciers par le conservateur des titres fonciers demeurèrent largement ignorés par le monde rural, qui s’accommode du droit coutumier, plus flexible et abordable, bien que précaire. L’exposé des motifs du Code foncier de 1986 posait déjà ouvertement la question de savoir s’il fallait ou pas faire de l’Etat, de droit, le seul et unique propriétaire de toutes les terres du Burundi. Il tranche en faveur du statu quo : “La question capitale que nous avons été amenés à résoudre est celle de savoir si oui ou non, la terre appartient exclusivement à l’Etat, ou si le droit de propriété peut être reconnu aux particuliers. ” A ce sujet, nous avons affaire à deux théories contradictoires. ” La première avance que pour assurer la meilleure gestion du patrimoine foncier national dans l’intérêt général, et en vue d’assurer le développement économique et social, seul l’Etat doit être reconnu propriétaire foncier, les particuliers n’ayant qu’un droit de jouissance limité sous forme d’emphytéose, d’usufruit ou de servitudes. Les tenants de cette opinion invoquent même un argument fondé sur l’histoire, selon lequel, à l’époque monarchique ‘le roi était le maître suprême de toute les terres et de tout le bétail du pays’. ” D’après la seconde théorie, qui semble de loin la plus juste et la plus répandue si l’ on s’en tient aux résultats de l’enquête sociale menée à travers tout le pays sur la question, depuis que le Burundi existe, le citoyen exerce un droit de propriété incontestable sur la terre qu’il occupe, puisqu’il peut la vendre ou la céder à titre gratuit, la grever de charges réelles, etc.”1 1 Exposé des motifs de la loi du 1er septembre 1986 portant Code foncier du Burundi. 21 | P a g e Lorsqu’en 1992, sous l’impulsion de la FAO naissent les premières consultations et démarches pour la révision du Code foncier de 1986, sous la forme d’un « code rural »1, la question de la propriété des terres fut remise sur la table. Le consultant de la FAO proposa un projet de code rural qui débutait par réaffirmer la prééminence du droit de l’Etat sur toutes les terres. Cette disposition, spontanément rejetée par les interlocuteurs étatiques, fut suivie de l’abandon du projet de code rural tout entier qui ne fut jamais publiquement débattu. Avec de nouveau le soutien de la FAO, un projet de réforme du Code foncier élaboré par deux académiciens burundais2 refit surface en 2004. Il prétendait moderniser le droit foncier, sans toutefois en changer les grandes caractéristiques : dualité, propriété individuelle, etc. Il proposait notamment de jeter les bases juridiques d’un « aménagement du territoire spécialisé » qui confèrerait à l’Etat le droit d’imposer des types de culture sur certaines régions pour favoriser la production agricole. Mais ce projet de loi, qui fit l’objet d’une table ronde des intervenants du secteur foncier, ne dépassa guère ce stade. Le tournant clé de la gestion décentralisée des terres Il fallut attendre l’année 2008 pour qu’un processus de réforme du Code foncier soit remis sur les rails. Celui-ci est nettement marqué par la préoccupation du Gouvernement burundais à l’égard des conflits fonciers qui prolifèrent et qu’il veut juguler. Il s’inscrit dans le prolongement de nouveaux projets de « gestion décentralisée des terres » amorcés par le Gouvernement burundais et la Coopération suisse en 2007, rejoints plus tard par l’Union Européenne. Cette nouvelle impulsion part du postulat que les conflits fonciers qui pullulent et engorgent les tribunaux ont pour cause majeure la précarité des modes coutumiers de tenure foncière, basés sur le témoignage oral. Partant, elle propose une gestion décentralisée de la procédure d’enregistrement des terres et l’ouverture dans les bureaux communaux de services fonciers habilités à délivrer des certificats fonciers censés être dotés d’une plus grande sécurité et valeur juridiques. Ce processus sera appuyé par des consultations communales organisées en août 2008 dans les 17 provinces du Burundi. Il se poursuivra par l’adoption en Conseil des Ministres les 15 et 16 avril 2009 d’une « lettre de politique foncière nationale » promulguée le 26 avril 2010 puis par le Code foncier, officialisé le 9 août 2011, actuellement en vigueur. La « lettre de politique foncière » trace des pistes de solution déclinées en cinq « axes stratégiques »3 :  Axe 1 : Rénovation de la législation foncière et domaniale ;  Axe 2 : Restructuration et modernisation des services en charge de la gestion foncière ;  Axe 3 : Décentralisation de la gestion foncière ;  Axe 4 : Inventaire des terres domaniales ;  Axe 5 : Développement de solutions durables aux problèmes de personnes sans terre et à l’exiguïté des terres. 1 FAO, Appui à l’élaboration d’un code rural. Rapport final, projets TCP/DBI/9155 et TCP/BDI/2251, Rome, FAO, 1992 2 Professeur Didace Nimpagaritse et Maître Vincent Ndikumasabo. 3 Axe 1 : Rénovation de la législation foncière et domaniale ; 2 : Restructuration et modernisation des services en charge de la gestion foncière ; 3 : Décentralisation de la gestion foncière ; 4 : Inventaire des terres domaniales ; 5 : Développement de solutions durables aux problèmes de personnes sans terre et à l’exiguïté des ter res. 22 | P a g e La « lettre » annonce un plan d’actions afin de « coordonner les phases de mise en œuvre de la politique foncière nationale ». Elle prévoit entre autres la mise en place :  d’un « dispositif de pilotage, de mise en œuvre et de suivi » ;  d’un « organe interministériel de coordination et de suivi » ;  d’une « cellule nationale ad hoc chargée plus spécifiquement du suivi opérationnel de la mise en œuvre de la réforme et des actions financées par les partenaires au développement, sous l’autorité du Ministre en charge des terres ». La « lettre » affirme s’inscrire « en cohérence avec les orientations nationales et sectorielles » et cite explicitement certaines stratégies et politiques à dimension foncière à prendre en compte dont :  le Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP);  la « stratégie nationale d’utilisation durable des terres »;  la « politique nationale d’habitat et d’urbanisation »;  la « stratégie nationale de l’environnement au Burundi (SNEB) et  le code de l’environnement;  la « stratégie agricole nationale »  l’étude prospective « Vision Burundi 2025 ». Théoriquement, la liste de ces références fait de la « Politique foncière » un document d’orientation qui s’appuie sur un éventail large et assez équilibré d’axes d’intervention. En pratique, les dispositifs organisationnels effectivement mis en place et leurs matières de concentration reflètent une vue et des efforts beaucoup moins bien répartis sur les différentes aires de la gouvernance foncière. Le « Comité de pilotage interministériel » de la réforme foncière ne s’intéresse pas, sinon peu, à plusieurs champs importants de la gouvernance foncière et demeure ainsi sans influence ni utilité pour une réforme foncière orientée avec plus d’équilibre et de coordination. Pourtant, la pression foncière s’accroit sous le poids de la croissance démographique. Elle accélère l’impact humain spontané sur l’occupation et l’exploitation des sols sans que les efforts de gouvernance foncière de l’Etat, encore trop inconstants et partiels, ne soient en mesure d’anticiper et contrecarrer les préjudices à l’environnement, à la productivité et à l’équité. Le CAGF passe en revue plusieurs de ces aspects de gouvernance, d’abord en décrivant sommairement les réalités de ce contexte, ensuite en appréciant le statut de la performance de l’Etat sur des leviers clés de la gouvernance foncière. Outre les aspects de politique foncière déjà énoncés, cette performance est à mettre en perspective avec les réalités de l’occupation et de l’exploitation des terres décrites ci-après. Un couvert forestier en régression sous la poussée démographique Au Burundi, l’autorité coloniale ressentit assez tôt le besoin de protéger les ressources naturelles et l’environnement. Dès 1930, trois réserves forestières furent officiellement établies : la réserve forestière de la ligne de partage Congo-Nil, de Bururi et de Kigwena. 23 | P a g e Les objectifs étaient principalement de (i) protéger les sols contre l'érosion, en particulier pour les crêtes dénudées, et (ii) fournir à plus long terme du bois d'œuvre, du bois de service et du bois de chauffe à usage domestique. Après l'Indépendance, c'est à partir de 1976 que les principaux boisements furent créés avec des appuis publics bilatéraux et multilatéraux à l’Etat burundais. Plus de 50.000 hectares furent ainsi mis en place entre 1980 et 1987, essentiellement situés sur les crêtes et les versants des régions naturelles du Mugamba, Bututsi, Mumirwa et sur les versants des sommets du Kirimiro (chaîne du Cene-Shunda, Gihinga), du Buyogoma (Mpungwe- Musongati, Nyaruganda, Nkoma), du Bweru et du Bugesera. Il s’agit notamment des boisements de Gakara (2.000 ha) et Vyanda (5.000 ha) financés par la Banque Mondiale entre 1981et 1985; Rugazi (2.000 ha), financé par le Fond Européen de Développement entre 1978 et 1986. C’est également des projets de reboisement de Ruyigi (9.000 ha) financés par le Fond International pour le Développement Agricole et la Coopération Allemande entre 1980 et 2000 ; Mugamba Bututsi (10.080 ha) financé par l’Arabie Saoudite et la Belgique de 1978 à 1986 et Bukirasazi (3.000 ha) financé par la Banque Africaine de Développement (BAD) entre 1988 et 2000. En 2008, les écosystèmes forestiers artificiels occupaient près de 155.000 ha (5,56 % du territoire national) dont 95.000 ha de boisements publics (Eucalyptus, Pinus) et plus de 60.000 ha d’essences agro-forestières, fourragères et fruitières (MEEATU, 2008). Cinq ans après, les boisements occupent 4,6% du territoire national soit 133.500 ha dont 61.375 ha de boisements appartenant à l’Etat, 24.125 ha de boisements communaux et 48.000 ha de boisements privés (MEEATU, 2013). Les boisements ainsi mis en place sont pour la plupart des « blocs » de grandes dimensions installés sur d'anciens pâturages ou zone de parcours montagneux et qui étaient exploités par les agriculteurs-éleveurs des alentours. La procédure utilisée consistait à choisir les zones à reboiser qui étaient décrétées « terres vacantes ». Ensuite suivait leur mise en défens avant le piquetage et la plantation réalisée lors des travaux communautaires ou par une main d’œuvre rémunérée, recrutée localement. En décrétant ces terres "vacantes", l'administration forestière présumait que ces espaces étaient inutilisés et donc libres pour leur affectation au reboisement. Pourtant, dans la plupart des cas, il s'agissait de terrains indivis, d'accès libre à tous les habitants de la colline pour le ramassage du bois, la cueillette et le pacage des troupeaux. Ces pâturages étaient généralement mis à feu à la fin de la saison sèche pour accélérer la repousse de l'herbe et permettre au bétail de franchir la période critique qui précède la reprise de la végétation. L'affectation de ces espaces au reboisement marqua la fin de ce type d'exploitation pastorale. Après leur mise en défens, les habitants des alentours et leurs troupeaux ne pouvaient plus avoir accès à ces terres sous peine de fortes amendes. L'affectation au reboisement de ces terres qualifiées à tort de "vacantes" s’est traduite par :  une diminution importante des pâturages accessibles au bétail et par une diminution de la qualité des autres pâturages (non reboisés) mais interdit de brûlis en fin de saison sèche ;  un impact négatif sur la fertilité des sols suite à une diminution des activités d’élevage par manque de pâturage ;  l’impossibilité de l’extension des terres cultivables. 24 | P a g e Bien qu’il s’agisse théoriquement de reboiser les "crêtes dénudées" et les pentes fortes pour les protéger de l'érosion, une grande partie de ces terres à "vocation forestière" aurait très bien pu être mises en culture. Dans certaines localités, les reboisements ont même été installés sur des sols profonds et particulièrement favorables à la mise en culture. C’est par exemple le cas à Gakara, dans la commune de Muhuta. La mise en défens des terres à vocation pastorale s’apparente aussi à une expropriation sans indemnisation d’un domaine indivis au profit de l'Etat. Cette expropriation, parfois massive, n’a pas été sans provoquer, de la part de la paysannerie, une forte résistance manifestée de multiples façons. Dans certaines régions, les terrains reboisés sont encore considérés par les agriculteurs comme d'accès libre à tous (indivis), comme ils l'étaient avant que l'Etat procède à leur "expropriation" de fait, d’où la persistance de feux qui ravagent régulièrement ces boisements. En définitive, la mise en œuvre de la politique de reboisement s’est faite sans tenir en compte des droits communautaires coutumiers. Les conséquences ont été la diminution des pâturages et la dégradation des parcours non reboisés soumis au surpâturage, la baisse de la fertilité des sols consécutive à celle des activités d’élevage et l’impossibilité d’extension des terres cultivables. De nombreux conflits entre l’administration des forêts et les populations vivant dans leurs alentours sont apparus dans plusieurs localités. Plusieurs facteurs tels les coupes illicites, les défrichements et les feux de brousse répétitifs entrainèrent une dégradation continue des boisements. Après l’indépendance, c’est à partir de 1980 que le Gouvernement dit de la IIème République s’est engagé dans la protection de l’environnement en créant l’Institut National pour la Conservation de la Nature (INCN)1 par le décret n° 100/47 du 3 mars 1980. Cet Institut fut mis sous la tutelle administrative de la Présidence de la République. Le mandat de l’INCN était entre autres de « créer, organiser et gérer les parcs nationaux et les réserves naturelles », « assurer l’administration des biens et des services des parcs nationaux et des réserves », « faire des études et des recherches visant la conservation de la nature en général, de la faune et de la flore dans les parcs et les réserves intégrales en particulier », « procéder à la diversification des espèces d’arbres et d’animaux dans les parcs nationaux et réserves », « assurer le meilleur rendement des sites touristiques des parcs nationaux et des réserves en collaboration avec l’office national du tourisme », « former des techniciens spécialisés dans le domaine de la conservation de la nature » et « proposer aux autorités compétentes des sites à ériger en parcs nationaux ou réserves ». La même année, le 3 mars, le Gouvernement promulgua le décret-loi n° 1/6 portant création des parcs nationaux et des réserves naturelles au Burundi pour permettre à l’INCN d’initier la création d’aires protégées. 1 INCN qui deviendra plus tard l’INECN puis l’OBPE 25 | P a g e C’est sur base des recommandations issues de plusieurs études menées par des professeurs de l’Université du Burundi et des consultants de l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO) et du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) que l’INCN procéda à la création d’aires protégées, de parcs nationaux et de réserves naturelles sans études d’identification préalables. L’INCN s’appuya sur l’article 19 du décret-loi de mars 1980 stipulant que « les personnes régulièrement installées dans les périmètres désignés comme parc national ou réserve naturelle seront indemnisées selon la procédure prévue par le décret du 24 juillet 1956 relatif à l’expropriation pour cause d’utilité publique ». L’INCN s’est également basé sur les articles 2, 13, 14, 15 et 16 du même décret-loi qui interdisent toute exploitation des ressources naturelles dans les aires protégées. La création des aires protégées fut en partie poussée par la pression internationale, le Burundi étant invité à s’associer ainsi aux autres nations du monde pour posséder des sites protégés, notamment pour le tourisme. Elle a été à la base de nombreux conflits entre les populations expropriées dont beaucoup ne furent pas été indemnisées. La création du parc de la Ruvubu semble être la plus controversée, selon certains experts1 parce qu’elle fut décrétée « dans une région agropastorale mise en valeur depuis déjà longtemps par des familles paysannes autochtones ou immigrées, là où toute "nature sauvage" avait disparu depuis longtemps à l'exception des rives de la rivière Ruvubu. Dans ces conditions, la ’reconstitution’ d'un ’Parc National’ a nécessité : l'expropriation de plus de 3.000 familles paysannes, la mise en défens de 50.000 hectares, le repeuplement progressif de la zone en animaux sauvages, la construction d'infrastructures touristiques ». Par contre, selon Hubert Cochet, la création du parc national de la Kibira était justifiée parce que la forêt était là et il s’agissait véritablement de protéger un patrimoine existant, d’autant plus important qu’il contribue sans doute à la régulation des phénomènes climatiques et torrentiels des régions situées de part et d’autre de la crête Congo-Nil. Il déplora néanmoins le fait que la protection de la Kibira fut mise en œuvre « contre » les paysans et sans concertation aucune. « En 1990, les conflits entre l’INECN et les populations riveraines étaient devenues difficiles à gérer. Cela a fait comprendre que la méthode dirigiste utilisée était source de conflits. En même temps, le besoin de définir des objectifs de gestion et d’aménagement s’est fait sentir. C’est ainsi que l’INECN a négocié plusieurs projets ayant aidé dans l’élaboration des plans de gestion de certaines aires protégées avec des objectifs plus clairs de protection. Malheureusement ces plans de gestion n’ont pas été finalisés et appliqués suite à la guerre déclenchée dès 19932. » Depuis 1993, l’Institut National pour l’Environnement et la Conservation de la Nature (INECN) a adopté une approche rendant obligatoire une étude préalable d’identification d’une aire à protéger en tenant compte des intérêts de la population avant sa création. Cette étude devait proposer des activités compatibles avec les mesures de protection émanant des populations riveraines enquêtées lors de l’étude ou découlant du jugement de l’expert. 1 Hubert Cochet, Etude sur la dynamique des systèmes agraires au Burundi, 1993 2 MEEATU – Modes de gouvernance et catégories d’aires protégées actuelles et futures au Burundi , non daté. 26 | P a g e Pour l’ensemble des aires protégées créées depuis 1993, la catégorie des « paysages protégés » a été privilégiée. Le choix de cette catégorie était motivé par plusieurs raisons, notamment :  intégrer les intérêts de la population dans la conservation des aires protégées ;  éviter les problèmes d’indemnisation devenus très embêtants pour l’Etat;  le manque d’autres terres pour installer les populations expropriées ;  le manque d’espaces vastes et continus encore naturels pouvant conduire à créer de grands parcs et réserves. C’est dans ce cadre que les « paysages protégés » de Gisagara, Mabanda/Nyanza-lac, Mukungu-Rukambasi et Kinoso furent créés. En 2000, la promulgation du code de l’environnement définit la procédure d’identification des aires protégées impliquant d’autres services administratifs, les communautés locales et les populations concernées. Le code de l’environnent rend obligatoire, avant le classement en aire protégée, la prise en considération du maintien des activités et des droits d’usage traditionnels existant sur les zones classées, dans la mesure où les activités et usages sont compatibles avec la réalisation des objectifs poursuivis dans le cadre du classement. Cependant, l’administration de l’environnement n’a pas encore reconnu les droits des populations vivant autour des aires protégées. Mais cela n’empêche pas certains groupes autochtones, nommément les Batwa, à continuer de vivre des ressources naturelles de ces espaces par des prélèvements anarchiques contribuant ainsi à leur dégradation. Actuellement, les forêts naturelles sont représentées par les forêts ombrophiles de montagne dont le Parc National de la Kibira (40.000 ha), la réserve de Monge (5.000 ha), la réserve forestière de Bururi ( 3.300 ha) et la réserve naturelle de Mpotsa (200 ha); la forêt mésophile péri guinéenne de Kigwena (500 ha), les forêts claires à Brachystegia comprenant les réserves de Rumonge (600 ha) et de Vyanda (4.500 ha), la forêt xérophile à Hyphaene petersiana située dans le Parc National de la Rusizi (11.000 ha) dans la plaine de l’Imbo, les savanes de l’Est dont la partie la plus importante est le Parc National de la Ruvubu, 50.000 ha1. En définitive, la procédure de création des aires protégées a évolué depuis l’époque coloniale jusqu’à ce jour. La création de la plupart des aires protégées a été faite dans les années 1980 par voie d’expropriations parfois massives et l’application d’une série « d’interdits » contre l’action des populations expropriées et celles vivant autour de ces espaces. Ces dernières ne se sont pas totalement soumises à ce refus de leurs droits par l’Etat. Elles ont continué à exploiter anarchiquement les ressources naturelles créant ainsi des situations des conflits interminables entre elles et l’administration des aires protégées. Face à cette situation, l’administration des aires protégées a initié depuis 1990 des actions visant à élaborer des plans de gestion participative et l’intégration des populations riveraines dans la gestion des aires protégées. Ce faisant, il s’agissait de leur reconnaitre quelques droits d’usage des ressources tout en rendant l’exercice des droits compatible avec l’action de conservation. 1 IUCN- Parcs et Réserves du Burundi. Evaluation de l’efficacité de la gestion des aires protégées. Programme Aires Protégées d’Afrique Centrale et de l’Ouest (PAPCO) , 2011 27 | P a g e Une population urbaine marginale en croissance continue Le Burundi est aussi un des pays les moins urbanisés de l’Afrique et du monde. Les projections d’urbanisation maintiennent le Burundi à des proportions faibles de population même à l’horizon 2020 (12%). Milieu de 1990 2008 2015 2020 résidence Burundi (population 5.292.793 8.053.574 9.834.543 11.126.883 totale) Population 333.044 811.866 1.041.863 1.329.710 urbaine Population 4.959.749 7.241.708 8.792.681 9.797.173 rurale Part (% des 6,2% 10% 11% 12% urbains) Sources: Données des recensements de 1990 et de 2008 et projections optimales des études sur les Schémas Directeurs de l’Aménagement Urbain (SDAU) des agglomérations de Gitega, Ngozi et Rumonge. La pression foncière fait naturellement évoluer le phénomène de l’exode rural, reflétée par des taux de croissance urbaine oscillant entre 6 et 7 % par an dans les quatre principales villes du pays. Bujumbura, la capitale, occupe une superficie de 110 km2. Elle est couverte à 73% par l'habitat, dont 39% est dit spontané1. Depuis la fin des années 1990, le Burundi ne compte plus de sociétés de promotion immobilière publique pour construire des logements. Les rares initiatives privées se sont confinées à des constructions de logement de haut standing, en quantité infime, quasiment toutes concentrées à Bujumbura. De plus en plus, sous la pression de la demande foncière qui déborde la capacité des services de l’urbanisme et de l’habitat à y répondre, l’habitat spontané a tendance à prendre le pas sur l’habitat issu des lotissements planifiés et encadrés. Cet habitat spontané concerne les logements de standing moyen et élevé ainsi que l’habitat rudimentaire, surtout visible dans les quartiers périphériques de la capitale, Bujumbura. Mais derrière le phénomène visible de l’habitat spontané se dissimule celui moins perceptible du surpeuplement croissant des quartiers résidentiels populaires. Il est à l’origine de phénomènes sociaux négatifs de plus en plus récurrents tels que les épidémies de choléra. Depuis quelques années et à intervalles de plus en plus réguliers (2012, 2014), elles frappent plusieurs quartiers de la capitale, en particulier ceux du Nord (Buterere, Kinama et Kamenge), traduisant ainsi en partie les difficultés de l’Etat à anticiper et contrôler le développement urbain. 1 SDAU de Bujumbura, Diagnostic préliminaire. Février 2012 28 | P a g e Les grandes caractéristiques de l’occupation effective du sol à Bujumbura se présentent comme suit: Surface occupée en TYPE % ha Habitat 4.380 73% Activités 560 9% Equipements 780 13% Sécurité (camps militaires et 210 3,5 % police) Confessionnel 80 1,5% Ensemble 6.000 100% Source: Rapport d’élaboration du SDAU de Bujumbura, juillet 2012. L’analyse de l’évolution de la planification urbaine au Burundi montre que pendant plusieurs années, seule la ville de Bujumbura a fait l’objet d’une attention spécifique et quasi exclusive en la matière. Durant l’époque coloniale déjà, le zoning urbain était dessiné selon les activités (habitat, équipements, commerce, industrie, etc.…). Un schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de la ville de Bujumbura fut conçu en 1982 pour donner des orientations de développement à l’horizon 2000. Globalement, ce schéma a été suivi dans sa mise en œuvre, au niveau du zoning. Les espaces réservés à l’habitat ont accueilli les quartiers résidentiels actuels de Gikungu, Gihosha, Kigobe, Carama, Kanyosha et Kibenga. Par contre, une partie du quartier de Kigobe qui était censée abriter des équipements structurants et servir de nouveau centre commercialo-administratif (“centre-ville”) fut affecté à l’habitat. Selon les schémas planifiés, la zone du “centre ville” abritant l’ancien marché et ses alentours devait être densifiée et modernisée mais cela ne fut pas le cas. Depuis 2002, il n'existe au Burundi ni schéma directeur d'aménagement urbain, ni plan local ou particulier d'aménagement ou règlement d'occupation des sols: "La production de parcelles se fait au coup par coup sans aucune planification préalable. Les acquéreurs de terrains doivent eux-mêmes payer tous les coûts afférents à la viabilisation des terrains. Le rythme de production reste faible et les réserves foncières pour mener les opérations de viabilisation s’amenuisent surtout dans la ville de Bujumbura."1 Toutefois, des schémas d’aménagement et d’urbanisme sont en cours de préparation pour la capitale Bujumbura et les trois autres principales villes, à savoir Gitega, Ngozi et Rumonge. 1 S. Ruzima S., A. Nintunze et S. Nyamuhwata, Situation des infrastructures au Burundi : Rapport final, Ministère des Transports, des Travaux publics et de l'Equipement, Direction générale de la Coordination des Equipements, Bujumbura, Août 2012, 29 | P a g e Pour la ville de Bujumbura, deux études relatives à ses perspectives de développement sont en cours, sur deux horizons différents : (i) le schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de la ville de Bujumbura à l’horizon 2025, réalisé par les Bureaux d’études Groupe Huit et SHER, dans le cadre des études du Secrétariat technique des travaux publics et de création d’emplois – PTPCE (Ministère des Transports, Travaux publics et Equipements, avec financement de la Banque Mondiale ; (ii) la vision d’un Plan directeur et d’aménagement de la ville métropoli taine du Grand Bujumbura à l’horizon 2045, par le Bureau d’études de Singapour Surbana, pour le compte du MEEATU, avec financement du PNUD. En ce qui concerne les villes de province, ce n’est qu’en 1986 que pour la première fois1, elles firent l’objet d’une étude diagnostique pour analyser leur profil et établir leurs schémas d’orientation d’aménagement et d’urbanisme. Ces schémas ont proposé des orientations de développement à l’horizon 2005, c’est-à-dire les programmations de zoning (sites et surfaces) en référence à une projection des besoins en habitat, en infrastructures et en équipements collectifs, activités, etc. Globalement, ces schémas furent bien suivis. Pendant une certaine période, les outils de planification et de gestion urbaine ayant atteint leurs horizons, l’administration pratiqua un pilotage à vue dans le secteur, en réalisant des opérations au coup par coup. En 2008, avec l’appui d’ONU-Habitat, le Burundi se dota, d’une “lettre de politique nationale de l’habitat et d’urbanisation”. Celle-ci recommande notamment la conception d'outils de planification urbaine pour toutes les villes du pays. Les objectifs spécifiques de cette politique sont énoncés comme suit:  renforcer le cadre institutionnel du secteur pour favoriser le développement urbain et l’amélioration progressive de l’habitat ;  asseoir une tradition urbaine viable et durable dans le pays ;  assurer un habitat décent à toute les couches de la population (chaque année, aménager et équiper environ 855 ha et construire 26 000 logements);  limiter la dégradation des conditions de vie en milieu urbain ;  améliorer la gouvernance pour accroitre la production urbaine. Pendant de longues années, les actes législatifs ou réglementaires en matière d’urbanisme, d’habitat et de constructions répondaient à des besoins ponctuels mais demeuraient “sans référence juridique globale”2. La législation applicable était soit absente, soit dispersée entre la législation foncière et domaniale, une « réglementation d’urbanisme et de la construction », la fiscalité immobilière et foncière et la réglementation bancaire. 1 Vingt-deux centres urbains secondaires établis par le décret n° 100/13 du 11 mars 1986 portant classification des Centres urbains du Burundi 2 Seth Sindayigaya pour le MEEATU, Rapport pour l'Habitat III, Version finale, Juillet 2015 30 | P a g e Le 12 août 2016, un “code de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction au Burundi” a été promulgué pour corriger cet état de fait. Structuré en neuf chapitres couvrant 147 articles, ce code traite entre autres:  de l’organisation institutionnelle et administrative de la gestion des questions d’urbanisme, d’habitat et de construction aux niveaux central et provincial;  de la classification et des documents de planification urbaine (schémas directeurs d’aménagement et d’urbanisme, plans locaux d’aménagement, plans particuliers d’aménagement;  de la gestion des terres urbaines;  des espaces verts en milieu urbain;  des sept types d’ “opérations d’urbanisme”: la “rénovation urbaine”, la “restructuration”, le “remembrement urbain”, la “restauration immobilière”, la “réhabilitation” et le “lotissement”);  de la construction en milieu urbain et rural;  des sanctions en cas de violation des dispositions du code. Une fiscalité foncière en longue hibernation, réveillée par la nécessité L’apport encore très faible des services publics notamment dans les opérations d’aménagement du territoire en zones rurales et urbaines, pour l’implantation et l’entretien des infrastructures (logements, routes, adductions d’eau, hygiène et salubrité, etc.) et dans le contrôle du respect effectif des normes de gestion foncière met en lumière la problématique du financement des services fonciers et sociaux ainsi que celui de la fiscalité foncière. Selon un audit urbain, organisationnel et financier effectué en 2012 sur la mairie de Bujumbura, les communes de la capitale ne collectaient en moyenne que 1.130 FBU (moins d’un dollar américain) de recette par habitant par an1. Théoriquement, au Burundi, la terre et les immeubles supportent plusieurs impôts qui sont basés sur des éléments de valorisation différents : la superficie, le prix de vente, les revenus locatifs perçus, etc. La superficie et les caractéristiques des terrains, dont leur emplacement géographique, constituent des critères de base à la taxation pour l’impôt foncier. Le prix de vente est utilisé pour les taxes locales et nationales sur les cessions immobilières. Les revenus fonciers sont utilisés pour les immeubles loués. Il existe une taxe que l’on paie lorsque l’Etat donne des parcelles en location avant l’attribution du titre de propriété. C’est une recette non fiscale. La mutation de la terre gérée par les services du cadastre et des titres fonciers est aussi soumise à une taxe de mutation de 3% de la valeur des biens objets de transaction. Cette valeur est fixée par la loi. Il existe également un impôt sur les plus-values, prévu par la loi n°1/02 du 24 janvier 2013 relative à l’impôt sur les revenus, qui est notamment perçu sur les ventes d’immeubles. S’agissant de l’impôt foncier, depuis la période de colonisation, au Burundi, la possession de la propriété ou des droits réels comme l’usufruit, l’emphytéose sont générateurs du paiement de l’impôt foncier. 1 Audit urbain, organisationnel et financier de la mairie de Bujumbura, URAM, juillet 2012 31 | P a g e Depuis la loi n°1/002 du 2 avril 1984 (articles 3, 4 et 5) jusqu’à la loi n°1/02 du 3 mars 2016 portant réforme de la fiscalité communale au Burundi, les tarifs de l’impôt fixé au mètre carré n’avaient pas été modifiés. La loi n°1/02 du 3 mars 2016 portant réforme de la fiscalité communale au Burundi n’a pas modifié les principes de base pour le calcul de l’impôt foncier. Elle modifie surtout les tarifs de calcul, revus à la hausse. C’est depuis 1984 et après les leçons tirées d’une terrible épidémie de choléra (1978-1979) que la collecte de l’impôt foncier fut cédée par le Gouvernement aux communes pour pouvoir financer certains services sociaux de base à la population. La superficie non bâtie est imposable seulement dans la ville de Bujumbura. Au cours de l’année 2017, le bureau de la mairie de Bujumbura a lancé une grande campagne pour une collecte systématique de l’impôt foncier. A grand renfort de communiqués publics et de mises en garde contre les retards de paiement, cette campagne a déclenché une ruée sans précédent depuis l’indépendance du Burundi pour l’acquittement de ladite taxe. Cette campagne suivait de presque deux ans la clôture d’un programme d’adressage fiscal dans cinq villes du Burundi, dont Bujumbura, soutenu par la Banque Mondiale. Parce qu’elle n’en a ni le mandat ni les moyens en personnel qualifié et suffisant, la mairie de Bujumbura s’abstient de tout rôle de vérification préalable de l’authenticité des droits de propriété exercés sur les terrains et immeubles pour lesquels elle perçoit l’impôt foncier. Néanmoins, si elle se poursuivait avec systématisme et rigueur, cette procédure de collecte de l’impôt foncier pourrait contribuer à la sécurisation foncière pour au moins trois raisons :  L’obligation d’acquitter l’impôt foncier pourrait dissuader certaines personnes de faire des revendications fallacieuses sur des propriétés en raison des obligations fiscales qui naissent avec ;  La collecte et l’enregistrement de l’impôt foncier peuvent aussi permettre de résoudre plus facilement quelques types de conflit foncier, en apportant par exemple des preuves d’occupation ou de « possession » d’un terrain ;  Bien qu’elle repose sur les informations déclarées exclusivement par le seul propriétaire présumé, la procédure d’acquittement de l’impôt foncier apporte des informations foncières (superficie, croquis) qui peuvent servir de référence, notamment au cours d’une procédure contentieuse. L’impôt sur les revenus locatifs, quant à lui, est basé (i) sur le revenu locatif des bâtiments et des terrains donnés en location et (ii) sur le profit de la sous-location totale ou partielle des mêmes propriétés. En vertu de l’article 39 de la loi n° 1/20 du 31 décembre 2016 portant fixation du budget général de l’Etat pour l’exercice 2017, cet impôt a été « rapatrié au sein de la fiscalité d’Etat gérée par l’Office Burundais des Recettes (OBR) » qui en redistribue les recettes aux communes et au Trésor public, respectivement à hauteur de 60% et 40%. Cet impôt est établi chaque année sur le revenu net de l'année antérieure. Depuis ce transfert de compétences et dès l’année 2017, l’OBR, bien plus nanti en ressources humaines et financières que la mairie de Bujumbura et les communes, a mené une campagne sans précédent de collecte de l’impôt sur les revenus locatifs, auparavant très faiblement collect é. L’affluence nombreuse des redevables aux guichets de l’OBR lors du premier trimestre de l’année 2017 laisse présager une hausse spectaculaire des recettes publiques sous la rubrique de l’impôt sur les revenus locatifs. 32 | P a g e Les conflits fonciers, leur typologie et les mécanismes de résolution Parce que la terre se raréfie alors qu’elle constitue la principale source de revenus pour plus de 90% de la population, elle fait aussi l’objet de nombreux conflits. Les conflits fonciers se manifestent sous plusieurs aspects, politique, socio-économique et juridique. Ils diffèrent selon les régions, les périodes, la nature et les modes d’acquisition des droits fonciers en question, les relations entre les personnes en conflit et la qualité des parties en conflit. Des études faites en 2009 établissaient que le volume des dossiers fonciers devant les cours et les tribunaux représentaient 71,9 % des affaires civiles1. Analyser la pertinence et l’efficacité des mécanismes de résolution des conflits au Burundi ainsi que les voies pour les améliorer passe fatalement par la référence et la prise en considération de leur typologie, de leurs proportions et de leurs fréquences. Une typologie des conflits fonciers les plus répandus au Burundi pourrait faire ressortir les suivants :  Les litiges fonciers liés aux successions : La problématique de la succession au Burundi est compliquée par l’absence d’une loi pour la régir. Jusqu’à ce jour, ce domaine est régi par la coutume qui a évolué sous l’impulsion des juridictions qui ont fini par créer une certaine jurisprudence. Dans l’ensemble, les litiges apparaissent lors de la succession de la fille, la succession des enfants dans la lignée maternelle, la succession des veuves aux biens de leurs maris, la succession des enfants naturels et enfin les testaments déséquilibrés.  Les litiges fonciers liés aux transactions commerciales (ventes/achats) sur les terres : Ces litiges revêtent plusieurs formes : ventes des terres des réfugiés et des déplacés, remise en cause par le vendeur lui-même, remise en cause par la famille du vendeur pour le cas des ventes opérées à l’insu et sans le consentement de cette famille ainsi que les conflits liés aux ventes des terres en indivision à l’insu des autres copropriétaires.  Les litiges fonciers liés aux déplacements massifs de population : Ils concernent les terres des réfugiés qui se rapatrient et celles des déplacés intérieurs. Ces deux groupes de population furent poussés par les crises et les violences politiques à répétition (1965,1972, 1988, 1993 et depuis avril 2015) à fuir leur lieux de résidence et perdre contrôle de la propriété et l’exploitation de leurs terres. Depuis les années d’après l’indépendance, fuyant ces conflits, des centaines de milliers de Burundais se sont réfugiés dans les pays limitrophes à savoir le Rwanda, la Tanzanie, la République Démocratique du Congo (RDC). D’autres effectuèrent des déplacements intérieurs, notamment à l’éclatement de la guerre civile en octobre 1993. Sur ces problèmes et en particulier les conflits consécutifs au rapatriement massif, après plusieurs décennies, de Burundais ayant fui les violences massives de l’année 1972, les gouvernements burundais successifs ont opté pour la mise sur pied de différentes commissions ad hoc pour arbitrer les litiges. Ce fut le cas des commissions créées en 1977 (la commission dite « Mandi »), 1991, 2002 (CNRS, Commission Nationale de Réhabilitation des Sinistrés) et en 2006 (CNTB, Commission Nationale des Terres et Autres Biens, créée dans le cadre de l'Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation au Burundi). 1 RCN Justice et Démocratie, Statistiques judiciaires, Décembre 2009, p. 26 33 | P a g e  Les conflits liés à la gestion des paysannats : Au Burundi, les « paysannats » désignent des terres placées dès 1949 par le pouvoir tutélaire belge sous un régime spécial d’exploitation agricole. Il visait à la fois à promouvoir une agriculture rationnelle de haut rendement ciblant les cultures d’exportation ainsi qu’à mieux répartir l’occupation humaine du territoire burundais en décongestionnant les régions surpeuplées telles que Ngozi et Kayanza, dans le Nord du Burundi. Sur le plan juridique, la situation était plutôt ambigüe. L’installation de ces agriculteurs se faisait en l’absence de toute procédure de domanialisation ou d’expropriation pour cause d’utilité publique. Jusqu’à la promulgation du Code foncier actuellement en vigueur en août 2011, le droit sur les paysannats n’avait pas de base juridique claire, la législation tutélaire n’ayant pas défini les droits que les cultivateurs exerçaient sur les parcelles1. En pratique, toutes les terres sous le régime des paysannats étaient considérées comme appartenant à l’Etat et leurs exploitants n’avaient que le statut de facto de détenteurs précaires. Il découla de cette situation un certain nombre d’abus et une proportion de conflits particulièrement élevés. Une « Revue du secteur foncier au Burundi » effectuée en 2014 établissait qu’alors que « seuls 9% des parcelles détenues par les ménages ruraux généraux sont présentés comme faisant l’objet de conflits fonciers, le chiffre équivalant pour les ménages paysannats est 17%. »2  Les litiges fonciers liés aux expropriations : Dans ce type de litige, les protagonistes sont l’Etat du Burundi et les particuliers. La loi n°1/010 du 1er mars 2005 portant Constitution de la République du Burundi prévoit en son article 36 que « nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique dans les cas et de la manière prévus par la loi et moyennant une juste et préalable indemnité ou en exécution d’une décision judiciaire coulée en force de chose jugée ». Selon le Code foncier en vigueur au Burundi (article 412), « hormis les cas où l’expropriation a pour but de constituer une zone protégée, seul le terrain nécessaire aux infrastructures d’utilité publique et leurs dépendances peut faire l’objet d’expropriation. ». La raréfaction des terres disponibles3, conjuguée à la hausse croissante de la population et des besoins fonciers conséquents, ont fait de l'expropriation pour cause d'utilité publique un fait de plus en plus courant et récurrent au Burundi. Cette tendance est objectivement confirmée par l'évolution des crédits votés par l'Etat pour le paiement des indemnisations liées à ces expropriations. Entre 2006 et 2012, ils passèrent de 500 millions de FBU à 4,5 milliards, soit une hausse de 900 %4. En octobre 2014, un projet d'inventaire et de cadastrage des terres domaniales financé par l'Union Européenne et exécuté par GiZ est entré en opération. Dans sa phase de préparation, ce projet avait soulevé auprès des bailleurs approchés par le gouvernement et de plusieurs acteurs de la société civile des interrogations sur les risques d’expropriation abusive et systématique qu’il pouvait entraîner. C’est pour prévenir ces risques que des mesures législatives et des opérationnelles furent convenues entre le Gouvernement du Burundi, le bailleur de fonds et l’agence d’exécution. 1 Réné MASSINO, Aspect de l’évolution historique du droit burundais, UB, 1983. 2 Revue du Secteur foncier, Rapport final, 31 mars 2014 3 Un inventaire des terres domaniales libres et habitables publié en janvier 2002 par le Gouvernement du Burundi et le HCR en 2001 évaluait leur superficie à 141.445 hectares, soit un peu moins que la taille de la petite province de Karusi. République du Burundi, Rapport définitif sur l’inventaire des terres domaniales au Burundi. Enquête de mars-octobre 2001, Bujumbura, janvier 2002. 4 Christophe Sebudandi, L'expropriation pour cause d'utilité publique : guide pratique pour intervenants dans l'appui aux victimes, Global Rights, Février 2014, pp. 20-21 34 | P a g e L’ordonnance ministérielle n°770/065 du 13 janvier 2016 sur les modalités d’inventaire des biens immeubles domaniaux prévoit qu’au cours de la procédure d’inventaire, « les conflits éventuels sont réglés à l’amiable par la Commission d’identification et de délimitation et les riverains ». L’ordonnance stipule que « tout conflit dont la médiation n’aurait pas été fructueuse fait l’objet d’un constat écrit et signé par les membres de la Commission d’identification et de délimitation et les riverains, copie remise aux parties en conflit ». Selon le rapport du PAGGF de septembre à octobre 2016, « depuis le début de l’identification et la délimitation des terres domaniales, 32 conflits se sont déclarés dont 16, soit 50% ont été réglés. Neuf cas ont été réglés par médiation, soit 28% ». Il est attendu qu’à moyen ou long terme, l’inventaire des terres domaniales contribue notamment à atténuer légèrement les risques d'expropriation en permettant entre autres à l'Etat de privilégier le recours à son propre domaine en cas de besoin d’espaces fonciers. Après une enquête menée entre septembre et décembre 2013 auprès de 2.257 ménages, la « Revue du secteur foncier au Burundi » a réparti en proportion les conflits fonciers par type. Nature des conflits fonciers signalés par les ménages enquêtés1 Types de conflits MR MU MM MP ME Moyenne Partage lors d’une 43,7 35,9 % 42, 0 % 5,9 % 16,7 % 34,3 % succession % Problème de limite 18 % 23,1 % 18,5 % 7,1 % 15,3 % 16,9 % Opposition à une vente 5,1 % 3,8 % 2,5 % 10,6 % 5,6 % 5,4 % Remise en cause d’une 9,3 % 9,0 % 6,2 % 21,2 % 2,8 % 9,7 % vente Remise en cause d’une 2,3 % 2,6 % 1,2 % 8,2 % 5,6 % 3,3 % attribution Expropriation 4,8 % 5, 1 % 6,2 % 3,5 % 25,0 % 7,2 % Récupération d’une terre d’origine 1,3 % 0, 0 % 1,2 % 22,4 % 9,7 % 4,9 % domaniale Remise en cause d’un 8,4 % 16,7 % 14,8 % 2,4 % 11,1 % 9,7 % droit Remise en cause d’un 0,6 % 0,0 % 0,0 % 0,0 % 0,0 % 0,3 % droit secondaire Remise en cause d’un droit issue de 0,0 % 0,0 % 0,0 % 0,0 % 0,0 % 0,0 % l’abolition du servage Autre 6, 4 % 3,8 % 7,4 % 18,8 % 8,3 % 8,1 % Source : Revue du secteur foncier au Burundi, Annexe 7, Tableau 20 Le tableau indique clairement la proportion importante et la place dominante qu’occupent les conflits fonciers issus du partage lors d’une succession. 1 MR : Ménages ruraux, MU : Ménages Urbains, MM : Ménages Marais, MP : Ménages Paysannats, ME : Ménages Environnement. 35 | P a g e Cette réalité est à associer avec les données de sources diverses qui indiquent à la fois que :  la succession est aussi le mode dominant d’acquisition des droits fonciers chez les Burundais ; 1  les terres acquises par voie de succession comptent parmi celles qui font le moins l’objet d’une procédure de certification2. Comme expliqué précédemment, la prolifération des conflits fonciers au Burundi a été l’un des principaux déclencheurs des programmes de « gestion décentralisée des terres » lancés à partir de septembre 2007 par le Gouvernement burundais avec, principalement, l’aide de la Coopération suisse et de l’Union Européenne. Ces programmes se sont fondés sur le postulat que ces conflits s’expliquent en grande partie par la précarité du mode coutumier de tenure foncière. Partant, ils ont lancé un vaste processus de soutien à la création et au fonctionnement de services fonciers communaux chargés de délivrer à bas prix des certifications fonciers aux propriétaires fonciers ruraux. La procédure suivie et les outils utilisés pour la délivrance de ces certificats sont censés apporter plus de sécurité juridique que les témoignages verbaux ou les contrats manuscrits sous seing privé aux contenus variables et aléatoires. Les programmes de gestion foncière décentralisée s’inscrivent ainsi davantage dans la prévention des conflits fonciers. Il n’existe pas encore d’étude comparative de référence ayant apprécié la mesure et les proportions dans lesquels ces SFC parviennent effectivement à sensiblement réduire les conflits fonciers. Mais il est d’ores et déjà clair que pour que ce programme joue pleinement son rôle dans la prévention des conflits, des efforts devraient être déployés pour que les terres acquises par voie de dévolution successorale entrent dans la procédure de certification dans des proportions significativement plus grandes. De quelque ordre qu’ils soient, les conflits sont portés devant divers types de mécanisme pour leur résolution : les mécanismes judiciaires des mécanismes non judiciaires. Les mécanismes judiciaires de résolution des litiges fonciers sont accessibles à la population rurale principalement par les “tribunaux de résidence” institués dans toutes les 119 communes du pays. Ceux-ci sont compétents pour connaître des litiges concernant les propriétés foncières non enregistrées. En cas d’appel de leurs décisions, les « tribunaux de Grande Instance », institués au niveau des 18 provinces, sont saisis. Les juridictions administratives, qui connaissent des litiges fonciers entre l’Etat et les particuliers, existent uniquement dans deux provinces du pays à savoir Gitega et Bujumbura. A ce niveau, l’accessibilité commence à poser des problèmes et les choses se compliquent au niveau de la Cour Suprême quand il s’agit de se pourvoir en cassation. Car il n’existe qu’une Cour Suprême au Burundi. En raison du volume des litiges fonciers, cette Cour se retrouvait souvent débordée et les dossiers de contentieux prenaient un temps excessivement long à être vidés. 1 APDH, Services fonciers communaux au Burundi : Avancées, Incertitudes et Défis, Février 2014 2 APDH, Op. cit.., Février 2014, p. 11 36 | P a g e C’est la raison pour laquelle une loi organique fut promulguée le 15 mai 2014 pour corriger cette situation. Pour toutes les affaires contentieuses relatives aux terres rurales, cette loi a supprimé les pourvois en cassation devant la Cour Suprême et réserve cette compétence aux Cours d’Appel de Bujumbura, Gitega, Ngozi et Bururi. Les mécanismes non judiciaires incluent les mécanismes communautaires traditionnels (les « Bashingantahe ») très populaires opérant au niveau collinaire. Ils comprennent aussi les mécanismes administratifs tels que la Commission Nationale des Terres et autres Biens (CNTB), la Commission Foncière Nationale pour ce qui est des conflits liés aux paysannats1, l’Ombudsman pour les conflits fonciers impliquant l’Etat, la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme (CNIDH) et enfin certaines associations sans but lucratif (ASBL) et organisations non gouvernementales étrangères (ONG). Concernant l’accessibilité des institutions non judiciaires, la saisie de la CNTB ne pose pas de problèmes particuliers et la procédure suivie devant elle est relativement rapide. Ses décisions sont exécutoires, sauf si pour des circonstances spéciales, le Président de la Commission ordonne sursis à l’exécution de ladite décision. Une « Cour spéciale des Terres et autres Biens » a été instituée en septembre 2014 pour tout recours contre les décisions de la CNTB. En cas de plainte devant cette juridiction, « les biens faisant objet du litige ne peuvent ni être aliénés, ni dénaturés, ni transformés ni grevés d’autres droits ou faire objet de saisie judiciaire »2 jusqu’à la décision définitive de cette Cour. L’accès aux mécanismes d’arbitrage offerts par l’Ombudsman, qui ne dispose que de deux bureaux sur toute l’étendue du territoire, est difficile. La revue du CAGF sur les mécanismes de résolution des conflits s’attache à examiner la distribution des responsabilités et des compétences dans la gestion des litiges, l’accessibilité de ces mécanismes au public et leur efficacité, mesurée en délais de procédure. 1 Officiellement, la CFN n'a aucune mission en matière de résolution des conflits, sauf le "règlement" des conflits qui naîtraient du transfert de propriété des paysannats à leurs “occupants légaux et réguliers”. Même dans ce cas, le Code foncier (art. 455, al. 3) stipule que la CFN "règle" les litiges liés aux paysannats alors que l’article 4 du décret du 31 janvier 2012 qui créa la CFN (repris à l’article 2 du décret n°100/15 du 30 janvier 2017 qui modifie celui de 2012) stipule: "La Commission analyse et donne un avis sur tout litige qui naîtrait de l'application des dispositions du Code foncier révisé relatives aux mutations de paysannats". 2 Article 25 al. 2 de la loi n° 1/31 du 31 décembre 2013 portant révision de la loi n° 1/01 du 04 janvier 2011 portant missions, composition, organisation et fonctionnement de la commission nationale des terres et autres biens 37 | P a g e Chapitre IV – Résultats de l’évaluation de la gouvernance foncière Dans ce chapitre, les neuf thèmes spécifiques de gouvernance foncière abordés par le CAGF sont présentés un à un selon des indicateurs de performance décrits et notés de manière décroissante de A à D. Comme expliqué précédemment, des panels de débat se sont tenus pour discuter et, au besoin, réapprécier les notes entre A et D proposées dans leurs rapports initiaux par des consultants nationaux sur 115 « dimensions » (ou sous-indicateurs) réparties sous 24 indicateurs de gouvernance foncière (IGF). Panel 1 : Reconnaissance de la tenure foncière 1.1) Eléments de contexte additionnels Les droits fonciers énumérés par l’article 5 du Code foncier sont : la propriété, l’emphytéose, l’usufruit, l’usage et l’habitation, les servitudes et l’hypothèque. Juridiquement, ces droits fonciers sont protégés, qu’ils soient en milieu rural ou en milieu urbain. Comme expliqué précédemment, l’article 380 du même code apporte une importante précision, permettant de constater que la protection légale ne se limite pas aux seuls droits formellement enregistrés, mais qu’elle s’étend aussi aux droits coutumiers. Il stipule : « Sont reconnus et protégés par la loi tous les droits réels exercés par toute personne physique ou morale de droit privé en vertu de la coutume ou d’un titre d’occupation délivré par l’autorité compétente sur des terres non domaniales, se traduisant par une emprise personnelle ou collective, permanente et durable, selon les usages du moment et du lieu et selon la vocation du terrain. » Partant de cette disposition légale, on peut affirmer qu’au moins sur le plan formel, toutes les typologies de tenure sont légalement reconnues en zone rurale. Dans la pratique néanmoins, il subsiste un certain nombre d’obstacles à la reconnaissance effective de quelques droits fonciers en telle zone. A cet égard, les droits fonciers qui semblent les moins protégés sont :  les droits fonciers des femmes, dans la mesure où, faute d’une loi régissant les successions et les régimes matrimoniaux, une femme qui a des frères a du mal à hériter au même pied d’égalité que ces derniers. La plupart du temps, elle sera contrainte de se contenter d’un usufruit viager sur un petit lopin de terre, communément appelé « igiseke » ; le décret d’application du code foncier sur son chapitre relatif aux droits fonciers certifiés promulgué le 23 juin 2016 réserve exclusivement la procédure de certification qu’au « droit réel de propriété » mais il admet « les autres droits » à une inscription dans le registre foncier communal et sur les certificats constatant la propriété foncière. (art. 2). A priori, sauf pratique contraire, il ne prévoit pas de disposition qui fasse explicitement blocage à l’inscription des deux conjoints sur un certificat, comme ça se fait au Rwanda ;  les droits fonciers des veuves : Tant qu’elles vivent harmonieusement avec leurs époux, les femmes peuvent vivre de la terre du ménage. Mais devenues veuves, elles sont le plus souvent exposées à être chassées par leur belle famille désireuse de récupérer la terre laissée par son mari, particulièrement quand ce dernier n’a pas laissé de progéniture; 38 | P a g e  les droits fonciers des enfants de père inconnu : Dès leur jeune âge, ils sont rejetés de toute part et, devenus grands, ils ne peuvent pas facilement hériter des droits fonciers de qui que ce soit. Ce sont alors généralement des sans terre;  les enfants orphelins rentrés d’exil : car ignorant tout de l’origine et des droits fonciers éventuels de leur père;  les droits des femmes chefs de ménages : Les auteurs de la revue du secteur foncier au Burundi relèvent ce qui suit : « 57% des chefs de ménages femmes qui ont été enquêtés se sentent en insécurité foncière, contre 24% des chefs de ménages ruraux généraux (qui sont en majorité des hommes). Les femmes en position matrimoniale fragile sont particulièrement vulnérables sur le plan foncier 1». 1.2) Evaluation notée du Panel n° 1 a) Tableau synoptique des notes Panel n° 1 - IGF 1 : Reconnaissance du continuum des droits fonciers: la loi reconnaît divers droits fonciers des individus (y compris les droits secondaires des locataires, des métayers, des femmes, etc.) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les droits fonciers des individus en Le cadre juridique existant reconnaît et protège les 1 zone rurale sont reconnus par la loi  droits de 70% à 90% de la et protégés dans la pratique population rurale Les droits fonciers coutumiers sont Les droits coutumiers ne sont que partiellement 2 reconnus par la loi et protégés dans  reconnus par la loi mais ils la pratique sont réellement protégés Les droits des peuples autochtones Les droits des peuples sur les terres et les forêts sont autochtones ne sont ni 3  reconnus par la loi et protégés dans reconnus par la loi ni la pratique protégés Les droits fonciers en zone urbaine Le cadre juridique existant reconnaît et protège les 4 sont reconnus par la loi et protégés  droits de 70% à 90% de la dans la pratique population urbaine 1 Kent Elbow et al., Revue du secteur foncier au Burundi. Rapport final, 17 juillet 2014, p.34 . 39 | P a g e Panel n° 1 - IGF 2 : Respect et application des droits fonciers DIM. Matières A B C D Situation du Burundi La loi permet, s'ils le souhaitent, l’individualisation partielle ou totale de la tenure pour ceux qui possèdent des Il existe des procédures accessibles droits fonciers sous un régime coutumier / 1 pour une individualisation de la  collectif/communautaire. tenure Les procédures pour ce faire ne sont pas financièrement abordables ou ne sont pas clairement décrites, ce qui débouche sur leur application arbitraire Les terres individuelles en zone Moins de 50% des terres individuelles en zone rurale 2 rurale sont enregistrées et  sont enregistrées et cartographies cartographiées Les terres individuelles en zone Moins de 50% des terres individuelles en zone 3 urbaine sont enregistrées et  urbaine sont enregistrées et cartographies cartographiées Le nombre de transactions foncières illicites est élevé et Le nombre de ventes illicites de 4  certaines sont identifiées terres est faible clairement de façon systématique Le nombre de baux fonciers illicites Non appréciable faute de 5 _ _ _ _ est faible données de référence Moins de 15% des terres Les droits des femmes sont enregistrées au nom de enregistrés et reconnus dans la personnes physiques le sont 6  pratique en zone urbaine comme en au nom d’une femme, zone rurale individuellement ou solidairement Les droits de propriété foncière des L'égalité des droits de femmes sont les mêmes que ceux propriété des femmes par 7  des hommes au regard de la loi et rapport à ceux des hommes dans la pratique n'est pas établie par la loi 40 | P a g e b) Revue commentée des évaluations par IGF et par dimension b.1) Panel 1 / IGF 1 : Reconnaissance du continuum des droits fonciers: la loi reconnaît divers droits fonciers des individus (y compris les droits secondaires des locataires, des métayers, des femmes, etc.) Dimension 1 : Les droits fonciers des individus en zone rurale sont-ils reconnus par la loi et protégés dans la pratique ? Note (B): Le cadre juridique existant reconnaît et protège les droits de 70% à 90% de la population rurale Cette note (B) relativement élevée s’explique surtout par la souplesse du droit foncier burundais (CF, art. 380) et de la pratique à l’égard des terres non formellement enregistrées. Les divers types de droits fonciers consacrés par la loi burundaise ouvrent, en pratique, à une distinction déterminée principalement par la nature de ces droits et par le genre. S'agissant du droit de propriété foncière, les hommes et les femmes ne l'exercent pas de manière égale. Au sens du Code foncier1, les droits exercés sur la plupart des propriétés foncières du Burundi ne sont ni enregistrés, ni certifiés. Néanmoins, pour autant que la propriété soit exploitée, les hommes exercent en pratique des droits de propriétaires : ils héritent, vendent, hypothèquent, cèdent leurs terrains à volonté. En revanche, les femmes n'exercent pas, en pratique, les mêmes droits que les hommes, malgré la Constitution de la République et plusieurs lois qui proclament ce droit et l'égalité entre sexes2. Elles ne peuvent ni vendre, ni céder un terrain obtenu par voie d'héritage, sur lequel elles n'exercent qu'un droit d'usufruit viager. Ce droit est reconnu et exercé, comme en attestent les jugements souvent rendus en faveur des femmes qui portent plainte contre les violations faites à ce droit. L’exercice de leur droit à la propriété peut être mis à mal, même lorsqu’elles ont été ou se sont rendues propriétaires d’un fonds foncier par voie d’achat ou de don. 1 Code foncier, chapitre II : Des droits fonciers enregistrés (art. 314 à 379) et chapitre III : Des droits fonciers certifiés (art. 380 à 410) 2 Constitution du Burundi : Article 19 : "Les droits et devoirs proclamés et garantis, entre autres, par la Déclaration universelle des droits de l’homme, les Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et la Convention relative aux droits de l’enfant font partie intégrante de la Constitution de la République du Burundi. Ces droits fondamentaux ne font l’objet d’aucune restriction ou dérogation, sauf dans certaines circonstances justifiables par l’intérêt général ou la protection d’ un droit fondamental." Article 22 (1): " Tous les citoyens sont égaux devant la loi, qui leur assure une protection égale." Article 36 : "Toute personne a droit à la propriété." 41 | P a g e Dimension 2 : Les droits fonciers coutumiers sont-ils reconnus par la loi et protégés dans la pratique ? Note (C): Les droits coutumiers ne sont que partiellement reconnus par la loi mais ils sont réellement protégés. De façon générale, les droits fonciers coutumiers sont explicitement reconnus et protégés dans la pratique. C’est ainsi par exemple que, comme vu plus haut, l’article 380 du Code foncier les retient parmi les droits effectivement reconnus et protégés. En outre, même en cas d’expropriation pour cause d’utilité publique, ces droits sont, sauf quelques abus, effectivement valorisés dans le calcul des tarifs d’indemnisation. Avec l’avènement du Code foncier de 2011, même les droits fonciers sur les marais et sur les terres des paysannats, qui étaient longtemps controversés sont pris tant bien que mal en considération à la fois par la loi et la pratique de la tenure foncière. Cependant, les termes de l’article 381 peuvent prêter à confusion et entrainer des abus sur le terrain de la pratique : « Sont considérées comme pouvant faire l’objet de droits privatifs coutumiers les terres effectivement exploitées. Sont réputées exploitées, les terres portant des cultures ou des constructions de toute nature, celles préparées en vue de leur culture ou celles dont les cultures viennent d’être récoltées, ainsi que les pâturages sur lesquels les particuliers exercent des droits privatifs, soit individuellement, soit en association ou en quelque groupement ». Cette disposition pourrait être interprétée comme affirmant que les activités agropastorales sont susceptibles de conférer valablement des droits coutumiers sur un terrain donné. Ainsi dit, face à des terrains boisés ou servant de briqueterie ou à la poterie, l’Etat pourrait évincer les titulaires de droits fonciers coutumiers en interprétant restrictivement ces dispositions légales. Une autre catégorie de droits fonciers coutumiers dont la protection semble fragile est constituée par les marais appropriés. Souvent très fertiles, les marais représentent un enjeu de développement important pour le Burundi. Selon le Gouvernement burundais, ils couvrent une superficie totale de 117.993 hectares dont 81.403 hectares (69%) fait l’objet d’une exploitation en agriculture sans aménagements particuliers et 26.021 hectares (22%) n’ont fait l’objet d’aucune exploitation1. L’incertitude du statut des droits fonciers exercés sur les marais et la faible capacité des services publics et territoriaux à y arbitrer les conflits et discipliner les pratiques locales, jettent une grosse hypothèque sur la préservation et la rentabilisation de ces terres. Le Code foncier stipule que les terres de marais « sont régies par le droit coutumier et ne peuvent faire l’objet d’enregistrement » (article 444.2). Il admet que « les marais exploités appartiennent à celui qui les a mis en valeur et non à celui à qui appartient la terre du bassin versant ou du bas-fond dont ils constituent le prolongement ». 1 Gouvernement du Burundi (Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage), Straté gie agricole nationale 2008-2015, Juillet 2008 42 | P a g e Le Code foncier (art. 442) ajoute que sur base d’une étude appropriée, « la délimitation d’un marais peut inclure les bas-fonds situés dans sa zone d’extension prévisible ». Physiquement, la distinction entre marais et bas-fonds n’est pas aisée et fait objet de litiges en justice qui forcent à des descentes sur terrain1. En outre, les critères théoriques (vacance, inondation, état de friche, mise en valeur) établis par le Code foncier pour identifier et distinguer les terres de marais du domaine public de celles du domaine privé ou pour désigner le propriétaire d’un marais exploité sont, sur le terrain des réalités, sujets à des appréciations multiples et différentes dans le temps. Ces confusions posent d’autant plus de problèmes que de nombreuses personnes, répondant à l’appel des pouvoirs publics pour la certification de leurs droits fonciers, ont mené des démarches auprès des SFC pour faire enregistrer à leur nom des terres dont les caractéristiques soulèvent des questions sur leur éligibilité à la procédure de certification. C’est eu égard à la complexité posée par l’application du Code foncier sur les droits des marais que vers la fin de l’année 2016 , la DDC a commandité une « étude prospective sur la délimitation des marais en province Ngozi2 ». Elle avait pour objectif général de proposer des règles procédurales et des critères permettant de déterminer les limites physiques entre les terres des marais et les autres types de terres, notamment les terres des collines et les terres des bas-fonds. Menée de manière participative et inclusive, cette étude s’est appuyée sur les connaissances et l’expérience des habitants des localités étudiées, en l’occurrence les marais de Nyakijima I et Nyakijima II en commune Ngozi et le marais de Burenge en commune Marangara. Elle s’est aussi ressourcée dans certains jugements intéressants rendus par les tribunaux locaux dans des cas de contentieux sur des marais. Les propositions concrètes faites pour tenter de lever les équivoques de la loi se retrouvent dans le « Guide méthodologique pour la délimitation des marais » joint à l’étude commanditée par la DDC. Ce Guide propose entre autres des critères pour :  déterminer des limites entre les différents statuts de marais et les autres types de terres ;  distinguer les marais des autres types de terre ;  distinguer les marais dans leurs différents statuts. Ce Guide est un instrument offert pour aider les acteurs de terrain et judiciaires régulièrement sollicités à arbitrer les cas de litige sur les marais qui se présentent, faute de texte d’application du Code foncier pour déterminer la procédure à suivre pour la délimitation des terres de marais. Enfin, la reconnaissance des droits sur les parcelles de paysannats reste problématique en dépit de l’innovation apportée par l’article 455 du Code foncier qui stipule : « Les détenteurs de parcelles constitutives de paysannats dont leur occupation a été régulière et légale obtiennent la pleine propriété. » La difficulté réside dans le fait que l’administration publique refuse l’enregistrement de ces terres aussi longtemps qu’elles n’auront pas été nettement distinguées des périmètres dits « hors paysannats »3 à l’issue d’une enquête et d’un bornage appropriés1. 1 Exemple du Dossier RC 6195 du Tribunal de résidence de Ngozi, introduit le 3 juillet 2014 et jugé le 30 juin 2015, opposant NG. Frida à BU. Joseph, son beau-frère, de la colline Mugomera. 2 Gilbert Bigirimana, Seth Sindayigaya, Etude prospective sur la délimitation des marais en province Ngozi. Rapport final, DDC (Programme d’appui à la gestion décentralisée des terres), Février 2017 3 Les terres dites « hors paysannats » sont réputées être situées dans un périmètre proche des terres de paysannat mais constituent « des réserves foncières de l’Etat” (article 455.2, CF). Elles “ne sont pas concernées par cette 43 | P a g e A la fin du mois d’octobre 2016, le PAGGF avait achevé un travail de collecte des données relatives aux paysannats auprès de l’Office de l’Huile de Palme (OHP) de Rumonge, du Projet d'intensification agricole dans les communes de Rumonge, Burambi et Buyengero (PIARUBUBU), de la Compagnie de Gérance du Coton (COGERCO) et de la Société Rizicole de Développement de l'Imbo (SRDI). Ces sociétés recevaient le produit des cultures faites sur les terres de paysannat. Au cours de la même période, le PAGGF affirmait aussi avoir achevé de classer par commune, scanner, archiver et centraliser à la Direction Générale de l’Aménagement du Territoire (DGAT) les dossiers de cessions et concessions sur les « hors paysannats ». Bien qu’il n’existe pas encore d’opération connue de mesurage et bornage de ces terres qui ait été fait, le fonds documentaire constitué grâce à l’aide du PAGGF et remis à la DGAT devrait déjà être une première source indirecte pour lever l’interdit systématique qui frappe l’enregistrement des terres de paysannat. Dimension 3 : Les droits des peuples autochtones sur les terres et les forêts sont-ils reconnus par la loi et protégés dans la pratique? Note (D): Les droits des peuples autochtones ne sont ni reconnus par la loi ni protégés. Dans le cas du Burundi, le peuple visé ici n’est autre que la communauté Batwa. Ses effectifs s’élèvent à environ 78.000 personnes. Or, la loi ne fait guère allusion à cette communauté, pas plus qu’aux communautés hutu et tutsi, ni pour leur reconnaître des droits fonciers quelconques, ni pour leur en refuser. Dans la pratique néanmoins, la situation est telle que, à de rares exceptions près, leurs droits fonciers ne sont ni reconnus ni protégés. Voici à ce propos le constat dressé par la revue du secteur foncier au Burundi : « Au fur et à mesure de la mise en culture de l’espace forestier par les premiers agriculteurs, les Batwa ont perdu la maitrise foncière de ces espaces au profit des premiers agriculteurs. A nos jours la majorité des Batwa restent sans terre et vivent dans une pauvreté extrême et se convertissent progressivement à l’agriculture ». Par ailleurs, étant pour la plupart analphabètes, les Batwa auront du mal à demander et obtenir des cessions de terres domaniales, dans la mesure où la procédure y relative est uniquement écrite. Dimension 4 : Les droits fonciers en zone urbaine sont-ils reconnus par la loi et protégés dans la pratique ? Note (B): Le cadre juridique existant reconnaît et protège les droits de 70% à 90% de la population urbaine. L’acquisition des droits fonciers en milieu urbain passe généralement par des procédures particulièrement formalistes. Des périmètres à aménager sont d’abord identifiés, et ensuite aménagés et viabilisés, les différents attributaires de parcelles étant alors clairement identifiés et dénombrés au fur et à mesure de ces opérations. Les attributaires de ces parcelles une fois connus, sont invités à s’acquitter des différents frais, en même temps qu’ils obtiennent progressivement des droits fonciers au fur et à mesure qu’ils s’acquittent de leurs obligations. mesure” consistant à conférer le droit de propriété aux « détenteurs de parcelles constitutives de paysannats dont l’occupation a été régulière et légale” (art. 455.1) 1 Kent Elbow et al. Revue du secteur foncier au Burundi, rapport final, annexe 9, p. 59. 44 | P a g e Des acquéreurs secondaires des droits fonciers en milieu urbain existent selon des modalités variées : achat de gré à gré, succession, compensation, vente publique aux enchères, etc. Ainsi, les titulaires légitimes des droits fonciers en milieu urbain bénéficient d’une protection légale d’autant plus forte que leurs droits sont généralement constatés dans un titre foncier. Or, selon l’article 317 du Code foncier, « Le titre foncier fait pleine foi des droits fonciers qui y sont constatés ». Néanmoins, tous les droits fonciers des milieux urbains ne sont pas nécessairement d’une situation régularisée chez le conservateur des titres fonciers. Ainsi par exemple, les héritiers de droits fonciers par voie successorale ne sont pas toujours enclins à aller faire procéder régulièrement à la mutation immobilière. En outre, le contentieux foncier soumis à la CNTB, de même que la faible valeur que cette Commission semble accorder aux titres fonciers versés dans les dossiers à sa disposition, tend à diluer la protection idéale attachée au titre foncier. b.2) Panel 1 / IGF 2 : Respect et application des droits fonciers Dimension 1 : Existe-t-il des procédures accessibles pour une individualisation de la tenure? Note (C)1: La loi permet, s'ils le souhaitent, l’individualisation partielle ou totale de la tenure pour ceux qui possèdent des droits fonciers sous un régime coutumier/collectif/communautaire. Les procédures pour ce faire ne sont pas financièrement abordables ou ne sont pas clairement décrites, ce qui débouche sur leur application arbitraire. La loi a offert à ceux qui veulent sortir d’une indivision foncière la possibilité d’y parvenir. Ainsi, aux termes de l’article 25 du Code foncier, chacun des copropriétaires peut toujours demander le partage nonobstant toute convention ou prohibition contraire. Les copropriétaires peuvent cependant convenir de rester dans l’indivision pendant un temps déterminé. Dans la pratique, le constat fait par la lettre de politique foncière est que la liberté de morcellement et d’individualisation des propriétés foncières a abouti à l’atomisation des terres : «Sur les terres occupées, les pratiques successoraux, l’individualisation des modes d’exploitation et la marchandisation de la terre provoquent un morcellement de plus en plus accentué » (paragraphe 7). Cette possibilité de partage s’étend aussi bien aux terres enregistrées qu’à celles non enregistrées, qu’elles soient d’origine coutumière ou autre. Néanmoins, de par leur nature, certains biens ne sont pas sujets à partage. Ce sont les biens sous le régime de la copropriété forcée, au sens où ils ont vocation à servir en même temps plusieurs immeubles ou parties d’immeubles aux propriétaires distincts. Le principe est posé par l’article 28 du Code foncier : « Lorsque les diverses parties d’un immeuble appartiennent à des propriétaires distincts, les choses affectées à ses diverses parties, pour l’usage commun, tels que sol, fondations, gros murs, toits, cours, puits, corridors, escaliers, ascenseurs, canalisations et tous autres, sont réputées communes ». En pratique, ceux qui veulent mettre fin au régime de copropriété de leurs terres peuvent y parvenir sans entrave majeure. Il leur suffit de se mettre d’accord sur les modalités d’y procéder. Faute d’accord, la partie la plus diligente peut saisir les juridictions compétentes pour procéder au partage, notamment successoral. 1 Note passée de B à C après le débat du panel. 45 | P a g e Le coût de la procédure varie selon que la copropriété foncière à partager est enregistrée ou pas. Quand elle n’est pas enregistrée, le coût est relativement abordable dans la mesure où les copropriétaires peuvent eux-mêmes procéder au partage en se passant d’un concours onéreux d’une tierce personne. Faute d’accord entre eux sur cette modalité, ils peuvent aussi passer par la voie judiciaire en vue de l’obtention et de l’exécution d’un jugement du tribunal de résidence compétent ordonnant le partage. Les frais officiels de justice y afférents ne sont pas exorbitants1. Dans le cas où le partage porte sur une copropriété foncière enregistrée ou certifiée, les co- indivisaires devront nécessairement faire procéder à la mutation immobilière par l’intermédiaire du Conservateur des titres fonciers ou du service foncier communal selon le cas. Peu importe qu’ils acceptent spontanément le partage ou qu’ils y soient contraints par décision judiciaire coulée en force de chose jugée. Le principe est posé en ces termes par l’article 345 du Code foncier de 2011 : « Les mutations immobilières soit entre vifs, soit par décès ne s’opèrent que (1) : par une inscription au livre foncier et sur le titre délivré au nouveau titulaire du droit pour les droits de propriété établis par un titre foncier; (2) par l’enregistrement de la mutation au registre foncier communal et l’établissement d’un nouveau certificat foncier pour les droits certifiés. Nulle charge ne frappe les droits fonciers si elle n’est inscrite au titre ou au certificat, à l’exception des servitudes légales ». Les frais de mutation que les copropriétaires vont devoir supporter sont fixés à 3% de la valeur du bien2. Une fois les formalités de mutation accomplies, chacun des copropriétaires pourra désormais obtenir son propre titre foncier, conformément aux dispositions du premier alinéa de l’article 353 du Code foncier : «Lorsque la mutation est opérée en vertu d’un échange, d’un partage ou d’un autre contrat emportant des prestations immobilières réciproques, le Conservateur inscrit dans son livre et délivre aux parties autant de nouveaux titres de propriété qu’il y a de nouveaux propriétaires ». En termes de garde-fous, le Code foncier prévient que le conservateur des titres fonciers doit, préalablement à toute mutation, se faire remettre, retenir et inscrire au livre-journal tous les actes et pièces que font valoir les requérants en quête de mutation immobilière (art.355 du Code foncier). De même, pour réduire les procédures et les coûts de mutation, il a été créé un guichet unique de transfert de transfert de propriété3. 1 2.000 FBU de frais de consignation au début du procès, auxquels il faut ajouter les frais de justice auxquels la partie perdante sera condamnée. 2 Article 1er de la loi n° 1/16 du 6 août 2008 portant modification de certaines dispositions du décret-loi n° 1/13 du 24 novembre 1986 portant fixation des droits d’enregistrement en matière foncière. 3 Arrêté n° 120/VP2/038 du 29 avril 2013 portant création, organisation et fonctionnement du guichet unique de transfert de propriété. 46 | P a g e Dimension 2 : Les terres individuelles en zone rurale sont-elles enregistrées et cartographiées ? Note (D): Moins de 50% des terres individuelles en zone rurale sont enregistrées et cartographiées. Bien que les dispositions légales sur l’enregistrement des droits fonciers 1 ne fassent pas de discrimination entre terres rurales et terres urbaines quand il s’agit de les enregistrer, la pratique est telle que la plupart des terres enregistrées sont urbaines, tandis que la majorité des terres rurales ne sont pas enregistrées. C’est ainsi que se référant aux informations fournies par la Direction des titres fonciers, le rapport final de la revue du secteur foncier au Burundi relève que jusqu’en 2014, « Plus de 95% des titres fonciers sécurisent des biens en milieu urbain, et 99% des terres rurales demeurent non enregistrées 2». Et ce même rapport de conclure : « Seuls 41% des ménages ruraux généraux détiennent un papier attestant de leurs droits de propriété, et la proportion des papiers détenus par ces ménages qui sont délivrés par les services de l’Etat est pratiquement nulle chez les ménages ruraux 3». Toutefois, en introduisant formellement en août 2011 les services et les certificats fonciers au niveau des communes, le Code foncier a ouvert des perspectives d’évolution notable du nombre et des proportions de terres enregistrées, bien que leur cartographie soit plus problématique. En son article 383, ce Code stipule que « les droits réels non enregistrés par le Conservateur des Titres Fonciers peuvent l’être par le Service foncier communal qui délivre à leurs titulaires un certificat foncier. » En pratique, l’expansion géographique des SFC et l’augmentation conséquente du nombre de terres rurales potentiellement enregistrables se heurtent aux multiples problèmes de gestion et de développement de ces services. Au 1er août 2017, il existait 50 communes avec service foncier, soit une couverture de 42% du territoire national. Les diverses revues de ces services effectuées à ce jour4 convergent toutes sur des problèmes communs de gestion qui hypothèquent assez sérieusement la durabilité desdits services, sinon la capacité de leurs services à fournir un minimum de qualité pour assurer ses fonctions et missions. Ces problèmes sont entre autres :  l’absence d’une stratégie et d’une politique publiques de soutien au développement durable des SFC : ni la lettre de politique foncière ni le code foncier ne peut remplacer une politique publique spécifique à la gestion et au développement des SFC. Cette politique, à élaborer en consultation et en coopération avec les communes elles-mêmes, doit entre autres (i) cadrer la vision de la place et du rôle que l’Etat donne aux SFC dans ses politiques de développement et de décentralisation, (ii) dresser le diagnostique spécifique qu’il fait de leur état actuel, de leurs défis et de leurs perspectives de développement et (iii) définir le soutien qu’il entend apporter au développement de ces SC. Selon les missions dévolues à la CFN, c’est à celle-ci qu’il revient de faire des propositions au Gouvernement à ce sujet. 1 Articles 314 à 379 du Code foncier. 2 Kent Elbow et al. Revue du secteur foncier au Burundi, PRODEMA, Rapport final, juillet 2014, p.40 3 Ibidem, p.39. 4 Notamment APDH, Services fonciers communaux au Burundi. Avancées, incertitudes et défis. Version finale, 24 juillet 2014. A la mi-juin 2017, le Projet foncier de Ngozi de la DDC finalisait aussi une « Etude sur l'appropriation et la pérennisation des services fonciers communaux » 47 | P a g e  l’absence d’un service et de mécanismes de coordination et supervision des conditions de mise en place et développement des SFC : dans le décret n°100/15 du 30 janvier 2017 qui réorganise la CFN, une des missions qui lui sont confiées consiste à « proposer des mécanismes permanents de pérennisation des recherches et des programmes pilotes dans le processus d’élaboration des stratégies et des plans d’actions fonciers ». En tant que structure gouvernementale et vu les missions qui sont les siennes, la CFN est habilitée à proposer et promouvoir la mise en place du cadre législatif et réglementaire susceptible de favoriser l’accompagnement du développement des SFC. Mais ni la deuxième vice- présidence de la République, ni le MEEATU ni la CFN ne sont en bonne position pour exercer une autorité hiérarchique sur les SFC qui relèvent d’instances élues par la population au niveau communal. Les communes dotées de SFC devraient elles-mêmes se doter d’une structure conjointe de coordination pour contribuer à l’élaboration du cadre normatif et des instruments de gestion des SFC, suivre la bonne application de ces derniers afin d’assurer la pérennité et la qualité des services fonciers. En l’absence des mécanismes ci-haut cités, on observe des pratiques et des procédures de gestion variables et souvent d’un SFC à un autre. Elles donnent lieu à de multiples risques et cas avérés de détournement des recettes, de gestion du personnel, instable, inégalement formé et préparé à leurs tâches1, etc. Dimension 3 : Les terres individuelles en zone urbaine sont-elles enregistrées et cartographiées? Note (D): Moins de 50% des terres individuelles en zone urbaine sont enregistrées et cartographiées. Selon l’article 4 du décret n° 100/111 du 31 juillet 2000 portant reclassification des centres urbains2, l’expression « centre urbain » embrasse tout à la fois les villes principales, les villes secondaires et les centres à vocation urbaine. D’après la liste annexée audit décret, il y avait, à cette date du 31 juillet 2000, un total de 63 centres urbains reconnus et disséminés sur tout le territoire national. On en trouvait dans chaque province. L’enregistrement et la cartographie foncière au Burundi couvrent beaucoup plus les terres urbaines que les terres rurales. Au 19 juin 2017, les registres des conservateurs fonciers à Bujumbura, Ngozi et Gitega indiquaient respectivement 69.200, 7.800 et 6.000 titres fonciers enregistrés, soit 83.000 au total3. Pour autant, toutes les terres situées dans les zones déclarées urbaines ne sont pas nécessairement enregistrées, tant ces centres sont nombreux et répartis dans toutes les provinces. Ainsi, les enquêtes menées en 2014 dans le cadre de la Revue du secteur foncier au Burundi révèlent que « 159 ménages urbains ont précisé les types de papiers qu’ils détiennent pour un total de 210 parcelles4». Les titres fonciers figurent en bonne position du total des papiers déclarés comme disponibles au titre de preuve des droits détenus sur ces parcelles. Mais d’autres documents sont aussi invoqués. 1 Dans une étude menée en 2014 par APDH dans huit SFC, « sur 16 agents fonciers recrutés, la plupart en 2010, 11, soit 68,75% ont soit présenté leur démission, soit été démis de leurs fonctions pour cause de comportement indigne de leur mission. » APDH, Op. cit.., p. 37 2 BOB n° 8bis/2000, p.600. 3 Source : Conservateurs à Bujumbura, Ngozi et Gitega contactés dans la matinée du 19 juin 2017. 4 Kent Elbow et al., op.cit., p.85. 48 | P a g e Le graphique reproduit ci-après sur base des réponses données alors par les ménages ruraux enquêtés est assez significatif. Dimension 4 : Le nombre de ventes illicites de terres est-il faible ? Note (C): Le nombre de transactions foncières illicites est élevé et certaines sont identifiées clairement de façon systématique. Les ventes illicites sont celles qui interviennent dans un contexte ou dans des conditions contraires aux exigences légales, telles que le libre consentement des parties, leur capacité de contracter, l’objet et la matière de la convention, ou encore l’existence d’une cause vraie et licite de la vente.1 Ainsi, dans la mesure où seules les ventes de terres satisfaisant à toutes ces conditions sont légalement formées, au sens de l’article 33 du code civil livre III2, on en déduit que les autres ventes sont qualifiées illicites. En voici quelques exemples :  La vente d’une propriété foncière par un propriétaire encore mineur incapable de discernement3, ou par un malade mental ;  La vente d’une parcelle d’un mineur sous tutelle, par le tuteur en l’absence d’un avis favorable du conseil de famille ;  La vente d’une terre domaniale par un occupant irrégulier ;  La vente d’une parcelle dépendant de la communauté conjugale par le mari en l’absence ou contre l’avis de son épouse4 ;  La vente d’une parcelle d’autrui5 ;  La vente d’une parcelle frappée de saisie. 1 Voir les conditions essentielles pour la validité des conventions, articles 8 à 32 du code civil livre III. 2 Cet article est ainsi libellé : «Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ». 3 Article 341 du code des personnes et de la famille : « Les actes accomplis par le mineur incapable de discernement sont nuls de nullité absolue. L’action en nullité appartient à tout intéressé ». 4 Il y aurait alors violation de l’article 126 du code des personnes et de la famille ; 5 Une telle vente tombe sous le coup de l’article 276 du code civil livre III, selon lequel la vente de la chose d’autrui est nulle. En outre, l’article 297 du code pénal érige une telle vente en infraction de stellionat. 49 | P a g e Le rapport définitif sur la « Revue du secteur foncier au Burundi » fait état d’une récurrence des ventes illicites. On lit en effet ce qui suit à la page 179 de l’annexe 9 de ce rapport : « Les résultats d’enquêtes et des entretiens révèlent une fréquence relativement importante des ventes de terres qui se font dans des conditions anormales, telles que la vente multiple de la même parcelle, ou l’opposition à la vente de la part des membres de la famille. Les achats/ventes de terres semblent être à l’origine d’un nombre croissant de conflits fonciers, notamment du fait de la remise en cause de transactions antérieures ». Malgré ce constat, il n’existe pas dans la législation et la pratique burundaises de mécanismes en place permettant d’identifier de telles ventes. Dimension 5 : Le nombre de baux fonciers illicites est-il faible ? Note (?): Impossible à noter L’article 374 du code civil livre III, qui s’applique aussi bien aux baux des maisons qu’aux baux ruraux, dispose comme suit : « Le louage n’est soumis à aucune condition de forme. Il est parfait entre les parties dès qu’elles sont convenues de la chose et du prix. L’acte qui en est dressé ne sert que de preuve littérale. Les règles générales sur les preuves s’appliquent au louage ». En réalité, la matière de baux fonciers ne fait pas l’objet d’une réglementation assez détaillée pour en permettre une analyse sous l’angle des restrictions imposées par le législateur. C’est le principe de la loi de l’offre et de la demande qui est mis en avant, sous réserve des conditions générales de validité des conventions auxquelles il a été fait allusion précédemment. Par conséquent, il n’est pas possible d’évaluer l’indicateur sous analyse en se conformant aux consignes d’évaluation indiquées. La raison en est que les restrictions juridiques éventuelles sur les baux fonciers n’existent pas. Dimension 6 : Les droits des femmes sont-ils enregistrés et reconnus dans la pratique en zone urbaine comme en zone rurale ? Note (D): Moins de 15% des terres enregistrées au nom de personnes physiques le sont au nom d’une femme, individuellement ou solidairement Le recensement général de la population et de l’habitat effectué en 2008 établit que 62,5 % des propriétaires fonciers déclarés étaient des hommes et 17,7% des femmes. Sur base des données collectées par l’Association pour la Paix et les Droits de l’Homme (APDH) auprès de 40 services fonciers communaux sur les 43 opérationnels à l’échelle du pays au 31 Juillet 2015, 89.240 demandes de certificats fonciers, dont 6797 introduites par les femmes en leur nom, soit 7,6% de toutes les demandes, avaient été reçues. 58.722 certificats fonciers avaient été établis, dont 4.497 appartenant aux femmes, soit 7,7%. De plus, 49.101 certificats fonciers ont été retirés, dont 3.688 certificats fonciers pour les femmes, soit 7,5%. La situation concrète de la problématique semble bien résumée par le rapport définitif de la Revue du secteur foncier au Burundi : « L’accès des femmes à la terre demeure en général problématique au Burundi. Traditionnellement et jusqu’aujourd’hui, le mode le plus fréquent d’accéder à la propriété foncière est la succession, toujours régie par la coutume, faute de loi écrite. Or, la coutume est très largement défavorable à la femme en matière successorale, particulièrement sur la propriété foncière lignagère. 50 | P a g e Par contre, on constate certaines tendances – quoiqu’isolées – en milieu urbain vers une égalité entre les sexes : dans certains contextes les femmes seraient traitées au même pied d’égalité que les hommes quand il s’agit de succéder. Malgré ces quelques signes positifs, dans l’ensemble les pratiques de succession ne semblent pas évoluer positivement pour les femmes 1». A part l’absence d’une loi régissant les successions et les libéralités, il n’y a pas à proprement parler d’obstacles législatifs ou règlementaires à l’enregistrement par les femmes, en leur nom, de leurs droits fonciers. Les obstacles sont plutôt d’ordre culturel. Dans une matière encore sous l’empire de la coutume, le privilège de masculinité continue de faire en sorte que la femme soit reléguée au second plan, derrière ses frères à chaque fois qu’il y en a, toutes les fois qu’il s’agit de succéder aux terres d’origine lignagère. Difficile, dans ces conditions, que la femme puisse avoir ses propres droits fonciers à faire enregistrer, puisque de son père elle n’hérite généralement que d’un petit lopin de terre appelée igiseke, non point à titre de propriété, mais comme usufruit viager. Quand bien même cette usufruitière serait dans le besoin, elle ne pourrait vendre ce lopin de terre. C’est même à peine qu’elle peut faire constater officiellement ce droit auprès du service foncier communal. Même la Cour suprême du Burundi est loin de se montrer favorable à l’égalité absolue de l’homme et de la femme quand il s’agit de succéder à la propriété foncière d’origine lignagère. Ainsi, dans son arrêt RCC 10531 rendu le 27 octobre 2005, la Chambre de cassation a admis que « la coutume a toujours protégé la société contre les conflits familiaux découlant du droit d’héritage de la fille parce que la terre constituait à l’époque la seule assiette sur laquelle reposait le droit de succession », et que «à l’époque cet état de fait s’expliquait et se justifie encore pour ce qui est de la succession de la terre familiale ». C’est pourtant le même arrêt qui retient que « ne pas reconnaître le droit d’héritage à une fille, une femme mariée ou à sa famille, procède d’une injustice notoire qui ne peut plus être cautionnée de nos jours », et « qu’actuellement, seuls les principes d’égalité et de non- discrimination garantis par le droit constitutionnel et les divers instruments internationaux déjà ratifiés doivent guider les rapports entre les hommes et les femmes ». En contraste avec cet arrêt réformiste, le tribunal de résidence Gisozi, dans l’affaire RC 2259, a invoqué l’absence d’une loi sur les successions pour débouter une femme qui réclamait le partage du lopin de terre familiale. Le dispositif de ce jugement dit entre autres ce qui suit : « NZ. Concilie est déboutée de sa demande de lopin de terre contre ND. Donavine parce qu’il n’y a pas de loi permettant aux filles mariées de partager la terre avec leurs frères ». Par ailleurs, lorsqu’une femme parvient à obtenir sa propre propriété, soit en vertu d’un jugement définitif rendu en sa faveur, soit par achat ou par donation, ou encore par voie successorale, elle pourrait généralement la faire enregistrer sans obstacle insurmontable. Pour autant, rien ne permet d’avancer avec certitude des pourcentages relatant les proportions des terres enregistrées au nom des femmes au Burundi. 1 Kent Elbow, op.cit., p.33. 51 | P a g e Dimension 7 : Les droits de propriété foncière des femmes sont-ils les mêmes que ceux des hommes au regard de la loi et dans la pratique ? Note (D): L'égalité des droits de propriété des femmes par rapport à ceux des hommes n'est pas établie par la loi. Comme indiqué précédemment, la question d’héritage au Burundi est depuis toujours sous l’empire du droit coutumier. Elle échappe donc au droit positif, ce qui signifie que jusqu’à présent, il n’y a pas de loi écrite organisant l’égalité des droits de propriété des femmes par rapport à ceux des hommes. Or, pour rappel, la coutume discrimine la femme en matière successorale, au nom du privilège de masculinité. Qu’en est-il alors dans la pratique ? Le principe généralement observé est que les femmes n’héritent pas, comme l’a si bien noté Louis De Clerck en interrogeant le droit coutumier des successions: « Les femmes ne sont pas héritières. Mariée, la femme est à charge de son mari et, veuve, elle a un droit d’usufruit sur la succession de celui-ci, si elle a des enfants de lui, et si elle ne se remarie pas, ou épouse un membre de la famille de son mari. La femme célibataire ou divorcée est à charge de sa famille. Elle reçoit généralement de son père ou de ses frères un lopin de terre à cultiver 1». Selon le droit coutumier, deux situations sont à distinguer, suivant que la succession se fait sur base ou en l’absence d’un testament. Dans le cadre de la succession testamentaire, la dévolution successorale se fera conformément à la volonté du de cujus exprimée dans son testament, écrit ou oral. Ainsi, si ce dernier prescrit un partage équitable entre successibles indépendamment de leur appartenance sexuelle, l’égalité entre hommes et femmes sera généralement sauve, ceux qui tenteraient de s’y opposer s’exposant à s’y faire résigner par voie judiciaire. Par contre, en l’absence de testament, la dévolution successorale se faisait selon les règles coutumières discriminant la femme2. Au fil du temps cependant, elle est allée s’améliorant à la faveur de quelques jugements rendus par les cours et tribunaux depuis déjà les années 1960. Louis De Clerck relevait déjà en 1971 ce qui suit : « la coutume a également évolué en cette matière. Un jugement du 9 février 1960 du tribunal du Mwami du Burundi reconnaît que les filles ont, dans le cas d’une succession ab intestat, le droit d’hériter de leur père en l’absence de garçon. La Cour de cassation du Burundi, dans son arrêt du 7 octobre 1964 a jugé qu’en vertu de la coutume les filles célibataires ou divorcées ont droit, au même titre que les héritiers mâles, à une part de l’héritage paternel 3». De façon générale, ce qui va de soi pour les garçons ne l’est pas pour les filles en matière successorale. Quand il s’agit de succéder à un père de famille décédé en laissant des descendants mâles et femelles, aucun doute que les garçons vont partager équitablement la propriété foncière constituant l’assiette successorale. Rien n’est moins sûr par contre pour les filles. Même celles qui seraient en situation matrimoniale malheureuse n’auront le moindre lopin de terre qu’au prix d’une longue procédure judiciaire. Une inégalité entre droits fonciers des femmes et des ceux hommes est donc une réalité au Burundi, en matière successorale. 1 Louis De Clerck, Op. cit.., p.6. 2 Voir ce qui a été déjà dit plus haut. 3 Louis De Clerck, Op. cit.., pp.6-7. 52 | P a g e Sur un autre plan, en matière des régimes matrimoniaux, on déplore aussi l’absence d’une loi. Théoriquement, les époux sont présumés se marier sous le régime de la communauté des biens, jusqu’à la preuve du contraire. C’est ce qui explique que l’article 126 du code des personnes et de la famille conditionne par le consentement des deux époux la validité tout acte d’acquisition ou d’aliénation de l’un quelconque des biens dépendant de la communauté conjugale. Les conséquences logiquement déductibles de ce principe devraient être entre autres qu’en cas de dissolution ou d’annulation d’un mariage, les biens ainsi réputés commun soient équitablement partagés entre époux ou leurs ayant-droits. Mais en pratique, cela est loin d’être le cas, d’où c’est finalement une communauté plus formelle que réelle. Pour preuve, en cas de divorce, même pour faute du mari, la femme n’obtient jamais à titre de propriétaire un quelconque morceau de la propriété foncière qui faisait vivre ce ménage. Tout au plus peut-elle, encore une fois au prix d’un procès pour les femmes les plus courageux, un usufruit. En la matière, le deuxième alinéa de l’article 183 du code des personnes inspire les juges : « Si l’époux qui a obtenu le divorce n’a pas de ressources suffisantes pour assurer sa subsistance, le tribunal lui accorde un établissement sur les biens de l’autre époux ou une pension alimentaire (…).Lorsque l’établissement est constitué par une propriété foncière, le créancier n’en aura que l’usufruit ». Voici quelques jugements diversement illustratifs rendus par le Tribunal de grande instance Ngozi.  RCA 8460 bis : La femme obtient les biens laissés par son mari prédécédé pour s’en servir dans l’éducation des enfants communs.  RCA 8045 : en cas de divorce, la femme obtient la moitié des biens du conjoint.  RCA 9114 : « le tribunal ordonne à NZ. Charles de quitter la maison construite ensemble avec NY. Odette pour que NY. Odette y élève les enfants communs ».  RCA 8180 bis : la veuve obtient du tribunal un champ de caféier et une propriétaire foncière de feu son mari. :  RCA 9285 : tandis que le dispositif contient entre autres points celui ordonnant le partage entre le mari et la femme divorcés de maisons construites sous leur union, le dernier point du dispositif interdit à la femme d’aliéner sous aucune forme les biens lui attribués par ce jugement, à l’exception d champ de caféier qu’elle avait acheté à ses frais manifestement personnels. Même dispositifs dans les jugements RCA 9145, 8841, 9480, 8922, 9112 ;  RCA 9039 bis : la propriété extra lignagère est partagée équitablement entre enfants abstraction faite de leur sexe, alors que pour la propriété lignagère, toutes les filles se partagent une part égale à celle que reçoit un seul garçon, et là aussi sans possibilité de l’aliéner sous aucune forme. 53 | P a g e Panel 2 : Droits sur les terres forestières et communautaires et réglementation de l'utilisation des terres rurales 2.1) Eléments de contexte additionnels Le secteur forestier a une place de choix dans l’économie nationale. En effet, le bois et ses dérivés offrent 95,4% des besoins énergétiques totaux du pays, soit 1 578 078 tonnes équivalent pétrole (tep). Les produits pétroliers et d’électricité ne fournissent que 4,2 %. Le secteur forestier contribue jusqu’à 2% du PIB et 6% à la création d’emplois1. Toutefois, les ressources naturelles et l’environnement sont en dégradation continue suite à plusieurs facteurs, dont la plupart sont liés à des insuffisances dans leur gestion et qui se manifestent aux niveaux politique, légal et institutionnel. Ce thème du CAGF s'intéresse particulièrement aux droits coutumiers exercés sur les forêts et les terres de type communautaires. L'observation a démontré que celles-ci étaient souvent ignorées dans le processus de législation et de codification des lois et des droits, de même que le régime de droit appliqué aux ressources naturelles de surface ou souterraines, dans leur cohabitation avec des droits fonciers individuels. A la différence à des pratiques et usages observés dans plusieurs pays africains, le Burundi ne connaît pas d'appropriation collective ou communautaire des terres. Celles-ci sont acquises à titre individuel par dévolution successorale, par achat ou don. Elles ne sont jamais attribuées à un groupe ou sous-groupe tribal ou clanique quelconque. Même si les Batwa exerçaient un droit d'usage (chasse, extraction d'argile dans les marais), le droit coutumier ne les considérait pas comme propriétaires2. Le Mwami et ses délégués administraient la terre comme un patrimoine collectif et les mécanismes de distribution des terres profitaient aux deux ethnies dominantes, les Hutu et Tutsi. L'accès à la terre s'opérait de manière plutôt individuelle, les plus nantis en acquérant plus puisqu'ils constituaient les rouages d’un système patrimonialiste de prélèvement et redistribution de biens et services matériels, sous leur autorité discrétionnaire. Les droits des particuliers sur les terres forestières n’ont été reconnus que récemment et dans le cadre d’un plan d’aménagement et de gestion rendu obligatoire pour chaque aire protégée (loi n°1/10 du 30 mai 2011 portant création et gestion des aires protégées au Burundi). Il n’y a cependant pas beaucoup de références pratiques au niveau de la mise en œuvre de cette loi. Bien plus, selon les codes foncier et minier, la propriété des terres n'emporte pas celle des substances minérales ou fossiles, qui restent la propriété exclusive de l'Etat. 1 Proposition de Préparation à la REDD+(R-PP). Burundi, Avril 2013 2 J.P. AMANI, Les droits fonciers et les peuples des forêts d’Afrique. Perspectives historiques, juridiques et Burundi - Evolution historique du droit foncier et son incidence sur la propriété foncière des Batwa au Burundi , 2009, p. 7. 54 | P a g e 2.2) Evaluation notée du Panel n° 2 a) Tableau synoptique des notes Panel n° 2 / IGF 1 : Droits sur les terres forestières et communautaires DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les terres forestières et communautaires sont Les terres forestières et clairement identifiées ; la communautaires sont clairement responsabilité concernant 1 identifiées dans la loi et la  leur utilisation est responsabilité concernant leur clairement identifiée mais utilisation est clairement attribuée. la mise en œuvre est ambiguë La tenure foncière de la Les droits collectifs en zone rurale plupart des groupes en 2 sont formellement reconnus et  zone rurale n’est pas peuvent être appliqués. reconnue par la loi. Même lorsque la loi confère à l'Etat Les droits des utilisateurs le droit de propriété ou de tutelle, sur les principales les modalités pour garantir les droits ressources naturelles ne des utilisateurs sur les principales 3  sont pas reconnus par la ressources naturelles du sol (y loi et il est fréquent qu'ils compris les ressources halieutiques) ne soient pas protégés sont reconnues par la loi et dans la pratique. protégées dans la pratique. Des droits multiples sur les mêmes La coexistence est terres communautaires et les légalement possible mais 4 ressources naturelles qui s'y  rarement respectée dans trouvent peuvent légalement la pratique. coexister. Des droits multiples sur la même La coexistence est parcelle et les ressources naturelles légalement possible mais 5 qui s'y trouvent peuvent légalement  rarement respectée dans coexister (p. Ex. Droit sur les la pratique. arbres). Des droits multiples sur les terres et La coexistence des droits les ressources minières/autres est impossible aux yeux 6 ressources du sous-sol de la même  de la loi ; les droits parcelle peuvent légalement miniers l'emportent sur coexister. les droits fonciers. 55 | P a g e Panel n° 2 / IGF 1 : Droits sur les terres forestières et communautaires (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Bien qu'une demande existe, la loi ne permet pas à ceux qui possèdent Il existe des procédures accessibles des droits fonciers pour l'enregistrement et la 7  collectifs sous un régime cartographie des droits coutumier/collectif collectifs/communautaires communautaire d'enregistrer et de cartographier ces droits. Entre 40% et 70% des terres communautaires ou Le périmètre des terres coutumières ont leur 8  communautaires est délimité. périmètre délimité/borné et les droits revendiqués sont enregistrés. Panel n° 2 / IGF 2: Efficacité et équité de la réglementation de l'utilisation des terres rurales DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Il est fréquent que la Les restrictions concernant réglementation ne soit 1 l'utilisation des terres en zone rurale  pas d'utilité publique et sont appliquées. son application est difficile. Il existe un ensemble de Les restrictions concernant la réglementations qui sont 2 transférabilité des terres en zone  pour la plupart d'utilité rurale sont d'utilité publique. publique mais elles ne sont pas appliquées. En zone rurale, les plans d’occupation des sols et les L'avis du public n’est pas modifications qui y sont apportées requis ni demandé dans 3 (y compris le rezonage) sont basés  la préparation et la sur un processus clair permettant la modification des plans consultation du public et le partage d’occupation des sols. des tâches. Plus de 70% des terres réaffectées à un nouvel usage dans les 3 Les changements d’affectation des dernières années ont été sols en zone rurale sont suivis 4  effectivement converties d’une conversion effective dans un à ce nouvel usage (p. ex. délai raisonnable. forêt, pâturages, zones humides, parcs nationaux, etc.). 56 | P a g e Panel n° 2 / IGF 2: Efficacité et équité de la réglementation de l'utilisation des terres rurales (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les processus de rezonage ne sont pas des processus publics et, Il existe une procédure publique dans la plupart des cas, claire pour le rezonage des 5  les droits sont ignorés et catégories d'utilisation des terres la perte de droits ne fait qui protège les droits existants. pas l'objet d'une indemnisation correcte et rapide. Moins de 10% des terres En zone rurale, les plans affectées à un usage d'occupation des sols pour des spécifique sont utilisées catégories précises de terres (forêts, 6  pour un autre usage non pâturages, zones humides, parcs précisé en contravention nationaux, etc.) correspondent aux avec la réglementation usages réels. existante. b) Revue commentée des évaluations par IGF et par dimension b.1) Panel 2 / IGF 1 : Droits sur les terres forestières et communautaires Dimension 1 : Les terres forestières et communautaires sont-elles clairement identifiées dans la loi et la responsabilité concernant leur utilisation clairement attribuée ? Note (B): Les terres forestières et communautaires sont clairement identifiées. La responsabilité concernant leur utilisation est clairement identifiée mais la mise en œuvre est ambiguë. L’analyse de la situation des terres forestières et communautaires permet de distinguer :  les terres couvertes par des formations naturelles (forêts, savanes, marais);  les terres qui ont été reboisées donnant ce que l’on appelle les forêts artificielles ainsi que  les terres qui restent à reboiser comme les crêtes dénudées. Les terres forestières et communautaires couvertes par les écosystèmes naturels sont assez bien délimitées. Actuellement, le Burundi compte ainsi 15 aires protégées réparties dans 4 catégories de 3 parcs nationaux, 5 réserves naturelles, 2 monuments naturels et 5 paysages protégés. Il existe également des aires en défens communautaires et privées notamment un bois sacré et deux arboretums. Dans l’ensemble, les aires protégées du Burundi ont une superficie d’environ 157 923 ha soit 5,6% du total du territoire national et 31% du total des 504 116 ha d’écosystèmes naturels disponibles (Stratégie Nationale et Plan d'Action sur la Biodiversité ou SNPAB 2013-2020). Il convient de noter qu’il existe des écosystèmes qui ne sont pas encore incorporés dans le réseau des aires protégées notamment la zone tampon autour du lac Tanganyika et les savanes des chaînes de montagnes d’Inanzegwe, Nkoma, Birime, Mpungwe et Murore. 57 | P a g e La responsabilité en ce qui concerne l’utilisation des aires protégées et de ces écosystèmes incombe à l’autorité publique chargée de la conservation, qui est actuellement l’Office Burundais pour la Protection de l’Environnement, une institution créée par le décret n° 100/198 du 15 septembre 2014 réorganisant le MEEATU et qui regroupe les anciens services de l’INECN et de la Direction Générale des Forêts et de l’Environnement. Les boisements ont été mis en place depuis l’époque coloniale et de façon plus soutenue depuis les années 1978 avec l’appui de plusieurs bailleurs de fonds. Ils ont été fort affectés par la crise sociopolitique de 1993 à 2005, période au cours de laquelle on estime à plus de 30 000 ha la superficie des boisements qui ont été détruits. En 2013, le MEEATU estimait que les boisements occupent 4,6% du territoire national, soit 133 500 ha dont 61 375 ha de boisements appartenant à l’Etat, 24 125 ha de boisements communaux et 48 000 ha de boisements privés. Il s’agit d’une estimation, la situation exacte devrait être connue à l’issue d’un inventaire exhaustif en cours. Les responsabilités concernant de l’utilisation des boisements domaniaux incombe à la Direction des Forêts tandis que celle des boisements communaux incombe aux communes, la coupe et la vente des boisements restant toutefois autorisées par l'Office Burundais pour la Protection de l’Environnement (OBPE). La gestion des boisements et des aires protégées ainsi créés a été donc confiée aux administrations publiques en charge des forêts et des aires protégées et les lois ne reconnaissaient aucun droit d’usage pour les communautés riveraines. Dans la pratique, les populations environnantes, acculées par le manque d’alternatives aux ressources qu’elles tiraient de ces espaces, n’ont jamais arrêté les exploitations illicites de ces espaces par des défrichements, coupe du bois, chasse, feux de brousse, etc. Le résultat est que ces espaces sont toujours en continuelle dégradation. Face à cette situation, le Gouvernement a pris conscience de la nécessité d’impliquer les populations dans la gestion des boisements et aires protégées en rendant obligatoire pour chaque espace considéré l’élaboration d’un plan d’aménagement de gestion et qui prévoit notamment la promotion des droits d’usage pour les riverains mais qui ne dégradent pas l’aire protégée. Dimension 2 : Les droits collectifs en zone rurale sont-ils formellement reconnus et peuvent-ils être appliqués ? Note (D): La tenure foncière de la plupart des groupes en zone rurale n’est pas reconnue par la loi Les principaux groupes en zone rural comprennent les agri-éleveurs (Hutu et Tutsi) et les Batwa. Les droits collectifs des agri-éleveurs sur les terres forestières et communautaires leur ont été retirés avec la mise en défens de ces espaces ce qui a conduit à la régression des pâturages et au recul de l’élevage. Les populations privées d’une bonne partie des terrains de parcours communautaires ont adopté la pratique de transhumance et l’élevage n’aurait pu subsister que dans les régions où il était possible de faire la transhumance1.Les Batwa - qui représentent environ 1% de la population burundaise - constituent un groupe ethnique qui traditionnellement vivait de la cueillette et de la chasse. Mais suite à la déforestation du pays, ils ont dû se convertir à la poterie mais pas pour longtemps parce que leurs produits ont été vite remplacés par les ustensiles importés, moins encombrants et d’utilisation plus commode. 1 H. Cochet, Op. cit. 58 | P a g e La poterie a commencé à être mise en difficulté dès la période de la colonisation belge, en 1925, par la dévolution des marais à l'ensemble des cultivateurs pour faire face aux famines. La mesure réduisit considérablement la réserve d'argile que les Batwa utilisaient pour produire des céramiques1. Ils furent donc obligés de se reconvertir à l’agriculture mais la plupart d’entre eux se retrouvent encore aujourd’hui sans terres, ne disposant, dans le meilleur des cas, que de la place sur laquelle sont construites leurs maisons. Malgré les interdictions de la loi, les Batwa qui habitent les environs de boisements et aires protégées continuent de vivre des ressources se trouvant dans ces espaces, profitant des faibles capacités de surveillance des administrations publiques chargées de leur gestion. Les difficultés de gestion durable des aires protégées et des boisements ont conduit l’Etat à assouplir la règlementation en vigueur afin de permettre aux populations riveraines d’accéder aux ressources naturelles que contiennent ces espaces sans compromettre l’objectif de conservation. Cependant, dans la pratique, cette disposition, encore au stade expérimental, connaît peu de succès. Dimension 3 : Même lorsque la loi confère à l'Etat le droit de propriété ou de tutelle, les modalités pour garantir les droits des utilisateurs sur les principales ressources naturelles du sol (y compris les ressources halieutiques) sont-elles reconnues par la loi et protégées dans la pratique ? Note (D) : Les droits des utilisateurs sur les principales ressources naturelles ne sont pas reconnus par la loi et il est fréquent qu'ils ne soient pas protégés dans la pratique Le décret n° 100/007 du 25 janvier 2000 portant délimitation d’un parc national et de quatre réserves naturelles stipule en son article 26 que « la chasse, la pêche et la coupe de bois sont interdites dans les limites des aires protégées. » » Toutefois, la population riveraine des aires protégées pourra être autorisée à opérer des extractions de certains produits ou autres ressources indispensables à leur vie sans préjudice des dispositions de l’article 28 alinéa 2 du présent décret. » Ces dispositions sont reprises comme telles dans tous les décrets portant délimitation de plusieurs aires protégées. La loi ne précise donc pas pour quels usages les droits des utilisateurs sont reconnus et la tendance de l’administration est d’interdire tout accès aux ressources naturelles des aires protégées, sans que les moyens humains et matériels soient rendus disponibles pour faire effectivement observer la mesure. La situation se présente ainsi alors que la création et l'implantation de certains parcs ou réserves naturelles a occasionné le déguerpissement des populations, sans indemnité. Le parc national de la Ruvubu et la réserve naturelle de la Rukoko en constituent des exemples vivants. Dans la pratique, les activités fortement combattues sont la coupe de bois, la chasse, le pâturage tandis que le ramassage du bois mort, l’exploitation des produits forestiers non ligneux comme les fruits, les champignons, le prélèvement des plantes médicinales sont tolérées. Une stratégie nationale sur l'utilisation des produits forestiers non ligneux a été adoptée. 1 J.P. Amani, Les droits fonciers et les peuples des forêts d’Afrique. Perspectives historiques, juridiques et Burundi - Evolution historique du droit foncier et son incidence sur la propriété foncière des Batwa au Burundi , 2009, p. 11. 59 | P a g e Dimension 4 : Des droits multiples sur les mêmes terres communautaires et les ressources naturelles qui s'y trouvent peuvent-ils légalement coexister ? Note (C): La coexistence de droits multiples sur les mêmes terres communautaires et les ressources naturelles est légalement possible mais rarement respectée dans la pratique Des droits limités sur les terres forestières n’ont été reconnus que récemment dans le cadre d’un plan d’aménagement et de gestion rendu obligatoire pour chaque aire protégée (loi n°1/10 du 30 Mai 2011 portant création et gestion des aires protégées au Burundi). A l’article 27, cette loi précise que « les droits d’usage sont des utilisations contrôlées de certaines ressources naturelles d’une aire protégée. Ces droits d’usage sont exercés sans pour autant mettre en danger l’atteinte des objectifs de conservation ». Il n’y a pas beaucoup de références pratiques au niveau de la mise en œuvre de cette loi. Il arrive cependant que l’organisme chargé de la gestion d’une aire protégée signe des accords pour des droits d’usages avec des groupes différents (apiculteurs, tradipraticiens, exploitants des produits non ligneux comme les champignons, etc.). Un exemple est le cas de la réserve naturelle de la Rusizi où l’INECN a signé, en 2011, des accords avec des associations différentes, chacune d’entre elles jouissant des droits d’usage pour une ressource bien déterminée (exploitation des phragmites, pêche dans les lagunes, exploitation des herbes artisanales). Dimension 5 : Des droits multiples sur la même parcelle et les ressources naturelles qui s'y trouvent peuvent-ils légalement coexister (p. Ex. Droit sur les arbres) ? Note (C): La coexistence de droits multiples sur la même parcelle et les ressources naturelles qui s'y trouvent est légalement possible mais rarement respectée dans la pratique La loi n°1/10 du 30 mai 2011 portant création et gestion des aires protégées au Burundi a marqué une évolution dans la reconnaissance des droits d’usages dans les aires protégées qui coexistent avec le droit de propriété de la terre détenu par l’Etat. En effet, l’article 26 de la susdite loi rend obligatoire l’élaboration, pour chaque aire protégée et en consultation avec les parties prenantes, d’un plan de gestion et d’aménagement assorti des indicateurs de référence et de progrès. Ce plan doit intégrer des programmes de développement autour des aires protégées comprenant entre autres la promotion des droits d’usage qui ne dégradent pas l’aire protégée. Les droits d’usage et les modalités de leur application sont consignés dans un mémorandum d’accord entre l’organisme ayant la conservation de la nature dans ses attributions, le comité d’appui et la frange de la population concernée par ces droits pour une durée déterminée et limitée par des objectifs et indicateurs précis (art.27). Pour ce qui concerne les boisements, la loi n°1/07 du 15 juillet 2016 portant révision du code forestier instaure la participation des populations riveraines des boisements domaniaux dans leur gestion. Avant cette loi, l’Ordonnance Ministérielle n° 770/989/CAB/2010 du 21 juin 2010 l’avait déjà fait. Un accord est censé être signé entre la commune, le Groupement de Gestion Forestière (GGF) et le Département des Forêts indiquant les responsabilités de chacune des parties ainsi que la répartition du partage des bénéfices issus de la gestion du boisement concerné. Les actions pilotes initiées en commune de Muyinga et Ngozi depuis 2010 ont été couronnées de succès parce que les boisements ont pu être bien entretenus, les communautés riveraines tirant profit des sous-produits des opérations de gestion de ces boisements à différentes étapes (produits d’éclaircies, d’élagage, etc.). 60 | P a g e Par contre les actions initiées pour les boisements dans le cadre du projet d’Appui à la gestion durable des peuplements d’Eucalyptus de Gakara et de Pinus de Vyanda et le partage équitable des bénéfices ont connu des résultats pour le moins mitigés, les GGF impliqués s’étant montrés beaucoup plus intéressés par l’exploitation que par les activités d’aménagement et gestion durable. Ces initiatives ayant été déclenchées avec l'appui des partenaires financiers de l'Etat du Burundi, en l'occurrence la FAO, il y a lieu de craindre qu'elles ne soient durables, si elles ne sont pas progressivement reprises en charge par l’Etat. Dimension 6 : Des droits multiples sur les terres et les ressources minières/autres ressources du sous-sol de la même parcelle peuvent-ils légalement coexister ? Note (D) : La coexistence des droits est impossible aux yeux de la loi. Les droits miniers l'emportent sur les droits fonciers Plusieurs dispositions de la loi n°1/ 21 du 15 octobre 2013 portant Code Minier du Burundi sont sans équivoque : face aux autorisations de prospection, de recherche et d’exploitation des mines et carrières, le détenteur des droits fonciers ne peut qu’exiger des indemnisations pour les biens se trouvant sur ses terres. A titre illustratif:  L'article 7 précise que les gisements des substances minérales ou fossiles constituent la propriété exclusive de l’Etat et que cette propriété relève de la souveraineté permanente de l’Etat sur ses ressources naturelles et, est inaliénable, imprescriptible et distincte de la propriété du sol.  L’article 106 stipule que les carrières ne peuvent être exploitées que sur autorisation préalable délivrée sous forme d’un permis d’exploitation de carrière par ordonnance du Ministre. Il précise également que même pour le propriétaire de terrain sur lequel se trouve la carrière, son exploitation requiert une autorisation préalable délivrée sous forme d’un permis d’exploitation de carrière par ordonnance ministérielle.  L’article 107 indique également que le propriétaire du sol ne peut pas s’opposer à une exploitation d’une carrière industrielle. Toutefois, une indemnité juste et préalable pour tout ou partie du sol qui est affecté par la recherche ou l’exploitation de la carrière ainsi que les cultures et constructions qui s’y trouvent, lui est accordée par l’exploitant.  L’article 108 donne pour les titulaires de permis de prospection, de recherche et d’exploitation de substances minérales et aux industries qui s’y rattachent, la latitude d’occupation des terrains nécessaires tant à l’intérieur qu’à l'extérieur du périmètre du titre minier ou de l’autorisation de prospection d’occupation, mo yennant une indemnisation au profit de l’occupant traditionnel ou coutumier. Le Code foncier lui-même reconnaît la prééminence de la propriété sur les ressources minières. L'article 11 conditionne en effet la propriété du sous-sol aux exceptions tirées des législations et règlements en rapport avec l'environnement, les mines et les hydrocarbures. Dans la pratique, avant de demander un permis d’exploitation artisanale, l’artisan négocie un accord avec le propriétaire du sol moyennant payement d’un montant convenu ou de partage dans une certaine proportion des produits issus de l’exploitation. Il s’agit en fait de rachat des droits de propriété foncière au moins durant la période de l’exploitation. 61 | P a g e Dans le cas de l’exploitation des carrières pour pavés par exemple, on a vu des cas où l’accord entre le propriétaire du terrain et l’artisan stipulait qu’il devait percevoir un montant déterminé par pavé produit. Dans d’autres cas, une somme globale lui était octroyée par l’artisan pour qu’il renonce à ses droits de propriété durant la période d’exploitation. L’article 91 du code minier stipule que le bénéficiaire d’un permis d’exploitation artisanale ne peut, sauf accord préalable des propriétaires, se livrer à ses activités sur des terrains de culture ni entraver l’irrigation. Il reste toutefois nécessaire de vérifier le niveau d’application de cette disposition qui relativise la prééminence des droits miniers sur les droits fonciers. Cela serait possible en comparant les proportions des exploitations artisanales et les exploitations industrielles. Si les premières primaient sur les secondes, et que cette obligation était systématiquement respectée, il y aurait une forme de reconnaissance forte des droits fonciers. Dimension 7 : Existe-t-il des procédures accessibles pour l'enregistrement et la cartographie des droits collectifs/communautaires ? Note (D) : Bien qu'une demande existe, la loi ne permet pas à ceux qui possèdent des droits fonciers collectifs sous un régime coutumier/collectif communautaire d'enregistrer et de cartographier ces droits. En pratique, le régime de la « copropriété foncière » prévu par le Code foncier burundais (articles 23 à 29) est réglementé à l’usage des immeubles. Il stipule que « si un fonds appartient à plusieurs personnes pour des parts indivises égales ou inégales, chacun des copropriétaires peut en user intégralement, mais en se conformant à sa destination et pourvu qu’il ne mette pas obstacle à son usage par les autres » (art. 24). La notion de droits fonciers communautaires auquel se réfère cette dimension du CAGF est assez variable d’une contrée à une autre. Selon le Réseau Africain des Droits des Communautés (ACRN), les caractéristiques qu’ils partagent généralement en Afrique noire sont les suivantes :  la totalité ou une partie des terres communautaires locales appartiennent à la communauté, puis sont affectées à un usage personnel/familial, ou à un usage collectif;  les droits individuels/familiaux et communautaires coexistent;  les communautés conservent leurs droits d’exclure des acteurs indésirables de leurs terres.1 A quelque exception près, il n’existe rien de tel au Burundi où la notion même de « communauté », dans l’entendement de l’anthropologie culturelle africaine, est absente. L’exception concerne l’usage souvent collectif des terres de pâturage qui, dans certains cas, a induit l’Etat burundais à croire à tort à leur vacance et à les domanialiser. Dans une certaine mesure, la notion s’applique aux aires protégées, où l’Etat promeut une gestion participative avec les riverains dont la tendance était de les considérer comme des terres collectives. Mais l’usage collectif de facto des terres forestières n’est pas rattaché à des revendications de droit fermes et l’Etat y a longtemps appliqué des restrictions strictes. En son article 58, le code forestier stipule qu’ « il ne peut être fait dans les boisements, terrains à boiser ou à restaurer appartenant aux communes et aux établissements publics, aucune concession de droit d’usage de quelque nature et sous quelque prétexte que ce soit ». 1 Africa Community Rights Network (ACRN), L’état des droits fonciers des communautés en Afrique, Décembre 2016, p. 4 62 | P a g e Plus récemment, la politique nationale forestière (2012) ainsi que le code forestier ont endossé une approche participative pour la gestion des forêts. Ainsi, le code forestier (article 121) stipule clairement que « l’exploitation des forêts ou des boisements de l’Etat, des communes et des établissements publics peut être transférée aux communautés villageoises ou inter villageoises relevant de leur ressort. » Il intègre aussi la reconnaissance des droits d’usage aux communautés organisées en Groupements de Gestion Forestière. Avant que ce code forestier soit promulgué en juillet 2016, une ordonnance ministérielle (n° 770/989/CAB/2010 du 21 juin 2010) avait instauré la « gestion participative des boisements domaniaux ». La loi n°1/10 du 30 mai 2011 portant création et gestion des aires protégées au Burundi prévoit aussi un « droit d’usage » régi par des memoranda d’accords. Le droit d’usage est un droit foncier reconnu par le Code foncier (loi n°1/13 du 09 août 2011 portant révision du Code foncier du Burundi) mais qui ne peut être ni cédé, ni loué, ni hypothéqué (art.94). Dimension 8 : Le périmètre des terres communautaires est-il délimité ? Note (B) : Entre 40% et 70% des terres communautaires ou coutumières ont leur périmètre délimité/borné et les droits revendiqués sont enregistrés Au Burundi, par extension, on pourrait considérer les terres communautaires comme étant celles des aires protégées dont le mode de gestion en cours de promotion est celui d’une gestion participative communautaire. La grande majorité de ces aires protégées sont délimitées par les différents décrets portant leur création. Certaines d’entre elles comme le Parc National de la Kibira, la Réserve Forestière de Bururi sont physiquement délimitées à l’aide de plantations artificielles tandis que d’autres ne sont délimitées que sur papier comme les « Paysages protégés » du Nord, le « Paysage protégé » de Gisagara. S’agissant de l’enregistrement des droits revendiqués, la reconnaissance des droits d’usages aux communautés riveraines regroupées en associations, à travers des accords avec le Conservateur est encore à l’état d’expérimentation. b.2) Panel 2 / IGF 2 : Efficacité et équité de la réglementation de l'utilisation des terres rurales Dimension 1 : Les restrictions concernant l'utilisation des terres en zone rurale sont-elles appliquées ? Note (C): Il est fréquent que la réglementation relative aux restrictions concernant l'utilisation des terres en zone rurale ne soit pas d'utilité publique et son application est difficile. L’article 10 du Code foncier stipule que « (…) les terres sont dites à usage résidentiel, industriel, commercial, agricole, d’élevage ou autre, selon l’usage qu’en fait l’occupant. ». Il ajoute toutefois que « cet usage peut être imposé par l’autorité publique, en application des dispositions relatives à l’aménagement du territoire, à la mise en valeur et au maintien de l’affectation des terres cédées ou concédées. » L’article 451 fait écho de cette restriction en précisant que « les exploitants des parcelles des marais doivent les mettre en valeur dans le respect des directives et sous l’encadrement des services techniques de l’administration des marais, de manière à améliorer ou à maintenir leur potentiel de production. » 63 | P a g e Il importe néanmoins de rappeler que l’absence de plans ou schémas officiels d’aménagement du territoire, ainsi que le manque de moyens humains et financiers pour les acteurs de gestion foncière, rendent les restrictions légales prévues dans le cadre de l’aménagement du territoire pratiquement inapplicables. Ces restrictions restent théoriques. Par exemple, « l’autorité de gestion des marais » prévue par l’article 447 du Code foncier n’a pas formellement émis de directives claires connues pour la mise en application des dispositions de l’article 451. Même pour les restrictions concernant la mise en valeur des terres rurales, lorsque celles-ci sont domaniales et font l’objet de concessions moyennant des conditions précisées dans un contrat, l’État ne sait généralement pas surveiller le respect de ces conditions. La réglementation n’est pas appliquée, comme en atteste un rapport du MEEATU (2009) sur les terres sous bail emphytéotique. Enfin, il existe aussi des cas de mesures administratives arbitraires prises par des autorités sans compétence légale ayant apporté des restrictions sur l’utilisation des terres rurales sans que l’utilité publique de ces mesures n’ait été démontrée ou comprise. C’est notamment le cas de l’interdiction de la culture de la plante Stevia faite en 2014 à Bubanza (étendue plus tard à d’autres provinces) par le gouverneur de la province1. Mais ce sont des cas ponctuels qui ne permettent pas d’affirmer que les restrictions sont « fréquentes ». Dimension 2 : Les restrictions concernant la transférabilité des terres en zone rurale sont-elles d'utilité publique ? Note (B): Il existe un ensemble de réglementations concernant la transférabilité des terres en zone rurale qui sont pour la plupart d'utilité publique mais elles ne sont pas appliquées. Cette dimension s’intéresse aux terres rurales en général et pas seulement aux forêts et aux aires dites protégées. Aussi longtemps qu’elles ne sont pas déclassées ou désaffectées, les terres du domaine public sont hors commerce, contrairement à celles du domaine privé peuvent faire l'objet de transfert. L’article 210 du Code foncier stipule que « la désaffectation d’une terre du domaine public artificiel intervient lorsqu’elle cesse d’être affectée à un usage public ou à un service public par l’autorité compétente ». Il ajoute que « la désaffectation peut être présumée en l’absence de toute déclaration formelle de l’administration lorsqu’un ensemble de faits persévérants et non équivoques démontre clairement que la terre considérée n’est plus affectée à usage public ou à un service public. » Bien que possible, la transférabilité des terres du domaine privé est subordonnée à des restrictions de compétences. Le Code foncier organise les modalités d'octroi de cessions et concessions sur les terres domaniales (voir notamment les articles 221 et 222). Ces restrictions sont d'utilité publique mais sont régulièrement violées, les mécanismes de gestion de ces espaces restant inefficaces malgré la récente réforme. Un fait clairement établi est que lorsqu’ils ont lieu, les changements d’affectation ou transfert des terres sont rarement rendus publics et motivés. En témoignent l’existence de cas de vastes terres placées sous la gestion d’établissements publics (ex. : Terres de l’ISABU - Institut des Sciences Agronomiques du Burundi) puis ayant fait l’objet de désaffectations partielles non officialisées, vers un usage résidentiel. L’ISABU a environ 600 hectares à Gitega, hautement convoitées par l’administration provinciale pour la construction de logements sociaux et d’écoles2. 1 http://bonesha.bi/La-culture-du-Stevia-interdite.html, con sulté le 1er juin 2017. 2 MEEATU et Global Rights, Compte-rendu de la réunion des gouverneurs et des hauts cadres sur l'Etat et les défis de la mise en œuvre du Code foncier du Burund i, 7 novembre 2013, p.6. 64 | P a g e Dimension 3 : En zone rurale, les plans d’occupation des sols et les modifications qui y sont apportées (y compris le rezonage) sont-ils basés sur un processus clair permettant la consultation du public et le partage des tâches ? Note (D) : En zone rurale, l'avis du public n’est ni requis ni demandé dans la préparation et la modification des plans d’occupation des sols Jusqu’à ce jour, le Burundi ne dispose pas encore d’un Plan national d’aménagement du territoire. La détermination de l’occupation des sols a suivi un processus marqué par la mise en défens des terres qui ont été affectées ultérieurement aux boisements, aux aires protégées, aux fermes de l’Etat et aux périmètres aménagés pour les cultures vivrières comme le riz ou les cultures industrielles comme le thé, le coton et le palmier à huile sans recours à l'avis du public. Dans ce contexte, il arrive également que l’Etat procède à la modification des plans locaux d’affectation des terres au profit des intérêts privés et cela sans requérir l’avis du public ou celui des services techniques spécialisés. Ceci est le cas par exemple de la récente implantation d’une exploitation industrielle privée de canne à sucre dans le Parc National de la Rusizi sans aucune étude d’impact environnemental. C’est également le cas de l’actuelle extension des plantations de canne à sucre de la Société Sucrière du Moso (SOSUMO) dans la réserve naturelle de la Malagarazi1. Pour le cas du Parc National de la Rusizi, son statut légal a été modifié par le décret de l’an 2000 portant délimitation d’un parc national et de quatre réserves. Il a modifié ses limites avec au départ 13.000 ha réduits conséquemment en Réserve Naturelle avec 5835 ha. Ce décret a été à l’origine de la distribution anarchique des terres aux autorités pour des activités de développement privées dont la plupart n’ont même pas fait l’objet d’études d’impact environnemental. Dimension 4 : Les changements d’affectation des sols en zone rurale sont-ils suivis d’une conversion effective dans un délai raisonnable ? Note (A): En zone rurale, plus de 70% des terres réaffectées à un nouvel usage dans les 3 dernières années ont été effectivement converties à ce nouvel usage (p. ex. forêt, pâturages, zones humides, parcs nationaux, etc.) En raison de leur rareté, les terres qui étaient affectées aux boisements et aux aires protégées sont régulièrement réaffectées à d’autres usages et parfois sans que les procédures de désaffection soient respectées. Ceci est le cas de l’installation des rapatriés dans les aires protégées (Cas du paysage protégé de Mukungu, Rukambasi et des Réserves Naturelles de Rumonge et Vyanda2). Parmi les changements d’affectation des terres devenus fréquents, il convient également de signaler la destruction des boisements communaux pour l’installation des cultures ou des infrastructures communautaires telles que les centres de santé, les écoles et les marchés, des villages, ainsi que l’extension des centres urbains sur des terrains agricoles à leur périphérie comme c’est le cas notamment pour la ville de Bujumbura. Dans tous ces cas, la conversion de facto aux nouveaux usages est immédiatement effective. Notons à toutes fins utiles que ces conversions ont plutôt l’allure de réaffectations forcées par la pression sur les terres. Ce ne sont pas les réaffectations dictées par l’intérêt public et l’intérêt du réaménagement du territoire allant plutôt le sens de faire gagner du terrain aux forêts, boisements et aires protégées. 1 Stratégie National et Plan d’Action sur la Biodiversité au Burundi 2013 -2020 22 SNPAB 2013 65 | P a g e Dimension 5 : Existe-t-il une procédure publique claire pour le rezonage des catégories d'utilisation des terres qui protège les droits existants ? Note (D): Les processus de rezonage ne sont pas des processus publics et, dans la plupart des cas, les droits sont ignorés et la perte de droits ne fait pas l'objet d'une indemnisation correcte et rapide. Parmi les processus de rezonage, un des plus importants semble être celui de la villagisation. Pour répondre aux besoins des populations déplacées par la crise de 1993, l’administration territoriale a pris la décision urgente de les regrouper en villages sur des terres boisées communales ou domaniales et parfois sur des terres privées. Ce sont les villages installés sur des propriétés privées qui sont sources de nombreux conflits, l’Etat n’ayant pas encore indemnisé les propriétaires de ces terres. Que ce soit pour les villages installés sur des terres de l’État, de la commune ou des privés, le processus n’a pas été public, le souci ayant été de répondre aux urgences. Le programme de villagisation en cours ne suit pas non plus les règles de gestion des terres du domaine privé. Il prend les formes d’une distribution spontanée des terres de ce domaine à des particuliers, sans trop se soucier du statut des droits des acquéreurs. Il n'est d'ailleurs pas rare que l'implantation de ces villages entraîne la dépossession de certains propriétaires, suite à des déclarations de domanialité faites sans enquête préalable. L’autre cas est celui de l’installation des populations qui étaient refugiées dans les pays voisins depuis longtemps et qui ont été rapatriées. Des cas sont signalés où elles sont installées par l’administration territoriale dans des aires protégées sans consultation de l’administration chargée de la conservation. Dans ce cas également, le processus n’est pas public et les études d’impacts sur l’environnement ne sont pas préalablement réalisées alors qu’elles sont prévues par la loi. Dimension 6 : En zone rurale, les plans d'occupation des sols pour des catégories précises de terres (forêts, pâturages, zones humides, parcs nationaux, etc.) correspondent-ils aux usages réels ? Note (D)1: Plus de 50% des terres affectées à un usage spécifique sont utilisées pour un autre usage non précisé en contravention avec la réglementation existante. Tableau : Évolution des aires protégées de 1960- 2013 Superficie Superficie convertie à Aires protégées Superficie /Année actuelle l’agriculture/ élevage Forêts ombrophiles 104 000 ha en 1960 55 000 (2013) 49 000 ha de montagnes (52,88%) Forêt de Mpotsa 300 ha en 1995 30 ha (2013) 270 ha (90%) Forêt de Kigwena 2000 ha en 1960 500 ha (2000) 1500 ha (75%) Savanes arborées 150 000 ha il y a 50 60 000 (2013) 90 000 ha (60%) ans Source : Stratégie Nationale et Plan d'Action sur la Biodiversité (SNPAB, 2013) 1 La note (A) a été initialement attribuée sur la base d’un malentendu car elle contredit les données du tableau et du commentaire joint. 66 | P a g e On se rend compte que les zones affectées à un usage spécifique ont changé de destination à des proportions plutôt inquiétantes. Et la tendance continue sans que des mesures de reconstitution soient envisagées. Dans toutes les communes du pays, des superficies importantes des boisements communaux et domaniaux sont déjà mis en culture à tel point que l’Etat ne sait plus récupérer ses terres. Les superficies déboisées ne sont pas connues faute d’inventaire. Le cas des marais est tout autant inquiétant. Bien que la loi reconnaisse leur appropriation, elle la subordonne à une exploitation contrôlée par les services techniques. Mais il n'existe pas de directives connues et/ou à jour à cet égard. Pourtant, un rapport du gouvernement burundais reconnait que "les marais sont peu représentés dans le système d’aires protégées" et qu'étant considérés comme des terres agricoles fertiles, ils sont "par conséquent très menacés"1. Ce rapport explique les fonctions de protection de l'environnement remplies par des vallées citées et les menaces humaines pesant sur elles. Il indique par exemple qu'à l’Est du Burundi et au niveau du plateau central, "les marais constituent des stations d’épuration des rivières comme la Malagarazi, la Rumpungwe et la Ruvubu". La rivière Ruvubu drainerait plus d’un quart du Burundi mais a perdu tous les marais qu'elle sillonne sauf dans le Parc National de la Ruvubu2. Le Code foncier entretient une confusion sur l'appropriation des terres de marais, en interdisant leur enregistrement par les particuliers (CF, art. 444) Panel 3 : Utilisation du sol, planification et développement urbains 3.1) Eléments de contexte additionnels Selon les données comparatives des deux derniers recensements de la population et de l’habitat (RGPH), les chefs-lieux des provinces de Gitega et Ngozi présentaient des taux de croissance de 6% à 7%, supérieurs au taux de croissance intercensitaire de la population urbaine du Burundi, qui est de 5%. Il reste que la population de Bujumbura, la capitale, représente à elle seule 17 fois la population de la seconde ville la plus peuplée du Burundi, près des 3/4 de la population urbaine du pays3, ce qui relativise le rythme et l'équilibre réels de l'urbanisation du Burundi. Celle-ci suit une forme de linéarisation, les agglomérations ayant tendance à se former le long des routes nationales ou interprovinciales. Les agglomérations urbaines ont connu un essor considérable, passant de deux en 1980 à douze en 20104. Les lacunes de planification urbaine sont à l'origine de l'extension anarchique des centres urbains, ce qui par ailleurs amène à se demander, à juste titre, si les conditions sont réunies pour qualifier certains centres d'urbains. En 1986, un décret a établi une liste de 12 villes et 10 centres à vocation urbaine. Cette liste a été mise à jour en 20005. Par ailleurs, les implantations non-planifiées font que les centres urbains connaissent en pratique un régime double, rural et urbain, pour ce qui concerne l'enregistrement des droits sur les parcelles. 1 MEEATU, INECN, Cinquième rapport du Burundi à la convention sur la diversité biologique, Mars 2014, p. 7 2 MEEATU, INECN, Op. cit.., p. 14 3 AFRICAPOLIS, Urbanisation en Afrique Centrale et Orientale, Fiche Pays, République du Burundi, 2010. 4 AFRICAPOLIS, Op. cit.. 5 Décret n° 100/111 du 31 juillet 2000 portant reclassement des centres urbains. 67 | P a g e 3.2) Evaluation notée du Panel n° 3 a) Tableau synoptique des notes Panel n° 3 / IGF 1 : Restrictions des droits : les droits fonciers ne sont pas tributaires du respect de normes irréalistes. DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Il existe un ensemble de Les restrictions relatives à la réglementations qui sont propriété et la transférabilité des 1  pour la plupart d'utilité terres en zone urbaine sont d'utilité publique mais leur publique et elles sont appliquées. application est défaillante. Les restrictions relatives à Il existe un ensemble de l'utilisation des terres en zone réglementations qui sont urbaine sont d'utilité publique et 2  pour la plupart d'utilité elles sont appliquées (y compris publique mais elles ne concernant les zones à risque et les sont pas appliquées. aires protégées). Panel n° 3 / IGF 2 : Transparence des restrictions sur l'utilisation des terres : Les réglementations concernant le changement d'affectation des sols et la gestion des terres sont élaborées de manière transparente et apportent des avantages significatifs à l'ensemble de la société plutôt qu'à certains groupes. DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Il existe un processus clair pour Les informations relatives l'agrandissement des terres urbaines et à un élargissement urbain le développement d'infrastructures qui planifié et un 1 respecte les droits existants ; les  développement informations relatives au changement d'infrastructures prévu ne d'affectation des sols sont publiques et sont pas rendues facilement accessibles. publiques. En zone urbaine, les plans L'avis du public n'est pas d'occupation des sols et les demandé dans la modifications qui y sont apportées 2  préparation et la sont basés sur un processus public modification des plans clair et sur la consultation de toutes d’occupation des sols. les parties prenantes. Entre 50% et 70% des En zone urbaine, les changements terres réaffectées dans les d’affectation des sols sont suivis 3  3 dernières années ont été d’une conversion effective dans un effectivement converties à temps raisonnable. ce nouvel usage. 68 | P a g e Panel n° 3 / IGF 3 : Efficacité des procédures de planification de l'occupation des sols en zone urbaine : les plans et règlements d’occupation des sols sont justifiés, mis en œuvre de manière efficace, ne poussent pas de vastes segments de la population vers l’habitat informel et parviennent à faire face à la croissance démographique. DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Une politique est en place et des Aucune disposition progrès sont accomplis pour n'oblige les promoteurs garantir la livraison de logements à 1  privés à répondre aux bas coûts et des services associés à besoins du marché du l'intention de ceux qui en ont logement à bas coût. besoin. Dans la plus grande ville, alors qu’une hiérarchie de plans régionaux/détaillés Les plans d’occupation des sols d’occupation des sols est permettent une orientation efficace 2  prévue par la loi, dans la du développement de la plus grande pratique l’essor spatial de ville. la ville est arbitraire et précède la réalisation des infrastructures. Panel n° 3 / IGF 3 : Efficacité des procédures de planification de l'occupation des sols en zone urbaine : les plans et règlements d’occupation des sols sont justifiés, mis en œuvre de manière efficace, ne poussent pas de vastes segments de la population vers l’habitat informel et parviennent à faire face à la croissance démographique. (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Dans les quatre plus grandes villes, alors qu’il est prévu une hiérarchie Les plans d’occupation des sols de plans permettent une orientation efficace régionaux/détaillés 3 du développement des quatre plus  d’occupation des sols, grandes villes (à l’exception de la dans la pratique le ville la plus grande). développement urbain est arbitraire et précède la réalisation des infrastructures. Dans la plus grande ville, le processus/l’autorité de planification urbaine parvient difficilement à La planification accompagne la faire face à la demande 4  croissance urbaine. croissante de terrains viabilisés comme en témoigne le fait que la plupart des nouveaux logements sont informels. 69 | P a g e Panel n° 3 / IGF 4 : Rapidité et prévisibilité des procédures d'autorisation d'utilisation des terres : les permis de construire sont délivrés rapidement et de façon prévisible. DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les conditions pour l’obtention d’un permis Les dispositions pour l’obtention de construire sont d’un permis de construire pour un techniquement justifiées, 1 logement sont adéquates,  mais financièrement abordables et rendues publiques inabordables pour la correctement. majorité des acteurs concernés. Le processus d'obtention d'un Toutes les demandes de permis de construire pour un 2  permis de construire sont logement est d'une durée traitées sous 6 mois. raisonnable. Panel n° 3 / IGF 5 : Programmes de régularisation de la tenure foncière en zone urbaine DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les conditions requises pour la formalisation des droits sur un terrain à La formalisation des droits sur un usage résidentiel en zone terrain à usage résidentiel en zone 1  urbaine sont claires, urbaine est possible et simples, financièrement financièrement abordable. abordables, mais ne sont pas appliquées de façon uniforme et transparente. Dans les villes présentant un niveau Il n'existe ni processus ni élevé d'habitat informel, il existe un stratégie pour mettre en 2 processus clair et bien documenté  œuvre une formalisation pour sécuriser la tenure et accroître de l'habitat informel. les infrastructures et les logements. La propriété commune/collective en régime de copropriété est La législation réglemente de façon reconnue mais la loi ne 3 adaptée la gestion de la propriété  réglemente pas la gestion commune. et la maintenance des propriétés/parties communes/collectives. 70 | P a g e b) Revue commentée des évaluations par IGF et par dimension b.1) Panel 3 / IGF 1 : Restrictions des droits Dimension 1 : Les restrictions relatives à la propriété et la transférabilité des terres en zone urbaine sont-elles d'utilité publique et sont-elles appliquées ? Note (B): Il existe un ensemble de réglementations qui sont pour la plupart d'utilité publique mais leur application est défaillante Il existe des restrictions d'utilité publique à l'exercice du droit de propriété sur une terre urbaine ou au droit de transfert d'une propriété urbaine. Cependant, leur application est défaillante principalement en raison de l'absence d'instruments de gestion courante spécifiquement conçus pour faire appliquer les restrictions, de structures rigoureuses de contrôle pour assurer que la norme soit appliquée. Les restrictions peuvent concerner la propriété, le propriétaire, la taille de la parcelle, ou les transactions comme les cessions par vente, donation ou échange, bail, prix du transfert ou du loyer, hypothèque, etc. Au niveau des mutations ou des transferts de propriétés, il n'y a pas de restrictions contraignantes comme telles mais la réglementation en vigueur prévoit de payer les frais de transferts. Ces frais de transactions représentent une charge non négligeable (3% du prix d'achat). L’incidence au niveau pratique est que cela peut entraîner des spéculations sur le coût à déclarer aux services en charges d’impôts et taxes. Au niveau des espaces verts, des espaces publics, il existe une bonne réglementation notamment sur leur préservation, mais leur application est défaillante suite à certaines décisions des autorités locales, ou même de certains gestionnaires fonciers d’urbanisme qui transfèrent ces espaces à un usage individuel. Dimension 2: Les restrictions relatives à l'utilisation des terres en zone urbaine sont-elles d'utilité publique et sont-elles appliquées (y compris concernant les zones à risque et les aires protégées) ? Note (B): Il existe un ensemble de réglementations qui sont pour la plupart d'utilité publique mais elles ne sont pas appliquées. Au niveau des études et de la planification de l’occupation du sol, les restrictions relatives à l'utilisation des terres en zone urbaine sont d'utilité publique mais c’est leur opérationnalisation qui pose problème. Certaines zones à risque (zones inondables et malsaines, risques d’éboulements) sont occupées spontanément par des ménages à très faibles revenus souvent avec le silence complice de l'administration urbaine. 71 | P a g e Il en est ainsi notamment du long des cours d’eau, tels que Ntahangwa et Kanyosha. Pour ce qui est des aires protégées, en principe faisant partie des espaces publics, il arrive qu'elles soient appropriées en tout ou partie, avec la complicité des autorités locales et des responsables de la gestion urbaine. Par exemple l’occupation du littoral du Lac Tanganyika, tels que le lieu-dit Kumase. Les voies routières ne sont pas non plus épargnées par des installations anarchiques de la part des particuliers. Ainsi par exemple, les travaux de pavage dans divers villes et centres urbains ont été dérangés par les empiètements, souvent de longue date, sur les pistes. b.2) Panel 3 / IGF 2 : Transparence des restrictions sur l'utilisation des terres Dimension 1 : Existe-t-il un processus clair pour l'agrandissement des terres urbaines et le développement d'infrastructures qui respecte les droits existants ? Les informations relatives au changement d'affectation des sols sont-elles publiques et facilement accessibles ? Note (D): Les informations relatives à un élargissement urbain planifié et un développement d'infrastructures prévu ne sont pas rendus publiques. Le défi majeur d’extension des terres urbaines est l’amenuisement progressif des terres domaniales. Dans ces conditions, il est souvent fait recours à l’expropriation pour cause d’utilité publique. L'Etat ressent le besoin grandissant de recourir aux terres des particuliers pour la réalisation de ses projets. Seulement, les règles et les procédures d'expropriation sont rarement respectées. En témoigne l'indemnisation des personnes expropriées, rarement préalable et rarement juste car calculée sur base d'une ordonnance obsolète de 2008 alors que le Code foncier prévoit la possibilité de sa négociation à l'amiable. Certaines extensions de la ville de Bujumbura ont été confrontées à des résistances populaires, les victimes dénonçant l'unilatéralisme de l'autorité publique et des mesures de spoliation notamment pour les cas où les deux parties se disputaient la propriété des terres objet de litige. Le processus d'expropriation est porté à la connaissance du public souvent en cours de route et selon des conditions prédéfinies par l'autorité publique. Le projet justifiant l'expropriation est traité au niveau des ministères concernés et n'est pas accessible au public. La déclaration provisoire d'utilité publique est affichée aux bureaux communaux et radiodiffusée. A ce niveau on peut dire que le public peut en avoir connaissance. Il se pose par contre un problème au niveau de l'évaluation des biens objet d'expropriation: les terres rurales n'en font pas partie alors que la ville s'étend exactement vers la zone rurale. L'enquête des éléments d'expropriation réalisée sur base de la réglementation actuellement appliquée1 est donc sujette à contestation, et c'est souvent le cas. Par suite, l'avis de la Commission foncière nationale est requis sur le rapport d'enquête et les réclamations éventuelles. Ceci demanderait des vérifications sur terrain mais la nouvelle commission n'est pas dotée de moyens pour le faire. Sinon les autres décisions administratives en rapport avec le processus d'expropriation sont publiées, des réunions d'information organisées à l'intention des concernés, même si les populations ont peu d'influence sur les orientations des projets. 1 Ordonnance ministérielle n°720/CAB/304/2008 du 20/3/2008 portant actualisation des tarifs d’indemnisation des terres, des cultures et des constructions en cas d’expropriation pour cause d’utilité publique, BOB N°3/2008. 72 | P a g e Dimension 2: En zone urbaine, les plans d'occupation des sols et les modifications qui y sont apportées sont-ils basés sur un processus public clair et sur la consultation de toutes les parties prenantes ? Note (D): L'avis du public n'est pas demandé dans la préparation et la modification des plans d'occupation des sols. La réglementation en vigueur dans la planification et la gestion des opérations d’urbanisme ne prévoit pas une consultation publique large comme tel. Dans le passé, il existait une commission nationale d'urbanisme qui donnait des orientations générales et même des instructions sur les opérations importantes d’urbanisme et d’habitat. Il existait aussi une commission provinciale d’urbanisme qui devait donner des avis sur les opérations d’urbanisme. Ces deux commissions ne sont plus opérationnelles alors qu'elles constituaient des cadres de concertation pour les opérations d'urbanisme. Ainsi dans la pratique, les opérations de préparation et de modification des plans d'occupation des sols sont prises en charge par le Ministère de l'Urbanisme, qui ne sollicite pas la participation du public. Dimension 3: En zone urbaine, les changements d’affectation des sols sont-ils suivis d’une conversion effective dans un temps raisonnable ? Note (B): Entre 50% et 70% des terres réaffectées dans les trois dernières années ont été effectivement converties à ce nouvel usage. Une gestion foncière efficace implique aussi que la conversion à l’usage prévu se fasse rapidement. Les données ont été collectées à partir des entretiens et de sondages des cadres qui travaillent dans les services d’urbanisme et des sociétés d’aménagement, ainsi que des appréciations des bénéficiaires des parcelles résidentielles dans les quartiers nouvellement lotis. Les zones destinées à accueillir des équipements collectifs ont été reconverties en zones d’habitat. A titre d’exemple, on peut citer les zones d’équipements de Carama, et de Kizingwe dans la ville de Bujumbura. Les pourcentages sont estimatifs à partir des zones initialement prévues pour les espaces verts ou les autres équipements collectifs. b.3) Panel 3 / IGF 3 : Efficacité des procédures de planification de l'occupation des sols en zone urbaine Dimension 1: Une politique est-elle en place et des progrès sont-ils accomplis pour garantir la livraison de logements à bas coûts et des services associés à l'intention de ceux qui en ont besoin ? Note (D): Aucune disposition n'oblige les promoteurs privés à répondre aux besoins du marché du logement à bas coût. La politique de l’habitat et de l’urbanisation élaborée en 2008 visait entre autres à mettre les services urbains à la portée de tous, en faire de véritables facteurs de production et promouvoir une gouvernance urbaine favorisant la participation de tous, dans la planification urbaine et dans l’organisation de la cité. Comme les services publics en charge de la planification et de la gestion urbaines ne sont pas nantis de moyens nécessaires pour cette mission, les outils de planification restant également lacunaires, plusieurs opérations d’urbanisme ont été réalisées au coup par coup et la plupart des extensions urbaines sont faites de façon anarchique, de vastes segments de la population urbaine vivant dans un habitat informel. 73 | P a g e La nouvelle politique n'a pas été assortie d'une stratégie nationale, avec un plan d'action pour un court et moyen termes. Elle aurait pu définir et éclairer par des projections adéquates en ce qui concerne les besoins en logements, et les moyens de mise en œuvre pour atteindre les objectifs escomptés en termes d’habitat décent pour le plus grand nombre. Et notamment permettre de combler les déficits du secteur public par le recours au secteur privé. Aujourd’hui, le secteur de l’habitat se trouve à la croisée des chemins avec une quasi absence de promotion immobilière, et une survie des fonctions d’aménagement foncier. La Société Immobilière Publique (SIP) et L’Etablissement public d’Encadrement des Constructions Sociales et Aménagement des Terrains (ECOSAT) n’ont plus les subsides publics et les autres soutiens qui leur permettaient jadis, de produire des logements à coûts relativement bas. Elles disposent de très peu de ressources (humaines, techniques et financières). La préoccupation principale n’est plus la production de logements sociaux mais celle de parcelles viabilisées pour les mieux nantis, et en quantité relativement faible, pour assurer la survie de ces sociétés. C’est ainsi qu’au cours des vingt dernières années, la SIP et l’ECOSAT ont produit respectivement 4.340 et 3.876 parcelles viabilisées dans la ville de Bujumbura et les quelques principaux centres urbains, ce qui reste faible par rapport à l’accroissement urbain. Le Fonds pour la Promotion de l’Habitat Urbain (FPHU) ne dispose pas de ressources stables et à longue durée, ce qui lui empêche de financer les logements sociaux pour les ménages à moyens et faibles revenus. Toutefois, au Conseil des Ministres du 1er décembre 2015, le Ministre des Transports, des Travaux Publics et de l’Equipement a présenté un nouveau projet de construction de logements sociaux pour les populations urbaines. Il passerait par la signature d’une convention entre la SIP et une société privée (Biz Planners and Advisers Limited). Toutefois, cela exigeait de la première qu’elle fasse un emprunt de 500 millions d’euros auprès de la seconde, remboursables sur 25 ans avec une période de grâce de 10 ans. Cet emprunt devait permettre de construire sur cinq ans « plusieurs logements et appartements » pour personnes à revenus moyens ainsi que des « blocs administratifs » à Bujumbura et dans d’autres centres urbains. La proposition incluait, de la part du gouvernement burundais, la mise à disposition de terrains et une série d’avantages fiscaux. Bien qu’il ait apprécié l’objectif du projet, le conseil des Ministres a reporté sa décision et désigné une équipe pour analyser plus en profondeur le dossier1. Le projet qui devait être revenu en conseil endéans un mois n’y était toujours pas revenu jusqu’en juin 2016. Au stade actuel, que ce soit au niveau réglementaire ou pratique, il n’existe aucune obligation quelconque faite aux promoteurs privés de réaliser l’habitat social malgré toutes ces faiblesses du système public. 1 http://burundi.gov.bi/spip.php?article550. Consulté le 12 juillet 2016 74 | P a g e Dimension 2: Les plans d’occupation des sols permettent-ils une orientation efficace du développement de la plus grande ville ? Note (C): Dans la plus grande ville, alors qu’une hiérarchie de plans régionaux/détaillés d’occupation des sols est prévue par la loi, dans la pratique l’essor spatial de la ville est arbitraire et précède la réalisation des infrastructures. Les documents des schémas directeurs d’aménagement et d’urbanisme élaborés dans les années 1980, ainsi que les plans d’occupation élaborés pour faire face aux différentes opérations d’urbanisme ont été globalement respectés à l’intérieur des périmètres urbains. La situation économique à ce moment avait permis également de produire un habitat social au plus grand nombre de gens à Bujumbura, la plus grande ville (quartiers Jabe, Musaga, Kanyosha, Gasenyi). Aujourd’hui la conjoncture économique entraîne un développement de l’habitat spontané et informel dans les quartiers périphériques de Bujumbura et des principales villes du Burundi. Si les plans d’occupation des sols (découlant des SDAU) permettent une orientation efficace du développement de la plus grande ville, c’est plutôt au niveau de la périphérie des villes que les citadins de moyens et faibles revenus vont chercher des logements accessibles dans la zone de développement informel. Il se fait que justement la périphérie connaît un essor plus rapide que la zone urbaine formelle, en raison des besoins et de la demande qui dépassent largement les capacités de l’Etat à y répondre. Les réponses sont taillées aux moyens de l’Etat qui, faute de pouvoir construire ou promouvoir la construction de logements sociaux aux prix abordables pour les moins nantis, se confine à rendre disponible des terrains et des lots de parcelles accessibles qu’aux classes sociales relativement aisées. Dès lors, l’occupation de fait des sols ne permet plus une orientation efficace du développement de la plus grande ville, car ceux qui ne trouvent pas leur compte dans ces lots occupent et bâtissent de manière anarchique dans la périphérie de la capitale. Dimension 3: Les plans d’occupation des sols permettent-ils une orientation efficace du développement des quatre plus grandes villes (à l’exception de la ville la plus grande) ? Note (C): Dans les quatre plus grandes villes, alors qu’il est prévu une hiérarchie de plans régionaux/détaillés d’occupation des sols, dans la pratique le développement urbain est arbitraire et précède la réalisation des infrastructures. Au Burundi, les trois villes importantes après la capitale sont : Gitega, Ngozi et Rumonge. Les Schémas directeurs de développement urbain élaborés en 1986 constituaient les seuls documents de planification dans ces villes secondaires. Il est intéressant de constater que ces derniers donnaient des projections très réalistes en matière de démographie, les chiffres de projection s’étant avérés quasi exacts. Néanmoins, les infrastructures prévues n’ont pas été réalisées, notamment en matière de voirie. De plus, ces schémas prévoyaient la densification des villes existantes, ce qui n’a pas été fait. Aujourd’hui, les schémas directeurs d’aménagement et d’urbanisme sont en cours de finalisation pour ces trois villes principales (avec l’appui de la Banque mondiale). Ces villes ont des dimensions encore modestes ayant autour de cinquante mille habitants chacune. Ces schémas vont certainement guider l’élaboration de plans détaillés d’occupation du sol. Néanmoins, le risque évoqué plus haut sur la prolifération des quartiers spontanés, est aussi valable ici, parce que la croissance des quartiers périphériques informels connaissent, et connaîtront encore au cours des prochaines années un essor important. 75 | P a g e Dimension 4 : La planification accompagne-t-elle la croissance urbaine ? Note (C): Dans la plus grande ville, le processus/l’autorité de planification urbaine parvient difficilement à faire face à la demande croissante de terrains viabilisés comme en témoigne le fait que la plupart des nouveaux logements sont informels. Il n y a pas d’étude récente spécifique sur la demande en terrains viabilisés et par type d’usage (résidentiel, commercial, artisanal, touristique, industriel, etc.). Les programmations récentes utilisent des recoupements d’informations et des estimations sectorielles. Comme de toute façon l’offre des terrains est déjà très en deçà de la demande potentielle, les opérations se réalisent au coup par coup. Seule une étude sur la demande de logements et les revenus des ménages à Bujumbura avait été réalisée par l’ECOSAT en 1992. Vingt-quatre ans plus tard, les données sont tombées en désuétude. Aussi, la situation de la capitale est comparable aux autres trois villes importantes en ce qui concerne la planification eu égard à la croissance urbaine. Il est en plus difficile d’analyser finement l’économie urbaine au Burundi. Parce que l'économie burundaise est encore largement rurale, il est difficile de dresser les profils économiques des villes sur la base des indicateurs communaux étant donné que les communes regroupent de vastes territoires ruraux, et qu'il n’existe pas d’enquêtes socio-économiques récentes en milieu urbain. Le nombre toujours grandissant de nouveaux logements construits sur les périphéries des villes, dans les quartiers informels non viabilisés, témoigne de la difficulté de faire face à la demande croissante des terrains viabilisés par les autorités de planification urbaine. b.4) Panel 3 / IGF 4 : Rapidité et prévisibilité des procédures d'autorisation d'utilisation des terres Dimension 1: Les dispositions pour l’obtention d’un permis de construire pour un logement sont- elles adéquates, abordables et rendues publiques correctement ? Note (C): Les conditions pour l’obtention d’un permis de construire sont techniquement justifiées, mais financièrement inabordables pour la majorité des acteurs concernés. Les dispositions pour l’obtention d’un permis de construire pour un logement ne sont pas largement diffusées. Elles sont néanmoins rendues disponibles pour les intéressés qui les retrouvent dans les services techniques concernés. Dans la constitution du dossier pour l’obtention du permis de construire, il est nécessaire de rappeler quelques frais y afférents, notamment les coûts liés à la location de la parcelle, à la conception du Projet de construction (plans), et à la reproduction des documents surtout des plans en quatre exemplaires. Techniquement parlant, la reproduction des plans en deux exemplaires au lieu de quatre ne devrait pas causer de difficultés. Du point de vue financier, le coût de l’obtention d’un permis de construire est de 0,6 % du devis estimatif du projet. Mais pour l’habitat social, ajouté aux frais ci-haut mentionné, ce coût reste élevé et même prohibitif. C’est pourquoi une bonne partie des citadins à moyens et faibles revenus préfèrent recourir aux constructions informelles dans les zones périphériques non loties, et souvent en dehors mais non loin du périmètre urbain. Cette occupation a des avantages comparatifs parce que le coût du terrain est relativement bas, car non viabilisé, mais aussi avec moins de contraintes/exigences des services d’urbanisme qui ne concernent que les ménages se trouvant à l’intérieur du périmètre urbain. 76 | P a g e Dimension 2: Le processus d'obtention d'un permis de construire pour un logement est-il d'une durée raisonnable ? Note (B): Toutes les demandes de permis de construire sont traitées sous 6 mois. Il y a quelques années, le demandeur d'un permis de construire devait faire des allers-retours dans différents services géographiquement dispersés, le processus pouvant parfois prendre jusqu'à 4 mois. Depuis le 11 mars 2013, sous l’impulsion de la Banque mondiale à travers les exigences du « Doing business », il a été créé un guichet unique pour réduire les délais et les distances des clients, en essayant de regrouper ces différents services et acteurs intervenant dans les procédures d’autorisation de bâtir. Théoriquement, les délais pour l’obtention d’un permis de construire devraient être en moyenne 30 jours. Une analyse réalisée à partir d’un échantillon de 91 dossiers de demandes en 2014, sur une période tirée au hasard de cinq mois consécutifs, pour l’obtention des permis de construire montre que des avancées significatives ont été réalisées. En effet, 35 cas soit 38, 46 % ont eu leurs permis de construire en moins de dix jours. En prenant le total cumulé des cas ayant obtenu leurs permis de construire endéans un mois, on arrive à 71 cas soit 78%. On enregistre 16 cas soit 17,58% ayant obtenu leurs permis de construire entre 1 à 2 mois. La synthèse montre que 87 cas soit 95,6 % ont obtenu leurs permis de construire endéans 2 mois. Les 4 cas qui restent représentant 4,3% et concernent des permis de construire obtenus entre 3 mois et 6 mois dont un cas de 6 mois et trois semaines ! Mais au niveau des villes secondaires de l’intérieur du pays, il faut noter que les délais sont relativement plus longs, compte tenu du fait que les dossiers sont introduits au niveau des antennes provinciales d’urbanisme, instruits au niveau de la direction régionale de l’urbanisme, puis contresignés à Bujumbura pour le permis de construire, par le directeur de la gestion urbaine et le directeur général d’urbanisme et de l’habitat. Dans tous les cas, le permis de construire peut s'obtenir endéans 6 mois. b.5) Panel 3 / IGF 5 : Programmes de régularisation de la tenure foncière en zone urbaine Dimension 1: La formalisation des droits sur un terrain à usage résidentiel en zone urbaine est-il possible et financièrement abordable ? Note (B): Les conditions requises pour la formalisation des droits sur un terrain à usage résidentiel en zone urbaine sont claires, simples, financièrement abordables, mais ne sont pas appliquées de façon uniforme et transparente. Les procédures de formalisation de droits sur un terrain à usage résidentiel en zone urbaine passe par les étapes suivantes :  Autorisation et paiement des frais de viabilisation ;  Obtention d’une lettre d’attribution d’une parcelle à usage résidentiel ;  Contrat de location de la parcelle ;  Obtention du permis de construire ;  Attestation de mise en valeur et de conformité ;  Certificat de conformité des constructions par rapport au permis de construire;  Paiement du coût de la parcelle à usage résidentiel ; 77 | P a g e  Obtention du procès-verbal (PV) d'arpentage et de bornage  Enregistrement et obtention du titre de propriété de la parcelle. Sur une échelle de A à D, le tableau ci-après décrit les facilités d'obtention des documents de formalisation des droits sur un terrain à usage résidentiel en zone urbaine. l'application Aptitude du obligations Organisme Cohérence Impératifs applicable du secteur candidat à abordable Caractère Caractère opérateur satisfaire de clarté public / Étapes privé aux de Attribution Urbanisme D D D D D Contrat de Serv. Titres A B D B location fonciers B Permis de Urbanisme B B D B construire Titre de Titres B B D B B propriété fonciers Source: Estimations de l'auteur sur base des informations disponibles au niveau des services concernés A partir de ce tableau, la formulation de l’appréciation de la dimension nécessite un peu d'être nuancée. En effet, les conditions requises pour la formalisation des droits sur un terrain à usage résidentiel en zone urbaine sont claires, simples, mais pas suffisamment accessibles financièrement. Dimension 2: Dans les villes présentant un niveau élevé d'habitat informel, existe-t-il un processus clair et bien documenté pour sécuriser la tenure et accroître les infrastructures et les logements ? Note (D): Il n'existe ni processus ni stratégie pour mettre en œuvre une formalisation de l'habitat informel. Il est nécessaire de souligner que dans les villes du Burundi, l’habitat informel se trouve généralement à la périphérie dans les quartiers qui se développent sans voies d’accès convenables et sans infrastructures. Cette situation frappe aussi bien la ville de Bujumbura que les villes secondaires. Dans ces quartiers, il n’existe pas un processus clair et bien documenté pour sécuriser la tenure foncière. Les acheteurs et les vendeurs se conviennent souvent sur des actes de transactions foncières, avec des témoins comprenant notamment les voisins de la propriété achetée, quelques autorités locales collinaires. Parfois, ces actes de mutations foncières sont « notariés » par l’administrateur communal, selon la volonté et les moyens dont dispose l’acheteur. Dans ces conditions, on se retrouve avec des occupations de terrains cunéiformes, et variées, ne permettant pas toujours des possibilités de passages des infrastructures telles que les voies d’accès, l’assainissement pluvial, l’adduction d’eau et les autres réseaux. 78 | P a g e Il existe quelques initiatives notamment d'ouverture de voies dans certains quartiers périphériques de Ngozi, de même que l'imposition d'un certificat de conformité permettant de vérifier l'accessibilité ou la possibilité de connexion d'un terrain en instance d'enregistrement à la voie publique. Il faut seulement noter que ces initiatives sont soit sporadiques, soit non intégrées dans un processus légalement reconnu, ce qui fausse leur légalité, légitimité, durabilité et généralisation. Dimension 3: La législation réglemente-t-elle de façon adaptée la gestion de la propriété commune ? Note (B): La propriété commune/collective en régime de copropriété est reconnue mais la loi ne réglemente pas la gestion et la maintenance des propriétés/parties communes/collectives. Une partie non négligeable de la population citadine au Burundi vit dans des copropriétés appelées impangu. Ce phénomène va se développer plus fortement au cours des années à venir, suite aux difficultés et à l’incapacité d’adéquation entre l’offre et la demande du logement. Un élément essentiel de la bonne gouvernance concernant les copropriétés ne concerne pas uniquement le droit de s’y loger mais aussi la reconnaissance des droits collectifs, avec une méthodologie claire pour la gestion des parties communes (voies d’accès, cours intérieures, aires de stationnement, jardins, cages d’escalier, etc.) afin d’assurer aux occupants la pleine jouissance de la propriété. Le Code foncier Burundais règle cette situation aux articles 26, 27 et 28. En vertu de ces articles, les biens immobiliers affectés à titre d'accessoire et pour l'usage commun à plusieurs propriétés appartenant à des propriétaires différents, ne sont pas susceptibles d'être partagés. De même ils ne peuvent être aliénés ni grevés de charges en dehors des propriétés dont ils sont des accessoires. Les frais d'entretien de ces parties communes sont répartis en proportion des parties principales. Panel 4 : Gestion des terres domaniales 4.1) Eléments de contexte additionnels Au Burundi, l'Etat n'est pas propriétaire de droit de toutes les terres. Il est propriétaire des terres dites du domaine public, naturel (lacs, rivières, forêts primaires, etc.) et artificiel (voies et places publiques, aéroports, cimetières, etc.) ainsi que d’un domaine privé constitué selon une procédure prescrite par la loi. Selon la loi, ce domaine privé couvre « toutes les terres et eaux de son patrimoine foncier qui ne font pas partie du domaine public », c’est -à-dire entre autres :  les biens fonciers vacants et sans maître ;  les terres du domaine public désaffectées ou déclassées ;  les terres acquises à titre onéreux ou gratuit par l’Etat ;  les terres expropriées pour cause d’utilité publique ;  les terres acquises par prescription ;  les marais vacants non inondés de façon permanente1. 1 Article 211, Code foncier du Burundi, Août 2011 79 | P a g e Un inventaire des terres domaniales libres et habitables effectué entre mars et octobre 2001 par le gouvernement du Burundi et le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) estimait celles-ci à une superficie de 141.266 ha. Cela représente environ 5 % du territoire ou la superficie de la province de Karusi. Selon des données publiées en 2013 par le Ministère de l'Eau, de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de l'Urbanisme (MEEATU), les forêts et boisements occupaient 4,6% du territoire national, soit 133.500 ha dont 61.375 ha de boisements appartenant à l’Etat, 24.125 ha de boisements communaux et 48.000 ha de boisements privés. Selon le Schéma directeur d’aménagement et de mise en valeur des marais, en l’an 2000, la superficie totale des marais du Burundi s’élevait à 117.993 ha dont 81.403 ha (68,99%) étaient cultivés. Depuis octobre 2014, des évolutions importantes sont en cours dans l’identification des terres domaniales, sous l’impulsion du Projet d’Amélioration de la Gestion et de la Gouvernance Foncière au, Burundi (PAGGF). Financé par l’Union Européenne et mis en exécution par l’organisation GiZ, ce programme entreprend une vaste opération d’identification, de délimitation, de bornage et de mesurage des terres domaniales. La mise en œuvre de ce programme a requis des préalables en matière de législation et réglementation domaniales, notamment la promulgation d’une ordonnance sur l’inventaire des terres domaniales et un décret portant enregistrement des terres domaniales, en application du Code foncier. A la fin du mois de février 2017, divers manuels étaient en cours d’élaboration ou de finalisation pour réglementer entre autres la procédure à suivre pour le bornage et le mesurage, l ’enquête foncière et l’enregistrement. 4.2) Evaluation notée du Panel n° 4 a) Tableau synoptique des notes Panel n° 1 / IGF 1 : Identification et gestion transparente des terres publiques : la propriété des terres publiques est clairement définie, justifiée par l'utilité publique, inventoriée, assortie de responsabilités de gestion claires et les informations DIM. Matières A B C D Situation du Burundi La propriété de la terre par La propriété des terres publiques est l’État présente un caractère d'utilité publique et est gérée clairement définie, justifiée par 1  à un niveau administratif l'utilité publique et gérée à un approprié mais les terres échelon administratif approprié publiques peuvent être gérées de façon arbitraire. Moins de 30% des terres Il existe un inventaire complet des publiques sont 2  terres publiques cartographiées ou clairement signalisées sur le terrain. Les informations contenues L’inventaire des terres publiques est dans l’inventaire des terres 3  accessible au public publiques ne sont pas accessibles au public. 80 | P a g e Il y a des ambiguïtés dans l’attribution de la La compétence de gestion des compétence de gestion des 4 différents types de terres publiques  différents types de terres est attribuée sans ambiguïté publiques qui affectent quelque peu la gestion des biens. Panel n° 1 / IGF 1 : Identification et gestion transparente des terres publiques : la propriété des terres publiques est clairement définie, justifiée par l'utilité publique, inventoriée, assortie de responsabilités de gestion claires et les informations (Suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les ressources sont très Des ressources suffisantes sont insuffisantes et/ou un manque sensible de capacité disponibles pour la gestion des 5  organisationnelle aboutit à terres publiques par les une mauvaise gestion ou une administrations concernées absence de gestion des terres publiques. Les informations les plus importantes concernant les attributions de terres publiques (l’emplacement et Les informations essentielles la superficie du terrain concernant les attributions de terres attribué, les parties 6  publiques à des intérêts privés sont prenantes et les conditions accessibles au public financières de l’attribution) sont enregistrées ou partiellement enregistrées mais elles ne sont pas accessibles au public. Panel n° 1 / IGF 2 : Justification et célérité des procédures d'acquisition : l’état n’engage une expropriation que dans l’intérêt public général et cette expropriation est menée avec efficacité Les cas de transfert de terres Evaluation objective 1 publiques au profit d’intérêts privés - - - - notée impossible. Les sont très peu nombreux notes doivent être attribuées selon une estimation (en pourcentage) de la proportion des terres expropriées à des fins Les terres acquises sont converties à privées et converties à 2 l’usage prévu dans un délai - - - - l’usage prévu au cours raisonnable des 3 dernières années. Les informations relatives à l’expropriation ne sont pas centralisées par un service public donné et ne sont pas disponibles. 81 | P a g e Panel n° 1 / IGF 3 : Transparence et équité des procédures d'expropriation : les procédures d’expropriation sont claires et transparentes et une indemnisation juste est versée rapidement DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Une indemnisation, en numéraire ou en nature, est versée pour certains droits non enregistrés (tels que la possession, l’occupation, etc.). Une indemnisation est versée en cas Cependant, les détenteurs 1 d’expropriation, que les droits  d’autres droits non soient enregistrés ou non enregistrés (qui peuvent inclure par exemple le pâturage, l’accès, la cueillette, etc.) ne touchent généralement pas d’indemnisation. Lorsque des droits sont perdus suite à un Une indemnisation adéquate est changement d’affectation accordée si le changement des sols (en dehors d’un 2 d'affectation des sols se traduit par  processus une perte de droits ou une d’expropriation), il n’y a restriction de l'utilisation des terres pas d’indemnisation des personnes concernées. Moins de 50% des Les propriétaires expropriés sont propriétaires expropriés 3 indemnisés dans un délai  reçoivent une raisonnable indemnisation dans l’année. Il existe des voies de recours plus ou moins Il existe des voies de recours indépendantes pour faire appel d’une décision 4 indépendantes et accessibles pour  d’expropriation. Ces voies faire appel d’une expropriation ne sont pas toujours accessibles aux populations concernées. Une décision de première instance est prononcée Les recours contre les dans moins de 30% des 5 expropriations sont examinés dans  recours contre une un délai raisonnable expropriation déposés dans les 3 dernières années. 82 | P a g e b) Revue commentée des évaluations par IGF et par dimension b.1) Panel 4 / IGF 1 : Identification et gestion transparente des terres publiques: la propriété des terres publiques est clairement définie, justifiée par l'utilité publique, inventoriée, assortie de responsabilités de gestion claires et les informations Dimension 1: La propriété des terres publiques est-elle clairement définie, justifiée par l'utilité publique et gérée à un échelon administratif approprié ? Note (B): La propriété de la terre par l’État présente un caractère d'utilité publique et est gérée à un niveau administratif approprié mais les terres domaniales peuvent être gérées de façon arbitraire. D'après la loi, le domaine foncier public de l'Etat est délimité et approprié selon des critères d'intérêt public, qu'il s'agisse du domaine public naturel ou artificiel. Les ressources naturelles (forêts primaires, lacs, rivières, étangs, certains marais, etc.) tombent dans le domaine foncier public naturel et ne fait généralement l'objet d'aucune prétention ou revendication rivale par des individus ou des sociétés. Il en va presque de même du domaine foncier public artificiel qui est constitué des places publiques ou des espaces réservés à des services publics (postes, ports, aéroports, cimetières, etc.). Quant au domaine foncier privé de l'Etat, l'intérêt public pour justifier ou étendre sa propriété est invoqué principalement en cas de vacance de terre ("biens fonciers vacants et sans maître" et "marais vacants non inondés de façon permanente", Code foncier, art. 214) et surtout en cas d'expropriation pour cause d'utilité publique. Le Code foncier fixe la propriété foncière de l'Etat selon des critères d'intérêt public non contestés. Néanmoins, les dispositions respectives relatives aux terres de l’Etat et aux terres des autres personnes publiques ne sont pas suffisamment claires pour en permettre une nette distinction en l’absence, comme c’est le cas actuellement, d’un inventaire exhaustif et actualisé y relatif. La gestion de ces terres domaniales est très centralisée puisque la politique générale, les cessions et les concessions domaniales sont placées entre les mains du MEEATU et de la CFN, basés à Bujumbura. La Direction générale de l'Aménagement du Territoire, qui relève du MEEATU, dispose de départements déconcentrés dans trois provinces. Mais ils ne sont nantis d'aucun pouvoir de décision en matière de gestion des terres domaniales, tout cas remontant au centre pour décision. Cette centralisation extrême des pouvoirs de décision en matière de gestion des terres domaniales pourrait paraître critiquable, eu égard aux avantages théoriques comparés d'une décentralisation. Mais au regard des difficultés observées dans la gestion des terres domaniales par les deux principales unités centrales (MEEATU, CFN), il y a tout lieu de craindre qu'à ce stade-ci, une décentralisation poussée de cette gestion démultiplierait les problèmes. Une loi promulguée le 25 mai 2015 a transféré quelques compétences de l'Etat aux communes. En matière foncière, ladite loi transfère moins de compétence qu'elle n'introduit le droit et le devoir des communes à participer et à être impliquée dans la gestion des terres domaniales, en particulier en matière de définition des politiques et de contrôle de leur application et celle des lois. Cette loi ouvre aussi une perspective intéressante de dévolution progressive des responsabilités de gestion du patrimoine foncier domanial vers les entités publiques déconcentrées et les communes. 83 | P a g e Selon cette loi, la commune participe à "l'élaboration des politiques d'aménagement du territoire et d'urbanisme élaborées par l'Etat ou tout autre organisme public en ce qui concerne son ressort territorial". Elle stipule que la commune doit donner son accord préalable à la création de tout projet sur l'environnement dans son ressort administratif. Elle "veille à la protection des ressources naturelles, notamment des forêts, des sols (…)". Cela revient à conférer aux communes un regard sur la gestion des terres domaniales. Malgré le prescrit de la loi, la pratique révèle que les terres domaniales sont gérées de façon arbitraire. Ceux qui ne sont investis par la loi d'aucun pouvoir en matière de cession ou concession domaniale persistent dans l'habitude d'exercer ce pouvoir dans leurs propres ressorts. Divers rapports de monitoring produits en 2014 par une plateforme d'ONGs burundaises œuvrant dans le foncier font état d'une multitude de ces cas, disséminés à travers le pays. Parallèlement, la CFN qui traite les demandes de cessions ou concessions de terres domaniales n'est pas encore parvenue à réglementer et motiver ses procédures d'avis sur les demandes en cessions ou concessions domaniales. De ce fait, il reste impossible, par exemple, de savoir l'étendue, la cartographie des superficies de terres domaniales cédées entre le début de son entrée en fonction en avril 2012 et fin 2014. De même, les politiques et les critères qui guident ses avis restent mal définis. Dimension 2 : Existe-t-il un inventaire complet des terres publiques ? Note (D): Moins de 30% des terres publiques sont cartographiées ou clairement signalisées sur le terrain. Entre mars et octobre 2001, un inventaire a été effectué par le gouvernement burundais avec la collaboration du HCR. Cet inventaire, bien que lui-même incomplet, est le seul à avoir été réalisé dans toutes les provinces du Burundi. Le rapport sanctionnant cet inventaire est assez détaillé et comporte, entre autres distinctions, celles d'entre ces terres relevant du domaine public et celles du domaine privé1. Néanmoins, les terres inventoriées n’ont été ni immatriculées ni enregistrées au bureau du conservateur des titres fonciers. Vieux de 14 ans, cet inventaire indiqua qu'il ne restait déjà plus que 141.266 ha de terres domaniales libres et habitables, soit environ 5% du territoire2 , répartis sur 617 terrains. Cet inventaire fit ressortir cinq catégories de terrain :  Terrain libres et habitables ;  Terrains boisés ;  Terrains non-boisés et non-habitables ;  Terrains privés de l’État ;  Parcs nationaux et réserves naturelles. 1 République du Burundi, Rapport définitif d’inventaire des terres domaniales au Burundi, Janvier 2002. 2 République du Burundi, Rapport définitif sur l’inventaire des terres domaniales au Burundi. Enquête de mars - octobre 2001, Bujumbura, janvier 2002 84 | P a g e Ces 617 terrains et 141.266 hectares étaient répartis comme suit : Provinces Terrains Superficies (ha) Bubanza 7 3.908 Bujumbura- 15 4.856,50 Rural Bururi 29 1.317 Cankuzo 101 17.685 Cibitoke 39 15.084 Gitega 79 7.839,50 Karusi 29 6.229,50 Kayanza 53 967 Kirundo 30 12.740 Makamba 48 19.473 Muramvya 24 534 Muyinga 57 4.432,50 Mwaro 18 1.243 Ngozi 3 235 Rutana 28 14.075 Ruyigi 57 30.647 Total 617 141.266 En dehors de cet inventaire et jusqu’à récemment, on ne dispose que de quelques rapports d’inventaires réalisés sporadiquement et sans harmonisation d’approches méthodologiques, dans les provinces de Ngozi, Gitega, Karusi et Makamba. Ceux qui ont conduit ces inventaires n’ont pas été en mesure de préciser, pour chaque terrain domanial recensé, s’il relevait du domaine public ou privé de l'Etat, s'il appartenait à l’Etat ou à une autre personne publique (commune, société publique ou entreprise parapublique). En 2013, les terres domaniales de certaines communes de la province Ngozi 1 ont été inventoriées et délimitées avec l’appui financier du Projet de la Coopération suisse sur la gestion décentralisée des terres. Le rapport y relatif2 est muet sur les différentes personnes publiques à qui appartiennent les différentes terres ainsi inventoriées. Leur délimitation a été faite à l’aide de bornes végétales. Il ne précise pas non plus si les terres domaniales relevées sont du domaine public ou privé. Les terres inventoriées n’ont fait l'objet d’enregistrement à aucun des bureaux du conservateur des titres fonciers. La même année, un autre travail d’inventaire et de délimitation des terres domaniales a eu lieu dans les provinces de Gitega et Karusi3 avec l’appui de l’Union Européenne, à travers le Programme d’appui à la bonne gouvernance "Gutwara Neza". Enfin, un autre inventaire des terres domaniales a débuté vers mars 2015 et s’est terminé vers la fin de cette même année à Makamba. Il a été mené par les départements de l’Aménagement du territoire et le Cadastre national avec l'appui de l'ONG néerlandaise ZOA dans les communes Mabanda et Vugizo. Cet inventaire s'inscrivait dans le cadre de la préparation de l'ouverture de services fonciers dans les mêmes communes. 1 Kiremba, Marangara, Ngozi, Nyamurenza, Ruhororo et Tangara 2 MEEATU, Département de l’Aménagement du territoire. Rapport sur le travail d’inventaire et de délimitation des terres domaniales. 3 Dans les communes suivantes: Shombo, Nyabikere pour Karusi, Mutaho, Bugendana, Itaba et Bukirasazi pour Gitega 85 | P a g e L'étape suivante devait consister à traiter les conflits déclarés lors de ce travail et enregistrés. Comme les autres, l'inventaire effectué ne fait de distinction ni entre les types de propriétaires publics (Etat, commune, société de droit public) ni entre les types de terres domaniales (publiques ou privées). En octobre 2014 fut officiellement inauguré le projet PAGGF qui vise à inventorier (identification et délimitation) et enregistrer (enquête foncière, mesurage et bornage) toutes les terres domaniales. Il le fait en se référant aux règles et à la procédure définies dans l’ordonnance ministérielle n°770/035 du 13 janvier 2016 portant modalités d’inventaire des biens immeubles domaniaux et le décret n°100/114 du 30 mai 2016 portant procédure d’enregistrement des biens immeubles domaniaux. Entre mars et novembre 2015, une phase de pré-identification de ces terres les chiffra au nombre de 11.862. A ce nombre de terrains domaniaux doivent être ajoutés les 2.683 terres domaniales déjà recensées par le Projet d’Appui à la Bonne Gouvernance (PABG, financé par l’UE), la Direction du Développement et de la Coopération (DDC, Suisse) et l’ONG néerlandaise ZOA, soit un total de 14.545 terres domaniales au niveau national.1 L’ordonnance ministérielle du 13 janvier 2016 portant sur les modalités d’inventaire des biens immeubles domaniaux impose les GPS (Global Positioning System) avec les couches locales SIG (Système d’Information Géographique) et les ortho photographies aériennes comme outils d’inventaires. Le modèle de procès-verbal de la commission d’identification et de délimitation d’un bien immeuble domanial est partie intégrante de cette ordonnance. Il réserve un espace pour le croquis orienté du bien immeuble. L’ordonnance stipule explicitement que « la finalité du travail d’inventaire consiste à mettre à la disposition des pouvoirs publics une base de données géo référencées, attributaires et une cartographie des biens immeubles domaniaux » (article 6). Ces exigences jettent les bases d’une cartographie future des terres domaniales. A la fin du mois de février 2017, le PAGGF rapportait les résultats d’étape suivants :  701 terres domaniales identifiées et limitées sur les 11.862 ciblées, soit 5,91% ;  277 terres domaniales bornées et mesurées sur les 11.862 ciblées, soit 2,34 % ;  2.299 bornes cadastrales posées sur les 90.000 attendues, soit 2,55% ;  3.196 hectares de surface bornés sur les 139.170 à borner, soit 2,30%. Dimension 3: L’inventaire des terres publiques est-il accessible au public ? Note (D) : Les informations contenues dans l’inventaire des terres publiques ne sont pas accessibles au public. Jusqu’à date, les rapports existants sur l’inventaire des terres domaniales sont difficilement accessibles au public. Ils sont rédigés en français, alors que la majorité des Burundais ne parlent ni ne comprennent cette langue. Les rares copies disponibles étaient conservées dans les bureaux des chefs de service ou des bailleurs ayant financé ces inventaires. Ces rapports ne pouvaient être consultés que sur rendez-vous. Dans certains cas, ils ne sont disponibles que sur support électronique conservé par les mêmes responsables2. 1 Projet PAGGF, Rapport d’activité n°11, Janvier-Février 2016, p.16 2 Propos recueillis lors de l’entretien susvisé avec le Directeur Général de l’Aménagement du territoire. 86 | P a g e Dans le cadre de la préparation de son propre inventaire des terres domaniales, le PAGGF a inscrit dans sa planification des résultats à atteindre la « collecte, analyse et intégration des inventaires existants ». En octobre 2016, le PAGGF rapportait que « 100 % des inventaires des terres domaniales déjà réalisés » étaient « collectés et archivés » par ses bons soins. Toutefois, jusqu’à la fin du mois de mai 2017, ces inventaires n’étaient toujours pas accessibles au public parce que leur contenu n’avait pas encore été officiellement présenté au niveau communal. Dimension 4 : La compétence de gestion des différents types de terres publiques est-elle attribuée sans ambiguïté ? 1 Note (C): Il y a des ambiguïtés dans l’attribution de la compétence de gestion des différents types de terres publiques qui affectent quelque peu la gestion des biens. Le Code foncier de 2011 réserve les compétences en gestion domaniale respectivement au(x) ministre(s) en charge des terres et au président de la République, suivant la superficie et le caractère rural ou urbain des terres domaniales. Ces autorités agissent sous le contrôle en amont de la CFN. Dans les faits, la gestion des terres domaniales révèle de récurrentes violations des dispositions légales sur les compétences et la procédure. Le MEEATU l'admet lui-même. En 2008, un rapport interne à ce Ministère dénonçait "le manque d’équité et de transparence observé dans la gestion des parcelles ou des terrains de l’Etat" comme étant "la cause principale des conflits fonciers qu’on enregistre dans les juridictions de notre pays". Ce rapport pointe du doigt "des attributions anarchiques des terres (…) parfois par des autorités qui devaient les protéger, sans considérer aucun critère". Dès l’année 2000 jusqu’à ce jour, poursuit le rapport, "cette cacophonie dans la gestion, au lieu de cesser, s’est accentuée avec la complicité des élus locaux notamment les administrateurs communaux et même par les nouveaux gestionnaires habilités (…)". A l’intérieur du pays, toute autorité entre sans être inquiétée dans la gestion des terres, à faire des attributions comme il l’entend (sic) sans aucun critère d’attribution, le morcellement se fait sans aucun support cartographique". Dimension 5: Des ressources suffisantes sont-elles disponibles pour la gestion des terres publiques par les administrations concernées? Note (D): Les ressources sont très insuffisantes et/ou un manque sensible de capacité organisationnelle aboutit à une mauvaise gestion ou une absence de gestion des terres publiques. En instituant avec le Code foncier une Commission Foncière Nationale et en la dotant en mai 2015 d'un Secrétariat permanent fonctionnel, la gestion des terres domaniales a reçu, pour la première fois, des ressources humaines spécialement affectées à elle. Ceci constitue une première et une avancée significative dans l'organisation de la gestion foncière publique. Cependant, les ressources humaines et financières allouées à cette gestion demeurent largement insuffisantes. Créée par le Code foncier de 2011, la commission foncière nationale, une des structures clés de la réforme et de la gouvernance foncières au Burundi, ne dispose que d'un budget annuel de 80 millions de FBU, soit environ 50.000 USD. Plus de 80% de cette somme est affectée aux missions de terrain des membres de la Commission, soit 68,25% de frais de mission et 14,25% de frais de carburant. En 2016 et en 2017, ce budget est passé respectivement à 64.000.000 puis à 85.653.7432. 1 Les aspects relatifs à la répartition des pouvoirs et des compétences en matière de gestion foncière sont détaillés et élaborés dans l'analyse du panel n° 9 sur l'organisation et les arrangements institutionnels. 2 Voir les lois budgétaires pour les exercices 2016 et 2017. 87 | P a g e Le budget général de l’Etat pour l’exercice 2015 alloua au ministère de l’Agriculture et de l’Élevage la somme de 100 millions FBU pour la délimitation et le cadastrage de son patrimoine foncier. Pourtant, cette activité relève du MEEATU. Le tableau ci-après donne une vue synoptique de l’évolution de certaines prévisions de dépenses liées à la gestion foncière inscrites dans les lois budgétaires : Evolution de certaines dépenses (en FBU) de gestion foncière inscrites aux budgets de l’Etat RUBRIQUES 2015 2016 2017 1) Commission Nationale des Terres et 1 782 089 076 1 532 596 605 1 782 596 605 Autres Biens (CNTB) 2) Commission Foncière Nationale a) Subside à la CFN 80 000 000 64 000 000 85 653 743 b) Guichet foncier 80 000 000 72 000 000 72 000 000 3) Appui à l’aménagement du territoire - - 25 440 000 4) Divers fonciers a) Frais de gestion foncière 7 176 000 5 740 800 5 740 800 b) Programme national de reboisement 250 000 000 150 000 000 150 000 000 c) Equipement antennes provinciales de 51 100 000 - 45 660 000 l’urbanisme d) Equipement antennes provinciales de 63 000 000 37 800 000 37 800 000 l’Aménagement du territoire e) Subsides à l’IGEBU 771 709 706 694 538 735 739 183 512 f) Subsides à l’INECN / OBPE 725 224 353 931 393 206 1 295 001 279 g) Subsides au Cadastre national 421 776 226 379 598 603 379 598 603 h) Mesurage et bornage des centres urbains 24 000 000 et de négoce i) Stratégie de gestion durable des terres 39 000 000 23 400 000 23 400 000 j) Contrepartie au Programme national 56 700 000 53 920 000 53 920 000 foncier k) Contrepartie au renforcement des capacités dans le domaine de la 31 500 000 18 900 000 18 900 000 cartographie et du SIG l) Contrepartie à l’appui à l’élaboration des cartes topographiques numériques des villes 31 500 000 18 900 000 18 900 000 de Bujumbura Dimension 6: Les informations essentielles concernant les attributions de terres publiques à des intérêts privés sont-elles accessibles au public ? 88 | P a g e Note (C): Les informations les plus importantes concernant les attributions de terres domaniales (l’emplacement et la superficie du terrain attribué, les parties prenantes et les conditions financières de l’attribution) sont enregistrées ou partiellement enregistrées mais elles ne sont pas accessibles au public. Dans la pratique, jusqu'à la nomination en juin 2015 d'un Secrétaire permanent de la CFN, les dossiers des demandeurs de terres domaniales étaient analysés par le Directeur Général de l’Aménagement du territoire qui faisait office de Secrétaire permanent. Il était le seul à détenir les dossiers et à les lire au moment de leur analyse par la CFN. Faute de photocopies distribuées aux membres de la CFN, il partageait leur contenu de façon très sommaire et oralement. Cette autorité explique qu'elle trie et présélectionne les dossiers à présenter à la CFN, selon le degré de sérieux qu'elle leur attribue unilatéralement. A travers l’analyse des rapports des activités de la CFN, les signatures des membres de la commission n’y figurent pas, une pratique qui, de l’avis de l’un des membres de la commission, n’est pas de nature à garantir la légitimité et la crédibilité des informations qui s’y trouvent. De nombreuses terres domaniales continuent à être attribuées gratuitement ou à titre onéreux par des autorités n’en ayant pas la compétence, dont des chefs de colline, et ce, sans consulter la commission foncière nationale. Les terres urbaines sont attribuées dans le cadre des logements sociaux en violation du Code foncier en vigueur dans la mesure où elles échappent à l’avis de la commission foncière nationale alors que l’attribution devrait être subordonnée à l’avis de celle-ci. Les baux conclus sur des terres domaniales sont censés être assortis de plusieurs conditions dont le versement périodique d'une "redevance" au Trésor public (articles 44 et 254 du Code foncier). Le type de bail généralement pratiqué au Burundi sur les terres d’origine domaniale est le bail emphytéotique. En vertu du Code foncier, il s’agit du droit d’avoir, pour une durée déterminée, la pleine jouissance d’un immeuble appartenant à autrui, à la charge de le mettre en valeur, de l’entretenir et de payer au propriétaire une redevance en nature ou en argent comme convenu. Cette durée est comprise entre 18 et 50 ans. D’après le Directeur Général de l’Aménagement du territoire, la décision d’octroi d'un droit sur une terre domaniale doit être un préalable à l’obtention d’un contrat de bail emphytéotique sur la même terre. Pour le Directeur Général, certains attributaires mettent en valeur les terrains sur base de cette unique décision et ne procèdent pas, par la suite, à l’enregistrement de leurs baux aux bureaux du conservateur des titres fonciers. Ils échapperaient du même coup au versement de la redevance prévue. Pour lui, c’est le cas pour la plupart et surtout pour les nombreuses terres attribuées par les Gouverneurs de province de 1986 au 9 août 2011, date de promulgation du Code foncier révisé. Celui-ci retira aux gouverneurs de province tout pouvoir en matière d’attribution des terres domaniales. Un rapport sur l’évaluation des terres sous contrat de bail emphytéotique produit en 2009 par le MEEATU dresse une liste nominative de plusieurs terres sous ce régime juridique. La plupart des terres inscrites dans ce rapport n’avait pas respecté les termes de leur contrat. Le rapport expose une liste de 149 terrains. Mais la superficie n'est précisée que pour seulement 81 d'entre eux (54%) couvrant 1.216 ha. 89 | P a g e Pour les 68 restants, l’étendue n’apparaît pas dans le rapport, ce qui fourn it une indication de la très faible connaissance par les services concernés de l'Etat de l'étendue et la localisation des terres domaniales. Les contrats de bail emphytéotique sont élaborés et délivrés par les bureaux du conservateur des titres fonciers. C'est aussi là que les "redevances" y sont versées. Seuls les requérants parvenus à l’a signature d'un contrat de bail emphytéotique et dont les droits réels ont été enregistrés au bureau des titres fonciers paieraient la valeur totale des baux, versée au guichet des Tires fonciers. Néanmoins, cela non plus n'a pu être vérifié auprès du bureau du conservateur des Titres fonciers. Le contribuable est en droit d'attendre que ce bureau fournisse un relevé rigoureux et à jour, entre autres choses, du nombre, du nom, des superficies et des redevances versées, par terrain, au total, par année. Pour le Directeur Général de l’Aménagement du territoire, les terres domaniales officiellement enregistrées sous bail emphytéotique représentent une quantité très négligeable par rapport à celles, selon lui, beaucoup plus nombreuses qui échappent à la connaissance et au contrôle du MEEATU. Par ailleurs, toutes les terres domaniales attribuées par les Gouverneurs de province échappent au même ministère. En bref, celui-ci n’est pas au courant de l'effectif, de la localisation et de l'étendue des terres domaniales concédées par les Gouverneurs de province depuis des décennies. Même les terres domaniales concédées par le ministère avant la promulgation du nouveau Code foncier, en août 2011, ne sont pas répertoriées et celles qui ont été cédées ou concédées ne sont que partiellement connues. L'intérêt et le Trésor publics sont les premiers et les plus gros perdants de toutes ces déficiences dans les politiques, des lois et des pratiques de gestion en matière de transfert du domaine foncier vers des usages privés. b.2) Panel 4 / IGF 2 : Justification et célérité des procédures d'acquisition : l’Etat n’engage une expropriation que dans l’intérêt public général et cette expropriation est menée avec efficacité Au Burundi, la Constitution de la République fonde le droit de tout citoyen à la propriété (art. 36.1). Selon celle-ci, "nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi et moyennant une juste et préalable indemnité ou en exécution d’une décision judiciaire coulée en force de chose jugée"(art. 36.2). Le principe général consacré par l’article 411 du Code foncier est que le processus d’expropriation ne peut être mis en action que pour la constitution d'une "zone protégée" ou l'acquisition d'un terrain nécessaire aux "infrastructures publiques". Cela sous-entend qu’en principe, l’expropriation ne peut en aucun cas être envisagée au profit d’une personne privée. Pourtant, à titre d'exemple, il s’avère qu’en violation de ce principe, l’ordonnance ministérielle n° 760/1534/2013 du 30 octobre 2013 portant approbation d’un modèle de convention d’exploitation minière permet un recours à l’expropriation foncière au profit des sociétés d’exploitation minière1. On est donc ici face à une ordonnance ministérielle manifestement illégale. Il en ira sans doute de même à l'occasion des agrandissements de Bujumbura et des autres centres urbains à des fins d'extension des zones d'habitat privé. 1 Voir annexe à cette ordonnance, articles 4.1.3 ; 4.1.4, et 7.2.3, Bulletin officiel du Burundi n° 10BIS/2013, pp. 1579 et 1581. du chapitre 4 90 | P a g e Dimension 1 : Les cas de transfert de terres publiques au profit d’intérêts privés sont -ils très peu nombreux ? Dimension 2 : Les terres acquises sont-elles converties à l’usage prévu dans un délai raisonnable ? Note (Indéterminée) : Justification et célérité des procédures d'acquisition : Impossible de coter la performance du Burundi pour cet indicateur, faute de données de référence. Deux notes, entre A et D, doivent être attribuées selon une estimation (en pourcentage) de la proportion des terres (i) expropriées à des fins privées et (ii) converties à l’usage prévu au cours des trois dernières années. Les informations relatives à l’expropriation ne sont pas centralisées par un service public et ne sont donc pas disponibles. b.3) Panel 4 / IGF 3 : Transparence et équité des procédures d'expropriation : les procédures d’expropriation sont claires et transparentes et une indemnisation juste est versée rapidement Dimension 1 : Une indemnisation est-elle versée en cas d’expropriation, que les droits soient enregistrés ou non ? Note (D) : Une indemnisation, en numéraire ou en nature, est versée pour certains droits non enregistrés (tels que la possession, l’occupation, etc.). Cependant, les détenteurs d’autres droits non enregistrés (qui peuvent inclure par exemple le pâturage, l’accès, la cueillette, etc.) ne touchent généralement pas d’indemnisation. Bien que le Directeur général en charge de l’Aménagement du territoire affirme que les expropriations sont gelées depuis la promulgation du Code foncier de 2011, la réalité semble tout autre. En témoignent les nombreuses prévisions du budget général de l’Etat observées depuis que ce code est en vigueur. Plusieurs montants sont annuellement prévus et répartis au titre de frais d’indemnisation entre surtout quatre ministères ayant respectivement en charge l’agriculture, l’énergie, les travaux publics et l’aménagement du territoire. Ainsi donc, depuis 2011, nombreuses sont les expropriations déjà terminées, toujours en cours ou simplement programmées, bien qu’aucune d’elle n’ait été formellement portée à la connaissance de la CFN pour avis. A ces expropriations formellement constatées à travers le budget général de l’Etat, il faut en ajouter d’autres, probablement plus nombreuses et moins formelles initiées au niveau communal ou provincial. En règle générale, en cas d'expropriation pour cause d'utilité publique, l'indemnisation a tendance à être budgétisée et versée quand le projet à l'origine de l'expropriation bénéficie d'une aide technique et/ou financière bilatérale ou multilatérale étrangère ou internationale. En revanche, quand aucun soutien n'est prévu de l'extérieur, les indemnisations ne sont généralement pas versées. Cela se produit surtout à l'échelle des communes rurales, dans le cadre des constructions d'infrastructures locales (écoles, dispensaires, pistes, etc.). Quand l'indemnité est versée, elle est rarement juste, dans la mesure où selon le Code foncier (art. 424), elle "doit compenser intégralement le préjudice subi par l’exproprié". La formule prévue par les articles 420 et 241 recèle elle-même une certaine injustice, en ce sens qu’elle postule que seuls les droits réels sont susceptibles d’être indemnisés. Elle peut même paraître modique, dérisoire dans certains cas, malgré qu’un jugement du 22 avril 1970 rendu par le Tribunal de première instance de Bujumbura avait déjà consacré le principe selon lequel "nul ne peut être contraint de céder les droits qu’il exerce sur le sol en vertu de la coutume, si ce n’est pour cause d’utilité publique et moyennant une indemnisation préalable et équitable1 ». 1 Voir tout le jugement dans la Revue administrative et juridique du Burundi, premier trimestre 1971, pp.54-55. 91 | P a g e En effet, faute d’ordonnance ministérielle fixant le niveau minimum des tarifs d’indemnisation1, l’autorité expropriante continue de se référer au niveau maximal des tarifs fixés par l’ordonnance ministérielle de 2008 pourtant frappée de caducité par application de l’article 426 du Code foncier2. Le plus préoccupant dans la procédure d'expropriation est que dans la pratique, celle-ci est entachée de violations systématiques des règles de transparence qui couvrent des transactions frauduleuses sur les gros crédits budgétaires votés annuellement pour les indemnisations. L'enquête préalable exigée lors des expropriations, notamment pour connaître "la nature et l’étendue des droits réels exercés sur les terres dont l’expropriation est envisagée", est souvent bâclée. De connivence avec des autorités territoriales locales et centrales, des personnes se font inscrire sur la liste des personnes à indemniser alors qu'elles ne possèdent aucun terrain sur le site ciblé par l'expropriation. Comme aucune forme de vérification n'est effectuée sur les noms inscrits, de faux propriétaires s'y glissent ou y sont glissés et empochent les indemnités calculées. Ces négligences prennent de plus en plus la forme d'actes délibérés. Ci-après un aperçu des prévisions de dépenses (en FBU) en indemnités d’expropriation inscrites dans les lois budgétaires de l’Etat burundais : INDEMNITES POUR 2015 2016 2017 EXPROPRIATION (1) Karera III 201 999 925 96 258 455 96 58 455 (2) Palais présidentiel 50 000 000 39 941 500 39 41 500 (3) Litiges Ruziba 1987 et 1993 500 000 000 405 000 000 Dimension 2 : Une indemnisation adéquate est-elle accordée si le changement d'affectation des sols se traduit par une perte de droits ou une restriction de l'utilisation des terres? Note (D) : Lorsque des droits sont perdus suite à un changement d’affectation des sols (en dehors d’un processus d’expropriation), il n’y a pas d’indemnisation des personnes concernées. Hors de l'expropriation, la loi burundaise (Code foncier, code civil) ne prévoit pas explicitement d'indemnisation pour les préjudices résultant d'un changement d'affectation des sols. Au Burundi, il n'existe encore ni plan ni schéma officiel d'aménagement du territoire, à quelque échelle géographique qui soit, pas plus qu'il n'existe de plans fonciers communaux agréés et appliqués, où que ce soit. Un changement d'affectation du sol ne saurait donc être établi et constaté par référence à l'un ou l'autre de ces documents inexistants. Toutefois, en pratique et sans que cela reflète des schémas et des plans connus et toujours en vigueur, certains sols peuvent être connus et réputés avoir eu une affectation spécifique. Par exemple, à l'origine, la ville de Bujumbura fut conçue selon un plan d'occupation précis des sols et un schéma de zonage. Une zone industrielle s'étend à l'Ouest de la ville, sur ou proche du littoral du lac Tanganyika et au-delà vers le nord de la capitale. 1 Ordonnance prévue par l’article 426 du Code foncier de 2011. 2 Il s’agit de l’ordonnance ministérielle n° 720/CAB/304/2008 du 20 mars 2008 portant actualisation des tarifs d’indemnisation des terres, des cultures et des constructions en cas d’expropriation pour cause d’utilité publique. 92 | P a g e De nos jours, les usines et les industries s'y concentrent encore. Une aire commerciale et administrative de densification regroupe les bureaux et les services tant publics que privés, ainsi que des commerces. Aujourd'hui, la faiblesse du contrôle administratif est telle que l'occupation des sols n'obéit plus rigoureusement à ces schémas originels, de sorte que même lorsqu'elles sont prises, les mesures partielles d'affectation de sol ne sont pas respectées. A Bujumbura dans les années 1980, toute la bande foncière coincée entre le littoral du lac Tanganyika et l'avenue dite du Large, avait fait l'objet d'une mesure de zonage. Seuls des bâtiments et des espaces destinés au tourisme et aux loisirs devaient y être construits ou aménagés. En soi, il s'agissait d'une mesure d'affectation des sols, qui comprenaient des terres domaniales et des terres privées. Et de fait, en longeant l'avenue du Large, les constructions qui s'y érigent respectent cette affectation, à une ou deux exceptions près. Mais le temps et le défaut de contrôle ont vite laissé des constructions de type résidentiel se dresser, par dizaines, derrière les façades bordant l'avenue. Dans ce cas, le changement d'affectation des sols a simplement été contourné. Dimension 3: Les propriétaires expropriés sont-ils indemnisés dans un délai raisonnable? Note (D): Moins de 50% des propriétaires expropriés reçoivent une indemnisation dans l’année. En principe, en matière d’expropriation, les délais sont indissociables de la procédure. Or, le Code foncier de 2011 intègre dans cette dernière des délais précis et variés. C’est le c as du délai d’un mois d’affichage à la commune de la déclaration provisoire d’utilité publique (art.420 al.2 du Code foncier), un mois pour l’envoi du rapport d’enquête par l’administrateur communal à l’autorité expropriante (article 422 du Code foncier), le délai de déguerpissement fixé par voie administrative ou judiciaire, le délai de réalisation du projet à l’origine de l’expropriation (art.434 du Code foncier, etc.). Or, les délais légaux ne peuvent pas être observés quand l’ensemble de la procédure d’expropriation ne se déroule pas conformément au Code foncier. Dimension 4: Existe-t-il des voies de recours indépendantes et accessibles pour faire appel d’une expropriation? Note (C): Il existe des voies de recours plus ou moins indépendantes pour faire appel d’une décision d’expropriation. Ces voies ne sont pas toujours accessibles aux populations concernées. En matière d’expropriation, la loi a organisé en faveur des expropriés potentiels ou effectifs un certain nombre de recours. Certains de ces recours sont purement administratifs, tandis que d’autres sont plutôt judiciaires. Le tableau ci-après récapitule ces recours en spécifiant, pour chacun d’eux, l’objet du recours, l’autorité à saisir, les délais de recours au sens du délai endéans lequel le recours doit être exerce sous peine de forclusion, avec à chaque fois un commentaire sur l’indépendance et l’accessibilité de l’autorité requise, ainsi que la fréquence du recours. 93 | P a g e Autorité ou Indépendance de Accessibilité de Fréquence du Références Type de recours Objet du recours Délais de recours instance à saisir l’autorité l’autorité recours légales Administratif Mutation foncière en faveur de l’ancien Relativement exproprié, muni facile (3 endroits Conservateur des d’une décision seulement dans Art.415 du Administratif Non précisés Irréprochable Faible titres fonciers administrative ou tout le pays : Code foncier judiciaire de Bujumbura, rétrocession du bien Gitega et Ngozi) exproprié Un mois à compter Faire valoir les droits de l’affichage au fonciers méconnus Administrateur bureau communal Art.421 du Administratif ou susceptibles de Relative Facile Fréquent communal de la déclaration Code foncier l’être lors de provisoire d’utilité l’enquête publique Faire valoir la préférence d’une Recours formel indemnité peu fréquent, les pécuniaire ; Difficilement De préférence expropriés Contester le bien accessible, Art.425 et 428 Autorité avant la prise de Pas préférant souvent Administratif fondé de agissant par du Code expropriante décision d’indépendance passer par les l’expropriation, la l’entremise de foncier. d’expropriation médias et les consistance de ses subordonnés manifestations l’indemnité ou le publiques délai de déguerpissement 94 | P a g e Autorité ou Indépendance de Accessibilité de Fréquence du Références Type de recours Objet du recours Délais de recours instance à saisir l’autorité l’autorité recours légales Après l’expiration Annulation de de quatre mois l’expropriation pour suivant l’entente à Autorité Art.433 du Administratif défaut de paiement l’amiable ou l’arrêt Relative Relative Rare expropriante Code foncier de l’indemnité définitif statuant d’expropriation sur l’indemnité d’expropriation Déclaration de l’intention de 4 mois suivant la Faible, faute de reprendre les biens notification leu notification ou de Autorité expropriés au motif Art.433 du Administratif adressée par Relative Relative publication du expropriante qu’ils n’ont pas reçu Code foncier l’autorité constat de non leur affectation administrative affectation déclarée dans les délais légaux Demande de remise des biens Non précisés : dès expropriés dans que les conditions Art.435 du Administratif Relative Difficile Faible Rare les cas prévus à posées par l’article Code foncier l’article 435 du 435 sont remplies Code foncier 95 | P a g e Autorité ou Indépendance de Accessibilité de Fréquence du Références Type de recours Objet du recours Délais de recours instance à saisir l’autorité l’autorité recours légales 2 mois à dater suivant la notification de la décision Relativement administrative accessible : ces Art.428 et Cour Contester le bien- défavorable au juridictions suivants du administrative ou, fondé de recours ou, à n’existent qu’en Code foncier, là où il n’y en a l’expropriation, la Relativement Recours par très Judiciaire défaut, suivant une endroits au et art.373 et pas, la chambre consistance de indépendante fréquent période de trois Burundi 379 du code administrative de l’indemnité et le délai mois de (Bujumbura, de procédure la Cour d’Appel de déguerpissement. l’introduction du Bururi, Gitega et civile recours Ngozi). administratif demeuré sans suite. Cour Faire annuler administrative ou, l’expropriation, avec là où il n’y en a Art.433 du Judiciaire dommages et Idem Idem Idem Rare pas, la chambre Code foncier intérêts le cas administrative de échéant la Cour d’Appel Art.373 et 379 Restitution des biens du code de expropriés dans les procédure Judiciaire Idem trois hypothèses Idem Idem Idem Rare civile, et prévues à l’article art.435 du 435 du Code foncier Code foncier 96 | P a g e La note C reflète les constatations du tableau ci-dessus qui établissent qu’il existe des voies de recours plus ou moins indépendantes pour faire appel d’une décision d’expropriation mais ces voies ne sont pas toujours accessibles des populations. Dimension 5: Les recours contre les expropriations sont-ils examinés dans un délai raisonnable ? Note (D): Une décision de première instance est prononcée dans moins de 30% des recours contre une expropriation déposés dans les trois dernières années. Cette dimension est difficile à évaluer, faute de disponibilité de statistiques sur le sort des recours administratifs et judiciaires en la matière. Qui plus est, il n’a pas été possible de dépouiller des dossiers déposés ces trois dernières années pour ensuite en tirer toutes les constatations utiles. Néanmoins, on peut avancer des hypothèses en matière de recours judiciaires, en se référant au Guide sur l’expropriation pour cause d’utilité publique produit par Christophe Sebudandi en mai 2013 (Sebudandi, 2013, pp.23 à 27). Ce dernier a analysé plusieurs dossiers, regroupés en dix-huit cas soumis aux juridictions administratives, en rapport avec à l’expropriation. En exploitant le tableau y relatif, on découvre que c’est dans seulement trois cas sur les 18 que la décision judiciaire a été prise dans un délai de trois ans au maximum suivant la saisine, soit dans 16% de cas. Panel 5 : Transparence des procédures et avantages économiques du transfert des terres publiques à un usage privé 5.1) Eléments de contexte additionnels C’est sans doute avec la conscience de la proportionnalité à assurer entre d’une part les superficies domaniales cédées ou concédées et d’autre part les recettes et intérêts publics (environnement, emploi, etc.) à en attendre que les codes fonciers du Burundi (1986 et 2011) ont toujours soumis les cessions ou concessions de grands domaines fonciers à une procédure de contrôle public plus étroite. En effet, les pouvoirs et les compétences en la matière sont déterminés selon la superficie des terres ciblées. Au-delà d’un seuil (25 hectares pour les terres rurales, un hectare pour les terres urbaines), les décisions de cession ou concession des terres domaniales appartiennent au Président de la République par voie de décret après délibération en Conseil des ministres (articles 221 et 222 du Code foncier). Il demeure que l’Etat a encore des préalables fondamentaux à satisfaire pour assurer que la gestion de son domaine et, en particulier, les transferts faits pour un usage privé apportent un avantage économique public :  le patrimoine domanial est mal connu ;  les structures publiques chargées de la gestion de ce patrimoine sont très mal nanties et outillées pour assurer des transactions planifiées, utiles et productives : officiellement, il n’y a pas de plans d’aménagement du territoire de référence ni de plans fonciers locaux, pas de ressources humaines et financières adéquates pour garantir des choix rationnels et productifs, etc. Avec l’appui financier de l’Union Européenne, la GIZ, en étroite collaboration avec le MEEATU, est en train de mettre en œuvre un vaste programme d’inventaire exhaustif des terres domaniales sur tout le territoire burundais. Outre l’inventaire et l’enregistrement des terres domaniales visés à terme, le PAGGF s’emploie aussi à répertorier les terres cédés ou concédés et à constituer des dossiers physiquement et numériquement archivés. Les données ainsi constituées constitueraient une base et une ressource précieuses pour :  aligner tous les nouveaux contrats de bail avec des privés sur une procédure standardisé et digitalisé obligatoire ;  suivre l’exécution des contrats et collecter plus rigoureusement les redevances dues sur les biens immobiliers domaniaux. En attendant le résultat de ces opérations, le patrimoine s’amenuise sous le coup de transactions violant l’ordre des compétences et les règles de procédures légalement admises. A cela s’ajoute un manque de transparence dans lesdites transactions qui favorisent les spoliations et les attributions clientélistes ou partisanes. Les terres sont pratiquement cédées ou concédées gratuitement ou à vil prix, sans distinction de bénéficiaires, ce qui entraîne un manque à gagner pour le Trésor public. Bien plus, les projets d’investissement qui justifient les cessions ou concessions sur les terres domaniales ne font pas souvent l’objet de suivi. Il se pose également un problème de coordination et d’harmonisation des interventions des acteurs impliqués, à telle enseigne que les avancées réalisées d’un côté peuvent être remises en cause de l’autre. Souvent ces chevauchements touchent des services relevant d’une même institution. Les problématiques ci-dessus paralysent la volonté et les efforts à chercher l’implication de la population dans les actions de gestion des terres domaniales et le suivi des projets qui y sont développés. 5.2) Evaluation notée du Panel n° 5 a) Tableau synoptique des notes Panel n° 5 / IGF 1 : Le transfert des terres publiques à un usage privé suit une procédure claire, transparente et compétitive DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Moins de 50% des terres publiques cédées/louées au cours des 3 dernières années Les transactions concernant les l’ont été dans le cadre d’une 1  terres publiques sont transparentes enchère publique ou d’un appel d’offres ouvert (sans compter les transferts pour améliorer l'équité) Moins de 50% de la valeur Les baux sur les terres publiques totale des baux à des intérêts 2  sont collectés. privés portant sur des terres publiques est collectée. 98 | P a g e Panel n° 5 / IGF 1 : Le transfert des terres publiques à un usage privé suit une procédure claire, transparente et compétitive (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les transactions sur les terres Les terre publiques ne sont publiques se font aux prix du rarement, voire jamais, 3 marché (lorsque les terres ne sont  cédées/louées aux prix du pas cédées/louées pour améliorer marché selon une procédure l'équité) transparente Des mécanismes pour permettre au public de bénéficier d’une part Le public bénéficie des éventuels significative des éventuels 4 gains dus à un changement  gains consécutifs à un d’affectation des sols. changement d’affectation des sols sont rarement utilisés et sont appliqués de façon arbitraire Des politiques sont en place pour améliorer l'accès aux Des politiques sont en place pour biens et leur mise en valeur 5 améliorer l'équité en termes d'accès  par les pauvres et les groupes et de mise en valeur des biens. marginalisés mais elles ne sont pas appliquées. Panel n° 5 / IGF 2:Stratégie d'investissement privé DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Des politiques et des réglementations sont en place et appliquées sans ambiguïté et de façon transparente Aucune politique n'est en 1 pour identifier les terres qui peuvent  place. être mises à la disposition d'investisseurs, en accord avec les titulaires de droits fonciers. Des processus politiques sont en place pour l'identification et la sélection d'investissements Aucun processus n'est en 2  bénéfiques sur le plan économique, place. environnemental et socio-culturel, et pour leur mise en œuvre efficace. Les institutions chargées de prendre des décisions sont Les institutions publiques impliquées clairement identifiées mais dans le transfert de vastes étendues elles n'ont ni les capacités ni de terres à des investisseurs privés 3  les incitations nécessaires sont clairement identifiées, sans pour garantir des avantages chevauchement institutionnel ou sociaux ou bien leurs administratif. décisions ne sont pas toujours appliquées. 99 | P a g e Panel n° 5 / IGF 2:Stratégie d'investissement privé DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les institutions publiques impliquées dans le transfert de vastes étendues de terres à des investisseurs privés Aucune politique n'est en mettent en commun les informations place mais certaines décisions foncières et des mécanismes de concernant l'utilisation des 4  coordination efficaces sont en place sols et les droits fonciers sont pour identifier et résoudre coordonnées entre les rapidement les affectations des sols secteurs. conflictuelles (y compris en ce qui concerne les ressources du sous-sol). Le respect par les investisseurs des plans d'activités approuvés fait Aucun suivi et aucune 5 l'objet d'un suivi régulier et efficace  médiatisation des résultats. et des mesures correctives sont prises le cas échéant. Des sauvegardes (socio- économiques, culturelles et Les mesures de sauvegarde environnementales) sont mises en (EIE, EIS, etc.) sont en partie place et appliquées pour empêcher 6  conformes aux meilleures que les investissements concernant pratiques à l'échelle de vastes étendues de terres mondiale. n'enfreignent ou n'abolissent les droits fonciers existants. Les cas où une réinstallation et un Il existe une politique de relèvement s'imposent sont réinstallation mais elle n'est 7 clairement définis et la mise en  appliquée que dans certains œuvre suit des procédures uniformes cas. et transparentes. Panel n° 5 / IGF 3: La mise en œuvre de la politique foncière publique est efficace, cohérente et transparente et elle fait intervenir les parties prenantes locales. DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les plans d'activités des investisseurs (dossier de candidature) présentent des Les informations exigées des preuves en matière de faisabilité investisseurs permettent aux technique, de consultation de la 1 pouvoirs publics d’évaluer les  communauté et de disponibilité retombées des investissements des ressources mais celles-ci ne proposés. permettent pas d'identifier correctement les risques ex ante du projet. 100 | P a g e Panel n° 5 / IGF 3: La mise en œuvre de la politique foncière publique est efficace, cohérente et transparente et elle fait intervenir les parties prenantes locales (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi La procédure d'examen des Une procédure clairement pièces relatives à la demande identifiée est en place pour d’investissement n'est ni 2 approuver les plans  uniforme ni stable dans la durée ; d'investissement et le délai requis dans la plupart des cas, la est raisonnable et respecté. décision est prise plus de 9 mois après le dépôt de la demande. Les titulaires de droits sur des terres présentant un potentiel Les négociations entre les d'investissement ont des droits titulaires de droits et les clairement définis et des investisseurs sont libres, sans 3  incitations à négocier intermédiaire et transparentes ; correctement mais les possibilités les titulaires de droits ont accès d'obtenir des informations aux informations pertinentes. pertinentes et une aide à un coût raisonnable sont limitées. Les modalités de partage des Les dispositions contractuelles bénéfices sont incorporées sont rendues publiques et systématiquement dans les 4 comprennent des mécanismes de  dispositions contractuelles partage des bénéfices avec les pertinentes mais elles ne sont que titulaires de droits. partiellement rendues publiques. Panel n° 5 / IGF 4: Les contrats sont rendus publics, facilement accessibles et les accords sont suivis et appliqués. Des informations détaillées et Des informations exactes et consolidées sur l'étendue faciles à comprendre concernant géographique et la durée des l'étendue géographique et la durée concessions/baux ne sont pas 1 des concessions approuvées sont  mises à la disposition des rendues publiques pour minimiser autorités ou les différents services les chevauchements et faciliter les doivent faire appel à différentes transferts. sources d'information. Il n'y a guère de suivi par des Le respect des mesures de tiers du respect des mesures de sauvegarde relatives aux sauvegarde par les investisseurs 2 concessions est surveillé et  et les mécanismes pour garantir appliqué de manière efficace et une mise en conformité rapide et cohérente. efficace sont quasiment inexistants. 101 | P a g e Panel n° 5 / IGF 4: Les contrats sont rendus publics, facilement accessibles et les accords sont suivis et appliqués (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Il n'y a guère de suivi par des Il existe des voies de recours pour tiers du respect des dispositions les titulaires de droits si les contractuelles par les investisseurs ne respectent pas investisseurs ; les mécanismes 3 leurs obligations contractuelles et  pour un arbitrage rapide et les décisions sont prises dans un efficace sont difficilement délai raisonnable et de manière accessibles aux communautés équitable. touchées et sont favorables aux investisseurs. b) Revue commentée des évaluations par IGF et par dimension b.1) Panel 5 / IGF 1 : Clarté, transparence et compétitivité du transfert des terres publiques à un usage privé Dimension 1: Les transactions concernant les terres publiques sont-elles transparentes ? Note (D): Moins de 50% des terres publiques cédées/louées au cours des trois dernières années l’ont été dans le cadre d’une enchère publique ou d’un appel d’offres ouvert (sans compter les transferts pour améliorer l'équité) La cession ou concession de terres au Burundi ne se fait pas suivant un appel d'offres ouvert au public. En vertu du Code foncier, la procédure légale pour le transfert des terres publiques à un usage privé est sommairement la suivante : quiconque désire obtenir la cession ou la concession d’une terre domaniale privé de l’Etat adresse une requête à l’autorité compétente avec copie au Gouverneur de province et à l’Administrateur communal. Si le dossier est complet, l’autorité compétente prend une décision dans un délai d’un mois à dater de la réception de l’avis de la commission foncière nationale, s’il s’agit d’une terre urbaine. S’il s’agit d’une terre rurale, l’autorité compétente transmet le dossier à l’administrateur communal qui affiche un exemplaire de la demande à la commune pendant trois mois et procède à l’enquête de vacance de terrain. L’objectif de cette enquête est de s’enquérir de la vacance du terrain (son appartenance au domaine privé de l’Etat) et de déterminer la nature, l’étendue et la base juridique des droits fonciers que des tiers pourraient exercer sur la même terre. Au terme de l’enquête de vacance de terre, un rapport est dressé par l’Administrateur Communal et est transmis à l’autorité compétente. Trois mois plus tard, au maximum, l’autorité compétente prend une décision après avis de la commission foncière nationale. En vertu du Code foncier, quatre conditions sont remplies pour qu’une autorité compétente accorde une cession ou concession domaniale. Il faut que (1) le terrain demandé fasse effectivement partie du domaine privé de l’Etat, (2) ne soit pas conflictuel ou les droits invoqués par les tiers ne soient pas fondés, (3) la commission foncière nationale ait marqué son accord et (4) le programme de mise en valeur et les moyens dont dispose le requérant soient jugés sérieux. 102 | P a g e La procédure prescrite ci-haut est déclenchée par juste une demande. Peu importe qu'elle fasse l'objet d'un processus public. A en croire le Directeur Général de l’Aménagement du territoire et de la protection du patrimoine foncier, aucune terre domaniale n’a jusqu'ici été cédée/louée dans le cadre d’une enchère publique ou d’un appel d’offres ouvert si ce n’est que dans le cadre de la privatisation des entreprises publiques dont certains comportent des terrains constituant leurs dépendances. La procédure prescrite par le Code foncier n’est pas non plus de nature à garantir l’inclusion de tous les demandeurs potentiels. Aucune disposition légale ne contraint les autorités compétentes à passer par la procédure d’appel d’offres, comme il en est le cas pour les marchés publics. Par ailleurs, un appel d’offres est toujours difficile à réaliser au Burundi car il suppose la connaissance des terres domaniales et la planification périodique et préalable des terres à rendre disponibles pour l’usage privé. De surcroît, même le code minier omet ce détail important de transparence. Dans le code minier en vigueur, en son article 59, il est stipulé qu’un bénéficiaire d’un permis de recherche peut se voir octroyé le droit d’exploitation sans passer par une compétition à travers les procédures de passation de marché. Dimension 2: Les baux sur les terres publiques sont-ils collectés ? Note (D): Moins de 50% de la valeur totale des baux à des intérêts privés portant sur des terres publiques est collectée Le type de bail généralement pratiqué sur les concessions d’origine domaniale est le bail emphytéotique. La décision d’octroi des droits sur une terre domaniale est un préalable à l’obtention d’un contrat de bail emphytéotique. Notons que certains attributaires mettent en valeur les terrains sur base de cette unique décision et ne procèdent pas, par conséquent, à l’enregistrement de leurs baux aux titres fonciers, échappant du même coup au paiement prévu. Il en est le cas pour la plupart des terres attribuées par les Gouverneurs de province avant la promulgation du Code foncier. Un rapport produit en 2009 fait état de nombreuses terres sous ce régime juridique dont, pour la plupart, les termes du contrat ne sont pas respectés. Le rapport fait état de 149 terrains dont l’étendue est mentionnée seulement pour 81 terrains, soit 1216 hectares. Pour les 68 restants, l’étendue n’apparaît pas. Les contrats de bail emphytéotique sont élaborés et délivrés par les bureaux des titres fonciers. Les redevances y relatives y sont également versées. Il va sans dire que seuls les requérants - très peu nombreux - qui sont allés jusqu’à l’acquisition des contrats de bail emphytéotique et dont les droits réels sont enregistrés au bureau des titres fonciers paient la valeur totale des baux. Le PAGGF s’occupe aussi de la collecte, du scanning et de l’archivage des dossiers des terres concédés. Ses rapports bimensuels indiquent le niveau de progression de la collecte, du scanning et de l’archivage de ces dossiers. A propos de la base de données sur les cessions et concessions domaniales, le rapport n°17 de janvier-février 2017 du PAGGF indiquait que « 170 classeurs contenant toutes les décisions scannées au niveau de toutes les provinces et des décisions ministérielles ont été distribués et sont classés au niveau de la Direction Générale de l’Aménagement du Territoire ». Le même rapport indique que 100% des dossiers de cessions/concessions des hors paysannats ont été classés par commune, puis scannés, archivés et centralisés à la Direction Générale de l’Aménagement du Territoire. 103 | P a g e Ce bilan ouvre des perspectives à court terme pour une meilleure performance du gouvernement sous cet indicateur, si les données recueillies par le PAGGF étaient correctement exploitées. Dimension 3: Les transactions sur les terres publiques se font-elles aux prix du marché (lorsque les terres ne sont pas cédées/louées pour améliorer l'équité) ? Note (D): Les terres publiques ne sont rarement, voire jamais, cédées/louées aux prix du marché selon une procédure transparente Les informations recueillies à la Direction Générale de l’Aménagement du Territoire laissent savoir que le transfert des terres à usage privé ne génère pratiquement pas de recettes à l’ Etat. Actuellement, en vertu d’un décret de 1990, le concessionnaire paie une redevance de 187,5 FBU par hectare par an. Cela revient à dire qu’une redevance annuelle de 1 dollar américain suffirait pour s’acquitter des redevances dues pour 9 hectares sous contrat de bail emphytéotique. Au niveau de la CFN, la question, relative à la revue à la hausse du tarif des cessions et concessions a été débattue et une proposition a été donnée au gouvernement pour statuer sur le cas. Le gouvernement a décidé de maintenir le statu quo arguant qu’en exploitant la terre, les bénéficiaires de ces concessions créent des emplois et grâce au produit tiré de la terre, ils paient les impôts et taxes. La CFN a trouvé que ce tarif est trop bas et, grâce à la présence d’un représentant de l’Office Burundais des Recettes au sein de la commission foncière nationale, la commission aurait proposé que sur chaque contrat de concession soit clairement mentionné que la redevance soit de 187.500 FBU par hectare par an, soit 100 fois plus que le prix actuel, une redevance jugée plus ou moins juste par les membres de la commission. Cette décision serait passée en pratique, avant même qu’il y ait un texte fixant la redevance à ce montant. Evolution des prévisions budgétaires (en FBU) des recettes en locations et redevances domaniales1 Revenus de la propriété 2015 2016 2017 1) Location terrains 18.878.576 138.977.190 1.546.905.420 2) Redevances domaniales 2.782.872.010 2.137.111.564 270.445.058 3) Location d’immeubles 73.634.631 50.736.425 95.386.218 La procédure de location n’est pas non plus transparente comme cela a par ailleurs été indiqué à la première dimension du premier indicateur. En vertu de l’article 257 du Code foncier, les ministres ayant les terres et l’urbanisme dans leurs attributions déterminent par ordonnance conjointe le tarif des cessions et ces concessions. Depuis l’adoption du Code foncier, la gestion des terres rurales et de l’urbanisme rentrent dans les attributions d’un seul ministre. Cette ordonnance n’a pourtant pas encore vu le jour. En réalité, comme les cessions/concessions sont souvent octroyées à des personnalités haut placées dans la sphère du pouvoir en place, la volonté de revoir à la hausse ces tarifs reste incertaine. 1 Nos efforts ont été vains pour tenter d’obtenir une explication à la brusque majoration des prévisions de recettes sur les locations de terrain en 2017 et la chute tout aussi brusque des prévisions de recettes sur les redevances domaniales au cours de la même année. 104 | P a g e Dimension 4: Le public bénéficie-t-il des éventuels gains dus à un changement d’affectation des sols ? Note (C): Des mécanismes pour permettre au public de bénéficier d’une part significative des éventuels gains consécutifs à un changement d’affectation des sols sont rarement utilisés et sont appliqués de façon arbitraire Comme démontré à la dimension 2, la plupart des terres sous bail emphytéotique ne sont pas exploitées dans le respect des clauses contractuelles. Beaucoup d'emphytéotes les font louer aux petits paysans vulnérables fonciers, à des prix peu réalistes et exorbitants alors qu’à leur tour, ils ne paient presque rien à l’Etat. Pour cela, le rapport dont question à cette dimension a recommandé de retirer ces terrains des mains des attributaires. Cette recommandation n’a pas encore été mise en œuvre. De nombreuses cessions et concessions des terres domaniales on t été opérées par des autorités incompétentes. Si par exemple tous ces terrains étaient retirés des mains de ces attributaires, ils aideraient le pays pour répondre, ne fût-ce que partiellement, à l’épineuse question des personnes sans terres. Les terrains recensés dans ce rapport peuvent servir à l’installation de 2600 ménages vulnérables en leur octroyant à chacun un terrain égal à la moyenne nationale (vers 1/2 ha). Dimension 5: Des politiques sont-elles en place pour améliorer l'équité en termes d'accès et de mise en valeur des biens ? Note (C): Des politiques sont en place pour améliorer l'accès aux biens et leur mise en valeur par les pauvres et les groupes marginalisés mais elles ne sont pas appliquées Les principaux documents d’orientation des politiques sectorielles qui sont la vision 2025 et CSLP II inscrit dans ses priorités l’équité pour un accès équitable aux facteurs de production dont la terre. La promotion de la femme, des Batwa et d’autres catégories vulnérables dans toutes les stratégies de lutte contre la pauvreté reste l’une des priorités constamment répétées. Le CSLP II a également entre autre objectif la bonne connaissance du patrimoine foncier de l’Etat et des communes grâce à un inventaire participatif, cartographique et actualisé permettant une meilleure gestion des terres domaniales, notamment pour répondre aux besoins des rapatriés et autres personnes vulnérables et sans terres. De plus, la "Lettre de politique foncière" comporte cinq axes stratégiques dont le premier porte sur la rénovation de la législation foncière et domaniale et le cinquième sur le développement de solutions durables aux problèmes des personnes sans terre et à l’exiguïté des terres. Par ailleurs, le Code foncier, en son article 218, ne permet la cession à titre gratuit qu’au bénéfice des personnes ne disposant d’aucune autre terre. A en croire les informations collectées auprès du Secrétariat de la commission foncière nationale, rares sont les demandes de cession ou de concession formulées par les personnes vulnérables sans terre. Par ailleurs, il semble inenvisageable de répondre aux demandes introduites par cette catégorie de personnes, qui s'avéreraient tellement nombreuses et difficiles à satisfaire. C'est ainsi qu'en cas de nécessité de venir en aide à des vulnérables dans le besoin de terres (rapatriés, victimes des calamités naturelles,...) le ministère de la solidarité ainsi que les responsables administratifs locaux s'impliquent et prennent la responsabilité de filtrage des plus nécessiteux et de l'introduction des demandes. Bien évidemment, rien ne garantit que ces processus ne soient récupérés en fonction du jeu de pouvoirs. Dans les faits, par exemple, les personnes sans terres ne viennent pas en ordre utile dans l'octroi des parcelles au sein des villages ruraux implantés dans plusieurs communes du pays. 105 | P a g e b.2) Panel 5 / IGF 2 : Stratégie d'investissement privé Dimension 1: Des politiques et des réglementations sont-elles en place et appliquées sans ambiguïté et de façon transparente pour identifier les terres qui peuvent être mises à la disposition d'investisseurs, en accord avec les titulaires de droits fonciers ? Note (D): Aucune politique n'est en place (pour identifier les terres qui peuvent être mises à la disposition d'investisseurs, en accord avec les titulaires de droits fonciers) Les terres du domaine public de l’Etat peuvent être concédées pour utilisation tandis que les terres du domaine privé de l’Etat sont, quant à elles, aliénables. Ainsi, les deux catégories de terres peuvent bel et bien être mises à la disposition des investisseurs en fonction de l’utilisation projetée. Les terres appropriées ne peuvent par contre être transférées à des investisseurs pour un usage privé (à l’exception d’une exploitation minière) que moyennant vente pure et simple sur base du consentement du titulaire des droits fonciers. Signalons toutefois que ni la localisation ni l’étendue des terres domaniales n'est expressément connue. A ce jour, aucun inventaire exhaustif de ces terres n'existe, sauf à noter un projet en cours exécuté par la GIZ (sur financement de l’Union Européenne) qui va appuyer dans l’inventaire, le cadastrage, la cartographie et l’immatriculation des terres domaniales sur l’ensemble du territoire. De plus, aucune stratégie long terme d’utilisation des terres domaniales n’est, pour le moment, en place. Les cessions ou concessions des terres domaniales sont accordées dans un contexte d’ignorance de l’affectation projetée des terres domaniales. Des schémas provinciaux d’aménagement du territoire ont été élaborés dans 12 provinces mais n’ont pas encore été validés et exploités. Notons également que les institutions de gestion et de contrôle de la distribution des terres domaniales, telles que la CFN, manquent de ressources pour jouer pleinement leur rôle. Ce qui rend difficiles les efforts de contrer l'hémorragie foncière à tous les niveaux, de la maîtrise de laquelle dépendrait la disponibilité de terres à attribuer aux investisseurs potentiels. Dimension 2: Des processus politiques sont-elles en place pour l'identification et la sélection d'investissements bénéfiques sur le plan économique, environnemental et socioculturel, et pour leur mise en œuvre efficace ? Note (D): Aucun processus n'est en place pour l'identification et la sélection d'investissements bénéfiques sur le plan économique, environnemental et socioculturel Les demandes formulées pour bénéficier des cessions et des concessions des terres domaniales concernent de nombreux secteurs d’activités : l’agriculture, l’élevage, le tourisme, les logements, les infrastructures commerciales et sociales notamment les écoles, les centres de santé et les hôpitaux, l’assainissement, les églises, les infrastructures sportives, les bureaux pour les associations sans but lucratif, etc. En plus des critères mentionnés ci-haut pour l’octroi d’une cession ou concession d’une terre domaniale, une étude d’impact social et environnemental et un plan d’implantation sont parfois exigés en fonction de la nature et de l’ampleur du projet. En analysant les procès- verbaux de la commission foncière nationale, il est difficile de détecter les projets qui intéressent le pays plus que d’autres. C’est vrai que les terrains destinés à la réalisation des infrastructures sociales notamment les écoles et les centres de santé font l’objet de la plus importante la demande mais leur attribution n’est pas automatique. 106 | P a g e Les seules demandes qui semblent bénéficier d’un avis favorable systématique sont celles relatives aux villages, sous prétexte qu’ils rentrent dans la politique nationale du pays. L’entrée des représentants de l’OBR dans la CFN semblait témoigner de la volonté de l’Etat d’attirer les investisseurs privés et de tirer avantage sur le plan économique du transfert des terres publiques à l’usage privé. Dans les faits néanmoins, ceux-ci ne jouent aucun rôle en rapport avec leurs institutions d’origine. Ils sont appelés au même travail que les autres membres de la commission notamment les descentes sur terrain pour vérifier la disponibilité du terrain dont la demande d’attribution a été faite et donner l’avis favorable ou défavorable pour la cession ou la concession. Dimension 3 : Les institutions publiques impliquées dans le transfert de vastes étendues de terres à des investisseurs privés sont-elles clairement identifiées, sans chevauchement institutionnel ou administratif ? Note (C): Les institutions chargées de prendre des décisions sont clairement identifiées mais elles n'ont ni les capacités ni les incitations nécessaires pour garantir des avantages sociaux ou bien leurs décisions ne sont pas toujours appliquées Les institutions intervenant dans le transfert des terres sont le ministère ayant l’Aménagement du territoire et l’Urbanisme dans ses attributions à travers la Direction Générale de l’Aménagement du Territoire, la Présidence de la République du Burundi, la Commission Nationale des Terres et Autres Biens, la Commission Foncière Nationale, la Direction des Titres Fonciers et la Direction du cadastre National. Les rôles de ces différentes structures sont clairement définis à travers le Code foncier et/ou les textes définissant leurs missions. Globalement, au niveau de la définition des missions, il n’y a vraiment pas de chevauchements institutionnels ou administratifs mais dans la pratique, certaines institutions accomplissent des missions qui ne rentrent pas dans leurs attributions ou qui ne sont pas de leurs compétences. Il en est ainsi pour la Direction Générale de l’Urbanisme qui a toujours procédé à la viabilisation et à l’attribution de terrains urbains dépassant 1 ha, alors que cette compétence est dévolue expressément au Président de la République, sur délibération du conseil des ministres. Cette Direction Générale est également en charge de la réception et du traitement des demandes de terres domaniales rurales. Or, curieusement, le Directeur Général assure en même temps le secrétariat de la CFN, censée donner son avis avant l’attribution de ces terres, assurant ainsi un certain contrôle de la régularité de la procédure. Pour ce qui est des moyens d’action, ils s’avèrent insuffisant pour toutes ces institutions. Ceci est illustré par les exemples (i) de la CFN qui connaît un déficit de financements et de ressources humaines, (ii) la direction des Titres fonciers qui sont respectivement dans l’incapacité de s’acquitter de l’obligation d’enquête foncière et (iii) le cadastre qui fait peser sur les demandeurs la prise en charge des frais de déplacement, de logement et de séjour de ses géomètres-topographes, ainsi qu’il en est d’ailleurs pour les antennes de l’aménagement du territoire. 107 | P a g e Dimension 4 : Les institutions publiques impliquées dans le transfert de vastes étendues de terres à des investisseurs privés mettent-elles en commun les informations foncières et des mécanismes de coordination efficaces sont-ils en place pour identifier et résoudre rapidement les affectations des sols conflictuelles (y compris en ce qui concerne les ressources du sous-sol) ? Note (C): Aucune politique de mise en commun des informations foncières ni de mécanismes de coordination efficaces n'est en place pour identifier et résoudre rapidement les affectations des sols conflictuelles mais certaines décisions concernant l'utilisation des sols et les droits fonciers sont coordonnées entre les secteurs. Certaines activités sont coordonnées entre différentes institutions en charge de la gestion foncière, d’autres non. Ci-après deux exemples d’entreprises de coordination. Premièrement, bien que ce cadre soit loin d’être suffisant pour la coordination technique des services étatiques en charge de la gestion foncière, un groupe sectoriel foncier réunit les différents intervenants dans le foncier en vue notamment du partage d’informations. Il importe également de préciser que cet organe est beaucoup plus dépendant des partenaires techniques et financiers de l’Etat burundais, en témoigne la cessation de son fonctionnement des suites de la crise sociopolitique de 2015 et des sanctions qui s’en sont suivies. Deuxièmement, la commission foncière nationale est composée de membres provenant de différents ministères pour permettre un débat à arguments variés avant de donner un avis favorable ou défavorable à la cession ou concession des terres domaniales. Ces efforts de coordination des actions en matière foncière n’empêchent pas malheureusement l’existence de décisions, politiques ou lois contradictoires. A titre d'illustration, un premier exemple. Le décret portant délimitation des aires protégées dans la partie de la réserve de la Rukoko a porté la superficie initiale de 6.000 à 10.000 hectares. Or, parmi les 4.000 hectares supplémentaires figure une étendue considérable de terres qui avaient été attribuées en bonne et due forme aux investisseurs nationaux et qui les avaient mises en valeur. Pour faire face à une telle situation, deux possibilités s’offrent : soit le Président de la République révise le décret pour exclure les terres déjà attribuées soit il sera indispensable d’indemniser les attributaires. Or, une évaluation sommaire estime les coûts d’indemnisation à 4 milliards de FBU. Ce montant calculé sur base des tarifs d’indemnisation d’une ordonnance « obsolète » de 2008, se verrait beaucoup plus élevé en application du Code foncier qui prévoit la négociation à l’amiable de l’indemnité d’expropriation. Ce qui est surprenant c’est le fait que la Direction Générale de l’Aménagement du Territoire et l’Institut National pour l’Environnement et la Conservation de la Nature (actuellement coulée dans l’Observatoire Burundais pour la Protection de l’Environnement) n’ont pas pu échanger des informations d’une aussi grande importance et coordonner leurs interventions. Un deuxième exemple concerne le même ministère. La direction générale de l’eau et celle de l’aménagement du territoire semblent d’avoir pas collaboré durant la rédaction du code de l’eau qui touche sérieusement le domaine du foncier. Les zones tampons prévues par ce code le long des lacs éteignent des droits déjà confirmés des investisseurs et propriétaires de ces espaces. Si la direction générale de l’aménagement du territoire avait été impliquée dans le processus de rédaction du code de l’eau, elle affirme qu’elle aurait proposé d’édicter des directives en matière de mise en valeur des terrains localisés dans ce périmètre plutôt que de les retirer des investisseurs et propriétaires de ces terres. 108 | P a g e En effet, l’État n’a pas les moyens nécessaires en vue de procéder à l’indemnisation des investisseurs et des populations qui exerçaient des droits fonciers dans ce périmètre. Dimension 5 : Le respect par les investisseurs des plans d'activités approuvés fait-il l'objet d'un suivi régulier et efficace et des mesures correctives sont-elles prises le cas échéant ? Note (D): Aucun suivi des plans d'activité agréés des investisseurs et aucune médiatisation des résultats. Alors que la CFN est formée de hauts cadres des ministères et institutions étatiques, donc beaucoup plus appelés par d’autres fonctions, l’expertise indispensable à l’analyse de différents projets et des plans de financement pour un avis éclairé de la commission foncière nationale fait défaut au niveau de son Secrétariat Permanent. Ce dernier se retrouve sans ressources humaines suffisantes ni expertise technique requise, pour analyser en profondeur et objectivement un volume souvent important de demandes. Les membres de la commission foncière nationale qui ont du mal à effectuer une descente sur terrain préalablement à la décision de cession ou concession vont davantage manquer de temps pour le suivi de la mise en œuvre du projet envisagé sur les terrains attribués. Dans ces conditions, le suivi du respect des plans d'activités approuvés reste hypothétique. En outre, les dossiers d’attributions de terres domaniales traités avant le Code foncier de 2011 et la création de la CFN ne sont pas répertoriés et centralisés au niveau de la direction générale de l’aménagement du territoire. Renforcé par l’absence d’une cartographie globale des terres domaniales, cet état de faits rend difficile le suivi du sort des terres attribuées. Avant de pouvoir localiser les terrains cédés ou concédés et d’identifier les occupants, il restera difficile de garantir le respect des plans d'activités approuvés. Il se pose aussi un problème de volonté politique pour assurer le minimum de suivi. Pour rappel, en effet, les recommandations formulées par le rapport de 2009 sur l’évaluation des terres sous contrat de bail emphytéotique n’ont été suivies d’aucun effet. Dimension 6 : Des sauvegardes (socio-économiques, culturelles et environnementales) sont-elles mises en place et appliquées pour empêcher que les investissements concernant de vastes étendues de terres n'enfreignent ou n'abolissent les droits fonciers existants ? Note (C): Les mesures de sauvegarde (EIE, EIS, etc.) pour empêcher que les investissements concernant de vastes étendues de terres n'enfreignent ou n'abolissent les droits fonciers existants sont en partie conformes aux meilleures pratiques à l'échelle mondiale. La loi no 1/010 du 30 juin 2000 portant code de l’environnement de la République du Burundi précise (de l’article 21 à l’article 27) la procédure d’étude d’impact sur l’environnement dans le but de minimiser ou supprimer les effets à court, moyen et long termes sur l’environnement des aménagements et ouvrages. Alors que beaucoup de terrains sont octroyés sans préalablement exiger l’EIE, il y a lieu de douter de la disponibilité de l’expertise requise pour évaluer la qualité de telles études dans les institutions en charge de la gestion des terres domaniales, notamment la CFN et son Secrétariat Permanent. Si le problème de financements ne s’ajoutait à cette carence, l’on pourrait recourir à de l’expertise externe. En outre, le code minier dispose en son article 91 que le bénéficiaire d'un permis d'exploitation artisanale (terrains de 1 ha ou moins - art. 121 du code minier) ne peut, sauf accord préalable des propriétaires, se livrer à des activités sur des terrains de culture ni entraver l'irrigation. De plus, selon l’article 101 du même code, le permis d'exploitation artisanale ne confère aucun droit de propriété sur le périmètre pour lequel il est accordé. 109 | P a g e Par contre, les usages sont loin d’être conformes aux meilleures pratiques à l'échelle mondiale. Dans l’EIE, les populations ne sont pas systématiquement consultées pour avoir leur consentement, de même que l’exécution des projets enfreint parfois aux droits fonciers riverains. Par exemple, une concession de 1.300 hectares a été faite à un investisseur national pour la culture de la canne à sucre et la mise en place d’une usine sucrière. Dans l’exécution de son projet, il a fait dévier un cours d’eau utilisé par des centaines de familles pour l’irrigation, les privant du même coût du droit de bénéficier de ce bien du domaine public et les exposant à l’insécurité alimentaire. Dimension 7 : Les cas où une réinstallation et un relèvement s'imposent sont-ils clairement définis et la mise en œuvre suit-elle des procédures uniformes et transparentes ? Note (C) : Il existe une politique de réinstallation mais elle n'est appliquée que dans certains cas. Le Code foncier donne la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique aux articles 411 à 437. Il requiert la fixation d’un tarif minimum d’indemnisation sur base duquel des négociations sont menées entre l’autorité expropriante et la/les personne(s) expropriée(s). A défaut d’accord à l’amiable, les juridictions compétentes peuvent être saisies. L’indemnité d’expropriation doit être versée préalablement au déguerpissement. Bien plus, des dispositions du Code foncier obligent l’autorité expropriante à mettre en œuvre le projet pour lequel la demande de terrain a été faite, et dans les délais légalement prévus. Sinon des mécanismes de récupération du terrain par le propriétaire sont prévus. Malgré ces dispositions légales, la pratique est toute autre. Rares sont les cas d’expropriation qui respectent les procédures légalement établies. Les personnes expropriées ne sont pas pour la plupart des cas consultées, les décisions tombent d’en haut. Si elles sont versées, les délais et les modalités de paiement des indemnités d’expropriation ne sont ni uniformes ni conformes à la loi. D’un côté, l’Etat se réfère à une ordonnance ministérielle de 2008, fixant des tarifs en déphasage d’avec la réalité des coûts actuels. Cette ordonnance exclue même les terres rurales dans les éléments d’indemnisation. D’un autre côté, certaines personnes obtiennent des indemnités négociées avec l’autorité expropriante. b.3) Panel 5 / IGF 3 : La mise en œuvre de la politique foncière publique est efficace, cohérente et transparente et elle fait intervenir les parties prenantes locales Dimension 1 : Les informations exigées des investisseurs permettent-elles aux pouvoirs publics d’évaluer les retombées des investissements proposés ? Note (C): Les plans d'activités des investisseurs (dossier de candidature) présentent des preuves en matière de faisabilité technique, de consultation de la communauté et de disponibilité des ressources mais celles-ci ne permettent pas d'identifier correctement les risques ex ante du projet. S’il est vrai que les principaux éléments recherchés dans les documents déposés en vue d’une demande de cession ou concession sont relatifs à la faisabilité technique et économique du projet envisagé, la question qui reste posée est celle de la possibilité de les analyser efficacement. A cause de la carence de ressources et de l’expertise requise au niveau de la CFN et de son Secrétariat Permanent (voir aussi ci-haut), les dossiers ne peuvent pas être traités avec la circonspection qu’ils requièrent notamment pour déceler les risques liés aux projets envisagés. Par exemple, une vingtaine de dossiers, non préalablement analysés par des experts, peuvent être étudiés par la CFN en une séance. 110 | P a g e Dans ces conditions, même si les documents à même de les éclairer seraient fournis par les investisseurs, il est difficile de correctement vérifier leur qualité, d’analyser toutes les informations fournies afin de prendre une décision mieux éclairée. Dimension 2 : Une procédure clairement identifiée est-elle en place pour approuver les plans d'investissement et le délai requis est-il raisonnable et respecté ? Note (D): La procédure d'examen des pièces relatives à la dem ande d’investissement n'est ni uniforme ni stable dans la durée ; dans la plupart des cas, la décision est prise plus de 9 mois après le dépôt de la demande. Les sources et garanties de financement exigées de la part des investisseurs avant l’avis de la Commission Foncière Nationale ont pour objet de s’enquérir de la manière dont l’entreprise sera financée. Ce plan d’investissement fait en principe corps avec le document de projet détaillé déposé à la CFN. Comme déjà souligné, la commission n’est pas bien outillée pour analyser ces documents, et dans les délais requis. Pour des terrains attribués aux personnes publiques ou privées en vue de la réalisation des infrastructures sociales (structures scolaires, sanitaires, etc.), l’avis des ministères concernés est nécessaire. D’après le Secrétaire Permanent de la CFN, l’analyse par la commission se fait en moyenne après deux mois. C’est d’autant plus vrai que les réunions de la commission se tiennent en moyenne une fois les deux mois. Une descente sur terrain est généralement programmée par les membres de la commission foncière nationale. Même si, à l’issue de la descente, la commission foncière donne un avis favorable, l’autorité ne prend pas la décision avant que l’investisseur ne fasse enregistrer la terre domaniale « au nom de l’Etat ». En effet, en vertu du Code foncier, aucune terre domaniale non enregistrée ne peut faire objet de cession ou concession. L’investisseur s’occupe de toute la procédure et prend en charge les charges y afférentes. C’est vrai qu’avec l’amélioration du climat des affaires (doing business) le délai de délivrance d’un titre foncer est réduit mais le processus qui mène à cette étape est plus long et complexe pour l’investisseur. Donc, même si le plan d’investissement est approuvé par la commission, l’attribution n’est pas possible avant l’établissement du titre foncier. Notons par ailleurs que la procédure adoptée dans la pratique par les bureaux des titres fonciers pour l’enregistrement des terres, tant domaniales qu’appropriées, n’est pas conforme à celle prévue par le Code foncier. Notamment l’exigence d’une enquête foncière n’est pas respectée. Par rapport au délai de la procédure, à titre illustratif, le Ministère de la Justice, a introduit un dossier de demande de terrain qui a été analysé par la CFN au mois d’Avril 2013 mais dont l’attribution n’a eu lieu qu’au mois de novembre 2014 (décret présidentiel no 100/248), soit plus d’une année et demi plus tard. Il est fort probable que ce délai serait plus long pour les demandes formulées par les investisseurs privés. Dimension 3 : Les négociations entre les titulaires de droits et les investisseurs sont-elles libres, sans intermédiaire et transparentes ? Les titulaires de droits ont-ils accès aux informations pertinentes ? Note (B): Les titulaires de droits sur des terres présentant un potentiel d'investissement ont des droits clairement définis et des incitations à négocier correctement mais les possibilités d'obtenir des informations pertinentes et une aide à un coût raisonnable sont limitées. En principe, lorsqu’un investisseur veut mener des activités sur un terrain approprié, il l’achète purement et simplement. En effet, il sied de rappeler que les populations burundaises exercent la pleine propriété sur les terres qu’elles occupent. 111 | P a g e Le prochain projet d’expropriation pour cause d’utilité publique de grande envergure concernera un gisement minier (Nickel). Dans le contrat entre le gouvernement du Burundi et la société minière, il est stipulé qu’il appartient à l’Etat de déclarer le terrain d’utilité publique et que c’est le titulaire du permis d’exploitation, un investisseur privé, qui s’occupera du versement d’une juste et préalable indemnité aux propriétaires et occupants du périmètre. Dans ce cas, si les populations sont suffisamment informées sur les procédures d’expropriation en vertu de la loi en vigueur, elles pourront négocier d’égal à égal sur base des dispositions du Code foncier. Les négociations entre les titulaires de droits fonciers et les investisseurs privés s’organi sent selon le droit commun des conventions. Généralement, il n’y a personne qui négocie à la place des titulaires de droits fonciers. Les négociations se font en privé, sans transparence sauf s’il s’agit d’un achat impliquant, concomitamment, plusieurs propriétaires de terrains contigus. Les investisseurs sont souvent mieux informés et plus astucieux que les titulaires de droits fonciers. Ils sont généralement plus au courant des opportunités économiques qui s’offrent ou sont en perspective : gisements miniers en vue de l’exploitation artisanale, les zones où les routes vont être bitumées et les chemins de fer construits, les zones qui vont être viabilisées et les alentours, les zones où des quartiers hauts standing vont être construits, etc. Les titulaires de droits ne sont généralement pas informés ou ne font pas ce genre d’analyse anticipée sur les possibles opportunités économiques dans leurs localités. Ainsi, ils négocient en position d’infériorité. Dimension 4 : Les dispositions contractuelles sont-elles rendues publiques et comprennent-elles des mécanismes de partage des bénéfices avec les titulaires de droits ? Note (B): Les modalités de partage des bénéfices sont incorporées systématiquement dans les dispositions contractuelles pertinentes mais elles ne sont que partiellement rendues publiques. Telle que libérée, cette dimension semble échapper au contexte burundais dans la mesure où le droit de pleine propriété est reconnu aux populations. Dans les faits, les contrats liant les investisseurs et les titulaires de droits fonciers sont des contrats entre vendeurs et acheteurs, ou bailleurs et preneurs (cas des aires d’implantation de certaines antennes de téléphonie mobile). Si le consensus est atteint, le transfert ou l’usage des droits fonciers est systématique. Aucun mécanisme de partage des bénéfices ne semble envisageable dans ce cas. b.4) Panel 5 / IGF 4 : Les contrats sont rendus publics, facilement accessibles et les accords sont suivis et appliqués Dimension 1 : Des informations exactes et faciles à comprendre concernant l'étendue géographique et la durée des concessions approuvées sont-elles rendues publiques pour minimiser les chevauchements et faciliter les transferts ? Note (D): Des informations détaillées et consolidées sur l'étendue géographique et la durée des concessions/baux ne sont pas mises à la disposition des autorités ou les différents services doivent faire appel à différentes sources d'information. Il a déjà été souligné que l’Etat n’a pas suffisamment connaissance de l’emplacement des terres domaniales. Le Ministère ne peut pas rendre publiques des concessions foncières accordées, dont il n’a parfois lui-même pas connaissance. Les quelques informations disponibles ne sont pas consolidées. 112 | P a g e Les conséquences liées à cette situation sont quelques fois dramatiques. Dans certaines localités, des terrains dont les concessions ont été accordées aux investisseurs ont, par après, été inclues dans les aires protégées. On pourra compter sur l’inventaire général en cours de réalisation par la GIZ avec le financement de l’UE, pourvu que les services étatiques s’engagent à capitaliser ce processus, les résultats de l’inventaire et à prendre les dispositions nécessaires pour sa mise à jour. Dimension 2 : Le respect des mesures de sauvegarde relatives aux concessions est-il surveillé et appliqué de manière efficace et cohérente ? Note (D): Il n'y a guère de suivi par des tiers du respect des mesures de sauvegarde par les investisseurs et les mécanismes pour garantir une mise en conformité rapide et efficace sont quasiment inexistants. Il a précédemment été souligné avec inquiétude l’insuffisance des ressources humaines et au déficit de l’expertise requise pour l’analyse de la qualité de l’étude d’impact environnemental et le suivi de l’exécution des projets pour lesquels les terrains sont demandés. Ces contraintes sont applicables à cette dimension visant à garantir un suivi efficace des actions des investisseurs bénéficiant des cessions et concessions de terres domaniales. Dimension 3 : Existe-t-il des voies de recours pour les titulaires de droits si les investisseurs ne respectent pas leurs obligations contractuelles et les décisions sont-elles prises dans un délai raisonnable et de manière équitable ? Note (C): Il n'y a guère de suivi par des tiers du respect des dispositions contractuelles par les investisseurs ; les mécanismes pour un arbitrage rapide et efficace sont difficilement accessibles aux communautés touchées et sont favorables aux investisseurs. Les transferts de vastes étendues de terres peuvent engendrer des litiges. Il ne peut y avoir de résolution juste et équitable de ces litiges que s’il existe des institutions accessibles et reconnues, surtout au niveau local, dotées de compétences clairement définies, et la possibilité de faire appel des décisions. Cette partie a pour objet d’analyser cette dimension dans la gouvernance foncière au Burundi. En cas de conflits, les parties peuvent saisir différentes instances de règlement des différends notamment le tribunal de commerce en cas de conflits d’ordre commercial, la cour administrative en cas de conflits opposant l’Etat aux particuliers, les autres cours et tribunaux en cas de conflits entre particuliers. Les jugements traînent naturellement et les populations ne maîtrisent pas les procédures pour saisir les juridictions en général et la cour administrative en particulier. Deux voies non juridictionnelles de résolution des conflits peuvent être empruntées au Burundi en cas de conflits entre les populations et les investisseurs : La médiation par l’ombudsman si l’investisseur est l’Etat et l’arbitrage en cas de conflits entre particuliers. L’institution de l’Ombudsman a été mise en place au début de l’année 2011.Par manque d’expertise en matière foncière au sein du bureau de l’institution de l’ombudsman, de même que suite au jeu de pouvoir lié notamment aux réalités politiques, beaucoup de problèmes y référées ne trouvent pas de solutions. 113 | P a g e L’arbitrage est également un mode alternatif de résolution des conflits organisé par la législation burundaise, mode rapide s’il est choisi par les parties au conflit. Le service d’arbitrage est disponible au Burundi mais reste centralisé à Bujumbura. Les gens y font moins recours par rapport aux tribunaux, sans doute suite à l’ignorance de son existence. Normalement, en choisissant la voie arbitrale, les parties renoncent à la voie juridictionnelle. Toutefois, certaines parties aux conflits n’hésitent pas à vouloir remettre en cause devant des instances juridictionnelles les sentences arbitrales. Panel 6 : Accès public aux informations foncières : Registre et Cadastre 6.1) Eléments de contexte additionnels Dans sa « Lettre de politique foncière », le gouvernement burundais consacre un de ses cinq axes, en l’occurrence le deuxième, à « la restructuration et la modernisation des services en charge de la gestion foncière ». Ce choix résulte entre autres du constat qu’en la matière, « faute de moyens matériels et humains, l’Etat n’est pas en mesure de répondre au rôle qui lui est assigné par la loi ». La Lettre relève la difficulté d’accès du public aux services fonciers, par l’extrême faiblesse de leur déconcentration sur le territoire mais aussi par les modes et les techniques défaillants et désuets d’indexation, de classement et de conservation des données foncières produites. L’axe 2 de la « Lettre de politique foncière » a pour objet « l’amélioration des services publics ayant en charge la gestion foncière ». Il prévoit entre autres actions de :  sauvegarder les archives foncières ;  contractualiser auprès d’opérateurs spécialisés des travaux de numérisation et de digitalisation, pour arriver à « une base de données foncières permettant une gestion transparente de l’information ». Vers la fin de l’année 2014 et le début de l’année 2015, c’est-à-dire lors de ses derniers mois d’opération, le « Projet des Travaux Publics et de Création d'Emplois » (PTPCE) financé par la Banque Mondiale avait amorcé un programme de courte durée (5 mois) pour la numérisation des archives du Département des Titres fonciers. Malheureusement, le projet prit du retard au démarrage et finit par être abandonné avant d’avoir réellement démarré. Financé par l’UE et exécuté par GiZ, le Projet d’Amélioration de la Gestion et de la Gouvernance Foncière au Burundi (PAGGF), d’une certaine façon, prit la relève du PTPCE. Il inscrivit parmi ses objectifs de contribuer à la modernisation du département des Titres fonciers. A cet égard, il s’est fixé, comme résultats à atteindre, de saisir et indexer 12.921 titres1 (environ 18% des titres répertoriés depuis l’Indépendance) et d’en scanner et archiver 2.2302. A la fin du mois de février 2017, le PAGGF rapportait avoir saisi et indexé 23% et scanné et archivé 3% des quantités ciblées. 1 Dont 12.850, 6.441 et 2.442 respectivement pour les circonscriptions foncières de Bujumbura, Gitega et Ngozi 2 PAGGF, Rapport d’activité n° 17 : Janvier-Février 2017, p. 7 114 | P a g e Même si les droits fonciers exercés en vertu de la coutume étaient considérés comme inférieurs à ceux enregistrés, le Code foncier de 1986 les reconnaissait (art. 329). La « Lettre de politique foncière » de 2010 et le Code foncier de 2011 vinrent leur donner plus de poids. Pour répondre aux orientations de l'axe 3 de la « Lettre de politique foncière » sur la décentralisation de la gestion foncière, le Code foncier de 2011 a juridiquement introduit les services fonciers communaux1. Ces services de proximité opèrent sur la base de la participation communautaire. Ils ont été initiés précisément pour corriger l'inaccessibilité et la cherté des services des Titres fonciers. Plus de 40 services fonciers communaux ont déjà été mis en place. Les SFC ne se sont pas substitués aux services des Titres fonciers. Le Code foncier prévoit d'ailleurs une procédure pour la transformation d'un certificat foncier (délivré par le SFC) en un titre foncier (art. 410), pour toute personne qui le souhaiterait. En plus, les SFC n'ont pas compétence pour formaliser certaines catégories de terres, par conséquent prises en charge par les Titres fonciers. En effet, les deux niveaux sont tenus à s'harmoniser, se compléter pour une meilleure gestion du patrimoine foncier national. 6.2) Evaluation notée du Panel n° 6 a) Tableau synoptique des notes Panel n° 6 / IGF 1 : Mécanismes pour la reconnaissance des droits. DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Il existe un processus Il existe un processus transparent et clair et pratique pour efficace pour formaliser reconnaître formellement l'occupation/la possession non l'occupation/possession 1  contestée de terres par les pauvres mais ce processus n’est qui est conforme aux pratiques pas mis en œuvre de locales et accepté localement. manière efficace, uniforme ou transparente. La pleine reconnaissance des droits de propriété peut être établie avec certains documents (par exemple des reçus fiscaux ou un papier attestant d'une vente informelle) Des preuves non écrites peuvent conjugués à des preuves 2  contribuer à établir les droits. ne nécessitant pas la présentation de documents écrits. Les preuves non écrites ont plus ou moins la même force probante que les documents écrits présentés. 1 En pratique, des services fonciers communaux existaient déjà à titre expérimental depuis trois ans, notamment à Ngozi, Gitega et Karusi. 115 | P a g e La loi reconnaît formellement les occupations/possessions de longue date qui ne sont pas contestées mais, du Les occupations/possessions de fait de la façon dont la 3 longue date non contestées sont  législation est mise en reconnues formellement. œuvre, très peu de ces possessions, qu'elles concernent des terres publiques ou privées, parviennent à obtenir une reconnaissance formelle. Panel n° 6 / IGF 1 : Mécanismes pour la reconnaissance des droits (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi L'enregistrement sur demande comprend des Le premier enregistrement sur sauvegardes pour 4 demande des terrains comprend des  empêcher les abus et les sauvegardes et n’est pas limité par coûts ne dépassent pas des frais réglementaires 0,5% de la valeur de la d’enregistrement élevés. propriété. Panel n° 6 / IGF 2: Complétude du registre foncier Le coût total d’enregistrement d’un Le coût total d’enregistrement d’un transfert de propriété est 1  transfert de propriété est faible. compris entre 2% et moins de 5% de la valeur de la propriété. Moins de 50% des enregistrements du Les informations contenues dans les registre/cadastre 2 registres sont incorporées dans les  concernant des terres cartes et traduisent la réalité. privées peuvent être identifiés sur des cartes (enregistrement spatial). Les hypothèques et servitudes privées Toutes les hypothèques et pertinentes sont 3 servitudes privées pertinentes sont  enregistrées mais pas de enregistrées. façon systématique et fiable. Les servitudes publiques pertinentes sont Toutes les servitudes publiques 4  enregistrées mais pas de pertinentes sont enregistrées. façon systématique ou fiable. 116 | P a g e Des copies ou extraits des Les demandes d'accès aux enregistrements des droits informations du registre/cadastre 5  de propriété peuvent sont traitées dans un délai généralement être obtenus raisonnable. sous une semaine. Les informations du registre peuvent être Il est possible de faire des 6  recherchées à la fois par recherches dans le registre/cadastre. parcelle et par nom du titulaire des droits. Panel n° 6 / IGF 2: Complétude du registre foncier (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Des copies ou extraits des enregistrements des droits Les informations contenues dans le de propriété peuvent être 7 registre/cadastre sont facilement  obtenus par quiconque accessibles. s’acquitte des frais formels exigibles, le cas échéant. Panel n° 6 / IGF 3: Fiabilité des informations foncières : les informations contenues dans le registre sont à jour et suffisent pour en inférer la propriété. C : Des liens sont en Les informations sur les droits place pour certains types fonciers gérées par les différents d'informations foncières registres publics sont mais les vérifications sont systématiquement synchronisées de 1  insuffisantes pour façon à réduire les coûts de éliminer un nombre transaction pour les utilisateurs en important de transactions veillant à la complétude de qui pourraient être l'information. frauduleuses. D : Moins de 50% des Les informations contenues dans les informations contenues 2 registres sont à jour et reflètent la  dans le registre/cadastre réalité sur le terrain. sont à jour et reflètent la réalité sur le terrain. 117 | P a g e Panel n° 6 / IGF 4: Rentabilité et soutenabilité financière : les services de l'administration foncière sont dispensés de manière efficace et rentable A : Le total des frais et droits d’enregistrement perçus est supérieur aux frais de fonctionnement du registre. (Le total des frais de fonctionnement incluent tous les coûts hors investissement en capital (c’est-à-dire Une tarification adaptée rend le salaires, fournitures, frais 1   registre financièrement soutenable. de transport, etc.) liés au fonctionnement du registre.) C : Le total des frais et droits d’enregistrement perçus représente entre 50% et 90% des frais de fonctionnement du registre. Panel n° 6 / IGF 4: Rentabilité et soutenabilité financière : les services de l'administration foncière sont dispensés de manière efficace et rentable (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi L'investissement est suffisant pour satisfaire la demande et fournir des D : Il n'y a que peu ou pas services de qualité qui sont d’investissement en 2 clairement définis et respectés  capital dans le système (informations foncières fiables, pour l’enregistrement des accessibles et financièrement droits fonciers. abordables). Panel n° 6 / IGF 5: Les frais et droits d'enregistrement sont déterminés de façon transparente pour couvrir les coûts de la prestation de services. A : Un système et un barème clairs des frais et La logique suivie pour déterminer droits d’enregistrement les frais et droits d'enregistrement pour les différents est claire ; le barème des frais et 1  services sont mis à la droits est accessible au public et les disposition du public et versements sont dûment des reçus sont délivrés comptabilisés. aux usagers pour toutes les transactions. 118 | P a g e C : Des mécanismes pour repérer les Les paiements informels sont comportements illégaux 2  découragés. des employés ne sont en place que dans certaines administrations foncières. C : Des normes de qualité de services ont été Les normes de qualité des services établies mais elles n’ont 3 sont rendues publiques et suivies  pas été rendues publiques, régulièrement. et peu d’effort est fait pour contrôler le respect de ces normes. b) Revue commentée des évaluations par IGF et par dimension b.1) Panel 6 / IGF 1 : Mécanismes pour la reconnaissance des droits Dimension 1: Existe-t-il un processus transparent et efficace pour formaliser l'occupation/la possession non contestée de terres par les pauvres qui est conforme aux pratiques locales et accepté localement ? Note (B): Il existe un processus clair et pratique pour reconnaître formellement l'occupation/possession mais ce processus n’est pas mis en œuvre de manière effica ce, uniforme ou transparente. Tout part de la Constitution du Burundi qui pose le principe de propriété inhérente à la personne. Son article 36 dispose que « Toute personne a droit à la propriété. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi et moyennant une juste et préalable indemnité ou en exécution d’une décision judiciaire coulée en force de chose jugée ». Le Code foncier organise la propriété et ses démembrements (l’emphytéose, l’usufruit, l’usage et l’habitation, les servitudes, l’hypothèque). Il clarifie en outre le régime des terres privées et des terres domaniales. En vertu de l'article 313, dans le titre sur le régime des terres des personnes privées, la propriété foncière est établie, soit par un titre foncier délivré par le service des Titres Fonciers, soit par un certificat foncier délivré par le service foncier communal. Le Code foncier définit les modalités d'obtention de ces deux documents. Parmi elles une enquête foncière (art. 328-332 pour le titre foncier et 393-396 pour le certificat foncier) doit se réaliser sur le lieu de situation du terrain objet d'enregistrement ou de certification pour établir la situation juridique et les droits réels exercés sur la terre objet de la procédure. Cette enquête publique est contradictoire permet de recueillir les éventuelles oppositions dont la persistance suspend le processus. Dans la pratique, cette enquête pourtant obligatoire et primordiale n’est pas jusqu’aujourd’hui réalisée au niveau du service des Titres fonciers. Le motif avancé est le manque de moyens pour le faire, ce qui constitue une entrave au bon fonctionnement de ce service et partant sur la crédibilité des documents ainsi délivrés sans vérification ni transparence et en dehors de toute procédure légale. 119 | P a g e La seule occasion de visite du terrain se passe pendant l'arpentage et bornage du terrain par les services du Cadastre. Notons que les deux services sont des administrations personnalisées juridiquement distinctes. Le Conservateur des Titres fonciers n'a par conséquent pas de mainmise sur le processus d'arpentage et de bornage, qui pourrait constituer l'enquête foncière. Parmi les autres documents exigés, les services des Titres Fonciers se font juste communiquer le PV d'arpentage et de bornage établi par le Cadastre. Sous cet angle, le Code foncier est loin d’être appliqué et les informations disponibles ne sont pas fiables. Pour ce qui est des services fonciers communaux, la procédure d'enquête foncière est plus respectueuse du prescrit du Code foncier. Une commission de reconnaissance est mise en place au niveau de chaque colline. Elle est inclusive et représentative de l'administration et de la population (art. 394). Le service foncier communal est plus accessible notamment du fait de sa proximité géographique pour les populations rurales, beaucoup moins coûteux et plus rapide. Une large publicité foncière est réglementée, avec la possibilité d'exprimer une opposition tout au long du processus de reconnaissance des droits fonciers. Dès lors, dans les communes dotées de ces services fonciers communaux, les propriétaires ont le choix entre l’immatriculation (titre foncier) et la certification (Certificat foncier). Il faut toutefois noter qu'à ce jour, seuls 43 services fonciers communaux existent, qui pour la plupart fonctionnent grâce aux appuis de partenaires externes à la commune. La question de leur appropriation, leur pérennisation et leur généralisation reste posée. Dimension 2: Des preuves non écrites peuvent-elles contribuer à établir les droits ? Note (B): La pleine reconnaissance des droits de propriété peut être établie avec certains documents (par exemple des reçus fiscaux ou un papier attestant d'une vente informelle) conjugués à des preuves ne nécessitant pas la présentation de documents écrits. Les preuves non écrites ont plus ou moins la même force probante que les documents écrits présentés. Au-delà du prescrit légal, les gens pauvres peuvent faire valoir leurs droits fonciers oralement ou verbalement. A l’épreuve, comme lors d’une contestation basée sur un droit foncier portée devant les conseils d’élus collinaires, les Bashingantahe ou les tribunaux, quand aucune des parties au conflit n’a de preuve écrite à fournir, il est traditionnellement admis de recourir à d’autres modes de preuve non écrites comme le témoignage. En attendant la réussite de la politique de sécurisation foncière, les autres voies de preuve non écrites sont admises. Le législateur a prévu une disposition transitoire permettant au propriétaire d’une terre de prouver son droit par des preuves non écrites. En effet, l’article 456 du Code foncier dispose qu’ « en attendant la mise en œuvre définitive de la réforme foncière en ce qui concerne l’enregistrement aux Titres Fonciers et au Service Foncier Communal, le droit de propriété foncière peut être prouvé par toutes voies de droit ». Ceci laisse entendre que le propriétaire lésé dans ses droits peut recourir à d’autres mécanismes de preuve en la matière comme le témoignage, les écrits signés par les notables ou les responsables administratifs locaux attestant l’appartenance d’une terre déterminée. 120 | P a g e Il sied toutefois de souligner que ces autres moyens de preuve peuvent facilement se détruire ou se manipuler. C'est le cas notamment pour les témoins qui peuvent être subornés ou mourir, les petits papiers mal écrits et pouvant facilement se perdre. La réforme foncière avait notamment pour motivation de combler ces lacunes par une documentation foncière dont l'établissement et la conservation sont mieux organisés. Dimension 3: Les occupations/possessions de longue date non contestées sont-elles reconnues formellement ? Note (C): La loi reconnaît formellement les occupations/possessions de longue date qui ne sont pas contestées mais, du fait de la façon dont la législation est mise en œuvre, très peu de ces possessions, qu'elles concernent des terres publiques ou privées, parviennent à obtenir une reconnaissance formelle. Déjà le Code Civil (décret du 30 juillet 1888) reconnaissait la prescription trentenaire dans les termes et conditions suivants :  toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans sans que celui qui allègue cette prescription soit obligé d’en rapporter un titre, ou qu’on puisse l ui opposer l’exception déduite de la mauvaise foi (Article 647 Code civil livre III).  La bonne foi est toujours présumée, et c’est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver. Il suffit que la bonne foi ait existé au moment de l’acquisition (Articles 650 et 651 Code civil Livre III).  La détention précaire pour autrui ne peut toutefois pas servir de base à cette prescription (Article 648 Code civil Livre III). Cette disposition a été consacrée par la loi du 1er septembre 1986 portant Code foncier du Burundi. Dans le même prolongement, la loi de 2011 portant révision du Code foncier de 1986 reconnaît formellement l’occupation/possession de longue date non contestée lorsqu’elle dispose en son article 22 que : « Celui qui acquiert de bonne foi un immeuble et en jouit d’une manière paisible, continue, publique et non équivoque pendant trente ans, en acquiert la propriété par prescription. Est réputé avoir acquis de bonne foi un immeuble quiconque a la croyance erronée mais non fautive en l’existence d’un droit foncier de la personne qui lui a cédé ledit immeuble. » » La bonne foi est toujours présumée et c’est à celui qui allègue la mauvaise foi de la prouver. » La détention précaire pour autrui ne peut servir de base à cette prescription ». La certification permet, au même titre que l’immatriculation, un accès à la formalisation légale des droits fonciers d’origine coutumière ou à la suite des transactions. Notons également que la loi reconnaît et protège « tous les droits réels exercés par toute personne physique ou morale de droit privé en vertu de la coutume ou d’un titre d’occupation délivré par l’autorité compétente sur des terres non domaniales, se traduisant par une emprise personnelle ou collective, permanente et durable, selon les usages du moment et du lieu et selon la vocation du terrain ». (article 380, CF). Ces droits privatifs peuvent faire l’objet d’un certificat établi par le service foncier communal compétent territorialement (article 380 CF). 121 | P a g e La pratique des services fonciers communaux a déjà montré que ce type de droits peut être certifié quand bien même les demandeurs ne seraient pas en possession de documents écrits. Le PV établi lors de la reconnaissance collinaire permet de recueillir les avis des personnes concernées, de documenter la situation du terrain objet de certification (mode d'acquisition, droits réels y exercés,...) et de fonder la décision de la Commission. C'est sur base de ce PV que le certificat foncier est établi. Dimension 4: Le premier enregistrement sur demande des terrains comprend-il des sauvegardes et est-il délié de limites imposées par des frais réglementaires d’enregistrement élevés ? Note (C): L'enregistrement sur demande comprend des sauvegardes pour empêcher les abus et les coûts ne dépassent pas 5% de la valeur de la propriété. Pour les Titres fonciers, un premier enregistrement peut avoir lieu pour le cas des terrains situés en milieu urbain ou rural. Les terrains urbains sont attribués par les services de l'Urbanisme. L'acquisition d'un terrain, souvent pour usage résidentiel, est conditionnée par le paiement des frais de viabilisation dépendant de la superficie et du coût de la viabilisation et d'une taxe de bâtisse (6 pour mille). Pour procéder à l'enregistrement d'un tel terrain, il faut de prime abord le faire cadastrer, ce qui demande le paiement de 20.000 FBu pour les frais de bornage. Les frais de déplacement des techniciens sont supportés par le demandeur. Au niveau des Titres fonciers, le statut du terrain, qui était en location, change en un contrat de vente dont le coût s'élève à la superficie en m2 multiplié par un taux qui est fonction de l'emplacement du terrain. Le coût de l'enregistrement des terrains ruraux est calculé sur base de la superficie et en fonction de leur usage (agricole ou résidentiel). Mais il faut pour cela être en détention d'une attestation de possession délivrée par l'autorité communale dont le prix s'élève à 5.000 FBu. Pour un terrain acheté, l'attestation de possession est subordonnée au paiement de la taxe de transaction de 3% du prix d'achat. Ce taux n'est pas uniforme pour toutes les communes, certaines appliquent des taux plus élevés. Au niveau des SFC et pour déterminer les frais qu’elles prélèvent pour acter une vente foncière, certaines communes combinent gardent la formule de calcul par pourcentage à la formule de calcul par superficie. D'autres calculent le coût du certificat en fonction de la superficie du terrain. Certaines communes ont dû revoir à la hausse les frais de certification pour plus ou moins les ajuster au coût de production du certificat. Mais dans l'ensemble, sauf pour les terres achetées dans le cas des services appliquant la formule d'un pourcentage du prix d'achat du terrain, les frais de certification sont a priori abordables. Les SFC et les Titres fonciers assurent la sauvegarde des informations en rapport avec la production et la délivrance des documents de propriété. Les Titres fonciers conservent un duplicata du titre foncier original tandis que les SFC gardent un registre foncier dont les informations (originales) permettent de reconstituer un certificat en cas de perte ou de destruction. 122 | P a g e b.2) Panel 6 / IGF 2 : Complétude du registre foncier Dimension 1: Le coût total d’enregistrement d’un transfert de propriété est-il faible ? Note (C): Le coût total d’enregistrement d’un transfert de propriété est compris entre 2% et moins de 5% de la valeur de la propriété. Ici, il est question d’apprécier si les coûts de transfert de propriété sont déterminés de manière à encourager l’acquittement des obligations de déclaration et paiement (coûts suffisamment bas) d’une part, et d’autre part, à permettre aux services habilités à assurer les opérations d’administration y relatives (enregistrement, mise à jour, contrôle etc.). En cas de transfert d’une propriété foncière à la suite d’une vente, une série de documents sont requis avant de payer les frais officiels d’enregistrement. Les coûts dépensés lors de la collecte de ces documents ne sont pas tenus en compte par les services publics chargés d’administrer les opérations de transfert. En cette matière, l’article 3 du décret-loi n° 1/13 du 24 novembre 1986 ci-haut cité et portant fixation des droits d’enregistrement en matière foncière était libellé tel qu’il suit : « Il est perçu un droit proportionnel de 6% à l’occasion de toute mutation de propriété ou part de propriété immobilière enregistrée ». Il a été modifié par la Loi n° 1/16 du 6 août 2008 portant Modification de certaines dispositions du Décret-loi n° 1/13 du 24 novembre 1986 (B.O.B., 2008, n° 8, p. 1450), réduit le droit proportionnel de moitié (3%). Le droit proportionnel se calcule sur base d'une expertise faite par les agents des titres fonciers et de l’Office Burundais des Recettes (OBR). Il n’y a pas recours à des expertises indépendantes commanditées par l’Etat sur la valeur des propriétés mises en vente. Pour déterminer la valeur de la propriété, on part de la valeur marchande c'est-à-dire celle déclarée par les parties au contrat de vente. Ensuite, l’expert immobilier des titres fonciers procède à l’expertise. Enfin, l’OBR effectue la contre-expertise et on détermine l’assiette imposable. Le taux de 3% ne s'applique pas automatiquement à la valeur de l'expertise. Cette dernière est comparée à la valeur d'acquisition et le calcul des frais à payer se fera sur la plus élevée des deux1. Il faut ajouter à cette taxe d’autres dépenses effectuées lors de l’opération de mutation comme les frais de dossier, les frais de déplacement des agents des services des titres fonciers et de l’OBR, les frais payés à la Mairie pour l’attestation de non-redevabilité. Ces frais informels s’ajoutent aux frais officiels de transfert des propriétés fixés à 3%. Il n'est pas aisé de discuter les frais de transfert de propriété foncière pour les terres ayant fait l'objet d'un certificat foncier. Le Code foncier l'a prévu mais les modalités de sa mise en application, n'ont pas encore été fixées. 1 Entretien avec le Conservateur des Titres foncier de la Circonscription de Ngozi. 123 | P a g e Dimension 2: Les informations contenues dans les registres sont-elles incorporées dans les cartes et traduisent-elles la réalité ? Note (D): Moins de 50% des enregistrements du registre/cadastre concernant des terres privées peuvent être identifiés sur des cartes (enregistrement spatial). Le procès-verbal d’arpentage et de bornage contient un plan parcellaire orienté avec indication des longueurs des côtés, des mesures des angles et de la superficie de la parcelle. Ce plan parcellaire n'est pas géo-référencé. Il est repris par les services des Titres Fonciers qui l'incorporent dans le titre délivré. Selon les informations recueillies au Cadastre National, les plans parcellaires alimentent la production d'un plan d'ensemble qui renseigne sur la localisation technique d’un terrain, les dimensions et les numéros des parcelles avoisinantes. Les informations ne sont pas fiables, car, a-t-on indiqué au consultant CAGF lors de la recherche, faute de moyens, les services du cadastre ne procèdent pas à l'actualisation du plan d'ensemble. En outre, un nombre important de modifications sur le terrain ne sont pas renseignées dans le registre. L’idéal reste le transfert des données physiques vers le Système d’Information Géographique (SIG) avec un référentiel unique. Des travaux de ce genre ont eu lieu dans quelques endroits comme au centre urbain de Ngozi, mais l'approche et les moyens disponibles ne permettent pas de rattacher systématiquement les mesurages effectués par le Cadastre à ce système. Le Cadastre estime à moins de 10% l'enregistrement spatial des propriétés du territoire. Au niveau des services fonciers communaux, la technique de réalisation d'un plan parcellaire permet de lever au GPS un point de rattachement au SIG. Seul le projet foncier de la Coopération Suisse (6 communes de Ngozi, soit 5% des communes du Burundi) a intégré la mise en place de la cartographie d'ensemble, manuellement et par SIG. Le système, sous expérimentation, permet également de rattacher les terres titrées, les terres cadastrées et les terres domaniales. Toutefois, les retards du processus de modernisation des services fonciers déconcentrés de l'Etat n'a pas encore permis de reprendre cette initiative, toujours gérée au niveau du projet. Dimension 3: Toutes les hypothèques et servitudes privées pertinentes sont-elles enregistrées ? Note (C): Les hypothèques et servitudes privées pertinentes sont enregistrées mais pas de façon systématique et fiable. L'article 150 du Code foncier rend obligatoire l’inscription des hypothèques, sous réserve des dispositions en rapport avec les hypothèques légales. En vertu de cet article, nulle hypothèque n’existe si elle n’est inscrite sur le titre foncier ou certificat foncier de l’immeuble ou du droit immobilier qu’elle grève. Toutes les hypothèques et servitudes privées pertinentes ne sont pas systématiquement enregistrées parce que non portées à la connaissance des services des Titres Fonciers ou du service foncier communal. Les servitudes figurent sur le procès-verbal d’arpentage et de bornage avec une description de tout le terrain. Pour rappel, ce croquis est repris dans le titre foncier. Au niveau des services fonciers communaux, les servitudes sont renseignées dans le PV de reconnaissance et sont repris sur le certificat foncier. Lorsque la servitude intervient après l’obtention d’un titre foncier ou d'un certificat foncier, le propriétaire devrait procéder à l’enregistrement de la servitude, opération faite gratuitement sans frais supplémentaires. 124 | P a g e Les servitudes privées devraient être inscrites à la diligence du propriétaire du fond servant car la part ayant servi à la servitude lui revient à l’extinction de la servitude conformément aux articles 129 et suivants du Code foncier. Probablement que certains propriétaires des fonds débiteurs ne voient pas l’intérêt de l’enregistrement. Pourtant, le propriétaire du fonds servant a intérêt à le porter à la connaissance des services publics de l’État car l’impôt foncier par exemple est réduit conséquemment. Les services des titres fonciers tiennent à jour les registres consacrés à l’inscription hypothécaire. A défaut de données statistiques fiables, les services des titres fonciers estiment que certaines banques créancières cachent certaines hypothèques pour des raisons de convenance avec les demandeurs de crédits pour ne pas surcharger par exemple le titre. La situation n'est pas différente au niveau des services fonciers communaux. En effet, bien que des crédits soient obtenus auprès des institutions de micro-finance suite à la mise en garantie de certificats fonciers, il n’existait aucun signe indiquant qu’un service foncier avait été approché pour une requête d'inscription hypothécaire. A ce niveau se pose également un problème de procédure non encore définie pour cette inscription. Que ce soit pour les Titres fonciers ou le SFC, cette lacune rentre dans la problématique générale de la mise à jour des titres de propriété, notamment par l'inscription des mutations et des changements survenus sur un terrain enregistré ou certifié. Il y a lieu également d'avancer que les propriétaires ont peur des frais liés à cette inscription. Le fait est qu’en pratique, il est difficile de contraindre les gens à procéder à l'inscription de ces changements car les transactions se passent souvent à l'insu des services concernés. Dimension 4 : Toutes les servitudes publiques pertinentes sont-elles enregistrées ? Note (C): Les servitudes publiques pertinentes sont enregistrées mais pas de façon systématique ou fiable. Le responsable de la Division « Domaine et Recouvrement » de la Direction des Titres a signifié au consultant du CAGF sur le Panel 3 qu’il ne connaît pas de cas de servitudes publiques pertinentes enregistrées dans le registre journal. D’après les informations recueillies auprès des services du cadastre national, en cas de lotissement, l’Office National des Télécommunications (ONATEL), la Régie des Eaux (REGIDESO) et les Services Techniques Municipaux (SETEMU) reçoivent des copies des plans de chaque lotissement réalisé pour pouvoir localiser les endroits d’implantation électrique, les poteaux, les canalisations etc. Les litiges probables concernent les empiètements des propriétaires sur les servitudes. En son article 58, le Code de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Construction promulgué le 12 août 2016 dispose : « Les opérations d’urbanisme sont initiées en tenant compte du schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme et des plans local et particulier d’urbanisme. Il est également tenu compte de toutes les servitudes légales, notamment en matière de voirie, d’alignement, de circulation, de transport d’énergie, d’installations aéronautiques, de protection des ressources en eau, d’assainissement et de protection de l’environnement ». Il ne reste qu’à les faire inscrire. 125 | P a g e Dimension 5: Les demandes d'accès aux informations du registre/cadastre sont-elles traitées dans un délai raisonnable ? Note (B) : Des copies ou extraits des enregistrements des droits de propriété peuvent généralement être obtenus sous une semaine. La consultation des registres disponibles aux services des titres fonciers n’a pas permis au consultant du CAGF de lire les demandes de copies ou d’extraits d’enregistrement des droits de propriété. En principe, on ne délivre pas le duplicata du titre foncier. En cas de perte d’un titre, le demandeur cherche une attestation de perte et fait le tour des banques qui certifient que le titre de l’intéressé n’a pas été donné en garantie. Les services des titres fonciers établissent un nouveau titre et annule le duplicata. Bon nombre des propriétaires tant privés que publics demandent des attestations de possession de l’unique immeuble ou de non possession de parcelle. Sur 10 demandes enregistrées entre août et septembre 2014, le consultant du CAGF a pu se rendre compte que les réponses étaient données en trois jours, soit en moins d’une semaine. Au niveau des services fonciers communaux, la demande de copies ou extraits n'a pas encore été réglementée dans le détail. L'article 406 du Code foncier exige au demandeur d'un duplicata du certificat foncier la production « d'une déclaration écrite de perte ou de destruction délivrée par l'officier de police judiciaire du ressort ». A défaut de faire passer le requérant au niveau des institutions de micro-finance et des banques, certains services ont introduit une déclaration de décharge vis-à-vis du service. Le duplicata est délivré dans moins d'une semaine. Dimension 6: Est-il possible de faire des recherches dans le registre/cadastre ? Note (A): Les informations du registre peuvent être recherchées à la fois par parcelle et par nom du titulaire des droits. Le système de classement actuel aux titres fonciers se fait à l’aide de fardes en papier carton empilées les unes sur les autres, faute de « fardes à suspendre », plus coûteuses. Le classement numérique (par numéro d’ordre) a été préféré à un classement alphabétique. Il est facile d’avoir des informations sur une parcelle quand on dispose du numéro de la parcelle et du nom du bénéficiaire. Les dossiers physiques sont rangés selon l’ordre numérique. Les duplicata des titres fonciers sont classés suivant l’ordre alpha numérique (alphabet et numéro). On peut donc retrouver les informations recherchées même quand on ne dispose pas du nom du propriétaire de la parcelle sur base des fiches parcellaires ou des fiches-facturiers, quand on connaît le nom de celui qui a effectué les paiements. Les problèmes auxquels on peut se heurter sont d’ordre administratif. Un dossier réclamé pour une vente publique, un transfert d’une propriété ou demandé en consultation par la direction des titres fonciers peut prendre du temps avant d’être reclassé et dans l’entretemps, il est introuvable pour la recherche ou d’autres services, internes ou externes. Au niveau des services fonciers, les dossiers parcellaires sont classés par colline, soit par ordre alphabétique soit par ordre numérique. Toutes les opérations successives rentrent dans la chemise parcellaire jusqu'à l'établissement du certificat foncier. 126 | P a g e La connaissance du nom du demandeur ou du numéro correspondant à une parcelle donnée permet d'accéder relativement facilement aux informations. Certains services fonciers tiennent également un répertoire numérique des dossiers, ce qui rend plus aisée la recherche. Le document d'orientation pour la mise en place et le fonctionnement d'un service foncier recommande de recours le moins possible aux nouvelles technologies de l'information dans la gestion du service1, en raison des capacités financières limitées des communes. Au niveau du cadastre, le classement s’opère suivant les divisions et les numéros cadastraux. La recherche est fructueuse et rapide quand on dispose d’un numéro cadastral de référence, sinon on est obligé de passer par les autres procès-verbaux disponibles comme ceux d’arpentage et de bornage. Dimension 7: Les informations contenues dans le registre/cadastre sont-elles facilement accessibles ? Note (A): Des copies ou extraits des enregistrements des droits de propriété peuvent être obtenus par quiconque s’acquitte des frais formels exigibles, le cas échéant. Des extraits ou copies des informations des classements décrits à la dimension 6 peuvent être obtenus dans un délai raisonnable. Dans la pratique, après s’être assuré de l’intérêt de la consultation, le destinataire de la correspondance (la direction des titres fonciers ou celle du cadastre, selon le cas) donne des directives à ses services pour apprêter la documentation voulue. Toutes les parties intéressées peuvent accéder aux informations foncières à la seule condition de témoigner de cet intérêt. Le propriétaire et, exceptionnellement, un mandataire, peuvent consulter le registre. Les services étatiques comme ceux de la justice peuvent demander et accéder aux informations du registre. Pour cela, il faut écrire au Directeur des titres fonciers une lettre de demande d’accès à ces informations. En consultant le registre, le consultant du CAGF a pu voir que la Commission Nationale Terres et Autres Biens s’était un jour adressée aux services des titres fonciers afin de consulter un dossier du registre, pour des raisons de service. D'autres demandes peuvent émaner des Universités comme l’Institut Technique Supérieur (ITS), le Département de Géographie de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines du l’Université du Burundi, les Facultés de Droit, les chercheurs, les consultants, les stagiaires de écoles secondaires, les ONG , le GIZ qui accède aux données du cadastre en rapport avec les concessions des terres domaniales pour en faire un inventaire exhaustif, les sociétés comme Intercontact Services pour un suivi des dossiers des sociétés qu’elle représente, etc. 1 République du Burundi, Orientations pour la création et le fonctionnement des services fonciers communaux, MEEATU, Non daté 127 | P a g e b. 3) Panel n° 6 / IGF n° 3 : Fiabilité des informations foncières : les informations contenues dans le registre sont à jour et suffisent pour en inférer la propriété Dimension 1: Les informations sur les droits fonciers gérées par les différents registres publics sont-elles systématiquement synchronisées de façon à réduire les coûts de transaction pour les utilisateurs en veillant à la complétude de l'information ? Note (C): Des liens sont en place pour certains types d'informations foncières mais les vérifications sont insuffisantes pour éliminer un nombre important de transactions qui pourraient être frauduleuses. Les services du cadastre national se plaignent de la réticence affichée par les services des titres fonciers qui ne leur communiquent pas les cas de transfert traités. Mais en cas de morcellement ou de réunification des propriétés foncières, les autres services techniques partenaires le sauront car les titres fonciers exigent au requérant de produire un autre certificat de conformité délivré par les services de l’Urbanisme, un procès-verbal d’arpentage et de bornage délivré par le cadastre. Il sied de préciser que, par exemple, le certificat de conformité institué par le MEEATU ne figure pas parmi les documents exigibles au niveau des services des titres fonciers. Rappelons également que les services des titres fonciers et du cadastre sont deux administrations personnalisées distinctes relevant de ministères distincts et qui échangent occasionnellement des informations par pur usage d’une bonne pratique. Les échanges d'informations entre les services fonciers déconcentrés et les services fonciers communaux sont inexistants, sinon épisodiques. Les services des titres fonciers ne se font pas communiquer les certificats fonciers établis et vice-versa. La collaboration entre les deux niveaux de services fonciers s'avère pourtant indispensable pour éviter des chevauchements. Par exemple, un certificat foncier ne devrait pas être délivré sur un terrain déjà titré. Le Code foncier prévoit la procédure de transformation d'un certificat foncier en un titre foncier. Le détenteur d'un titre foncier pourrait se faire délivrer un certificat foncier et l'utiliser à des fins frauduleuses. Dimension 2: Les informations contenues dans les registres sont-elles à jour et reflètent-elles la réalité sur le terrain ? Note (D): Moins de 50% des informations contenues dans le registre/cadastre sont à jour et reflètent la réalité sur le terrain. Il a été montré précédemment que les données du cadastre, notamment les plans cadastraux, ne sont pas régulièrement mises à jour, faute de moyens. Les données s’en trouvent par conséquent hypothéquées. Le registre est parfois mis à jour quand des modifications y sont consignées, quand par exemple l’urbanisme revoit à la hausse ou à la baisse la superficie des parcelles. Un registre-journal donne des informations sur les cas de morcellements ou de réunification des terrains. L’enregistrement et les numéros se suivent, indistinctement de l’objet de l’enregistrement (titre de propriété, morcellement ou réunification), si bien qu’il n’est pas aisé de faire un décompte immédiat des dossiers traités selon leur nature à cause de ce mélange dans l’enregistrement. Ces enregistrements tiennent compte des documents fournis par le cadastre et présentés par le demandeur. 128 | P a g e Il a aussi été souligné ci-haut que dans la majorité des cas, les changements de superficie, de propriétaire, etc. survenus sur les terres certifiées ne sont pas enregistrés au service foncier communal. b.4) Panel 6 / IGF 4 : Rentabilité et soutenabilité financière : les services de l'administration foncière sont dispensés de manière efficace et rentable. Dimension 1 : Existe-t-il une tarification adaptée qui rend le registre financièrement soutenable ? Note (A) pour les Titres fonciers : Le total des frais et droits d’enregistrement perçus est supérieur aux frais de fonctionnement du registre. (Le total des frais de fonctionnement incluent tous les coûts hors investissement en capital (c’est-à-dire salaires, fournitures, frais de transport, etc.) liés au fonctionnement du registre.) Note (C) pour les certificats fonciers: Le total des frais et droits d’enregistrement perçus représente entre 50% et 90% des frais de fonctionnement du registre. Titres fonciers : Le total des frais et droits d’enregistrement perçus sont de loin supérieurs aux frais de fonctionnement. A titre d’illustration, la comptabilité publique de la Direction des Titre Fonciers affiche un total des recettes du mois de janvier à novembre 2014 de 2.083.031.576 FBU. Pour l’exercice 2015, la Direction des Titres Fonciers avait estimé son budget annuel à 902.196.488 FBU. Certificats fonciers : Une étude conduite par l'ADPH en 2014 a permis de comparer les recettes et les dépenses de quelques services fonciers communaux. Pour le service de Nyabitsinda, de 2010 à 2013, les recettes remontaient à 5.681.150 FBu tandis que les dépenses ont été de 10.625.020 FBu, soit un déficit de 4.943.870 FBu1. Quatre autres services (Itaba, Mutaho, Bukirasazi, Nyabikere) accusaient un déficit supérieur à 3.400.000 FBu en moyenne, de 2011 à 2013. Ces derniers étaient sous l'appui d'un partenaire externe2. Dimension 2: L'investissement est-il suffisant pour satisfaire la demande et fournir des services de qualité qui sont clairement définis et respectés (informations foncières fiables, accessibles et financièrement abordables) ? Note (D) : Il n'y a que peu ou pas d’investissement en capital dans le système pour l’enregistrement des droits fonciers. Comme mentionné dans la dimension précédente, les frais et droits d'enregistrement perçus par les services des titres fonciers sont de loin supérieures aux frais de fonctionnement. Ces services des titres fonciers reçoivent des subsides après les discussions budgétaires à l’instar des autres administrations personnalisées. Le fait est que le niveau des investissements est loin d'y être suffisant. La mission assignée à la Direction des Titres Fonciers requiert pourtant des investissements importants. En effet, le Code foncier et la politique sectorielle du Ministère de la Justice reconnaissent l’établissement au niveau de chaque province, d’un bureau du Conservateur des Titres Fonciers. Jusqu’à juin 2017, il n’y en avait que trois. 1 APDH, Services fonciers au Burundi: Avancées, incertitudes et défis, Bujumbura, Global Rights, 2014, p. 30. 2 APDH, Op. cit.., p. 31. 129 | P a g e Avant la délivrance d’un titre de propriété, la loi exige aux services des titres fonciers d’effectuer des descentes sur terrain pour s’assurer de l’exactitude des informations fournies par le demandeur sur le bien faisant objet d’enregistrement. En règle générale, cette exigence légale n'est malheureusement pas observée. A voir l’état des lieux des services des titres fonciers, il est clair que l’investissement n’est pas suffisant pour qu’ils fournissent des services de qualité. A l’intérieur du pays, à Gitega, la Direction des titres fonciers loue un immeuble qui n’est pas en bon état, surtout du point de vue de l’installation électrique. Il y a risque de disparition des titres à la suite du déplacement des archives, en cas de changement de bailleur. A Bujumbura, Les bâtiments sont vétustes et une partie des bureaux d’archivage ont leurs murs lézardés. Il y va de la sécurité des dossiers qui risquent de s’abîmer et de disparaître. L’exigüité des bureaux d’archivage a comme corollaire les mauvaises conditions de travail pour le personnel y affecté. Les équipements ne sont pas non plus suffisants et ne sont pas modernisés. Il n’y a jamais eu une évaluation technique du plus à gagner dans la numérisation des services et des dommages causés par le mode actuel de gestion. Les services concernés voudraient bien le faire mais se heurtent au manque de fonds pour commanditer l’étude. Les fonds mis à la disposition des services ne leur permettent pas non plus de s’équiper d’un groupe électrogène si bien que plusieurs activités sont à l’arrêt quand survient une coupure d’électricité. S'agissant des services fonciers communaux, l'Association Burundaise des Elus Locaux (ABELO) fait remarquer : « On constate que les recettes générées par le SFC sont de loin inférieures aux dépenses de fonctionnement dudit service, même lorsqu’il serait appuyé par un PTF ».1 Même si de moins en moins de SFC sont soutenus financièrement par des partenaires financiers externes, la question de la pérennisation financière et technique des SFC demeure posée. Certaines communes ne furent pas suffisamment ou adéquatement associées dans le montage de leur SFC et se contentèrent du produit livré clé-en-main. La décision par l’Etat d’allouer une subvention annuelle pour le fonctionnement des SFC en déficit ou en défaut d'appui externe représente une première et un signe encourageant d’intérêt et d’implication de l’Etat dans la gestion de ces SFC. Il convient également de saluer la décision d'accorder à chaque commune, dans le cadre de la décentralisation, un fonds de 500 millions pour ses besoins d'investissement et de fonctionnement2. 1 Idem p.50 2 Voir l’article 85 de la loi n° 1/33 du 28 novembre 2014 portant organisation de l’administration communale et l’article 21 de la loi 1/22 du 31 décembre 2015 portant fixation du budget général de l’Etat pour l’exercice 2016. 130 | P a g e b.5) Panel 6 / IGF 5 : Les frais et droits d'enregistrement sont déterminés de façon transparente pour couvrir les coûts de la prestation de services. Dimension 1: La logique suivie pour déterminer les frais et droits d'enregistrement est-elle claire ? Le barème des frais et droits est-il accessible au public et les versements sont-ils dûment comptabilisés ? Note (A): Un système et un barème clairs des frais et droits d’enregistrement pour les différents services sont mis à la disposition du public et des reçus sont délivrés aux usagers pour toutes les transactions. Au niveau des services des titres fonciers, les frais sont fixés d’avance, conformément à la réglementation en vigueur. Le comptable public fournit obligatoirement aux intéressés la facture pro forma qui sert de paiement à l’Office Burundais des Recettes. Ce dernier leur délivre la preuve de paiement qu’ils présentent à la comptabilité. Il y a transparence. Les versements sont dûment comptabilisés. Pour les SFC, les frais de certification sont décidés sur délibération du Conseil Communal, lequel tient compte du contexte spécifique. Ils diffèrent ainsi d'une commune à l'autre. A titre illustratif, pour fixer les frais de la procédure de certification foncière, la commune de Ngozi fait une distinction entre sa zone rurale et sa zone urbaine. Les autres communes fixent un taux variant en fonction de la superficie du terrain objet de certification ou déterminent un pourcentage à percevoir en cas de vente d’une terre. Les barèmes des frais de certification sont communiqués au public pendant les séances de sensibilisation précédant l'ouverture des SFC. Ils sont également affichés au bureau du SFC. En principe, les frais sont payés contre délivrance d’une quittance de la comptabilité communale. Dimension 2: Les paiements informels sont-ils découragés ? Note (C): Des mécanismes pour repérer les comportements illégaux des employés ne sont en place que dans certaines administrations foncières. Généralement, les paiements informels profitent des failles et des déficiences dans la procédure suivie et le système d’enregistrement des droits et la délivrance des services (procédure de réception et traitement des demandes). Les documents exigés par les services sont rendus publics par voie d’affichage. En juin 2013, un agent de la Division Enregistrement, travaillant dans la cellule « Croquis », participa à la fabrication d’une fausse attestation de non redevabilité qu’il signa à la Mairie de Bujumbura. Cette attestation devait être présentée aux Titres fonciers comme document exigible à l’obtention d’un titre. Il fut emprisonné et licencié par son employeur. Des faux documents confectionnés à partir de l’extérieur ont déjà été saisis et transmis à la police pour enquête. A la Direction des Titres fonciers, quelques sources disent contribuer à la prévention de la corruption à travers les réunions de services. Certains agents de SFC peuvent profiter du déficit de supervision de la part de l'autorité communale pour percevoir le montant des frais de certification sans délivrer de quittance. Les différents cadres de coordination des initiatives d'appui à la gestion foncière décentralisée, les rencontres entre gestionnaires des communes, sont régulièrement saisis pour conscientiser les autorités communales sur cet impératif. 131 | P a g e Des agents ont déjà subi des sanctions disciplinaires pour des fautes de ce genre1. Dimension 3 : Les normes de qualité des services sont-elles rendues publiques et suivies régulièrement ? Note (C): Des normes de qualité de services ont été établies mais elles n’ont pas été rendues publiques, et peu d’effort est fait pour contrôler le respect de ces normes. Les processus de formalisation des droits fonciers, de même que la conservation des documents en rapport avec ces droits exigent que la qualité des services soit la meilleure possible. La qualité des services renvoie à leur qualité technique, administrative et sociale. Le Code foncier détermine les exigences légales pour la conduite de l'activité d'enregistrement ou de la certification des terres. Plus la qualité est bonne, plus le produit est satisfaisant et les prestations appréciées par les bénéficiaires. Le contrôle de la qualité des services doit être organisé sur base de ces exigences. S'agissant de la qualité administrative, l'ensemble des documents à présenter pour l'obtention d'un titre foncier ou d'un certificat foncier est déterminé par le Code. Le défaut de présentation de ces documents conduit à l'irrecevabilité du dossier. Pour le SFC, les vérifications ont lieu lors de la reconnaissance collinaire. La pratique des services fonciers communaux montre une certaine négligence de la part de certaines autorités communales qui n'exigent pas les pièces qui accompagnent le certificat foncier avant de signer un certificat foncier. Ils se contentent de la seule quittance de paiement des frais de certification. Les PV de reconnaissance sur terrain lors de la procédure de certification sont rarement consultés. Le contrôle de la qualité sociale des prestations pose des problèmes, tant pour les Titres fonciers que pour les SFC. L'enquête foncière exigée par la loi n'a pas lieu au niveau des Titres fonciers tandis que pour les certificats fonciers, elle a lieu sans la participation de l'autorité communale, pourtant censée faire partie de la commission de reconnaissance. Les descentes régulières au niveau des collines seraient impossibles à réaliser, faute de temps et de moyens. Par exemple, 1 Cas des communes Tangara, Nyamurenza et Mutaho. 132 | P a g e Panel 7 : Estimation de la valeur des terres et fiscalité foncière 7.1) Eléments de contexte additionnels Au Burundi, il existe tout une gamme d'impôts et de taxes fixés par la loi et perçus par divers institutions ou services. Les impôts sont principalement des impôts sur les revenus : revenus des entreprises, revenus des salariés, revenus des capitaux, revenus locatifs. A ces impôts s'ajoute l'impôt foncier. L'impôt sur les revenus locatifs ainsi que l'impôt foncier ont été cédés à la mairie de Bujumbura et aux communes provinciales alors que les autres sont déclarés à l'Office Burundais des Recettes et reversés au Trésor public. Quant aux taxes pouvant toucher au foncier, il s'agit de la Taxe sur la Valeur, les accises et les taxes ad-valorem, les taxes de mutations et de successions immobilières ainsi que diverses autres. La terre et les immeubles au Burundi supportent depuis longtemps plusieurs impôts qui sont basés sur des éléments de valorisation différents : la superficie, le prix de vente, les revenus locatifs perçus, etc. L'impôt foncier est perçu par la mairie de Bujumbura ou les communes rurales, notamment pour financer les besoins de la population, en particulier la santé et l’aménagement urbain. Il est déterminé par la superficie des surfaces bâties et non bâties et il est tarifé au mètre carré. Le mètre carré est plus cher sur la surface bâtie que sur la surface non bâtie et selon l'emplacement de la parcelle dans les zones de Bujumbura, ce tarif varie aussi. La qualité des matériaux de construction utilisés sur la surface bâtie affecte aussi les tarifs d'imposition. Les constructions en dur font augmenter les tarifs. Les bâtiments à plus d'un niveau multiplient leurs surfaces bâties d'autant d'étages qu'il y a dans le bâtiment. Les tarifs de calcul appliqués sont relativement bas. La surface non bâtie n'est imposable qu'à Bujumbura. Depuis la loi du 3 mars 2016 portant réforme de la fiscalité communale au Burundi, l'impôt sur les revenus locatifs est collecté par l'Office Burundais des Recettes (OBR), qui fut créé en 2009 notamment pour centraliser les opérations de collecte des recettes fiscales. Cet impôt avait été cédé aux communes par une loi de janvier 1987 modifiée en juillet 1989 pour financer les besoins de la population en particulier la santé et l’aménagement urbain. Il est basé sur le revenu locatif des bâtiments et terrains donnés en location et sur le profit de la sous-location totale ou partielle des mêmes propriétés. L’article 39 de la loi n°1/20 du 31 décembre 2016 portant fixation du budget général de l’Etat pour l’exercice 2017 a déterminé que les recettes issues de cet impôt reviendraient à 60% et 40% respectivement aux communes et au Trésor public. Certaines taxes appliquées sur des transactions immobilières (mutations, droits d'enregistrement foncier, etc.) sont perçus par le Trésor public. Il existe une taxe que l’on paie lorsque l’Etat donne des parcelles en location avant l’attribution du titre de propriété .C’est une recette non fiscale. La mutation de la terre gérée par les services du cadastre et des titres fonciers est aussi soumise à une taxe de mutation de 3% de sa valeur. Cette valeur est fixée par la loi sur les droits proportionnels lors des mutations immobilières (applicable pour les immeubles enregistrés aux titres fonciers. 133 | P a g e Une Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) est appliquée en cas de transfert d’immeubles commerciaux dont le prix de vente dépasse 100.000.000 FBU. La TVA est exigée au propriétaire qui vend un immeuble à usage commercial. 7.2) Evaluation notée du Panel n° 7 a) Tableau synoptique des notes Panel n° 7 / IGF 1 : Transparence dans l’estimation des valeurs foncières : les estimations de la valeur des terres à des fins fiscales ou d'indemnisation sont basées sur des principes clairs et appliqués uniformément ; elles sont mises à jour régulièrement et accessibles au public DIM. Matières A B C D Situation du Burundi L’estimation de la valeur des terres/propriétés à des Il existe un processus clair pour fins d’imposition ou 1 l’estimation de la valeur des  d'indemnisation n’est pas propriétés clairement fondée sur les prix du marché. Il n’y a pas de politique Les registres fiscaux sont 2  d’accessibilité publique des accessibles au public registres fiscaux. Panel n° 7 / IGF 2 : Efficacité de la collecte des taxes et impôts fonciers : les recettes des taxes foncières et immobilières sont collectées et le produit de cette collecte dépasse les frais engagés pour la collecte DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les exemptions du paiement de la taxe foncière/immobilière ne se Les exemptions d’impôt foncier basent pas clairement sur 1  sont justifiées et transparentes des principes d’équité et d’efficacité et ne sont pas toujours appliquées de façon transparente et cohérente. Panel n° 7 / IGF 2 : Efficacité de la collecte des taxes et impôts fonciers : les recettes des taxes foncières et immobilières sont collectées et le produit de cette collecte dépasse les frais engagés pour la collecte (Suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les propriétaires redevables de Entre 50% et 70% des propriétaires redevables de 2 l’impôt foncier figurent dans les  l’impôt foncier figurent dans registres fiscaux les registres fiscaux. Moins de 50% des impôts 3 Les impôts exigibles sont collectés  fonciers exigibles sont collectés. Le montant de l’impôt foncier est 1 à 3 fois Les recettes de l’impôt foncier 4  supérieur aux coûts dépassent les coûts de collecte salariaux des personnes chargées de la collecte. 134 | P a g e b) Revue commentée des évaluations par IGF et par dimension b.1) Panel 7 / IGF 1 : Transparence dans l’estimation des valeurs foncières: les estimations de la valeur des terres à des fins fiscales ou d'indemnisation sont basées sur des principes clairs et appliqués uniformément ; elles sont mises à jour régulièrement et accessibles au public. Dimension 1 : Existe-t-il un processus clair pour l’estimation de la valeur des propriétés ? Note (D): L’estimation de la valeur des terres/propriétés à des fins d’imposition ou d'indemnisation n’est pas clairement fondée sur les prix du marché. La prise en compte de la loi du marché est utilisée pour les taxes sur les mutations immobilières, la TVA et l’impôt sur les plus-values. Tous ces impôts appliquent la loi sur le prix de vente (6% et 3% du prix pour mes mutations 18% pour la TVA appliquée sur les immeubles commerciaux, 15% l’impôt sur les plus-values), l’impôt sur les revenus locatifs basé sur des revenus réalisés et la taxe sur mutations immobilière basée sur les prix de ventes, et l’impôt sur les plus-values basé sur le prix de vente. On peut affirmer que la taxation est basée sur le prix de marché. Par contre, l’impôt foncier ne se base pas sur le prix du marché car il est basé sur la superficie. Dimension 2 : Les registres fiscaux sont-ils accessibles au public ? Note (D): Il n’y a pas de politique d’accessibilité publique des registres fiscaux. Jusqu’au 1er juin 2017, le fichier des immeubles était tenu manuellement. Il est donc impossible de le rendre consultable par le public. Par contre, les résultats de l’adressage seront rendus utilisables par certaines organisations mais sur base de conventions à signer. b.1) Panel 7 / IGF 2 : Efficacité de la collecte des taxes et impôts fonciers: les recettes des taxes foncières et immobilières sont collectées et le produit de cette collecte dépasse les frais engagés pour la collecte Dimension 1: Les exemptions d’impôt foncier sont-elles justifiées et transparentes ? Note (C): Les exemptions du paiement de la taxe foncière/immobilière ne se basent pas clairement sur des principes d’équité et d’efficacité et ne sont pas toujours appliquées de façon transparente et cohérente. Certaines lois prévoient les exonérations, notamment ma loi du 17 février 1964 (art.3 et 5 et la lo n°1/004 du 13 mars 2001 (art. 12). Ce sont souvent les exonérations à caractère social qui sont privilégiées (veufs ou veuves, orphelins, retraités, handicapés). D’autres sont d’ordre économique : immeubles nouvellement construits, les revenus des niveaux de construction en hauteur, etc. Toutefois, les agents des communes appliquent ces exemptions d’une manière peu claire. Par exemple, pour bénéficier des exonérations, il faut se présenter aux services techniques de la Mairie pour une évaluation et une validation mais sans critères précis d’évaluation. Il en va de même pour les personnes bénéficiant d’exonération sur les revenus locatifs d’un immeuble. Au lieu de considérer un immeuble, certains services des impôts considèrent le contrat de location. Il n’y a pas de transparence parce que les exonérations ne sont pas évaluées pour les comparer aux dépenses fiscales qui, du reste, ne figurent pas au budget des communes. 135 | P a g e Dimension 2 : Les propriétaires redevables de l’impôt foncier figurent-ils dans les registres fiscaux ? Note (C): Entre 50% et 70% des propriétaires redevables de l’impôt foncier figurent dans les registres fiscaux. En comparant les résultats de l’adressage fiscal et les recettes réalisées, on comprend que moins de 50% du potentiel des impôts sur les immeubles et ses revenus sont collectés. % entre les ILLUSTRATION DE LA FAIBLESSE DU RENDEMENT réalisations DE LA COLLECTE DES IMPOTS ET LE POTENTIEL et le potentiel Potentiel mesuré Colonne 1 Année 2012 Année 2013 Mois d'Août 2014 fin Novembre 2014 Taxe sur les mutations 160.561.658 253.335.829 167.848.676 immobilières Taxe sur les successions 5.980.878 10.655.943 3142241 immobilières Impôt 78.039.275 188.340.420 162.300.480 432.917.137 37% foncier Potentiel mesuré Colonne 1 Année 2012 Année 2013 Mois d'Août 2014 fin Novembre 2014 Impôt sur les revenus 1.820.195.790 3.176.216.623 2.819.922.213 8.716.479.717 32% locatifs Total Recettes 2.064.777.601 3.628.548.815 3. 153.213.610 9. 149. 396.854 immobilières Recettes 3. 711. 866.819 6. 850.474.752 5.611.957.606 totales % des recettes immobilières 55,60% 53,00% 56,20% par rapport aux recettes totales 136 | P a g e Dimension 3 : Les impôts exigibles sont-ils collectés ? Note (D): Moins de 50% des impôts fonciers exigibles sont collectés. La note de 50% est justifiée par les résultats des recettes collectées comparées aux résultats des potentiels mesurés lors de l’adressage. Dimension 4 : Les recettes de l’impôt foncier dépassent-elles les coûts de collecte ? Note (C): Le montant de l’impôt foncier est 1 à 3 fois supérieur aux coûts salariaux des personnes chargées de la collecte. Le personnel affecté aux services de taxations foncières est insuffisant. L’essentiel du personnel est affecté dans les taxes d’activités et l’impôt locatif. Selon les autorités de la Mairie de Bujumbura, en 2015, les membres du personnel chargé des recettes étaient autour de 81 : 42 pour le service de vérification, 39 pour le service des recettes. A Bujumbura, selon le rapport d’adressage produit par le Projet des Travaux Publics et de Gestion Urbaine (PTPGU) il y a plus de 38.795 parcelles et 80.919 bâtiments qui sont contrôlés par 42 cadres et agents et le recouvrement est assuré par 39 d’entre eux. L’impôt foncier et l’impôt locatif ne sont pas rigoureusement suivis. Les nouveaux tarifs en FBU de l’impôt foncier ont été fixés comme suit par la loi de mars 2016 sur le transfert de certaines compétences fiscales vers les communes : Accessibilité Matériaux Desserte par une Desserte par route Desserte par une de Confort route non revêtue route en terre construction carrossable Maxi Mini Maxi Mini Maxi Mini WC intérieur 500 400 375 300 250 200 Construction Eau courante 350 280 263 210 175 140 avec Electricité ossature en sans eau 200 160 150 120 100 80 béton armé courante métallique Sans éléments 100 80 75 60 50 40 de confort WC intérieur 375 300 281 225 188 150 Eau courante 263 210 197 158 131 105 Construction Electricité en briques sans eau 150 120 113 90 75 60 sans courante ossature Sans éléments 75 60 56 45 38 30 de confort WC intérieur 250 200 188 150 125 100 Eau courante 175 140 131 105 88 70 Construction Electricité en terre sans eau 100 80 75 60 50 40 battue, bois courante ou paille Sans éléments 0 0 0 0 0 0 de confort 137 | P a g e Panel 8 : Résolution des litiges 8.1) Eléments de contexte additionnels Parallèlement au tableau de fond précédemment brossé sur les mécanismes judiciaires et non judiciaires usuels d’arbitrage et de résolution des litiges fonciers, il importe de souligner les mécanismes ad hoc qui se mettent en place exclusivement dans le cadre de la mise en œuvre des nouveaux programmes de certification et d’enregistrement des droits fonciers. Qu’il s’agisse des certificats fonciers délivrés dans le cadre du processus d’enregistrement par les SFC ou du processus en cours d’enregistrement des terres domaniales dans le cadre du PAGGF, il est prévu une procédure pour arbitrer les conflits qui surgissent à l’occasion de la délimitation des terrains. Dans les deux cas, des commissions sont mises sur pied avec des garanties de compétence et de diversité et la procédure est publique et transparente : les dates de reconnaissance et délimitation sont publiées et affichées avec une marge de temps suffisante pour que tous les concernés puissent être présents. La possibilité est donnée à quiconque de contester les droits revendiqués par l’un ou l’autre et, faute de conciliation réussie sur place, un procès-verbal est tenu du litige et des réclamations des parties pour qu’une suite ultérieure y soit donnée par les procédures d’arbitrage et de résolution classiques. 8.2) Evaluation notée du Panel n° 8 a) Tableau synoptique des notes Panel n° 8 / IGF 1 : Attribution des responsabilités : les responsabilités concernant la gestion des litiges à différents niveaux sont clairement attribuées, en conformité avec les pratiques ; les entités pertinentes sont légalement compétentes et il peut être fait appel des décisions. DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Il existe des voies parallèles pour la résolution des litiges et un même cas peut être Les responsabilités pour la examiné en parallèle par 1 résolution des litiges sont  différents circuits. Les clairement assignées. éléments de preuves et les décisions peuvent être partagés mais au cas par cas. Des institutions pour la résolution des litiges en Des mécanismes de résolution des première instance sont 2  litiges sont accessibles au public. accessibles au niveau local dans la majorité de collectivités/communautés. 138 | P a g e Panel n° 8 / IGF 1 : Attribution des responsabilités : les responsabilités concernant la gestion des litiges à différents niveaux sont clairement attribuées, en conformité avec les pratiques ; les entités pertinentes sont légalement compétentes et il peut être fait appel des décisions (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Il existe un système informel local de résolution des litiges qui résout un nombre Les accords à l'amiable au terme important de litiges de 3 d'un système informel de résolution  façon efficace et équitable des litiges sont encouragés. mais il n'est pas reconnu par le système formel judiciaire ou administratif de résolution des litiges. Il existe une procédure Il existe une procédure accessible, pour faire appel des abordable et rapide pour faire appel décisions portant sur les 4  des décisions portant sur les litiges litiges fonciers mais elle fonciers. très longue et son coût peut être élevé. Panel n° 8 / IGF 2: La proportion de terres concernées par un litige en attente de résolution est faible et en diminution. Les litiges fonciers Les litiges fonciers constituent une constituent plus de 50% 1 faible proportion des dossiers traités  des dossiers traités par les par le système légal formel. tribunaux dans le système légal formel. Pour les litiges liés au foncier, dans 90% des cas, Le temps nécessaire pour résoudre une décision en première 2 les litiges dans le système formel  instance est prononcée est raisonnable. dans un délai de 18 mois ou moins. La proportion de litiges Il existe peu de litiges fonciers de fonciers de longue date est 3 longue date (d’une durée supérieure  supérieure à 20% du total à 5 ans). des litiges fonciers en instance de résolution. Pour les litiges liés au Le temps nécessaire pour mettre en foncier, dans plus de 90% œuvre une décision finale (non des cas, une décision finale 4  contestée) dans le système formel et prononcée est mise en raisonnable œuvre dans un délai d’un an ou moins. 139 | P a g e b) Revue commentée des évaluations par IGF et par dimension b.1) Panel 8 / IGF 1 : Attribution des responsabilités concernant la gestion des litiges Dimension 1: Les responsabilités pour la résolution des litiges sont-elles clairement assignées ? Note (C): Il existe des voies parallèles pour la résolution des litiges et un même cas peut être examiné en parallèle par différents circuits. Les éléments de preuves et les décisions peuvent être partagés mais au cas par cas. Des voies parallèles pour la résolution des litiges fonciers peuvent être empruntées par les requérants qui croient ainsi multiplier leurs chances d’aboutissement favorable de l’arrangement. Ceci se présente surtout à l’échelle locale, là où se rencontrent une variété d'acteurs dans la gestion des conflits fonciers dont les sources de légitimité sont également variées (nomination par l'Etat, investiture traditionnelle, élections, la loi,...). Il n’est pas rare qu’un cas se retrouve en conciliation devant le Conseil collinaire et devant une structure de résolution prise en charge par une ONG. De même, un cas réglé devant le conseil collinaire peut se retrouver devant le Tribunal de Résidence. Dans ces circonstances, les usagers semblent vouloir chercher la validation des décisions prises au niveau communautaire par une institution ayant force émanant de l'Etat ou de la loi1. La gestion des litiges au niveau des structures communautaires connaît des lacunes quant à la documentation des processus. Ainsi, il n'est donc pas aisé pour le Tribunal de Résidence de retrouver les traces du règlement d'un cas introduit devant lui après une tentative de résolution au niveau du conseil collinaire. Il ne peut que s’appuyer sur le témoignage des personnes qui ont assisté à la première médiation. Le « shopping institutionnel » se manifeste également entre les tribunaux et les autorités administratives. Le contexte politique influant significativement, les justiciables ayant des affinités avec les responsables administratifs tentent de faire peser l'administration sur le traitement des litiges par les juridictions. Il n'est pas anodin de préciser que dans telles circonstances, aucun échange de dossier n'est envisageable. Enfin, avec la mise en œuvre de la gestion foncière décentralisée, les Tribunaux de résidence peuvent aussi entrer en concurrence avec les services fonciers communaux (SFC) dans la gestion des litiges fonciers. Une procédure de médiation est engagée auprès des SFC dans le cadre du traitement des demandes de certificats fonciers. Quelques fois, les opposants à ce processus réfèrent les cas devant le Tribunal de Résidence pour bloquer la poursuite de la procédure par le SFC. Dans des cas marginaux, les magistrats du Tribunal de Résidence se concertent avec le SFC pour instruire un tel cas2. 1 Munezero, C., Challenges of Land Access and Conflict Management in a Plural Normative Context: The case of Burundi, Dissertation, University of Antwerp (IOB), 2015, p. 33. 2 Des cas pareils ont eu lieu dans certains services fonciers de la province de Ngozi comme Marangara et Ngozi. 140 | P a g e Dimension 2 : Des mécanismes de résolution des litiges sont-ils accessibles au public ? Note (A): Des institutions pour la résolution des litiges en première instance sont accessibles au niveau local dans la majorité de collectivités/communautés. Le système informel est répandu sur tout le territoire national. En général, les litiges fonciers sont, en premier lieu, gérés au niveau des familles par conciliation d'un conseil de famille ad hoc1. Chaque famille peut en constituer un. Il n'est pas exclu que les familles soient dans l'impossibilité d'aboutir à un consensus. Dans ces conditions, les cas sont référés aux structures communautaires de règlement des conflits. Celles-ci sont constituées des Bashingantahe et d'autres personnes réputées intègres, en lesquelles la communauté a placé sa confiance. Bien que les Bashingantahe aient été progressivement remis en cause par la législation et le contexte politique, ils demeurent très sollicités pour appuyer les conseils collinaires, aussi présents sur tout le territoire national, et chargés par la loi communale de résoudre les conflits de voisinage, en particulier les conflits fonciers. Les deux offrent un avantage comparatif étant donné qu'ils sont accessibles et peu coûteux. De même, les membres de ces structures sont souvent d’une proximité telle que, généralement, ils sont déjà informés ou peuvent aisément s’informer auprès de sources proches et diversifiées des fait s constitutifs des conflits. Cela peut les rendre plus indiqués pour rétablir la confiance et la cohésion sociale. Les conseils collinaires font partie du système formel de résolution des conflits mais ils ont besoin de s'adjoindre l'appui du système informel pour être efficace. En général, c'est lorsque la médiation des litiges au niveau de la famille et des structures communautaires échoue que les cas sont transférés aux tribunaux de résidence. Ceux-ci sont institués au niveau de chaque commune et sont également proches des usagers. Concernant l’accessibilité des institutions non judiciaires formelles, la saisine des Commissions mises en place localement notamment dans le cadre de la CNTB ne pose pas de problèmes particuliers et la procédure devant elle est déterminée par le texte qui la régit. La procédure est relativement rapide devant la CNTB et la décision de la Commission est exécutoire, à moins que suite à des circonstances spéciales, le Président de la Commission n’ordonne sursis à l’exécution de ladite décision. Toutefois, les voies de recours ouvertes devant la Cour Spéciale des terres et autres Biens s’exercent au sein de la même juridiction hormis le pourvoi en révision. S’agissant de l’accessibilité de l’Ombudsman2, la saisine de ce dernier reste difficile pour les citoyens sans information ni moyens puisque l'institution ne dispose que de deux antennes régionales, à Ngozi et à Makamba. La conséquence est que certaines situations d’abus des droits fonciers des populations passent inaperçues alors que les victimes étaient en droit de s’en remettre à cette institution pour trouver solution à leur litige. 1 Le Conseil de famille est en principe prévu et organisé par le Code des personnes et de la famille (art. 371). Il est institué pour veiller à la sauvegarde des intérêts de chacun des membres de la famille. Le Code en détermine la composition. Dans la pratique, la plupart des familles recourent à des conseils composés selon leur convenance et les circonstances. 2 La loi n° 1/04 du 24 janvier 2013 portant organisation et fonctionnement de l’Ombudsman, en son article 11.2b) exige de tout réclamant qu’avant de saisir cette institution, il ait accompli une démarche préalable auprès de l’autorité administrative concernée pour obtenir satisfaction. 141 | P a g e Dimension 3: Les accords à l'amiable au terme d'un système informel de résolution des litiges sont- ils encouragés ? Note (B): Il existe un système informel local de résolution des litiges qui résout un nombre important de litiges de façon efficace et équitable mais il n'est pas reconnu par le système formel judiciaire ou administratif de résolution des litiges. Comme ci-haut énoncé, le système informel se trouve répandu sur le territoire national. Il est constitué des structures traditionnelles de gestion conflits, essentiellement les Bashingantahe auxquels se joignent d'autres personnes choisies pour leur présumé intégrité. Leur rôle reste prépondérant dans la gestion des rapports sociaux et dans la médiation des conflits fonciers. Les conseils collinaires se font effectivement aider par eux dans leurs efforts de règlement des litiges survenant au niveau de la communauté. Cependant, leur efficacité est handicapée par la complexité de certains dossiers, notamment liés aux successions. Jusqu’en 2005, l'institution des Bashingantahe avait des compétences explicitement reconnues par l’ancien code de l’organisation et de la compétence judiciaires (1987) qui fut abrogé par un nouveau code. Celui-ci supprima la reconnaissance formelle et légale du rôle et des compétences du mécanisme des Bashingantahe comme première instance de conciliation. Ce Code les confine dans un rôle d’exécution des jugements1 auxquels ils n’ont pas été associés et à propos desquels le recueil préalable de leur avis n’est plus obligatoire. Dimension 4 : Existe-t-il une procédure accessible, abordable et rapide pour faire appel des décisions portant sur les litiges fonciers ? Note (C): Il existe une procédure pour faire appel des décisions portant sur les litiges fonciers mais elle est très longue et son coût peut être élevé. Les choses se compliquent pour l'accès aux instances d'appel. En cas d’appel des décisions des tribunaux de résidence, les tribunaux de Grande Instance sont saisis et ceux-ci sont institués au niveau des provinces. Les juridictions administratives existent uniquement dans deux provinces du pays à savoir Gitega et Bujumbura. Quand il s’agit de se pourvoir en cassation, il n’existe qu’une Cour Suprême au Burundi. Compte tenu du volume des litiges fonciers au niveau du pays, cette Cour s’est retrouvée débordée. Le traitement des dossiers prenait un temps excessif pour arriver au terme de la procédure judiciaire. Une loi organique a été promulguée le 15 mai 2014 avec le but de corriger cette situation. Pour toutes les affaires relatives aux terres rurales, cette loi prévoit la suppression des pourvois en cassation devant la Cour Suprême et attribue cette compétence aux Cours d’Appel. Ceci constitue une avancée significative en ce qui concerne la durée prise par les pourvois en cassation des décisions rendues en matière foncière, même s'il n'existe que quatre cours d’Appel, situées à Bujumbura, à Gitega, à Ngozi et plus récemment créée à Bururi. La population en quête de justice qui est nécessiteuse devrait pouvoir accéder aux moyens d’assistance par les mécanismes d’aide légale. La question de l'assistance légale semble se poser plus à ce niveau qu'à celui des institutions judiciaires de base. 1 Loi n° 1/08 du 17 mars 2005 portant code de l’organisation et de la compétence judiciaires, article 78 : « En matière de propriété foncière non enregistrée située en milieu rural, l’exécution d es jugements est assurée par les juges des tribunaux de résidence assistés d’un greffier, avec le concours des notables ou des Bashingantahe. » 142 | P a g e b.2) Panel 8 / IGF 2 : La proportion de terres concernées par un litige en attente de résolution est faible et en diminution Dimension 1: Les litiges fonciers constituent-ils une faible proportion des dossiers traités par le système légal formel ? Note (D): Les litiges fonciers constituent plus de 50% des dossiers traités par les tribunaux dans le système légal formel. D’après les statistiques établies par le Ministère de la Justice, le volume des dossiers fonciers jugés par les Tribunaux de Grande Instance du Burundi en 2012 représente 69,3% du total des dossiers civils. Parmi ceux-là, 275 dossiers sur les 4150 dossiers fonciers étaient liés aux successions. La terre était aussi citée comme une des trois premières causes de violence dans le monde rural, selon les enquêtes menées en 2012 par la CTB auprès des Communes1. A la Cour Suprême, le volume du contentieux foncier représente 80% des dossiers de cassation2. Il s’agit manifestement d’un volume très important de dossiers et les proportions qu’il occupe dans le système légal formel sont très inquiétantes. Cette situation a justifié certaines réformes récemment initiées visant à alléger la charge écrasante des conflits fonciers notamment la suppression des pourvois en cassation devant la Cour Suprême pour les affaires foncières relatives aux terres rurales et la création de la Cour Spéciale des Terres et autres Biens. En consultant les données de l'Annuaire Statistique de la Justice du Burundi 2013, s'agissant du volume des jugements et décisions des juridictions burundaises, on constate par exemple que sur l'ensemble des dossiers pendants devant les Tribunaux de Grande Instance, année 2011, seuls 25% ont été jugés. Pour la même période, les Cours d'Appel ont rendu des jugements à hauteur de 12%. Le rendement augmente légèrement pour l'exercice 2012. L'ensemble des cours administratives enregistre un résultat allant même à 10% pour les décisions rendues durant l'année 2012. La Cour Suprême fait montre d'un résultat beaucoup plus élevé (plus de 60%) quant aux décisions rendues en matière civile. Mais il importe de souligner que ce résultat concerne une petite portion de dossiers, du fait que la plupart sont gérés au niveau des juridictions inférieures. Enfin, on peut déplorer le fait que l'annuaire ne documente pas l'activité des Tribunaux de Résidence, alors que ceux-ci, institués au niveau des communes et partant plus proches de la population, traitent l'essentiel des litiges fonciers. Dimension 2: Le temps nécessaire pour résoudre les litiges dans le système formel est-il raisonnable ? Note (C): Pour les litiges liés au foncier, dans 90% des cas, une décision en première instance est prononcée dans un délai de 18 mois ou moins. Au niveau du circuit de la procédure devant le Conseil collinaire, on constate que la procédure est raisonnable car en raison de la proximité des justiciables, des témoins à citer, la décision est vite rendue. En revanche, la procédure juridictionnelle prend souvent beaucoup de temps si bien qu’on ne puisse parler de délais raisonnables. 1 RCN, justice et démocratie, statistiques judiciaires burundaises : Rendement, délais et typologie des litiges fonciers dans les Tribunaux de Résidence, p.25. 2 Cadre stratégique de la Cour Suprême 2011-2015, p.74. 143 | P a g e Dans un diagnostic de la justice au Burundi conduit en 2009, le Projet d’Appui à la Gestion Economique (PAGE) conclut que "terminer une affaire devant le Tribunal pour le plaideur est un long parcours du combattant"1. Parmi les causes d'insatisfaction des usagers des Tribunaux de Résidence figure en bonne place la lenteur du traitement des dossiers 2. On ne dispose pas d'informations actualisées par rapport à la célérité de l'activité des Tribunaux de Résidence mais elle figure parmi les critères de cotation des magistrats, ce qui serait entrain de pousser vers l'amélioration de la situation. Les choses semblent plus compliquées au niveau des Cours administratives. La durée moyenne de la procédure devant les Cours administratives du Burundi a été estimée à 39,5 mois à partir de la première audience jusqu’au prononcé de l’arrêt3. Au niveau des juridictions administratives, il arrive qu’un dossier passe de nombreuses années pour aboutir à un arrêt d’irrecevabilité ou à un arrêt qui déboute le requérant. Cette situation peut être illustrée par quelques exemples. Dans un des rares dossiers (RAC 2726) où le requérant a obtenu gain de cause, la requête avait été introduite en 2005 et le jugement a été rendu en 2011, soit six ans plus tard. Dans un autre dossier de Rumonge impliquant 44 requérants, la requête a été introduite en 2003 et aucune décision n’a été rendue dix ans plus tard. Rares sont des dossiers jugés en une année tels que les affaires RAC 91 et RAC 10584. En principe, une affaire doit être prise en délibéré à la troisième audience, conformément au code de procédure civile. De façon générale, le manque de célérité de la procédure est lié à de nombreux facteurs, notamment le comportement des parties aux procès, en particulier le défaut de comparution des agents de l’Etat ou des communes, le défaut de conclure en temps utile, le défaut de comparution des témoins, la complaisance des juges qui ne prennent pas de décisions lorsque l’Etat ou le Ministère Public manque de diligence, le manque de moyens matériels et financiers pour effectuer des descentes sur terrains. On peut également citer les nombreuses et répétitives remises (entre 3 et 9 mois) notamment suite à l'absence des plaideurs5. Dimension 3: Existe-t-il peu de litiges fonciers de longue date (d’une durée supérieure à 5 ans) ? Note (D): La proportion de litiges de longue date est supérieure à 20% du total des litiges fonciers en instance de résolution. Les litiges fonciers de longue date se retrouvent devant la Cour administrative et la Cour Suprême. Avec la loi de 2014 portant suppression du pourvoi en cassation pour les dossiers fonciers relatifs aux terres rurales, le volume des dossiers a été transféré devant les Cours d’Appel. Il n’est cependant pas rare de trouver des dossiers vieux de plus de cinq ans en raison du circuit suivi du Tribunal de Résidence à la Cour Suprême en passant par les Tribunaux de Grande Instance, ou de la Cour Administrative à la Cour Suprême qui est saisie soit en appel, soit en cassation. 1 PAGE, Etude diagnostique du système juridique et judiciaire du Burundi, Rapport final, 2009, p. 101. 2 Kohlhagen, D., Les défis de la justice de proximité au Burundi. Synthèse de la réflexion nationale de 2011, République du Burundi, p. 18. Les usagers qui avancent ce motif dépassent 60% de l'ensemble des personnes enquêtées. 3 Annuaire statistique de la justice au Burundi, édition 2013, p. 95. 4 Voir Christophe SEBUDANDI, Expropriation pou cause d’utilité publique : Guide pratique pour intervenants dans l’appui aux victimes, février 2014, p.30 5 PAGE, Op. cit.., p. 102. 144 | P a g e Le volume des arriérés des dossiers est l'une des motivations des appuis apportés à la Cour Suprême par la Coopération Technique Belge (CTB). Dans une fiche de capitalisation de ces appuis établie en 2014, la CTB indiquait que ce volume avait été réduit de moitié et ramené à 5070 dossiers1. Comparé au nombre total de dossiers pendants devant la Cour (6825 en 2011 et 7756 en 20152), on se rend compte que cet arriéré représente beaucoup plus de 50 %. Même si cet arriéré ne met pas en exergue la proportion des dossiers fonciers, on sait déjà que les conflits fonciers sont prédominants dans les juridictions burundaises. Les statistiques disponibles à la Cour Suprême montrent qu’il existe des dossiers de longue date et qui, pour la plupart des cas, ont passé un temps excessivement long au niveau de l’avis du Ministère Public3. Devant la Cour Administrative de Bujumbura, des cas extrêmes ont été identifiés où un dossier datant de 2003 est toujours en cours. Dimension 4: Le temps nécessaire pour mettre en œuvre une décision finale (non contestée) dans le système formel est-il raisonnable ? Note (D): Pour les litiges liés au foncier, dans plus de 90% des cas, une décision finale prononcée est mise en œuvre dans un délai de dix-huit mois ou moins. En consultant les données de l'Annuaire Statistique de la Justice du Burundi 2013, s'agissant du volume des jugements et décisions des juridictions burundaises, on constate que sur l'ensemble des dossiers pendants devant les Tribunaux de Grande Instance, année 2011, seuls 25% ont été jugés parmi lesquels 28% ont été exécutés. Pour la même période, les Cours d'Appel ont rendu des jugements à hauteur de 12% tandis qu'elles en ont exécuté 4,4%. Deux années plus tard, en janvier 2016, lors d’un atelier de validation de la politique de ce Ministère pour 2016-2020, M. Edouard Minani, du Ministère de la Justice du Burundi déclarait et rectifiait que le taux d’exécution des jugements, de 14% en 2010, 16% en 2011 et 18% en 2012, était passé à 83,2% en 2013 et 20144. Les décisions des Conseils collinaires en dehors du système judiciaire prennent relativement peu de temps à être exécutées parce que les protagonistes s’entendent sur les modalités de mise en œuvre de cette décision obtenue de commun accord. En revanche les décisions des juridictions prennent en général du temps pour être exécutées pour plusieurs raisons : réticence de la partie ayant perdu la cause, problèmes logistiques des juridictions devant appliquer la décision, complexité de l’affaire etc. On organise des campa gnes d'exécution des décisions rendues mais les moyens et le temps sont insuffisants pour terminer tous les dossiers en attente. En plus, les exécutions peuvent être rendues difficiles par la situation sur le terrain, étant donné que la plupart des fois les juridictions n'effectuent pas des descentes d'instruction des dossiers. Les frais liés à l'exécution des jugements sont souvent pris en charge par la partie diligente, sinon les juridictions sont obligées d'attendre l'appui des partenaires techniques et financiers. Cela a pour conséquence que l’exécution prend du temps relativement long. 1 CTB, Note de capitalisation. Appui technique à la Cour Suprême du Burundi: Actions 2013/2014, Projet "Appui Institutionnel Central et Périphérique au Ministère de Justice", p.2. 2 Annuaire statistique de la justice au Burundi, édition 2013, p. 55. 3 Cadre stratégique de la Cour Suprême du Burundi p. 73. 4 http://burundi-agnews.org/justice/burundi-justice-le-taux-dexecution-des-jugements-est-de-14-en-2010-a-832- en-2014/ consulté le 14 juillet 2016 145 | P a g e Notons que l’exécution des jugements rendus contre l’Etat pose plus de problèmes. Les arrêts rendus en matière administrative ne peuvent faire objet d’une exécution forcée sur les biens meubles ou immeubles de l’Etat, des Administrations personnalisées de l’Etat, des Communes, des Etablissements publics à caractère administratifs ou des sociétés publiques ou mixtes1. Forts de cette disposition, certains agents de l’Etat refusent d’exécuter les jugements et il semble que l’exécution de tels jugements et arrêts dépend de la volonté des agents de l’Etat. Panel 9 : Examen des modalités institutionnelles et des politiques générales 9.1) Eléments de contexte additionnels L'une des problématiques à laquelle la réforme foncière au Burundi s'est proposée de répondre concerne la déconnexion des institutions et des structures en charge de la gestion foncière. La « Lettre de politique foncière » précise d'entrée de jeu qu' « elle entend répondre à l'absence de concertation entre les acteurs publics de la gestion des droits sur les sols, que ces sols soient urbains ou ruraux »2. Elle constate par ailleurs que le peu de droits enregistrés comprennent des attributions illégales3. Ce détail démontre la pertinence de l'intérêt porté à la concertation entre les acteurs publics de gestion foncière. Une bonne articulation des institutions et politiques de gestion foncière serait avantageuse aussi bien pour l'Etat que pour les particuliers. Mais également de façon plus globale, pour avancer harmonieusement vers un développement durable et paisible. C'est au prix d'une réforme bien réfléchie et coordonnée que le Burundi parviendra à venir à bout de cette entrave aux initiatives visant la stabilité sociale, base incontestée du développement. 9.2) Evaluation notée du Panel n° 9 a) Tableau synoptique des notes Panel n° 9 / IGF 1 : Clarté des mandats et des pratiques. DIM. Matières A B C D Situation du Burundi En cas de situations pouvant conduire à des conflits d’intérêts ou susceptibles de Il existe une séparation adéquate faire l'objet d'abus (p. ex. en entre les différentes fonctions cas de transferts de droits concernant la formulation des fonciers), il existe un degré 1  politiques, leur mise en œuvre et les de séparation entre les procédures d’arbitrage liées aux fonctions liées à la droits fonciers. formulation des politiques mais pas entre celles ayant trait à leur mise en œuvre et aux procédures d’arbitrage. 1 Article 398 de la loi n°1/010 du 13 mai 2004 portant Code de Procédure Civile. 2 République du Burundi, MEEATU, Lettre de politique foncière, Bujumbura, 2010, p. 2. 3 République du Burundi, Op. cit.., p. 3. 146 | P a g e Panel n° 9 / IGF 1 : Clarté des mandats et des pratiques (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les responsabilités exercées par les différentes autorités compétentes en matière Les responsabilités en matière d’administration foncière, foncière entre ministères et agences 2  telles que définies, ne se chevauchent pas débordent sur les (chevauchement horizontal). responsabilités des autres agences du secteur foncier, posant un problème de cohérence. La répartition des responsabilités en matière Les chevauchements de foncière entre les responsabilités en matière foncière différents niveaux 3 entre les différents niveaux  d’administrations et de administratifs sont évités collectivités est claire et (chevauchement vertical). entraîne quelques chevauchements. Dans la pratique, ou du fait d’une politique Les informations sur la propriété et délibérée, les l'utilisation foncières sont réparties informations relatives aux 4 entre les institutions compétentes et  droits fonciers ne sont pas les différents éléments sont à la disposition des librement accessibles au public. institutions qui en ont besoin. Le cadre juridique et les procédures relatives au foncier (y compris les Les chevauchements de droits (sur ressources renouvelables la base de la typologie des tenures) et du sous-sol) traitent des 5  sont minimes et n'engendrent ni questions foncières de friction ni litige. façon très différente et il n'existe pas de mécanisme efficace pour remédier aux chevauchements. Différentes institutions publiques traitent des questions foncières de L'ambiguïté des mandats manière très différente 6 institutionnels (sur la base de la mais des mécanismes de carte des institutions) n'engendre  coordination efficaces pas de difficultés. sont en place et sont régulièrement utilisés. 147 | P a g e Panel n° 9 / IGF 2: Équité et non-discrimination dans le processus de prise de décisions DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Une politique foncière exhaustive existe ou peut être inférée à partir de la législation en vigueur. Les politiques et réglementations Les segments de la foncières sont en place et sont population affectés par les 1 élaborées selon un processus  décisions sont informés, participatif faisant intervenir toutes mais leur avis n'est les parties prenantes. généralement pas demandé ni pris en compte dans la prise de décisions. Les politiques foncières Des objectifs d’équité et de affichent certains réduction de la pauvreté sont objectifs d’équité et de 2 incorporés dans la politique  réduction de la pauvreté foncière et leur réalisation fait mais leur réalisation ne l'objet d'un suivi. fait pas l'objet d'un suivi régulier ou rigoureux. Les politiques foncières affichent certains Des objectifs de protection et de objectifs d’écologie et de durabilité de l'environnement sont durabilité de 3 incorporés dans la politique  l'environnement mais leur foncière et leur réalisation fait réalisation ne fait pas l'objet d'un suivi. l'objet d'un suivi régulier ou rigoureux. Le coût de mise en œuvre de la politique foncière Le coût de mise en œuvre de la n’est pas totalement politique foncière est chiffré, chiffré et/ou le budget ou 4  comparé aux résultats, et couvert les capacités humaines et par des ressources suffisantes. institutionnelles sont très insuffisants pour mettre en œuvre la politique. 148 | P a g e Panel n° 9 / IGF 2: Équité et non-discrimination dans le processus de prise de décisions (suite) DIM. Matières A B C D Situation du Burundi Les administrations foncières formelles rendent compte de leur progrès dans la mise en œuvre de la politique Il existe des rapports publics 5  foncière mais de façon réguliers pour rendre compte des sporadique ou bien d’une progrès dans la mise en œuvre de la façon qui ne permet pas politique. un suivi rigoureux des progrès réalisés dans les différents domaines. Des politiques sont en La politique foncière fait en sorte place pour améliorer que des terres adaptées soient à la l'accès aux biens et leur 6 disposition des petits agriculteurs et  mise en valeur par les qu'il y ait des logements pour les pauvres et les groupes groupes à faible revenu. marginalisés mais elles ne sont pas appliquées. La politique foncière parvient à Il existe une politique empêcher les établissements pour empêcher les humains dans les zones à risque établissements humains 7  élevé et promeut la préparation dans les zones à risque contre les futurs risques de élevé mais elle n'est pas catastrophe. appliquée. b) Revue commentée des évaluations par IGF et par dimension b.1) Panel 9 / IGF 1 : Clarté des mandats et des pratiques Dimension 1: Existe-t-il une séparation adéquate entre les différentes fonctions concernant la formulation des politiques, leur mise en œuvre et les procédures d’arbitrage liées aux droits fonciers ? Note (C): En cas de situations pouvant conduire à des conflits d’intérêts ou susceptibles de faire l'objet d'abus (p. ex. en cas de transferts de droits fonciers), il existe un degré de séparation entre les fonctions liées à la formulation des politiques mais pas entre celles ayant trait à leur mise en œuvre et aux procédures d’arbitrage. Dans le cadre de la réforme en cours, on observe dans une large mesure une multiplicité des acteurs et des institutions qui interviennent dans la gestion et l’administration du foncier au Burundi. Leurs attributions ne sont par clairement définies et ne permettent pas de coordonner et d’optimiser les interventions. 149 | P a g e Le décret qui définit les missions, l’organisation et le fonctionnement du Ministère de l’Eau, de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme (MEEATU) statue explicitement que celui-ci doit « concevoir et exécuter » la politique nationale en matière d’eau, d’environnement, d’aménagement du territoire, d’urbanisme et de l’habitat ainsi que de la lutte contre l’érosion des sols1. Au niveau central, la coordination de l’action du Gouvernement en matière foncière reste faible, le comité interministériel2 mis en place en 2012 pour coordonner la réforme foncière et sa mise en œuvre demeure presque inactif et ne se montre pas efficace dans l’arbitrage entre les différentes priorités de la réforme foncière. L’approche de mise en place des organes interministériels dans la réforme foncière n’a pas non plus résolu les problèmes de coordination ni renforcé le pouvoir de contrôle et d’arbitrage en matière foncière. La Commission foncière nationale (CFN) prévue par Code foncier révisé de 2011 (art. 452-453) et régie par le Décret n° 100/15 du 30 janvier 20173, n’assure pas encore le leadership nécessaire dans la mise en œuvre de la réforme foncière comme « un levier de bonne gouvernance, en mesure d’assurer la transparence et la redevabilité de la gestion foncière à tous les niveaux »4. A côté de l'insuffisance de moyens de mise en œuvre des missions lui confiées, la composition de la commission souffre d'un grand déséquilibre étant donné que 13 des 14 membres qui la composent émanent de droit de services ministériels ou d’établissements à caractère public. Son manque d'ouverture à la société civile, au secteur privé ou aux mandataires élus (non parlementaires) lui enlève le caractère de garant de la bonne mise en œuvre de la réforme. En outre, malgré son caractère interministériel, son fonctionnement est influencé dans une large mesure par le MEEATU. En matière de cessions et de concessions, elle prend des décisions qui entérinent celles déjà prises par la Direction générale de l’Aménagement du territoire et de protection du patrimoine foncier. Elle évoque à ce sujet un manque de moyens matériels et financiers qui l’empêchent de se déployer sur terrain et prendre des décisions éclairées après enquête5. La fusion des missions de la CFN et de l'Unité de Coordination du Programme National Foncier (UC/PNF) en mai 2015, aura permis de résoudre les chevauchements antérieurs entre les deux entités. En effet, leurs textes constitutifs leur attribuaient une même mission, celle de « faciliter et coordonner la collecte fiable des données pouvant permettre un débat politique éclairé et constructif »6. On ne pourrait pas dire pour autant qu'elle permet de résoudre les difficultés liées à son fonctionnement. 1 Décret n° 100/198 du 15 septembre 2014 portant révision du décret n°100/95 du 28 mars 2011 portant missions, organisation et fonctionnement du Ministère de l’Eau, de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme 2 Décret n° 100/191 du 29 juin 2012 portant création, missions, composition et fonctionnement du comité interministériel de pilotage de la réforme foncière 3 Décret n° 100/15 du 30 janvier 2017 portant réorganisation de la Commission Foncière Nationale et son Secrétariat permanent. 4 APDH (2014) Terres domaniales et expropriations au Burundi Etat de mise en œuvre du Code foncier 18 mois après sa promulgation, étude réalisée avec l’appui de Global Rights et de la Coopération Suisse, p.52. 5 Entretien avec un membre de la CFN, 19 février 2015 6 Article 12 du Décret n° 100/34 du 31 janvier 2012 portant création, missions, composition et fonctionnement de la commission foncière nationale et de son secrétariat permane nt; article 4 de l’Ordonnance ministérielle n° 1218 du 12 août 2010 portant création, missions, organisation et fonctionnement de l’unité de coordination du programme national foncier. 150 | P a g e L’Office Burundais pour la Protection de l’Environnement (OBPE), créé par décret présidentiel en octobre 2014 est un établissement public théoriquement doté d’une « autonomie financière et administrative »1. Cet Office est investi de missions et de pouvoirs importants en matière foncière. Il doit notamment « veiller au respect du code de l’eau, du code forestier, du code de l’environnement et autres textes en rapport avec la protection de l’environnement ». Le Ministre de la Justice peut investir ses agents de pouvoirs d’officiers de police judiciaire. L’Office « peut ordonner la suspension des activités non conformes aux dispositions du code de l’environnement, et d’autres lois relatives à la protection de l’environnement » (article 9 du décret créant l’OBPE). Mais à l’instar de la CFN, cet Office est placé sous la tutelle du MEEATU. Il est administré par un Conseil d’Administration composé de 7 membres provenant tous, sans exception, de départements ministériels. Ceux-ci sont tous nommés par décret présidentiel, sur proposition du Ministre de l’Eau, de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme. Leur statut et leur mode de nomination ne font pas de l’Office, dit administrativement autonome, une structure apte à jouer un rôle d’arbitrage en situation de conflits d’intérêt, même si des dispositions prévoient explicitement que les personnes siégeant dans la CFN ou à l’OBPE ne peuvent pas participer aux réunions où se discutent des questions sur lesquelles elles ont un intérêt personnel. L'institution de l'Ombudsman peut arbitrer des litiges de droits fonciers découlant de la mise en œuvre de politiques qui opposent l'Etat à des particuliers. Toutefois, aucune institution de l'exécutif ou administratif n'a été prévue pour arbitrer les conflits interservices en matière de gestion foncière. Dimension 2: Les responsabilités en matière foncière entre ministères et agences se chevauchent- elles (chevauchement horizontal) ? Note (C): Les responsabilités exercées par les différentes autorités compétentes en matière d’administration foncière, telles que définies, débordent sur les responsabilités des autres agences du secteur foncier, posant un problème de cohérence. Dans son axe 2 sur « la restructuration et la modernisation des services en charge de la gestion foncière », la « Lettre de politique foncière » du Burundi adoptée par décret présidentiel en avril 2010 cite comme première « action » que « les procédures de gestion des terres seront clarifiées et simplifiées ». Pourtant, au niveau ministériel, il subsiste une difficulté permanente à définir de manière précise les attributions des différentes entités ministérielles et parfois même celles des divers organes à l’intérieur d’un même ministère, malgré le regroupement de plusieurs compétences foncières importantes au sein d’un ministère : le MEEATU. A côté de ce Ministère, qui intervient dans une large mesure dans la gestion des terres, d’autres ministères comme ceux des Travaux publics, de la Justice, de l’Intérieur,…continuent à exercer des compétences en matière foncière tantôt en toute complémentarité, tantôt en toute concurrence. Cette distribution horizontale des compétences ne pose pas de problèmes comme tel, d’autant plus que la question foncière reste une question transversale par nature. Seulement, la formulation des politiques et l’adoption des textes juridiques dans les différentes entités ministérielles continuent à se faire de manière isolée et créent de nombreux problèmes sur terrain. Cela pose des difficultés immenses à la coordination de l’action gouvernementale et dans la coordination et la continuité des activités des ministères intervenant en matière foncière. 1 Décret n° 100/240 du 29 octobre 2014 portant création, missions, orga nisation et fonctionnement de l’ L’Office Burundais pour la Protection de l’Environnement (OBPE) 151 | P a g e A titre d’exemple, les codes foncier et de l’eau sont en conflit sur plusieurs thématiques notamment la définition du domaine public hydraulique et du domaine public et privé de l’Etat, ce qui vient fragiliser les droits des riverains des cours d’eau et donnent lieu à des conflits, soit entre les citoyens et l’administration au niveau local, soit entre les citoyens eux - mêmes1. Dans la pratique, les ministères n’élaborent pas non plus des plans d’action conjoints même lorsqu’ils interviennent dans les mêmes zones. A titre d’exemple, le Ministère de l’Agriculture ne s’inspire pas des plans d’aménagement du territoire dans la répartition des projets agricoles. II ne prend pas non plus en compte les expériences actuelles en matière de sécurisation des terres dans ses activités en rapport avec l’amélioration des exploitations agricoles en milieu rural. Autrement, il y aurait eu un plaidoyer pour la sécurisation des terres des marais, qui sont très productives, mais que le Code foncier préfère garder sous le régime du droit coutumier2. Egalement, des entités administratives intervenant dans la même chaine d’activités comme le Cadastre et les Titres fonciers ne font pas des concertations régulières pour évaluer ensemble les défis liés à leur domaine d’intervention, à savoir l’enregistrement des terres. A part des réunions administratives initiées par les autorités ministérielles ou les organismes de coopération internationale, il n’existe pas de concertation régulière entre ces deux entités. C’est n’est qu’avec l’introduction du « Guichet foncier unique » que la collaboration régulière commence à se mettre en place progressivement3. A part ce manque de concertation, il continue à s’observer également des conflits de compétence en matière de gestion foncière, notamment sur le plan des cessions et des concessions. Le ministère de l’Intérieur est pointé du doigt pour l’attribution des parcelles des sites sur lesquelles ont été érigés les villages à travers tout le pays, sans en référer au MEEATU qui a compétence en matière d’aménagement du territoire et de concessions et cessions des terres. En matière de protection de l’environnement, des boisements domaniaux ont été systématiquement détruits avec l’aval des autorités communales dans plusieurs communes du Burundi malgré l’opposition des autorités du MEEATU. Au niveau de la ville de Bujumbura, la Mairie reconnaît avoir procédé systématiquement à des concessions pour l’implantation des kiosques et autres aires de commerce sur les terres publiques urbaines, mais tout simplement pour des besoins de renflouer ses caisses et celles des communes. Les autorités de la Mairie rencontrées reconnaissent au MEEATU, plus spécifiquement à la Direction Générale de l’Urbanisme, les compétences en matière d’aménagement et de gestion du domaine foncier de l’Etat, soit-il public ou privé, mais affirment que la Mairie est la mieux indiquée pour savoir rentabiliser sur le plan financier les espaces disponibles4. Il n’existe pas cependant de base légale en vertu de laquelle les autorités municipales ont des compétences pour attribuer des terres. Même sous le régime de l’ancien Code foncier de 1986 qui donnait aux Gouverneurs de Province des compétences en matière de cession et de concession des terres, le Maire de la Ville n’avait pas cette compétence. 1 Idem 2 Interview avec un cadre du FIDA, 21 février 2015. 3 Interview avec un agent des Titres Fonciers détaché au guichet unique, 18 février 2015. 4 Interview avec un cadre du Service Recouvrement de la Mairie, en date du 18 février 2015 152 | P a g e Dimension 3: Les chevauchements de responsabilités en matière foncière entre les différents niveaux administratifs sont-ils évités (chevauchement vertical) ? Note (B): La répartition des responsabilités en matière foncière entre les différents niveaux d’administrations et de collectivités est claire et entraîne quelques chevauchements. Au niveau interne des ministères, il arrive souvent que des organes qui devraient se concerter exercent des responsabilités concurrentes et entrent en conflits d’intérêts en matière foncière. A titre d’illustration, le travail de la Direction Générale des forêts du MEEATU a longtemps évolué en parallèle avec celui de la Direction des forêts et de l’Institut National pour la l’Environnement et la Conservation de la Nature (INECN). Ceci a souve nt entraîné dans la pratique des conflits dans la gestion des parcs nationaux et des aires protégés où l’INECN prenait des décisions et des initiatives sans s’en référer à la Direction générale. Avec cette vision parcellaire des responsabilités, suite à des messages ou des positions contradictoires de la part de ces différentes entités, une perte de temps et de moyens, les forêts et l’environnement ont subi des dégâts immenses1. La création de l'Office Burundais pour la Protection de l'Environnement 2 est destinée à répondre à cette préoccupation. Il résulte de la dissolution/fusion de la DGEF et de l'INECN. L’attribution des parcelles en zone périurbaine fait également objet de conflits de compétence entre les services de l’Urbanisme et la Direction générale de l’aménagement du territoire et de la protection du patrimoine foncier, alors que les deux entités relèvent du même ministère. Le ciblage des sites à viabiliser ne fait pas l’objet d’entente préalable et les services en charge de l’environnement, ne sont pas associés pour évaluer l’impact environnemental3. Dimension 4: Les informations sur la propriété et l'utilisation foncières sont-elles réparties entre les institutions compétentes et les différents éléments sont-ils librement accessibles au public ? Note (D): Dans la pratique, ou du fait d’une politique délibérée, les informations relatives aux droits fonciers ne sont pas à la disposition des institutions qui en ont besoin. Dans son axe 2 sur « la restructuration et la modernisation des services en charge de la gestion foncière », la « Lettre de politique foncière » du Burundi annonce que « des travaux de numérisation et de digitalisation seront contractualisés auprès d’opérateurs spécialisés ». Elle ajoute que « l’information foncière ainsi dématérialisée pourra être intégrée dans une base de données foncière permettant une gestion transparente de l’information ». En soi, ce trait de politique constitue une avancée importante, dans le sens où elle engage officiellement le gouvernement à chercher les moyens de cette politique. Mais six ans plus tard, ni la numérisation ni la transparence n’est encore réalisée. Au début de l’année 2015, un projet de numérisation des données conservées au département des Titres fonciers était en voie d’exécution avec financement du PTPCE. Malheureusement, un concours malheureux de circonstances (retard dans l’attribution du marché, fin du PTPCE) en a empêché la matérialisation. 1 Interview avec un haut cadre de l’Office burundais pour la protection de l’environnement (OBPE), MEEATU. 2 Décret N°100/240 du 2 octobre 2014 portant création, missions, organisation et fonctionnement de l'Office Burundais pour la Protection de l'Environnement. 3 Interview avec un cadre 153 | P a g e De façon générale, il n’existe donc pas de système de collecte, de traitement, de conservat ion et de diffusion de l’information foncière dans l’ensemble. Les informations qui existent ne sont pas centralisées et leur partage entre services se fait sur une base volontariste. L'accès du public à ces informations peut donc différer en fonction des services concernés. Au niveau des Titres fonciers, les parties intéressées peuvent accéder aux informations foncières conservées physiquement et manuellement à condition de témoigner de cet intérêt. Les services publics, les institutions judiciaires, les avocats, les chercheurs, les universités, les ONG, les organismes de coopération, les sociétés,... peuvent avoir accès aux informations s'ils en démontrent l'intérêt. Seulement l'intérêt de la recherche de ces informations peut être interprété restrictivement. Certaines informations conservées au niveau des Titres fonciers et du cadastre sont considérées comme des informations personnelles et certains de leurs aspects ne peuvent être divulgués au public. Il n’existe pas encore d’informations actualisées et disponibles pour le grand public, même si rien ne s’y oppose en fait et en droit1. Les services des Titres fonciers et du Cadastre échangent des informations sur les dossiers en cours de traitement. Toutefois, ces services échangent rarement des informations, avec la Mairie, les communes ou les services de l’urbanisme. Cela arrive de manière ponctuelle par exemple en cas de litiges portant sur des terres titrées ou en cas de procédure de saisie immobilière2. Même les données utilisées par la Mairie et les communes urbaines pour lever les taxes et impôts, notamment l’impôt locatif, sont constituées au fur et à mesure par ces mêmes services sans aucun concours du Service de l’Urbanisme. Le Bureau de Centralisation Géomatique (BCG) mis en place en 2013 et placé sous l’autorité de la 2ème Vice-présidence de la République, dispose et fournit des informations géographiques utilisables en matière foncière à tous les autres ministères, institutions publics et autres acteurs intéressés. Il faut tout simplement formuler une demande ad hoc précisant l’objet pour lequel les informations sont sollicitées. L’ISTEEBU et le Ministère de l’Intérieur ont à leur disposition les données en rapport avec le recensement général de la population, qui contiennent un volet intéressant sur la démographie et le foncier disponible pour tous les usagers. L’ISTEEBU affirme publier toutes ces informations sur son site internet alors que le Ministère de l’Intérieur conditionne l’obtention de ces informations à une demande écrite spécifique3. La direction générale de l’aménagement du territoire ne dispose pas d’archives et d’informations foncières importantes. Un travail de récupération de ces informations (schéma national et provincial d’aménagement du territoire ; plans fonciers communaux,…) serait en cours auprès d’autres entités comme la direction générale, les inspections provinciales des forêts, etc. Elles seraient ainsi mises à jour et à la disposition du public, mais cela n’est pas encore le cas4. 1 Interview avec un cadre des Titres fonciers, 18 février 2015 2 Interview avec un cadre de la direction de la planification urbaine, Dire ction générale de l’Urbanisme et de l’Habitat, 18 février 2015. 3 Interview au téléphone avec un Conseiller au Ministère de l’Intérieur 4 Interview auprès de l’antenne provinciale de l’aménagement du territoire à Ngozi. 154 | P a g e Les études menées par les organisations non-gouvernementales ou les projets de coopération fournissent de précieuses informations utilisables en matière foncière, mais il n’existe pas de cadre de partage et de capitalisation de ces données par les services et institutions étatiques. Certaines organisations comme l’Observatoire de l’Action Gouvernementale (OAG) les partagent régulièrement à travers des séances de restitution et sur leurs sites internet. L’ONG Global Rights avait également mis en place une plateforme d’informations foncières très importantes sous forme de forum électronique. L’accès est libre à tout acteur qui en fait la demande auprès des administrateurs de ce forum1. De manière générale, l’information foncière demeure incomplète, peu fiable et difficilement accessible. Les documents de politique ou les textes législatifs et réglementaires ne sont pas vulgarisés et n’existent pas dans la langue nationale, le Kirundi, ou sur des supports facilement utilisables (dépliants, brochures, supports audio,…). Les ministères sectoriels et certaines institutions concernés ont fait l’effort de mettre en place des sites internet. Seulement, l’information qui y est disponible reste sommaire et visiblement peu systématique. Il n’existe pas de site de référence comme tel, pouvant aider à trouver des informations fiables et actualisées en matière foncière. Les informations cartographiques souffrent d'un manque de mécanismes de coordination et d'un plan d'ensemble. Les levés parcellaires effectués au niveau des services étatiques et des services communaux ne sont pas tous rattachés à un référentiel unique, ce qui pose le problème de centralisation et d'accès. Dimension 5: Les chevauchements de droits (sur la base de la typologie des tenures) sont-ils minimes et engendrent-ils des frictions ou des litiges ? Note (D): Le cadre juridique et les procédures relatives au foncier (y compris les ressources renouvelables et du sous-sol) traitent des questions foncières de façon très différente et il n'existe pas de mécanisme efficace pour remédier aux chevauchements. Faute d’une information foncière fiable et actualisée, notamment sur la nature, l’étendue et la localisation des terres de l’Etat et des particuliers, il existe souvent des empiètements sur les terres de l’Etat. Ce problème est très fréquent notamment sur les terres domaniales situées à la lisière des forêts et aires protégées (Parcs Nationaux de la Ruvubu, Rusizi et Kibira). Pareils problèmes se posent aussi au niveau des terres situées à la périphérie des grandes villes où des populations rurales ne cessent de réclamer leurs terres que l’Etat fait entrer le plus souvent dans le périmètre urbain de manière arbitraire (cas du site de Gasenyi ciblé pour la construction du palais présidentiel, cas des terres de Kinyankonge, cas des terres en cours de viabilisation à Mutimbuzi sur la route de Gatumba,…). Appelés à appuyer dans la résolution de ce différent, le MEEATU ou les autres structures de l’Etat en charge de la gestion des conflits, ne sont pas à mesure de départager les protagonistes faute de documents de référence claires et non contestés. Le problème de coordination et de manque de collaboration entre plusieurs entités administratives intervenant en matière foncière conduisent aussi à des situations d’ambigüité sur les droits fonciers. Des documents de preuve contradictoires existent souvent sur les mêmes terres. Ce qui crée souvent des conflits de légitimité et de légalité par rapport aux parties au conflit et aux moyens de preuve qu’ils utilisent. Des cas existent où la CNTB, tirant avantage du poids politique à elle reconnu, a remis en cause des titres fonciers régulièrement établis sans recours à la voie juridictionnelle. 1 L’adresse URL de cette plateforme : https://dgroups.org/kit/ITONGO 155 | P a g e Egalement, il existe une confusion générale sur le patrimoine foncier des communes et celui de l’Etat. Les communes ont tendance à considérer toute terre domaniale située dans sa commune comme terre de la commune. Cela se produit essentiellement sur les terres des boisements domaniaux situées dans les communes1. Dimension 6: L'ambiguïté des mandats institutionnels (sur la base de la carte des institutions) engendre-t-elle des difficultés ? Note (D): Différentes institutions publiques traitent des questions foncières de manière très différente et il n'existe pas de mécanismes de coordination efficaces. De manière générale, il s’observe souvent une ambiguïté au niveau des mandats institutionnels des acteurs intervenant en matière foncière. Le foncier reste un territoire de compétition entre plusieurs niveaux de pouvoir. Il existe parfois aussi des conflits ouverts entre les structures judiciaires et les autres structures mises en place par l’Etat pour gérer les conflits liés à la terre, à l’instar de la CNTB. Un exemple assez récent est celui des membres de la CNTB et des administratifs à la base de la province de Bururi qui sont allés manifester devant le Parquet de la République de Bururi pour protester contre une décision de justice en juillet 20132. Il a même été rapporté à plusieurs reprises des cas où cette Commission a déchiré des Titres de propriété aux mains des particuliers alors qu’un Titre ne peut être annulé que par décision de justice. L’autre exemple de confusion au niveau des mandats institutionnels est fourni par la CFN. Elle a été instituée comme un organe consultatif mais dont les avis doivent être respectés par le gouvernement sous peine de nullité. Mais faute de moyens suffisants, le rôle de la CFN se limite souvent à avaliser les décisions prises par le MEEATU en matière de cession et de concession, ce qui handicape son efficacité comme garant de la bonne gouvernance en matière foncière3. Les mécanismes de coordination de la gestion des questions foncières qui se sont montrés relativement opérationnels sont ceux qui ont bénéficié d’un appui direct des partenaires techniques et financiers de l'Etat burundais. Alors que ces mécanismes ont eux-mêmes du mal à assurer leur continuité, en particulier depuis fin avril 2015 et la réduction de la coopération entre l’Etat du Burundi et certains de ses anciens partenaires bilatéraux actifs, ceux de l'Etat paraissent flottants et/ou lourds à gérer (ex. CIRF). 1 Voir APDH (2014) Terres domaniales et expropriations au Burundi Etat de mise en œuvre du Code foncier 18 mois après sa promulgation, étude réalisée avec l’appui de Global Rights et de la Coopération Suisse 2 http://www.iwacu-burundi.org/index.php/bururi-crise-de-confiance-entre-la-cntb-et-le-parquet/ consulté le 1er mars 2015 3 APDH(2014), Op. cit.. page 52 156 | P a g e b.2) Panel 9 / IGF 2 : Équité et non-discrimination dans le processus de prise de décisions Dimension 1: Les politiques et réglementations foncières sont-elles en place et sont-elles élaborées selon un processus participatif faisant intervenir toutes les parties prenantes ? Note (B): Une politique foncière exhaustive existe ou peut être inférée à partir de la législation en vigueur. Les segments de la population affectés par les décisions sont informés, mais leur avis n'est généralement pas demandé ni pris en compte dans la prise de décisions. De manière générale, l’élaboration des documents de politique ou des textes de lois dans plusieurs domaines de la vie nationale en général et de la gestion foncière en particulier adoptent de plus en plus une logique de concertation de tous les acteurs impliqués, à travers des consultations sectorielles et thématiques à travers tout le pays. Même les populations à la base sont de plus en plus associées à travers des consultations communautaires dans des cadres proches de la population. Tel a été le cas lors du processus d’élaboration de la lettre de politique foncière de 2010 et du Code foncier de 2011, la rédaction des Plans Communaux de Développement Communautaire. Toutefois, ces processus de consultation semblent devoir leur existence au plaidoyer des ONGs et associations ainsi que et surtout par le soutien technique et financier des partenaires techniques et financiers de l'Etat. Ce dernier, de même que ses services, ne pilote souvent de tels processus que de façade. Parfois, l'aboutissement de la consultation ne tient pas compte des avis des acteurs impliqués. Tel a été le cas pour la Commission Foncière Nationale quasi-totalement composé d'acteurs publics alors que les consultations au niveau du GSF l'avaient envisagé beaucoup plus inclusive et représentative qu’elle ne l’est aujourd’hui. Ces cadres permettent aux acteurs gouvernementaux, aux organisations de la société civile, aux partenaires techniques et financiers et à la population de contribuer à l’élaboration des outils importants pour la mise en œuvre des réformes importantes à l’instar de la réforme foncière. Cependant, cet élan de concertation cache mal un problème classique dans la formulation et la mise en œuvre des politiques et des lois au Burundi, lié en grande partie au manque de définition claire et préalable des rôles et responsabilités au sein des organes et institutions de l’Etat en général et en matière foncière en particulier. Souvent, la consultation de la population s'avère être une forme de validation rapide des réflexions menées au niveau central. La prise en compte des réalités sociales ne peut être atteinte que sur base d'une étude approfondie du contexte, sur base de la lecture qu'en font les communautés. Dimension 2: Des objectifs d’équité et de réduction de la pauvreté sont-ils incorporés dans la politique foncière et leur réalisation fait-elle l'objet d'un suivi ? Note (C): Les politiques foncières affichent certains objectifs d’équité et de réduction de la pauvreté mais leur réalisation ne fait pas l'objet d'un suivi régulier ou rigoureux. La “lettre de politique foncière” adoptée en 2010 prévoir en son axe 5 « le développement des solutions durables aux problèmes des sans terres et à l’exiguïté des parcelles ». Dans cette même optique, il avait été prévu la cession des terres des paysannats à leurs exploitants, une mesure de réparation d’une injustice à leur égard. Egalement, le Code foncier (art. 218) permet la cession à titre gratuit des terres du domaine privé de l'Etat, au profit des personnes sans terre. 157 | P a g e La même « lettre de politique foncière » définit des actions prioritaires dont la création des villages ruraux intégrés accueillant des populations mixtes et l’établissement des pôles de développement dans les zones rurales autour d’un habitat regroupé afin d’optimiser l’accès aux infrastructures et équipements de base. Des mesures d’accompagnement étaient aussi prévues, notamment l’exploitation collective des terres pour éviter le morcellement des terres, la promotion des emplois non-agricoles, l’amélioration de la fertilité des sols, etc. 1 Il faut malheureusement relever que ces mesures, comme la lettre de politique foncière dans son ensemble, n’ont pas fait l’objet d’un plan d’action et n’ont pas bénéficié des appuis nécessaires pour réellement répondre à cet objectif d’intégration de la lutte contre la pauvreté dans la mise en œuvre de la politique foncière. Il n’y a non plus aucune évaluation déjà conduite jusqu’à présent pour apprécier l’état de mise en œuvre de la lettre de politique foncière en général et de sa contribution à la lutte contre la pauvreté et la promotion de l’équité en matière foncière. Le document de lettre de politique foncière est resté aussi lacunaire sur la question de l’équité hommes-femmes en matière d’accès à la terre. Selon le dernier recensement général de la population et de l’habitat au Burundi (RGPH, 2008), 80,2% des Burundais ont une propriété foncière mais seulement 17,7% d’entre eux sont des femmes. Le gouvernement burundais a reconnu la persistance de ces inégalités entre hommes et femmes par rapport à l’accès et l’exploitation de la ressource foncière, notamment lors de son évaluation de « Beijing + 20 »2. Dimension 3: Des objectifs de protection et de durabilité de l'environnement sont-ils incorporés dans la politique foncière et leur réalisation fait-elle l'objet d'un suivi ? Note (C): Les politiques foncières affichent certains objectifs d’écologie et de durabilité de l'environnement mais leur réalisation ne fait pas l'objet d'un suivi régulier ou rigoureux. L’analyse des défis faite préalablement à l’élaboration de la lettre de politique foncière a relevé la problématique de surexploitation et de dégradation des terres comme un des défis majeurs en matière foncière au Burundi. Il existe également une cohérence entre la lettre de politique foncière et la Stratégie Nationale de Gestion durable des terres. Toutefois, la lettre de politique foncière reconnaît n'être pas la seule à définir la politique foncière puisqu'"elle précise et complète d'autres notes stratégiques et textes relatifs à la gestion des terres, notamment dans les domaines de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme ou de l'environnement"3. Il existe un nombre assez important de politiques relatives à la protection de l'environnement :  La Stratégie Nationale et Plan d’Action en matière d’Education Environnementale et de Sensibilisation ;  Le Cadre national de biosécurité : En conformité avec les exigences de précaution fixées par la convention de Rio, le Cadre national de biosécurité s'est donné pour objectif général de développer la biotechnologie moderne autour d'un système participatif de biosécurité. Parmi ses objectifs spécifiques se trouve "la promotion de la prévention des risques de la biotechnologie moderne"4. 1 République du Burundi (2010) Lettre de Politique foncière, points 42, 43 et 44 2 Gouvernement du Burundi, Rapport national d’évaluation de mise en application du programme d’action de Beijing (Beijing + 20), juin 2014 3 République du Burundi, Lettre de Politique Foncière, Bujumbura, 2010, p. 3. 4 République du Burundi, Cadre national de biosécurité, Bujumbura, 2006, p. 23. 158 | P a g e  La Politique nationale d'assainissement: l'absence d'assainissement est perçue comme une entrave au développement du pays et au bien-être de ses habitants1.  La Stratégie nationale et plan d'action de lutte contre la dégradation des sols2.  La Stratégie nationale de l'eau 2011-2020, Etc. Comme on s'en rend compte, il n'existe donc pas de politique foncière unifiée au Burundi. La définition des objectifs en rapport avec la protection et la durabilité de l’environnement n'ayant pas été faite dans un cadre national global, il se pose le problème de mise en place d’un plan d’action cohérent de la mise en œuvre de l'ensemble de ces politiques. Faute de plan d’action, le suivi demeure également faible. Il n’existe pas encore des cadres consolidés de suivi-évaluation. L’Office Burundais pour la Protection de l’Environnement assure pouvoir y remédier avec l’appui de ses partenaires. Le décret qui crée cet Office se réfère à une « commission nationale de l’environnement » dont la création – même juridique - ne semble pourtant confirmée par aucun texte légal, pas même le code de l’environnement. Il existe une expérience intéressante en rapport avec le suivi des changements climatiques au niveau du pays qui produit et vulgarise un rapport périodique sur l’état des lieux en la matière depuis plusieurs années3. Ce qui est en soi très intéressant même s'il importe de se demander l'usage concret qui est fait de ces rapports. Le suivi se heurte aussi à un problème de ressources financières, matérielles et humaines. Les efforts de mobilisation des budgets sont beaucoup plus orientés vers la recherche des moyens de fonctionnement des institutions en charge de la gestion foncière et de la protection de l’environnement, plutôt que vers l’évaluation des défis et la recherche des solutions aux problèmes identifiés. Dimension 4: Le coût de mise en œuvre de la politique foncière est-il chiffré, comparé aux résultats, et couvert par des ressources suffisantes ? Note (C): Le coût de mise en œuvre de la politique foncière n’est pas totalement chiffré et/ou le budget ou les capacités humaines et institutionnelles sont très insuffisants pour mettre en œuvre la politique. Il n’existe pas de prévisions chiffrées depuis l’adoption de la lettre de politique foncière, comme il n’existe pas non de plus de plan d’action pour sa mise en œuvre avec des indications claires sur les stratégies à mettre en œuvre et résultats à atteindre. Le processus d’élaboration des budgets demeure classique : les entités du MEEATU (directions générales, administrations personnalisées comme le cadastre,…) et des autres ministères impliqués dans la gestion foncière établissent leurs prévisions de dépenses sur base de ce qu’ils pensent être les priorités au cours de l’exercice budgétaire à venir, mais sans nécessairement les connecter à des actions et des résultats destinés à la mise en œuvre de la politique foncière dans l’ensemble. Il n’existe pas de concertation préalable entre les acteurs de la mise en œuvre de cette politique pour fixer les priorités et proposer des budgets conséquents. 1 République du Burundi, Politique nationale d'assainissement du Burundi et stratégie opérationnelle. Horizon 2025, Bujumbura, 2013, p. 11. 2 République du Burundi, Stratégie nationale et plan d'action de lutte contre la dégradation des sols, MEEATU, Bujumbura, 2011. 3 Interview avec un cadre de l’OBPE 159 | P a g e Les dotations budgétaires aux nouveaux organes de mise en œuvre de la réforme foncière, notamment la CFN, ont été intégrés dans les budgets du MEEATU. Pour la 4ème année consécutive, le budget de la CFN a été fixé à 80 millions FBU dans la loi budgétaire de 20161. Ceci témoigne d’un manque d’ambitions dans la mise en œuvre des missions de la CFN, autrement rien ne justifie que ses budgets restent uniformes sans tenir compte des défis et des priorités en présence. En outre, les appuis financiers externes des projets de coopération appuyant la réforme foncière continuent à être gérés de manière individuelle par les projets, sans que ces derniers adoptent la logique d’un « fonds commun » pouvant servir à canaliser les ressources du Gouvernement et de ses partenaires et de les affecter à la réalisation d’un plan d’action global arrêté en fonction des besoins et des priorités du pays en matière foncière. Les prévisions de la lettre de politique foncière en rapport avec la mise en place d’une Cellule nationale ad hoc chargée plus spécifiquement du suivi opérationnel de la mise en œuvre de la réforme et des actions financées par les partenaires au développement, sous l’autorité d’un Ministère en charge des terres qui pilote et coordonne l’ensemble des actions en matière de foncier ainsi que l’adoption d’un plan stratégique sur 5 ans pour la mise en œuvre de la politique foncière n’ont pas encore eu lieu, 5 ans après l’adoption de la lettre de politique foncière2. Par contre, en 2014, le Gouvernement du Burundi a décidé d'allouer un montant global de 80 millions de FBU en appui aux services fonciers communaux. Le groupe de travail sur la « Gestion foncière décentralisée » avait convenu d'affecter ce montant aux services dont le financement externe a été rompu, l'Unité de Coordination du Programme National Foncier étant chargée de la gestion de cette allocation. Bien évidemment, ce montant ne permet pas de couvrir les besoins en mise en place et fonctionnement des services fonciers communaux. La nouvelle loi communale du 28 novembre 2014 alloue aux communes une subvention de 500 millions de FBU chacune pour financer son fonctionnement et ses investissements de développement. Le budget national 2017 intègre cette subvention. Si elle est effectivement concrétisée, cette subvention devrait en partie utilisée pour la mise en œuvre de la politique foncière, notamment par la création des services fonciers communaux et leur intégration dans la gestion communale. Dimension 5: Existe-t-il des rapports publics réguliers pour rendre compte des progrès dans la mise en œuvre de la politique ? Note (C): Les administrations foncières formelles rendent compte de leur progrès dans la mise en œuvre de la politique foncière mais de façon sporadique ou bien d’une façon qui ne permet pas un suivi rigoureux des progrès réalisés dans les différents domaines. Il n’existe pas de rapports publics relativement à la mise en œuvre de la politique foncière dans l’ensemble, en dehors des rapports de mise en œuvre des projets ad hoc. Il n’existe pas non plus de cellule technique interministérielle en charge de recueillir, capitaliser et traiter les informations foncières de diverses natures comme cela avait été recommandé par plusieurs études dans le passé. Des études et/ou inventaires des terres domaniales ont été faits par différents intervenants étatiques ou non-étatiques. Curieusement, il est difficile d'y mettre la main au niveau du Ministère en charge des terres. 1 Loi n° 1/22 du 31 décembre 2015 portant fixation du budget général de l’Etat pour l’exercice 2016. 2 République du Burundi (2010) Lettre de politique foncière, page 13. 160 | P a g e Le même problème se rencontre en ce qui concerne les données en rapport avec la subdivision administrative et l'évolution des effectifs de la population au niveau du Ministère de l'Intérieur. Or, la planification des projets de développement et de gestion foncière devrait impérativement en tenir compte. L’une des missions confiées au Secrétariat Permanent de la CFN est de « …faciliter et coordonner la collecte des données pour constituer une base de données foncières fiables pouvant permettre un débat politique éclairé et constructif ». Pour cela, il faudra que la CFN soit dotée de moyens matériels, financiers et humains suffisants. Actuellement, elle n'arrive à s'acquitter que de ses missions les plus essentielles, notamment la vérification préalable avant cessions et/ou concessions portant sur les terres du domaine privé de l'Etat. Les Ministères, dont le MEEATU, présentent chaque année au public et à l’Assemblée Nationale, un bilan de leurs réalisations. Ces rapports constituent une occasion intéressante de présenter les avancées et les défis mais il s’agit des rapports d’ensemble qui ne permettent pas de mesurer les progrès sur une thématique sectorielle comme le foncier. L’approche de rapports thématiques interministériels, à l’instar des rapports de mise en œuvre du Cadre stratégique de croissance et de lutte contre la pauvreté seraient mieux indiquée. Dimension 6: La politique foncière fait-elle en sorte que des terres adaptées soient à la disposition des petits agriculteurs et qu'il y ait des logements pour les groupes à faible revenu ? Note (C): Des politiques sont en place pour améliorer l'accès aux biens et leur mise en valeur par les pauvres et les groupes marginalisés mais elles ne sont pas appliquées. Le document de politique sectorielle du Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage1 relève que « la mise en œuvre des activités spéciales en faveur des catégories sociales vulnérables (rapatriés, déplacés, chômeurs, démobilisés, enfants abandonnés ou orphelins et femmes veuves chef de ménage) » rentre dans les priorités d’intervention du Ministère. Dans la pratique, le Ministère indique faire recours au MEEATU pour attribuer des terres à des personnes vulnérables, essentiellement des rapatriées identifiés par le Ministère de la Solidarité Nationale, du Genre et des Droits de la Personne Humaine. Et cette tâche devient de plus en plus compliquée au regard des problèmes d’exiguïté des terres sur l’ensemble du territoire. Le ministère encourage aussi des activités en associations, orientées vers le développement des cultures de filières et la consolidation des unités agricoles. Ceci cadre avec les orientations de la lettre de politique foncière en rapport avec le développement des solutions alternatives aux problèmes des terres et à l’exiguïté des parcelles. Il n’existe cependant pas encore un plan d’action cohérent de plus ou moins long terme dans le sens de favoriser les petits exploitants agricoles dans l’accès et l’utilisation des terres. Cette option reste envisagée dans le cadre de la promotion des coopératives agricoles à l’étude2. L’accès au logement pour les personnes à faible revenu devient de plus en plus problématique. L’ECOSAT et la Direction générale de l’Urbanisme et de l’Habitat affirment orienter actuellement leurs actions dans le sens d’aider les fonctionnaires moyens à acquérir le premier logement mais reconnaissent que l’offre immobilière actuelle n’est pas financièrement à la portée des personnes à faible revenu3. Le problème est compliqué par la suppression de l’investissement du Gouvernement dans la production des parcelles et la construction des maisons qui étaient attribués aux fonctionnaires en « location-vente ». 1 République du Burundi, Politique sectorielle du Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage, Relance et Développement durable du secteur agricole, Bujumbura, mai 2006 2 Entretien avec un cadre de la Direction provinciale de Kayanza, 19 février 2015. 3 Entretien avec un cadre de l’Ecosat, 1 mars 2015 161 | P a g e L’exigence de participation aux frais de viabilisation imposée aux attributaires des parcelles limite l’accès au logement car la plupart des fonctionnaires moyens n’arrivent pas à s’acquitter de cette obligation, ce qui leur fait perdre les parcelles dont ils avaient bénéficié 1. L’autre défi est lié à l’absence de l’investissement privé, comme celui du secteur bancaire, dans la production du logement à des taux accessibles. Le Fonds de promotion de l’habitat urbain n’arrive plus à satisfaire la demande des crédits logements devenue très élevée faute d’autres institutions d’appui dans ce secteur. Et cela conduit à l’implan tation des quartiers « sauvages » dans les zones périphériques où les fonctionnaires à faible revenu paient des parcelles moins chères et construisent sans respect des normes urbanistiques minimales. Dimension 7: La politique foncière parvient-elle à empêcher les établissements humains dans les zones à risque élevé et promeut-elle la préparation contre les futurs risques de catastrophe ? Note (C): Il existe une politique pour empêcher les établissements humains dans les zones à risque élevé mais elle n'est pas appliquée. Le Burundi connaît de plus en plus d'accidents naturels, essentiellement en rapport avec les inondations et les éboulements de terre. Le cas le plus parlant est celui des inondations qui ont ravagé le Nord de la Mairie de Bujumbura en février 2014. Les fortes précipitations de la nuit du 9 ont causé d'importantes montées et coulées d’eau qui ont emporté 77 vies humaines, 1.000 habitations, laissant 20.000 personnes sans abris2. En outre, les nombreuses habitations construites le long des 6 rivières traversant la ville de Bujumbura sont constamment menacées d'effondrement. Il n'est pas rare d'entendre des cas de destructions et d'ensevelissements de maisons d'habitation suite aux glissements de terrains le long de la route Bujumbura- Rumonge. En mars 2015, des pluies torrentielles ont coupé deux ponts et détruit 180 maisons, ensevelissant plusieurs écoles et églises. Le 2 novembre 2015, des crues ont détruit 320 maisons, 33 salles de classes et 3 écoles. De tels cas s'observent également dans d'autres régions du pays comme en témoignent les récents débordements des rivières Ruvubu et Ruvyironza en janvier 2016. Ces inondations ont endommagé un barrage hydro-électrique national et une mini-centrale alimentant le Grand Séminaire de Burasira. A la suite de ces phénomènes et en prévision du phénomène El Nino 2015, le gouvernement burundais a adopté en novembre 2015 un « Plan de réponse » aux catastrophes naturelles censé couvrir 6 mois (novembre 2015 à avril 2016). Ce plan prévoyait entre autres la mise en place d’une cartographie des zones à risque régulièrement mise à jour 3. Malgré cela, le Gouvernement ne semble pas avoir tiré les leçons qui s'imposent. Les extensions de la ville de Bujumbura se poursuivent dans les mêmes plaines inondées, les extractions de carrières quasi-anarchiques dans les rivières qui traversent la ville continuent tandis que les mesures de protection des lits de ces rivières tardent à venir. Le défi actuel pour le MEEATU est de revoir les plans d’aménagement du territoire pour encourager une utilisation des sols qui tient compte de l’aptitude et de la fragilité des terres au niveau local et national. Ceci passe par le renforcement des capacités des institutions gouvernementales en matière d’évaluation des aléas ou des risques ou dans l’utilisation des résultats d’évaluation des risques4. 1 Idem 2 République du Burundi, Burundi : analyse des facteurs de risques, évaluation des dommages et propositions pour un relèvement et une reconstruction durables. Evaluation rapide et conjointe suite à la catastrophe des 9-10 février 2014 aux alentours de Bujumbura, Bujumbura. 3 Plan de réponse catastrophe naturelle : inondation (El Nino 2015), novembre 2015, 31 p. 4 Plan d’action pour le renforcement des capacités nationales pour la réduction des risques, la préparation et la réponse aux urgences au Burundi 2013-2016 162 | P a g e Chapitre V – Matrice d’Actions1 PANEL 1 : RECONNAISSANCE DE LA TENURE FONCIERE Indicateurs/Moyens de Vérification/ Résultats Recommandations Services / Agences responsables (à court, moyen, long termes) MEEATU  Les rapports d’études  Capitaliser et poursuivre les diverses études menées sur la soutenabilité CFN  Nbre et diversité (multidisciplinarité) des financière des SFC en y associant des acteurs et experts de la PTF sources de données recueillies pour ces décentralisation, de la fiscalité et de la promotion du Genre. GSF et OSC études  Avec des cas rapportés et analysés, le  Engager le secrétariat de la CFN dans des pratiques et une procédure MEEATU / CFN monitoring des SFC par la CFN permet de écrite et organisée de suivi-évaluation des SFC pour relever et soutenir Ministère de l’Intérieur documenter les défis financiers, de les bonnes pratiques, anticiper et aider au redressement et à la Ministère du Développement formation professionnelle, de qualité et correction des problèmes ou des phénomènes négatifs émergeant communal quantité de services des SFC  Le code promulgué  Nbre de personnes bénéficiant des services Ministère de la Justice de vulgarisation  Promulguer un code des régimes matrimoniaux, des successions et Ministre des Droits Humains, des  L’évolution du nbre de titres et certificats des libéralités et en assurer la plus large vulgarisation possible Affaires Sociales et du Genre fonciers inscrits aux noms de femmes ou des Organisations de la SC deux conjoints  L’évolution du nbre de microcrédits accordés à des femmes  Les textes d’application (décret, ordonnances et manuels) promulgués du code foncier relatifs aux droits sur les marais  Clarifier le Code foncier (articles 444 et 448, alinéas 2) sur le statut des MEEATU et Ministère de  Nbre de bas-fonds et marais démarqués à droits exercés sur les marais l’Agriculture et de l’Elevage l’aide des outils promulgués et produits  Nbre de marais du domaine public dégagés d’exploitations nuisibles  Circulaires émises et remises aux  En attendant le mesurage et bornage des terres dites « hors paysannat », administratifs concernés lever le blocage systématique pratiqué à l’encontre de l’enregistrement MEEATU / DGAT  Nbre de descentes et réunions avec les des terres des paysannat en octroyant les droits à ceux qui peuvent s’en Ministère de la Justice responsables territoriaux abritant des prévaloir à l’aide des dossiers sur les cessions et concessions sur les Tribunaux de Grande Instance paysannats paysannats collectés, scannés, archivés et remis par le PAGGF à la PAGGF  Nbre de terres de paysannat certifiées DGAT.  Nbre de jugements rendus en faveur de l’enregistrement de terres de paysannat 1 Recommandations prioritaires par thème retenues lors de l’atelier de validation du Rapport PANEL 1 : RECONNAISSANCE DE LA TENURE FONCIERE (Suite) Indicateurs/Moyens de Vérification/ Résultats Recommandations Services / Agences responsables (à court, moyen, long termes)  Faire dresser une liste de tous les Batwa sans terre, et mettre à leur Ministère de l’Intérieur  Nbre de Batwa enregistrés dans la campagne disposition une expertise juridique pour la rédaction de demandes Associations en charge de la  Nbre de demandes de terres introduites par individualisées de terres au MEEATU, assurer le suivi des dossiers y Promotion des droits des Batwa les Batwa soutenus afférents.  Nbre de consultations organisées entre Associations en charge de la pouvoirs publics et Batwa  Elaborer de manière participative et mettre en œuvre une politique Promotion des droits des Batwa  Nbre de Batwa ayant participé aux nationale d'intégration volontariste d’insertion des Batwa qui inclurait Ministre des Droits Humains, des consultations organisées en vue de la des solutions de compromis sur leurs droits fonciers Affaires Sociales et du Genre politique à définir  Nbre de suggestions venues de Batwa  La loi promulguée  Promulguer une loi régissant la procédure et les conditions de vente des Ministère de la Justice  Evolution du nbre de jugements rendus se terres MEEATU référant explicitement à la nouvelle loi  La loi promulguée  Promulguer une loi sur les baux fonciers et en assurer la plus large Ministère de la Justice  Evolution du nbre de jugements rendus se vulgarisation possible MEEATU référant explicitement à la nouvelle loi  Nbre et diversité des expériences et Consortium d’Association de  Mener une étude générale sur les obstacles au droit de l’égalité des initiatives antérieures inventoriées et Défense et de Promotion des droits fonciers des hommes et des femmes qui propose des stratégies de analysées de manière critique dans l’étude Droits humains résolution du problème qui diagnostique, prend en compte et tire des  Nbre et diversité des bonnes pratiques du MEEATU leçons du bilan des approches, des initiatives et des expériences Burundi et d’ailleurs citées et prises en Ministre des Droits Humains, des antérieurs tentées à ce sujet compte dans l’étude Affaires Sociales et du Genre  L’étude publiée Ministre des Droits Humains, des  Nbre et proportions de certificats fonciers  A l’échelle locale (collinaire ou communale), amorcer un projet pilote à Affaires Sociales et du Genre inscrits aux noms de femmes caractère économique pour rendre plus visible le rôle d’acteur Ministère de l’Intérieur  Nbre de terres dont le commerce et le économique de la femme et favoriser l’octroi ou la reconnaissance des Administrations communales bénéfice des produits sont effectivement droits de propriété foncière de la femme pilotes contrôlés par des femmes Ministère de la Justice  Recenser auprès des cours et tribunaux les décisions les plus Ministre des Droits Humains, des évolutionnistes en matière de droit successoral et s’en servir dans les  Nbre de tribunaux visités Affaires Sociales et du Genre ateliers et sessions de formation ou perfectionnement des magistrats sur  Nbre de décisions évolutionnistes collectées Organisations de la SC ce droit CFPJ PANEL 2 : DROITS SUR LES TERRES FORESTIERES ET COMMUNAUTAIRES ET REGLEMENTATION DE L'UTILISATION DES TERRES RURALES Indicateurs/Moyens de Vérification/ Résultats Recommandations Services / Agences responsables (à court, moyen, long termes)  Accélérer l’élaboration et l’adoption participatives d’un plan national  Le plan d’aménagement national du 2ème VP de la République d’aménagement du territoire sur base notamment des Schémas territoire adopté MEEATU Provinciaux d’Aménagement du Territoire (SPAT), des ortho  Décision et avis du MEEATU et de la CFN Bureau central de Géomatique photographies réalisées en 2012 et des données d’inventaire des terres se référant explicitement et tenant IGEBU domaniales déjà disponibles. effectivement compte dudit Plan  Nbre d’accords de partenariat pour la gestion des domaines forestiers de l’Etat, des communes ou des établissements  Accélérer la mise en œuvre effective d’une gouvernance participative publics dans la gestion des ressources naturelles collectives notamment à conclus entre des structures de gestion travers : (i) le renforcement des performances des institutions en charge participative et les services publics de la gestion des aires protégées et forêts artificielles en ressources MEEATU compétents et validés par la commission humaines, techniques et financières (ii) une forte implication des OBPE nationale forestière autorités et des communautés locales (iii) la formation des membres des  Nbre de contrats de gestion signés sous la associations/groupements en matière de gestion durable des ressources supervision de l’administration forestière naturelles entre les propriétaires des boisements privés et les tiers, groupés ou non en associations, dans les conditions prévues par le code forestier et ses textes d’application  Les plans adoptés  Nbre de populations riveraines ayant  Elaborer, sur une base participative, des plans d’aménagement et de participé aux réunions de consultation et de gestion de toutes les aires protégées et des boisements et déterminer les MEEATU préparation des plans normes d’exploitation des ressources naturelles en général et celles dont OBPE  Rapports de monitoring sur l’exploitation l’accès par les populations locales est autorisé (produits forestiers non des aires protégées ligneux)  Evolution du nbre de cas rapportés de violation des accords de gestion 165 | P a g e PANEL 2 : DROITS SUR LES TERRES FORESTIERES ET COMMUNAUTAIRES ET REGLEMENTATION DE L'UTILISATION DES TERRES RURALES (Suite) Indicateurs/Moyens de Vérification/ Résultats Recommandations Services / Agences responsables (à court, moyen, long termes)  La procédure et le canevas établis  Le nombre d’études d’impact se conformant au canevas et apportant les informations et données requises pour informer les  Elaborer une procédure et un canevas précis pour la réalisation d'une MEEATU processus de décision étude d'impact environnemental et les modalités de leur examen et OBPE OSC  Le nombre de décisions et avis sur des évaluation projets d’exploitation à impact environnemental et foncier positivement influencées par les études d’impact ainsi réorientées et réorganisées  Nbre de personnes ayant participé aux consultations  A l’issue d’une large consultation de la population et après une étude  Rapport d’étude d’impact d’impact environnemental et social, intégrer dans le réseau des aires MEEATU  Décrets de création des nouvelles aires protégées les écosystèmes et les espaces riches en biodiversité qui ne le OBPE protégées sont pas encore  Rapports de monitoring sur l’état de protection et conservation des nouvelles aires protégées PANEL 3 : UTILISATION DU SOL, PLANIFICATION ET DEVELOPPEMENT URBAINS Indicateurs/Moyens de Vérification/ Résultats Recommandations Services / Agences responsables (à court, moyen, long termes)  Nbre et diversité des participants aux  Promouvoir des activités de planification participative d'aménagement, activités d’aménagement dans le cadre de l'élaboration des plans d’occupation des sols et des MEEATU  Plans d’aménagement issus des schémas directeurs d’aménagement et d’urbanisme (SDAU) consultations  Soumettre à évaluation au moins un des 12 SPAT produits en identifiant les compléments d'opérations et les mises à jour éventuelles 2ème VP de la République Nbre et diversité des mises à jour effectuées sur à faire pour établir des références méthodologiques fiables avant MEEATU le SPAT sélectionné l'extension à tout le territoire.  Accélérer le processus de formalisation des droits exercés sur les terres urbaines qui répondent aux critères et conditions préalables de MEEATU Nbre de titres et certificats fonciers délivrés formalisation 166 | P a g e PANEL 4 : GESTION DES TERRES DOMANIALES Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes)  Qualité des informations du répertoire de la CFN ventilées par acte (cessions, concessions,  Auditer la procédure suivie devant le MEEATU et la CFN et le expropriations) bilan de leurs avis et de leurs actes sur les cas de cessions et de Assemblée nationale  Qualité des outils de travail et de concessions domaniales et d’expropriations pour cause d’utilité OSC référence de la CFN publique  Nbre, qualité et diversité des apports et contributions des membres de la CFN dans la procédure d’avis et décisions  Qualité des informations du répertoire de la CNTB ventilées  Qualité des outils de travail et de  Auditer la procédure suivie par la CNTB et le MEEATU ainsi que Assemblée nationale référence de la CNTB le bilan de leurs avis et de leurs actes dans leur mandat de OSC  Nbre, qualité et diversité des apports récupération des terres domaniales irrégulièrement attribuées et contributions des membres de la CNTB dans la procédure d’avis et décisions Nbre de terres domaniales irrégulièrement attribuées :  En tenant compte des recommandations des audits ci-haut cités,  identifiées et répertoriées procéder à un inventaire exhaustif de toutes les terres domaniales MEEATU  retournées par un acte officiel dans le irrégulièrement attribuées ou occupées, pour ensuite prendre des CFN domaine de l’Etat actes administratifs portant leur retour dans le domine de l’Etat.  effectivement retournées de dans le domaine de l’Etat  Nbre et participants aux réunions de  Promulguer un texte réglementaire sur les compétences de gestion consultations tenues à l’initiative de Présidence de la République des terres domaniales et organiser un débat à l’intention du l’Etat sur le sujet MEEATU Gouvernement, de la commission foncière nationale et des hauts  Le texte réglementaire promulgué GSF cadres intervenant dans la gestion des terres domaniales  Les compétences en matière de gestion foncière sont mieux réparties 167 | P a g e PANEL 4 : GESTION DES TERRES DOMANIALES (Suite) Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes)  Nbre et nature des initiatives prises pour assurer la diffusion des inventaires des terres domaniales produits  Assurer une large diffusion et l’accessibilité publique des MEEATU  Nbre de visites et de téléchargements inventaires des terres domaniales produits et validés PAGGF sur le site Web contenant les inventaires  Nbre de visites effectuées aux lieux de conservation des inventaires pour les consulter  Nbre, fonction et diversité des participants auxdites réunions  Organiser une réunion annuelle traditionnelle à l’intention des  Nbre et nature des recommandations membres du Gouvernement, présidents des conseils communaux, Présidence de la République issues des réunions des administrateurs communaux et des gouverneurs de province MEEATU  Qualité du suivi des sur les règles et le bilan de la gestion des terres domaniales de GSF recommandations l’Etat et des communes  Influence objectivement mesurable des réunions sur les actes de gestion des autorités participantes  Le manuel de procédure publié  Elaborer un manuel de procédure sur la gestion des terres MEEATU  Les données des rapports de domaniales CFN monitoring annuellement présentés sur la gestion des terres domaniales  Soumettre toutes les demandes de cession ou concession  Le canevas conçu par la CFN domaniale au remplissage d’un formulaire conçu notamment  Nbre des entrées du canevas pour permettre :  Nbre des données nouvelles  d’apprécier la conformité de la procédure et de l’avis ou de la MEEATU apparaissant dans les outils de travail décision à prendre avec la loi et les règlements du Burundi du MEEATU et de la CFN (ex.: superficies demandées pour établir compétences de CFN décision) ; Ministère de l’Intérieur  Nbre de décisions explicitement  la prise en compte dans les décisions/avis des schémas orientées par les données nouvelles d’aménagement du territoire, des plans fonciers locaux, des recueillies grâce à l’aide des stratégies et des politiques nationales de développement instruments de travail nouvellement économique et social utilisés par le MEEATU et la CFN  Faire signer les procès-verbaux des réunions de la CFN par tous MEEATU Nbre de PV signés par tous les membres ses membres CFN de la CFN 168 | P a g e PANEL 4 : GESTION DES TERRES DOMANIALES (Suite) Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes) MEEATU  Nbre d’avis et de décisions de  Soumettre les projets de décisions de cessions et concessions Ministères concernés cessions et concessions publiés domaniales à publicité (y compris Web) et affichage public CFN  Nbre de lieux où les décisions sont préalable et les décisions au Bulletin Officiel du Burundi (B.O.B.) Administrations communales publiées Nbre de plans cartographiques annexés  Annexer aux rapports de la CFN et aux avis d’attribution les plans MEEATU aux avis favorables de cessions ou cartographiques des terres objet de cession ou concession CFN concessions domaniales  Nbre et diversité des participants à la Présidence de la République retraite MEEATU  Nbre et qualité des avis et des  Organiser une retraite sur les principes, la procédure, le bilan et la Ministère de l’Intérieur recommandations issus de la Retraite stratégie des expropriations foncières PTF  Les violations de la procédure et des actes d’expropriation régressent en nbre  Nbre de projets à impact reçus par le  Instruire aux Ministères techniques concernés de soumettre avec Présidence de la République MEEATU et la CFN préavis leurs projets avec (i) besoins fonciers et/ou (ii) projet ou 1ère VP de la République  Nbre et diversité des services ayant risque d’expropriation au MEEATU et à la CFN (en suivant un 2ème VP de la République envoyé au MEEATU et à la CFN canevas élaboré par la CFN) MEEATU leurs projets en suivant le canevas à cet usage  Nbre d’auditions (en commissions ou  Débattre périodiquement avec le MEEATU du projet et des bilans en plénière) du MEEATU au des cessions, concessions domaniales et des expropriations Assemblée nationale Parlement (passées, en cours ou programmées) pour en vérifier la conformité Sénat  Qualité et diversité des sujets suivis à avec les bonnes politiques nationales et le Code foncier. l’agenda de ces auditions  Compte-rendu de ces auditions  Nbre de sorties de sensibilisations Ombudsman ventilées par acteurs de vulgarisation  Sensibiliser et former la population sur ses droits et devoirs en cas Assemblée nationale  Nbre de personnes sur sites d’expropriation Sénat OSC d’expropriation (réelle ou en vue) ayant participé à ces activités 169 | P a g e PANEL 4 : GESTION DES TERRES DOMANIALES (Suite) Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes)  Données collectées et ventilées par numéros des dossiers, année, localités, nombre, origines et  Au service statistique du Ministère de la justice, centraliser les revendications des plaignants, durées informations et les statistiques ressortissant des juridictions Ministère de la Justice de procédure, décisions judiciaires administratives en rapport avec les dossiers d’expropriation  Les données recueillies informent les politiques et pratiques publiques en matière d’expropriation à titre préventif  Données ventilées notamment par année, localités, superficies, causes d’expropriation, indemnités prévues  Dresser et conserver un répertoire général des terres expropriées et MEEATU et acquittées, nbre d’expropriés. leur destination, come exigé par l’article 437 du code foncier. Ministère de l’Intérieur  Les données recueillies informent les politiques et pratiques publiques en matière d’expropriation à titre préventif  L’OM promulguée  Promouvoir la promulgation d'une ordonnance ministérielle fixant Présidence de la République  Montant des indemnités inscrites aux les tarifs minimaux d'indemnisation basés sur les prix du marché, MEEATU budgets et exécutées en cas d’expropriation Ministère des Finances  Tarif et montant des indemnités effectivement payées  Le Manuel adopté et publié  Nbre d’expropriations ayant suivi la  Elaborer et adopter par décret un manuel de procédure des MEEATU procédure du manuel expropriations pour cause d’utilité publique CFN  Nbre et proportion d’indemnités payées préalablement 170 | P a g e Panel 5 : Transparence des procédures et avantages économiques du transfert des terres publiques à un usage privé Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes)  Nbre de contrats de bail examinés et Examiner et réévaluer les contrats de bail sur les terres domaniales à réévalués l’aide des données recueillies par le PAGGF sur 12.300 dossiers, dont MEEATU  Nbre de visites sur terrain effectuées 11.325 au niveau provincial et 975 au niveau national (ministériel). CFN dans le cadre de cet Inscrire les prévisions de recettes sur les redevances domaniales et les PAGGF examen/réévaluation locations de terrain dans la procédure annuelle de planification et OSC  Evolution des montants de d’évaluation budgétaire pour garantir une performance stable en redevances domaniales acquittées matière de collecte.  Nbre de contractuels dont les contrats Panel 6 : Accès public aux informations foncières : registre et cadastre Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes) Ministère de la Justice  Evolution du montant des tarifs de Direction des Titres fonciers redevance Actualiser le tarif des redevances en les alignant sur les prix du marché MEEATU  Différentiel entre montants des tarifs CFN  Evolution du montant des recettes  Compte-rendu du débat  Engager un débat avec tous les acteurs et intervenants publics et  Les besoins requis pour assurer la privés intéressés sur la stratégie d’utilisation et de mise à jour MEEATU maintenance et la mise à jour des rationnels, efficients et pérennes des données que le PAGGF CFN données collectées par le PAGGF collecte, scanne et archive depuis plus de deux ans sur les cessions PAGGF sont évalués et concessions de terres domaniales à travers tout le pays  Un plan réaliste de relève du PAGGF est adopté  Le nbre et la diversité des « entrées »  Promouvoir la constitution et la mise à jour régulière d’une base Présidence de la République de la base de données intégrée de données numériques sur le foncier, incluant les titres et 1ère VP de la République  Les données recueillies permettent de ème les certificats fonciers délivrés, les informations géo-spatiales 2 VP de la République MEEATU produire des cartes foncières fiables attachées aux terres domaniales cédées, concédées ou non (y CFN et précieuses à la planification de compris les marais), les terres appropriées certifiées, etc. Bureau Central de Géomatique l’occupation et de l’exploitation des espaces 171 | P a g e Panel 6 : Accès public aux informations foncières : registre et cadastre Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes)  Doter les services techniques tels que le Cadastre, l'IGEBU, Présidence de la République Evolution du montant et de la quantité des l'Aménagement du Territoire et le Bureau Central de Géomatique 1ère VP de la République moyens mis à disposition du Cadastre, de des moyens nécessaires pour être notamment en mesure de 2ème VP de la République MEEATU l’AT, du BCG pour contribuer à la contribuer efficacement à la constitution et à la mise à jour de la Ministère des Finances constitution et à la mise à jour de la base base intégrée de données foncières Assemblée nationale intégrée de données foncières Panel 7 : Estimation de la valeur des biens immobiliers fonciers et fiscalité foncière Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes)  Nbre, noms, fonctions et genre des personnes ayant participé aux  Organiser des consultations avec les autorités centrales et locales consultations concernées ainsi que les acteurs privés impliqués pour développer  Une stratégie fiscale adoptée à l’issue une stratégie, revoir et rééquilibrer la loi de mars 2016 sur la Ministère des Finances MEEATU des consultations soutient réforme de la fiscalité communale, ce afin de ruraliser l’impôt Mairie de Bujumbura Conseils l’introduction d’un impôt foncier sur foncier (terres non bâties) avec souplesse et créer des rapports communaux les terres rurales, bâties et non bâties productifs de réciprocité de services entre d’une part les entités PNUD / BAD / BM / UE  La loi sur la réforme de la fiscalité locales décentralisées ou déconcentrées et d’autre part les citoyens communale est amendée et introduit et leurs communautés respectives. un impôt foncier sur les terres rurales, bâties et non bâties  Assurer une plus grande transparence, d’une part sur les MEEATU La Mairie de Bujumbura publie prévisions et les résultats comparés de recettes en impôts fonciers Ministère des Finances Mairie de annuellement le montant des recettes de et d’autre part sur les prévisions et les exécutions des dépenses Bujumbura Communes urbaines l’impôt foncier ainsi que ses projets tirées de ces mêmes recettes PNUD / BAD / BM / UE d’investissement des recettes recueillies  Le personnel chargé de la collecte des impôts dans la mairie de  Renforcer les effectifs et les capacités techniques du personnel Bujumbura et dans les communes chargé de la collecte des impôts (fonciers et locatifs) pour MEEATU urbaines et rurales est augmenté en améliorer sensiblement le taux de collecte et accroître en Ministère des Finances nombre conséquence les moyens pour la mairie et les communautés CFN  Les contrôles inopinés sur le d’assumer notamment leurs responsabilités sociales envers les PNUD / BAD / BM / UE paiement des impôts fonciers redevables et leurs communautés respectives dissuadent le défaut de déclaration ou les fausses déclarations. 172 | P a g e Panel 7 : Estimation de la valeur des biens immobiliers fonciers et fiscalité foncière Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes)  L’étude, menée à l’échelle de deux communes pilotes, facilite la  Étudier les termes et les conditions de l’institution d’un impôt Ministère des Finances préparation d’un projet de révision de foncier sur les terres rurales, bâties et non bâties en vue, en Ministère de l’Intérieur la loi sur la fiscalité communale. Elle incluant des estimations de recettes et les contreparties Ministère du Développement anticipe les risques de non- conséquentes de services publics et sociaux exigibles par les communal déclarations et propose des mesures contribuables. PTF incitatives et dissuasives pour les contrecarrer.  Légiférer sur la procédure d’estimation des valeurs immobilières MEEATU  La loi promulguée et leur contrôle en se référant aux valeurs locatives qui sont Ministère des Finances  Réduction des fausses déclarations de souvent régulièrement mises à jour CFN valeurs Ministère de l’Intérieur  Rendre les registres fiscaux accessibles au public, une fois Nbre de registres fiscaux rendus Ministère des Finances digitalisés accessibles au public Conseils communaux Panel 8 : Résolution des litiges fonciers Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes) L’audit permet d’identifier les éléments de force et de faiblesse des structures et  Conduire un audit institutionnel et de performance approfondi des Cour Suprême mécanismes de gestion des conflits cadres et des structures de gestion des conflits fonciers en vue Ministère de la Justice fonciers, notamment par rapport à leur d’opérer un montage institutionnel plus efficace et plus fluide, MEEATU capacité à fournir un service rapide, sans chevauchements. OSC gagner la confiance des bénéficiaires et créer des précédents positifs susceptibles d’améliorer la gouvernance foncière  Renforcer les capacités institutionnelles des cadres formels de Ministère de la Justice Nbre d’acteurs de résolution des conflits résolution des litiges fonciers afin qu'ils soient mieux outillés pour MEEATU formés, testés et accompagnés dans leurs recevoir et traiter convenablement les affaires leur soumises. CFPJ activités post-formation  Assurer des campagnes en itinérance par les juridictions et Nbre de descentes itinérantes en province institutions spéciales et non décentralisés (ex. : CSTB, CSTB effectuées par la CSTB et l’Ombudsman Ombudsman) pour entendre et résoudre les problèmes des usagers Ombudsman pour rapprocher leurs services des en se rapprochant d’eux et en se rendant ainsi plus accessibles à CNTB justiciables engagés dans des conflits leur égard. fonciers 173 | P a g e Panel 8 : Résolution des litiges fonciers Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes) Nbre de mesures publiques et  Engager l’Ombudsman à utiliser toutes les prérogatives que la loi administratives de bonne gouvernance lui donne pour agir en amont des problèmes liés aux foncière prises en considération des expropriations pour cause dite d’utilité publique, notamment en Ombudsman recommandations de l’Ombudsman en exigeant des comptes aux autorités gouvernementales et Assemblée nationale rapport avec les conflits sur les terres provinciales se rendant coupables de violation des procédures domaniales ou impliquant l’Etat sur des légales en matière d’expropriation. terres appropriées. Thème 9 : Examen des modalités institutionnelles et des politiques générales Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes) Le Programme national foncier :  intègre des données et des Présidence de la République recommandations couvrant des  En s’inspirant de la « Lettre de politique foncière », arrêter une 1ère VP de la République domaines plus diversifiés de politique foncière globale et unifiée assortie d'un plan global 2ème VP de la République gouvernance foncière ; d'actions vers lequel les subsides publics de l’Etat burundais et les MEEATU  inclut une théorie de changement en appuis financiers externes des projets de coopération seraient Ministère de l’Intérieur faveur de la bonne gouvernance qui canalisés sous forme d’un « fonds commun » affecté à la Ministère de la Justice énonce avec clarté et cohérence un réalisation des actions prioritaires définies et justifiées par le Assemblée nationale ordre logique de priorités à suivre et Gouvernement PTF des résultats attendus d’étape et de GSF termes réalistes ;  inclut un ordre et une nomenclature pertinents des compétences et des responsabilités 174 | P a g e Thème 9 : Examen des modalités institutionnelles et des politiques générales Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes)  Les règlements d’ordre intérieur et de procédure au sein des structures ciblées sont révisés pour prendre en compte les recommandations issues de leurs audits institutionnels  Les textes régissant lesdites structures et leurs procédures sont revus et améliorent les garanties d’accessibilité publique de ces  Repenser la composition et/ou le mode réglementaire de structures et de transparence de leurs actes fonctionnement de certaines structures clés de gouvernance Présidence de la République et bilans foncière, en particulier la CFN, le conseil d’administration de MEEATU  La composition revue de ces structures leur l’OBPE, la CNTB, la commission nationale de l’environnement, CFN permet d’accueillir des professionnels et ce afin de garantir des formes de participation et de contrôle GSF des bénéficiaires qui apportent des externes, indépendants. garanties d’indépendance et de contrôle qualité  Le respect des manuels de procédure et l’utilisation des instruments de travail revus augmentent le nombre des actes et des mesures effectives de bonne gouvernance foncières prises par ces structures  Nbre de points de friction et chevauchements identifiés entre lesdits services  Identifier les services qui œuvrent dans des sphères foncières Présidence de la République  Nbre de mesures adoptées en concertation identiques (ex. Titres fonciers et Cadastre, CFN et Services de MEEATU entre les ministères et services concernés l'Aménagement du Territoire, etc.) et harmoniser leurs missions et Ministère de la Justice pour harmoniser les mandats leurs modalités d'intervention  Type et nbre d’actes de procédure ayant bénéficié des mesures de coordination des mandats  Evolution annuelle du montant des  Doter le Secrétariat Permanent de la CFN de moyens juridiques, subsides publics alloués à la CFN financiers, matériels et humains lui permettant d'assurer la collecte Présidence de la République  Progression du nbre de dossiers intégrés et la publication périodique de l'ensemble des informations MEEATU Ministère des Finances dans la base de données numériques de la foncières disponibles au niveau de services ou institutions de CFN, par types de demandes et d’actes gestion foncière. requis 175 | P a g e Thème 9 : Examen des modalités institutionnelles et des politiques générales Indicateurs/Moyens de Vérification/ Recommandations Services / Agences responsables Résultats (à court, moyen, long termes)  Engager le secrétariat de la CFN dans des pratiques et une  Avec des cas rapportés et analysés, le MEEATU / CFN procédure écrite et organisée de suivi-évaluation des SFC pour monitoring des SFC par la CFN permet de Ministère de l’Intérieur relever et soutenir les bonnes pratiques, anticiper et aider au documenter les défis financiers, de Ministère du Développement redressement et à la correction des problèmes ou des phénomènes formation professionnelle, de qualité et communal négatifs émergeant quantité de services des SFC  Une étude de faisabilité est menée pour la constitution ou le renforcement et le financement d’un centre de formation et de  Soumettre le personnel-clé des services fonciers centraux et perfectionnement en cours d’emploi décentralisés aux prescrits et aux exigences d’une politique, de MEEATU notamment pour le personnel-clé des Titres règles et de pratiques institutionnalisées de formation pré-emploi Ministère des Finances/OBR fonciers, du Cadastre national, de la CFN, et de perfectionnement en cours d’emploi des cellules de planification du MEEATU et d’autres Ministères en liaison étroite avec la gestion de la ressource foncière  Revitaliser le « Groupe sectoriel foncier » qui, sous la présidence  Nbre et fonctions des participants aux du MEEATU et la co-présidence d’un chef de file de la réunions du GSF coopération technique étrangère, tenait une réunion mensuelle  Nbre des recommandations du GSF MEEATU d’échanges d’informations et d’idées sur les évolutions du secteur effectivement prises en considération dans DDC foncier. Cela fait plus de deux ans qu’il ne tient plus de réunion le processus des décisions et avis du alors qu’avant cela, il apparaissait comme l’un des groupes MEEATU, de la CFN er des acteurs sectoriels thématiques les plus dynamiques et constructifs. publics fonciers 176 | P a g e La « matrice d’actions » développée au chapitre précédent énumère et juxtapose une longue série de recommandations à suivre par thématique. Cependant, il est important que l’Etat énonce des principes et des objectifs clairs de gouvernance et se fixe des priorités claires pour réaliser ses objectifs de performance en matière de gouvernance. Aujourd’hui, une excellente opportunité de relancer cette gouvernance foncière se présente avec le processus d’enregistrement décentralisée des droits fonciers amorcé en 2007 et l’inventaire en cours des terres domaniales, lancé en octobre 2014. Avec des « opérations groupées de reconnaissance » (OGR) des terres en vue de promouvoir les droits fonciers certifiés et cet inventaire des terres domaniales, c’est la perspective qu’à moyen ou long terme, une vaste partie du territoire burundais soit découpé en lots de terrains et parcelles cadastrés et paramétrés avec des références géo-spatiales, enregistrés pour garantir des droits et accompagner les mutations qui s’y opèreront. La finalisation de ces processus se pose en soi comme un défi pour l’Etat burundais. Mais il n’est pas le seul. Dans l’immédiat et à très court terme, la qualité de la collecte, la maintenance et l’usage des données collectées posent aussi des questions tout aussi cruciales et pressantes au niveau de registre et cadastre. Au regard des besoins financiers cruciaux de l’Etat burundais et de la nécessité impérieuse :  de permettre aux Burundais d’exercer leurs droits fondamentaux de manière égale et d’accomplir pleinement leur potentiel,  de mieux organiser l’occupation et l’exploitation des espaces qui se rétrécissent et s’appauvrissent en générant de plus en plus de conflits, Il y a lieu de voir l’intérêt et les efforts récents de l’Etat (via l’OBR) et de la Mairie pour collecter et recouvrer l’impôt foncier et l’impôt sur les revenus locatifs comme un bon point d’entrée pour engager une vraie dynamique de gouvernance foncière réformée. En effet, il est vraisemblable et prévisible que les résultats de la collecte de ces impôts seront exceptionnels, comparés aux résultats des exercices fiscaux antérieurs et que partant, l’Etat et les communes auront à cœur d’être plus régulier et systématique dans ce travail. En soi, c’est déjà un point de départ intéressant pour motiver les services publics à se constituer et à garder à jour une base de données foncières qui lui garantisse des revenus d’impôts accrus. En repensant au capital régénéré que représente la ressource foncière lorsqu’on négocie, reconnait, accorde et maîtrise les droits qui s’y exercent, on comprend d’autant mieux l’importance :  de tenir la base de données foncières à jour : par exemple, pour collecter et recouvrer les impôts et les redevances dus ;  de reconnaître ces droits, de veiller à leur protection et de prévenir les abus : pour associer les contribuables et les citoyens à la préservation des ressources (forêts, boisements, etc.) et à la fructification de leurs droits (ex. : femmes, propriété et capitaux) LOGIQUE DE GOUVERNANCE FONCIERE Meilleure protection Reconnaissance des droits: et fructification des ressources naturelles  Tenure coutumière (forêts, boisements, sols,  Femmes …) avec implication des  Minorité Batwa populations  Marais / Paysannats  Riverains de forêts/boisements Augmentation des impôts Etat levés et des contreparties de l’Etat et des collectivités Aménagement du territoire : burundais locales en services publics et sociaux  Schémas d’aménagement pertinents et appliqués  Enregistrement des droits fonciers Meilleure rentabilisation  Délimitation et enregistrement des de la ressource foncière terres domaniales Réduction des conflits La « logique de gouvernance » ci-haut, une parmi plusieurs possibles, pose la thèse que dans leur quête intense de sources additionnelles de revenus, le pouvoir central et les collectivités locales sont actuellement dans de bonnes dispositions à adhérer et mettre en œuvre une politique qui table sur une hausse sensible de leurs recettes à court, moyen et long termes. La condition pour garantir des revenus croissants étant de tenir proprement et mettre à jour une base de données sur l’état et les mouvements (marchés) des droits fonciers, ces acteurs publics devraient comprendre leur intérêt à organiser leur système d’information foncière. C’est dans le prolongement de cette même logique, poussée plus loin, que les enjeux de sécurisation des droits des catégories défavorisées (femmes, Batwa), de préservation et de productivité accrue du patrimoine foncier pourraient être réhabilités aux yeux des pouvoirs publics et locaux et trouver un second souffle. Il est essentiel de fonder la relance de la gouvernance foncière au Burundi sur une théorie de changement qui investisse dans la conviction et la volonté de l’Etat à s’y engager avec vigueur et en sortant d’une attitude passive et trop dépendante des apports externes. En eff et, la réussite de tout effort en la matière requerra un investissement en temps, en fonds, en capital humain. 178 | P a g e Un Gouvernement et une collectivité locale qui saisissent les enjeux d’une bonne gouvernance foncière seront stimulés par les bénéfices qu’ils seront convaincus, à juste titre, d’en tirer notamment en :  recettes pour le Trésor public et les collectivités locales (impôts, investissements, etc.);  protection, préservation et productivité du patrimoine foncier domanial ;  cohésion sociale (réduction des conflits) ;  délestage des charges pesant sur certaines institutions (Justice, Ombudsman, etc.) ;  exercice des droits pour les citoyens ;  etc. Le développement et la promotion auprès des autorités de l’Etat burundais d’une stratégie de gouvernance foncière améliorée qui les déterminent à s’y investir avec énergie pourraient passer par le biais du lancement d’un projet pilote à l’échelle d’une ou plusieurs communes rurales. Le projet aurait pour principal but de servir de modèle et de référence pour l’émulation et la stimulation des autres. Les objectifs spécifiques de ce projet seraient notamment d’établir par l’expérience et la pratique le lien de cause à effet entre la collecte et la bonne utilisation de l’information foncière, l’accès public à l’information foncière, la sécurisation des droits fonciers (notamment pour les catégories les plus défavorisées), le niveau des recettes des divers impôts fonciers et leur lien avec l’augmentation des contreparties de services, etc. Des critères de choix des communes-pilotes à prendre pour essai pourraient inclure (i) le taux de couverture de la certification foncière et de la délimitation des terres domaniales, (ii) le potentiel économique et commercial des communes, (iii) l’existence et les résultats de programmes indépendants d’appui à l’autonomisation de la femme, les plans de développement et d’investissements des comités de développement communal locaux, etc. 179 | P a g e Chapitre VI – Conclusion finale Le droit foncier burundais reste largement empreint des coutumes du pays, avec lesquelles il compose avec une certaine souplesse et du réalisme. Par exemple, il reconnait et protège juridiquement les terres non enregistrées, qui demeurent les plus nombreuses. Depuis plusieurs années, ce droit se modernise aussi sous la pression aigue des besoins socio- économiques multiformes d’une population en croissance rapide et pour faire face aux impératifs de productivité économique accrue que cette croissance démographique appelle. Timidement et progressivement, un cadre légal se met en place pour, par exemple :  raffermir et sécuriser davantage les droits fonciers des individus par un mode de tenure foncière présentant plus de garantie juridique et moins coûteux ;  assurer une protection des forêts naturels et des aires protégées qui associe intelligemment les populations avoisinantes qui peuvent en être à la fois les meilleurs garanties de protection et les plus grandes menaces ;  préparer et organiser un meilleur aménagement du territoire et une meilleure occupation des espaces fonciers urbains et ruraux (avec les projets de schémas directeurs d’aménagement urbain en cours de finalisation et incessamment, un nouveau code d’aménagement du territoire) ;  transférer plus de compétences et de pouvoirs aux entités locales, notamment par le transfert vers les communes de plus de compétences et pouvoirs économiques (i.e. loi sur le transfert de certaines compétences fiscales aux communes) ; Etc. Toutefois, des déséquilibres forts persistent entre, d’un côté la pertinence du cadre normatif (politique et lois) qui se met en place et de l’autre, la qualité et le bilan de sa mise en œuvre. Sur le terrain des réalités, l’écart entre les deux se traduit par des préjudices très matériels et concrets, humains, économiques et sociaux : des terres cultivables toujours plus exigües et de moins en moins fertiles, des problèmes d’habitat accrus qui aggravent les risques d’insalubrité et d’insécurité, un volume de ressources financières levées à un rythme bien trop inférieur à la croissance des charges et au déclin des services, le domaine foncier privé de l’Etat qui s’étiole sans retour connu de profit pour le public, etc. Le CAGF offre au Burundi une trousse d’ « indicateurs » et de « dimensions » pour évaluer sa performance en matière de gouvernance foncière, thème par thème. Au bout du processus, le bilan d’ensemble a les apparences d’un puzzle désassemblé. Il appartient à chaque pays d’assembler et monter un schéma de gouvernance foncière logique et fonctionnelle, avec les éléments les plus utiles du CAGF. Ce schéma est toujours partiellement lisible dans le volume, la nature et la répartition des ressources humaines, matérielles et financières (budget) de l’Etat. Même avec le volume global actuel très limité des ressources financières de l’Etat, il est possible d’insuffler une dynamique nouvelle à la gouvernance foncière qui, sur la durée et à tout égard, produirait des succès patents. Cela exige de redéfinir les enjeux et l’impact d’une gouvernance foncière améliorée et de mettre les moyens – humains et financiers – pour la mettre en action. 180 | P a g e BIBLIOGRAPHIE I) ETUDES ET RAPPORTS 1) Africa Community Rights Network (ACRN), L’état des droits fonciers des communautés en Afrique, Décembre 2016 2) Africapolis, Urbanisation en Afrique Centrale et Orientale, Fiche Pays, République du Burundi, 2010 3) Amani, J.P, Les droits fonciers et les peuples des forêts d’Afrique. Perspectives historiques, juridiques et Burundi - Evolution historique du droit foncier et son incidence sur la propriété foncière des Batwa au Burundi, 2009 4) APDH, Services fonciers communaux au Burundi : Avancées, Incertitudes et Défis, Global Rights, Février 2014 5) APDH, Terres domaniales et expropriations au Burundi. Etat de mise en œuvre du Code foncier 18 mois après sa promulgation, Global Rights, 2014 6) Banque Mondiale, Décentralisation fiscale et gouvernance locale. 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Rapport sur le travail d’inventaire et de délimitation des terres domaniales 20) Gouvernement du Burundi (MEEATU), Orientations pour la création et le fonctionnement des services fonciers communaux, Non daté 21) Gouvernement du Burundi (MEEATU), Politique nationale d'assainissement du Burundi et stratégie opérationnelle. Horizon 2025, Bujumbura, 2013 22) Gouvernement du Burundi (MEEATU), Rapport définitif sur l’inventaire des terres domaniales au Burundi. Enquête de mars-octobre 2001, Bujumbura, janvier 2002. 181 | P a g e 23) Gouvernement du Burundi (MEEATU), Schéma Directeur de l’Aménagement Urbain (SDAU) de Bujumbura, Diagnostic préliminaire. 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Burundi, premier trimestre 1971 3) Projet d’Amélioration de la Gestion et de la Gouvernance Foncière au Burundi, Rapport d’activité n°11 : Janvier-Février 2016 4) Projet d’Amélioration de la Gestion et de la Gouvernance Foncière au Burundi, Rapport d’activité n° 12 : Mars-Avril 2016 5) Projet d’Amélioration de la Gestion et de la Gouvernance Foncière au Burundi, Rapport d’activité n°13 : Mai-Juin 2016 6) Projet d’Amélioration de la Gestion et de la Gouvernance Foncière au Burundi, Rapport d’activité n° 14 : Juillet-Août 2016 7) Projet d’Amélioration de la Gestion et de la Gouvernance Foncière au Burundi, Rapport d’activité n°15 : Septembre-Octobre 2016 8) Projet d’Amélioration de la Gestion et de la Gouvernance Foncière au Burundi, Rapport d’activité n° 16 : Novembre-Décembre 2016 9) Projet d’Amélioration de la Gestion et de la Gouvernance Foncière au Burundi, Rapport d’activité n°17 : Janvier-Février 2017 10) Toulmin, C., "Securing Land and Land Property Rights in Sub-Saharan Africa: 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communale 9) Loi n° 1/04 du 24 janvier 2013 portant organisation et fonctionnement de l’Ombudsman 10) Loi n°1/02 du 26 mars 2012 portant Code de l’eau au Burundi 11) Loi n°1/13 du 9 août 2011 portant révision du code foncier du Burundi 183 | P a g e 12) Loi n°1/10 du 30 mai 2011 portant création et gestion des aires protégées au Burundi 13) Loi n° 1/16 du 6 août 2008 portant modification de certaines dispositions du décret- loi n° 1/13 du 24 novembre 1986 portant fixation des droits d’enregistrement en matière foncière. 14) Loi n° 1/08 du 17 mars 2005 portant code de l’organisation et de la compétence judiciaires 15) Loi n°1/010 du 13 mai 2004 portant Code de Procédure Civile 16) Loi n° 1/26 du 15 septembre 2014 portant création, organisation, composition, fonctionnement et compétence de la Cour spéciale des Terres et Autres Biens 17) Loi n° 1/31 du 31 décembre 2013 portant missions, composition, organisation et fonctionnement de la Commission Nationale des Terres et autres Biens (CNTB) 18) Code civil Livre III Décret-loi 19) Décret-loi n°1/138 du 17 juillet 1976 portant Code minier et pétrolier du Burundi Décrets 20) Décret n°100/33 du 28 février 2017 portant nomination des membres de la Commission Foncière Nationale 21) Décret n° 100/15 du 30 janvier 2017 portant réorganisation de la Commission Foncière Nationale et de son Secrétariat permanent 22) Décret n°100/129 du 23 juin 2016 portant modalités d’application des dispositions du chapitre 3 : « Des droits fonciers certifiés », de la loi n°1/13 du 9 août 2011 portant révision du code foncier du Burundi 23) Décret n°100/114 du 30 mai 2016 portant procédure d'enregistrement des biens immeubles domaniaux 24) Décret n° 100/164 du 24 mai 2015 portant révision du décret n° 100/34 du 312 janvier 2012 portant création, missions, composition et fonctionnement de la commission foncière nationale et de son secrétariat permanent. 25) Décret n° 100/240 du 29 octobre 2014 portant création, missions, organisation et fonctionnement de l’Office Burundais pour la Protection de l’Environnement (OBPE) 26) Décret n° 100/198 du 15 septembre 2014 portant révision du décret n°100/95 du 28 mars 2011 portant missions, organisation et fonctionnement du Ministère de l’Eau, de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme 27) Décret n° 100/191 du 29 juin 2012 portant création, missions, composition et fonctionnement du comité interministériel de pilotage de la réforme foncière 28) Décret n°100/72 du 26 avril 2010 portant adoption de la lettre de politique foncière au Burundi Arrêtés 29) Arrêté n° 120/VP2/038 du 29 avril 2013 portant création, organisation et fonctionnement du guichet unique de transfert de propriété. 184 | P a g e Ordonnances et décision ministérielles 30) Ordonnance ministérielle n°540/530.13 du 3 janvier 2017 sur les modalités de rapatriement de l'Impôt sur les Revenus Locatifs à l'Office Burundais des Recettes 31) Ordonnance Ministérielle n°770-035 du 13 janvier 2016 portant modalités d'inventaires des biens immeubles domaniaux 32) Ordonnance Ministérielle n°720/CAB/304/2008 du 20/3/2008 portant actualisation des tarifs d’indemnisation des terres, des cultures et des constructions en cas d’expropriation pour cause d’utilité publique, BOB N°3/2008 33) Décision ministérielle n°770/083 du 9 janvier 2013 portant sur le cadrage dans la procédure d'étude d'impact environnemental au Burundi 185 | P a g e ANNEXE I Liste des thématiques de Gouvernance foncière du CAGF et des experts-consultants ayant produit les recherches et rapports Thèmes des rapports et panels Experts-consultants 10) Reconnaissance de la tenure foncière Me Gilbert BIGIRIMANA 11) Droits sur les terres forestières et communautaires et réglementation de Ir. Salvator RUZIMA l'utilisation des terres rurales 12) Utilisation du sol, planification et Ir. Seth SINDAYIGAYA développement urbains 13) Gestion des terres domaniales Me Gilbert BIGIRIMANA 14) Transparence des procédures et avantages économiques du transfert des Jean Marie HABWINTAHE terres publiques à un usage privé 15) Accès public aux informations foncières Me Espérance NINAHAZE : registre et cadastre 16) Estimation de la valeur des terres et Charles NIHANGAZA fiscalité foncière 17) Résolution des litiges Me Dieudonné NTIBATINGESO 18) Examen des modalités institutionnelles René Claude NIYONKURU et des politiques générales 186 | P a g e ANNEXE II Liste des participants aux Panels Panel n° 1 : Reconnaissance de la tenure foncière Date et Heure : Lundi 16 mars 2015, 14h30 à 17h30 Lieu : Bujumbura, Hôtel Restaurant Botanika NOMS ET PRENOMS FONCTIONS 1) BIGIRIMANA Gilbert Expert-consultant pour le CAGF 2) CARAZIWE Clotilde Administrateur communale de Ngozi Présidente du Tribunal de Grande Instance de 3) KANYANGE Médiatrice Bujumbura rural Directeur des Forêts à l’Office Burundais 4) NGENDABANYIKWA Félix pour la Protection de l’Environnement (OBPE) 5) NINDORERA Louis-Marie Coordinateur national du CAGF Chef de service à la Direction du Cadastre 6) NIYONJUKA Rose national 7) NKURUNZIZA Alexis Projet PRODEFI / PAIVA-B du FIDA 8) NSABIMANA Serges Chef du Service Foncier communal de Ngozi Membre du comité exécutif de l’Association 9) SINDAYIHEBURA Yvette des Femmes Juristes du Burundi (AFJB) Panel n° 2 : Droits sur les terres forestières et communautaires et réglementation de l'utilisation des terres rurales Date et Heure : Lundi 9 mars 2015, 09h05 à 15h20 Lieu : Bujumbura, Hôtel Restaurant Botanika NOMS ET PRENOMS FONCTIONS Secrétaire exécutive de l’ Agence de Renforcement des Capacités et d’Appui pour le 1) DUSHIMIRIMANA Laetitia Développement Rural et l’Environnement (ARCADE, asbl) Président et Représentant légal de l’association 2) HABIMANA Léonard UNIPROBA (Unissons Nous pour la Promotion des Batwa) Cadre d’Appui à la Commission Foncière 3) KANKINDI Aimée-Spès Nationale et conseillère à la Direction générale de l’Aménagement du Territoire 4) NDUWIMANA André Expert environnementaliste Directeur des Forêts à l’Office Burundais pour 5) NGENDABANYIKWA Félix la Protection de l’Environnement (OBPE) 6) NINDORERA Louis-Marie Coordinateur national du CAGF Conseillère à la Direction générale de 7) NSHIMIRIMANA Marie Josée l’Aménagement du Territoire 8) RUZIMA Salvator Expert-consultant pour le CAGF 187 | P a g e Liste des participants aux Panels (suite) Panel n° 3 : Utilisation du sol, planification et développement urbains Date et Heure : Mercredi 18 mars 2015, 14h30 à 19h00 Lieu : Bujumbura, Hôtel Restaurant Botanika NOMS ET PRENOMS FONCTIONS Directeur général de la Coordination des 1) BARASOKOROZA Nestor Equipement au Ministère des Travaux publics Directeur de la Planification Urbaine 2) BIZABISHAKA Cléophas (MEEATU) Directeur de l’Association pour la Paix et les 3) HABWINTAHE Jean Marie Droits de l’Homme (APDH) Conseiller juridique à la 4) NDORERE Pascal Direction des Titres fonciers 5) NINDORERA Louis-Marie Coordinateur national du CAGF 6) NKURUNZIZA Fabrice Directeur de l’Urbanisme (MEEATU) 7) SINDAYIGAYA Seth Expert-consultant pour le CAGF Panel n° 4 : Gestion des Terres domaniales Date et Heure : Mardi 10 mars 2015, 09h28 à 14h10 Lieu : Bujumbura, Hôtel Restaurant Botanika NOMS ET PRENOMS FONCTIONS 1) BIGIRIMANA Gilbert Expert-consultant pour le CAGF Secrétaire exécutive de l’Agence de Renforcement des Capacités et d’Appui pour 2) DUSHIMIRIMANA Laetitia le Développement Rural et l’Environnement (ARCADE, asbl) Chargée du Programme foncier au Bureau de 3) GIHUGU Didacienne la Coopération suisse au Burundi Cadre d’Appui à la Commission Foncière 4) KANKINDI Aimée-Spès Nationale et conseillère à la Direction générale de l’Aménagement du Territoire 5) LASRY Florent Chef du PAGGF Coordinateur de l’Unité de Coordination du 6) MACUMI Damien Programme National Foncier 7) NINDORERA Louis-Marie Coordinateur national du CAGF Vice-président de la Cour 8) NIVYABANDI Faustin administrative de Bujumbura 9) NIYONKURU René Claude APDH / Consultant Conseillère à la Direction générale de 10) NSHIMIRIMANA Marie Josée l’Aménagement du Territoire 188 | P a g e Liste des participants aux Panels (suite) Panel n° 5 : Transparence des procédures et avantages économiques du transfert des terres publiques à un usage privé Date et Heure : Lundi 16 mars 2015, 09h25 à 13h55 Lieu : Bujumbura, Hôtel Restaurant Botanika NOMS ET PRENOMS FONCTIONS 1) BIZONGWAKO Jean Darcy Expert-consultant pour le CAGF Délégué de la Chambre Fédérale de 2) COBASHAKA Léandre Commerce et d’Industrie / Section Bâtiments et Travaux Publics 3) HABWINTAHE Jean Marie Expert-consultant pour le CAGF Cadre d’Appui à la Commission Foncière 4) KANKINDI Aimée-Spès Nationale et conseillère à la Direction générale de l’Aménagement du Territoire 5) NINDORERA Louis-Marie Coordinateur national du CAGF Conseillère à la Direction générale de 6) NSHIMIRIMANA Marie Josée l’Aménagement du Territoire Panel n° 6 : Accès public aux informations foncières : Registre et cadastre Date et Heure : Mardi 17 mars 2015, 14h40 à 17h30 et Vendredi 10 juillet 2015 (10h00-14h00) Lieu : Bujumbura, Hôtel Restaurant Botanika NOMS ET PRENOMS FONCTIONS 1) HABWINTAHE Jean Marie Directeur exécutif de l’APDH 2) KIGANAHE Antoine Conseiller à la Direction du Cadastre national Secrétaire permanent de la 3) MACUMI Damien Commission Foncière Nationale (MEEATU) Agent foncier de la commune 4) MUHIRWA Charles de Kiremba (Ngozi) Secrétaire exécutif permanent du 5) NGENDABAKANA Frédéric Bureau Central de Géomatique Chef de service à la Direction 6) NGENDAHAYO Jean Pierre du Cadastre national Agent foncier à la Commune 7) NIKOBAGIRA Onésime de Nyabitsinda (Ruyigi) 8) NINAHAZE Espérance Experte-consultante pour le CAGF 9) NINDORERA Louis-Marie Coordinateur national du CAGF Administrateur de la Commune 10) NIZIGIYIMANA Benoîte de Nyabitsinda (Ruyigi) 11) NKESHIMANA Grégoire Directeur des Titres fonciers 189 | P a g e Liste des participants aux Panels (suite) Panel n° 7 : Estimation de la valeur des terres et fiscalité foncière Date et Heure : Mercredi 18 mars 2015, 09h10 à 12h05 Lieu : Bujumbura, Hôtel Restaurant Botanika NOMS ET PRENOMS FONCTIONS 1) NAHIMANA Valentin Administrateur de la commune de Gitega Chef du Département des Recettes au Bureau 2) NDAYISHIMIYE Cylus de la Mairie de Bujumbura 3) NIHANGAZA C harles Expert-consultant pour le CAGF 4) NINAHAZE Espérance Juriste Expert-consultant pour le CAGF 5) NINAHAZE Espérance sur le Panel 6 6) NINDORERA Louis-Marie Coordinateur national du CAGF 7) NIVYAYO Révérien Assistant de la Direction du PTPCE Chef du Service Vérification au Bureau de la 8) NSENGIYUMVA Rémy Mairie de Bujumbura Chef de la Division de l’Expertise 9) NTWARI Eric immobilière à la Direction des Titres fonciers Panel n° 8 : Résolution des litiges Date et Heure : Vendredi 6 mars 2015, 09h10 à 13h45 Lieu : Bujumbura, Hôtel Restaurant Botanika NOMS ET PRENOMS FONCTIONS Coordinateur-Adjoint des Opérations à 1) HATUNGIMANA Adelin l’ONG ACCORD 2) KABURA Léopold Magistrat à la Cour d’Appel de Bujumbura Membre de la Commission Nationale des 3) MBONAYO Nicolas Terres et autres Biens (CNTB) 4) NINDORERA Louis-Marie Coordinateur national du CAGF Conseillère à la Direction générale de 5) NSHIMIRIMANA Marie Josée l’Aménagement du Territoire 6) NTIBATINGESO Dieudonné Expert-consultant pour le CAGF Chef du Service Statistiques à l’Inspection 7) RUKINGAMUBIRI Bernard générale de la Justice 190 | P a g e Liste des participants aux Panels (suite et fin) Panel n° 9 : Examen des modalités institutionnelles et des politiques générales Date et Heure : Mercredi 17 juin 2015, 10h00 à 13h35 Lieu : Bujumbura, Hôtel Restaurant Botanika NOMS ET PRENOMS FONCTIONS Secrétaire permanent de 1) MACUMI Damien la Commission Foncière Nationale (MEEATU) 2) NIHANGAZA Charles Expert-consultant pour le CAGF/Panel n° 7 3) NINAHAZE Espérance Expert-consultant pour le CAGF/Panel n° 6 4) NINDORERA Louis-Marie Coordinateur national du CAGF 5) NTIBATINGESO Dieudonné Expert-consultant pour le CAGF/Panel n° 8 6) RUZIMA Salvator Expert-consultant pour le CAGF/Panel n° 2 7) SINDAYIGAYA Seth Expert-consultant pour le CAGF/Panel n° 3 191 | P a g e ANNEXE III Atelier de validation du rapport du CAGF Les recommandations principales émises lors de la restitution du CGAF et des neuf panels organisés par le CAGF sont les suivantes, et certains recoupent celles qui émergent de la « Lettre de politique foncière ». En voici quelques unes : Gestion urbain :  Renforcer les capacités de gestion des terres urbaines ;  Redynamiser les commissions nationale et provinciales d’urbanisme ;  « Restructurer » les quartiers spontanés ;  Mettre effectivement en place les outils de planification urbaine (Schémas Directeurs d’Aménagement Urbain, Plans locaux d’aménagement, plans de lotissement, etc.) Gestion foncière équitable  Elaborer une stratégie d’accès équitable à la terre pour la majorité de la population urbaine.  Promouvoir une loi sur le régime de la succession  Améliorer le Cadre juridique donnant accès équitables à toutes les catégories sociales (femmes, orphelins et Batwa) ;  Assainir le cadre juridique pour les catégories spécifiques (Droits des peuples autochtones et autres personnes vulnérables) ; Administration foncière :  Regrouper le Cadastre national et les Titres fonciers sous la même autorité ministérielle tutélaire ;  Intégrer le Système d’Information Géographique (SIG) dans la base de données foncières ;  Départager la CFN et la CNTB dans les chevauchements de leurs compétences en ce qui concerne le contrôle des cessions ou concessions de terres domaniales ;  Généraliser l’enregistrement des terres domaniales et privées ;  Définir les critères et la procédure de transfert des terres domaniales aux communes ;  Mener une étude complète sur le statut des paysannats et émettre des textes d’application ;  Génération des revenues à partir des taxes sur la propriété  Harmoniser les taxes de mutation foncière ;  Mettre à jour et finaliser le système d’adressage fiscal et son informatisation ; Gestion du foncier ; gestion durable de l’espace  Promulguer et mettre en œuvre un texte d’application pour la gestion des marais ; Capacité d’Analyse et suivi de progrès  Créer une base de données foncières ; Annexe IV Liaisons opérationnelles ENREGISTREMENT POLITIQUE(S) FONCIERE(S) PROJETS LEGISLATION FONCIERE à impacts fonciers importants Inventaire Aménagement, Mesurage, Gouvernement lotissement, attribution délimitation à impacts fonciers des terres urbaines, (adoption) (marais), Bornage, Stratégies, Politiques nationales et sectorielles semi-urbaines et rurales cadastrage Immatriculation Comité de Pilotage a) Reboisement Enregistrement aux b) Gestion, aménagement Titres fonciers de la Réforme des forêts naturelles et MEEATU foncière domaniales (conception / exécution) c) Création, gestion des Politique et Code de l'Eau aires protégées Etc. Politique et Code de l'Environnement Domaine foncier privé Politique, Code et Schémas d'Aménagement de l'Etat Politique et Code d'Urbanisme et de l'Habitat Sécurisation foncière Terres pleines, Stratégie de lutte contre la dégradation des sols Marais domaniaux, a) Traçage, élargissement des Périmètres hors-paysannat infrastructures routières MTTPE b) Coordination des (conception / exécution) équipements Terres appropriées Politique des Bâtiments publics et c) Supervision des études de Succession / Achats infrastructures routières construction et réhabilitation Marais non domaniaux, des bâtiments publics d) Contrôle des normes de Ex-terres de paysannat construction des bâtiments publics et privés MINAGRI (Ex.: Superviser les implantations (conception / exécution) industrielles et commerciales) Politique d'Agriculture et d'Elevage Conservateur des Titres fonciers (Titre) Contrats miniers Service foncier Min. Energie et Mines Construction de barrages (conception / exécution) hydroélectriques communal (Certificat) Politique Energie, Géologie et Mines etc.