Page 1 Rapport N° 54491-BF   Burkina Faso Filets sociaux Le 31 janvier 2011 Département du développement humain Unité de la protection sociale Région Afrique Document de la Banque mondiale Page 2 EXERCICE FISCAL 1 er janvier au 31 décembre ÉQUIVALENCE MONETAIRE Unité monétaire : Franc CFA (CFAF) (au 31 décembre 2009) 1 dollar EU : 480,00 francs CFA POIDS ET MESURES Système métrique ABRÉVIATIONS ET ACRONYMES ACT Thérapie combinée à base d'artémisinine AFD Agence française de développement AMBC Assurance Maladie à Base Communautaire APE Association des parents d’élèves ASS Afrique subsaharienne BM Banque mondiale CAST Compte d’affectation spéciale du Trésor CCT Transfert monétaire conditionnel ( Conditional Cash Transfer ) CDMT Cadre des dépenses à moyen terme CE Commission européenne CEDEAO Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest CILSS Comité permanent inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel CNLS-IST Conseil national de lutte contre le sida et les infections sexuellement transmissibles CNRST Centre national de la recherche scientifique et technologique CNSA Conseil national de sécurité alimentaire COGES Comité de gestion des CSPS CONASUR Conseil national de secours d’urgence et de réhabilitation CRB Croix-Rouge Burkinabè CRCHUM Centre de Recherche du Centre Hospitalier de l’Université de Montréal CRS Catholic Relief Services CRSN Centre de Recherche en Santé de Nouna CSLP Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (ancien nom du Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté) CSPS Center de santé et de promotion sociale CST Commission sectorielle et thématique CWR Community Wealth Ranking DAF Direction administrative et financière DECRG Groupe de recherche sur l'économie du développement (de la Banque mondiale) DfID Département pour le développement international du Royaume-Uni ( Department for International Development ) DGB Direction générale du budget DGCOOP Direction générale de la coopération DGEP Directeur de l'économie et de la planification DGPER Direction générale de la promotion de l'économie rurale DMEG Dépôt de médicaments essentiels génériques DNEB Direction nationale de l’enseignement de base ECHO Service d'aide humanitaire et de protection civile de la Commission EDP Examen des dépenses publiques EICVM Enquête intégrale sur les conditions de vie des ménages FCFA Franc CFA FMI Fonds monétaire international FNS Fonds national de solidarité IDH Indice de développement humain IRD Institut de recherche pour le développement IRSS Institut de recherche en sciences de la santé du CNRST MAHRH Ministère de l’Agriculture, de l’Hydraulique et des Ressources halieutiques Page 3 MAMS Maquette pour la simulation des OMD MASSN Ministère de l’Action sociale et de la Solidarité nationale MdS Ministère de la Santé MEBA Ministère de l'Enseignement de base et de l'Alphabétisation MEF Ministère de l'Économie et des Finances MESSRS Ministère de l'Enseignement secondaire et supérieur et de la Recherche scientifique MID Ministère des infrastructures et du désenclavement MJE Ministère de la Jeunesse et de l’Emploi MMS Mélange maïs-soya MPF Ministère de la Promotion de la femme MSF Médecins Sans Frontières MTSS Ministère du Travail et de la Sécurité sociale OCDE Organisation de coopération et de développement économiques OEV Orphelins et enfants vulnérables OIT Organisation internationale du travail OMD Objectif du Millénaire pour le développement OMS Organisation mondiale de la santé ONG Organisation non gouvernementale ONU Organisation des Nations Unies PADS Programme d’appui au développement sanitaire PAM Programme alimentaire mondial PAP-DSRP Programme d'action prioritaire pour la mise en œuvre du DSRP PIB Produit intérieur brut PNDS Plan national de développement sanitaire PNOCSUR Plan national d’organisation et de coordination des secours d’urgence et de réhabilitation PNUD Programme des Nations Unies pour le développement PPTE Pays pauvre très endetté PrEst Programme de pistes rurales – Désenclavement à l’Est PRSC Crédit à l’appui de la réduction de la pauvreté (Poverty Reduction Support Credit ) PS Protection sociale PTF Partenaire technique et financier QUIBB Questionnaire des indicateurs de base du bien-être S&E Suivi et évaluation SAP Stratégie d’aide-pays SAP Système d'alerte précoce SCADD Stratégie de croissance accélérée et de développement durable SIDA Syndrome d'immunodéficience acquise SNS Stock national de sécurité SNSA Stratégie nationale de sécurité alimentaire SONAGESS Société nationale de gestion du stock de sécurité SONU Soins obstétricaux et néonataux d’urgence TAR Thérapie antirétrovirale TdH Terre des Hommes TVA Taxe sur la valeur ajoutée UEMOA Union économique et monétaire de l’Afrique de l’Ouest UNICEF Fonds des Nations Unies pour l’enfance ( United Nations Children’s Fund ) USAID United States Agency for International Development (agence américaine pour le développement international) VCF Vivres contre formation VCT Vivres contre travail VIH Virus de l'immunodéficience humaine Vice- président : Obiageli K. Ezekwesili Directeur-pays : Madani M. Tall Responsable- pays : Galina Y. Sotirova Directeur secteur : Ritva S. Reinikka Responsable secteur : Lynne D. Sherburne-Benz Chef de projet : Setareh Razmara Page 4 REMERCIEMENTS Ce rapport a été élaboré par une équipe composée de Azedine Ouerghi (chef économiste, AFTSP), Cécile Cherrier (consultante), Pascale Kervyn de Lettenhove (économiste senior, ECAPR), Carlo del Ninno (économiste senior, AFTSP), et Setareh Razmara (spécialiste en chef Protection sociale, chef de projet, AFTSP). Une précieuse contribution a été apportée pour la problématique du genre par Dominique van de Walle (chef économiste, PRMGE) et Harounan Kazianga (consultant). Le rapport a également bénéficié du support technique de Sarah Hague (spécialiste des politiques sociales et économiques, UNICEF Burkina Faso) et du document de référence préparé par le professeur Kimseyinga Savadogo (consultant national). L’évaluation par les pairs a été réalisée par John Elder (spécialiste en chef Protection sociale, HDNSP) et Damien de Walque (économiste senior, DECRG). Darcy Gallucio a apporté un appui précieux et a édité le document. Le soutien administratif a été fourni par Bintou Sogodogo (assistante de l’équipe, AFMBF) et Josiane Luchmun (assistante programme, AFTSP). Des suggestions et commentaires importants ont été apportés par Galina Sotirova (responsable pays, AFMBF), Kalanidhi Subbarao (spécialiste en chef Protection sociale, SASHD), Gilles Alfandari (économiste senior, AFTP4), Siaka Coulibay (économiste senior, AFTP4 et Mama Keita (économiste Pauvreté, AFTP4). Pour préparer ce rapport, l’équipe a travaillé en étroite collaboration avec ses homologues du Gouvernement et avec d’autres partenaires au développement (en particulier l’UNICEF, le PAM et le FMI). Elle exprime sa gratitude au Gouvernement du Burkina Faso pour le soutien et la coopération dont il a fait preuve en communiquant l’information et les données examinées dans ce rapport. L’équipe est particulièrement reconnaissante aux Ministère de l’Économie et des Finances, Ministère de l’Enseignement de Base et de l’Alphabétisation, Ministère de l’Action sociale et de la Solidarité Nationale et Ministère de la Santé pour l’appui appréciable qu’ils lui ont fourni. Elle remercie tout spécialement M. Yamsékré Tiendrebeogo, directeur général Économie et Planification (DGEP) qui a mené la préparation de ce travail au Burkina, ainsi que Mme Eugénie Malgoubri (SCADD). Les résultats préliminaires de ce rapport ont été présentés en décembre 2009 aux représentants du Gouvernement ainsi qu’aux partenaires au développement et ONG, qui ont tous fait des commentaires d’un grand intérêt. Les recommandations et messages stratégiques du rapport ont fait l’objet d’un consensus. À la demande du DGEP, l’équipe a présenté les constats et suggestions de ce rapport pendant l’examen du DSRP du 16 avril 2010, présidé par le Premier ministre, ainsi qu’au cours du Forum technique national pour la protection sociale (27 au 29 avril 2010). Les conclusions de ce rapport, y compris le projet de plan d’action pour le développement d’un système efficace de filets sociaux, ont constitué un apport intéressant pour la SCADD que le Gouvernement a récemment élaboré (Septembre 2010). Page 5 TABLE DES MATIÈRES RÉSUMÉ ANALYTIQUE................................................................................................................i CHAPITRE I INTRODUCTION.....................................................................................................1 A. Justification et objectifs............................................................................................................1 B. Définition des filets sociaux utilisée dans la présente étude....................................................2 C. Méthodologie de l’étude...........................................................................................................6 D. Structure du rapport..................................................................................................................6 CHAPITRE II PAUVRETÉ, VULNÉRABILITÉ ET RISQUES AU BURKINA FASO...............7 A. Contexte national et point de vue macroéconomique...............................................................8 B. Questions liées à la pauvreté et au développement humain.....................................................9 C. Tendances de la pauvreté, vulnérabilité et profil de la pauvreté............................................10 D. Ampleur de la pauvreté et coût pour faire sérieusement la différence...................................21 CHAPITRE III POLITIQUE ET INSTITUTIONS ÉTATIQUES EN MATIÈRE DE FILETS SOCIAUX..............................................................................................................................23 A. Rôle stratégique accordé aux filets sociaux au sein de la politique de développement élargie.....................................................................................................................................24 B. Dispositif institutionnel du système de filets sociaux............................................................33 C. Financement du système de filets sociaux .............................................................................36 CHAPITRE IV EXAMEN DES PROGRAMMES INDIVIDUELS DE FILETS SOCIAUX EXISTANTS..........................................................................................................................57 A. Transferts monétaires et quasi-monétaires.............................................................................58 B. Transferts alimentaires...........................................................................................................62 C. Subventions universelles des produits alimentaires et pétroliers...........................................73 D. Travaux publics à haute intensité de main-d’œuvre et Argent/vivres contre travail..............75 E. Exemptions des frais de santé ................................................................................................79 CHAPITRE V : RECOMMANDATIONS POUR UNE PLUS GRANDE EFFICACITÉ DU SYSTEME DE FILETS SOCIAUX.......................................................................................91 A. Résumé des constats...............................................................................................................91 B. Recommandations pour les politiques....................................................................................99 RÉFÉRENCES ..................................................................................................................................109   Page 6 Liste des annexes Annexe 1 : Glossaire............................................................................................................................114   Annexe 2 : Principe de conception des bonnes pratiques de soutien direct tirés de l’expérience internationale.....................................................................................................................116   Annexe 3 : Quelques exemples de pays appliquant de bonnes pratiques pour la mise en œuvre de programmes de filets sociaux en Afrique..........................................................................120   Liste des tableaux Tableau 1 : Indices de pauvreté selon le lieu de résidence....................................................................11   Tableau 2 : Estimations de la tendance de la pauvreté monétaire sur la base des comptes nationaux...........................................................................................................................11   Tableau 3 : Incidence de la pauvreté et vulnérabilité alimentaire par régions administratives .............14   Tableau 4 : Pauvreté selon le lieu de résidence et la région administrative, 2003.................................18   Tableau 5 : Pauvreté en fonction de quelques caractéristiques des chefs de famille, 2003...................21   Tableau 6 : Estimation des montants nécessaires pour amener tous les pauvres, et les plus pauvres et les plus vulnérables jusqu’au seuil de pauvreté par des transferts en espèces (2003, 2005 et 2007).....................................................................................................................22   Tableau 7 : Composante « Filets sociaux » du plan d’action de crise 2009-2010.................................32   Tableau 8 : Composante « Protection sociale des groupes vulnérables » du plan d’action de crise 2009...................................................................................................................................32   Tableau 9 : Liste des principaux programmes de filets sociaux existants au Burkina Faso, 2008- 2009...................................................................................................................................38   Tableau 10 : Dépenses totales dans les programmes de filets sociaux, 2005-2009...............................43   Tableau 11 : Dépenses sociales (y compris les financements PPTE et hors financements extérieurs)..........................................................................................................................45   Tableau 12 : Priorités de l’État et des bailleurs de fonds par programme en 2008 ...............................47   Tableau 13 : Bénéficiaires et allocation budgétaire par programme au Burkina Faso, 2009................49   Tableau 14 : Options de développement des programmes de filets sociaux .........................................51   Tableau 15 : Options pour l’augmentation des budgets des filets sociaux: Avantages et inconvénients.....................................................................................................................54   Tableau 16 : Groupes bénéficiaires de la recherche-action du CNLS-IST............................................59   Tableau 17 : Principales caractéristiques des récents programmes de coupons alimentaires................60   Tableau 18 : Stock d’intervention, situation au 31 décembre 2008.......................................................64   Tableau 19 : Stock national de sécurité alimentaire, situation au 31 décembre 2008 ...........................64   Tableau 20 : Nombre indicatif des bénéficiaires potentiels des stocks nationaux de sécurité...............65   Tableau 21 : Assistance en céréales du CONASUR aux populations vulnérables................................66   Tableau 22 : Assistance en céréales du CONASUR aux personnes affectées par une catastrophe.......66   Tableau 23 : Nombre indicatif des bénéficiaires des distributions ciblées de vivres, 2006-2010.........67   Tableau 24 : Principales caractéristiques des programmes de cantines scolaires dans les écoles primaires............................................................................................................................71   Tableau 25 : Implication pour les prix des exonérations sur les produits de première nécessité ciblés .................................................................................................................................74   Tableau 27 : Programmes Vivres contre infrastructure du PAM (bénéficiaires et budgets), 2006- 2010...................................................................................................................................78   Tableau 1 : Indices de pauvreté selon le lieu de résidence....................................................................11   Tableau 2 : Estimations de la tendance de la pauvreté monétaire sur la base des comptes nationaux...........................................................................................................................11   Tableau 3 : Incidence de la pauvreté et vulnérabilité alimentaire par régions administratives 14   Tableau 4 : Pauvreté selon le lieu de résidence et la région administrative, 2003.................................18   Tableau 5 : Pauvreté en fonction de quelques caractéristiques des chefs de famille, 2003...................21   Page 7 Tableau 6 : Estimation des montants n écessaires pour amener tous les pauvres, et les plus pauvres et les plus vulnérables jusqu’au seuil de pauvreté par des transferts en espèces (2003, 2005 et 2007).....................................................................................................................22   Tableau 7 : Composante « Filets sociaux » du plan d’action de crise 2009-2010.................................32   Tableau 8 : Composante « Protection sociale des groupes vulnérables » du plan d’action de crise 2009...................................................................................................................................32   Tableau 9 : Liste des principaux programmes de filets sociaux existants au Burkina Faso, 2008- 2009...................................................................................................................................38   Tableau 10 : Dépenses totales dans les programmes de filets sociaux, 2005-2009...............................43   Tableau 11 : Dépenses sociales (y compris les financements PPTE et hors financements extérieurs)..........................................................................................................................45   Tableau 12 : Priorités de l’État et des bailleurs de fonds par programme en 2008 ...............................47   Tableau 13 : Bénéficiaires et allocation budgétaire par programme au Burkina Faso, 2009 49   Tableau 14 : Options de développement des programmes de filets sociaux .........................................51   Tableau 15 : Options pour l’augmentation des budgets des filets sociaux: Avantages et inconvénients.....................................................................................................................54   Tableau 16 : Groupes bénéficiaires de la recherche-action du CNLS-IST............................................59   Tableau 17 : Principales caractéristiques des récents programmes de coupons alimentaires 60   Tableau 18 : Stock d’intervention, situation au 31 décembre 2008.......................................................64   Tableau 19 : Stock national de sécurité alimentaire, situation au 31 décembre 2008 ...........................64   Tableau 20 : Nombre indicatif des bénéficiaires potentiels des stocks nationaux de sécurité...............65   Tableau 21 : Assistance en céréales du CONASUR aux populations vulnérables................................66   Tableau 22 : Assistance en céréales du CONASUR aux personnes affectées par une catastrophe.......66   Tableau 23 : Nombre indicatif des bénéficiaires des distributions ciblées de vivres, 2006-2010.........67   Tableau 24 : Principales caractéristiques des programmes de cantines scolaires dans les écoles primaires............................................................................................................................71   Tableau 25 : Implication pour les prix des exonérations sur les produits de première nécessité ciblés .................................................................................................................................74   Tableau 26 : Implications des exemptions sur les prix des carburants ciblés, 2008 ......................74   Tableau 27 : Programmes Vivres contre infrastructure du PAM (bénéficiaires et budgets), 2006- 2010...................................................................................................................................78   Liste des figures Figure 1 : Place des filets sociaux au sein des politiques de développement élargies.............................5   Figure 2 : Typologie régionale du Burkina Faso...................................................................................14   Figure 3 : Typologie des ménages au Burkina Faso (nationale)............................................................17   Figure 4 : Typologie des ménages au Burkina Faso (zones rurales/urbaines).......................................17   Figure 5 : Les femmes veuves ou qui l’ont été ont un indice de masse corporelle inférieur à celui des femmes ayant un autre état matrimonial .......................................................................20   Figure 6 : En milieu rural, les enfants des veuves ou des femmes qui l’ont été ont moins de chances d'être scolarisés....................................................................................................................20   Figure 7 : Dispositif institutionnel du projet de régime national d’assurance maladie..........................29   Figure 8 : Évolution des dépenses dans les filets sociaux au cours du temps, 2005-2009....................44   Figure 9 : Part de l’enseignement fondamental, de la santé et des filets sociaux dans le total des dépenses financées par des ressources intérieures et extérieures.........................................46   Figure 10 : Nombre indicatif des bénéficiaires des programmes de filets sociaux par an, 2009...........49   Figure 11 : Répartition des avantages des subventions .........................................................................75   Figure 12 : Nombre moyen de consultations mensuelles d’enfants de moins de 5 ans dans les CSPS des quatre districts d’intervention HELP et TdH et des quatre districts de contrôle...........83   Figure 13 : Rendement de l’investissement dans le capital humain, en fixant initialement un investissement égal pour tous les âges.................................................................................97   Page 8 Liste des encadrés Encadré 1 : Grandes lignes de la politique nationale de protection sociale élaborée sous la direction du MTSS (non adopté).......................................................................... 27   Encadré 2 : Initiative pour un socle de protection sociale..................................................... 36   Encadré 3 : Problèmes liés à l’information sur les filets sociaux........................................... 37   Encadré 4 : Problèmes de gestion budgétaire au Burkina Faso ............................................. 47   Encadré 5 : Leçons tirées de l’analyse de l’assiette fiscale du Burkina Faso, à l’aide du modèle MAMS.................................................................................................... 53   Encadré 6 : Programme de coupons alimentaires du PAM ................................................... 61   Encadré 7 : Transferts monétaires et en nature Alternatives ou compléments ?..................... 68   Encadré 8 : Planification pour le passage à l’échelle supérieure des intervenions nutritionnelles...................................................................................................... 70   Encadré 9 : Programmes de travaux publics Eléments requis pour atteindre les pauvres....... 77   Encadré 10 : Efficacité du ciblage des programmes de travaux publics l’expérience internationale....................................................................................................... 79   Encadré 11 : Une approche de ciblage communautaire pour dispenser les plus démunis des frais de santé au Burkina Faso.............................................................................. 81   Encadré 12 : Utilisation de l’auto-détermination des rangs de pauvreté par la communauté pour identifier le quintile le plus pauvre éligible à une subvention de l’adhésion à l’assurance maladie à base communautaire .......................................................... 82   Encadré 13 : Le débat sur le paiement par l’usager............................................................... 84   Encadré 14 : Principes d’une protection sociale tenant compte des enfants........................... 96   Encadré 15 : Choses à faire et à ne pas faire pour une protection sociale sensible aux femmes.............................................................................................................. 104   Encadré 16 : Cibler ou ne pas cibler – Les coûts et l’économie politique d’une approche sélective............................................................................................................. 107   Page 9 i RÉSUMÉ ANALYTIQUE Le Burkina Faso est un pays pauvre enclavé, avec peu de ressources naturelles et une population de 15,8 millions d’habitants en expansion rapide. Malgré des réformes structurelles et de bonnes politiques macroéconomiques, l’économie reste très vulnérable aux chocs (climatiques et extérieurs, y compris les termes de l’échange pour le coton et la hausse des prix alimentaires et pétroliers). Ce pays, où règnent une pauvreté extrême et des conditions de vie difficiles, occupe une des positions les plus basses (177 e sur 182 pays en 2009) au classement de l’indice de développement humain du Programme des Nations Unies pour le Développement (IDH du PNUD). En 2008, le revenu moyen par habitant était de 480 dollars EU et plus de 40 % de la population vivait en-dessous du seuil de pauvreté. Malgré les efforts du gouvernement pour améliorer le niveau de vie général, les différences d’accès aux services sociaux, un taux de croissance démographique élevé (3,1 %), l’extrême pauvreté et une grande vulnérabilité à toute une série de chocs continuent à peser sur la population du Burkina Faso. La neuvième revue annuelle du Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté révélait en 2008 que la croissance économique ne s’était pas traduite par la réduction de la pauvreté attendue, principalement à cause des récentes crises alimentaires, de la forte croissance démographique et de l’inefficacité des mécanismes de redistribution de la richesse. Plus récemment, la crise financière et économique mondiale et les graves inondations de 2009 ont freiné la croissance économique. La grande vulnérabilité du pays à toute une variété de chocs (environnementaux, sociaux et économiques), affectant particulièrement les Burkinabés les plus pauvres, a augmenté la demande de programmes de filets sociaux. Une étude antérieure (2004) réalisée par la Banque mondiale a montré que les programmes de filets sociaux existants sont gérés par plusieurs ministères, ont une couverture limitée, dépendent fortement du financement extérieur, et qu’une nouvelle évaluation est nécessaire pour mieux comprendre leur rôle et, en particulier, pour réviser le fonctionnement de certains d’entre eux. Dans ce contexte, et en réponse à une demande du gouvernement, ce rapport, appuyé techniquement par l’UNICEF, fait un inventaire détaillé et actualisé des programmes de filets sociaux existants et suggère des mesures de politiques susceptibles d’améliorer leur couverture, leur efficacité, leur pertinence et leur viabilité financière. Ces résultats devraient aider le gouvernement à étendre les filets sociaux pour qu’ils atteignent les populations les plus pauvres (pauvres chroniques) et les plus vulnérables. Ils constituent également un apport pour sa 2010 Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD).   A. Principaux constats du rapport Ce rapport montre que la portée et la couverture du système de filets sociaux existant sont trop restreintes, et que la plupart des interventions ont une échelle plutôt petite et sont conçues comme des programmes temporaires. En moyenne, en dehors de la subvention des carburants, la dépense dans les programmes de filets sociaux a été d’environ 0,6 % du PIB de 2005 à 2009 – de 0,3% en 2005 à 0,9% en 2009, alors qu’environ 20 % de la population souffre d’insécurité alimentaire et vit dans une pauvreté chronique permanente. La subvention universelle des carburants est très coûteuse (0,7 % du PIB en 2007), et ses effets sont très limités pour le décile le plus pauvre (84 % des avantages vont aux non-pauvres). Parmi les autres programmes, les transferts alimentaires sont la principale forme de programmes de filets sociaux au Burkina Faso. Ils représentaient 69 % des dépenses totales en faveur des filets sociaux et rassemblaient plus de 80 % du total estimé des bénéficiaires en 2009 (subventions carburant exclues). La plus grande partie du financement des programmes de filets sociaux vient de l’extérieur et de ressources ad hoc. Page 10 ii Définition des filets sociaux Le terme filet social désigne, dans ce rapport, des programmes de transferts non contributifs publiquement financés, ciblant de l’une ou l’autre manière des individus ou des ménages pauvres ou vulnérables, et visant à accroître directement la consommation et/ou l’accès aux services sociaux de base. Les filets sociaux peuvent jouer quatre rôles dans la politique de développement i) redistribuer le revenu aux pauvres et plus vulnérables, avec un impact immédiat sur la pauvreté et l’inégalité ii) permettre aux ménages de mieux investir dans leur avenir, tant dans le capital humain de leurs enfants que dans les moyens d’existence des soutiens de famille iii) aider les ménages à gérer les risques, à la fois en protégeant les ménages et en promouvant leur autonomie et iv) permettre aux pouvoirs publics de faire des choix soutenant l’efficacité et la croissance, en libérant d’autres secteurs de toute fonction de redistribution pour qu’ils puissent se concentrer sur une prestation efficace des services. Les filets sociaux peuvent donc contribuer au développement général du pays. De même que d’autres instruments de protection sociale, les filets sociaux sont des interventions liées à la demande qui visent à agir en synergie avec des interventions associées à l’offre (comme la fourniture de services éducatifs et de santé de qualité, la production agricole, les services de la microfinance, etc.) en faveur du développement du capital humain, du développement rural, etc. et, en fin de compte, de la réduction de la pauvreté et de la cohésion sociale. Source : Grosh et coll. 2008. Pauvreté et vulnérabilité Bien que l’incidence de la pauvreté ait diminué grâce à la croissance économique soutenue de la dernière décennie et que d’importants progrès aient été réalisés au niveau de l’accès des ménages aux services de base, il reste des défis importants, et sa croissance démographique rapide risque d’empêcher le pays d’atteindre ses Objectifs du Millénaire pour le Développement. Sur la base des données d’enquêtes disponibles et des prévisions pour les comptes nationaux, la part de population vivant en-dessous du seuil de pauvreté est tombée de 46,4 % en 2003 à 42,2 % en 2009. En termes d’actifs, même si la pauvreté a diminué (de 46,3 % en 2003 à 40,4 % en 2005 et 38,5 % en 2007), le pourcentage des pauvres chroniques a augmenté suite à différents chocs : il est passé de 25,4 % en 2003 à 18,8 % en 2007, après avoir plafonné à 31,1 % en 2005 après les chocs climatiques. En termes d’indicateurs sociaux, l’accès aux services de santé s’est amélioré grâce à une augmentation régulière des dépenses dans la santé publique exprimée en pourcentages du budget général (de 7,4 % en 2004 à 9,9 % en 2006). Malgré cela, i) la qualité de l’enseignement reste médiocre ; ii) les disparités liées au genre sont toujours importantes et iii) la rapide croissance démographique (3,1 % par an) a des conséquences négatives majeures pour la croissance, le niveau de vie et la réduction de la pauvreté. Sur base de l’enquête sur les priorités de 2003, le ménage burkinabé pauvre type se compose de sept membres ou plus, a à sa tête un homme polygame, illettré ou avec un niveau d’études ne dépassant pas le primaire inférieur, qui est un agriculteur vivant dans une zone rurale de la région Nord-Est. Plus de 92 % de la population vit dans des zones rurales où l’incidence de la pauvreté est plus de deux fois supérieure à celle des zones urbaines (52,3 % contre 19,9 %). En termes de pauvreté régionale, la région du Centre figure parmi les plus pauvres, avec plus de la moitié du total des pauvres. Les ménages dont le chef de famille est un homme, qui représentent 95,6 % de l’incidence de la pauvreté, ont tendance à être plus pauvres que ceux dont le chef de famille est une femme, tant en termes d’incidence que d’écart. Le genre est également fortement corrélé à la pauvreté, et comme dans beaucoup de régions de l’Afrique de l’Ouest sahélienne, il y a des raisons de croire que certains groupes de femmes puissent être particulièrement pauvres et vulnérables (veuves, veuves remariées, divorcées, ainsi que leurs enfants). En outre, les ménages dont le chef de famille est analphabète ou n’a pas dépassé le début de l’école primaire ont une incidence de pauvreté sensiblement plus élevée (51,0 % et 41,1 % respectivement). Stratégie du gouvernement, dispositifs institutionnels et dépenses en faveur des filets sociaux Page 11 iii Bien que le Burkina Faso n’ait pas encore adopté une politique de protection sociale nationale consolidée, les programmes de filets sociaux jouent un rôle important dans le développement du capital humain et dans les stratégies de réponse aux crises du pays. Des programmes de filets sociaux apparaissent dans beaucoup de stratégies sectorielles : la santé, l’enseignement, la sécurité alimentaire et l’emploi. Pourtant, leur potentiel de réduction de la pauvreté et de la vulnérabilité par la redistribution, la promotion et la transformation des revenus est moins souvent reconnu dans les stratégies sectorielles à moyen terme. De plus, à cause de l’absence d’une stratégie complète et de structures institutionnelles adéquates, les mécanismes de coordination interministérielle de la protection sociale et des filets sociaux sont faibles. Le gouvernement entreprend actuellement plusieurs actions pour répondre à la nécessité d’une protection sociale plus complète et, en particulier, d’un système de filets sociaux plus efficace. En février 2010, un Comité interministériel pour la protection sociale a été créé par décret et sa première réunion a été organisée en juillet 2010 De plus, en avril 2010, le Ministère de l’Économie et des Finances (MEF) a organisé un forum technique national sur la protection sociale dans le but explicite de tracer les grandes lignes d’une vision nationale et consolidée de la protection sociale, y compris de la composante « filets sociaux », et de fournir directement de l’information à l’élaboration de la SCADD. En dehors du coût de la subvention générale des produits alimentaires et pétroliers, la dépense totale dans les programmes de filets sociaux sur la période 2005-2009 a atteint en moyenne 0,6 % du PIB. Actuellement, on peut classer les programmes de filets sociaux au Burkina en cinq catégories : i) les transferts monétaires et quasi-monétaires ; ii) les transferts alimentaires (vente d’aliments à prix subventionnés, distribution ciblée de vivres, programmes de nutrition et cantines scolaires) ; iii) les subventions universelles (aliments et carburants) ; iv) les travaux publics et v) les exemptions de frais. Ce niveau de dépenses en faveur des filets sociaux correspondait environ à un tiers du montant requis pour élever tous les pauvres au niveau du seuil de la pauvreté à l’aide de transferts monétaires. Depuis 2006, le financement des programmes de filets sociaux dépend de plus en plus des bailleurs de fonds. À l’exception des subventions universelles, la part du financement extérieur des filets sociaux a augmenté d’environ 57 % en 2005 à 69 % en 2008 et à 76 % en 2009. Au cours de la même période, les dépenses de l’État ont augmenté moins vite, de 0,1 % du PIB en 2005 à 0,2 % en 2009 (en excluant les subventions aux produits alimentaires et pétroliers). On observe d’importantes différences entre les priorités du gouvernement et celles des bailleurs de fond, ceux-ci mettant l’accent sur la nutrition et le gouvernement concentrant surtout son financement sur la subvention universelle des carburants. La couverture des programmes de filets sociaux reste limitée comparée aux besoins. Théoriquement, le nombre des bénéficiaires des programmes de filets sociaux était estimé à plus de 3,9 millions en 2009, soit environ 25 % de la population totale. En fait, la plupart des programmes n’offrent qu’une couverture temporaire (réactions aux chocs), et pour certains, les allocations sont très réduites et insuffisantes pour aider les pauvres à lisser leur consommation. La raison en est avant tout la limitation de l’enveloppe financière et le manque de capacités de mise en œuvre (en particulier, des difficultés à identifier et atteindre les plus pauvres, et à mesurer le rapport coût-efficacité). De plus, à cause du manque d’investissement dans le suivi et évaluation (sauf pour quelques initiatives récentes financées par les bailleurs de fond, comme les transferts monétaires, les coupons alimentaires et les cantines scolaires) on ne dispose pas d’informations sur l’impact réel des programmes de filets sociaux, qui permettrait de faire des choix politiques en connaissance de cause. Programmes de filets sociaux existants Page 12 iv L’examen des programmes de filets sociaux existants confirme que, malgré l’importance des besoins, peu de programmes aident les pauvres chroniques et fournissent des transferts réguliers et prévisibles. Les interventions existantes sont principalement mises en œuvre à travers des projets, souvent en périodes de chocs, et centrées sur une seule région géographique. Il n’existe aucune approche systématique pour assister les ménages pauvres et vulnérables. Les principaux défis pour un tel système sont : la définition des groupes cibles prioritaires, le choix des instruments adéquats et la mise en place de systèmes de suivi et évaluation solides pour éclairer les décisions politiques. Les récentes initiatives innovantes, comme les coupons alimentaires, les transferts monétaires et l’exemption des frais de santé, devraient permettre de tirer des leçons pour rendre plus efficaces les programmes de filets sociaux et, potentiellement, en étendre la portée. Transferts monétaires et quasi-monétaires On peut tirer de précieux enseignements des programmes de transferts monétaires récemment introduits au Burkina Faso. Depuis 2008, trois programmes pilotes de transferts monétaires ont été financés exclusivement de l’extérieur : un programme pilote de transferts monétaires supervisé par le Conseil national de lutte contre le sida et les infections sexuellement transmissibles (CNLS-IST) et deux programmes de coupons alimentaires menés par le Catholic Relief Services (CRS) et le Programme alimentaire mondial (PAM). Les résultats de l’évaluation d’impact du projet CNLS-IST sur 3 900 ménages sont attendus pour la fin 2010. Une évaluation à mi-parcours du programme PAM, bénéficiant à plus de 30 000 ménages, indique un processus de mise en œuvre efficace et des résultats positifs en termes de consommation alimentaire, tant en quantité qu’en qualité, malgré des problèmes de ciblage en milieu urbain. Transferts alimentaires Les transferts alimentaires sont la principale forme de programmes de filets sociaux au Burkina Faso. Ils ont représenté 87 % des dépenses totales en faveur des filets sociaux sur la période 2005-2009 et ont rassemblé plus de 80 % du total estimé des bénéficiaires en 2009 (hors subvention des carburants). On observe actuellement quatre types de transferts alimentaires : i) les ventes d’aliments à prix subventionnés ; ii) les distributions ciblées de vivres gratuits ; iii) les programmes nutritionnels ; et iv) les programmes de cantines scolaires. Les ventes ciblées d’aliments à prix subventionnés. Du fait d’un faible système de suivi et évaluation du programme de ventes d’aliments à prix subventionnés, les informations sur le nombre, le profil et le niveau de pauvreté réels des bénéficiaires manquent. Cependant, il est à craindre que les plus pauvres ne puissent pas avoir suffisamment de ressources financières pour accéder aux céréales subventionnées. Distributions ciblées de vivres gratuits. La distribution d’aliments gratuits s’effectue à travers trois mécanismes : i) la distribution de vivres gratuits par le Conseil national de secours d’urgence et de réhabilitation (CONASUR) ; ii) le programme Vivres contre éducation/formation du PAM ; et iii) le programme général de secours de Catholic Relief Service s (CRS).En 2008, le CONASUR a fourni une aide alimentaire à environ 44 000 personnes sur une base ponctuelle (notamment, aux personnes touchées par les inondations ou par des catastrophes localisées). Les transferts alimentaires du PAM conditionnés par la fréquentation des cours d’alphabétisation ou de formation ont progressivement été recentré sur les provinces du Sahel, et ont atteint quelques 36 000 bénéficiaires en 2008/2009. Enfin, le CRS aide chaque année environ 14 000 personnes vulnérables (personnes vivant avec le VIH, orphelins, personnes âgés et handicapés). Néanmoins, l’insécurité alimentaire étant principalement un problème d’accès, les transferts monétaires ou quasi-monétaires pourraient être plus appropriés. Page 13 v Programmes de nutrition. Au vu des besoins importants, le gouvernement et ses partenaires, notamment l’UNICEF et la Banque mondiale, font depuis 2003 des efforts substantiels pour étendre leurs interventions nutritionnelles. L’UNICEF, le PAM, ECHO et leurs ONG partenaires sont particulièrement actifs dans la prise en charge des enfants de moins de 5 ans et des femmes enceintes et allaitantes, modérément ou gravement mal nourris. Néanmoins, la couverture des programmes existants reste insuffisante, bien que la malnutrition aiguë sévère soit un des principaux défis pour la réalisation des OMD liés à la nutrition. Cantines scolaires. Les cantines scolaires sont l’un des principaux programmes de filets sociaux actuellement en cours au Burkina Faso. En 2009, elles comptaient pour 24 % de la dépense totale en faveur des filets sociaux et concernaient plus de 27 % du total estimatif des bénéficiaires des filets sociaux (subventions générales exclues). Plus de 50 % des écoles primaires du pays ont des activités de cantines scolaires, et plus de 50 % de la dépense est extérieurement financée via USAID et les financements multilatéraux à travers le PAM et CRS. Le Ministère de l’Enseignement de Base et de l’Alphabétisation (MEBA) gère des programmes endogènes de cantines scolaires, fournissant des vivres pour trois mois seulement, tandis que les programmes soutenus par les bailleurs de fond apportent une aide pour toute l’année scolaire dans les zones les plus touchées par l’insécurité alimentaire. Une récente évaluation d’impact (2008) a rapporté que les deux formes de cantine scolaire assistée, repas pris à l’école et les rations sèches à emporter pour les filles, ont permis d’augmenter la scolarisation des filles d’environ 6 %. Aucune de ces interventions n’a montré d’impact positif significatif sur l’apprentissage, mais un impact positif des rations sèches pour les filles sur le statut nutritionnel des frères et sœurs plus jeunes a été observé.. Ces résultats mitigés invitent à reconsidérer le choix des repas pris à l’école pour augmenter les taux de scolarisation. Les repas pris à l’école sont coûteux et un impact plus important (sur la pauvreté et la nutrition) pourrait être réalisé avec des rations ciblées (éventuellement conditionnelles) avec des résultats similaires sur les taux de scolarisation, et la possibilité de cibler prioritairement les filles et réduire ainsi les disparités entre genres. Le gouvernement prévoit de faire passer son programme de cantines scolaires (repas pris à l’école) à l’échelle pendant l’année scolaire 2010-2011, afin de couvrir toutes les écoles primaires. Il n’est cependant pas clair si cette expansion est une mesure temporaire pour atténuer les effets de la crise récente ou une stratégie à long terme. L’expansion des cantines scolaires peut certes être une réponse temporaire, pratique et légitime à la crise alimentaire mais les autorités doivent continuer à rechercher l’instrument de filet social le plus adéquat à long terme, y compris les mécanismes de ciblage au plus pauvres, pour améliorer les taux de scolarisation et contribuer à la réduction de la pauvreté. Subventions universelles des produits alimentaires et pétroliers Pour atténuer les effets négatifs des prix élevés des produits alimentaires et pétroliers, le gouvernement a mis en place des subventions universelles, qui sont coûteuses et inefficaces pour atteindre les pauvres. Les subventions universelles des produits alimentaires introduite en 2008 en réponse à la crise causée par la hausse mondiale des prix se sont avérées très coûteuses et moins qu’efficaces pour atteindre les pauvres. C’est pourquoi, il a été mis fin à ce programme. En outre, un certain nombre de produits pétroliers sont subventionnés par l’État depuis des années, malgré un coût élevé pour les finances publiques et un très faible impact sur les ménages les plus pauvres (sauf pour le pétrole lampant). Dans l’ensemble, le coût direct pour les finances publiques de l’exonération des taxes d’importation sur les carburants est estimé à 0,7 % du PIB en 2007 et 2008, avec un impact sur les pauvres très limité, plus de 84 % des avantages allant aux non-pauvres. Page 14 vi Travaux publics à haute intensité de main d’œuvre et argent ou vivres contre travail Il y a beaucoup à apprendre de l’expérience positive des programmes de travaux publics en cours. Le PrEst (Programme de pistes rurales Désenclavement à l’Est) est mis en œuvre par l’ONG Helvetas depuis 2002, sous la supervision du Ministère des Infrastructures et du Désenclavement (MID). Il utilise une approche à haute intensité de main d’œuvre pour la création d’infrastructures dans les zones rurales. Parmi les autres expériences de travaux publics, on trouve aussi le programme Vivres contre infrastructures du PAM, qui se concentre principalement sur la construction d’actifs de qualité. Sur la base des expériences du PrEst et du programme Vivres contre infrastructure du PAM, d’autres types de programmes de travaux publics pourraient être introduits en tant qu’instruments efficaces de filets sociaux. En fait, un examen récent de l’expérience avec les programmes de travaux publics dans plusieurs pays montre que, s’ils sont bien conçus et bien mis en œuvre, de tels programmes peuvent contribuer à atténuer les chocs sur les revenus et devenir des instruments efficaces de lutte contre la pauvreté. Cependant, leur efficacité dépend en grande mesure de la capacité du programme à fournir des sources supplémentaires de revenus à la population la plus vulnérable lorsqu’elle en a le plus besoin. Et il faudrait consacrer plus d’attention aux méthodes de ciblage, à la durée et au calendrier des travaux, aux caractéristiques de conception particulières pouvant favoriser la participation des femmes, à la participation des communautés et au choix de la rémunération. Exemption des frais de santé Bien que diverses initiatives nationales aient visé à introduire la gratuité des soins médicaux pour les personnes pauvres et vulnérables, elles ne se sont jamais concrétisées faute de mécanismes de mise en œuvre. La politique de subvention des SONU (soins obstétricaux et néonatals d’urgence) de 2006 donnait aux femmes indigentes (pauvres) le droit à des soins médicaux gratuits. Elle n’a cependant jamais réussi à déterminer les critères d’éligibilité à ces avantages, si bien que ces femmes n’ont jamais pu en bénéficier. Trois questions clés se posent pour ce programme : i) la définition de qui est indigent (ou pauvre) ? ; ii) qui décide de ce statut ? ; et (iii) qui paiera pour cette exemption des frais de santé ? Bien que l’expérience internationale suggère que l’abolition du paiement par l’usager pour les plus pauvres est équitable, des études complémentaires sont nécessaires pour définir les mécanismes de mise en œuvre. En particulier dans le contexte du financement du système de santé au Burkina Faso, l’exemption des frais de santé doit être considérée dans le cadre d’une stratégie plus large de politique de santé, pour déterminer le modèle à promouvoir et les mécanismes de mise en œuvre nécessaires. Deux projets pilotes financés par des fonds extérieurs fournissant des services de santé gratuits aux femmes enceintes et allaitantes et aux enfants de moins de 5 ans ont montré de bons résultats sur l’utilisation des services de santé . Ces initiatives, mises en œuvre par les ONG HELP (dans deux districts du Sahel depuis septembre 2007) et Terre des Hommes (dans deux districts du Nord depuis octobre 2008) en collaboration avec les COGES, font écho à l’expérience internationale qui suggère que l’abolition du paiement par l’usager n’est pas seulement juste et équitable mais également potentiellement faisable à la fois techniquement et financièrement. Page 15 vii Le débat autour de l’abolition des paiements et l’expansion des exemptions de frais appelle à reconsidérer la stratégie et le financement du secteur de la santé et ses mesures de protection sociale dans leur ensemble. Plus de recherche est requise pour informer les questions clés suivantes : (i) si le gouvernement veut abolir les paiements par l’usager, comment cela devrait-il être fait ? (ii) comment les partenaires peuvent-ils soutenir le gouvernement ? et (iii) comment l’abolition du paiement par l’usager peut-elle être le point d’entrée pour une amélioration de la qualité des services ? B. Principales recommandations pour les politiques La principale recommandation du rapport est de développer un système efficace de filets sociaux qui réponde adéquatement aux besoins des pauvres au Burkina Faso. En s’appuyant sur l’engagement du gouvernement à construire une structure de protection sociale, les actions prioritaires pour développer un système de filets sociaux plus efficace et plus rentable doivent être axées sur : (i) Le renforcement du cadre stratégique, institutionnel et financier pour la conception, la mise en œuvre, la gestion, et le suivi et évaluation des programmes de filets sociaux ; et (ii) L’établissement d’un plan d’amélioration de l’efficacité du système de filets sociaux par la réforme des programmes existants et, sur la base d’expériences récentes, par la conception de nouveaux programmes. En particulier, la réforme des programmes de filets sociaux existants devrait inclure la réduction des programmes de très petite envergure ou inefficaces, et le renforcement des quelques programmes viables ayant un meilleur ciblage et de meilleurs résultats. Renforcer le cadre stratégique, institutionnel et financier (a) Adopter une stratégie nationale de protection sociale incluant des filets sociaux Développer une stratégie complète de protection sociale. La politique nationale de protection sociale ébauchée en 2007 constitue un bon point de départ. Elle devrait être actualisée, en tenant compte des défis qui se posent actuellement au pays. Étant donné l’énormité des besoins de santé et d’éducation, et dans un contexte de ressources financières limitées, les instruments de protection sociale devraient contribuer directement au développement du capital humain. Il faut promouvoir les synergies et les économies d’échelle entre les différents instruments de protection sociale et d’autres politiques sociales. Clarifier les objectifs du système de filets sociaux au sein d’une stratégie de protection sociale plus large. Les objectifs de la composante « filets sociaux » sont : i) d’apporter un appui direct à la consommation des populations chroniquement pauvres et vulnérables ; ii) d’assurer l’accès des populations pauvres et vulnérables aux services sociaux de base, afin de promouvoir l’investissement dans le capital humain ; et iii) de fournir une assistance temporaire aux populations pauvres et vulnérables frappées par des chocs. Pour cela, les principes prioritaires du système de filets sociaux devraient être : i) d’assurer que les populations dans un état chronique de pauvreté extrême et de vulnérabilité reçoivent une assistance régulière et prévisible, accompagnée de programmes complémentaires pour les libérer des pièges de la pauvreté et briser la transmission intergénérationnelle de celle-ci ; ii) de fournir des revenus temporaires aux groupes vulnérables en cas de choc ; iii) de prêter une attention particulière aux besoins des enfants vulnérables (par exemple, les transferts nutritionnels, éducatifs ou monétaires conditionnels) et à ceux des femmes pauvres et vulnérables (c’est-à-dire minimiser les impacts négatifs potentiels et optimiser les impacts Page 16 viii positifs sur les femmes et sur l’égalité des genres). Proposer des actions prioritaires et clarifier les liens entre les politiques sociales. Les différentes stratégies sectorielles existantes ont tendance à considérer tout le spectre des personnes dans le besoin, sans établir clairement les priorités. La stratégie devrait décrire les priorités et clarifier les liens entre les politiques sociales. Les programmes de filets sociaux sont supposés agir conjointement avec d’autres programmes de réduction de la pauvreté, et sont habituellement utilisés en complément d’interventions liées à l’offre ou comme appoint lorsque les autres mesures ne peuvent pas produire des résultats immédiats suffisants. Au Burkina Faso, les programmes de filets sociaux pourraient donc compléter d’autres programmes sociaux, par exemple en assurant que la dépense dans l’éducation et la santé est favorable aux pauvres, en apportant une sécurité alimentaire, en complétant les politiques d’assurance maladie et démographiques, etc. Un appui coordonné serait nécessaire entre différents ministères sectoriels. (b) Renforcer le cadre institutionnel de protection sociale et des filets sociaux Appuyer le comité interministériel permanent de protection sociale créé récemment. Depuis février 2010, le gouvernement a mis en place un comité permanent de protection sociale. Il sera responsable de réviser la stratégie de protection sociale (y compris les programmes d’assurance sociale et de filets sociaux), de superviser et coordonner les diverses initiatives et d’assurer non seulement le dialogue intersectoriel entre ministères, mais également des résultats concrets issus de ce dialogue. Ce comité doit jouer un rôle actif dans la conception et la supervision de la mise en œuvre de la stratégie de protection sociale, filets sociaux compris. Clarifier les rôles et responsabilités des différentes institutions nationales impliquées dans les filets sociaux. Une fois le cadre stratégique de la protection sociale défini et les actions prioritaires pour les filets sociaux clarifiées, il faudra définir les fonctions et les rôles respectifs des principales structures responsables des filets sociaux (MdS, MEBA, MASSN, FNS et CONASUR). Ceci comprend : i) la définition des rôles des autorités centralisées et décentralisées ; ii) la définition des dispositifs de mise en œuvre adéquats et la séparation des tâches (y compris des ONG et du secteur privé impliqués dans la fourniture des filets sociaux) ; et iii) l’appui au renforcement des capacités. La définition de toute nouvelle responsabilité devra se traduire par des allocations budgétaires (par exemple, pour la formation du personnel, la mise en place de ressources humaines et matérielles, et le renforcement de la structure institutionnelle) et devra être appuyée par de meilleurs mécanismes de coordination entre les différents ministères sectoriels. Appuyer le renforcement des capacités. Le concept de filets sociaux en tant qu’investissement social nécessaire (régulier et prévisible) est une assez grande nouveauté au Burkina Faso. Des efforts de sensibilisation et de formation seront nécessaires aux niveaux national et local. D’autres initiatives, telles que la formation sur le tas et les voyages d’études, peuvent s’avérer utiles pour accroître la compréhension générale des filets sociaux et de la protection sociale, et l’intérêt qui leur est porté. Page 17 ix (c) Renforcer le cadre financier Sécuriser les ressources financières nécessaires pour qu’à court terme, les dépenses dans les programmes de filets sociaux soient, au minimum, maintenues à leurs niveaux actuels (autour de 1 % du PIB en 2009), et soient ultérieurement augmentées pour s’adapter à une plus large couverture. Dans ce but, un arbitrage budgétaire sera nécessaire pour maintenir ou étendre les programmes de filets sociaux les plus rentables. Le Burkina Faso doit examiner soigneusement le rôle que devraient jouer les filets sociaux dans la stratégie de développement du pays, le nombre souhaité de bénéficiaires pour chaque type de programme et le coût attendu selon le profil de pauvreté et de vulnérabilité, les performances des programmes existants, l’expérience internationale et la capacité institutionnelle nationale. Pour rendre ce financement plus soutenable, les étapes suivantes doivent être entreprises : · Déterminer l’enveloppe budgétaire totale (provenant de l’État et de ses partenaires) nécessaire pour le niveau de couverture souhaité des filets sociaux et une fourniture annuelle adéquate de ce budget. · Rechercher des appuis budgétaires dans le cadre du crédit IDA d’aide à la réduction de la pauvreté et d’autres opérations semblables d’autres partenaires extérieurs. Ceci constituera un pas en avant dans la gestion du système de filets sociaux et une amélioration d’aspects tels que les mécanismes fiduciaires, la passation des marchés et les audits, ainsi que le suivi et évaluation des résultats. Des économies seront possibles grâce à un meilleur ciblage, une rationalisation des coûts et une réallocation des dépenses publiques, en réduisant les coûts des programmes de petite taille ou inefficaces et en renforçant les quelques programmes mieux ciblés et plus performants. Dans ce contexte, les dépenses doivent devenir en général plus efficaces et plus favorables aux pauvres, grâce à une réduction des subventions mal ciblées et à un recentrage sur des secteurs hautement prioritaires comme la santé et l’éducation. En outre, des économies sur les dépenses discrétionnaires peuvent amener des gains d’efficacité. (d) Améliorer le suivi et l’évaluation des programmes Le suivi systématique de l’ensemble des programmes de filets sociaux et l’évaluation individuelle de ces programmes sont nécessaires pour juger de la bonne utilisation des ressources. C’est là une condition préalable du pilotage et/ou de l’extension de tout programme de filet social. On peut en particulier envisager six actions systémiques : · Établir une classification rigoureuse des dépenses de protection sociale et une liste complète des programmes publics de filets sociaux ; · Établir les exigences minimales de production de rapports pour les programmes de filets sociaux, permettant un bon suivi et l’évaluation de l’efficacité, avec des coûts ventilés entre la prestation de services, les frais généraux, les sources de financement, etc. · Transmettre systématiquement les rapports de suivi des programmes aux ministères sectoriels responsables de la protection sociale et des filets sociaux, et maintenir une base de données sur les programmes ; · Mettre en place une évaluation adéquate des programmes, en particulier des programmes pilotes pendant l’introduction de nouvelles interventions ou l’extension d’interventions existantes à de nouvelles catégories de bénéficiaires. · Impliquer la société civile dans le suivi et l’évaluation ; Page 18 x · Renforcer les capacités de suivi et d’évaluation des ministères sectoriels ; et · Fournir plus de formation aux responsables des programmes aux techniques de suivi et d’évaluation, couplée avec un mécanisme d’échange d’expériences entre programmes. Planification de l’amélioration de l’efficacité du système de filets sociaux Une fois que les cadres stratégique, institutionnel et financier ainsi que le système de suivi et évaluation auront été définis, il faudra : i ) identifier les instruments de filets sociaux adéquats en fonction des besoins ; ii ) améliorer l’efficience et l’efficacité du ciblage des programmes existants ; et iii ) étendre les interventions pilote en cours couronnées de succès. Déterminer la combinaison adéquate d’instruments de filets sociaux. Dans ce contexte, premièrement , à partir des données (qui seront disponibles en 2010-2011) de l’enquête intégrale sur les conditions de vie des ménages (EICVM) actuellement en cours, il faudra mettre à jour l’analyse de la pauvreté pour identifier les groupes cibles prioritaires, et repérer leur localisation géographique respective à l’aide de cartes de pauvreté. Deuxièmement , définir le type, le rôle, l’échelle et la fréquence des instruments de filets sociaux pour chaque groupe cible prioritaire. Sur la base de l’analyse actualisée de la pauvreté, puis d’analyses de faisabilité, il est proposé d’envisager la combinaison d’instruments suivante de façon permanente pour enrayer la pauvreté chronique : i) des programmes de supplémentation nutritionnelle pour les femmes enceintes ou allaitantes et pour les enfants de moins de 5 ans ; ii) des programmes ciblés de cantines scolaires pour les enfants de 6 à 14 ans, afin d’étendre la scolarisation et l’assiduité scolaire des enfants pauvres ; iii) des transferts monétaires réguliers aux ménages frappés de pauvreté chronique, pour augmenter leur revenu réel ; et iv) des travaux publics saisonniers à haute intensité de main d’œuvre afin de créer une source de revenus pour les travailleurs pauvres et de construire une infrastructure publique ou de fournir des services à la communauté. La portée et l’échelle de chacun des instruments proposés devront être déterminées sur la base des résultats de l’analyse, de la disponibilité budgétaire et de la capacité de mise en œuvre. Une fois qu’un système permanent adéquat de filets sociaux aura été établi, on pourra envisager d’étendre certains mécanismes pour répondre aux crises, en les accompagnant d’autres instruments temporaires. Améliorer l’efficience et le ciblage des programmes de filets sociaux. Le ciblage est à l’heure actuelle, confronté à beaucoup de contraintes, incluant, entre autres, les capacités administratives et la qualité de la gouvernance, la perception négative des programmes publics et les obligations familiales des femmes. À cet égard, l’expérience internationale nous indique, comme bonne pratique, l’approche suivante : · Suivre les processus et les coûts des programmes. Les informations sur les ressources utilisées pour la gestion des programmes sont cruciales pour améliorer la qualité de l’exécution de ceux-ci et la réduction des coûts au fil du temps. Cependant, un investissement initial plus important dans les outils administratifs et les capacités pourrait s’avérer nécessaire. · Assurer qu’une meilleure information soit recueillie auprès des bénéficiaires actuels et potentiels pour faciliter le ciblage et évaluer les résultats. Actuellement, les données détaillées sur les bénéficiaires sont insuffisantes. · Mettre au point des outils de ciblage efficaces pour rediriger vers les pauvres le flux des ressources. L’État doit élaborer et appliquer des critères et des instruments de Page 19 xi ciblage communs à deux niveaux : i) au niveau géographique , pour allouer les dépenses publiques sociales en général, et dans les programmes de filets sociaux en particulier, là où se trouve le plus grand nombre de pauvres chroniques ; et ii) au niveau des ménages, avec la détermination d’indicateurs communs pour l’évaluation des moyens d’existence par approximation, qui peuvent être appliqués objectivement à toute une gamme de programmes. · Mettre en place des mécanismes d’appel et de réclamation. Plus de transparence est nécessaire dans les normes des programmes, et des normes de gouvernance de qualité doivent être mise en place et maintenues. Maintenir ou étendre les programmes efficaces et efficients. Des évaluations et analyses supplémentaires seront nécessaires pour pouvoir émettre des propositions détaillées d’extension ou de réduction de la portée des programmes individuels de protection sociale. Ceci dit, l’étude présentée dans ce rapport permet d’émettre certaines recommandations initiales : (i) Étendre les transferts monétaires efficients en tenant compte des prochaines évaluations d’impact (transferts monétaires et coupons alimentaires) ; (ii) Examiner plus avant les ventes d’aliments à des prix subventionnés et les distributions ciblées de vivres pour évaluer leur rentabilité et leur impact sur les bénéficiaires, et envisager leur réduction au profit d’un programme dont le ciblage donne de meilleurs résultats ; (iii) Renforcer et étendre les programmes nutritionnels , en particulier en raison de la médiocre situation nutritionnelle ; (iv) Rechercher des mécanismes de ciblage géographique pour les cantines scolaires afin d’assurer que celles-ci bénéficient les enfants pauvres ;et surtout se baser sur les résultats des expériences en cours du PAM et CRS qui sont déjà géographiquement ciblées ; Éviter les subventions générales , sauf en tant qu’instrument de dernier recours en temps de crise, et viser en particulier les produits principalement consommés par les pauvres ; (v) Entreprendre des travaux publics ciblés sur les pauvres des zones rurales, par exemple en utilisant les taux de rémunération et autres critères de ciblage possibles pour générer temporairement des revenus pendant les pertes d’emplois saisonnières et en périodes de chocs ; (vi) Examiner soigneusement les exemptions ou l’abolition du paiement par l’usager des soins de santé pour les pauvres des zones rurales, dans le cadre de réformes plus larges du système de santé et de son financement, afin de mettre en place des mécanismes de compensation pour une mise en œuvre effective du programme. Page 20 B u r k i n a F a s o : P L A N D ’ A C T I O N P O L I T I Q U E P O U R U N S Y S T È M E D E F I L E T S S O C I A U X E F F I C A C E A c t i o n s e t c a l e n d r i e r R e c o m m a n d a t i o n s d e p o l i t i q u e s 2 0 1 0 - 2 0 1 1 2 0 1 2 - 2 0 1 4 A c t e u r s I n d i c a t e u r s d e s u i v i O b j e c t i f p o l i t i q u e 1 : R e n f o r c e r l e C a d r e S t r a t é g i q u e p o u r C o n c e v o i r , C o o r d o n n e r , G é r e r e t F i n a n c e r l e S y s t è m e N a t i o n a l d e P r o t e c t i o n S o c i a l e , F i l e t s S o c i a u x C o m p r i s U n c a d r e n a t i o n a l d e c o n s u l t a t i o n i m p l i q u a n t d i v e r s o r g a n i s m e s d u s e c t e u r s o c i a l a s s u r e l ’ o r i e n t a t i o n p o l i t i q u e · U n c o m i t é i n t e r m i n i s t é r i e l p e r m a n e n t d e P S e s t c r é é p o u r c o n c e v o i r e t s u i v r e l a s t r a t é g i e d e P S , y c o m p r i s l e s f i l e t s s o c i a u x · U n s o u s - c o m i t é r e s p o n s a b l e d u s y s t è m e d ’ a s s u r a n c e s s o c i a l e s e s t c r é é p o u r s u i v r e l e s r é f o r m e s d e s a s s u r a n c e s s o c i a l e s e t d u s y s t è m e d e p e n s i o n s · U n s o u s - c o m i t é r e s p o n s a b l e d e s f i l e t s s o c i a u x e s t c r é é p o u r d é f i n i r l e t y p e , l e r ô l e e t l ’ i n s t r u m e n t p o u r r é p o n d r e a u x b e s o i n s d e s p e r s o n n e s p a u v r e s e t v u l n é r a b l e s · L e s s t r u c t u r e s c h a r g é e s d e l a P S e t d e s f i l e t s s o c i a u x s o n t o p é r a t i o n n e l l e s · D i f f u s i o n d e l a s t r a t é g i e n a t i o n a l e d e P S , y c o m p r i s l e s f i l e t s s o c i a u x · L a D G E P d i r i g e l e c o m i t é i n t e r m i n i s t é r i e l c o m p r e n a n t d e s r e p r é s e n t a n t s d e s m i n i s t è r e s s e c t o r i e l s , d e s c o l l e c t i v i t é s d é c e n t r a l i s é e s , d e l a s o c i é t é c i v i l e e t d e s p a r t e n a i r e s t e c h n i q u e s e t f i n a n c i e r s ( P T F ) · A d o p t i o n d e l a s t r a t é g i e n a t i o n a l e d e f i l e t s s o c i a u x ( 2 0 1 1 ) · A d o p t i o n d e l a s t r a t é g i e n a t i o n a l e d e P S ( 2 0 1 2 ) · R a p p o r t s a n n u e l s s u r l e s r é s u l t a t s d e l a P S , y c o m p r i s l e s f i l e t s s o c i a u x L e c a d r e i n s t i t u t i o n n e l d e l a P S e t d e s f i l e t s s o c i a u x e s t r e n f o r c é · C l a r i f i c a t i o n d e s r ô l e s e t r e s p o n s a b i l i t é s d e s d i f f é r e n t e s i n s t i t u t i o n s n a t i o n a l e s i m p l i q u é e s d a n s l e s f i l e t s s o c i a u x d é f i n i t i o n d e s r ô l e s e t d e s d i s p o s i t i o n s d e m i s e e n œ u v r e a d é q u a t e s e t · S o u t i e n a u r e n f o r c e m e n t d e s c a p a c i t é s . · A s s u r e r l a c o o r d i n a t i o n e n t r e l ’ É t a t e t l e s P T F · D G E P c o m i t é i n t e r m i n i s t é r i e l p o u r l a P S e t l e s f i l e t s s o c i a u x · A m é l i o r a t i o n d e s c a p a c i t é s i n s t i t u t i o n n e l l e s U n c a d r e f i n a n c i e r v i a b l e e s t c r é é p o u r l e f i n a n c e m e n t d e s p r o g r a m m e s d e P S , y c o m p r i s l e s f i l e t s s o c i a u x · M i s e e n p l a c e d ’ u n s u i v i r i g o u r e u x d e s d é p e n s e s d a n s l a P S e t l e s f i l e t s s o c i a u x p u b l i c s · D é t e r m i n a t i o n d e l ’ e n v e l o p p e b u d g é t a i r e n é c e s s a i r e à u n s y s t è m e c o m p l e t d e f i l e t s s o c i a u x · I d e n t i f i c a t i o n d e s s o u r c e s d e f i n a n c e m e n t v i a b l e s ( b u d g e t , p a r t e n a i r e s a u d é v e l o p p e m e n t , c o l l e c t i v i t é s l o c a l e s , O N G e t s e c t e u r p r i v é ) · B u d g é t i s a t i o n d ’ u n p r o g r a m m e p l u r i a n n u e l d e f i l e t s s o c i a u x · M E F / D G E P e t m i n i s t è r e s s e c t o r i e l s , P T F · S y s t è m e d e p r o d u c t i o n d e r a p p o r t s u r l e s d é p e n s e s d a n s l e s f i l e t s s o c i a u x ( b u d g e t e t f i n a n c e m e n t e x t é r i e u r c o m p r i s ) U n s y s t è m e r o b u s t e d e s u i v i - é v a l u a t i o n e s t e n p l a c e p o u r i n f o r m e r l a p r i s e d e d é c i s i o n s p o l i t i q u e s · I n v e s t i r d a n s l e s u i v i e t é v a l u a t i o n d e s p r o g r a m m e s p o u r é v a l u e r l a r e n t a b i l i t é d e s f i l e t s s o c i a u x . · D é f i n i r d e s e x i g e n c e s m i n i m a l e s p o u r l a p r o d u c t i o n d e r a p p o r t s s u r l e s f i l e t s s o c i a u x · E n t a m e r l a m i s e e n œ u v r e d u s u i v i s y s t é m a t i q u e d e s f i l e t s s o c i a u x · I m p l i q u e r l a s o c i é t é c i v i l e d a n s l e s u i v i e t l ’ é v a l u a t i o n · T r a n s m e t t r e d e s r a p p o r t s a n n u e l s d ’ é v a l u a t i o n d e s p r o g r a m m e s a u x m i n i s t è r e s s e c t o r i e l s r e s p o n s a b l e s d e l a P S e t d e s f i l e t s s o c i a u x · R e n f o r c e r l e s c a p a c i t é s d e s u i v i e t é v a l u a t i o n d e s m i n i s t è r e s s e c t o r i e l s ( f o r m a t i o n , é c h a n g e s d ’ e x p é r i e n c e e n t r e l e s p r o g r a m m e s ) · M E F / m i n i s t è r e s s e c t o r i e l s e t o r g a n i s m e s , P T F · R a p p o r t a n n u e l s u r l e s u i v i d e c h a q u e p r o g r a m m e d e f i l e t s s o c i a u x · É v a l u a t i o n d e l ’ i m p a c t d e s p r o g r a m m e s l e s p l u s i m p o r t a n t s O b j e c t i f p o l i t i q u e 2 : S o u t e n i r l a C o n s o m m a t i o n d e s P e r s o n n e s P a u v r e s e t V u l n é r a b l e s e t E t e n d r e L e u r A c c è s a u x S e r v i c e s S o c i a u x d e B a s e à t r a v e r s u n S y s t è m e E f f i c a c e d e Page 21 i A c t i o n s e t c a l e n d r i e r R e c o m m a n d a t i o n s d e p o l i t i q u e s 2 0 1 0 - 2 0 1 1 2 0 1 2 - 2 0 1 4 A c t e u r s I n d i c a t e u r s d e s u i v i F i l e t s S o c i a u x L ’ e f f i c a c i t é d e s f i l e t s s o c i a u x a c t u e l s e s t r e n f o r c é e e t l a p o r t é e d e s p r o g r a m m e s e f f i c a c e s e s t a u g m e n t é e · D é f i n i r d e s g r o u p e s p r i o r i t a i r e s d e b é n é f i c i a i r e s d e s f i l e t s s o c i a u x s u r l a b a s e d e s r é s u l t a t s d e l ’ e n q u ê t e d e 2 0 1 0 s u r l e b u d g e t d e s m é n a g e s · D é f i n i r d e s i n s t r u m e n t s p r i o r i t a i r e s p o u r r é p o n d r e a u x b e s o i n s d e s g r o u p e s p r i o r i t a i r e s · M e t t r e a u p o i n t u n s y s t è m e d e c i b l a g e p o u r l e s p o p u l a t i o n s e n é t a t d e p a u v r e t é c h r o n i q u e ( i n s é c u r i t é a l i m e n t a i r e ) · P r é p a r e r u n e a n a l y s e d e f a i s a b i l i t é p o u r l ’ e x t e n s i o n d e s t r a n s f e r t s m o n é t a i r e s , s u r l a b a s e d ’ e x p é r i e n c e s r é c e n t e s ( t r a n s f e r t s m o n é t a i r e s e t c o u p o n s d ’ a l i m e n t a t i o n ) · P r é p a r e r u n e a n a l y s e d e f a i s a b i l i t é p o u r l ’ i n t r o d u c t i o n d e t r a v a u x p u b l i c s c i b l a n t l e s p a u v r e s e t f o n d é s s u r l e s e x p é r i e n c e s e n c o u r s · E x a m i n e r l a r e n t a b i l i t é d e s v e n t e s d ’ a l i m e n t s à d e s p r i x s u b v e n t i o n n é s e t d e s d i s t r i b u t i o n s d e v i v r e s c i b l é e s · E x a m i n e r l e s m é c a n i s m e s d e r e n f o r c e m e n t e t d ’ e x t e n s i o n d e s p r o g r a m m e s d e n u t r i t i o n · M e t t r e a u p o i n t d e s o u t i l s d e c i b l a g e e f f i c a c e s p o u r r e d i r i g e r v e r s l e s p a u v r e s l e f l u x d e s r e s s o u r c e s · R e c h e r c h e r d e s m é c a n i s m e s d e c i b l a g e g é o g r a p h i q u e p o u r l e s c a n t i n e s s c o l a i r e s a f i n d ’ a s s u r e r q u e c e l l e s - c i a i e n t b i e n p o u r b é n é f i c i a i r e s l e s e n f a n t s p a u v r e s · E x a m i n e r l a f a i s a b i l i t é d e s e x e m p t i o n s d e s f r a i s d e s a n t é e t d e l ’ a b o l i t i o n d u p a i e m e n t p a r l ’ u s a g e r p o u r l e s p a u v r e s d a n s l e c o n t e x t e d e s r é f o r m e s d u f i n a n c e m e n t d e s s e r v i c e s d e s a n t é · T e s t e r l e s p r o g r a m m e s p i l o t e ( t r a n s f e r t s e n e s p è c e s e t t r a v a u x p u b l i c s ) e t e n a s s u r e r l e s u i v i - é v a l u a t i o n · S o u s - c o m i t é r e s p o n s a b l e d e s f i l e t s s o c i a u x ( p r é p a r e r l e s T O R p o u r l ’ é v a l u a t i o n d e s p r o g r a m m e s ) · M i n i s t è r e s t e c h n i q u e s m e t t a n t e n œ u v r e l e s p r o g r a m m e s · P T F · R a p p o r t s d ’ é v a l u a t i o n e x - a n t e · C r i t è r e s d e c i b l a g e · I n d i c a t e u r s p o u r l e s u i v i · R a p p o r t d ’ é v a l u a t i o n d e s r é s u l t a t s d e s p r o g r a m m e s p i l o t e s Page 22 1 CHAPITRE I : INTRODUCTION 1. Ce chapitre présente le contexte, les raisons et les objectifs de l’étude, clarifie la définition de « filet social » utilisée dans le cadre de la présente analyse, et expose la méthodologie et l’organisation du rapport. B. Justification et objectifs 2. Le Burkina Faso souffre d’extrême pauvreté et de conditions de vie difficiles . Le pays est enclavé et pauvre, avec des ressources naturelles réduites et une population à croissance rapide de 15,8 millions d’habitants (mi-2009) 1 . Malgré des réformes structurelles et des politiques macroéconomiques saines, l’économie reste très vulnérable aux chocs (climatiques et exogènes, y compris les termes de l’échange du coton ainsi que la hausse des prix alimentaires et pétroliers). L’économie est essentiellement agricole: les revenus de plus de 80 % de la population active proviennent de l’agriculture et le secteur représente plus de 40 % du produit intérieur brut (PIB). Le pays est classé parmi les derniers au monde (177 e sur 182 pays en 2009) selon l’indice de développement humain (IDH) du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). En 2008, le revenu par habitant était de 480 dollars EU (méthode Atlas) et près de 40 % de la population vivaient en dessous du seuil de pauvreté. Comme dans d’autres pays, la pauvreté est surtout répandue dans les zones rurales qui abritent plus de 90 % des pauvres. 3. Malgr é les efforts de l’État pour améliorer le niveau de vie général, l’inégalité d’accès aux services sociaux, le taux de croissance démographique élevé de 3,1 %, l’extrême pauvreté et la forte vulnérabilité à une grande variété de crises continuent d’affliger la population burkinabé. La croissance démographique rapide a compromis l’investissement dans le capital humain et a d’énormes conséquences pour l’économie et la sécurité alimentaire. Il ressort de la Stratégie d’aide-pays (CAS), que le Burkina Faso est peu susceptible d’atteindre plusieurs des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) d’ici 2015, tels que la réduction de moitié de la proportion de personnes vivant avec un revenu inférieur à 1,25 dollars EU par jour, l’enseignement primaire pour tous les enfants et l’élimination des inégalités filles-garçons dans l’enseignement primaire et secondaire. En ce qui concerne l’éducation, le taux d’alphabétisation des adultes n’était que de 28,7 % en 2007, et la qualité de l’enseignement est restée faible. Les résultats en matière de santé pour les enfants et les femmes n’ont enregistré aucune amélioration seules 41 % des naissances ont été suivies par un personnel médical qualifié et le taux de mortalité maternelle était très élevé, avec 700 décès pour 100 000 naissances, tandis que la mortalité infantile était de l’ordre de 100 pour 1 000 naissances entre 2000 et 2008. Des progrès ont cependant été réalisés dans d’autres domaines, notamment ceux liés à la prévalence du VIH et à la durabilité de l’environnement. Étant donné la détérioration des conditions économiques, la disponibilité des ressources publiques pour les services de base et les progrès en direction des OMD peuvent relever du défi. Comme la plupart des autres pays d’Afrique subsaharienne, le Burkina Faso est confronté à de fortes variations saisonnières de la pluviométrie ainsi qu’aux prix (termes de l’échange) et chocs sur la production associés qui affectent durement la consommation des pauvres (leur bien-être). Au Burkina, les pauvres sont également plus exposés aux chocs sanitaires. Les deux chocs covariants induits par la fluctuation des conditions météorologiques et de l’environnement macro et extérieur, ainsi que les risques idiosyncrasiques liés notamment à la santé rendent la plupart des personnes pauvres et quasi-pauvres vulnérables aux graves déficits de consommation. 1 Source Bureau de référence de la population, 2009, feuille de données Population. Page 23 2 4. Dans ce contexte, les programmes de filets sociaux de sécurité (FSS) sont particulièrement importants . Le degré de vulnérabilité de la population a augmenté la demande de mesures de protection sociale. Une étude précédente de la Banque mondiale a passé en revue les programmes existants de gestion des risques et de filets sociaux financés par des fonds publics au Burkina Faso [Banque mondiale, 2004]. Ce travail d’analyse a essentiellement porté sur les programmes de santé, d’éducation, de sécurité alimentaire, de marché du travail, et d’assistance sociale en faveur des femmes et des enfants. Les principaux constats sont les suivants i) les programmes sont gérés par plusieurs ministères (par exemple santé, éducation, affaires sociales, agriculture, femmes et enfants, etc.) ii) les programmes sont soit universels ou spécifiques à certains groupes vulnérables (les femmes, les enfants, les personnes handicapées, les rapatriés, etc.), et sont fortement tributaires de financements extérieurs iii) la plupart des programmes ont une couverture limitée, surtout à cause de l’inadéquation du financement, de l’absence de structures institutionnelles pour la mise en œuvre des programmes, et du manque de coordination entre les différents ministères et iv) une évaluation plus approfondie des programmes existants s’impose pour mieux comprendre le rôle des programmes de filets sociaux existants et, surtout, pour analyser le fonctionnement de certains programmes. 5. Le Gouvernement a demandé l’appui technique de la Banque mondiale afin d’améliorer l’efficacité des programmes de filets sociaux en faveur des populations les plus vulnérables. Dans ce con texte, le présent rapport vise à i) établir un inventaire détaillé et actualisé du système actuel de filets sociaux– en analysant leurs coûts, les mécanismes de financement, la couverture et l’efficacité chaque fois que les données sont disponibles ii) identifier les insuffisances de l’actuel système de filets sociaux et iii) faire des suggestions sur la base de l’expérience internationale, pour améliorer la couverture, l’efficacité, la pertinence et la viabilité financière du système de filets sociaux et de programmes sélectionnés, y compris des améliorations dans leur suivi et évaluation. 6. Cette étude fait partie de l’assistance technique fournie au Burkina Faso, à la fois par la Banque mondiale et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF). Ses conclusions viendront directement soutenir la révision du Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP) qui sera remplacée en 2010 par la Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD) réalisé sous la supervision du ministère des Finances, ainsi que les efforts consentis d’une part par le ministère de l’Action sociale et de la Solidarité nationale (MASSN) pour élaborer une stratégie de protection sociale, et d’autre part, par le ministère de la Jeunesse et de l’Emploi (MJE) pour examiner l’utilisation des programme de travaux publics à haute intensité de main d’œuvre (HIMO) au Burkina Faso. C. Définition des filets sociaux utilisée dans la présente étude 7. Il n’y a pas de consensus sur une définition universelle des filets sociaux, sur ce qu’ils concernent et sur la manière d’adapter les programmes de filets sociaux aux conditions locales 2 . Certains acteurs peuvent utiliser différents termes protection sociale, sécurité sociale, assistance sociale, filets sociaux et transferts sociaux de manière interchangeable. 8. Dans le présent rapport, le terme filets sociaux fait référence aux programmes de transfert non contributifs ciblant, d’une manière ou d’une autre, les pauvres ou les personnes vulnérables [Grosh et coll. 2008]. Défini de cette manière, l’on pourrait penser que le terme « filets sociaux » est analogue à l’expression burkinabé « action sociale ». 2 L’Annexe 1 précise les principaux concepts de politique sociale utilisés dans ce rapport pour assurer une compréhension commune de la terminologie et des idées clés. Page 24 3 Cependant, en pratique, ce concept burkinabé semble couvrir un plus large éventail d’activités, y compris la prestation de services sociaux (par exemple, l’appui aux associations de personnes handicapées, l’accès à la justice, etc.) et les activités génératrices de revenus. 9. Les filets sociaux, tels que définis dans le présent rapport, visent à accroître et à stabiliser la consommation tout en soutenant l’utilisation des services sociaux de base –directement ou indirectement par la réduction du coût des denrées alimentaires, des autres produits de base et des services essentiels, et non par une augmentation des ressources elles-mêmes. Les activités génératrices de revenus et autres programmes de subsistance se trouvent donc exclus du champ de la présente étude. Ces programmes sont d’importants instruments de réduction de la pauvreté, mais peuvent ne pas assurer une augmentation directe de la consommation, et ne sont donc pas classés comme programmes de filets sociaux. 10. Les filets sociaux visent d’une manière ou d’une autre les pauvres et les personnes vulnérables , c’est-à-dire les individus vivant dans la pauvreté et incapables de satisfaire leurs propres besoins fondamentaux, ou risquant de tomber dans la pauvreté à cause de chocs exogènes ou de circonstances socioéconomiques, telles que l’âge, la maladie, le handicap ou la discrimination. Les filets sociaux peuvent s’adresser à un ou à une combinaison des groupes suivants [Grosh et coll. 2008] : ƒ Les pauvres chroniques , c’est-à-dire les personnes qui n’ont pas les atouts nécessaires pour gagner des revenus suffisants, même les bonnes années ; ƒ Les pauvres transitoires , c’est-à-dire les personnes qui gagnent suffisamment pendant les bonnes années, mais tombent dans la pauvreté, du moins temporairement, à la suite de chocs idiosyncratiques ou covariants allant d’une maladie au sein du ménage ou de la perte d’un emploi jusqu’à la sécheresse ou à une crise macroéconomique; ƒ Les groupes vulnérables , c’est-à-dire, de manière non limitative, les personnes handicapées, âgées ou déplacées, les orphelins, les réfugiés, les demandeurs d’asile et ƒ Les personnes affectées négativement par les réformes . 11. Les politiques et programmes visant à améliorer l’accès aux services de base pour l’ensemble de la population (exemple éducation primaire gratuite) ne sont donc pas concernés par le présent rapport . Il en est de m ême des programmes de transfert aux communautés et associations (exemple pour mettre en place des biens sociaux dans des communautés vulnérables) puisqu’ils ne visent pas directement les personnes ou ménages pauvres et vulnérables. Les programmes de subvention générale (exemple prix subventionnés) peuvent être considérés comme des filets sociaux s’ils visent à augmenter la consommation des ménages vulnérables (exemple les ménages affectés par la flambée des cours mondiaux des denrées alimentaires) en réduisant les prix des produits de base qu’ils consomment. 12. Les instruments utilisés pour accroître la consommation incluent les transferts directs, les subventions et les exemptions de frais . Les types de programmes de filets sociaux les plus communs peuvent être classés comme suit [Grosh et coll. 2008] : ƒ Les programmes de transferts non conditionnels en espèces ou en nature : a. Les transferts en espèces (exemples prestations pour les enfants, allocations familiales, pensions sociales) et en quasi espèces (exemples coupons alimentaires et bons pour des produits de base) ; b. Transferts alimentaires en nature (exemples cantines scolaires, rations à emporter) et autres transferts en nature (exemples fournitures scolaires) et Page 25 4 c. Subventions générales destinées à bénéficier aux ménages, souvent pour la nourriture, l’énergie, le logement ou les services publics. ƒ Programmes pourvoyeurs de revenus : a. Travaux publics dans lesquels les personnes pauvres/vulnérables travaillent en échange d’une rémunération en vivres ou en espèces ; ƒ Les programmes visant à protéger et améliorer le capital humain ainsi que l’accès aux services de base : a. Les transferts conditionnels (c’est-à-dire les transferts en espèces ou en nature destinés aux ménages pauvres/vulnérables sous réserve du respect de certaines conditions relatives à l’éducation et/ou à la santé) et b. Les exemptions de frais pour la santé et l’enseignement qui permettent d’accéder aux services publics essentiels (exemple exemption des frais de soins de santé, bourses scolaires, etc.), et que l’on désigne souvent comme des interventions portant sur la demande dans les secteurs de la santé et de l’enseignement. 13. Les systèmes de filets sociaux sont généralement constitués de plusieurs programmes se complétant, de préférence, les uns les autres et agissent en synergie avec d’autres politiques publiques ou sociales . Ils peuvent être des transferts prévisibles à long terme ou des transferts d’aide d’urgence à court terme. Un bon système de filet de sécurité est bien plus qu’une collection de programmes bien conçus et bien mis en œuvre. L’effet systémique de la protection sociale peut produire plus que la somme des différents programmes sociaux. 14. Les filets sociaux constituent un sous-ensemble de politiques et programmes plus larges de protection sociale, accompagné d’une assurance et d’une législation sociales, qui garantit des normes civiques minimales sauvegardant les intérêts des individus (exemple la législation du travail, et les normes de santé et de sécurité). La protection sociale est un droit humain fondamental qui s’attaque directement à la pauvreté et à l’insécurité alimentaire tout en contribuant à la croissance économique et au développement humain. 15. Les filets sociaux font partie d’une plus vaste stratégie de réduction de la pauvreté . Les filets sociaux œuvrent parallèlement à l’assurance sociale et interagissent avec elle la santé, l’éducation et les services financiers la fourniture des services publics et les routes et d’autres politiques de réduction de la pauvreté et de gestion des risques (Figure 1). La réduction de la pauvreté passe par un accès assuré des populations à la consommation et à la sécurité alimentaire, à la santé, à l’éducation, aux droits, à l’expression, à la sécurité, à la dignité et à un travail décent. Elle implique un processus politique, et exige des efforts pour autonomiser les pauvres en renforçant leur voix et en favorisant la redevabilité démocratique. Ces dernières années, les concepts de protection sociale et de filets sociaux sont progressivement devenus une composante clé des stratégies de réduction de la pauvreté et de sécurité alimentaire dans les pays en développement. Page 26 5 Figure 1 : Place des filets soc iaux au sein des politiques de développement élargies Source : Grosh et coll. 2008. 16. Au cœur des nombreux débats entourant les filets sociaux se pose la question de la prévisibilité et de la viabilité. Pour un nombre croissant d’acteurs du développement, les transferts sociaux doivent être prévisibles, c’est-à-dire payés ou distribués régulièrement ou d’une manière prévisible (par exemple, chaque fois que les conditions climatiques empêchent d’avoir de bonnes production agricoles), et non comme une réaction opportuniste à une crise. En tant qu’initiative préventive, ce type de transfert social permet aux bénéficiaires de se préparer et de se protéger efficacement contre les catastrophes imprévisibles. Si par le passé, les filets sociaux ont souvent été perçus comme de simples transferts d’aide sociale permettant aux pauvres d’atténuer les pires effets des chocs, il est de plus en plus question de distinguer les filets sociaux des projets sociaux individuels, par l’intégration de plusieurs activités dans un système de protection sociale prévisible, institutionnalisé et capable de répondre à la vulnérabilité aux risques, en s’appuyant sur une approche basée sur les droits. Les simples transferts d’aide d’urgence se sont avérés peu avantageux à long terme et présentent en plus un risque de création d’une dépendance. S’ils sont correctement mis en œuvre, les filets sociaux peuvent non seulement protéger, mais également promouvoir de manière significative les moyens de subsistance des populations pauvres. 17. Enfin, le principal domaine de l’action publique relevant du secteur public, le présent rapport se concentre sur les filets sociaux financés par les fonds publics ou par l’administration nationale ou locale ou par l’aide internationale officielle. Dans la plupart des pays en développement, il existe trois formes de base de transferts sociaux prévoyant i) des mécanismes formels fournis par les États et prescrits par la loi ii) un appui semi-formel fourni par les agences onusiennes ou les ONG et iii) des mécanismes informels fournis par Page 27 6 les ménages et les communautés. Le présent rapport ne couvre pas les filets sociaux informels. D. Méthodologie de l’étude 18. La présente étude a été réalisée à l’aide des analyses de la pauvreté existantes, des données administratives et de celles des enquêtes auprès des ménages, en étroite collaboration avec plusieurs ministères ainsi que des bailleurs de fonds engagés dans la protection sociale. Les principales sources de données utilisées dans le rapport sont les suivantes : · Questionnaires sur les indicateurs essentiels de bien-être . L’analyse des besoins a nécessité une analyse économétrique des données de 2003, 2005 et 2007 des questionnaires sur les indicateurs essentiels de bien-être (CWIQ), ainsi qu’un examen de l’évaluation des risques et de la vulnérabilité de 2003. Voir « Dynamique de la pauvreté et de la précarité au Burkina Faso (2003-2007) » réalisée par une équipe conjointe du ministère de l’Économie et des Finances du Burkina Faso et de la Banque mondiale (Nouvé et coll. 2009, non publié). Une nouvelle enquête auprès des ménages pour 2009-2010, avec des informations approfondies sur la consommation des ménages, est actuellement en cours sur le terrain (sur plus de 12 mois avec quatre visites aux ménages). Les résultats complets de cette enquête, attendus en 2011, fourniront des estimations plus précises de la pauvreté. · Inventaires de différents programmes de filets sociaux existants (financés par l’État, des organisations internationales/bailleurs de fonds bilatéraux et des ONG). · Des données administratives ainsi que les évaluations des programmes existants ont servi à l’évaluation de la portée et de l’efficacité desdits programmes ainsi que de leur pertinence par rapport aux principaux risques auxquels sont confrontés les ménages vulnérables. · L’inventaire détaillé des programmes de filets sociaux , préparé par le professeur Kimseyinga Savadogo (consultant national), a constitué la principale source d’information pour cette étude. E. Structure du rapport 19. Le reste du rapport est organisé comme suit le Chapitre II expose la nature et l’ampleur du problème, en décrivant ce qui est connu de la pauvreté et de la vulnérabilité au Burkina Faso. Le Chapitre III donne un aperçu des politiques, des cadres institutionnels et du dispositif financier des filets sociaux. Le Chapitre IV passe en revue les performances des différents programmes de filets sociaux existants en prenant en particulier en compte leur adéquation, équité, rentabilité et viabilité. Enfin, le Chapitre V formule des recommandations politiques clés pour améliorer l’efficacité des filets sociaux existants afin de protéger les personnes pauvres et vulnérables tout en préparant une réponse aux crises à venir. Page 28 7 CHAPITRE II : PAUVRETÉ, VULNÉRABILITÉ ET RISQUES AU BURKINA FASO Suite à la croissance économique soutenue enregistrée au cours de la dernière décennie, on estime que l’incidence de la pauvreté monétaire au Burkina Faso a baissé de 46,4 % en 2003 à 43,2 % en 2009. En termes de biens, les études du QUIBB ont déterminé que la pauvreté a baissé de 46,3 % en 2003 à 38,5 % en 2007. Il y a cependant des raisons de croire que le récent ralentissement de la croissance économique et la hausse des prix des carburants et des aliments ont amené une chute du revenu réel et inversé la tendance positive de la réduction de la pauvreté. Même si les différentes études fournissent des estimations différentes de la pauvreté, c’est un fait confirmé que la pauvreté a diminué au long de la dernière décennie. Les prochaines enquêtes 2008 et 2009-2010 sur la consommation des ménages devraient fournir des informations plus précises sur les tendances de la pauvreté. Sur la base des données disponibles, la vulnérabilité aux risques d’un ménage burkinabé dépend de facteurs tels que l’état de santé et la situation nutritionnelle de ses membres, le genre, les biens physiques comme le logement, les infrastructures, le lieu de résidence, ainsi que le niveau d'éducation, l'accès à l'information et les pratiques culturelles et comportementales. Les pauvres sont plus vulnérables que les autres groupes de la population parce qu’ils sont généralement plus exposés au risque, sont confrontés à plusieurs risques en même temps, et ont moins de biens et de ressources pour faire face aux risques de perte de revenu. Sur la base des enquêtes QUIBB, on estime que la pauvreté chronique est tombée de 25,4 % en 2003 à 18,8 % en 2007, après avoir plafonné à 31,1 % en 2005 suite à la crise climatique de 2004. Par ailleurs, en périodes de chocs, on estime que 20 % de plus de la population devient temporairement pauvre. Selon l’enquête 2003 sur les priorités, un ménage burkinabé pauvre typique se compose de sept membres ou plus, a à sa tête un homme polygame, illettré ou avec un niveau d’études primaires inférieures, qui est agriculteur dans une zone rurale de la région Nord-est. Certaines données indiquent que les veuves et les femmes qui l’ont été peuvent se trouver dans une situation sensiblement pire et être plus vulnérables au risque de perte de revenu que beaucoup des autres femmes du Mali rural. Ce sont des faits dont les politiques de filets sociaux devraient tenir compte. Étant donné la haute incidence de la pauvreté, le pourcentage de la population qui devrait bénéficier des filets sociaux est important (plus de 40 % de la population totale). Sur la base des données sur la pauvreté qui sont disponibles, le coût financier des transferts publics nécessaires pour combler l’écart de pauvreté pourrait aller de 2,3 à 2,6 % du PIB. Cependant, en raison des contraintes budgétaires, une stratégie sensée de filets sociaux devrait avoir pour but de réduire les formes les plus extrêmes d’indigence et d’insécurité alimentaire et d’aider les plus pauvres et les plus vulnérables à maintenir la consommation en période de chocs. De plus, les dépenses publiques en faveur des pauvres à travers des filets sociaux bien ciblés pourraient apporter des ressources permettant aux pauvres d’investir le nécessaire dans le développement du capital humain. 20. Une bonne compréhension des groupes de population qui ont besoin de programmes de filets sociaux de manière permanente est essentielle pour éclairer les décideurs politiques lors de la définition d’une combinaison adéquate de politiques de filets sociaux. C’est pourquoi dans ce chapitre nous ferons le point de la situation de la pauvreté et de la vulnérabilité dans le pays, sur la base des rapports existants et des données disponibles. La section A examine le contexte macroéconomique national les sections B et C se concentrent sur le niveau de pauvreté, l’accès aux services de base, l’évolution de la pauvreté à travers le temps et les principales sources de risques et de vulnérabilité. Enfin, Page 29 8 la section D fait une évaluation rapide des aspects financiers de l’allègement de la pauvreté. F. Contexte national et point de vue macroéconomique 21. Le Burkina Faso est un petit pays enclavé de l’Afrique de l’Ouest, à prédominance rurale. Sa population de 15,8 millions d’habitants (2009), en rapide expansion, dépend de ressources naturelles très limitées, où le coton est le seul produit d’exportation important. 3 Le secteur agricole emploie plus de 80 % de la population, et représente 40 % du PIB national. La filière coton est et restera un élément vital de l’économie du Burkina à court et moyen terme. Il génère 700 000 emplois, fait travailler 17 % de la population et constitue la seule source de revenus en espèces pour beaucoup d’agriculteurs. Or, l’économie agraire est particulièrement vulnérable aux chocs climatiques et extérieurs. Le fragile environnement sahélien du Burkina connaît aussi bien la sécheresse que des inondations. En plus des conditions climatiques, des facteurs extérieurs, comme les cours internationaux du coton et la fluctuation de ceux des carburants et des aliments ont également un impact sur le pays. En tant que pays enclavé, entouré de six voisins, le Burkina Faso est hautement dépendant de ses bonnes relations avec ceux-ci et de leur stabilité pour le transit, le commerce sur les marchés extérieurs et la stabilité politique. 22. Depuis le début des années 90, le pays a bénéficié d’une relative stabilité politique et d’une plateforme progressiste de réformes économiques et politiques. Au cours des deux dernières décennies, le gouvernement du Burkina Faso s’est engagé dans un ambitieux agenda de réformes économiques et politiques, incluant le commerce, la libéralisation des prix et des tentatives de gouvernance décentralisée. Après la dévaluation de la monnaie en 1994 et au fil de l’exécution de l’agenda des réformes, un accroissement moyen du PIB réel stable de 5,6 % a pu être atteint de 1994 à 2004. Entre 1998 et 2006, le Burkina Faso a bénéficié d’un taux moyen de croissance économique élevé, d’environ 6 % par an. Entre les années 80 et 2008, le revenu par habitant est passé de 270 à 480 dollars EU. La plupart de ces résultats sont le fruit des gains d’efficacité réalisés grâce à la mise en œuvre de réformes structurelles, dont la dévaluation du franc CFA en 1994. L’important flux de l’aide extérieure, estimé entre 8 et 9 % du PIB depuis 1996, a lui aussi largement contribué à cette réussite. En fait, le Burkina Faso est devenu l’un des premiers pays éligibles à l’initiative pour les pays pauvres très endettés. 23. Cependant, depuis 2007, l'instabilité des pluies, la fluctuation des cours des produits de base, la hausse des prix des carburants et du riz et la récente crise financière mondiale ont provoqué une chute du taux de croissance. La baisse des cours du coton en 2004-2006 (une chute de plus de 40 % du cours de référence mondial pendant cette période), la dépréciation du dollar EU par rapport à l'euro, la diminution de 44 % de la production de coton en 2007-2008, et l’augmentation des prix alimentaires et pétroliers des deux dernières années ont tous eu un effet sur la croissance du Burkina. La crise financière mondiale affecte négativement la croissance du Burkina et les performances budgétaires. Bien que le pays ait fait preuve de résilience face à l’impact de la crise financière grâce aux liaisons transfrontalières limitées de son système bancaire, les perspectives économiques ont empiré à mesure que les effets néfastes pour l’activité réelle pénètrent l’économie. Les principaux mécanismes de transmission sont la chute spectaculaire des prix d’exportation du coton et la diminution de la demande, même s’ils sont en partie compensés par la baisse du pétrole et la hausse de l'or. L’affaiblissement de 3 En 2008, la population totale était de 14,7 millions. Avec une croissance démographique de 3,1 % par an, on estime que la population atteignait un total de 15,8 millions in 2009. Page 30 9 la croissance mondiale et la baisse des prix nationaux du coton ont sensiblement affecté la rentabilité des usines d’égrenage, fait pression sur les finances de l'État et créé un risque qui a entraîné une brusque baisse de la production des petits planteurs de coton menant potentiellement à une aggravation significative de la pauvreté. On s’attend aussi à ce que le durcissement des conditions du crédit freine les investissements étrangers directs, notamment dans le secteur minier. De plus, l’aide publique pourrait diminuer car les bailleurs de fond affrontent des crises financières dans leurs propres pays. 24. En conséquence, la croissance du PIB pour 2009 a été revue à la baisse, passant de 6,2 % avant la crise à une estimation de 3,1 %. Il en va de même pour les prévisions de croissance pour 2010, qui passent de 6,0 % à 4,2 %. La croissance devrait principalement provenir du secteur agricole, étant donné que les mesures introduites en 2008 pour répondre à la crise alimentaire commencent à faire leur effet, et du secteur minier (bien que dans une moindre mesure) car les cours de l’or ont généralement résisté au fléchissement des marchés des matières premières, tandis que plus de mines passent à l’étape d’exploitation On ne s’attend pas à un rétablissement de la croissance avant 2012. Sur la base du rapport du personnel du FMI (janvier 2010), dans le budget supplémentaire de 2009, le déficit général (basé sur les engagements, y compris de dons) est estimé à 6,7 % du PIB. Avec le remboursement accéléré des arriérés de paiement nationaux, le déficit global en espèces (dons compris) devrait s’élargir à 7,3 % du PIB. Malgré l’impact du ralentissement de l’économie mondiale sur l’activité économique, le revenu est estimé à 13,2 % du PIB, grâce aux mesures administratives adoptées par les autorités pour renforcer les contrôles et améliorer l’efficacité des organismes de perception des impôts. La dépense totale est estimée à 27 % du PIB en 2009, contre 21,7 % en 2008. Ce sensible accroissement est dû au coût des mesures de lutte contre les chocs et au retour à la tendance dans l'investissement financé extérieurement. Celui-ci pourrait atteindre 7 % du PIB en 2009, en augmentation de plus de 3 points de pourcentage, étant donné que certains des projets retardés en 2008 devraient se terminer en 2009. Le bilan actuel ne devrait pas être significativement affecté pour le moment car la chute des exportations de coton est compensée par les cours élevés de l’or et par les bas prix du pétrole. L’inflation a elle aussi baissé de 2 % en 2009, à cause des récentes baisses des prix alimentaires et pétroliers. G. Questions liées à la pauvreté et au développement humain 25. La bonne croissance économique passée et de plus importants investissements dans les services sociaux ont amené une diminution de l’incidence de la pauvreté. Sur la base des données d’enquête disponibles et des prévisions pour les comptes nationaux, on estime que le pourcentage de la population vivant en-dessous du seuil de pauvreté est tombé de 46,4 % en 2003 à 43,2 % en 2009. Il y a cependant des raisons de croire que le récent ralentissement de la croissance économique et la hausse des prix pétroliers et alimentaires peut avoir amené une baisse du revenu réel et inversé la tendance positive de la réduction de la pauvreté. En 2009, la stratégie d’aide-pays (SAP) a estimé que le revenu réel moyen avait chuté de 1,1 % en 2007 et de 3 % en 2008, et que le pourcentage de la population vivant en-dessous du seuil de pauvreté était remonté à plus de 45 % en 2008. 4 La SAP soutient également que, même si l’impact immédiat de la crise du coton sur les producteurs est atténué par le « fonds de lissage », la tendance à la hausse de la pauvreté pourrait être exacerbée si l’impact de la crise financière mondiale, notamment sur le 4 Rapp orté dans la SAP 2009 et dans le CEM 2009. Cependant, aucune source n’est citée et il est très difficile de déterminer si cette hausse est vraiment due à la crise ou simplement à l’utilisation de méthodes différentes pour le calcul de l’incidence de la pauvreté. En faite, la question de la comparabilité des données a déjà été évoquée dans l’évaluation 2003 des risques et de la vulnérabilité au Burkina Faso (voir section sur les tendances de la pauvreté). Page 31 10 secteur cotonnier, se prolongeait à cause des liens étroits entre la production de coton, la génération du revenu rural et la production alimentaire au Burkina Faso. 26. De même, le Burkina a fait des progrès satisfaisants dans l'accès des ménages aux services de base. Les indicateurs montrent des améliorations au niveau de l’eau potable et de la santé. L’accès global à l’eau potable est passé de 54 % en 2004 à 79 % en 2007, avec des avancées plus modestes dans les zones rurales. Les services de santé sont en moyenne plus accessibles grâce à l’augmentation constante du pourcentage du budget général consacré à la santé publique (de 7,4 % en 2004 à 9,9 % en 2006). Les taux de vaccination sont restés élevés, d’où de sensibles améliorations dans la lutte contre les maladies contagieuses avec, en particulier, une baisse de la mortalité par méningite (de 21 % en 2005 à 8,5 % en 2006). La prévalence du VIH/SIDA reste basse, à 2,03 % en 2006. 27. Il reste cependant des défis importants, notamment lié au fait que le Burkina Faso est un des pays situés le plus bas au classement mondial de l'indice de développement humain (IDH) du PNUD (177 e sur 182 pays en 2009). L’IDH révèle que i) le taux d’alphabétisation est encore bas (28,7 % en 2007) et la qualité de l’enseignement est préoccupante ii) les écarts subsistent entre les genres dans les taux de scolarisation, d’alphabétisation, d’achèvement du cycle primaire (seulement 40 % dans l’ensemble), et d’accès au premier cycle du secondaire, même si ces taux sont en hausse et iii) le taux brut d’admission en première année primaire est de 82 %. En plus des enfants qui ne peuvent pas entrer à l’école primaire, plus d’un tiers de ceux qui la fréquentent ne peuvent pas poursuivre des études secondaires. 28. De plus, la rapide croissance démographique pourrait empêcher le Burkina Faso d’atteindre ses OMD. Malgré la baisse impressionnante des taux de mortalité, la fécondité est restée très haute avec une moyenne de 6,2 enfants par femme. À cause de son retard dans la transition de la fécondité, le Burkina Faso a connu une poussée démographique phénoménale. Ceci est mis en évidence par la densification de la population, notamment dans les zones cultivables. Depuis l’indépendance, la population urbaine a été multipliée par onze, tandis que la population rurale a triplé. Actuellement, le Burkina Faso doit faire face chaque année à 600 000 nouveaux-nés vivants, contre 200 000 en 1950. Enfin, l’accroissement rapide de la population a également toute une série de de conséquences pour l’économie dans les domaines de la productivité de la main d’œuvre, de l’épargne, de la croissance, du niveau de vie et de la réduction de la pauvreté. H. Tendances de la pauvreté, vulnérabilité et profil de la pauvreté 29. Suivre les tendances de la pauvreté au Burkina Faso est un défi, malgré un assez grand nombre d’enquêtes. Depuis 1994, quatre enquêtes sur les priorités (1994, 1998, 2003 et 2009/2010, dont les résultats ne sont disponibles que pour les trois premières) et plusieurs QUIBB (2003, 2005, et 2007) ont été entrepris par l’INSD. Des études qualitatives ont également été réalisées pour évaluer les risques auxquels les ménages sont confrontés et la vulnérabilité de ceux-ci. Malheureusement, ces diverses études utilisent des méthodologies différentes et ne sont pas directement comparables. Les constats tirés des enquêtes sur les priorités 1994, 1998, et 2003 de l’INSD montrent une hausse des principaux indicateurs de la pauvreté, surtout en zone urbaine, comnme l’indique le Tableau 1. Page 32 11 Tableau 1 : Indices de pauvreté selon le lieu de résidence Incidence Profondeur Sévérité Pourcentage 1994 1998 2003 1994 1998 2003 1994 1998 2003 1994 1998 2003 Urbain 10,4 16,5 19,9 2,5 4,0 5,5 0,9 1,5 2,2 3,8 6,1 7,8 Rural 51,0 51,0 52,3 16,1 15,7 17,9 7,0 6,8 8,2 96,2 93,9 92,2 National 44,5 45,3 46,4 13,9 13,7 15,5 6,0 5,9 7,0 100,0 100,0 100,0 Source : Institut national de la statistique et de la démographie (INSD), 2003 . 30. Pendant la période 1994-2003, le taux de croissance de la production a dépassé celui de la population de 3 points de pourcentage par an. Par conséquent, le PIB par habitant était de 14 % plus élevé en 1998 qu’en 1994, et de 13 % en 2003 qu’en 1998. L’inégalité est restée stable de 1994 à 1998 et a diminué de 1998 à 2003. De même, les tendances des indicateurs de bien-être non monétaire (éducation, santé et nutrition) ont montré une amélioration. La combinaison d’une croissance solide, d’une inégalité stable où en baisse, et de l’amélioration de plusieurs indicateurs de bien-être non monétaire devrait avoir eu un impact significatif sur la pauvreté. 31. Malgré diverses incohérences dans les données d’enquête, on peut sans risques conclure que la pauvreté a diminué au Burkina Faso au cours des 15 dernières années et que, malgré les chocs récents, l’incidence de la pauvreté semble rester actuellement aux alentours de 40 % de la population. L’évaluation 2004 des risques et de la vulnérabilité au Burkina Faso conclut que la pauvreté pourrait en fait avoir décru entre 1994 et 1998, compte tenu des incohérences dans les données résultants i) de modifications dans la période pour laquelle les personnes interrogées doit faire appel à leur mémoire, qui ont entraîné des changements substantiels et erronés dans la consommation déclarée, donc dans le degré de pauvreté et ii) du calendrier de réalisation de l’enquête, qui a eu un impact non négligeable sur les tendances de la pauvreté, en particulier dans l’environnement aride de l’Afrique de l’Ouest, à cause des grandes différences de consommation entre les périodes de pré-récolte (période de pénurie) et d’après-récolte. Des ajustements ont été réalisés pour corriger les incohérences identifiées dans l’étude de 2004 mentionnée ci- dessus. Les résultats ajustés indiquent que la pauvreté a baissé au Burkina Faso de 44,5 % en 1994 à une valeur sitée entre 33 et 36 % en 1998, ce qui est conforme aux tendances macroéconomiques et à la dynamique des principaux indicateurs de bien-être non monétaire. De même, d’autres ajustements effectués dans le cadre du modèle de simulation macroéconomique pour l’analyse de la pauvreté (MSAP) permettent de penser que la pauvreté pourrait avoir diminué de 46,4 % en 2003 à 39,2 % en 2007 (cité dans Nouvé et coll. 2009). D’après l’estimation de la pauvreté prévue fondée sur les comptes nationaux, l’incidence de la pauvreté a baissé au niveau national de 46,4 à 43,2 % au cours de la période 2003-2009 (Voir Tableau 2). Il est important de veiller à ce que les futures analyses de la pauvreté tiennent compte de la comparabilité entre les données des enquêtes. Une enquête complète auprès des ménages a été lancée en 2009/2010 et sera achevée à la fin 2010. Elle couvre une période de 12 mois sur la base de quatre visites aux ménages et est compartable à l’enquête 2003. Elle devrait fournir des informations fiables sur la pauvreté monétaire et sur les tendances. Les résultats de cette enquête sont attendus en 2011. Tableau 2 : Estimations de la tendance de la pauvreté monétaire sur la base des comptes nationaux 2003 2005 2007 2009 Nationale 46,4 45,4 43,6 43,2 Rurale 52,3 51,4 50,4 48,8 Page 33 12 Urbaine 19,9 20,9 19,2 20,6 Source : Les données pour 2003 sont fondées sur l’enquête sur les budgets des ménages, et les estimations pour 2005-2007-2009 sur les prévisions économiques de la DGEP . 32. Enfin, une nouvelle étude a tenté d’éclairer quelque peu les tendances de la pauvreté au Burkina Faso. 5 Elle met à profit une série d’enquêtes auprès des ménages appelées Questionnaire des indicateurs de base du bien-être (QUIBB), conçues pour suivre la mise en œuvre de la stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP), et le fait que les enquêtes 2003, 2005 et 2007 sur les priorités de l’INSD sont elles aussi fondées sur le modèle QUIBB. La principale différence réside dans le fait que les enquêtes sur les priorités contiennent des informations sur les revenus et les dépenses, tandis que le QUIBB se base sur les avoirs et les biens d’une part, et sur la perception qu’ont les ménages de leur niveau de bien-être d’autre part. L’enquête 2003 sur les priorités est également un QUIBB, ce qui a permis à cette étude d’utiliser la pauvreté monétaire en 2003 comme niveau de référence. Au stade actuel, il s’avère qu’il serait conceptuellement plus approprié d’utiliser la série des QUIBB pour suivre les tendances de la pauvreté (et sans doute aussi la vulnérabilité des ménages) et d’utiliser l’enquête 2003 sur les priorités (en attendant les résultats de celle de 2008) pour déterminer le profil de la pauvreté à un moment particulier. Tendances de la pauvreté 6 33. En termes d’avoirs, comme le montrent les enquêtes QUIBB, la pauvreté a diminué de 46,3 % en 2003 à 38,5 % en 2007 (Tableau 3). Ceci concorde avec le schéma de la croissance économique, les indicateurs de bien-être non monétaire et les tendances de l’inégalité. Une tendance similaire est observée dans les zones tant urbaines (entre 19,9 et 13,0 %) que rurales (entre 52,2 et 43,9 %) sur la même période. Des tendances à la baisse semblables ont pu être observées dans la plupart des régions administratives, avec toutefois des niveaux de départ différents, des ralentissements et, parfois, une inversion au milieu de la période (2005). En termes d’avoirs, les régions du Nord-est et du Sud-est ont la plus haute incidence de pauvreté (plus de 60 %) Ces régions n’ont pas seulement connu très peu d’amélioration entre les dates des enquêtes, mais leur situation a également empiré en 2005. Cette dégradation peut s’expliquer par les effets des basses précipitations et par les invasions de criquets de 2004 qui ont frappé l’agriculture, surtout dans les régions agro- écologiquement fragiles, ce qui a contribué à la hausse des prix alimentaires observée en 2005. Ce phénomène est visible dans les données décrivant la vulnérabilité alimentaire (Tableau 3). L’information recueillie auprès des ménages sur leur capacité à satisfaire leurs besoins alimentaires montre clairement une pointe en 2005, avant un retour à des niveaux inférieurs en 2007. Les effets varient selon la situation géographique et, dans une certaine mesure, selon le niveau initial des avoirs familiaux. Les ménages urbains ont vu leur vulnérabilité alimentaire augmenter de 5,6 % entre 2003 et 2005, alors que les ménages ruraux ont subi une hausse beaucoup plus marquée, allant jusqu’à 18,5 points de pourcentage sur la même période. Les régions Nord-est, Sud-ouest ainsi que celle des Cascades ont été les plus touchées par le choc de 2004-2005, et ne semblaient pas s’en être complètement rétablies en 2007 si on les compare avec d’autres régions. Même s’ils ont été touchés au même titre que les autres groupes, les ménages qui avaient les plus hauts 5 Dynamique de la pauvreté et de la précarité au Burkina Faso (2003- 2007) réalisé par une équipe conjointe du ministère de l’Économie et des Finances du Burkina Faso et de la Banque mondiale (2009 non publié). 6 Cette section s’appuie largement sur le travail d’analyse de Nouvé et coll. (2009) cité plus haut. Elle utilise une approche cohérente à travers trois enquêtes (2003, 2005 et 2007) pour déterminer les tendances non seulement au cours du temps mais aussi à travers les zones géographiques et les groupes socioéconomiques. Page 34 13 niveaux d’avoirs en 2003 ont pu mieux surmonter le choc de 2004-2005. Ceci est particulièrement vrai dans les centres urbains et dans quelques secteurs de la région Centrale. 34. L’étude 2009 (Nouvé et coll . ) a combiné les indicateurs d’avoirs et de vulnérabilité alimentaire au cours du temps, afin de définir une typologie régionale des ménages. Cette approche identifiait trois régions distinctes, reflétant le niveau de dépenses des ménages, leurs avoirs, leur vulnérabilité aux chocs alimentaires ainsi que leur résilience aux chocs pendant la période 2003-2007. La typologie régionale distingue i) la région Nord-est caractérisée par une consommation moyenne, des avoirs limités, une forte précarité et une situation de stagnation ii) la région centrale caractérisée par une faible consommation, des avoirs moyens, une précarité moyenne et une situation en progrès iii) les régions de la capitale et du Sud caractérisées par une consommation élevée, des avoirs importants, une précarité limitée et une situation en progrès (Tableau 3). Le message sous- jacent de cette approche est que la prise en compte des risques et de la résilience aux chocs est essentielle pour la formulation de politiques solides et pour le choix des interventions visant la pauvreté et la vulnérabilité. Page 35 14 Tableau 3 : Incidence de la pauvreté et vulnérabilité alimentaire par régions administratives Pauvreté monétaire Pauvreté basée sur les avoirs ou les biens Vulnérabilité alimentaire (Incapacité à satisfaire les besoins alimentaires) 2003 2003 2005 2007 2003 2005 2007 NATIONALE 46,4 46,3 40,4 38,5 49,1 65,4 38,2 Lieu de résidence Rural 52,3 52,2 45,5 43,9 50,7 69,2 39,4 Urbain 19,9 19,9 16,3 13,0 41,5 47,4 32,1 Régions du Nord-est Sahel 37,2 62,7 83,7 67,1 50,2 86,8 52,5 Centre-nord 34,0 64,0 55,4 50,5 45,0 90,6 42,4 Est 40,9 76,6 63,1 73,2 45,3 72,0 34,7 Région centrale Nord 68,6 43,8 37,7 23,6 70,9 72,1 23,7 Boucle du Mouhoun 60,5 51,3 42,5 35,8 46,4 52,5 29,0 Centre Ouest 41,3 44,7 40,2 39,4 61,3 64,9 45,8 Plateau central 58,6 37,5 27,1 36,4 71,3 64,9 38,3 Centre-sud 66,1 45,1 29,6 26,4 54,9 65,7 43,5 Centre-est 55,1 40,2 40,7 38,4 43,6 73,7 48,9 Sud-ouest 56,6 69,3 63,5 60,2 58,6 75,5 66,9 Capitale/Régions du Centre Sud 22,3 10,5 7,1 7,8 41,7 50,6 31,9 Hauts Bassins 34,8 28,7 21,8 17,0 27,0 44,0 22,7 Cascades 39,1 54,2 23,4 47,4 34,9 39,6 47,7 Source : Nouvé et coll., non publié 2009 fondé sur les QUIBB 2003, 2005, et 2007de l’INSD. Figure 2 : Typologie régionale du Burkina Faso Source : Nouvé et coll. non publié 2009 fondé sur les QUIBB 2003, 2005, et 2007 de l’INSD. Page 36 15 Risques, chocs et vulnérabilité 35. Au Burkina Faso, les ménages sont confrontés à plusieurs catégories de risques, tels que les risques naturels et alimentaires, les risques économiques et sociaux, l’instabilité régionale, la santé et autres risques individuels. Ces risques constituent un facteur majeur d’accentuation de la vulnérabilité des pauvres aux pénuries de consommation et à la montée saisonnière de l’incidence de la pauvreté. Risques naturels (sécurité alimentaire) 36. La situation géographique du Burkina est en soi une source de vulnérabilité. Située en Afrique subsaharienne, le Burkina est généralement sec et son sol est aride. Au nord, règne un climat de steppe semi-aride (sahélien), caractérisé par trois à cinq mois de pluies, souvent irrégulières. Vers le sud, le climat se fait de plus en plus tropical humide ou sec (soudanien), caractérisé par une plus grande variabilité des températures et des précipitations, avec un total de précipitations plus important. Comme dans la plupart des autres pays subsahariens, il y a une forte corrélation entre la production agricole et les niveaux des précipitations au Burkina. L'activité agricole du pays est associée à un niveau de risque élevé, à cause des fluctuations intra et inter annuelles du régime des pluies. Ces fluctuations ont des impacts immédiats sur la production agricole, donc sur le revenu et le niveau de bien-être des agriculteurs. De plus, le Burkina Faso dépend depuis toujours de manière prédominante de l’agriculture extensive pour satisfaire les besoins alimentaire de ses habitants. Risques économiques (modalités des chocs commerciaux) 37. L’agriculture représente plus d’un tiers du PIB du Burkina Faso. Jusqu’au récent boom minier, le coton et le bétail étaient les deux principaux biens d’exportation du Burkina. Le secteur cotonnier est le principal moyen de subsistance de quelque 3 millions de personnes, et représente environ 65 % des recettes d’exportation. Récemment, le marché mondial a connu un déclin des cours du coton. Ce choc sur les prix a été plus tard aggravé par un décalage du change entre les coûts de production et les prix à l’exportation. Le coton est vendu en dollars EU alors que les agriculteurs burkinabés sont payés en francs CFA. Comme la monnaie du Burkina est liée à l’euro, la récente appréciation de ce dernier par rapport au dollar a eu des implications directes pour les producteurs de coton, en abaissant leurs marges bénéficiaires. C’est pourquoi la capacité d’exportation limitée du pays le rend vulnérable à la volatilité des cours mondiaux des produits agricoles, et entraîne des fluctuations imprévisibles des revenus des ménages dans les zones rurales. Elle est également source de volatilité pour les recettes d’exportation du pays et pour les finances de l’État. Ces risques économiques peuvent entraîner une réduction des revenus, à cause soit du chômage, soit d’une diminution des activités génératrices de revenus dans l’agriculture, le petit commerce et la petite industrie. Risques géographiques (dépendance vis-à-vis de la stabilité régionale) 38. Le Burkina est un pays e nclavé, qui dépend de ses voisins pour l'entrée et la sortie des marchandises et, parfois, pour la migration des travailleurs. Cette dépendance géographique rend l’économie du pays vulnérable à toute instabilité politique dans la région. Par exemple, le conflit en Côte d’Ivoire a affecté l’économie du Burkina Faso de plusieurs manières i) interruption du commerce dû à la difficulté de transporter des marchandises de et vers le port d’Abidjan ii) déficit des recettes de l’État dû à la chute des recettes fiscales (douanières) iii) augmentation des dépenses pour la prise en charge des Burkinabés revenant au pays et iv) réduction des envois de fonds des travailleurs à l’étranger. Page 37 16 Risques de santé (coût et manque à gagner) 39. La pauvreté et la santé sont interdépendantes. La pauvreté compromet l’état de santé, et les problèmes de santé contribuent à la pauvreté monétaire. La médiocre situation sanitaire du pays se caractérise par des taux élevés de mortalité infantile et néonatale, de mortalité maternelle et de prévalence du VIH/SIDA. La malnutrition est aussi largement répandue. La malaria est la principale cause de morbidité et de mortalité infantiles au Burkina, les suivantes étant les maladies diarrhéiques et les infections respiratoires aiguës. Les épidémies récurrentes de rougeole et de méningite cérébrospinale sont aussi des préoccupations majeures au Burkina. Les risques de santé entraînent une perte de temps de travail, périodique ou permanente, qui réduit les revenus ainsi que la capacité à faire face à d’autres chocs. Risques sociaux 40. Les ménages du Burkina Faso sont confrontés à divers événements liée au cycle de vie, comme les enterrements et les mariages, ainsi qu’à d’autres risques comme l’invalidité ou les blessures. Cela exige souvent des dépenses supplémentaires et/ou des manques à gagner, au détriment des ressources disponibles pour les besoins essentiels. Les ménages qui sont exclus des ressources communes et des réseaux informels, ou qui n’y ont pas accès, sont confrontés à de graves difficultés. 41. Grâce aux QUIBB 2003, 2005 et 2007, Nouvé et coll. (non publié 2009) ont montré que, au fil du temps, la vulnérabilité varie entre les groupes en fonction du patrimoine, de la capacité à satisfaire leurs besoins alimentaires et du lieu de résidence des ménages. La gravité et la fréquence des chocs, ainsi que les facteurs qui les composent, peuvent avoir des impacts différents selon les groupes. L’étude a identifié quatre groupes de ménages sur la base de leur niveau de pauvreté en avoirs et de leur capacité à satisfaire leurs besoins alimentaires i) les ménages non pauvres et non vulnérables à la baisse de la consommation alimentaire ii) les ménages non pauvres, mais vulnérables à la baisse de la consommation alimentaire iii) les ménages pauvres mais non vulnérables à la baisse de la consommation alimentaire et iv) les ménages pauvres et vulnérables à la baisse de la consommation alimentaire. On peut utiliser cette typologie pour déterminer l’étendue de la pauvreté chronique. La catégorie définie comme « pauvre et vulnérable à la baisse de la consommation alimentaire » pendant la période 2003-2007 pouvait être considérée comme une variable de remplacement pour la pauvreté chronique. Dans ce contexte, les pauvres chroniques sont des personnes non seulement vulnérables à la baisse de la consommation alimentaire, mais aussi peu capables d’augmenter leurs revenus et donc vouées à rester pauvres dans un avenir proche. Leur pourcentage est tombé de 25,4 % en 2003 à 18,8 % en 2007, après une pointe à 31,1 % en 2005 après le choc climatique de 2004. Le pourcentage global des pauvres a évolué de 46,4 % en 2003 à 40,4 % en 2005 puis à 38,5 % en 2007. C’est donc la proportion entre les personnes pauvres chroniques et les personnes pauvres et vulnérables à la pauvreté qui change en cas de choc (Figure 3). Page 38 17 Figure 3 : Typologie des ménages au Burkina Faso (nationale) Evolution des différentes formes de pauvreté au Burkina Faso: Ensemble du pays, 2003-07 25.4 3 1.1 18.8 21.0 9.3 19.7 23.7 34.3 19.4 30.0 2 5.2 : 42.2 0 % 1 00% 2 003 2005 2007 A nnée P r o p o r t i o n d e s d i f f é r e n t e s f o r m e s d e p a u v r e t é ( % ) M énages à l'abri de la pauvreté et de la précarité Ménages plus aisés mais en précarité M énages pauvres et non en précarité M énages pauvres et en précarité Source : Nouvé et coll. inédit 2009 fondé sur les QUIBB 2003, 2005, et 2007 de l’INSD. 42. Le tableau est très différent si on compare les ménages ruraux et urbains. La pauvreté chronique en zone urbaine a diminué de presque la moitié (de 12,5 % en 2003 à 6,7 % en 2007), avec toutefois un palier en 2005. Cependant, la pauvreté chronique n’a pas diminué dans les mêmes proportions en zone rurale qu’en zone urbaine. Elle n’est passée que de 28,2 % à 21,4 %, avec une pointe à 35 % en 2005 après le choc de 2004 (Figure 4). Figure 4 : Typologie des ménages au Burkina Faso (zones rurales/urbaines) Evolution des différentes formes de pauvreté au Burkina Faso: M ilieu rural, 2003-07 28.2 35.0 21.4 24.0 10.4 22.5 22.5 34.2 18.1 25.3 20.4 38.1 0% 100% 2003 2005 2007 Année P r o p o r t i o n d e s d i f f é r e n t e s f o r m e s d e p a u v r e t é ( % ) Ménages à l'abri de la pauvreté et de la précarité Ménages plus aisés mais en précarité Ménages pauvres et non en précarité Ménages pauvres et en précarité Evolution des différentes formes de pauvreté au Burkina Faso: M ilieu urbain, 2003-07 12.5 12.3 6.7 7.4 4.1 6.3 29.0 35.1 25.4 51.1 48.6 61.6 0% 100% 2003 2005 2007 Année P r o p o r t i o n d e s d i f f é r e n t e s f o r m e s d e p a u v r e t é ( % ) Ménages à l'abri de la pauvreté et de la précarité Ménages plus aisés mais en précarité Ménages pauvres et non en précarité Ménages pauvres et en précarité Source : Nouvé et coll. non publié 2009 fondé sur les QUIBB 2003, 2005, et 2007de l’INSD. Profil de la pauvreté 43. Comme dit plus haut, l’enquête 2003 sur les priorités a été utilisée pour déterminer le profil de la pauvreté au Burkina Faso. L’enquête 2003 apporte la plus récente information disponible sur la consommation des ménages. L’enquête 2009-2010 auprès des ménages actuellement en cours comporte aussi des informations sur la consommation et les dépenses des ménages, mais ces données ne sont pas encore disponibles. Selon l’enquête 2003 sur les priorités, un ménage pauvre typique se compose de sept membres ou plus, a à sa tête un homme polygame, illettré ou avec un niveau d’études primaires inférieures, qui est agriculteur dans une zone rurale de la région Nord- est. 44. La pauvreté reste un phénomène à prédominance rurale le pourcentage des personnes pauvres vivant en milieu rural atteignait 92,2 %, alors que leur représentation dans la population totale est inférieure d’environ 10 points de pourcentage (81,8 %). De plus, l’incidence de la pauvreté en zone rurale est deux fois supérieure à celle des zones Page 39 18 urbaines (52,3 % contre 19,9 %). Dans les zones rurales l’écart de pauvreté est de 17,9 %, soit plus du triple de celui qu’on observe en milieu urbain (5,5 %) 45. Les val eurs régionales de la pauvreté montrent que la Région centrale est parmi les plus pauvres, avec un taux de pauvreté situé très au-dessus de la moyenne nationale. Cette région héberge plus de la moitié des pauvres du Burkina Faso (part de population), et affiche aussi l’écart de pauvreté le plus élevé. Les régions Nord-est et Sud viennent en deuxième position, avec des taux de pauvreté légèrement inférieurs à la moyenne nationale, et la région de la Capitale montre la plus basse incidence de la pauvreté (environ la moitié de la moyenne nationale) (Tableau 4). Tableau 4 : Pauvreté selon le lieu de résidence et la région administrative, 2003 Incidence de la pauvreté Pourcentage de la pauvreté Écart de pauvreté % % % NATIONALE 46,4 100 15,5 Zone 100 Rurale 52,3 92,2 17,9 Urbaine 19,9 7,8 5,5 Régions 100 Région du Nord-est Sahel 37,2 7,8 12,6 Centre-nord 34,0 11,4 8,2 Est 40,9 14,1 12,3 Région centrale Nord 68,6 8,1 24,7 Boucle du Mouhoun 60,5 13,5 21,3 Centre-ouest 41,3 8,4 14,1 Plateau central 58,6 4,9 20,3 Centre-sud 66,1 4,2 26,0 Centre-est 55,1 7,2 19,7 Sud-ouest 56,6 7,3 17,5 Capitale/Région Sud Centre 22,3 2,3 7,1 Hauts Bassins 34,8 6,7 10,6 Cascades 39,1 4,3 14,6 Source : Nouvé et coll. inédit 2009 fondé sur l’enquête QUIBB sur les priorités de l’INSD de 2003. 46. Les niveaux socioéconomiques et d’études du chef de famille sont des facteurs déterminants clé de la pauvreté. Les ménages dont le chef de famille est un homme ont tendance à être plus pauvres que ceux menés par des femmes, tant en termes d’incidence (46,9 % contre 36,5 %) que d’écart (15,8 % contre 12,7 %). Un peu plus de la moitié (55,1 %) des ménages polygames sont plus pauvres que les autres groupes déterminés par l’état matrimonial du chef de famille. Les ménages dont le chef de famille est illettré ou a un niveau d’études primaires inférieures montrent une incidence de la pauvreté remarquablement haute, de 51,0 et 41,1 % respectivement. Les chefs de famille salariés, que ce soit dans le secteur public, privé formel ou privé informel, montrent une incidence de la pauvreté considérablement inférieure à celle des travailleurs agricoles, particulièrement dans la culture du coton. Ceux qui exercent des activités indépendantes (entrepreneurs) s’en sortent mieux que ceux qui sont engagés dans l’agriculture, mais légèrement moins bien que les salariés (Tableau 4). Page 40 19 47. Le genre est également un facteur clé corrélé avec la pauvreté. Des études faites partout dans le monde montrent que les membres d’un même ménage n’ont pas toujours le même niveau de vie les revenus et les ressources ne sont pas nécessairement mis en commun, ni également répartis. Les principaux facteurs de différentiation au sein du ménage sont typiquement l'âge et le genre. Comme à beaucoup d’endroits de l’Afrique de l’Ouest sahélienne, il y a des raisons de croire que certains groupes de femmes peuvent être particulièrement pauvres et vulnérables. Dans une grande partie du Burkina Faso, elles sont dépendantes des hommes. Les femmes célibataires ont des droits limités. On les marie jeunes à un mari ayant en moyenne 9 ans de plus qu’elles. Le mariage leur apporte une protection et quelques droits comme l’utilisation de la terre. Ces droits sont cependant liés à leur état matrimonial et elles les perdent en cas de divorce ou de veuvage. Étant donné l’importante différence d’âge entre les conjoints, beaucoup de jeunes veuves se retrouvent avec peu de droits à la mort de leur mari. Presque toutes se remarient, souvent avec un parent de leur défunt mari, ce qui leur permet de conserver l'accès à certaines terres et un soutien pour elles et leurs enfants. Cette tradition du lévirat, où une veuve épouse un parent de son mari décédé, disparaît lentement en laissant les femmes sans autres opportunités d’assurer leur subsistance. 48. Malheureusement, les enquêtes sur la consommation des ménages ne recueillent pas de données individuelles détaillant la répartition des ressources, la consommation, le travail et l’utilisation du temps à l’intérieur des ménages. Le niveau de pauvreté ou de vulnérabilité des membres du ménage pris individuellement ne peut donc pas être calculé directement à partir de ces études. Une approche souvent utilisée consiste à comparer les ménages dont les chefs de famille sont des femmes ou des hommes, pour en inférer les conséquences du genre sur le bien-être. Cependant, comme dans beaucoup de pays, les ménages burkinabés dirigés par des femmes sont extrêmement hétérogènes. Même si, comme dit plus haut, l'incidence générale de la pauvreté est plus basse parmi les ménages dirigés par des femmes, une analyse utilisant l’enquête 2003 sur les priorités confirme que, après prise en compte de différentes caractéristiques influençant le niveau de vie, il y a peu de différence entre les ménages dirigés par des femmes ou par des hommes. Toutefois, les enquêtes démographiques et de santé (EDS) contiennent, elles, des informations sur les individus, y compris quelques indicateurs de bien-être au niveau individuel. Mais elles présentent certains inconvénients pour ce type d’analyse elles interrogent beaucoup plus de femmes que d’hommes, et ne recueillent des informations détaillées que sur les personnes âgées de 15 à 49 ans. Page 41 20 Figure 5 : Les femmes veuves ou qui l’ont été ont un indice de masse corporelle inférieur à celui des femmes ayant un autre état matrimonial Source : Van de Walle, 2010 . Figure 6 : En milieu rural, les enfants des veuves ou des femmes qui l’ont été ont moins de chances d'être scolarisés Source : Van de Walle, 2010 . 49. Une analyse de l’EDS 2003 du Burkina Faso révèle que les veuves et les femmes actuellement mariées mais précédemment veuves ou divorcées peuvent constituer des groupes particulièrement vulnérables dans ce pays. Malheureusement, l’EDS ne dit rien sur l’important groupe des veuves et autres femmes non mariées de plus de 49 ans. Elle fournit néanmoins quelques indicateurs individuels de bien-être pour les femmes de 15 à 49 ans, par état matrimonial. En tenant compte de l’âge, nous observons que dans le Burkina rural, les veuves et les femmes mariées plus d’une fois constituent un groupe particulièrement vulnérable par rapport à ceux des femmes mariées une seule fois ou actuellement divorcées. La Figure 5 montre qu’elles ont des indices de masse corporelle nettement inférieurs à ceux des autres femmes, de telles différences n’apparaissant Page 42 21 cependant pas dans les zones urbaines. Les données indiquent également que les enfants des femmes veuves ou qui l’ont été ont moins de chance d’être scolarisés que ceux des femmes ayant un autre état matrimonial (Figure 6). Tableau 5 : Pauvreté en fonction de quelques caractéristiques des chefs de famille, 2003 Incidence de la pauvreté Pourcentage de la pauvreté Écart de pauvreté % % % NATIONALE 46,4 100 15,5 Genre Masculin 46,9 92,2 15,8 Féminin 36,5 7,8 12,7 État civil Célibataire 20,8 1,0 12,7 Monogame 40,4 49,4 19,6 Polygame 55,1 44,9 9,5 Divorcé/e 28,7 0,5 13,1 Veuf/ve 39,9 3,9 5,6 En couple 19,4 0,3 - Niveau d’études Aucun 51,0 93,7 17,2 Primaire inférieur 41,1 2,8 13,0 Primaire supérieur 24,8 2,7 7,6 Secondaire inférieur 19,4 0,8 6,3 Secondaire supérieur 3,1 0,1 0,9 Universitaire 0,3 - - Situation de l’emploi Salarié/e public 4,7 0,2 1,2 Salarié/e privé formel 6,5 0,1 1,9 Salarié/e privé informel 18,3 1,0 4,5 Culture du coton 45,5 19,3 14,8 Exploitant/e agricole 55,6 71,7 19,0 Indépendant/e (« entrepreneurs ») 21,5 2,4 5,9 Travailleur bénévole 39,2 0,7 14,1 Inactif/ve 39,0 0,8 13,3 Sans emploi 33,0 3,7 12,2 Taille des ménages 1 2 membres 10,6 3,2 2,3 3 4 membres 24,5 14,1 6,6 5 6 membres 38,0 21,4 11,0 7 membres ou plus 55,5 61,3 19,6 Source : Nouvé et coll. non publié 2009 fondé sur l’enquête sur les priorités/QUIBB de l’INSD. I. Ampleur de la pauvreté et coût pour faire sérieusement la différence 50. Pour évaluer le coût financier de la réduction de la pauvreté à travers des transferts, la première question à se poser est ce que cela couterait, très globalement en chiffres annuels, pour combler l’écart entre les revenus des pauvres et le seuil de la Page 43 22 pauvreté. À titre indicatif, dans cette section, le coût nécessaire pour élever les revenus de tous les pauvres jusqu’au niveau du seuil de pauvreté est estimé à partir des données sur le profil de la pauvreté 2003 déjà évoquées dans ce chapitre et fondées sur le rapport d’évaluation de la pauvreté de la Banque mondiale (2005). Les chiffres ci-dessous résultent d’une série d’hypothèses très simples, et la marge d’erreur peut être importante. En particulier, les estimations supposent une progression depuis 2003 du seuil de pauvreté fondée sur un IPC moyen, et une croissance démographique de 3,1 % pendant cette période. La profondeur de la pauvreté est fondée sur la profondeur de la pauvreté nationale de 2003 (15,5) comme le montre le Tableau 5 ci-dessus et est supposée constante. Les estimations quantifient aussi le montant total des avantages nécessaires pour combler l’écart de pauvreté. Ces calculs négligent donc des facteurs tels que les coûts administratifs et les éventuelles pertes d’efficacité. Les coûts liés aux problèmes de ciblage sont également exclus. Il ne s’agit donc que d’une première approximation des coûts, avec des transferts en espèces supposés totalement efficaces. 51. Un minimum de 2,5 % et de 2,7 % du PIB auraient été nécessaires en 2007 et 2008 respectivement, pour amener tous les pauvres jusqu’au niveau du seuil de pauvreté à travers des transferts en espèces. Ces estimations sont basées sur les seuils et écarts de pauvreté décrits au Tableau 6 . On estime aussi qu’il aurait fallu un minimum de 1,4 % et de 1,7 % du PIB en 2007 et 2008 pour amener les pauvres chroniques (les plus pauvres et les plus vulnérables) jusqu’au seuil de pauvreté à l’aide de transferts en espèces (Tableau 6 ) . Ces estimations du niveau de pauvreté chronique en 2008 sont calculées en supposant un rapport constant de 49 % en 2007 et 2008 entre les pauvres chroniques et la pauvreté, et une hausse de l’incidence de la pauvreté de 45 % en 2008. Ainsi, le nombre des plus pauvres et des plus vulnérables augmenterait à 22,1 % de la population. Ces estimations sont probablement trop conservatrices étant donné que la profondeur de la pauvreté du groupe des plus pauvres et plus vulnérables a été alignée sur celle des zones rurales, où la pauvreté est plus aiguë (Tableau 6). Tableau 6 : Estimation des montants nécessaires pour amener tous les pauvres, et les plus pauvres et les plus vulnérables jusqu’au seuil de pauvreté par des transferts en espèces (2003, 2005 et 2007) 2003 2005 2007 2008 PIB (milliards de francs CFA, prix courants) (1) 2 513,8 2 862,8 3 239,4 3 647,9 Population (millions) (2) 12,6 13,4 14,3 14,7 PIB par habitant (francs CFA) 199,206 213,428 227,200 248,155 Dollar EU/francs CFA (moyenne annuelle) 519,3 449,9 481,5 PIB par habitant (dollars EU) 505,0 515,4 IPC moyen 2,04 6,41 -0,25 10,67 Seuil de pauvreté, méthode des besoins de base (3) 82,672 88,298 94,308 97,464 Incidence de la pauvreté, basé sur les richesses/avoirs (4) 46,4 % 40,4 % 38,5 % 45 % Nombre de pauvres (millions) 5,9 5,4 5,5 6,6 Profondeur de la pauvreté supposée constante (%) (5) 0,155 0,155 0,155 0,155 Écart de pauvreté (milliards de francs CFA) 75 74 80 100 Écart de pauvreté en % du PIB 3,0 % 2,6 % 2,5 % 2,7 % Proportion de pauvres et vulnérables (% de la population) (6) 25,4 % 31,1 % 18,8 % 22,1 % Nombre de pauvres et vulnérables (millions) 3,21 4,17 2,68 3,24 Profondeur de la pauvreté (7) 0,18 0,18 0,18 0,18 Page 44 23 Écart de la pauvreté 47,7 66,3 45,5 56,9 ( 1) FMI (2) CEM, BM (3) 2003 ZP BM, p. 16 (graphique) indexation depuis 2003 fondée sur l’IPC moyen 2003-2009 (4) 2003-2007 QUIBB 2008 fondé sur la SAP mais incertitudes méthodologiques (5) INSD, 2003, supposé constant (6) 2003- 2007 Nouvé 2009 (non publié), fondé sur le QUIBB 2008 rapport très pauvres/pauvres supposé constant 2007 ; (7) Estimation du personnel de la Banque, fondée sur la profondeur de la pauvreté rurale 2003 (INSD). Source : Auteurs . 52. Bien qu’approximatives, ces estimations devraient être considérées comme un minimum. Rapportés au budget existant, ces coûts représenteraient des engagements financiers significatifs pour l’État. Par exemple, le coût minimum de l’élimination complète de l'écart de pauvreté en 2007, estimé à 2,7 % du PIB, équivalait grosso modo à moins de 10 % du budget total de 2007, à moins de la moitié de la masse salariale publique de 2007 (6 % du PIB), ou à un peu plus que la dépense totale de santé (2,3 % du PIB) pour la même année. CHAPITRE III : POLITIQ UE ET INSTITUTIONS ÉTATIQUES EN MATIÈRE DE FILETS SOCIAUX Le Burkina Faso n’a pas adopté de politique nationale consolidée de protection sociale, susceptible de fournir un cadre aux filets sociaux. Les programmes de filets sociaux jouent néanmoins un rôle important dans les stratégies de développement du capital humain et de réponses aux crises du Burkina Faso. Les filets sociaux sont considérés comme des investissements socioéconomiques nécessaires dans la vision à long terme que le pays se fait de la société. Pourtant, leur potentiel de réduction de la pauvreté et de la vulnérabilité par la redistribution, la promotion et la transformation des revenus, est souvent peu reconnu dans les stratégies à moyen terme. Dans l’ensemble, le système de filets sociaux existant a un impact limité sur les plus pauvres et les plus vulnérables. Cette situation s’explique essentiellement par leur couverture limitée par la faiblesse des allocations financières et le ciblage rendu inefficace par le manque de capacités de mise en œuvre, en particulier les difficultés à toucher les plus pauvres et à évaluer le rapport coût-efficacité. Jusqu’à récemment, le domaine se caractérisait par un manque de leadership et la faiblesse des mécanismes de coordination intersectorielle. Cependant, dans un contexte marqué par des crises à répétition, la protection sociale et sa composante de filets sociaux sont en train de gagner en importance et le gouvernement a entrepris diverses actions visant à élaborer une politique efficace de protection sociale. Ainsi, la mise en place récente du Comité interministériel de la protection sociale et la perspective d’intégration d’une composante multisectorielle de protection sociale dans la prochaine Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD) offre une opportunité de voir la protection sociale et les filets sociaux jouer un rôle plus important et plus efficace dans les stratégies de réduction de la pauvreté. Si on exclut la subvention générale des produits alimentaires et pétroliers, la dépense totale en faveur des programmes de filets sociaux représentait en moyenne 0,4 % du PIB entre 2005 et 2009. Grâce à ’un plus grand engagement de l’État et des bailleurs de fonds, les dépenses consacrées aux programmes de filets sociaux ont enregistré une hausse constante, passant de 0,3 % du PIB en 2005 à environ 0,9 % en 2009. Cette augmentation s’explique en grande partie par les dépenses effectuées dans la cadre des programmes alimentaires. Depuis 2006, le financement des programmes de filets sociaux dépend de plus en plus des bailleurs de fonds. Cependant, les bailleurs de fonds se concentrent principalement sur les programmes de nutrition, tandis que les fonds publics sont essentiellement destinés à la subvention universelle des produits alimentaires et du carburant. Page 45 24 53. Après le diagnostic de la pauvreté, de la vulnérabilité et des risques présenté au Chapitre II, le présent chapitre se demande si l’actuel système de filets sociaux constitue une réponse appropriée à la pauvreté et à la vulnérabilité. La première section passe en revue les objectifs de la stratégie de développement du Burkina Faso, examine leurs interactions et leurs complémentarités avec d’autres réponses politiques de l’État à la pauvreté et à la vulnérabilité. La deuxième section porte sur le dispositif institutionnel des filets sociaux, tandis que la section suivante ’s’intéresse au financement du système, avec une estimation des dépenses totales et une réflexion sur les sources de financement. A. Rôle stratégique accordé aux filets sociaux au sein de la politique de développement élargie Les filets sociaux au sein de la stratégie à moyen terme de réduction de la pauvreté et de la vision à long terme de développement du Burkina 54. Le dernier Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP) intègre la protection sociale en tant qu’aspiration dans le second pilier « Promotion de l’accès des pauvres aux services sociaux de base et à la protection sociale » [MEDEV 2004]. En 2000, le Burkina Faso était le premier pays de la sous-région à adopter et à mettre en œuvre un DSRP, avec un fort accent sur l’éducation et la santé 7 . L’actuel DRSP (le deuxième), élaboré en 2003, avec 13 DSRP régionaux, a élargi les secteurs sociaux couverts et intégré, spécifiquement, la protection sociale dans son deuxième pilier 8 . Celui-ci vise à assurer l’accès des pauvres aux services sociaux de base et à la protection sociale par le renforcement du capital humain (éducation, santé, nutrition, VIH/SIDA, eau potable, assainissement, etc.) et un meilleur accès des pauvres à l‘éducation, aux services de santé, aux programmes de nutrition, à la lutte contre le VIH/SIDA, à l‘eau potable, au logement et à la protection sociale. En outre, la solidarité nationale apparaît au cœur de la vision à long terme de la société, élaborée par le pays en 2005 9 . Au-delà des avantages sociaux et politiques, la solidarité et l’extension des filets sociaux devraient offrir aux citoyens les plus pauvres les moyens de contribuer à la production et à la consommation, et les filets sociaux sont identifiés en tant qu’investissements sociaux et économiques. 55. Cependant, les filets socia ux ne sont pas explicitement considérés comme un élément clé de la stratégie de réduction de la pauvreté, qui reste axée sur les interventions liées à l’offre. Quatre domaines d‘action stratégiques ont été identifiés dans le DSRP pour promouvoir la protection sociale: i) le renforcement des mesures de lutte contre toute forme d‘exclusion sociale ii) des mesures visant à promouvoir la solidarité iii) l’augmentation des revenus des plus pauvres et iv) la promotion des micro-assurances de santé pour les groupes les plus pauvres et les indigents [MEDEV 2004]. Dans ce contexte, les mesures se sont essentiellement concentrées sur la prestation de services d’assistance sociale aux groupes vulnérables, la promotion des droits et l’adoption de nouvelles législations, la création d‘activités génératrices de revenus, et des régimes d‘assurance sociale contributifs (exemple mutuelles de santé). Ainsi, dans le cadre de cette stratégie, 7 La lettre d’intention sur la politique de développement humain durable (LIPDHD) adoptée en 1995 a servi de base au Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté. 8 Les autres piliers du DSRP sont 1) l’accélération de la croissance généralisée 3) l’augmentation de l’emploi et des activités génératrices de revenus et 4) la promotion de la bonne gouvernance. 9 Les stratégies identifiées dans la vision à long terme de la société «Burkina 2025» pour une solidarité effective sont les suivantes redistribution équitable des richesses lutte contre les discriminations sociales éducation et emploi développement territorial équilibré et harmonieux et mobilisation des citoyens et réarmement moral [MEDEV 2005]. Page 46 25 l’utilisation des transferts directs non contributifs à des individus ou des ménages est ponctuellement limitée à un petit nombre de groupes vulnérables (exemples élèves vulnérables, enfants affectés par le VIH, handicapés). 56. Les médiocres performances des DSRP précédents et les crises récentes ont accru le besoin d’une protection sociale plus large, et de programmes de filets sociaux en particulier. Le DSRP est en cours de révision et devrait être remplacé en 2010 par la Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD). En février 2010, cinq piliers ont été identifiés pour guider l’élaboration de la stratégie quinquennale envisagée. Il s’agit de l’accélération de la croissance économique la réduction de la pauvreté la gestion de la croissance démographique la préservation de l’environnement et la réduction des inégalités entre hommes et femmes [GovBF 2010]. L’extension des filets sociaux ainsi que l’amélioration de l’accès aux services de base, la scolarisation universelle, l’accès à l’emploi, etc. constitue une action prioritaire explicitement identifiée dans le deuxième pilier de la prochaine SCADD. En avril 2010, le ministère de l’Économie et des Finances (MEF) a organisé un forum technique national sur la protection sociale avec le but déclaré de tracer les grandes lignes d’une vision nationale et consolidée de la protection sociale, incluant la composante des filets sociaux, et d’éclairer directement l’élaboration de la SCADD. Filets sociaux et approche du Burkina en matière de protection sociale 57. Le Burkina n’a pas de politique de protection sociale consolidée adoptée par le Gouvernement. En 2006, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale (MTSS) a piloté un processus interministériel en vue de l’élaboration d’une politique nationale de protection sociale (Encadré 1). Ce document présente une approche multisectorielle intéressante dans laquelle la protection sociale est plus perçue comme un investissement que comme une aide. Conscient de l’énormité des besoins de protection sociale par rapport à la limitation des ressources, le document propose un certain nombre d’initiatives visant à s’assurer que les groupes les plus vulnérables sont les véritables bénéficiaires, tout en recherchant le meilleur rapport coût-efficacité du programme dans l’élaboration du système [MTSS 2007]. Les programmes de filets sociaux sont au cœur de la politique proposée. Bien que ce document ait été finalisé en janvier 2007, il n’a jamais été adopté et le gouvernement a demandé à chaque ministère d’élaborer sa propre stratégie ministérielle, amenant ainsi le MASSN à développer sa politique nationale d’action sociale. 58. Les filets de sécurité sociale n’apparaissent pas comme un élément stratégique clé dans la Politique nationale d’action sociale . Cette politique ministérielle (Politique nationale d’action sociale ou PNAS) élaborée en 2007 par le MASSN, conformément au deuxième pilier du DSRP, vise à assurer la protection et la promotion de groupes sociaux spécifiques, et à créer des conditions favorables au renforcement de la solidarité au sein de la population. Elle s’articule autour de cinq composantes l’amélioration des conditions de vie des ménages la promotion d’une culture de solidarité nationale 10 , la protection et la promotion de groupes spécifiques la contribution à la lutte contre le VIH/SIDA et le renforcement des capacités institutionnelles [MASSN 2007]. Les activités proposées, qui se limitent au mandat du MASSN, mettent l’accent sur l’éducation et la sensibilisation, la prestation de services d’assistance sociale (au profit des personnes handicapées et enfants vulnérables, par exemple), la protection juridique et l’appui aux activités génératrices de revenus. Les filets sociaux ne bénéficient donc que de peu d’attention. La politique ne 10 La solidarité, qui est définie comme une action « humaniste » dans la Charte de la solidarité nationale récemment adoptée, est au cœur de l'action du MASSN. Cette approche de la solidarité peut être quelque peu différente des notions de redistribution des revenus et d’investissements sociaux nécessaires soutenues par les filets sociaux, tels que définis ici. Page 47 26 prend pas en compte la fourniture d’un appui financier aux orphelins et autres enfants vulnérables (OEV), aux personnes affectées par une catastrophe, ou dans le cadre des actions de solidarité. Rien n’est non plus précisé sur l’institutionnalisation de différentes formes de transferts sociaux réguliers et prévisibles aux personnes ou ménages 11 pauvres ou vulnérables. 59. Le gouvernement a pris récemment différentes initiatives en faveur du développement d’une stratégie nationale de protection sociale, et la perspective de l’intégration d’une composante de protection sociale dans la prochaine SCADD offre une opportunité de promouvoir de nouveau l’approche multisectorielle nécessaire à la protection sociale et aux filets sociaux . Comme indiqué dans la prochaine section, la protection sociale est en train de prendre de l’ampleur, et les acteurs nationaux et internationaux essaient d’obtenir un consensus national entre les différents ministères et organismes. Des efforts sont en cours pour promouvoir une stratégie intégrée de protection sociale qui comprendra également un système efficace de filets sociaux. 11 Le MASSN a proposé en 2009, un nouveau programme intitulé « Filets sociaux » [MASSN, 2009a] mais l’avant-projet proposé s’est cependant heurté à des critiques sévères d’intervenants nationaux et internationaux. Il a été jugé trop mal conçu pour être un filet social efficace, et trop ambitieux pour les ressources financières, techniques, et humaines actuelles du MASSN. Le programme n'a donc pas été pris en compte dans le budget 2010. Page 48 27 Encadré 1 : Grandes lignes de la politique nationale de protection sociale élaborée sous la direction du MTSS (non adopté) Objectif général Atténuer l’impact des chocs menaçant directement la vie des groupes les plus vulnérables de la population. Objectifs spécifiques : ƒ Assurer l’accès des groupes les plus démunis ou vulnérables aux services sociaux de base (essentiellement la santé et l’éducation) et à des revenus temporaires en cas de chocs menaçant la survie du ménage et ƒ Créer un environnement favorable au développement de la protection sociale par le biais de mécanismes de marché pour ceux qui peuvent y contribuer. Principes directeurs Solidarité nationale équité et égalité de traitement diversification des instruments et des acteurs responsabilité globale de l’État et gestion démocratique. Piliers : 1. Assurer l’accès des populations indigentes et des groupes particulièrement vulnérables aux services sociaux de base 2. Assurer une couverture sociale adéquate pour les acteurs du secteur informel et 3. Réformer la sécurité sociale institutionnelle et renforcer sa légitimité. Activités proposées (pour la période de transition 2006-2008) : ƒ Poursuite des programmes existants et évaluation de leur rapport coût-efficacité : Santé programmes de lutte contre le paludisme et le VIH/SIDA subvention des soins obstétricaux ; Éducation cantine scolaire, approvisionnement en eau, écoles communautaires, fourniture de matériel scolaire, suppression des contributions des parents d’élèves dans les zones démunies, et programmes éducatifs soutenus par le MASSN (au profit des enfants de la rue, des enfants ayant des difficultés d’apprentissage, et de l’enseignement préscolaire) ; Génération de revenus et création d’emplois amélioration de l’efficacité des programmes; Sécurité alimentaire stock national de sécurité alimentaire et Gestion des risques et assistance aux victimes de catastrophes naturelles programme de lutte contre les invasions acridiennes. ƒ Études de faisabilité et projets pilotes pour les tester Subventions des services de santé pour les franges les plus démunies de la population (sous la supervision du ministère de la Santé) Paquet nutritionnel minimum pour les enfants de moins de 5 ans (sous la supervision du ministère de la Santé) ; Transfert monétaires conditionnels pour améliorer l’assiduité scolaire (sous la supervision du MEBA) et Travaux publics à haute intensité de main d’œuvre pour répondre aux situations de grande vulnérabilité (sous la supervision du MJE), ƒ Programme proposé par le MASSN pour aider les orphelins et enfants vulnérables (OEV). ƒ Activités transversales visant à améliorer les programmes existants : Définition et identification des indigents (sous la supervision du MASSN); Examen du secteur des mutuelles d’assurances (sous la supervision du MTSS); Préparation d’une réforme du système officiel de sécurité sociale (sous la supervision du MTSS) et Évaluation des programmes existants (sous la supervision du MEDEV). Estimation du budget annuel 39,9 milliards de francs CFA ( soit 1,1% du PIB) Dispositif institutionnel Le Comité de pilotage et de suivi de la protection sociale (présidé par le représentant du Premier ministre Membres représentants des ministères et organisations compétentes Secrétariat permanent (hébergé par le MEDEV) mise en œuvre par les agences respectives, à travers une approche contractuelle chaque fois que possible. Source: MTSS, 2007. Filets sociaux dans les politiques sociales sectorielles du Burkina 60. Malgré l’absence d’une stratégie nationale de protection sociale et la non prise en compte des filets sociaux dans la politique nationale d’action sociale, les programmes de Page 49 28 filets sociau x apparaissent dans de nombreuses stratégies sectorielles santé, éducation, sécurité alimentaire et emploi. Politique de santé 61. Des interventions liées à la demande, telles que l’exemption des frais, sont incluses dans la stratégie pour assurer un accès efficace aux services de santé et agir en synergie avec les efforts visant à améliorer la qualité et la disponibilité des services de santé. Le Plan national de développement sanitaire (PNDS, 2001-2010) comprend des activités spécifiques visant à i) promouvoir les soins préventifs et curatifs pour les groupes vulnérables définis comme les enfants, les femmes, les jeunes, les personnes âgées, et les personnes séropositives (en vertu des objectifs spécifiques 3 et 4) et ii) assurer l’accès des pauvres aux soins médicaux (en vertu de l’objectif spécifique 6) [ministère de la Santé, 2000]. 62. Un certain nombre de services et médicaments sont proposés à des prix subventionnés pour tous. Le paiement direct des services de santé par les usagers existe au Burkina Faso depuis les années 1980. Il a été renforcé avec la mise en œuvre de l’Initiative de Bamako (adoptée en 1987), qui est entrée en vigueur au Burkina Faso en 1993. Dans les années qui ont suivi, un certain nombre de mesures ont été prises pour supprimer ou subventionner les frais supportés par les usagers, en particulier les femmes et les jeunes enfants, comme stratégie de réduction des taux de mortalité maternelle et néonatale et de promotion de l’accès des pauvres aux services de santé. Le gouvernement, a, notamment, adopté en 2006 une politique de subvention reposant sur le principe de la prise en charge de 80 % des frais d’accouchement, des soins obstétricaux et néonataux d’urgence par l’État, et ce, jusqu’à concurrence de 100 % pour les femmes défavorisées (indigentes). Un budget total de 30 milliards de francs CFA a été alloué à cette fin pour la période 2006-2015, dont 5 milliards pour les subventions supplémentaires destinées aux personnes indigentes. Les subventions générales de santé ne sont pas considérées comme des filets sociaux parce qu’elles ne sont pas spécifiquement destinées aux plus pauvres et aux plus vulnérables, seules les subventions supplémentaires en faveur des indigents entrent dans le cadre des programmes de filets sociaux. 63. Des mécanismes sont envisagés pour offrir des subventions supplémentaires aux indigents. Les personnes indigentes ont droit à la gratuité des soins de santé, en vertu des dispositions du Kiti n°An-VIII-0202/FP/SAN-AS du 8 février 1991 relatif à la base de tarification générale. Cependant, les mécanismes nationaux restent à clarifier pour rendre ce droit effectif. Il existe quelques initiatives isolées, mais il subsiste aussi de sérieux défis, notamment en ce qui concerne l’identification des indigents (critères et mécanismes) et le financement de ces subventions supplémentaires. 64. Le régime national d’assurance maladie envisagé prend également en compte des exemptions de frais pour les personnes indigentes (Figure 7). Cependant, les décideurs politiques sont confrontés aux mêmes défis clés Comment identifier les indigents Comment financer le système Comment le mettre en œuvre Page 50 29 Figure 7 : Dispositif institutionnel du projet de régime national d’assurance maladie Légende : CNAM Caisse nationale d’assurance maladie CRAM Caisse régionale d’assurance maladie AMO Assurance maladie obligatoire AMV Assurance maladie volontaire SI Système d’information Source: Secrétariat permanent du Comité de pilotage de l’assurance maladie. Politique en matière d’éducation 65. Les mesures liées à la demande, telles que des exemptions de frais de scolarité, sont au cœur de l’initiative Éducation pour tous, et les enfants de 6 à 16 ans ont droit à la gratuité de l’enseignement , en vertu de la Loi de réforme de l’éducation adoptée en 1996. Au nombre des mesures concrètes visant à assurer la gratuité de l’enseignement figurent la suppression des frais dans les écoles publiques et la distribution gratuite du matériel scolaire de base dans les écoles publiques et privées. Ces mesures ont été prises dans toutes les provinces en 2007-2008, pour un budget annuel total de 6,5 milliards de francs CFA (financé par l’État et le CAST). Par ailleurs, l’État prend en charge la cotisation de l’APE 12 pour toutes les filles inscrites en première année primaire dans les établissements publics, avec une moyenne annuelle de 192 700 fillettes bénéficiant de l’exemption des frais de 1 000 francs CFA, soit un total de 190 millions de francs CFA par an (grâce essentiellement à l’appui du CAST). Cette politique s’est traduite par une hausse significative du taux de scolarisation avec i) une augmentation du taux de scolarisation global de 47 % en 2002-2003 à 71 % en 2008-2009 ii) une progression du taux de scolarisation des filles de 47,7 % en 2002-2003 à 72,4 % en 2009-2010 et iii) une amélioration de la parité filles-garçons qui est passée de 0,72 en 2002-2003 à 0,86 en 2009-2010. Dans l’ensemble, les mesures visant à assurer la gratuité de l’enseignement primaire pour tous ont joué un grand rôle dans l’amélioration de l’accès à l’éducation 12 Contribution faite par l’Association des parents d’élèves (APE). Page 51 30 66. Un certain nombre de programmes de filets sociaux complètent ces mesures universelles et interventions liées à l’offre pour encore accroître le taux de scolarisation, l’assiduité scolaire et les taux d’achèvement, et réduire les disparités [MEBA, 2000]. Il s’agit notamment des cantines scolaires dans les écoles primaires et secondaires, des programmes de bourses d’études, et d’un programme pilote de transfert monétaire (conditionnel). Ces programmes seront discutés plus avant dans le Chapitre IV. Politique de sécurité alimentaire 67. Certains programmes de filets sociaux figurent explicitement dans la Stratégie nationale de sécurité alimentaire. Cette Stratégie nationale de sécurité alimentaire (SNSA), élaborée par le ministère de l’Agriculture en 2001 et révisée en 2003, comprend la fourniture de programmes de nutrition et l’accès aux soins de santé pour les femmes enceintes et allaitantes ainsi que les enfants de moins de 5 ans atteints de malnutrition (dans le cadre de son objectif 3 « Amélioration durable des conditions économiques et nutritionnelles des populations pauvres et des groupes vulnérables »). La distribution de vivres à travers des mécanismes décentralisés et les stocks nationaux de sécurité alimentaire sont au cœur de la stratégie de protection des populations affectées par des catastrophes naturelles (dans le cadre de l’objectif 4 « Renforcement du dispositif de prévention et de gestion des crises conjoncturelles, en cohérence avec la construction de la sécurité alimentaire structurelle »). Politique de l’emploi 68. La prom otion d’une utilisation (large et systématique) des approches à haute intensité de main d’œuvre est une ambition clairement définie dans la politique nationale de l’emploi adoptée en 2008. Cette politique vise à renforcer les mesures ciblées destinées à promouvoir l’emploi. Le Programme d’investissement public propose un large éventail d’infrastructures pouvant être réalisées et/ou entretenus au moyen d’approches à haute intensité de main-d’œuvre. Mais, même si la politique vise la création d’opportunités d’emploi grâce à cette approche, rien n’indique si les programmes seront conçus de manière à faciliter la participation des plus pauvres et des plus vulnérables à ces activités professionnelles temporaires. Filets sociaux dans les réponses aux crises du Burkina 69. Les transferts directs aux individus et aux ménages sont au cœur des stratégies de réponses aux crises du Burkina . Le plan d’urgence en matière de sécurité alimentaire et de nutrition, adopté par le gouvernement en 2008 en réponse à la flambée des cours mondiaux des produits alimentaires et pétroliers, comprend dans l’ensemble les mêmes types de programmes, y compris les interventions nutritionnelles à court terme. Le plan d’urgence du pays comprend, entre autres, des distributions de vivres aux ménages affectés par les catastrophes, des programmes nutritionnels destinés aux enfants et femmes atteints de malnutrition, des programmes de cantines scolaires pour les élèves déplacés ainsi que des soins de santé en faveur de la mère et de l’enfant. 70. Cepend ant, le plan d’action 2009-2010, élaboré pour atténuer les effets de la crise financière et économique constitue, en fait, le premier document stratégique à mettre un accent particulier sur les filets sociaux . Le quatrième pilier de ce plan d’action de crise (« Renforcement des programmes de protection sociale ») a trois composantes i) mise en œuvre de filets sociaux et de mécanismes novateurs de réduction des charges des ménages ii) supervision d’une structure de tarification et iii) mise en œuvre d’un programme spécial pour l’emploi et les travaux à haute intensité de main d’œuvre [MEF 2009b]. De manière plus spécifique, les activités proposées au titre de la composante « Filets sociaux » du plan d’action de crise comprennent à la fois des activités existantes Page 52 31 (SNS et cantines scolaires et des nouvelles (consultations prénatales gratuites) (Tableau 7). Néanmoins, comme dans le DSRP et la Politique nationale d’action sociale, le terme « protection sociale » est utilisé dans un sens très restreint, et le Programme de protection sociale des groupes vulnérables fait essentiellement référence aux services d’assistance sociale plutôt qu’à un éventail plus large d’assurance sociale, de filets sociaux, de politiques et règlementations, et de services d’assistance sociale (Tableau 8). Il convient de noter que cet ensemble de mesures a été voté avec le budget complémentaire de 2009 devant être décaissé avant la fin février 2010. Rien n’indique que les ressources ont été mises à disposition en 2010. Page 53 32 Tableau 7 : Composante « Filets sociaux » du plan d’action de crise 2009-2010 (en millions de francs CFA) Activité 2009 2010 2010 Budget supplémentaire requis Budget supplémentaire requis Financement sécurisé en décembre 2009 Programme 1: Sécurité alimentaire et nutritionnelle 8 446,8 31.466,2 175,2 Distribution de vivres et construction de lieux de stockage des denrées 8 446,8 30 050,9 175,2 Programme de lutte contre la malnutrition maternelle et infantile - 1 415,2 - Programme 2: Éducation 12 582 12 582 4 348,2 Subventions pour les filles nouvellement inscrites à l’école primaire 260 260 - Programme de cantines scolaires du MEBA 12 322 12 322 4 348,2 Programme 3: Santé 2 000 26 602,3 19 477,9 Programme de subvention des soins obstétricaux et néonataux 1 702,0 1 162,4 2 500 Programme de lutte contre la tuberculose - 3 521,8 50 Programme de lutte contre le paludisme - 8 636,7 55 Programme élargi de vaccination - 6 901,5 1 847,3 Gratuité des consultations prénatales préventives - 400 469,1 Programme de réduction de la morbidité liée à la filariose lymphatique - 690 2 200 ARV pour les personnes vivant avec le VIH - 3 517 13 378,9 Autres (interventions liées à l’offre) 298 5 289,7 977,6 Programme 4 Protection sociale des groupes vulnérables 865 2 702,6 1 038,1 Total 23 893,9 73 353,3 25 039,5 Source: MEF, 2009b. Tableau 8 : Composante « Protection sociale des groupes vulnérables » du plan d’action de crise 2009 Activités du Programme 4 « Protection sociale des groupes vulnérables » Part du budget du programme allouée (%) Soutien en vivres et kits aux écoles du préscolaire 31 Matériel pour les personnes handicapées 26 Activités génératrices de revenus dans des centres de formation spécialisés 18 Frais de scolarité, kits scolaires et vélos à 1 500 OEV 18 Aide alimentaire aux orphelinats 4 Aide alimentaire aux cours de solidarité 1 Coûts administratifs 2 Total 100 NB Le programme 2010 de protection sociale des groupes vulnérables comprend les mêmes activités, y compris l’aide alimentaire aux orphelins et enfants vulnérables et aux malades indigents dans les hôpitaux . Source: MEF, 2009b ; Auteurs. Page 54 33 71. Dans l’ensemble, l’analyse des politiques et stratégies existantes révèle le peu d’importance accordé aux filets sociaux dans les politiques de développement par les décideurs politiques burkinabés, et que des études supplémentaires sont nécessaires pour définir un plan d’action complet . Parmi les quatre rôles que peuvent jouer les filets sociaux dans la politique de développement, le plus reconnu au Burkina Faso est probablement celui qu’ils ont dans le développement du capital humain, comme en témoignent les politiques de santé, nutritionnelles et d’éducation du pays. Le rôle de protection que peuvent jouer les filets sociaux dans l’atténuation des impacts négatifs des chocs semble aussi largement reconnu, comme le montrent les plans de réponse aux crises du Burkina. Néanmoins, d’autres études s’imposent pour définir et adopter un plan d’action concret pour les filets sociaux. Celui-ci devra présenter des objectifs fixés dans le temps avec les allocations de ressources humaines et financières correspondant à chaque tâche et l’identification des institutions responsables de la mise en œuvre. 72. En outre, cette analyse stratégique montre également que les filets sociaux n’ont pas été utilisés au maximum de leur potentiel. Au stade actuel, les filets sociaux ont eu une portée limitée, avec un faible niveau de transferts. L’approche visant à améliorer la situation économique des ménages pauvres et vulnérables a été axée sur la promotion d’une culture de solidarité nationale et l’appui aux activités génératrices de revenus. Le rôle potentiel des filets sociaux dans l’amélioration des moyens d’existence (par une meilleure gestion des risques et la promotion de l’autonomie) reste à intégrer. Enfin, l’absence d’une stratégie nationale pour les filets sociaux montre que les pouvoirs publics n’ont pas encore vu le rôle qu’un système cohérent et efficace de filets sociaux peut jouer dans le soutien de l’efficacité et de la croissance en libérant d’autres secteurs de tout rôle de redistribution pour leur permettre de se concentrer sur la prestation de services efficaces. B. Dispositif institutionnel du système de filets sociaux Au niveau national 73. L’absence d’une stratégie nationale de filets sociaux s’accompagne d’un manque de coordination institutionnelle dans le domaine. Le projet de politique nationale de protection sociale, élaboré par un comité interrninistériel sous la coordination du Ministère du Travail et de la Sécurité Sociale (MTSS), avait identifié des priorités en matière de filets sociaux. Malheureusement, ce projet n'a pas était adopté et chaque Ministère concerné a opté pour une politique sectorielle focalisée sur son mandat unique. Ainsi, le MTSS, dans son projet de politique nationale du travail met l'accent sur la réglementation du travail et l’assurance sociale. Dans le cadre de cette assurance sociale, il est envisagé la mise en place d'une assurance maladie à vision universelle qui développera des programmes de filets sociaux. II s'agit notamment du subventionnement des soins pour les personnes vulnérables, de transferts monétaires pour les personnes âgées et les familles avec enfants. Quant au MASSN, dont le mandat 13 suppose un accent stratégique sur les filets sociaux, il n’a, dans les faits, accordé aucune priorité claire aux filets sociaux dans sa politique nationale d’action sociale et aucun programme important de filets sociaux ne relève de sa gestion. Par exemple, en 2008, le FNS n’a aidé que 4 562 personnes (moins de 0,07 % des pauvres en termes monétaires) et une dizaine d’organisations à travers des 13 Le MASSN a six domain es d’intervention la protection et la promotion des enfants et adolescents la protection familiale et la promotion sociale la promotion de la solidarité nationale la protection et la promotion sociale de groupes spécifiques (personnes handicapées, âgées et socialement exclues) la promotion et l’appui socioéconomique et psychosocial aux personnes infectées et affectées par le VIH/SIDA et le renforcement des compétences et des capacités institutionnelles. Page 55 34 transferts ponctuels en nature ou en espèces, pour un coût total de 38,8 millions de francs CFA. Le MdS, le MEBA et le MAHRH semblent être les plus actifs dans la mise en œuvre des filets sociaux, même si leur mandat devrait les amener à se focaliser sur la prestation des services de base. 74. Dans l’ensemble, les mécanismes de coordination interministérielle en matière de protection sociale et de filets sociaux sont faibles . La Commission sectorielle et thématique (CST) du DSRP pour la protection sociale n’a pas été très active au cours des dernières années, et n’a pas réussi à aligner les ministères chargés de la gestion des programmes de filets sociaux 14 . En fait, jusqu’à récemment, rien n’était prévu pour que les ministères sectoriels coordonnent leurs stratégies de filets sociaux et échangent leurs expériences 15 . 75. Cependant, dans un contexte marqué par des crises à répétition, la protection sociale et notamment les filets sociaux gagnent de l’ampleur . À la fin 2009, le MEF a coordonné l’élaboration d’un plan d’action pour atténuer la crise financière et économique, qui intégrait explicitement les programmes de filets sociaux dans un pilier prioritaire de protection sociale. En janvier 2010, un atelier de formation sur la protection sociale a été organisé à l’intention de 30 techniciens de 11 ministères, avec le soutien de l’UNICEF. En février 2010, un Comité ministériel conjoint pour la protection sociale a été créé par décret. En avril 2010, le MEF a organisé, avec le soutien de l’UNICEF, un atelier technique national sur la protection sociale afin de: i) diffuser les principes de base de la protection sociale ii) partager des informations sur les programmes de filets sociaux existants au Burkina Faso et iii) présenter une vision consolidée et multisectorielle du rôle de la protection sociale dans le pays. L’atelier a réuni près de 90 personnes, marquant une avancée notable en direction de l’élaboration d’une stratégie nationale de protection sociale incluant les filets sociaux et de son intégration dans la prochaine SCADD. 76. La mise en place du Comité ministériel conjoint pour la protection sociale et la perspective de l’intégration d’une stratégie nationale de protection sociale dans la prochaine SCADD ont offert à la protection sociale et aux filets sociaux, une opportunité de jouer un rôle plus important et efficace dans les stratégies de réduction de la pauvreté . L’intégration d’une composante de protection sociale dans la SCADD constitue une grande opportunité pour l’adoption de l’approche multisectorielle nécessaire, qui renverse largement les approches sectorielles qui ont prévalu dans le passé. Actuellement, les agences d’exécution sont confrontées à des problèmes communs, tels que la difficulté d’identification des pauvres, l’introduction de programmes novateurs, et le suivi et évaluation des programmes. La mise en place du Comité viendra en appui au dialogue interministériel sur les questions de conception et de mise en œuvre des filets sociaux, favorisera la capitalisation de l’apprentissage au niveau national et encouragera les économies d’échelle. Au niveau décentralisé 77. Comme indiqué dans la récente revue des dépenses publiques, la gestion du programme et des dépenses restent largement centralisés et inefficaces. En dépit d’une augmentation rapide depuis 2005, les ressources des autorités locales ne représentaient que 0,8 % du PIB en 2007 et 4 % des recettes publiques totales [Banque mondiale 2009a]. La 14 Il ne s’agit que de cinq ministères le ministère de l’Action sociale et de la Solidarité nationale (MASSN), le ministère de la Promotion de la femme (MPF), le ministère du Travail et de la Sécurité sociale (MTSS), le ministère de l’Emploi et de la Jeunesse (MEJ), et le ministère des Sports et Loisirs (MSL). 15 Le Comité interministériel de suivi de la conjoncture (CISC), mis en place en juillet 2009 pour coordonner le plan d’action de réponse aux effets de la crise, se réunit au niveau ministériel sous la conduite du Premier ministre. Page 56 35 gestion centralisée des dépenses explique, entre autres, le « paradoxe burkinabé », c’est-à- dire une déconnexion apparente entre des performances et une gestion économique satisfaisante et des résultats médiocres en termes de réduction de la pauvreté. La création des conditions d’une décentralisation effective est essentielle à l’amélioration de l’efficacité des dépenses publiques en termes de réduction de la pauvreté. Dans le cadre du Plan national d’organisation et de coordination des secours d’urgence et de réhabilitation (PNOCSUR), les conseils de secours d’urgence et de réhabilitation 16 devraient être fonctionnels aux niveaux national, régional, provincial, départemental, et villageois afin de coordonner les réponses aux crises et éviter l’exclusion des personnes vulnérables. Au niveau des bailleurs de fonds 78. Le Burkina Faso est un pays pilote de l’Initiative des Nations Unies pour un socle de protection sociale. Les principaux bailleurs de fonds engagés dans la protection sociale au Burkina Faso, notamment l’OIT, l’UNICEF, le PAM, la Banque mondiale, le FMI, l’UE et le PNUD, coordonnent leurs efforts de manière étroite. En 2009, dans un contexte de crise mondiale menaçant de faire disparaître des décennies d’investissement dans le développement humain et la poursuite des OMD, l’Organisation des Nations Unies a lancé son Initiative pour un socle de protection sociale visant à mettre en place un ensemble de base de garanties de protection sociale pour tous les citoyens (Encadré 2). Le Burkina Faso a été choisi comme l’un des pays pilotes avec le Cambodge, l’Éthiopie, et le Honduras 17 . 16 Par exemple, le Conseil national de secours d'urgence et de réhabilitation ou CONASUR au niveau national. Le CONASUR est une structure interministérielle composée d’une quinzaine de départements ministériels, d’ONG et de la société nationale de la Croix Rouge, qui relève du MASSN. 17 Cette initiative bénéficie de l’appui de l’OIT et d’un projet de l’Union européenne, géré depuis Genève et dont l’objectif est d’offrir une plateforme de sensibilisation et d’échanges de bonnes pratiques en matière de protection sociale et d’emploi. Page 57 36 Encadré 2 : Initiative pour un socle de protection sociale La crise économique et financière mondiale actuelle aura des conséquences dramatiques pour le domaine social mais aussi pour celui de la santé, de la nutrition et de l’éducation, à moins que des actions décisives ne soient prises. Elle menace de faire disparaître des décennies d’investissement dans le développement humain et la poursuite des objectifs de développement internationalement acceptés, y compris les OMD. En situation de crise, les prestations de sécurité sociale, les programmes de santé publique et de nutrition, et les services sociaux font office de stabilisateurs sociaux, sanitaires et économiques, permettant de réduire la profondeur sociale et économique potentielle de la récession, en luttant contre la pauvreté, assurant la continuité des services, et stabilisant la demande globale. La communauté internationale doit non seulement résoudre les problèmes mis en évidence par la crise dans les systèmes financiers, monétaires et économiques mondiaux, mais également protéger la population pendant et après la crise. La crise offre aussi une occasion de développer un ensemble de base de garanties de protection sociale pour tous les citoyens. Un socle de protection sociale pourrait comprendre deux éléments principaux permettant de réaliser respectivement les droits de l’homme suivants i) les services essentiels assurer la disponibilité, la continuité et l’accès aux services publics (tels que l’eau et l’assainissement, la santé, l’éducation, et le soutien du travail social centré sur la famille) ii) les transferts sociaux un ensemble de base de transferts sociaux essentiels, en espèces et en nature, destinés aux pauvres et aux personnes vulnérables, afin de renforcer la sécurité alimentaire et la nutrition, et d’offrir un revenu minimal garanti et l’accès aux services de base, y compris l’éducation et les soins de santé. Les calculs effectués par différentes agences des Nations Unies, dont l’OIT, ONUSIDA, l’UNICEF et l’OMS, montrent qu’un socle de base de transferts sociaux est globalement abordable, même si le financement n’est pas encore disponible partout. Il aurait également un impact majeur sur la pauvreté, l’accès et l’utilisation des services clés, y compris ceux liés à la lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme, ainsi que le travail et la traite des enfants. Correctement mis en œuvre, les transferts monétaires et les systèmes de santé de base existants déjà dans de nombreux pays en développement ont des effets positifs sur la pauvreté, le travail des enfants, la santé et la nutrition, l’éducation, le statut social des bénéficiaires, et l’activité économique. Le socle de protection sociale est un catalyseur conceptuel pour une coalition mondiale menée par l’ONU pour sauvegarder les acquis de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Source : OIT et OMS, 2009 . C. Financement du système de filets sociaux 79. Les principaux programmes de filets sociaux existants au Burkina Faso sont résumés dans le Tableau 9. Les problèmes de conception, de mise en œuvre, et de financement de chaque type de programme seront analysés individuellement au Chapitre IV. Comme indiqué au Tableau 9, plus de trente programmes de transferts sociaux sont actuellement financés par différents bailleurs de fonds. Bien que chacun ait ses mérites, la plupart n’atteignent pas plus de quelques dizaines de milliers de bénéficiaires, et ne fournissent pas non plus des avantages durables aux pauvres. Dans cette section, la question de leur financement sera examinée. 80. Il est difficile de quantifier les dépenses en faveur des filets sociaux . Actuellement, les programmes de filets sociaux sont gérés et mis en œuvre par différents ministères, et il n’y a aucun système de suivi centralisé. Il est donc difficile de suivre les dépenses en faveur des programmes de filets sociaux et l’absence de données détaillées pose des défis à l’estimation des niveaux respectifs de dépenses (Encadré 3). Page 58 37 Encadré 3 : Problèmes liés à l’information sur les filets sociaux Les données globales sur les filets sociaux sont incomplètes. Toute tentative d’évaluation des coûts des programmes de filets sociaux existants se heurte à de graves problèmes de disponibilité et de fiabilité des données, notamment ƒ Les données sur les dépenses extrabudgétaires des bailleurs de fonds et ONG peuvent souvent être dans un format non comparable. En particulier, les données sur certaines dépenses non gouvernementales peuvent ne pas être annualisées, rendant toute analyse chronologique difficile. La multitude des bailleurs de fonds dans le secteur est également étonnante et complique la collecte des données et leur analyse. Les dépenses publiques, présentées sur une base budgétaire annuelle, peuvent donc être surreprésentées par rapport aux autres contributeurs. De plus, même pour les programmes financés par les bailleurs de fonds, les dépenses risquent de paraître plus modérées que dans la réalité. ƒ Pour les dépenses inscrites au budget, comme pour celles de protection sociale, il est évident que le système de classification budgétaire n’est pas bien adapté pour une prise de décision sur les filets sociaux. Par exemple, aucune estimation n’est disponible pour les soins de santé gratuits pour les pauvres ni pour les montants consacrés aux indigents. Ces dépenses ne sont pas budgétisées, et à moins que des rapports spécifiques ne soient établis, les informations financières sur les montants des subventions et des transferts monétaires ne sont pas disponibles. ƒ Dans la mesure du possible, les montants sont présentés sur une base nette, c’est-à-dire qu’ils correspondent aux montants réels des avantages fournis aux bénéficiaires ciblés. Dans certains cas, cependant, les coûts des programmes ne peuvent être ventilés entre les avantages et les autres coûts (frais de gestion, de transport, etc.) Dans ce cas, les données sont essentiellement fournies sur une base brute, ce qui peut entraîner une surestimation des avantages réels. Source: Auteurs. Page 59 3 8 T a b l e a u 9 : L i s t e d e s p r i n c i p a u x p r o g r a m m e s d e f i l e t s s o c i a u x e x i s t a n t s a u B u r k i n a F a s o , 2 0 0 8 - 2 0 0 9 P r o g r a m m e , a n n é e ( s ) A g e n c e ( s ) d ’ e x é c u t i o n G r o u p e ( s ) c i b l e ( s ) C o u v e r t u r e g é o g r a p h i q u e N o m b r e i n d i c a t i f d e b é n é f i c i a i r e s N i v e a u i n d i c a t i f d e s d é p e n s e s a n n u e l l e s S o u r c e ( s ) d e f i n a n c e m e n t s T R A N S F E R T S M O N É T A I R E S E T Q U A S I - M O N É T A I R E S T r a n s f e r t s m o n é t a i r e s a u x O E V ( C o m p o s a n t e 2 d u P A S S ) o c t . 2 0 0 8 - s e p t 2 0 1 0 R e c h e r c h e e t a c t i o n s u r l e s s o i n s c o m m u n a u t a i r e s o f f e r t s a u x O E V d a n s l e N a h o u r i S P - C N L S - I S T p o u r l e s i n t e r v e n t i o n s , e t l a B a n q u e m o n d i a l e p o u r l e s r e c h e r c h e s O E V P r o v i n c e d u N a h o u r i 6 5 0 0 e n f a n t s ( 2 0 0 9 ) 2 7 0 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) B a n q u e m o n d i a l e P r o g r a m m e d e c o u p o n s a l i m e n t a i r e s p o u r l e s m é n a g e s u r b a i n s ( E M O P 1 0 7 7 3 ) j a n v . 2 0 0 9 à j u i n 2 0 1 0 P A M e t M A S S N , C R S , C R B P e r s o n n e s i n d i g e n t e s e n m i l i e u u r b a i n V i l l e s d e O u a g a d o u g o u e t B o b o - D i o u l a s s o 3 3 8 9 1 5 p e r s o n n e s ( 2 0 0 9 ) 8 5 0 1 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) M u l t i l a t é r a l C o u p o n s a l i m e n t a i r e s p o u r l e s P V V I H ( f e m m e s e t e n f a n t s i n f e c t é s ) d é c . 2 0 0 8 - a o û t 2 0 0 9 C R S e t O C A D E S F e m m e s e t e n c e i n t e s e t e n f a n t s d e m o i n s d e 2 a n s i n f e c t é s p a r l e V I H R é g i o n s ( C e n t r e , C e n t r e s u d , C e n t r e e s t , C e n t r e o u e s t , H a u t s B a s s i n s , C a s c a d e s ) 2 2 2 0 p e r s o n n e s ( 2 0 0 9 ) 1 7 6 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 8 - 2 0 0 9 ) F o n d s m o n d i a l C o u p o n s a l i m e n t a i r e s p o u r l e s p a u v r e s e n m i l i e u u r b a i n s e p t . 2 0 0 8 - f é v . 2 0 0 9 C R S e t O C A D E S M é n a g e s p a u v r e s d e s z o n e s u r b a i n e s V i l l e s d e O u a g a d o u g o u & B o b o - D i o u l a s s o 1 9 0 0 m é n a g e s ( 2 0 0 8 / 2 0 0 9 ) 1 1 2 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 8 / 2 0 0 9 ) F o n d a t i o n G a t e s T R A N S F E R T S A L I M E N T A I R E S V e n t e d ’ a l i m e n t s à d e s p r i x s u b v e n t i o n n é s S t o c k d ’ i n t e r v e n t i o n S O N A G E S e t C O N A S U R S e l o n l e s c r i t è r e s d é f i n i s p a r l e C O P R O S U R / C O D E S U R - Z o n e s e n s i t u a t i o n d ’ i n s é c u r i t é a l i m e n t a i r e 1 8 0 0 0 0 0 p e r s o n n e s ( 2 0 0 8 ) 1 , 9 m i l l i a r d s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 8 - 2 0 0 9 ) É t a t D i s t r i b u t i o n c i b l é e d e v i v r e s S e c o u r s g é n é r a l C R S e t p a r t e n a i r e s P V V I H , o r p h e l i n s , e n f a n t s m a l n u t r i s , p e r s o n n e s â g é e s , v e u v e s , e t c . 2 3 p r o v i n c e s 1 4 8 5 0 p e r s o n n e s ( 2 0 0 8 ) 2 4 2 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 8 / 2 0 0 9 ) U S A I D A i d e a l i m e n t a i r e a u x p o p u l a t i o n s v u l n é r a b l e s e t a u x m é n a g e s v i c t i m e s d e c a t a s t r o p h e s M A S S N e t C O N A S U R P o p u l a t i o n s v u l n é r a b l e s e t m é n a g e s v i c t i m e s d e c a t a s t r o p h e s N a t i o n a l 4 4 3 0 0 p e r s o n n e s ( 2 0 0 8 ) 3 1 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 2 - 2 0 0 8 ) É t a t Page 60 3 9 P r o g r a m m e , a n n é e ( s ) A g e n c e ( s ) d ’ e x é c u t i o n G r o u p e ( s ) c i b l e ( s ) C o u v e r t u r e g é o g r a p h i q u e N o m b r e i n d i c a t i f d e b é n é f i c i a i r e s N i v e a u i n d i c a t i f d e s d é p e n s e s a n n u e l l e s S o u r c e ( s ) d e f i n a n c e m e n t s P r o g r a m m e V i v r e s c o n t r e é d u c a t i o n ( C P 1 0 3 9 9 . 0 C o m p o s a n t e 1 : i i . A l p h a b é t i s a t i o n ) 2 0 0 6 - 2 0 1 0 P A M e t p a r t e n a i r e s P e r s o n n e s f r é q u e n t a n t l e s c e n t r e s d ’ a l p h a b é t i s a t i o n 1 1 p r o v i n c e s ( S a h e l , E s t , C e n t r e e t C e n t r e N o r d ) 2 0 3 0 0 f e m m e s 1 6 3 4 8 h o m m e s ( 2 0 0 9 ) 2 2 4 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) M u l t i l a t é r a l , É t a t N u t r i t i o n C o m p l é m e n t n u t r i t i o n n e l a u x e n f a n t s m a l n u t r i s e t a u x f e m m e s e n c e i n t e s e t a l l a i t a n t e s ( P R R O 1 0 5 4 1 . 0 2 0 0 7 - 2 0 0 9 e t P R R O 2 0 0 5 4 2 0 1 0 - 2 0 1 1 ) P A M e t p a r t e n a i r e s E n f a n t s m o d é r é m e n t m a l n u t r i s e t f e m m e s e n c e i n t e s e t a l l a i t a n t e s S a h e l , N o r d , E s t , S u d - o u e s t , C e n t r e - n o r d e t C e n t r e - s u d 3 1 2 0 0 0 p e r s o n n e s 4 9 0 0 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) M u l t i l a t é r a l , É t a t S o u t i e n a l i m e n t a i r e a u x g r o u p e s v u l n é r a b l e s e t P V V I H ( C P 1 0 3 9 9 . 0 c o m p o s a n t e 2 ) 2 0 0 6 - 2 0 1 0 P A M e t p a r t e n a i r e s P e r s o n n e s m o d é r é m e n t m a l n u t r i e s C e n t r e , N o r d , C e n t r e - n o r d , C e n t r e - s u d , E s t , S u d - o u e s t , C a s c a d e s , H a u t s B a s i n s , M o u h o u n ) 2 0 5 0 0 p e r s o n n e s ( 2 0 0 9 ) 2 1 7 5 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) M u l t i l a t é r a l , É t a t T r a i t e m e n t e t p r é v e n t i o n d e l a m a l n u t r i t i o n a i g u ë p o u r l e d é v e l o p p e m e n t e t l a s u r v i e d e l ’ e n f a n t 2 0 0 6 - 2 0 1 0 U N I C E F e t p a r t e n a i r e s E n f a n t s d e m o i n s d e 3 a n s e t f e m m e s e n c e i n t e s e t a l l a i t a n t e s a t t e i n t s d e m a l n u t r i t i o n s é v è r e 5 r é g i o n s l e s p l u s t o u c h é e s p a r l a m a l n u t r i t i o n 1 7 0 0 0 e n f a n t s ( 2 0 0 9 ) 3 7 9 0 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) M u l t i l a t é r a l P r i s e e n c h a r g e d e s e n f a n t s a t t e i n t s d e m a l n u t r i t i o n a i g u ë s é v è r e – 2 0 0 7 - 2 0 1 0 M é d e c i n s s a n s f r o n t i è r e s - F r a n c e e t C S P S E n f a n t s d e 6 à 5 9 m o i s a t t e i n t s d e m a l n u t r i t i o n a i g u ë s é v è r e 2 3 C S P S d a n s l e s p r o v i n c e s d u P a s s o r é e t d u L o r o u m 1 8 0 0 0 e n f a n t s 1 4 7 6 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) M S F , E C H O R é d u c t i o n d e l a m o r t a l i t é i n f a n t i l e e t d e l a m a l n u t r i t i o n 2 0 0 7 - 2 0 1 0 C r o i x R o u g e b e l g e e t b u r k i n a b é f e m m e s e n c e i n t e s e t a l l a i t a n t e s e t e n f a n t s e n b a s â g e 1 8 0 v i l l a g e s d a n s l e s r é g i o n s d u N o r d , d u S a h e l e t d u S u d - o u e s t n / a 4 7 2 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) E C H O R é d u c t i o n d e l a m a l n u t r i t i o n a i g u ë e t d e l a m o r t a l i t é d e s e n f a n t s d e m o i n s d e 5 a n s e t d e s f e m m e s e n c e i n t e s e t a l l a i t a n t e s 2 0 0 7 - 2 0 1 0 T e r r e s d e s h o m m e s e t H e l e n K e l l e r I n t e r n a t i o n a l F e m m e s e t e n f a n t s m a l n u t r i s D i s t r i c t s d e T o u g a n , S é g u é n é g a , G a y é r i e t F a d a n / a n / a E C H O P r é v e n t i o n e t t r a i t e m e n t d e l a m a l n u t r i t i o n a i g u ë 2 0 0 8 - 2 0 1 0 A c t i o n c o n t r e l a f a i m E n f a n t s d e 6 à 5 9 m o i s a t t e i n t s d e m a l n u t r i t i o n s é v è r e D i s t r i c t s a n i t a i r e d e D i a p a g a , p r o v i n c e d e l a T a p o a n / a 5 2 7 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) E C H O U r g e n c e n u t r i t i o n n e l l e p o u r l e s e n f a n t s 2 0 0 8 - 2 0 1 0 S a v e t h e C h i l d r e n U K E n f a n t s d e 6 à 5 9 m o i s a t t e i n t s d e m a l n u t r i t i o n s é v è r e D i s t r i c t d e K a y a , r é g i o n d u C e n t r e - N o r d n / a 4 1 2 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) E C H O C a n t i n e s s c o l a i r e s ( e t r a t i o n s à e m p o r t e r ) Page 61 4 0 P r o g r a m m e , a n n é e ( s ) A g e n c e ( s ) d ’ e x é c u t i o n G r o u p e ( s ) c i b l e ( s ) C o u v e r t u r e g é o g r a p h i q u e N o m b r e i n d i c a t i f d e b é n é f i c i a i r e s N i v e a u i n d i c a t i f d e s d é p e n s e s a n n u e l l e s S o u r c e ( s ) d e f i n a n c e m e n t s C a n t i n e s s c o l a i r e s d u p r i m a i r e ( c a n t i n e s e n d o g è n e s ) d e p u i s 1 9 8 8 M E B A É l è v e s d u p r i m a i r e d e s é t a b l i s s e m e n t s p u b l i c s 2 2 p r o v i n c e s 7 1 1 0 0 0 é l è v e s d e 3 5 6 5 é c o l e s ( 2 0 0 8 / 2 0 0 9 ) 4 , 5 m i l l i a r d s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 8 / 2 0 0 9 ) É t a t , C A S T , C o m m u n a u t é s C a n t i n e s s c o l a i r e s d u s e c o n d a i r e M E S S R S É l è v e s d u s e c o n d a i r e d a n s l e s é t a b l i s s e m e n t s p u b l i c s N a t i o n a l 2 0 7 0 0 é l è v e s d a n s 3 1 0 é t a b l i s s e m e n t s ( 2 0 0 8 - 2 0 0 9 ) 7 5 0 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 8 / 2 0 0 9 ) É t a t , C o m m u n a u t é s C a n t i n e s s c o l a i r e s a s s i s t é e s d a n s l e s é c o l e s p r i m a i r e s d e p u i s 1 9 6 2 C R S e t p a r t e n a i r e s É l è v e s d e s é t a b l i s s e m e n t s p u b l i c s , p r i v é s e t c o m m u n a u t a i r e s 1 9 p r o v i n c e s 2 4 5 9 0 0 é l è v e s d e 1 3 2 8 é c o l e s ( 2 0 0 8 - 2 0 0 9 ) 2 , 3 m i l l i a r d s d e f r a n c s C F A F ( 2 0 0 9 ) U S A I D , C o m m u n a u t é s C a n t i n e s s c o l a i r e s a s s i s t é e s d a n s l e s b i s o n g o C R S e t p a r t e n a i r e s L e s e n f a n t s f r é q u e n t a n t l e s b i s o n g o n / a 4 0 2 9 e n f a n t s d e 4 1 b i s o n g o ( 2 0 0 9 ) 4 8 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) U S A I D , C o m m u n a u t é s C a n t i n e s s c o l a i r e s a s s i s t é e s d a n s l e s é c o l e s B R I G H T C R S a v e c T i n T u a e t F A W E L e s f i l l e s d e s é c o l e s B R I G H T 1 0 p r o v i n c e s 3 0 0 0 f i l l e s d a n s 1 3 é c o l e s 1 3 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) U S A I D , C o m m u n a u t é s C a n t i n e s s c o l a i r e s a s s i s t é e s ( C P 1 0 3 9 9 . 0 C o m p o s a n t e 1 ) d e p u i s 2 0 0 2 P A M e t p a r t e n a i r e s L e s é l è v e s d u p r i m a i r e 4 p r o v i n c e s d u S a h e l 8 6 0 0 0 é l è v e s d e 6 4 0 é c o l e s ( 2 0 0 9 / 2 0 1 0 ) 8 6 4 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) M u l t i l a t é r a l , É t a t , C o m m u n a u t é s S U B V E N T I O N S D E S P R O D U I T S A L I M E N T A I R E S E T P E T R O L I E R S S o u t i e n u n i v e r s e l i n d i r e c t d e s p r o d u i t s a l i m e n t a i r e s S t o c k n a t i o n a l d e s é c u r i t é S O N A G E S n / a n / a n / a n / a É t a t , b a i l l e u r s d e f o n d s E x e m p t i o n d e t a x e s e t d e d r o i t s M E F / D G D n / a N a t i o n a l n / a 4 , 3 m i l l i a r d s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 8 ) É t a t S o u t i e n u n i v e r s e l i n d i r e c t d e s p r o d u i t s p é t r o l i e r s E x e m p t i o n d e t a x e s s u r l e s p r o d u i t s p é t r o l i e r s D o u a n e s , S O N A B E L , S O N A B H Y e t d i s t r i b u t e u r s p r i v é s n / a N a t i o n a l n / a 2 1 , 7 m i l l i a r d s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) É t a t T R A V A U X P U B L I C S P r E s t ( P r o g r a m m e d e d é s e n c l a v e m e n t d e l ’ E s t ) 2 0 0 2 - 2 0 1 1 H e l v e t a s e t M I D L e s j e u n e s e n p r i o r i t é 9 c o m m u n e s d a n s l e s p r o v i n c e s d e l a G n a g n a , d u G o u r m a e t d e l a T a p o a 8 6 5 p e r s o n n e s ( 2 0 0 5 - 2 0 0 7 ) 4 7 8 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 2 - 2 0 1 1 ) C o o p é r a t i o n S u i s s e V i v r e s c o n t r e i n f r a s t r u c t u r e ( C P 1 0 3 9 9 . 0 c o m p o s a n t e 3 ) 2 0 0 6 - 2 0 1 0 P A M e t p a r t e n a i r e s P o p u l a t i o n d e s v i l l a g e s c i b l é s 1 8 p r o v i n c e s 3 0 8 0 0 f e m m e s e t 3 1 4 0 0 h o m m e s ( 2 0 0 9 ) 2 9 4 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( 2 0 0 9 ) M u l t i l a t é r a l , É t a t E X E M P T I O N D E S F R A I S D E S A N T E Page 62 4 1 P r o g r a m m e , a n n é e ( s ) A g e n c e ( s ) d ’ e x é c u t i o n G r o u p e ( s ) c i b l e ( s ) C o u v e r t u r e g é o g r a p h i q u e N o m b r e i n d i c a t i f d e b é n é f i c i a i r e s N i v e a u i n d i c a t i f d e s d é p e n s e s a n n u e l l e s S o u r c e ( s ) d e f i n a n c e m e n t s S u b v e n t i o n s u p p l é m e n t a i r e p o u r l e s s o i n s o b s t é t r i c a u x e t n é o n a t a u x d ’ u r g e n c e ( S O N U ) d e p u i s 2 0 0 6 M i n i s t è r e d e l a s a n t é F e m m e s e n c e i n t e s i n d i g e n t e s N a t i o n a l n / a 5 0 0 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( a l l o u é , n o n d é p e n s é ) É t a t , B a n q u e m o n d i a l e ( C A S R P ) S u p p r e s s i o n d e s f r a i s p o u r l e s i n d i g e n t s d e p u i s 2 0 0 7 M i n i s t è r e d e l a s a n t é e t O B C P V V I H i n d i g e n t s N a t i o n a l n / a 3 7 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A ( y c o m p r i s l e s A G R ) É t a t P r i s e e n c h a r g e d e s i n d i g e n t s s o u s A R V F o n d s n a t i o n a l d e s o l i d a r i t é I n d i g e n t s s o u s A R V N a t i o n a l 2 0 0 p e r s o n n e s 4 0 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A É t a t G r a t u i t é d e s s o i n s p o u r l e s f e m m e s e n c e i n t e s e t l e s e n f a n t s d e m o i n s d e 5 a n s d e p u i s s e p t . 2 0 0 8 H E L P E n f a n t s d e m o i n s d e 5 a n s e t f e m m e s e n c e i n t e s e t a l l a i t a n t e s D i s t r i c t s s a n i t a i r e s d e S e b a e t D o r i d a n s l e S a h e l 1 0 0 0 0 0 p e r s o n n e s 5 0 0 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A E C H O G r a t u i t é d e s s o i n s p o u r l e s f e m m e s e n c e i n t e s e t l e s e n f a n t s d e m o i n s d e 5 a n s T e r r e d e s H o m m e s E n f a n t s d e m o i n s d e 5 a n s T o u g a n , S é g u é n é g a n / a 6 4 0 m i l l i o n s d e f r a n c s C F A E C H O G r a t u i t é d u t r a i t e m e n t p o u r l e s P V V I H – 2 0 0 1 - 2 0 0 9 M é d e c i n s s a n s f r o n t i è r e s - L u x e m b o u r g P V V I H D i s t r i c t d e O u a g a d o u g o u n / a n / a n / a G r a t u i t é d u t r a i t e m e n t d u p a l u d i s m e – 2 0 0 8 / 2 0 0 9 M é d e c i n s s a n s f r o n t i è r e s - F r a n c e e t l e s C S P S L e s p e r s o n n e s a t t e i n t e s d e p a l u d i s m e D i s t r i c t d e T i t a o 4 0 0 0 0 c a s 4 9 m i l l i o n s d e F C F A ( 2 0 0 8 / 2 0 0 9 ) M S F , E C H O N B : C e t t e l i s t e e s t l o i n d ’ ê t r e e x h a u s t i v e , m a i s l e s p r i n c i p a u x p r o g r a m m e s d e f i l e t s s o c i a u x e x i s t a n t s a u B u r k i n a F a s o y f i g u r e n t . I l p e u t y a v o i r b e a u c o u p d ’ a u t r e s i n i t i a t i v e s d e p e t i t e s O N G o u d e c o l l e c t i v i t é s l o c a l e s à t r a v e r s l e p a y s , q u i f o u r n i s s e n t d e s t r a n s f e r t s s o c i a u x a u x p e r s o n n e s / m é n a g e s p a u v r e s o u v u l n é r a b l e s . L a p l u p a r t o n t é t é j u g é e s t r o p p e t i t e s e t i s o l é e s p o u r ê t r e p r i s e s e n c o m p t e . P o u r t a n t , c e r t a i n s p e t i t s p r o j e t s o n t é t é i n c l u s p a r c e q u ’ i l s s e m b l e n t f a i r e p r e u v e d ’ i n n o v a t i o n e t ê t r e d e s e x e m p l e s d i g n e s d ’ i n t é r ê t . S o u r c e : A u t e u r s . Page 63 42 Niveau des dépenses dans les filets sociaux 81. En dehors des subventions générales des produits pétroliers et autres subventions temporaires des produits alimentaires, la dépense totale dans les programmes de filets sociaux représentait en moyenne 0,6 % du PIB entre 2005 et 2009 . Ce chiffre est compara ble à la dépense moyenne du Mali dans les filets sociaux de 2006 à 2009 18 . Une récente étude mondiale a conclu que les programmes de filets sociaux dans les pays en développement étaient généralement de l’ordre de 1 à 2 % du PIB, voire moins [Grosh et coll. 2008]. Le Burkina semble donc se situer au bas de l’échelle en termes de dépenses dans les filets sociaux. Avec quelque 0,6 % du PIB, les dépenses dans les filets sociaux n’atteignent donc pas le quart du montant indicatif minimum nécessaire pour élever tous les pauvres au niveau du seuil de pauvreté grâce à des transferts monétaires en 2007, soit moins de 50 % du montant minimum requis pour amener les plus pauvres et les plus vulnérables jusqu’au seuil de pauvreté. De même, comme indiqué au Tableau 10, les dépenses par pauvre (hors subventions universelles des produits alimentaires et pétroliers) représentaient environ 3 % du seuil de la pauvreté en 2007. Toujours en excluant les subventions, le montant dépensé dans les filets sociaux par habitant était de l’ordre de 3 % du PIB par habitant. 18 Mali : Filets sociaux, Banque mondiale 2010. Page 64 43 Tableau 10 : Dépenses totales dans les programmes de filets sociaux, 2005-2009 Type de programme 2005 2006 2007 2008 2009 2010 (*) 1. Transferts monétaires et quasi-monétaires - - - 284 9 021 4 359 2. Transferts alimentaires 7 378 11 195 13 760 22 130 25 047 34 714 2.1 Ventes à prix subventionné ciblées - 248 239 1 644 2 144 2 144 2.2 Distributions alimentaires ciblées 273 1 400 558 407 497 563 2.3 Nutrition - 1 940 5 873 12 001 13 771 12 692 2.4 Cantines scolaires 7 106 7 608 7 090 8 079 8 635 19 315 3. Subventions universelles 16 726 21 999 23 757 26 340 21 730 24 500 3.1 Subventions alimentaires universelles - - - 4 263 - - 3.2 Subventions énergétiques universelles 16 726 21 999 23 757 22 077 21 730 24 500 4. Travaux publics 945 865 651 1 075 772 913 5. Exemptions de frais - - 311 1 162 1 249 1 118 5.1 Exemptions de frais de santé - 311 1 162 1 249 1 118 TOTAL (million de FCFA) 25 050 34 059 38 478 50 991 57 818 65 603 TOTAL (% du PIB) 0,88% 1,13% 1,19% 1,40% 1,52% 1,62% TOTAL subventions alimentaires et énergétiques exclues (million de FCFA) 8 324 12 060 14 721 24 651 36 088 41 103 TOTAL subventions alimentaires et énergétiques exclues (% du PIB) 0,3% 0,4% 0,5% 0,7% 0,9% 1,0% Dépense par habitant en termes nominaux (FCFA), y compris subventions universelles 487 1 944 2 366 3 188 3 591 Dépense par habitant en termes réels (2005=100) (FCFA) 487 1 886 2 226 2 909 3 178 Dépense par pauvre en termes nominaux (FCFA) 1 205 6 145 7 084 Dépense par pauvre en termes réels (CFAF) : - subventions universelles comprises 1 205 5 781 6 464 - subventions universelles exclues 1 205 2 054 2 708 (*) Les données pour l’année 2010 sont présentées à titre indicative seulement. Source : Auteurs . 82. Les dépenses dans les filets sociaux ont augmenté de manière constante (Tableau 10 et Figure 8 ). Les dépenses dans les filets sociaux sont passées de 0,3 % du PIB en 2005 à environ 0,9 % du PIB en 2009, subventions non comprises. Avec les exonérations fiscales et douanières sur les importations de carburant, et les exemptions fiscales temporaires de 2008 sur les importations de produits alimentaires, les dépenses dans les filets sociaux ont atteint 1,4 % et 1,5 % du PIB en 2008 et 2009 respectivement. Les exonérations fiscales pour diverses importations de vivres en réponse à la flambée des cours des produits alimentaires ont atteint environ 0,1 % du PIB en 2008. Ainsi, le coût de la subvention générale des produits alimentaires a absorbé moins de 8 % des dépenses totales dans les filets sociaux en 2008. Toutefois, en 2008, le coût de cette subvention générale des produits alimentaires représentait près de 13 % de l’ensemble des filets sociaux financés par l’État. 83. La hausse générale du niveau des filets sociaux en valeur réelle montre la rapidité de la réponse de l’État et des bailleurs de fonds aux crises alimentaire et pétrolière de 2008 . Les dépenses totales dans les filets sociaux, mesurées en francs CFA de 2005, ont enregistré une hausse de 10 % en 2007 contre 2 9% en 2008, et 10 % en 2009. Page 65 44 La croissance est, toutefois, beaucoup plus spectaculaire sans les subventions universelles 18 % en 2007 contre 63 % en 2008 et 42 % en 2009. 84. L’augmentation des dépenses dans les filets sociaux s’explique en grande partie par les efforts importants réalisés dans les programmes de transferts alimentaires, notamment les ventes de produits alimentaires à des prix subventionnés, les programmes nutritionnels et la distribution ciblée de vivres . Un programme de transfert s monétaires et un autre de travaux publics, impliquant tous deux des décaissements importants en 2008, ont compromis la croissance des filets sociaux de cette année. En revanche, les subventions aux consommateurs des produits pétroliers (exonération de la TVA) n’ont enregistré qu’une hausse marginale en 2008, même si elles restent néanmoins, la composante la plus importante des filets sociaux financés par l’État, soit 65% (voir ci-dessous pour plus de détails). Figure 8 : Évolution des dépenses dans les filets sociaux au cours du temps, 2005-2009 NB : Les données de 2010 sont présentées à titre purement indicatif. Source: Auteurs. 85. Les dépenses dans les filets sociaux sont diminuées par la combinaison de celles dans la santé et l’éducation ainsi que celles dans les autres secteurs sociaux (toutes les activités définies comme contribuant à la réduction de la pauvreté 19 ) (Tableau 11). Les montants consacrés aux filets sociaux semblent dérisoires au regard de l’importance de toutes les dépenses sociales dans le budget (y compris la santé et l’éducation). Étant donné l’importance de l’ensemble des dépenses sociales dans le budget (y compris la santé et l’éducation), les montants consacrés aux filets sociaux semble insignifiants. Les dépenses combinées de santé et d’éducation en 2008 représentaient près de 14 fois les montants consacrés aux filets sociaux, hors subventions alimentaires. Cependant, les dépenses financées par des ressources nationales dans la santé, l’éducation et les filets sociaux, en dépit d’une nette progression en valeur nominale et en pourcentage du PIB entre 2005 et 2009, comme indiqué au Tableau 11, n’ont pas progressé de la même manière que les dépenses totales financées par les ressources nationales (financement PPTE compris). Les dépenses en faveur de l’enseignement fondamental sont restées en 19 En dehors de la santé et de l’enseignement fondamental, ceux-ci incluent les programmes sociaux du ministère de la Promotion de la femme, du ministère de la Jeunesse, du Travail et de l’Emploi, de celui des Infrastructures (routes rurales), du ministère de l’Agriculture, su ministère des Ressources animales, du ministère de l’Environnement, du ministère de l’Information, du ministère de la Justice, du ministère des Mines et de l’Énergie, le ministère de l’Économie et des Finances, ainsi que certaines dépenses courantes. Page 66 45 moyenne légèrement supérieures à 14 % du total des dépenses financées par des ressources nationales. Les dépenses de santé sont tombées juste en dessous de 10 %, contre moins de 1 % des dépenses totales pour les ressources nationales consacrées aux filets sociaux, ce qui suggère que l’augmentation des dépenses dans ces secteurs est proportionnelle à la croissance de l’ensemble des ressources nationales. 86. Plus précisément, ce qui précède implique que l’importance des secteurs sociaux (éducation, santé, et filets sociaux) est restée pratiquement inchangée dans l’agenda des priorités de l’État. L’aide extérieure à la santé et à l’éducation a subi des variations (Figure 9). Les trois secteurs se caractérisent par une forte dépendance aux financements extérieurs, mais celui des filets sociaux semble dépendre de plus en plus des bailleurs de fonds. Tableau 11 : Dépenses sociales (y compris les financements PPTE 20 et hors financements extérieurs) 2005 2006 2007 2008 2009 (*) 2010 (**) Enseignement fondamental (en milliards de francs CFA) 59,6 74,7 74,9 81,9 98,5 109,2 en pourcentage du PIB 21 % 2,5 % 2,3 % 2,2 % 2,6 % 2,7 % en pourcentage des dépenses financées par les ressources nationales et PPTE 14,5 % 15,9 % 13,7 % 13,4 % 14 % 15,3 % Santé (en milliards de francs CFA) 37,1 47,9 56,9 57,7 69,8 83,8 en pourcentage du PIB 1,3 % 1,6 % 1,8 % 1,6 % 1,8 % 2,1 % en pourcentage des dépenses financées par les ressources nationales et PPTE 9 % 10,2 % 10,4 % 9,5 % 9,9 % 11,8 % Autres dépenses sociales (en milliards de francs CFA) 65,1 44,6 50,8 58,9 91,2 81,5 o/w Routes rurales 3,7 3,9 2,7 3,8 3,4 4,1 o/w ministère de l’Action sociale et de la Solidarité nationale 5.1 5,1 5,4 5,4 n/a n/a en pourcentage du PIB 2.3 % 1,5 % 1,6 % 1,6 % 2,4 % 2 % en pourcentage des dépenses financées par les ressources nationales et PPTE 15.9 % 9,5 % 9,3 % 9,7 % 13 % 11,4 % Filets sociaux financés par les ressources nationales (hors subventions universelles) (en millions de francs CFA) 2,8 3,7 4,1 5,9 7,2 4,5 en pourcentage du PIB 0,1 % 0,1 % 0,1 % 0,2 % 0,2 % 0,1 % en pourcentage des dépenses financées par les ressources nationales et PPTE 0,7 % 0,8 % 0,8 % 1 % 1 % 0,6 % (*) prévu, (**) budgétisé Sources : Revue des dépenses publiques, Banque mondiale, 2009 FMI auteurs. 20 PPTE (Pays pauvres très endettés). Les montants dépensés sous cette rubrique correspondent aux dépenses publiques équivalentes à l’allègement de la dette au titre de l’Initiative PPTE. Page 67 46 Figure 9 : Part de l’enseignement fondamental, de la santé et des filets sociaux dans le total des dépenses financées par des ressources intérieures et extérieures Source: Auteurs. Structure du financement des filets sociaux 87. Le financement des programmes de filets sociaux dépend largement et de plus en plus des bailleurs de fonds . Hors subventions universelles, la part des financements extérieurs consacrés aux filets sociaux est passée de 57 % environ en 2005 à 69 % en 2008 et 76 % en 2009. En incluant les subventions des produits alimentaires et pétroliers, cette hausse des dépenses extérieures dans les filets sociaux était de moins de 20 % du total des dépenses en 2006 contre plus de 48 % en 2009. Lorsqu’on exclut les subventions pour les produits alimentaires et pétroliers, on note entre 2005 et 2009, une légère hausse des dépenses publiques en pourcentage du PIB, de 0,1 à 0,2 % du PIB. 88. Les bailleurs de fonds font preuve d’un engagement clair en faveur d’un financement accru des filets sociaux. Le financement des bailleurs de fonds a enregistré une forte hausse (comme indiqué dans les chiffres susmentionnés), passant de près de 0,2 % du PIB en 2005 à 0,7 % en 2009, soit une augmentation en valeur réelle (francs CFA de 2005) à peu près multipliée par cinq. 89. En dehors de la subvention des produits alimentaires et pétroliers, la priorité des bailleurs de fonds et des États va aux programmes à caractère alimentaire. Sur la base des données disponibles, les programmes de distribution et de vente ciblées de vivres, de nutrition et de cantines scolaires (tous des programmes à caractère alimentaire) représentaient 90 % des dépenses totales dans les filets sociaux en 2005 et tournaient toujours autour de 70 % en 2009. Au titre de ces programmes, les bailleurs de fonds ont massivement investi dans les cantines scolaires et la nutrition tandis que les pouvoirs publics dépensaient dans les cantines scolaires mais à peine dans la nutrition. Si les données sur les ventes et distribution de vivres étaient finalisées, ce tableau s’en trouverait sans doute quelque peu modifié. Il est intéressant de noter l’apparition des transferts monétaires et quasi-monétaires en 2008 au Burkina alors que les dépenses dans les travaux publics, exclusivement financés par les bailleurs de fonds, enregistraient une baisse d’environ 10 % du total en 2005 à 2 % en 2009. 90. La structure des dépenses révèle des priorités différentes entre l’État et les bailleurs de fonds. Pour les années dont les données sont disponibles (2005 à 2009), les priorités des pouvoirs publics ont essentiellement porté sur les subventions universelles. Les dépenses pour la subvention des produits pétroliers ont augmenté en 2008 suite à la Page 68 47 flambée des cours du pétrole. En 2005, la part de subvention dans le montant total des filets sociaux financés par l’État représentait plus de 80 %, et atteignait encore 77 % en 2008 (Tableau 12) Tableau 12 : Priorités de l’État et des bailleurs de fonds par programme en 2008 État (%) Bailleurs de fonds (%) 1. Transferts monétaires et quasi-monétaires n/a 2 2. Transferts alimentaires 19 92 2.1 Vente ciblée d’aliments à des prix subventionnés 5 n/a 2.2 Distribution ciblée de vivres 0 2 2.3 Nutrition 1 67 2.4 Cantine scolaire 13 23 3. Subventions universelles 77 0 3.1 Subventions universelles des produits alimentaires 13 0 3.2 Subventions universelles des produits pétroliers 65 0 4. Travaux publics n/a 6 5. Exemption des frais (santé) 3 40 Total 100 100 Source: Auteurs. Encadré 4 : Problèmes de gestion budgétaire au Burkina Faso Indépendamment du niveau de financement des filets sociaux, des problèmes de décaissement des fonds, de suivi, de surveillance, d’évaluation et de redevabilité ont été évoqués dans d’autres rapports . Le décaissement des fonds publics est entravé par la lenteur et l’extrême longueur d’un processus marqué par de multiples contrôles ex-ante , en partie responsable des taux d’exécution irréguliers, même s’il s’améliore. C, comme le montre le tableau ci-dessous, pour le ministère de la Santé, le ministère de l’enseignement fondamental et le ministère de l’Action sociale et de la Solidarité nationale. Les problèmes de décaissement semblent aussi prévaloir dans le cas du budget complémentaire de 2009 comprenant 25,7 milliards de francs CFA de mesures sociales, dont 8,4 milliards non encore décaissés en avril 2010. Il est intéressant de noter en particulier la lenteur des décaissements sur les investissements financés par des ressources extérieures, avec une moyenne d’un peu plus de 60 % entre 2004 et 2008. Il s’agit là d’une préoccupation importante dans les secteurs tels que les filets sociaux où le financement extérieur domine largement. Taux d’exécution budgétaire 2004-2008 2004 (%) 2005 (%) 2006 (%) 2007 (%) 2008 (%) Budget total (y compris financement extérieur et PPTE) 95 93 96 98 97 Budget d’investissement total financé par des ressources extérieures 66 60 70 74 43 Ministère de l’Enseignement fondamental et de l’Alphabétisation (y compris financement extérieur et PPTE) 83 78 120 112 93 Ministère de la Santé (y compris financement extérieur et PPTE) 99 100 104 102 96 Ministère des Affaires sociales et de la Solidarité nationale (ressources nationales uniquement) n.d. 98 100 98 95 La nomenclature budgétaire ne permet pas de suivre les dépenses liées aux filets sociaux, et aucun mécanisme n’est actuellement en place pour le suivi des dépenses de protection sociale et de filets sociaux . La nomenclature budgétaire est basée sur la directive de 1998 de l’UEMOA. Même si une nouvelle classification fonctionnelle a été introduite en 2007 (sur la base du Manuel international de statistiques financières), elle ne permet pas de faire la distinction entre les programmes de filets sociaux. Il s’agit d’une responsabilité partagée de différents ministères, y compris de petits ministères comme le MASSN, qui n’ont Page 69 48 ni la capacité ni les ressources nécessaires pour suivre et encore moins évaluer les programmes de filets sociaux. Par ailleurs, comme ind iqué dans d’autres rapports, les préoccupations fiduciaires restent importantes au Burkina, en raison de la faiblesse des mécanismes de contrôle . Comme mentionné dans l’Examen des dépenses publiques, l’efficience et l’efficacité des contrôles internes réalisés par l’Inspection générale des finances (IGF) et l’Autorité supérieure du contrôle d’État sont affectées par le manque de moyens et, dans le cas de l’IGF, une indépendance insuffisante. La Cour des Comptes, créée en 2000, n’a pas encore réussi à fonctionner au plein de son potentiel à cause de ses ressources limitées et du fait qu’elle dépend du ministère des Finances pour sa dotation en personnel. À l’issue de l’évaluation 2007 des dépenses publiques et de la responsabilité financière (PEFA), la notation du pays en ce qui concerne le contrôle interne des ressources publiques montre que des défis continuent à empêcher la création d’un environnement à faible risque fiduciaire au Burkina. Contrôle interne des dépenses publiques Contrôle du paiement des salaires (note C +) Même lorsque les dossiers d’emploi et les données des paiements sont bien synchronisés et que les changements sont bien documentés, les retards dans les ajustements de l’emploi ou les rémunérations entraînent de nombreux ajustements rétroactifs et les vérifications des paiements effectifs sont partielles. Contrôle des dépenses non salariales: (Note C +) Les mécanismes de contrôle des engagements existent, mais ne sont pas exhaustifs. Même si les règles sont généralement bien comprises et appliquées, des simplifications et des procédures d’urgence sont utilisées sans justification, suscitant des inquiétudes par rapport à leur régularité. Transparence de la passation des marchés publics (Note C +) Bien que des mécanismes efficaces soient en place pour les plaintes, il y a peu d’informations disponibles pour évaluer les processus de passation des marchés, et les justifications du recours à des méthodes moins concurrentielles sont insuffisantes. Efficacité des contrôles internes (Note D +) La couverture des contrôles est partielle et ne répond pas aux normes internationales. En outre, les rapports sont peu nombreux et strictement internes. Les recommandations résultant des contrôles internes sont habituellement ignorées. Note : Évaluation des dépenses publiques et de la responsabilité financière (2007). (Les notes vont de A à D, A étant la meilleure et D la moins bonne) Source : GovBF PER, Banque mondiale, 2009 et Évaluation des dépenses publiques et de la responsabilité financière (GovBF 2007). 91. La couverture des programmes de filets sociaux actuels est limitée par rapport aux besoins. L’estimation théorique du nombre des bénéficiaires des programmes de filets sociaux (en faisant l’hypothèse qu’il n’y a aucun chevauchement entre les programmes et en excluant les subventions générales) dépassait les 3,9 millions de personnes en 2009, soit près de 25 % de la population totale du Burkina Faso 21 . Ce pourcentage est toutefois trompeur. La plupart des bénéficiaires sont concernés par la vente de produits alimentaires à des prix subventionnés (Figure 10). Et la couverture de ces ventes subventionnées n’est que temporaire et le niveau des prestations est très faible (Tableau 13). Ainsi, ces questions doivent être prises en compte dans l’estimation de la couverture réelle des programmes de filets sociaux existants. 21 Sur la base d’une population totale de 15,8 millions d’habitants (à la mi-2009) Page 70 49 Figure 10 : Nombre indicatif des bénéficiaires des programmes de filets sociaux par an, 2009 Source : Auteurs. Tableau 13 : Bénéficiaires et allocation budgétaire par programme au Burkina Faso, 2009 Type Programmes Nombre de bénéficiaires Budget annuel en millions de francs CFA francs CFA par bénéficiaire et par an % du seuil de pauvreté 1. Transferts monétaires et quasi-monétaires 359 062 9 021 25 128 27% 2.1 Ventes d’aliments à des prix subventionnés 1 800 000 2 144 1 191 1% 2.2 Distributions ciblées de vivres 95 878 497 5 184 6% 2.3 Nutrition 377 362 13 771 36 493 39% 2.4 Cantines scolaires 1 070 649 8 635 8 065 9% 4. Travaux publics 63 065 772 12 241 13% 5.1 Exemption des frais de santé 140 200 1 249 8 909 9% Total (couverture potentielle) 3 906 216 36 089 9 239 10% % de la population couverte 25% Total (couverture potentielle) hors ventes subventionnées 2 106 216 33 945 16 116 17% % de la population couverte 13% % de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté 43% Note : Le niveau des transferts n’inclut pas les coûts administratifs qui peuvent être élevés pour les programmes de nutrition Le seuil de pauvreté considéré en 2009 était de 93 949 francs CFA par personne et par an Source : Auteurs . Options pour l’accroissement des budgets consacrés aux filets sociaux 92. Comme l’ont souligné d’autres examens, le soutien des revenus actuels des pauvres est un choix politique raisonnable, mais le système actuel de filets sociaux semble trop limité pour constituer une réponse appropriée à la pauvreté et à la vulnérabilité. Comparé aux besoins, la couverture des pauvres par les filets sociaux doit Page 71 50 s’accroître sensiblement qu’une différence soit perceptible dans la vie des pauvres. En outre, la grande dépendance des programmes de filets sociaux vis-à-vis des bailleurs de fonds montre que l’État doit jouer un rôle plus important dans l’organisation, la consolidation et la pérennisation des différentes composantes du système de filets sociaux, afin de le rendre soutenable. 93. En rais on de leurs contraintes budgétaires, les pouvoirs publics doivent répartir des ressources limitées entre les programmes appuyant les revenus des pauvres, promouvant l’éducation des filles, ou étendant le stock toujours limité du capital physique public, tel que les routes. Dans un débat élargi, il faut garder ces considérations à l’esprit, surtout dans le contexte de la crise économique actuelle où les dépenses dans le capital humain peuvent être menacées par les pressions exercées sur les ressources financières. 94. Les coûts du maintien des filets sociaux au niveau actuel (environ 1% du PIB en 2009) peuvent être élevés à long terme, même si cette option peut sembler attrayante à court terme 22 . Dans ce cas, la politique financière devrait se focaliser sur le maintien des dépenses dans les secteurs sociaux à leur niveau actuel par rapport au PIB. L’arbitrage devrait se concentrer sur la promotion ou l’intensification des programmes les plus rentables (Tableau 14). 22 En effet, comme l’a récemment souligné un rapport de la Banque mondiale [Document d’information préparé par le personnel du Groupe de la Banque mondiale pour la rencontre des dirigeants du G-20 à Pittsburgh, États-Unis, du 24-25 septembre 2009]: « Même un léger repli peut avoir un impact coûteux et de longue durée sur le bien-être des personnes, étant donné que les familles qui ont peu d’opportunités d’emploi alternatif et peu ou pas d’accès au crédit sont obligées de réduire leur consommation alimentaire, même celle des enfants en bas âge, ou de retirer leurs enfants de l’école. Les crises passées ont montré que les enfants privés de nourriture à court terme peuvent subir des dommages à long terme. Ces éventuels effets indésirables soulignent l’importance d’une protection des dépenses de base, y compris dans la santé et l’éducation, face à la baisse brutale des revenus. » Page 72 51 Tableau 14 : Options de développement des programmes de filets sociaux Type de programme de filets sociaux Groupe cible 10 % les plus pauvres 20 % des urbains les plus pauvres 20% des ruraux les plus pauvres 1. Transferts directs Bénéficiaires – Ménages 200 000 28 770 357 135 Bénéficiaires – Personnes (7 personnes par ménage) 1 400 000 201 390 2 499 943 Transfert/ménage/mois (FCFA) 10 967 10 967 10 967 Transfert/personne/an (FCFA) 18 800 18 800 18 800 Coût total des transferts milliards de FCFA par an 26,3 3,8 47,0 2. Travaux publics Bénéficiaires – Travailleurs 200 000 85 705 Bénéficiaires – Individus (7 personnes par ménage) 1 400 000 599 932 Salaire/jour (FCFA) 1 000 1 000 Jours (5 mois à 20 jours/mois) 100 50 Transfert/travailleur/an (FCFA) 100 000 50 000 Transfert/personne/an (FCFA) 14 286 7 143 Coût total des transferts milliards de FCFA par an 20,0 4,3 En considérant 20 % d’apports 24,0 5,1 Personnes par projet 100 100 Nombre de projets 2 000 857 3. Transferts monétaires conditionnels bourses d’études Montant des bourses/an sur une base de 10 mois en FCFA 15 000 Nombre d’enfants de 5 à 9 ans non scolarisés 690 780 20 % des enfants de 5 à 9 ans non scolarisés les plus pauvres 138 156,0 Coût total des transferts milliards de FCFA par an 2,07 En pourcentage du PIB (2009) 0,05 % En pourcentage des dépenses publiques (2009) 0,2 % 4. Nutrition ciblant les enfants pauvres de 0 à 5 ans Coût moyen des programmes par habitant/an (en francs CFA) 7 000 Nombre de bénéficiaires (enfants pauvres de moins de 5 ans) 1 339 650 Coût total des transferts milliards de FCFA par an 9,4 En pourcentage du PIB (2009) 0,2 % En pourcentage des dépenses publiques (2009) 0,9 % Notes : i) Transfert monétaire annuel de 18 880 FCFA par personne (20 % du seuil de pauvreté de 2009) ; ii) Salaire basé sur 2/3 du salaire minimum (environ 20 000 FCFA par mois) et 20 jours de travail par mois. Sources : Banque mondiale, UNICEF, Auteurs . 95. La première possibilité, ou « option progressive », est l’extension progressive de certains programmes de filets sociaux efficaces et complémentaires (programmes de nutrition et de travaux publics), ainsi que l’introduction de programmes permanents de transferts monétaires. À titre indicatif, une augmentation des dépenses dans les filets sociaux pour cette option consisterait par exemple, à doubler le montant (en pourcentage du PIB) dépensé dans les programmes de filets sociaux à moyen terme, ce qui porterait le total des dépenses à 2 % environ du PIB. L’avantage de cette option est de conserver le contrôle des coûts de financement des filets sociaux tout en garantissant leur gérabilité et en contenant les risques fiduciaires associés aux programmes de grande envergure. Les inconvénients sont que cette option ne permet pas d’éradiquer complètement la pauvreté, même si un programme de filets sociaux bien conçu, atteignant 2 % du PIB, pourrait réduire l’extrême pauvreté de manière significative. Les programmes Page 73 52 à petite échelle devraient également être protégés d’une approche par coups de frein et d’accélérateur (pour atténuer les risques d’une telle approche, on pourrait choisir de renforcer et étendre les programmes existants). Le Tableau 14 montre quelques exemples hypothétiques de programmes qui pourraient être financés dans le cadre de cette option pour donner une idée du nombre de personnes pouvant être couvertes par chaque type de programme. Les coûts pourraient être réduits en sélectionnant les programmes les plus rentables ou en modifiant le montant des ressources entre les programmes et le nombre des bénéficiaires à couvrir. Il convient de rappeler que les montants estimés représentent les avantages nets et qu’ils ne prennent pas en compte l’ensemble des coûts liés à la gestion des programmes. Une marge doit donc y être ajoutée pour les coûts de fonctionnement. 96. La deuxième option est une approche plus agressive de réduction de la pauvreté par des programmes à l’échelle nationale. L’avantage évident de cette option est de s’attaquer à la pauvreté de manière significative. Les défis sont nombreux et importants, y compris les questions financière et fiduciaire. Dans l’ensemble, cette option pourrait ne pas être réaliste pour le moment, étant donné qu’elle nécessite un meilleur ciblage des filets sociaux afin qu’ils touchent au moins une partie des personnes les plus pauvres, et qu’elle implique une importante mobilisation de ressources tout en courant le risque de compromettre d’autres secteurs importants tels que la santé et l’éducation. 97. Les options de financement d’une augmentation des filets sociaux posent le problème des recettes publiques . La Banque mondiale a examiné les différentes options d’augmentation des recettes publiques (Revue des dépenses publiques ou PER) dans le cadre des compromis à faire pour accroître les ressources et atteindre les OMD (avec un accent particulier sur la santé, l’éducation et l’agriculture). Le récent PER s’inspire du modèle MAMS 23 pour examiner les alternatives présentées dans l’Encadré 5, étant donné que cette question est également pertinente pour le problème du financement supplémentaire des filets sociaux. 98. Quatre options de base sont généralement envisagées pour l’accroissement des recettes publiques : i) la réallocation des dépenses dans le cadre des contraintes financières existantes ; ii) une augmentation du financement des bailleurs de fonds sur les recettes nationales à des conditions concessionnelles ; iii) l’emprunt ; et iv) l’augmentation des recettes intérieures (par l’imposition ou une meilleure perception des recettes). Les avantages et inconvénients de chacune de ces options sont résumés dans le tableau ci-dessous et brièvement discutés dans le contexte du Burkina Faso. 23 Maquette de simulation des objectifs du Millénaire pour le développement. Page 74 53 Encadré 5 : Leçons tirées de l’analyse de l’assiette fiscale du Burkina Faso, à l’aide du modèle MAMS En ce qui concerne les options d’augmentation des recettes publiques en vue d’atteindre les OMD, aucun des scénarios ne domine les autres, d’où la nécessité d’envisager des compromis. Par exemple, ce qui pourrait le plus réduire la pauvreté d’ici 2015, c’est une augmentation, financée par l’aide, des dépenses dans les infrastructures. Cependant, concentrer les ressources de l’aide sur les dépenses dans le développement humain devrait produire de meilleurs résultats sur les indicateurs des OMD liés à l’éducation et à la santé. Il y a donc un compromis à faire entre les OMD, de même qu’entre les sources d’augmentation des recettes publiques. Par exemple, la mobilisation d’une aide supplémentaire permet d’augmenter l’absorption intérieure et d’éviter la résistance politique que peut faire naître l’identification de sources nationales de recettes publiques (exemple le lobbying des contribuables contre la hausse des impôts ou des changements dans la structure fiscale), mais elle est potentiellement moins fiable (et permanente) que les sources nationales de recettes, et accroît la dépendance de l’État vis-à-vis de l’aide des bailleurs de fonds. En fin de compte, ces compromis doivent se faire au niveau national, en tenant compte des préférences spécifiques de chaque pays. L’analyse des recettes publiques fondée sur un modèle peut donc aider à identifier et quantifier les éventuels compromis. Accroître en valeur réelle les services d’éducation et de santé prend du temps. Le Burkina Faso a, ces dernières années, déjà réalisé d’énormes progrès dans ces domaines, et l’on prévoit d’importantes avancées au niveau des OMD liées à la santé et à l’éducation dans les prochaines années. Mais l’expansion significative de ces services par rapport aux niveaux de référence peut poser des défis, car elle requiert des capacités dont le renforcement prend du temps. L’augmentation des dépenses dans ces domaines exige donc une préparation minutieuse afin d’aligner le rythme de l’augmentation des dépenses sur la capacité des programmes d’éducation et de formation à produire des travailleurs bien formés. Il peut également s’avérer nécessaire de suivre les tensions salariales pour éviter que de fortes augmentations de la masse salariale n’entravent les autres dépenses. Les dépenses d’infrastructure favorisent non seulement la croissance, mais également la réalisation d’autres OMD. Dans le MAMS, l’infrastructure a un impact positif direct sur les OMD liés à l’éducation et à la santé parce qu’elle facilite la prestation de ces services. Elle a aussi un impact indirect à travers une croissance plus forte, des revenus par habitant plus élevés augmentant la demande de ces services. Dans les simulations, les dépenses infrastructurelles permettent d’améliorer sensiblement les indicateurs des OMD liés à l’éducation et la santé à travers ces deux canaux. Cependant, il faut quelques années, pour que cela se produise effectivement. Source : Gottschalk et coll., 2009. Page 75 54 Tableau 15 : Options pour l’augmentation des budgets des filets sociaux: Avantages et inconvénients Méthodes de financement Avantages Défis Réallocation des dépenses ƒ Financement des programmes dans les limites budgétaires ƒ Augmentation de la productivité globale des dépenses publiques ƒ Gains d’efficacité par la réduction des dépenses improductives ƒ Faisabilité à court terme à petite échelle surtout si les « fruits les plus faciles à cueillir » peuvent être identifiés pour ces réductions ƒ Pas de fonds supplémentaires par rapport au budget ƒ Selon les montants à dégager, Ces options peuvent nécessiter un d’engagement important des pouvoirs publics pour la mise en œuvre des compromis ƒ Peut être difficile à mettre en œuvre si des réallocations à grande échelle s’imposent cette option exigerait une analyse détaillée des programmes de dépenses publiques et des engagements à moyen terme de l’État. Financement par les bailleurs de fonds ƒ Financements concessionnels ou dons ƒ Augmentation de l’enveloppe globale ƒ Un soutien budgétaire est nécessaire pour plus de souplesse dans l’utilisation des fonds ƒ Caractère cyclique du financement, et tendance à la baisse à moyen terme ƒ Problèmes de coordination des bailleurs de fonds ƒ Besoin d’une augmentation significative du soutien au nouveau budget ƒ Besoin d’un engagement important et durable des bailleurs de fonds en faveur de l’harmonisation et de la continuité pour des programmes progressifs ou à plus grande échelle. Emprunt ƒ Financement de l’expansion temporaire des programmes en temps de crise ƒ Moindre dépendance vis-à-vis des bailleurs de fonds ƒ Le Burkina Faso coure un grand risque de surendettement ƒ Accord du FMI pour les emprunts non concessionnels ƒ Impact excessif sur la croissance ƒ Plus onéreux que le financement concessionnel Augmentation des recettes nationales ƒ Option pouvant être plus soutenable que les autres ƒ Nécessité d’une meilleure gestion fiscale ƒ Offre des financements sécurisés à court terme ƒ Peut avoir un effet de redistribution ƒ Si réalisée à travers une plus forte imposition, les coûts économiques peuvent avoir des impacts directs et indirects sur l’économie, ce qui affecterait la croissance économique et en fin de compte, les pauvres d’où la nécessité d’une analyse de l’incidence de la taxation ƒ Le rendement de l’augmentation des taxes peut être limité du fait de l’étroitesse de l’assiette fiscale et du faible ratio des revenus par rapport au PIB. Impopularité politique et éventuelles conséquences néfastes sur les pauvres. Source : Auteurs . Page 76 55 Option 1 – Réallocation des dépenses 99. La première option, la réallocation des dépenses dans le respect des contraintes budgétaires, requiert une analyse approfondie des allocations et de l’efficacité des dépenses, qui va au-delà du champ du présent rapport. Cependant, étant donné les énormes besoins des secteurs tels que l’éducation et la santé, et d’autres qui sont importants pour la croissance et la lutte contre la pauvreté, l’idée est que les allocations à ces secteurs soient au minimum maintenues et que des gains d’efficacité et d’équité soient recherchés (voir Examen des dépenses publiques, Banque mondiale, 2009). 100. Dans les secteurs prioritaires comme l’éducation, les dépenses publiques doivent devenir plus efficaces et pro-pauvres . L’Examen des dépenses publiques (Banque mondiale 2009) a précisément montré qu’en dépit d’une hausse constante des dépenses publiques dans l’éducation (de 10 % des dépenses totales en 2000 à 16,6 % en 2008) et d’une augmentation du taux brut de scolarisation, de 40 % en 2000 à 65 % en 2007, les inégalités filles-garçons restent importantes en matière d’accès à l’éducation. Par ailleurs, l’accès à l’éducation est limité pour les enfants des zones rurales et des familles pauvres. Ces inégalités se renforcent mutuellement de sorte que le taux brut de scolarisation n’est que de 40 % parmi les familles les plus pauvres des zones rurales. L’analyse du profil de la pauvreté montre que les dépenses consacrées à l’éducation doivent devenir pro-pauvres. La restructuration des dépenses en faveur d’une amélioration de l’offre éducative ne suffit pas. La demande d’éducation doit également bénéficier d’un appui. Pour stimuler la demande dans ce contexte, les filets sociaux permettant d’augmenter le revenu des parents, (par exemple, à travers des transferts monétaires ou en nature) et d’autres programmes d’appui à la scolarisation pourraient s’avérer importants, surtout pour les filles. 101. De même, dans le secteur de la santé, malgré une hausse constante des dépenses de santé (de 7,7 % du budget à 9,2 % en 2008), et l’amélioration de certains indicateurs de santé (exemple les accouchements assistés et la couverture vaccinale), des inégalités subsistent entre régions au niveau de l’offre de services de santé. L’accès aux services de santé a même chuté dans 7 des 13 régions. Les dépenses de santé publique pourraient être orientées vers des programmes explicitement en faveur des pauvres, tels que les programmes de nutrition et d’exemption de frais couverts par les filets sociaux. Par exemple, sur la base des coûts des programmes de nutrition évoqués dans la section 24 précédente, une augmentation de ces programmes au profit des enfants pauvres de moins de 5 ans (estimés à environ 1,3 millions) se chiffrerait autour de 9,2 milliards de francs CFA (en supposant un coût annuel de 7 000 francs CFA par enfant), soit près de 0,9 % du total des dépenses publiques en 2009. 102. Pour financer ces besoins ainsi qu’une extension progressive des programmes de filets sociaux, l’État pourrait se tourner vers des dépenses moins productives, y compris dans d’autres secteurs « sociaux », et identifier des programmes dont l’efficacité est moindre ou très faible en matière de réduction de la pauvreté . Tel est le cas de la subvention des importations de produits pétroliers et des programmes de logements sociaux, qui ne semblent pas bien cibler les plus démunis. Sur le plan fonctionnel, cela pourrait impliquer un examen minutieux de catégories telles que les dépenses non affectées ainsi que les Services généraux et l’Administration publique qui absorbent 27 % du budget 2007-2009, soit l’équivalent des dépenses combinées dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Sur la base de l’Examen des dépenses publiques, en raison du niveau élevé des dépenses d’exploitation et maintenance de ces catégories, il y a 24 Nous partons de l’hypothèse d’un coût moyen de 12 000 francs CFA/an par bénéficiaire pour les programmes nutritionnels en faveur des enfants de moins de 5 ans et des mères. Page 77 56 un risque de perte de contrôle des coûts liés, par exemple, aux véhicules, au carburant, aux déplacements, etc. Sur la base des chiffres du budget 2009, un gain d’efficacité de 10 % sur ces dépenses pourraient représenter près de 0,6 % du PIB, soit à peu près l’équivalent du coût annuel estimatif d’un transfert monétaire de 18 800 francs CFA au décile le plus pauvre de la population (hors coûts d’administration et de ciblage). 103. De façon plus générale, des estimations très approximatives des gains d’efficacité dans les dépenses publiques, par exemple, un gain de 10 % sur les dépenses discrétionnaires (biens et services, transferts courants et investissements financés sur les ressources nationales) pourraient représenter jusqu’à 1,5 % du PIB , ce qui permettrait de faire en grand pas en direction de la mise en place des programmes de filets sociaux décrits plus haut tout donnant au gouvernement une position de leadership au niveau de la promotion et du financement d’un système cohérent de filets sociaux. Option 2 – Augmentation de l’appui extérieur concessionnel 104. Un plus grand financement des bailleurs de fonds peut être une option à court terme, le Burkina étant susceptible de rester fortement dépendant des bailleurs de fonds à moyen terme et ces derniers s’intéressant de plus en plus au financement des filets sociaux. L’intérêt des bailleurs de fonds pour les filets sociaux ressort également de la composition et de l’évolution des programmes soutenus par les bailleurs de fonds au Burkina depuis 2005, comme évoqué dans la section précédente. 105. Les problèmes liés au financement extérieur comprennent le fait que l’aide étrangère reste dominée par les projets au détriment du soutien budgétaire . Sur la base des estimations et prévisions du FMI, le ratio des projets par rapport aux programmes était de l’ordre de 1 en 2008. Ce ratio devrait, toutefois, passer à 2,5 dans les prochaines années 25 . Cette tendance fait ressortir la fragmentation de l’aide et ne permet pas d’envisager facilement des réformes sectorielles dans tout secteur largement dominé par l’aide étrangère. Une autre préoccupation par rapport au financement extérieur est le faible niveau de décaissement en faveur des investissements, précédemment souligné (voir Encadré 4). En moyenne, entre 2004 et 2008, le décaissement des fonds extérieur représentait environ 50 % des montants prévus. 106. Le financement des bailleurs de fonds devrait augmenter à l’avenir avec le recul de la récession dans les pays industrialisés, et sa volatilité actuelle diminuer à moyen terme. Le financemen t des bailleurs de fonds est très sensible aux cycles économiques. En conséquence, l’imprévisibilité du financement extérieur pourrait augmenter dans les prochaines années. Cette volatilité peut aggraver l’approche par coups de frein et d’accélérateur due au caractère imprévisible du financement. À moyen terme, les prévisions envisagent une réduction de l’aide étrangère en pourcentage du PIB selon les prévisions du FMI 26 , le financement extérieur devrait descendre de 11,4 % du PIB à 10,8 % en 2013. En outre, plus important encore, un déséquilibre de financement supplémentaire entre les bailleurs de fonds et l’État dans le financement des filets sociaux pourrait également créer une situation insoutenable à moyen terme, non seulement en termes financiers mais également en termes de cohérence et de gérabilité de l’ensemble du système des filets sociaux. 25 Burkina Faso Rapport des services du FMI pour les consultations de 2009 au titre de l’Article IV, cinquième examen au titre de la Facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance et demandes d’augmentation de l’accès et de modification des critères de performance, j anvier 2010. Page 78 57 Option 3 – Emprunt 107. La proposition d’emprunt à des conditions non concessionnelles est très risquée pour le Burkina, à l’heure actuelle . L’Analyse conjointe de la viabilité de la dette (DSA) réalisée par le FMI/Banque mondiale a classé le Burkina parmi les pays à haut risque de surendettement. La mise en œuvre d’une politique budgétaire prudente, limitant les emprunts extérieurs aux prêts concessionnels, améliorant la gestion de la dette publique et fixant un objectif de déficit soutenable, s’impose pour stabiliser les ratios d’endettement à long terme [FMI 2009a]. Option 4 – Augmentation des recettes intérieures 108. L’État a adopté en 2009 des mesures visant à réformer le système d’imposition, qui devraient augmenter les recettes, même s’il s’agit d’une base en baisse en pourcentage du PIB. Ces mesures incluent l’introduction de l’impôt sur les sociétés, la rationalisation du code d’investissement, et le renforcement du système de la TVA. Selon les prévisions du FMI, ces mesures devraient permettre d’augmenter les recettes intérieures de 0,9 % du PIB en 2011, de 0,6 % en 2012, et de 0,4 % en 2013. L’allocation aux filets sociaux d’une partie de cette augmentation pourrait être envisagée, étant entendu que des mesures supplémentaires seraient nécessaires pour assurer la viabilité des programmes de filets sociaux. En outre, de nombreux pays, développés et en développement, exonèrent les ménages les plus pauvres du paiement des impôts. L’exonération fiscale des plus pauvres pourrait effectivement être une mesure utile pour soutenir la consommation des ménages pauvres. Mais bien entendu, cela pose à nouveau la question de la capacité de ciblage. CHAPITRE IV : Revue DES PROGRAMMES INDIVIDUELS DE FILETS SOCIAUX EXISTANTS La plupart des programmes de filets sociaux du Burkina Faso fournissent une assistance temporaire et sont généralement introduits durant les périodes de chocs, ce qui les rend moins appropriés pour lutter contre la pauvreté chronique. Les interventions existantes sont souvent basées sur une approche projet, concentrées sur une zone géographique, et il n’y a aucune approche systématique pour venir en aide aux ménages pauvres et vulnérables. Les principaux défis sont les difficultés à définir les groupes cibles (pauvres et vulnérables) la sélection des instruments adéquats et la mise en place de solides systèmes de suivi et évaluation pour éclairer les décisions relatives aux politiques. Les récentes initiatives innovantes telles que les coupons alimentaires, les transferts en espèces et l’exemption des frais de santé permettent de tirer d’importantes leçons dont on peut s’inspirer pour améliorer l’efficacité des programmes de filets sociaux existants et potentiellement en augmenter l’envergure. Les transferts alimentaires représentent la principale forme de programmes de filets sociaux au Burkina Faso, représentant 69 % des dépenses en faveur des filets sociaux et plus de 80 % du nombre total estimé des bénéficiaires des filets sociaux en 2009 (hors subvention du carburant). Parmi ces programmes, les cantines scolaires, financées à parts presque égales par l’État et les partenaires au développement, représentent un des principaux programmes de filets sociaux, avec 24 % des dépenses en faveur des filets sociaux et environ 38 % du nombre total estimé des bénéficiaires des filets sociaux. Des programmes de nutrition sont mis en œuvre avec l’appui de bailleurs de fonds, mais ils sont encore insuffisants pour faire face aux problèmes de malnutrition infantile aiguë. Il faut des politiques nationales plus proactives. La subvention universelle du carburant Page 79 58 par l’État est très coûteuse (0,7 % du PIB en 2007) et a un effet très limité sur le décile le plus pauvre (84 % des avantages vont aux non pauvres). Les programmes de travaux publics, soutenus par des financements extérieurs, proposent des expériences intéressantes qui pourraient aider à développer des instruments efficaces de filets sociaux. Enfin, la mise en place d’un programme national de subvention/exemption des frais pour la santé est entravée par l’absence de critères de ciblage clairs et de mécanismes de mise en œuvre explicites. 109. Ce chapitre décrit comment chaque programme individuel du système existant pourrait être rendu plus efficace et peut-être étendu. Les programmes considérés sont i) les transferts monétaires et quasi-monétaires; ii) les transferts alimentaires (vente à prix subventionnés de produits alimentaires, distribution ciblée de produits alimentaires, programmes de nutrition et cantines scolaires) iii) les subventions universelles (produits alimentaires et carburant) iv) les travaux publics et v) les exemptions de frais. La conception et les performances de chaque type de programme sont discutées en tenant compte des bonnes pratiques internationales et d’un ensemble de critères de performance clés, tels que la pertinence, l’adéquation (couverture, niveau des avantages et durée), l’équité, le rapport coût-efficacité, (efficience et efficacité, adéquation des fonds alloués aux coûts administratifs), l’efficacité et la viabilité (budgétaire, politique et administrative) [Grosh et coll. 2008]. D. Transferts monétaires et quasi-monétaires 110. Des éléments probants montrent, au niveau international, que les transferts monétaires sociaux peuvent avoir un impact positif sur l’éducation, la santé, la nutrition, la sécurité alimentaire et la réduction de la pauvreté en général [Grosh et coll. 2008]. Les transferts monétaires sont susceptibles de permettre aux pauvres de mieux gérer les risques sociaux, et de générer toute une série d’impacts positifs. Premièrement, en fournissant un revenu en espèces, ils réduisent directement à court terme la pauvreté tant du revenu que des dépenses. Deuxièmement, étant donné les schémas types de consommation, les ménages pauvres consacrent une part significative de leurs dépenses à la nourriture, améliorant ainsi les résultats nutritionnels. Suivant les décisions d’allocations prises eu sein des ménages, une grande partie de ces dépenses devraient profiter aux enfants. Dans la plupart des cas, les transferts sociaux contribueront également à l’accumulation du capital humain des enfants, en particulier sous la forme d’une amélioration de la fréquentation et des résultats scolaires ainsi que de l’accès aux soins de santé de base. En outre, des signes en évolution indiquent que les transferts sociaux contribuent à une croissance économique pro-pauvre et inclusive. L’éventail des résultats contribue à la réduction de la pauvreté à long terme, en particulier en brisant la transmission intergénérationnelle du manque et de la privation. L’Annexe 2 présente des bonnes pratiques de conception des programmes de transferts monétaires sociaux, et l’Annexe 3 expose quelques bons exemples de programmes de transferts monétaires mis en place en Afrique. 111. Tirant profit des enseignements de l’expérience internationale, quelques programmes de transferts monétaires ont été récemment introduits au Burkina Faso le programme pilote de transferts monétaires CNLS-IST et les programmes de coupons alimentaires du CRS et du PAM. Ces programmes dépendent exclusivement d’un financement extérieur et sont mis en œuvre avec l’appui de partenaires internationaux. Transferts monétaires conditionnels et inconditionnels 112. La recherche-action entreprise dans le cadre du CNLS-IST devrait apporter des enseignements précieux sur le rôle des conditionnalités et du genre dans l’impact Page 80 59 des transferts monétaires. En 2008, le Conseil national de lutte contre le sida et les infections sexuellement transmissibles (CNLS- IST) et la Banque mondiale ont lancé une recherche-action dans la province de Nahouri dans le but d’évaluer le rôle des conditionnalités et du genre dans l’impact des transferts monétaires ciblant les orphelins 27 et autres enfants vulnérables 28 (OEV) sur la santé, l’éducation et le bien-être. Le programme couvre un total de 2 600 ménages (approximativement 18 000 personnes). Les villages de la zone d’intervention ont été répartis de manière aléatoire en cinq groupes et 650 ménages ont été sélectionnés également de manière aléatoire parmi les ménages éligibles dans chacun de ces groupes pour participer à la recherche-action (Tableau 16). Ce projet est une des quelques initiatives en Afrique qui visent à évaluer l’avantage comparatif des conditionnalités une recherche-action similaire est en cours en Zambie et au Kenya. Environ 40 % du budget total a été consacré à l’évaluation de l’impact. Les premiers résultats sont attendus au cours de 2010. Les résultats finaux sont attendus en 2011 et seront extrêmement utiles pour éclairer la conception de mécanismes appropriés pour assister les OEV, ainsi que les ménages pauvres en général. Tableau 16 : Groupes bénéficiaires de la recherche-action du CNLS-IST Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4 Groupe 5 Taille 15 villages 650 ménages 15 villages 650 ménages 15 villages 650 ménages 15 villages 650 ménages 15 villages 650 ménages Droits aux transferts monétaires Oui Oui Oui Oui Non (contrôle) Conditionnalité Non Non Oui Oui sans objet Niveau des avantages pour les enfants de 0 à 6 ans 1 000 francs CFA/trimestre 1 000 francs CFA/ trimestre conditionné par des visites à un centre de santé sans objet pour les enfants de 7 à 10 ans 2 000 francs CFA/ trimestre 2 000 francs CFA/ trimestre conditionné par l’assiduité scolaire (90 %) (classes CP1 à CE2) sans objet pour les enfants de 11 à 15 ans 4 000 francs CFA/ trimestre 4 000 francs CFA/ trimestre conditionné à l’assiduité scolaire (90 %) (classes CM1 à la 4 e ) sans objet Fréquence trimestriel trimestriel trimestriel trimestriel sans objet Bénéficiaire mère père mère père sans objet Source : SP/CNLS-IST, 2008. Coupons alimentaires 113. Les coupons alimentaires en milieu urbain sont un programme innovant qui a pour but d’assister les personnes extrêmement pauvres des milieux urbains . Mettant à profit leur expérience avec les coupons utilisés pour les concours de semences et ensuite dans les salons de l’alimentation et de la construction pour aider les ménages affectés par les inondations, Catholic Relief Services a lancé en 2008 un programme de coupons pour 27 Pour le CNLS- IST, un orphelin est un enfant de moins de 15 ans ayant perdu au moins l’un de ses parents biologiques. 28 Pour le CNLS-IST, un enfant vulnérable est un enfant vivant dans un ménage dont le revenu par personne est inférieur au seuil de pauvreté ou dans un ménage dont au moins un des membres est séropositif. Page 81 60 répondre à l’insécurité alimentaire accrue des zones urbaines, induite par la flambée des prix alimentaires. Le PAM a suivi en 2009 avec un programme plus vaste qui fournit actuellement des coupons alimentaires à plus de 30 000 ménages à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso (plus que 180 000 personnes) (Tableau 17). Tableau 17 : Principales caractéristiques des récents programmes de coupons alimentaires Programme Coupons alimentaires pour les pauvres urbains Coupons alimentaires pour les personnes infectées par le VIH Programme de coupons en zone urbaine Agence d’exécution CRS avec le réseau OCADES CRS avec le réseau OCADES et le district sanitaire PAM avec le MASSN, la CRB et la CRS Source de financement Fondation Gates Fonds mondial Multilatéral Zone d’intervention Urbaine Ouagadougou et Bobo-Dioulasso Centres de santé dans 6 régions Urbaine Ouagadougou et Bobo-Dioulasso Type de bénéficiaires 56 % des ménages dirigés par une femme + les personnes âgées + les professions précaires (maçon, mécanicien, gardien) Femmes enceintes et enfants de moins de 5 ans infectés par le VIH Ménages vivant dans l’extrême pauvreté Nombre de bénéficiaires 3 800 ménages 2 200 personnes 31 500 ménages Niveau des avantages (francs CFA/mois) 9 000 par ménage sans objet 1 500 par personne avec un plafond de 9 000 par ménage Durée 6 mois Sept. 2008-fév. 2009 8 mois Déc. 2008-août 2009 18 mois Jan. 2009-juin 2010 Source : CRS, PAM, Auteurs. 114. Les évaluations à mi-parcours du Programme de coupons alimentaires en milieu urbain du PAM font état d’un processus de mise en œuvre plutôt efficace et de résultats positifs, tout en soulignant les sérieux défis du ciblage en milieu urbain. Le recensement de 142 000 ménages effectué avant l’intervention a servi de base à la sélection des bénéficiaires pour un coût de 1 700 francs CFA par bénéficiaire. L’évaluation du ciblage a révélé des résultats décevants et recommandé la recherche d’une alternative, si possible plus simple, pour la sélection des bénéficiaires (Encadré 6). Une évaluation conjointe à mi-parcours (uniquement qualitative) réalisée en juin 2009 a révélé que la grande majorité des bénéficiaires étaient satisfaits de la gamme des produits offerts ainsi que du mécanisme de livraison. Les boutiquiers ont également indiqué leur satisfaction par rapport au programme. Le PAM a signalé que le programme de coupons coûtait 40 % de moins que la distribution de vivres classique. Ces résultats positifs ont justifié la prolongation du programme pour six mois supplémentaires, jusqu’à juin 2010. Depuis janvier 2010 le PAM a progressivement augmenté le nombre de bénéficiaires de 30 %. Le programme a dû être arrêté en juin 2010 par faute de financement. 115. L’équipe de l’évaluation à mi-parcours a recommandé que le programme soit maintenu de façon permanente pour les extrêmement pauvres qui ne peuvent pas travailler, suggérant que ce groupe reçoive également des chèques santé. Elle a en outre demandé le renforcement de la Politique nationale d’action sociale et du système de protection sociale en général. 29 Une boîte à outils a été développée pour capitaliser 29 L’équipe a en outre recommandé un certain nombre d’activités complémentaires, comprenant le dépistage de la malnutrition et la possible expansion des programmes de nutrition du PAM et de l’UNICEF à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso des activités de cantines scolaires (éventuellement avec des chèques ciblant Page 82 61 l’expérience et appuyer un transfert graduel du programme aux institutions nationales, et au mois d’avril 2010, un total de 142 travailleurs sociaux avaient déjà reçu une formation sur les filets sociaux et sur la mise en place des coupons alimentaires. Encadré 6 : Programme de coupons alimentaires du PAM En juin 2008, la mission conduite conjointement par le Burkina Faso, le Système des Nations Unies et Save the children pour évaluer l’impact de la hausse des prix alimentaires mondiaux dans les villes de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso a fait état d’une situation alarmante. En réponse à une demande officielle du gouvernement, le PAM a lancé un programme d’urgence fournissant des coupons alimentaires à 30 000 ménages indigents pour compenser leur perte de pouvoir d’achat, et des suppléments nutritionnels aux ménages pauvres et indigents des quartiers ciblés afin de prévenir la malnutrition. Objectifs Le programme a trois objectifs spécifiques i) protéger les conditions de vie en fournissant aux ménages bénéficiaires une compensation de leur perte de pouvoir d’achat à travers une distribution de coupons alimentaires inconditionnels ii) réduire la faim chronique et la sous-nutrition des enfants de 6 à 24 mois et des femmes enceintes et allaitantes à travers la distribution d’aliments fortifiés et iii) renforcer la capacité des pouvoirs publics à combattre la faim à travers l’établissement de filets sociaux. Ciblage L’exercice de ciblage a eu lieu en août 2008, utilisant le score de vulnérabilité établi par la Croix-Rouge burkinabé (CRB). Puisque le recensement de toute la population de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso aurait nécessité du temps et des ressources, une présélection des quartiers les plus pauvres a été organisée sur la base d’indicateurs économiques. Dans ces zones, un total de 89 835 ménages à Ouagadougou et de 48 290 à Bobo-Dioulasso a été soumis à une enquête et classé. La liste des bénéficiaires a ensuite été revérifiée par les comités locaux et les partenaires. Mais quand l’opération a réellement commencé en février 2009, environ 10 % des ménages sélectionnés n’ont pas pu être localisés (2 300 des 20 000 ménages de Ouagadougou) et ont été remplacés par les ménages éligibles qui suivaient dans la liste. L’évaluation du ciblage conduite par l’IRD en avril/mai 2009 signale des résultats décevants par rapport aux efforts entrepris, tout en concluant que tous les ménages bénéficiaires étaient dans le besoin. En prenant les dépenses alimentaires comme indicateurs de vulnérabilité alimentaire, l’évaluation a révélé qu’un tiers des ménages bénéficiaires étaient indigents (groupe ciblé), qu’un tiers étaient pauvres, et qu’un tiers l’étaient moins. L’IRD explique cette erreur d’inclusion par le fait que le score de vulnérabilité (basé sur des critères structurels) n’est pas approprié pour évaluer la pauvreté alimentaire (largement cyclique). Des contraintes budgétaires ont également causé une importante erreur d’exclusion. Considérant qu’environ 60 % de la population de Ouagadougou n’avait pas été visitée, l’IRD a estimé que plus que la moitié des ménages pauvres avait été exclue de fait. L’évaluation a également révélé de sérieux problèmes de collecte et de saisie des données. Le questionnaire était complexe et mal adapté à une intervention d’urgence à grande échelle et aucun logiciel adéquat de gestion des données n’avait été utilisé. Un autre problème mis en évidence est le fait que les ménages urbains déménagent et que leur statut change. L’évaluation à mi-parcours a noté que de nombreux ménages qui avaient été classés comme pauvres en 2008 étaient tombés dans la catégorie des indigents en 2009 et devenaient ainsi éligibles à l’aide. Ceci suggère que des mécanismes de re-ciblage devraient être introduits en cours de route. L’IRD a recommandé la recherche de méthodes alternatives, telles que le ciblage géographique à plus petite échelle, combiné à un ciblage communautaire et à un questionnaire léger pour les ménages présélectionnés. Forme, niveau et livraison des transferts Une analyse de marché menée en septembre 2008 a indiqué que les marchés fonctionnaient et étaient intégrés et que le risque d’inflation était faible, suggérant qu’une intervention monétaire était réalisable. Le PAM a choisi d’utiliser des coupons plutôt que des espèces pour s’assurer que les transferts étaient consacrés aux vivres, pour renforcer la sécurité des bénéficiaires et par crainte d’une mauvaise gestion des fonds (comme l’ont exprimé les groupes de réflexion au cours des discussions avec les femmes). L’option des coupons permet aussi de limiter la liste des produits accessibles à ceux qui sont produits localement. Certains bénéficiaires préféreraient probablement le riz, mais il est importé et beaucoup plus cher que le maïs. Tous les fonds injectés (2 600 millions de francs CFA en 2009) sont dépensés dans le pays. La valeur du coupon était fixée à 1 500 francs CFA par personne et par mois (jusqu’à maximum 6 personnes par ménage dans les ménages polygames, chaque femme et ses enfants étant considérés comme un ménage ce que le PAM estimait correspondre à 22 % du seuil de pauvreté, ou 15 à 18 jours de besoins en céréales). Les produits accessibles sont le maïs, l’huile végétale, le sucre, le sel et le savon. L’évaluation du ciblage a indiqué que ce niveau était approprié. Les expressément les écoliers indigents) des activités génératrices de revenu (en particulier pour les femmes) des programmes de formation professionnelle et de microcrédit pour les jeunes l’appui aux petites industries à Bobo l’appui à la production agricole et l’exemption des frais de santé. Elle a également suggéré de conditionner les chèques à l’assiduité scolaire dans une deuxième phase du programme, tout en reconnaissant que des écoles supplémentaires devraient être construites (il y a actuellement 100 à 200 élèves par classe dans les écoles publiques). Elle a aussi demandé une évaluation de la situation dans d’autres villes du pays. Page 83 62 échangent auprès d’une des boutiques participantes (une boutique pour 200 ménages bénéficiaires en moyenne). Le suivi post-distribution a révélé que 99 % des bénéficiaires échangeaient tous leurs coupons dans les deux jours suivant la distribution. Les boutiques participantes ont été sélectionnées en collaboration avec le ministère du Commerce et sont payées par l’institution de microfinance (Microfi). Les suppléments nutritionnels sont distribués par les agents du MASSN à travers les centres de santé de la zone d’intervention Plumpy-Doz (ou farine enrichie Nutrifaso-Gret) pour tous les enfants de 6 à 24 mois ayant un dossier médical à jour, et CSB pour toutes les femmes enceintes et allaitantes pendant la saison maigre. Impact L’évaluation à mi-parcours (examen qualitatif rapide) a indiqué que les économies sur les dépenses alimentaires générées par le programme étaient trop limitées pour permettre aux ménages bénéficiaires d’investir dans des activités génératrices de revenu, mais qu’elles avaient amélioré leur consommation alimentaire en qualité et en quantité, et, à un moindre degré, leur accès à la sante et à l’éducation. Les boutiques participantes ont fait état d’un effet positif sur leur chiffre d’affaires et sur la création d’emplois temporaires. Aucune inflation n’en a résulté et la majorité des boutiques non participantes n’a pas souffert de pertes dans leurs affaires. Sources : PAM, 2008a, 2008b, 2009a, 2009b IRD, 2009 Auteurs. 116. Une analyse complémentaire est prévue au cours du premier semestre de 2010 pour guider l’élaboration de mécanismes efficaces de filets sociaux pour les populations urbaines. À la fin de 2009, le PAM a élargi son programme de coupons pour aider 6 562 ménages supplémentaires affectés par les inondations. En plus des coupons, ces ménages (8 906 ménages) ont reçu pendant 4 mois des transferts monétaires mensuels de 1 500 francs CFA par personne (avec un plafond de 9 000 francs CFA par ménage). En fournissant cette assistance monétaire supplémentaire, le PAM voulait empêcher les ménages de revendre leurs coupons ou leurs vivres pour se procurer des matériaux pour la réparation de leurs maisons et des produits non alimentaires essentiels. Les coupons et l’argent étaient remis aux femmes. Le suivi post-distribution réalisé en mars 2010 renseignera sur la manière dont les fonds ont été utilisés et apportera peut être d’autres éclaircissements sur la question précédemment anticipée de leur gestion. L’évaluation finale du Programme de coupons en milieu urbain (qualitative et quantitative, avec une base de référence et un groupe témoin) lancée en avril 2010 devrait aussi apporter d’autres preuves et enseignements précieux pour la conception de filets sociaux efficaces en milieu urbain. E. Transferts alimentaires 117. Les transferts alimentaires sont la principale forme de programmes de filets sociaux au Burkina Faso, absorbant 69 % des dépenses totales pour les filets sociaux et plus que 80 % du nombre total estimé de bénéficiaires des filets sociaux en 2009 (hors subvention du carburant). L’enquête de 2003 sur les conditions de vie des ménages a signalé que 49 % de la population rurale était incapable de se procurer une ration alimentaire satisfaisante. Il en résulte une prévalence élevée de la malnutrition chronique, affectant près de 38,7 % des enfants, avec un taux élevé de mortalité infantile (2 enfants sur 10 meurent avant l’âge de cinq ans). Cette situation alarmante a motivé de nombreux acteurs à investir davantage dans les programmes de transferts alimentaires. Quatre types de transferts alimentaires sont actuellement en place i) subvention ciblée de la vente de vivres ii) distribution ciblée de vivres gratuits iii) programmes de nutrition, et iv) les programmes de cantines scolaires. Page 84 63 Vente d’aliments à des prix subventionnés 118. L’État subventionne les ventes de vivres en utilisant le Stock d’intervention. 30 Le Stock d’intervention de 10 000 tonnes de l’État a pour but d’assister les populations vivant dans les zones isolées ou affectées par une catastrophe, à travers la vente ciblée et subventionnée de vivres (par exemple, 10 000 francs CFA au lieu de 35 000 francs CFA par sac de 100 kg de sorgho ou de millet). L’utilisation du Stock d’intervention est décidée au niveau central définition des zones, prix subventionné et période d’opération. Un des objectifs de ces ventes subventionnées est de contribuer à la stabilité des prix des céréales dans les provinces déficitaires. Au cours de l’année agricole 2007-2008, les pouvoirs publics ont estimé que de tels effets avaient été obtenus dans plusieurs provinces, mais seulement pendant une brève période [RVCC 2008]. Un autre objectif est d’assister les ménages vulnérables à l’insécurité alimentaire. 119. Il n’y a pas d’information sur le nombre et les profils réels des bénéficiaires des ventes subventionnées de vivres. 31 Ni le CONASUR ni la SONAGESS, les agences responsables de la gestion et de la distribution des stocks de vi vres, n’ont d'informations sur les bénéficiaires de leurs programmes. En 2008, la SONAGESS a indiqué que la totalité du stock avait était utilisée, avec 20 000 tonnes supplémentaires empruntées au Stock national de sécurité (ou SNS). Près de 136 800 ménages auraient bénéficié de la vente de ces 30 000 tonnes si l’on prend en compte les besoins moyens trimestriels en céréales des ménages, 32 ou jusqu’à 300 000 ménages si les ventes étaient limitées à 100 kg par ménage. Ces chiffres indicatifs semblent cependant peu en ligne avec des données liées fournies par le Comité national de sécurité alimentaire (CNSA) 33 et le CONASUR 34 . 120. Ces ventes subventionnées peuvent ne pas atteindre les ménages les plus pauvres étant donné que les indigents peuvent tout simplement ne pas avoir les ressources financières pour acheter les céréales subventionnées proposées. Les critères d’éligibilité sont définis par le COPROSUR (Conseil provincial de secours d’urgence et de réhabilitation). Les chefs de ménages éligibles intéressés doivent s’enregistrer à la mairie du village et prendre livraison de leurs céréales à l’entrepôt de la SONAGESS (au niveau provincial ou départemental). Il n’est pas clair que les ventes soient faites sur la base du premier arrivé-premier servi et que les critères de vulnérabilité soient entièrement respectés. En l’absence d’un solide suivi et évaluation et de modalités efficaces d’identification des ménages vulnérables, il n’est pas possible d’évaluer l’efficacité du Stock d’intervention dans l’appui à la consommation alimentaire de pauvres. 30 Au 30 juin 2009, le niveau du Stock d’intervention était de 10 404,14 tonnes métriques, ce qui est conforme à son niveau habituel de 10 000 tonnes métriques, et était constitué de 91 % de maïs, millet, sorgho, 5 % de niébé et 4 % de riz local. 31 Le COPROSUR ne reçoit que 100 000 francs CFA par mois pour les activités de suivi et évaluation. 32 En considérant un ménage de 6 personnes et une ration journalière de 400 grammes de céréales par personne. 33 Le CNSA a estimé que pendant la période 2002-2008 le nombre de rations alimentaires journalières supplémentaires (400 g de céréales) distribuées à la fois à travers les ventes subventionnées et les distributions de vivres gratuits ont dépassé 100 millions, ce qui laisse à supposer qu’un total de (seulement) 40 000 tonnes de céréales a été distribué au cours de la période [SE-CNSA 2009]. 34 Le CONASUR a rapporté qu’en 2005 un total de 13 342,5 tonnes avait été distribué à travers les ventes subventionnées à un total de 552 611 ménages [CONASUR 2008a]. Ceci ne représenterait que 24 Kg par ménage soit les besoins moyens d’un ménage pour 10 jours seulement. Aucune donnée sur les tonnages et bénéficiaires des ventes subventionnées n’ait fournit pour les années 2006, 2007 et 2008 [CONASUR 2008a and 2008b]. Page 85 64 Tableau 18 : Stock d’intervention, situation au 31 décembre 2008 (en tonnes) Source : SONAGESS. Tableau 19 : Stock national de sécurité alimentaire, situation au 31 décembre 2008 (en tonnes) Centre Millet Sorgho Maïs Total Ouagarinter - - 1 350,54 1 350,54 CNSAO - 1 950,00 738,09 2 688,09 Kaya 500,00 500,00 - 1 000,00 Ouahigouya 500,00 1 000,00 - 1 500,00 Titao - 500,00 - 500,00 Djibo 525,00 - - 525,00 Gorom-Gorom 1 050,00 - - 1 050,00 Aribinda 1 557,10 - - 1 557,10 Dori 691,80 1 243,00 - 1 934,80 Total (tonnes) 4 823,90 5 193,00 2 088,63 12 105,53 Total (%) 40% 43% 17% 100% Source : SONAGESS. 121. Le CNSA envisage de soutenir davantage le processus de décentralisation en établissant des banques de céréales. Les rapports post- opération tendent à indiquer que les quantités reçues sont insuffisantes par rapport aux besoins. Le CNSA demande une augmentation du niveau des stocks nationaux 35 (Tableau 21) et une décentralisation plus poussée du processus avec la création de stocks communaux/communautaires. Le Plan d’urgence pour la sécurité alimentaire préparé pour la période 2008-2012 inclut l’établissement d’une banque de céréales dans chaque commune à moyen et long terme. La proposition prévoit 1 510 millions de francs CFA pour la construction des banques et 7 550 millions de francs CFA pour le stock initial. 36 35 Le niveau de 70 000 tonnes métriques défini il y a 10 ans n’a jamais été revu malgré l’énorme croissance démographique. 36 Le plan d’urgence de sécurité alimentaire développé pour la période 2008-2012 comprend à court terme des distributions alimentaires ciblées les cantines scolaires, la nutrition, les soins de santé de la mère et de Centre Millet Sorgho Maïs Total Ouagarinter 122,40 507,60 119,92 749,92 CNSAO - 307,30 - 307,30 Kaya 406,50 - 152,10 558,60 Ouahigouya - 360,70 - 360,70 Titao Djibo 450,00 - - 450,00 Dori 976,20 - - 976,20 Total (tonnes) 1 955,10 1 175,60 272,02 3 402,72 Total (%) 57% 35% 8% 100% Page 86 65 Tableau 20 : Nombre indicatif des bénéficiaires potentiels des stocks nationaux de sécurité Volume (tonnes) Nombre de rations individuelles par mois (*) Nombre de rations individuelles par trimestre (*) Nombre de rations trimestrielles par ménage (**) Stock d’intervention (SI) 10 000 822 000 274 000 45 600 Stock national de sécurité (SNS) 35 000 2 877 000 959 000 159 600 Stock financier (SF) 25 000 2 055 000 685 000 114 000 Total 70 000 5 754 000 1 918 000 319 200 (*) Sur base d’une ration journalière de 400 g de céréales. (**) Pour une taille moyenne des ménages de six membres Note : Le système central a une capacité de livraison de 365 tonnes (26 camions) Source : Auteurs. Distribution ciblée de vivres gratuits 122. Le pays ayant produit des surplus au cours des dix dernières années, le SNS n’a jamais été utilisé pour distribuer des vivres gratuits sur une grande échelle. L’utilisation du Stock national de sécurité (SNS) a été approuvée par le gouvernement et les bailleurs de fonds internationaux. Selon les critères définis dans le Plan national d’organisation et de coordination des secours d’urgence et de réhabilitation (PNOCSUR), dès qu’un déficit national de 5 % est enregistré, les vivres gratuits sont distribués pour répondre à l’urgence. La production céréalière du Burkina a augmenté en moyenne de 7 % par an pendant la période 1997-2007, avec un surplus moyen de 447 570 tonnes et un taux moyen de couverture annuelle de 115 % descendu à 92 % en 1997-1998. Cependant, certaines zones demeurent structurellement déficitaires 14 zones déficitaires ont été identifiées en 2009, la majorité dans le Nord (à faible pluviosité) et dans la province de Kadiogo (province de la capitale où le commerce l’emporte sur l’agriculture). Ces zones sont approvisionnées par des commerçants, des organisations humanitaires 37 et le système national. En 2008-2009, les besoins étaient estimés à 22 354 tonnes (pour trois mois de consommation). Les bailleurs de fonds et les ONG partenaires ont couvert 5 819 tonnes et l’État 13 435 [SE-CNSA 2009]. 123. Le syst ème national a octroyé chaque année une aide alimentaire au cas par cas à quelques dizaines de milliers de personnes. L’aide aux populations vulnérables se fait sur la base de demandes reçues d’organisations caritatives. En 2008, le CONASUR a répondu positivement à 342 sur 414 demandes. Son assistance aux populations vulnérables consiste en produits alimentaires et non alimentaires (Tableau 21). La quantité de céréales fournies aux populations vulnérables en 2008 équivalait à 31 800 rations individuelles mensuelles. En plus, le CONASUR a soutenu les personnes victimes de catastrophes avec, en 2008, l’équivalent de 12 550 rations mensuelles individuelles de céréales (Tableau 22). l’enfant et à moyen et long terme des banques de céréales un programme d’achat public pour augmenter la demande du marché en aliments nutritifs l’expansion des programmes de cantines scolaires basés sur la production locale des investissements dans la nutrition des mères l’intégration de la nutrition dans les programmes de promotion de la santé infantile (au titre du volet « Améliorer l’utilisation des denrées alimentaires ») l’accroissement des opportunités d’emploi, en particulier pour les femmes la construction de 10 156 kilomètres de voies ferrées rurales (MID, 210 720 millions de francs CFA 2009-2012). 37 Au titre de l’aide alimentaire, sur la période 2006-2009, le pays a enregistré 18 324 tonnes métriques de sorgho et de maïs, 5 003,1 tonnes métriques de niébé du PAM, et 14 532.484 tonnes métriques de riz du Japon. La majorité a été distribuée à travers des distributions gratuites ou des programmes Vivres contre travail. Page 87 66 La majorité des interventions ont été faites à la suite d’inondations et de désastres mineurs (conflit agriculteurs-éleveurs, incendies). Tableau 21 : Assistance en céréales du CONASUR aux populations vulnérables (en tonnes) Produit 2007 2008 Céréales 204,37 381,93 Maïs 101,10 235,56 Sorgho 3,60 4,75 Millet 43,09 - Riz 56,58 141,62 Note : Ce tableau ne présente la quantité de céréales distribuées qu’à titre d’indication. D’autres produits ont également été distribués (huile, dattes, biscuits et lait en 2007 sardines, corned beef et sucre en 2008) avec également des produits non alimentaires. Source : SP/CONASUR 2008a et 2008b. Tableau 22 : Assistance en céréales du CONASUR aux personnes affectées par une catastrophe (en tonnes) Produit 2007 2008 Céréales 1 121,28 150,63 Maïs 824,78 127,53 Sorgho 91,50 2,50 Millet 100,00 - Riz 105,00 20,60 Note : Ce tableau ne présente la quantité de céréales distribuées qu’à titre d’indication. D’autres produits ont également été distribués ( corned beef , sardines et huile en 2008 biscuits BP5, dattes, conserves et sucre en 2007) avec également des produits non alimentaires. Source : SP/CONASUR, 2008a et 2008b. 124. À l’avenir, le CONASUR aimerait fournir des rations complètes aux populations victimes de catastrophes. L’objectif de sécurité alimentaire du nouveau plan national d’urgence, adopté en février 2009 et administré par le CONASUR, est de maintenir une capacité d’intervention permettant de nourrir adéquatement 300 000 personnes pendant un mois. Le plan propose 4 545 tonnes, dont 3 600 tonnes de céréales, 540 tonnes de légumineuses, 225 tonnes d’huile, 135 tonnes de sucre et 45 tonnes de sel (soit une ration complète de 2 100 Kcal/personne/jour) dans les 13 régions pour réduire le temps de livraison (GdBF 2009a). La mobilisation du stock est décidée au niveau régional tant que le nombre de personnes affectées ne dépasse pas 5 000 passé ce seuil, le système central doit être activé. En septembre 2009, ce plan n’était pas encore financé. 125. Dans l’ensemble, les distributions ciblées de vivres (par le CONASUR, le PAM et le CRS) atteignent probablement moins de 100 000 personnes chaque année, soit beaucoup moins que le Programme de coupons en milieu urbain à lui seul (Tableau 23). 38 À travers son programme Vivres contre éducation/formation, le PAM fournit des transferts alimentaires conditionnés par la fréquentation des centres d’alphabétisation ou de cours de 38 Ceci n’inclut pas les transferts alimentaires réalisés dans le cadre d’interventions nutritionnelles et du type Vivres contre travail. Page 88 67 formation (par exemple sur le maintien des actifs, les techniques agricoles améliorées, etc.). Le programme a progressivement été réorienté vers les provinces du Sahel, où il était en cours de réduction, de 21 provinces en 2005 à 9 en 2010. Par le biais de son programme d’assistance générale ( General Relief ), le CRS assiste chaque année plus de 13 000 personnes vulnérables (les personnes vivant avec le VIH, les orphelins, les personnes âgées et les handicapés, par exemple). Tableau 23 : Nombre indicatif des bénéficiaires des distributions ciblées de vivres, 2006-2010 Programme 2008/2009 Vivres contre éducation du PAM (données 2009) 36 648 Bénéficiaires femmes 20 300 Bénéficiaires hommes 16 348 General Relief de CRS ( données 2008) 14 842 CONASUR Populations vulnérables ( *) (données 2008) 31 800 CONASUR Personnes victimes de catastrophes (**) (données 2008) 12 550 Total 95,840 (*) Equivalent en rations individuelles mensuelles de la quantité de céréales fournies. (**) Equivalent en rations individuelles mensuelles de la quantité de céréales fournies En 2008, le CONASUR a enregistré 27 383 personnes victimes de catastrophes. Source : PAM CRS CONASUR. 126. L’insécurité alimentaire est principalement un problème d’accès au Burkina Faso, et le choix des transferts monétaires pourrait être préféré. La production agricole est dominée par les céréales traditionnelles qui sont largement destinées à la consommation intérieure. Dans les régions du Nord et du Sahel, où la production est faible, les ménages ont besoin de sources de revenu pour acheter les céréales sur le marché. La production brute par habitant a augmenté de 20 % entre 1996 (0,236 tonnes) et 2009 (0,283 tonnes). L’accès est en cours d’amélioration à travers le développement de l’économie de marché et les efforts visant à l’étendre aux zones isolées. Les interventions monétaires associées aux interventions de marché peuvent avoir un impact positif sur le développement local (Encadré 7). Les transferts alimentaires peuvent nuire aux marchés locaux et entraver encore plus l’essor des négociants privés. Les vivres sont parfois fournis parce qu’il y a plus de chances que les femmes exercent un meilleur contrôle sur la nourriture qui leur est confiée et que cela devrait avoir un plus grand impact sur le bien être de la famille. Que ces avantages soient réels ou dignes des coûts supplémentaires demeure discutable. Il est clair que les transferts alimentaires resteront probablement nécessaires dans les années de sécheresse si les marchés ne parviennent pas à réagir de manière efficace. Finalement, les programmes devraient envisager de passer aux coupons monétaires chaque fois que possible, en particulier pour répondre à l’insécurité alimentaire/pauvreté chronique. Page 89 68 Encadré 7 : Transferts monétaires et en nature Alternatives ou compléments ? Quand les programmes de transferts alimentaires sont-ils app ropriés Quels sont les critères à considérer en décidant de la quantité à distribuer sous forme de rations et du montant en espèces. Les concepteurs de programmes devraient penser aux quatre considérations clés suivantes en décidant si les programmes de transferts alimentaires sont appropriés ou nécessaires · Le fonctionnement des marchés alimentaires, y compris l’accès, le transport et l’entreposage, et comment il se reflète sur les prix des denrées alimentaires. Si les marchés sont bien intégrés entre les régions, les transferts monétaires présentent un avantage du fait de la capacité supérieure du secteur privé à déplacer les produits alimentaires ou autres plus efficacement que le secteur public. En outre, certaines soutiennent que les transferts en espèces peuvent avoir un impact positif sur le petit commerce et d’autres activités économiques (Devereux, 2000). Par contre, lorsque les marchés sont étroits, pauvrement intégrés entre les régions ou monopolistiques, les transferts en espèces peuvent faire grimper les prix, ce qui réduit la valeur du transfert et risque de causer des difficultés supplémentaires aux ménages pauvres qui ne bénéficient d’aucun transfert (Devereux, Mvula, et Solomon 2006). Un suivi étroit des prix, pas de la production, est requis pour évaluer la situation. · Le niveau des coûts de transaction pour le programme et pour les bénéficiaires. La plupart des arguments relatifs aux coûts de transaction font référence au coût élevé de la distribution des vivres fournis par les bailleurs de fonds par rapport au coût relativement plus bas de la distribution d’espèces. L’organisation de la distribution de produits alimentaires prend du temps, les denrées doivent être entreposées et transportées et sont sujettes à des pertes et à des vols et le secteur public a tendance à être peu efficace lorsqu’il s’agit de garder les prix à un bas niveau. Néanmoins, dans certains endroits où les canaux de commercialisation et de transport ne sont pas développés, le secteur public est le seul qui puisse approvisionner les marchés locaux adéquatement. Les coûts de transaction pour le bénéficiaire doivent être également pris en considération. Ils incluent le temps et le coût du déplacement vers marchés locaux, qui risquent d’augmenter lorsque les localités sont éloignées ou peu sûres. · L’impact de la forme et de la taille du transfert dans la détermination du niveau de consommation alimentaire. Les ménages pauvres sont plus susceptibles de pouvoir consommer de la nourriture et d’en manger une qui soit de bonne qualité s’ils reçoivent un petit transfert. Certains avancent que les hommes peuvent utiliser les transferts monétaires pour acheter des produits tels que des cigarettes ou de l’alcool, et la littérature indique que de petits transferts de vivres entrainent une consommation alimentaire plus élevée que des transferts monétaires (del Ninno et Dorosh 2003 Fraker 1990). En outre, Hoddinott et Islam (2007) ainsi que Jacoby (2002) montrent que, lorsqu’ils ont accès à de petits transferts de vivres de qualité, les ménages ont tendance à adhérer (en vertu de ce qu’on appelle le flypaper effect ou effet papier tue-mouches, qui veut que l’argent reste là où il « s’est posé ») à des schémas de consommation et de répartition au sein du ménage, qui ont un impact positif sur la nutrition des enfants . · Les préférences des bénéficiaires. Les préférences des bénéficiaires peuvent varier selon les circonstances. Même s’ils peuvent préférer les transferts monétaires, parce que ceux-ci sont plus flexibles, ils veulent quand même maximiser le niveau du transfert et leur contrôle sur ce dernier. C’est pourquoi dans certaines circonstances, les femmes peuvent préférer les vivres à l’argent (voir Ahmed, Quisumbing et Hoddinott 2007 sur le Bangladesh et Sharma 2006 sur le Sri Lanka). Source : Grosh et coll., 2008. Programmes de nutrition 127. Le Burkina Faso et ses partenaires, l’UNICEF et la Banque mondiale en particulier, ont fait des efforts substantiels depuis 2003 pour accroitre les interventions nutritionnelles. L’UNICEF, le PAM, l’ECHO et leurs ONG partenaires sont particulièrement actifs au niveau du traitement des enfants de moins de 5 ans modérément et sévèrement malnutris, ainsi que des femmes enceintes et allaitantes. Le PAM fournit aussi un soutien alimentaire aux personnes vivant avec le VIH. Bien que le système national d’information sur la santé n’arrive pas encore à suivre les données sur la nutrition, l’UNICEF estime le nombre d’enfants sévèrement malnutris traités en 2009 à Page 90 69 environ 25 000 dont 90 % vont mieux, 2 % ont aba ndonné le traitement et 2 % sont morts (pas d’information sur les 6 % restant). Les rapports de Médecins sans frontières sur les districts de Titao et de Yako faisaient état de plus de 20 000 enfants sévèrement malnutris traités en 2008. 128. La couverture inadéquate du dépistage et de la gestion de la malnutrition aiguë sévère constitue un des principaux défis pour la réalisation des OMD liés à la nutrition (Encadré 8). Malgré des efforts considérables, la situation nutritionnelle demeure alarmante. Environ 2 enfants de moins de 5 ans sur 5 souffrent de malnutrition aiguë, en particulier les enfants âgés de 24 à 59 mois. Plus d’un enfant sur trois accuse un retard de croissance avec d’énormes disparités géographiques. Dans les zones rurales, une fille de 15 à 19 ans sur sept souffre de malnutrition. La hausse des prix alimentaires depuis 2006 a constitué un facteur de risque majeur d’augmentation de la malnutrition, en particulier en zones urbaines. Un des défis est de montrer comment le leadership du MdS en faveur de la nutrition pourrait créer des liens efficaces avec d’autres secteurs concernés, tels que la protection sociale, l’eau et l’environnement et le développement communautaire. Page 91 70 Encadré 8 : Planification pour le passage à l’échelle supérieure des intervenions nutritionnelles Le gouvernement et ses partenaire s, l’UNICEF et la Banque mondiale en particulier, ont fait des efforts considérables depuis 2003 pour accroitre les interventions nutritionnelles. De 1993 à 2003, l’insuffisance pondérale a augmenté de 0,5 % par an, compromettant la réalisation des OMD et atteignant 35 % de personnes en sous poids en 2003. La résolution des problèmes de malnutrition a gagné en importance dans l’agenda du gouvernement et ceci a entrainé des résultats encourageants. Figure B6.1 Tournant de la prévalence de l’insuffisance pondérale Source OMS 2009, référence OMS 2005. La réalisation des OMD liés à la nutrition est possible . Il est urgent d’accélérer les efforts pour faire encore baisser la prévalence de l’insuffisance pondérale. Aujourd’hui, le pays a un cadre approprié d'organisations, une vision bien définie et un Plan stratégique national de nutrition basé sur des résultats, incluant un plan d’action chiffré détaillé. Les principales sources de financement en matière de nutrition sont des fonds mis en commun (43 %, dont 8 % proviennent du fonds de la Banque mondiale pour la nutrition et 31 % de l’UNICEF). Le Burkina Faso dispose d’un environnement favorable à la réussite , avec un engagement envers le Partenariat interna tional pour la santé (IHP+) et la préparation du PACTE des mécanismes bien établis de financement en commun de la santé un solide appui au niveau de la nouvelle approche de passation de contrats avec des ONG en vue d’accélérer les programmes communautaires de santé et de nutrition et la mise en place d’un système de financement basé sur les performances. Les principaux défis liés à la réalisation des OMD sont les pratiques inappropriées d’alimentation des nourrissons et enfants en bas âge (allaitement maternel exclusif pendant six mois et alimentation complémentaire) l’inadéquation de la couverture du dépistage et de la gestion de la malnutrition aiguë sévère l’utilisation inadéquate du zinc dans le traitement de la diarrhée chez les jeunes enfants la faible utilisation des moustiquaires traitées aux insecticides de longue durée par les femmes et les enfants le faible taux d’assainissement et les pratiques d’hygiène inadéquates l’insuffisance de personnes qualifiées pour la communication sur la nutrition et le changement des comportements et le financement inadéquat de la prévention de la malnutrition. Pour étendre les interventions nutritionnelles et atteindre les OMD, le Burkina Faso doit encore renforcer la capacité nutritionnelle à tous les niveaux renforcer l’implication des ONG et des organisations communautaires dans les activités de nutrition communautaires et s’assurer des investissements adéquats et constants de la part du budget national et des partenaires au développement international. Source : MdS, 2009. Cantines scolaires 129. Les cantines scolaires constituent un des principaux programmes de filets sociaux actuellement en place au Burkina Faso. En 2009, il représentait 24 % des dépenses totales consacrées aux filets sociaux et environ 38 % du nombre total estimé des bénéficiaires des filets sociaux (hors subvention de la nourriture et du carburant). Entre 2005 et 2009, le MEBA a dépensé à lui seul une moyenne de 4,2 milliards de francs CFA par an pour des activités « endogènes » de cantines scolaires (initiées par les communautés et soutenues par l’État) dans les écoles primaires. CRS et le PAM mènent par ailleurs des programmes de cantines scolaires « assistées » dans les zones les plus vénérables. Actuellement, les écoles ne sont approvisionnées en vivres qu’une fois tous les trois mois Page 92 71 par le MEBA, tandis que les programmes de CRS et du PAM leur fournissent un appui pour toute l’année scolaire. Le programme du MEBA est complété par des contributions communautaires, soutenant les modèles de cantines scolaires endogènes. En 2005/2006, le DAMSE a révélé qu’un total de 4 636 écoles légèrement moins que la moitié du nombre total d’écoles primaires avait bénéficié de programmes de cantines scolaires assistés par CRS (46 %), le MEBA (45 %) et le PAM (9 %). La stratégie des cantines scolaires prévoit la reprise progressive des programmes de cantines scolaires de CRS par le MEBA et le maintien des programmes de cantines scolaires assistées au SAHEL cette région étant une zone d’insécurité alimentaire (Tableau 24). Le MESSRS soutient également des cantines scolaires dans les écoles secondaires. 39 En 2007-2008, 20 700 élèves ont bénéficié de repas subventionnés dans 310 écoles. Bien que la demande soit en hausse, le budget de 2009 de 760 millions de francs CFA ne couvrait même pas 10 % des élèves. Le programme souffre également des faibles taux de recouvrement (45,73 % en 2007) et de divers problèmes de mise en œuvre (MESSRS 2009). Tableau 24 : Principales caractéristiques des programmes de cantines scolaires dans les écoles primaires Type de programme Cantine scolaire assistée Cantine scolaire endogène Mise en œuvre CRS CRS PAM et ONG MEBA Financement USAID (FFP) USAID (MCA) Multilatéral État (CAST) Repas chaud à l’école Déjeuner Déjeuner Déjeuner et petit déjeuner Déjeuner Ration à emporter à la maison 8 kg de farine de maïs fortifié par fille et par mois pour toutes les filles fréquentant l’école primaire 5 kg de riz par fille et par mois pour toutes les filles fréquentant l’école 10 kg de céréales par fille et par mois pour les filles fréquentant les deux dernières années du primaire Aucun Origine des produits Contributions en nature des États-Unis d’Amérique Contributions en nature des États-Unis d’Amérique Achats locaux et internationaux Contributions communautaires et achats locaux Dynamique Retrait progressif/transfert au MEBA Stable (écoles BRIGHT) Stable (Sahel) Expansion/remplacement de CRS Source: CRS; WFP; MEBA; Auteurs. 130. Un passage à une échelle nettement supérieure des activités de cantines scolaires dans les écoles primaires est prévu pour l’année scolaire 2010-2011 . Dans le cadre du Plan d’action pour la lutte contre la crise, le MEBA s’est vu allouer un budget annuel supplémentaire de 12,3 milliards de francs CFA pour les activités de cantines scolaires en 2010 et 2011 (en plus des 5 270 milliards de francs CFA déjà octroyés en 2010). Le Plan d’action pour la lutte contre la crise vise à procurer un repas chaque jour de classe à 100 % des enfants qui fréquentent l’école publique au lieu des 40 % de la couverture actuelle. En plus de l’achat prévu de 28 548 tonnes de produits alimentaires (céréales et huile), les activités suivantes sont envisagées i) la construction/location d’un 39 Le DAF/MESSRS procure aux écoles bénéficiaires les écoles tant publiques que privées désignées peuvent soumettre une demande des kits et des denrées alimentaires (riz, pâtes, sardines, tomates quatre produits importés niébé et ignames) pour un tiers des élèves. Les écoles sont chargées de transporter les denrées et de servir les repas au prix subventionné de 100 francs CFA à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso, 50 francs CAF au Sahel et 75 francs CFA ailleurs. Les écoles doivent verser au Trésor 35 francs CFA par repas pour les coûts administratifs. Page 93 72 lieu d’entreposage régional ii) l’achat de palettes pour le stockage iii) l’achat de fournitures de bureau et d’ordinateurs iv) le transport des denrées alimentaires depuis les magasins régionaux jusqu’aux écoles v) le suivi et évaluation de la gestion des denrées et vi) la formation des contrôleurs et magasiniers à la gestion des stocks et à la maintenance de l’entreposage. Il n’est toujours pas clair si l’expansion planifiée des activités de cantines scolaires à toutes les écoles primaires pendant toute l’année est une mesure temporaire pour atténuer les effets de la crise récente ou une stratégie à long terme. La viabilité d’une telle stratégie nécessitera des ressources substantielles. Même si l’expansion des programmes de cantines scolaires est une réponse légitime à la crise alimentaire, les autorités doivent continuer à rechercher l’instrument de filet social le plus approprié à long terme. De plus, étant donné les contraintes financières, les mécanismes de ciblage et le rôle des contributions communautaires doivent être examinés pour assurer la viabilité du programme. 131. En 2008, une évaluation de l’impact de deux formes de cantines scolaires sur les résultats pédagogiques et la santé des enfants issus de ménages à faible revenu a abouti à des conclusions mitigées. Les deux forme s de cantines scolaires examinés étaient les repas scolaires, où un déjeuner est fourni aux élèves chaque jour de classe, et les rations à emporter de 10 kg de farine de céréales fournies chaque mois aux filles conditionnées à un taux de fréquentation scolaire de 90 % (les deux sont mis en œuvre au sein du programme PAM). Après une année scolaire de fonctionnement, l’étude a trouvé que les deux programmes avaient augmenté l’inscription des filles de 5 à 6 % - et aucune évidence que les rations à emporter ciblant les filles réduisaient l’inscription des garçons. Un effet négatif des repas scolaires sur les scores bruts en mathématiques a été observé pour les garçons de 13 à 15 ans, laissant supposer que les repas scolaires peuvent avoir un effet négatif sur les écoles qui sont moins bien organisées. Aucun autre impact significatif n’a été observé sur les scores bruts en mathématiques, mais les scores ramenés au temps indiquaient une légère amélioration chez les filles dans les villages recevant des repas scolaires. De façon inattendue, un taux moyen de fréquentation plus faible a été observé – un enregistrement accru peut s’accompagner d’une fréquentation réduite. Les auteurs pensent que cela reflèterait l’absence d’un marché du travail actif et le fait que les ménages manquent de bras et/ou que le travail des enfants complète celui des adultes. Les interventions semblent être à l’origine d’une baisse de la fréquentation scolaire des enfants issus de ménages où l’offre de main-d’œuvre enfantine est faible tandis que la fréquentation scolaire s’est améliorée pour les ménages disposant d’une offre de main-d’œuvre enfantine relativement élevée, en concordance avec les contraintes du travail. Ceci, à son tour, explique les effets mitigés observés sur les résultats de l’apprentissage. Finalement, pour les frères et sœurs plus jeunes des bénéficiaires, âgés de 12 à 60 mois et n’allant pas à l’école, les rations à emporter ont fait augmenter le poids selon l’âge d’un écart-type de 0,38 et le poids selon la taille d’un écart-type de 0,33. Les repas scolaires par contre n’ont eu aucun impact significatif sur la nutrition de ces enfants plus jeunes. [Kazianga et coll. 2008]. 132. Ces résultats mitigés invitent éventuellement à reconsidérer le choix du modèle le plus économiquement rentable pour accroitre la fréquentation scolaire au sein des populations les plus pauvres et les plus vulnérables. Au cours des dernières années, les inscriptions, la fréquentation et les indicateurs de résultats de l’école primaire se sont améliorés. Il n’est pas cependant clair si cela est dû aux cantines scolaires ou à d’autres initiatives Éducation pour tous, et si de meilleurs résultats auraient pu être obtenus de façon plus économique avec d’autres instruments. Les options suivantes peuvent être envisagées pour augmenter les taux de fréquentation scolaire : repas pris à l’école uniquement ; rations à emporter uniquement ; transferts monétaires conditionnels et transferts monétaires non conditionnels. Pour éclairer une telle réflexion, il faudrait plus d’information et de faits sur Page 94 73 le coût 40 et l’impact (sur la fréquentation scolaire, le développement local, etc.) des différents types de programmes ainsi qu’une mise en cohérence des stratégies d’intervention au niveau de la demande et au niveau de l’offre. 133. Malgré la preuve globale de l’impact positif des cantines scolaires, des recherches supplémentaires sont nécessaires pour évaluer les mérites relatifs à long terme de l’alimentation à l’école par rapport aux rations à emporter ou à d’autres instruments de filets sociaux (transferts monétaires conditionnels). Les programmes de cantines scolaires peuvent faire augmenter la fréquentation scolaire, la cognition et les résultats pédagogiques, en particulier lorsqu’ils sont appuyés par des actions complémentaires telles que le déparasitage et l’apport de micronutriments ou la supplémentation [Bundy et coll. 2009]. dans leur discussion de l’efficacité des modalités des cantines scolaires, Bundy et coll. [2009] reconnaissent qu’il est particulièrement nécessaire d’obtenir de meilleures données sur l’efficience des approches et des modalités de cantines scolaires qui sont disponibles. 134. Les programmes de cantines scolaires peuvent ne pas atteindre les plus pauvres et les plus vulnérables. Dans les zones les plus pauvres où la scolarisation est faible, les cantines scolaires peuvent ne pas atteindre les plus pauvres. Premièrement, les pauvres sont moins susceptibles d’aller à l’école que les non-pauvres. Deuxièmement, il est très difficile de cibler les avantages en faveur les pauvres au sein d’une école, sauf si on utilise les rations à emporter, qui ne sont pas tellement différentes des transferts monétaires conditionnels. Troisièmement, les activités de cantines scolaires sont coûteuses et doivent être géographiquement ciblées, mais alors, le programme ne profite plus à la majorité des pauvres vivant dans les zones qui ne sont pas couvertes. 135. Il faudrait établir de meilleurs liens entre les programmes d’aide alimentaire et la production locale. Petit à petit, l’approvisionnement local a été mis en avant et de meilleurs liens entre les programmes d’aide alimentaire et les programmes d’appui aux petits exploitants agricoles ont été établis. Au niveau mondial, l’approvisionnement local est activement évalué en tant que moyen de réaliser des programmes durables et, en même temps, d’utiliser le pouvoir d’achat des programme comme une force multiplicatrice et un stimulant pour l’économie agricole locale [Bundy et coll. 2009]. Pourtant, dans les programmes financés par l’USAID, les vivres sont fournis en nature par les Etats-Unis. Cette approche ne soutient pas les marchés locaux, nationaux ou régionaux. Le PAM, par contre, a introduit le programme Achats pour le progrès (P4P) qui vise à acheter une quantité significative de vivres aux associations de petits exploitants agricoles. 41 La promotion des produits locaux fait aussi partie de « Burkina 2025 » et du plan d’urgence pour la réalisation de la sécurité alimentaire et nutritionnelle au Burkina Faso (2008-2012). F. Subventions universelles des produits alimentaires et pétroliers 136. La subvention alimentaire universelle introduite en 2008 par le Gouvernement en réponse à la crise induite par la flambée des cours mondiaux était très coûteuse et très inefficace pour atteindre les pauvres. Pour atténuer les effets négatifs de la hausse des prix alimentaires mondiaux, le Gouvernement a suspendu, en mars 2008, la TVA ou le tarif sur les importations pour un certain nombre de denrées alimentaires de base (Tableau 25). La perte générée par ces mesures a été estimée à plus de 4 milliards de francs CFA (0,1 % du PIB). En termes d’impact sur les prix alimentaires, les mois qui ont suivi ont 40 À titre indicatif, entre 2006 et 2010, le coût moyen du programme de cantines scolaires du PAM était de 21 000 francs CFA par élève et par an. 41 L’initiative Achats pour le progrès (P4P) du PAM a pour but d’assurer que 10 à 15 % des produits alimentaires sont achetés aux exploitants agricoles locaux. Cette initiative a été lancée en janvier 2009 avec l’appui de la Fondation Bill et Melinda Gates et elle vise à renforcer les chaines de production. Page 95 74 connu une augmentation du prix du riz et pas de réduction des prix des autres produits subventionnés. En termes d’effet sur le bien-être des ménages, les deux quintiles les plus pauvres ont été les plus frappés par les prix alimentaires élevés et ont donc très peu bénéficié de ces exonérations de taxes seuls 10 % des avantages ont atteint le quintile le plus pauvre. Dans les six mois (octobre 2008), ces mesures ont été abandonnées et ce programme peu performant clôturé. Tableau 25 : Implication pour les prix des exonérations sur les produits de première nécessité ciblés Produit Type d’exonération Taux de la taxe suspendue (%) Riz Tarif sur les importations 10 Sel Tarif sur les importations 5 Lait et produits laitiers Tarif sur les importations 9 Pâtes TVA 18 Savon TVA 18 Huile végétale TVA 18 Source : FMI, non-publié, 2008. 137. Le Gouvernement a pendant des années subventionné un certain nombre de produits pétroliers malgré le coût élevé pour les finances publiques et l’impact très limité sur les ménages les plus pauvres . 42 Depuis juillet 2007, le gouvernement a utilisé un mécanisme de rétrocession immédiate pour les produits pétroliers, sur une base plus opportuniste qu’automatique. Les coûts budgétaires générés ont été estimés à 0,8 % du PIB. Pour empêcher l’usage du charbon de bois et encourager la conservation de l’environnement, le gaz butane (LPG) a été subsidié à travers une subvention au distributeur, pour un coût atteignant 0,3 % du PIB. Dans un effort pour contenir le prix de l’électricité, le carburant utilisé par les génératrices productrices d’électricité a également été subventionné à hauteur de 0,4 % du PIB. En 2007, le coût de l’ensemble des subventions du carburant a atteint 0,73 % du PIB. 43 Il s’agit là d’un coût extrêmement élevé pour un impact très limité sur les pauvres. En fait, on estime que plus de 84 % des avantages sont allés aux non-pauvres, 98 % si on ne considère que les avantages de la subvention du butane. La subvention du kérosène (pétrole lampant) a davantage profité aux pauvres, 38 % des avantages ayant atteint les quintiles les plus défavorisés. Tableau 26 : Implications des exemptions sur les prix des carburants ciblés, 2008 Essence ( super ) LPG ( butane ) Kérosène ( pétrole ) Diesel 1 ( gasoil ) Diesel 2 (DGM) Subvention explicite (aux distributeurs) 9 types Subvention implicite (SONABHY) 9 9 9 9 9 Suspension des droits de douanes Suspension des accises sur le pétrole 9 9 9 Suspension de la TVA 9 9 9 Subvention totale, % du prix actuel (*) 10 % 240 % 81 % 22 % 75 % (*) en septembre 2008 Source: FMI, non-publié, 2008. 42 Une subvention explicite du LPG avait été introduite avant 2007 en tant que mesure à long terme. D’autres mesures pour compenser la hausse des prix pétroliers ont été introduites en juillet 2007, janvier 2008 et juillet 2008. 43 Selon le FMI, en tenant compte des pertes sur les taxes à la consommation dues à ces mesures, le coût total de la subvention des produits pétroliers peut être estimé à 2,9 % du PIB. Page 96 75 Figure 11 : Répartition des avantages des subventions (par rapport à la dépense totale de subvention des produits pétroliers et de première nécessité) Source: FMI, non- publié, 2008, et sous révision. G. Travaux publics à haute intensité de main-d’œuvre et Argent/vivres contre travail 138. À travers la Politique nationale de l’emploi, le ministère de la Jeunesse et de l’Emploi cherche à promouvoir l’utilisation de l’approche basée sur les travaux publics à haute intensité de main-d’œuvre. De récentes simulations suggèrent que l’investissement dans l’infrastructure peut avoir un impact positif substantiel sur la croissance économique et les progrès en direction des OMD [Banque mondiale 2009b]. Le ministère de la Jeunesse et de l’Emploi (MJE) a initié un examen critique des expériences passées en matière de projets de travaux publics dont beaucoup ont échoué afin d’en dégager les enseignements et il envisage de concevoir deux nouveaux projets pilotes un en milieu urbain, l’autre en milieu rural. 44 139. Le projet PrEst actuellement en cours applique une approche à haute intensité de main-d’œuvre pour la création d’infrastructures en milieu rural, même s’il n’est pas conçu comme un programme de travaux publics destiné à atteindre spécifiquement les pauvres. Bien que positive, cette expérience n’a pas permis de dégager des connaissances reproductibles. 45 Le programme a fait état d’impacts positifs sur la réduction de la pauvreté et le développement local tels que l’utilisation accrue des services de santé, l’augmentation de la scolarisation, une légère réduction de la mortalité infantile, la réduction de la migration des jeunes, et la réduction de la pauvreté au sein des bénéficiaires directs. [Helvetas 2008 Balkouma Boursin 2008]. Il est mis en œuvre par l’ONG Helvetas depuis 2002, sous la supervision du ministère de l’Infrastructure et devrait continuer jusqu’en 2011. Entre 2003 et 2008, plus de 200 kilomètres de pistes rurales ont été construits dans les provinces de Gourma, Gnagna et Tapoa, pour desservir 42 villages et 44 En 2009, le MJE a octroyé un budget de 10 millions de francs CFA pour une telle activité et a mis en place un comité interministériel pour superviser l’étude. 45 Programme de pistes rurales Désenclavement à l’Est. Page 97 76 une population estimée à 492 000 habitants. 46 Entre 2005 et 2007, le projet a employé annuellement une moyenne de 865 personnes (principalement des jeunes de 20 à 35 ans, dont 16 % de femmes) pendant environ 6 mois. La rémunération moyenne était de 130 950 francs CFA par an (fluctuant entre 19 275 et 26 437 francs CFA par mois), soit légèrement moins que le salaire minimum garanti (33 139 francs CFA par mois), mais bien plus que le seuil de pauvreté (82 672 francs CFA par an dans la région de l’Est) [Helvetas 2008]. Le PrEst a été conçu pour créer des pistes rurales gérées localement, en se focalisant sur le développement local comme stratégie de réduction de la pauvreté. Il a aussi offert des activités complémentaires telles que la formation aux questions liées au genre, à l’environnement et au VIH-SIDA. Il n’était cependant pas conçu comme un programme de filets sociaux en soi. Le programme est pourtant parvenu à renforcer la capacité des communautés locales, des autorités et des entreprises privées en matière d’approche basée sur le travail à haute intensité de main-d’œuvre. Les principes fondamentaux du PrEst offrent aux acteurs nationaux un schéma de base pour des programmes de travaux publics susceptibles d’être élargis pour atteindre les pauvres (Encadré 99). 46 Le projet contribue à la Stratégie nationale de transport rural 2003 qui a pour objectif la réhabilitation de 10 700 kilomètres de pistes rurales pour un coût total de 58 milliards de francs CFA sur 10 ans. Page 98 77 Encadré 9 : Programmes de travaux publics Eléments requis pour atteindre les pauvres Auto-ciblage en fixant le taux des salaires à un niveau approprié. Dans un contexte où le ciblage de la pauvreté semble particulièrement difficile et où les capacités financières et administratives demeurent limitées, on peut être tenté de s’appuyer sur l’auto-ciblage. Cependant, ce n’est possible que si le salaire du marché est supérieur au salaire minimum. En effet, le salaire du programme financé par des fonds publics ne peut être inférieur au salaire minimum et sera donc supérieur au salaire local de la main-d’œuvre non- qualifiée, donc susceptible d’attirer les non pauvres vers le programme de travaux publics. Donc, si le salaire minimum est égal ou supérieur au salaire du marché et si les lois restrictives de l’emploi empêchent de le fixer en-dessous du niveau minimum, la possibilité d’utiliser l’auto-ciblage s’en trouve entravée et d’autres mécanismes de ciblage doivent être introduits. L’utilisation de l’auto-sélection pure pourrait aussi ne pas suffire pour atteindre les groupes vulnérables des zones pauvres ou lorsque la demande de participation est très importante et qu’une certaine forme de rationnement de l’emploi est nécessaire. Le fait que les jeunes de 15 à 24 ans représentent un tiers des chômeurs les jeunes femmes étant encore plus touchées que les jeunes hommes peut aussi suggérer l’adoption de méthodes de ciblage visant spécifiquement ces catégories. En outre, si le salaire du programme est trop bas, il risque d’exclure des ménages pauvres pour lesquels le coût d’opportunité de ce travail est trop élevé (lorsque le salaire du programme est inférieur au salaire d’acceptation) ou de rater les objectifs du programme (par exemple, l’objectif de nutrition si le salaire du programme est nettement inférieur au coût du panier minimum). Il est essentiel de veiller à ce que le salaire du programme soit fixé en tenant compte des objectifs du projet. La fourniture de biens publics de qualité est essentielle. Sur la base de l’expérience internationale, la promotion des travaux publics en tant qu’instrument de mise en place d’un filet social ne doit avoir lieu que si les biens publics produits ont un impact positif sur la communauté et que s’ils sont réalisés à un coût similaire à celui atteint en utilisant les procédures contractuelles d’embauche. Ils ne peuvent être introduits comme des stratégies de transferts sociaux aux pauvres « méritants ». Les projets de travaux publics peuvent inclure des projets d’infrastructure traditionnelle ou des projets publics d’amélioration de l’environnement (par exemple, les projets d’assainissement pour faire reculer le paludisme, les projets de réduction des risques de catastrophe naturelle), mais aussi des activités sociales (par exemple, les travailleurs donnant des soins à domicile et ceux chargés du développement de la petite enfance en Afrique du Sud), ou des activités économiques (par exemple, des petites entreprises et des coopératives). S’ils sont pertinents, bien exécutés et entretenus, les biens publics produits peuvent jouer un rôle important dans l’allègement des contraintes empêchant des rendements plus élevés pour les personnes pauvres, indépendamment du fait qu’elles participent ou non au programme. Depuis 2004, le PAM encourage des synergies entre les programmes Vivres contre travail et les programmes de cantines scolaires et de nutrition (par exemple, la construction de salles de classe, d’entrepôts, de latrines, etc.). Le PAM accorde également une priorité aux projets communautaires bénéficiant aux femmes. Pour aborder le problème de la pauvreté chronique, les programmes de travaux publics devraient opérer pendant toute l’année à différents degrés d’intensité. Un programme n’opérant que pendant la morte-saison agricole, quand le coût d’opportunité du travail est bas, permettrait aux ménages pauvres de « lisser leur consommation » mais ne leur apporterait pas l’assurance de trouver un emploi chaque fois qu’ils en ont besoin. Un programme opérant tout au long de l’année à divers degrés d’intensité fournira aux ménages pauvres à la fois l’ « assurance » et le « lissage de la consommation ». Dans les pays où le chômage et le sous emploi sont largement répandus, les programmes standards de travaux publics à court terme se sont révélés incapables de sortir les pauvres chroniques de la pauvreté. Le Brésil, l’Argentine, l’Inde et le Bangladesh représentent quelques exemples de bonnes pratiques où le programme a rempli les fonctions d’assurance, de lissage de la consommation et de réduction de la pauvreté. Pour assurer une couverture supplémentaire, on peut rationner le nombre de jours travaillés et appliquer un système de rotation. Par exemple, l’Inde garantit légalement 100 jours d’emploi par an à tout ménage rural disposé à effectuer des travaux publics au salaire minimum légal et l’Éthiopie assiste plus de 7 millions de personnes en état d’insécurité alimentaire chronique environ 10 % de la population à travers les mécanismes d’emploi de son Programme de filet social productif et des transferts alimentaires et monétaires. Ceci étant dit, les projets à haute intensité de main-d’œuvre peuvent également être utilisés efficacement dans la foulée des catastrophes naturelles, pour la réhabilitation et la reconstruction d’infrastructures abimées ou détruites . Source : Grosh et coll., 2008 del Ninno et coll., 2009. 140. Des enseignements peuvent être tirés du programme Vivres contre Page 99 78 infrastructure du PAM, bien qu’encore une fois, l’accent de ce programme soit principalement placé sur la construction d’actifs de qualité et, à un moindre degré, sur l’intensité de main-d’œuvre du projet. L’aide alimentaire est utilisée en tant que mesure incitative pour effectuer des travaux communautaires tels que de petites digues et des berges anti-érosion ou des travaux dont les résultats ne sont apparents qu’après un an ou plus, tels que le drainage de marécages ou la construction de digues. Le programme contribue à atténuer la dégradation continue du sol sur des terres arables ou potentiellement arables et à appuyer les initiatives destinées à l’aménagement ou à l’exploitation agricole de terres arables hautement productives cultures maraichères sur des terre défrichées ou sous irrigation à petite échelle . Les ressources et la portée du programme ont augmenté avec le temps. (Tableau 27). Tableau 27 : Programmes Vivres contre infrastructure du PAM (bénéficiaires et budgets), 2006-2010 2006 2007 2008 2009 2010 Bénéficiaires femmes 14 800 13 870 21 606 30 808 35 300 Bénéficiaires hommes 9 920 14 880 33 794 31 408 35 300 Total bénéficiaires 24 800 28 750 55 400 62 216 70 600 Coûts de l’activité (dollars EU) 730 964 327 121 1 127 271 1 022 408 1 436 820 Coûts administratifs (dollars EU) 51 167 22 898 78 909 71 568 100 580 Coûts totaux (dollars EU) 782 131 350 019 1 206 180 1 093 976 1 537 400 Pourcentage des coûts administratifs 6,5% 6,5% 6,5% 6,5% 6,5% Coût moyen par bénéficiaire (dollars EU) 31,54 12,17 21,77 17,58 21,78 Source: PAM 141. Sur base de l’expérience et des capacités des programmes PrEst et Vivres contre infrastructure, d’autres types de programmes de travaux publics pourraient être introduits comme instruments efficaces de filets sociaux. 47 Un examen récent de l’expérience de plusieurs pays avec des programmes de travaux publics révèle que des travaux publics bien conçus et exécutés peuvent aider à atténuer les chocs sur le revenu et peuvent être utilisés comme un instrument anti-pauvreté efficace (Encadré 10). Cependant, l’efficacité des travaux publics en tant qu’instrument de filets sociaux dépend grandement de la capacité du programme à fournir des sources supplémentaires de revenus aux populations les plus vulnérables quand elles en ont le plus besoin. Il faudrait, en outre, accorder une plus grande attention aux méthodes de ciblage (Encadré 10), à la durée et au calendrier des travaux, aux caractéristiques de conception particulières qui peuvent accroître la participation des femmes et de la communauté. Le choix de la méthode de rémunération peut en particulier affecter le ciblage et les résultats du programme de travaux publics. Le paiement à la tâche apporte une certaine flexibilité et peut attirer plus de femmes sur les chantiers. De plus, l’implication de la communauté dans la sélection des projets de travaux publics est essentielle pour assurer que les actifs sont ceux dont elle a le plus besoin et pour faire naître une appropriation. 47 À Ouagadougou, environ 500 femmes sont employées par les Brigades vertes et sont payées en dessous du salaire minimum. Page 100 79 Encadré 10 : Efficacité du ciblage des programmes de travaux publics l’expérience internationale Même s’il faut garder en mémoire les objectifs ultimes de réduction statique et dynamique de la pauvreté, l’efficacité du ciblage demeure clairement un facteur important de l’évaluation du rapport coût-efficacité des programmes de travaux publics. En général, la performance du ciblage a été satisfaisante par rapport aux autres interventions publiques ciblées • Au Chili, près de 100 % des ménages participants étaient pauvres. • Dans le programme Trabajar de l’Argentine, environ 80 % des ménages appartenaient au quintile le plus pauvre et 60 % au décile le plus pauvre. En plus du bas salaire payé par le programme, ce résultat a été atteint en incluant le taux local du niveau de la pauvreté dans la formule de notation pour déterminer les allocations du programme. • Différents chercheurs ont trouvé des résultats positifs pour le ciblage du Mécanisme de garantie de l’emploi de Maharashtra (MEGS) en Inde, au moins avant l’augmentation du salaire minimum (donc du salaire du programme) en 1988. Une enquête consacrée aux participants du MEGS entre 1978 et 1979 a révélé que 90 % des travailleurs vivaient en-dessous du seuil de pauvreté, même en incluant dans le calcul les salaires du mécanisme de garantie de l’emploi, à un moment où le nombre de personnes vivant dans la pauvreté calculé de manière similaire était de 49 %. Une enquête effectuée plus tard, en 1985-1986, a révélé que les revenus moyens des ménages participant au MEGS étaient de 20 % inférieurs au seuil de pauvreté. Les résultats positifs du ciblage sont confirmés par d’autres analyses de 1979-1982. Des éléments probants indiquent que la performance du ciblage du mécanisme s’est détériorée quand le niveau des salaires a augmenté substantiellement en 1988. • Au Bangladesh, le ciblage du programme Vivres contre travail s’est également révélé satisfaisant, les participants provenant de ménages plus pauvres que la population rurale dans son ensemble, et le nombre total de jours/homme de travail créé était encore plus pro-pauvres. Alors qu’environ 25 % de tous les ménages ruraux avaient des revenus inférieurs à 1 500 taka en 1981-82, les revenus d’environ 60 % des participants au programme étaient inférieurs à ce niveau. De même, environ 70 % des emplois du programme étaient occupés par 25 % de ménages ruraux dont les revenus était inférieurs à ce niveau. • 77 % des participants du Fonds d’investissement social (FIS) de la Bolivie provenaient des 40 % les plus pauvres de la population. Les évaluations d’autres FIS au Honduras, au Nicaragua et au Pérou ont aussi révélé l’incidence pro-pauvre des avantages du FIS. • Aux Philippines, la majorité des participants aux travaux publics provenaient de ménages marginalement pauvres et non pauvres plutôt que de ménages très pauvres. Ce résultat était largement dû à la rémunération offerte par le programme qui prévoyait le salaire minimum en espèces plus des avantages en nature, ce qui plaçait la rémunération totale au-dessus du salaire du marché. • En Indonésie, l’évaluation des programmes de filets sociaux introduits après la crise asiatique a révélé que les systèmes de travaux publics basés sur l’auto-ciblage avaient plus de chance d’atteindre les ménages qui avaient été victimes de chocs importants que les programmes basés sur des méthodes de ciblage administratif tels que le riz subventionné, les bourses d’études et les subventions de la santé. • L’analyse des données all-India NSS sur les programmes de travaux publics pour 1993-1994 indiquent une performance du ciblage pro-pauvre mais aussi des erreurs significatives. La performance du ciblage a aussi été meilleure par rapport au PDS (non-ciblé) et au programme de microfinance (IRDP). Sources: K. Subbarao, 2003 C. del Ninno, K. Subbarao et A. Milazzo, 2007. H. Exemptions des frais de santé 142. Plusieurs initiatives proposent de fournir des soins de santé gratuits aux personnes pauvres et vulnérables. Le Plan national de développement sanitaire (PNDS 2001-2010) comprend des activités spécifiques pour i) promouvoir les soins préventifs et curatifs pour les groupes vulnérables (enfants, femmes, jeunes et personnes âgées et les personnes vivant avec le VIH); et ii) assurer l’accès des plus pauvres aux services de santé. Comme mentionné au Chapitre III, un certain nombre de mesures ont été adoptées dans le Page 101 80 but de supprimer ou de subventionner les frais associés à des soins médicaux spécifiques, en particulier, ceux destinés aux femmes et aux jeunes enfants. Ces subventions universelles de la santé ont été exclues de la présente étude. Cette dernière se focalise sur la subvention des soins de santé visant spécifiquement les indigents. 143. Les mesures destinées à fournir gratuitement des soins de santé spécifiquement aux indigents ne sont pas appliquées à cause de l’absence de mécanismes d’identification de ces derniers. Le Kiti n°An-VIII-0202/FP/SAN- du 8 février 1991 stipule que les personnes indigentes ont droit à des services de santé gratuits. Cependant, en pratique, 20 ans plus tard, les mécanismes nationaux restent encore à clarifier pour que la mesure devienne effective. La politique de subvention SONU de 2009 donne aux femmes indigentes le droit à des services de santé gratuits, mais elle n’a pas réussi à déterminer des critères de qualification si bien que ces femmes n’en ont toujours pas bénéficié [AI 2009]. 48 Trois questions clés demeurent pour la mise en place d’exemptions de frais de santé : i) qui est indigent (ou pauvre) ; ii) qui décide de ce statut ; et iii) qui paiera pour cette exemption des frais de santé. En 2007, un comité interministériel sur les soins aux indigents a été établi sous la supervision du MdS pour examiner ces questions, mais il n’a jamais été très actif. Sa réactivation figure à l’agenda du MdS pour 2010. Vers la fin 2009, une directive du MdS a appelé les centres de santé à effectivement utiliser les 200 000 francs CFA octroyés aux soins des indigents. Cependant, le problème de la définition des critères n’ayant toujours pas été résolu, la directive ne peut pas être appliquée. Quelques initiatives intéressantes pour l’identification des indigents (pauvres) sont néanmoins en cours, en particulier au niveau de : l’Université de Montréal ( Centre de Recherche du Cent re Hospitalier de l’Université de Montréal ou CRCHUM) en collaboration avec l’IRSS/CNRST ( Institut de Recherche en Sciences de la Santé du CNRST ) (Encadré 11), et du Centre de recherche sur la santé de Nouna, en zones rurales ; ainsi que du PAM et de l’IRD en zones urbaines (Encadré 6). Les recherches de l’Université de Montréal ont apporté quelques précieux éléments sur certains points critiques des méthodes possibles d’identification des indigents et des sources éventuelles de financement d’un tel système. Ces résultats de la recherche ont aussi montré que les systèmes d’exemption des frais pour les indigents peuvent effectivement appuyer le renforcement des piliers de l’Initiative de Bamako recouvrement des coûts, participation communautaire et équité. 48 Quand la politique de subvention SONU a été définie en juin 2006, l’option de subvention de 80 % a été retenue contre 60 ou 100 % non pour des raisons financières mais par crainte que la gratuité encourage la population à utiliser les services de manière irresponsable [AI 2009]. En février 2010, le Président du Burkina Faso s’est engagé à éliminer toutes les barrières financières aux soins obstétricaux d’urgence et à l’accès au planning familial dans la stratégie de lutte contre la mortalité maternelle [AI 2009]. Il est intéressant de noter que la subvention à 100 % des soins obstétricaux d’urgence pour tous ne nécessiterait pas réellement de ressources financières supplémentaires. Un mauvais calcul du coût de l’intervention (estimé à 4 500 francs CFA au lieu de 2 000 francs CFA) lors de l’élaboration de la politique de subvention SONU fait que quand le MdS rembourse 3 900 francs CFA (80%) et que les usagers paient 900 francs CFA, les centres de santé font en fait des bénéfices sans compter que le personnel de santé reçoit 20 % du coût de chaque intervention [Ridde et Bicaba 2009b]. Les 30 milliards de francs CFA alloués aux subventions du SONU pour la période 2006-2015 suffiraient à offrir des subventions complètes pour tous. Page 102 81 Encadré 11 : Une approche de ciblage communautaire pour dispenser les plus démunis des frais de santé au Burkina Faso Pour éviter le risque d’exclusion engendré par le paiement par l’usager, les responsables de la mise en œuvre de l’Initiative de Bamako (IB) avaient été appelés à organiser des régimes d’exemption pour les indigents. Ces régimes d’exemption n’ont cependant jamais été mis en place en Afrique en raison des difficultés à identifier les indigents. L’Université de Montréal a réalisé en collaboration avec l’IRSS/CNRST une recherche-action pour tester la faisabilité d’un processus communautaire de sélection des bénéficiaires de l’exemption du paiement par l’usager. Trois mécanismes ont été examinés : • Intervention A – En 2005, une donation exceptionnelle de médicaments (achetés avec des fonds PPTE) a été remise aux centres de santé pour distribution aux indigents. Un total de 2 700 personnes en aurait bénéficié dans la zone d’intervention. Une liste de seulement 297 indigents a pu être trouvée dans les 11 CSPS et seuls 48 d’entre eux ont été retrouvés en 2007 pour vérifier leur statut de pauvreté. La population n’avait pas été informée de la mesure. Aucun critère n’avait été fixé. L’action n’était pas soutenable. • Intervention B – L’étude a été effectuée dans 10 centres de santé primaire (CSPS) du Burkina Faso. Les comités de sélection villageois (CSV) ont préparé des listes des personnes les plus pauvres, qui ont ensuite été validées par les chefs de village, les maires et les comités de la santé (COGES). Les 124 CSV sélectionnèrent 566 personnes. Les 10 COGES en ont retenu 269 (48 %), c’est-à-dire 2,81 pour 1 000 habitants. À l’exception d’un CSPS, les profits annuels de ces régimes de paiement par l’usager pouvaient en moyenne couvrir six fois plus d’indigents que le nombre moyen sélectionné par les CSV. • Intervention C – Une liste de 20 critères a été établie avec les travailleurs sociaux. Le personnel de santé ne les a appliqués qu’à 0,007 % des patients (72 patients dans 11 CSPS sur 18 mois). Seuls 33 patients ont obtenu le statut d’indigent. • Tableau B11.1 : Les trois interventions de la recherche- action de l’Université de Montréal Intervention A Intervention B Intervention C Districts Ouargaye Ouargaye, Dori, Sebba Ouargaye Services entièrement subventionnés Médicaments au CSPS Tous les services au CSPS et à l’hôpital de district Tous les services au CSPS et à l’hôpital de district Sélection des bénéficiaires Personnel de santé sans critères imposés Communauté sans critères imposés, mais avec une définition consensuelle Personnel de santé avec 20 critères Information des bénéficiaires Aucun, au point de service Distribution de cartes d’indigent avec le personnel de santé et le MdS Aucun, au point de service Financement Don du ministère Endogène Endogène Source : Ridde et coll., 2009. Dans le contexte rural africain, les villageois sont capables de sélectionner ceux qui devraient être dispensés des frais selon leur propre perspective. Grâce à l’Initiative de Bamako (IB), les centres de santé jouissent d’une certaine capacité financière pour prendre soin des indigents. Dans une approche de ciblage communautaire utilisant les ressources endogènes générées par les profits de l’IB, la perception locale de la viabilité financière des centres de santé, combinée au contexte hiérarchique social, ont abouti à une sélection très restrictive des candidats à l’exemption. 291.2 166.5 8.9 1.9 0 : \03 Sources : Ridde et coll., 2009; Auteurs. Page 103 82 Encadré 12 : Utilisation de l’auto-détermination des rangs de pauvreté par la communauté pour identifier le quintile le plus pauvre éligible à une subvention de l’adhésion à l’assurance maladie à base communautaire En cohérence avec l’objectif du DSRP d’améliorer l’accès aux soins de santé, le Centre de Recherche en Santé de Nouna (CRSN), en collaboration avec l’Université de Heidelberg, a lancé en 2004 un projet d’Assurance Maladie à Base Communautaire (AMBC) dans le district de Nouna. En 2006, seulement 5,1% des ménages avaient adhéré à l’AMBC. Le manque de ressources financières est apparu comme un facteur explicatif majeur de ce faible taux d’adhésion. En 2007, un bailleur de fonds a accepté de subventionner l’adhésion à l’AMBC pour le quintile le plus pauvre du district pendant deux ans (750 FCFA au lieu de 1500 FCFA pour un adulte, et 250 FCFA au lieu de 500 FCFA pour un enfant). Une approche pour l’auto- détermination des rangs de pauvreté par la communauté ( community wealth ranking ou CWR) a été conçue pour identifier les membres les plus pauvres de la population sur base des perceptions et niveaux relatifs locaux de la pauvreté au sein d’une communauté donnée. Processus – L’exercice de CWR a été mené dans les 41 villages où l’AMBC avait été lancée, et dans les 7 secteurs de la ville de Nouna (1 rural et 6 semi-urbain). Des discussions en groupe ( focus group ) ont été organisées dans chaque village ou sous-secteur. Elles visaient à : i) comprendre les perceptions et les critères de pauvreté locaux ; ii) définir le nombre et le nom des groupes de richesse locaux ; et iii) choisir trois personnes-clés. Ces personnes-clés étaient alors responsable d’attribuer un groupe de richesse à chaque ménage (défini comme ceux partageant et vivant du même grenier), puis les classer au sein de chaque groupe. Ce processus devait d’abord être fait individuellement par chacune des trois personnes-clés, puis discuté entre elles jusqu’à aboutir à un consensus. Résultats – Cela a pris un mois et une semaine de mener l’exercice dans les 41 villages, et deux mois de le mener dans Nouna. L’expérience a montré que plus de temps et des outils diversifiés auraient du être utilisés pour informer les ménages en avance. Pour ce qui est de la définition de la pauvreté, les ménages l’ont principalement décrite comme : une privation des capacités ; un manque de besoins de base ; des conditions de vie indécentes ; et un manque de capital social (réseau social auquel on peut faire appel en cas de difficultés). En moyenne, les communautés ont établi trois groupes de richesse : très pauvre, moyen et riche. Toutefois, le concept de groupe de richesse est apparu difficile à appréhender par de nombreux participants. Egalement, les populations n’arrivaient pas à définir des critères de pauvreté quantifiés, et « le riche dans un village donné peut être considéré comme un pauvre si l’on change de repère, c’est-à-dire de village ». Utiliser l’approche CWR s’est révélé être le plus facile dans les villages de 50 ménages ou moins, mais peut ne pas être pertinent étant donné le faible nombre de ménages à classer (les observations tendent à correspondre). Un nombre de ménages entre 50 et 150 est plus approprié pour tester l’approche, et s’est révélé gérable. Les villages de plus de 150 ménages étaient multiethniques, et les liens interethniques sont apparus trop faibles pour permettre à une personne d’un groupe ethnique donné de classer un ménage d’un autre groupe ethnique. Le processus s’est également révélé trop prenant pour les personnes-clés et les membres des focus group . Dans les zones semi-urbaines, la mobilisation communautaire s’est révélée difficile (pas de respect des rendez-vous fixés, manque de ponctualité, faible participation), et de nombreux ménages n’ont pu être classés car ils étaient inconnus des personnes participants aux focus group . Que ce soit e zone rural ou semi-urbaine, certaines des personnes-clés choisies par la communauté connaissaient en fait que peu le statut socioéconomique des ménages. Aboutir à un consensus parmi les trois personnes-clés s’est également révélé difficile. Prochaines étapes – Globalement, le processus a été évalué comme étant rapide (2 heures pour un village de 100 ménages), démocratique (bien qu’une certaine prudence soit requise), et coût-efficace. C’est une méthode alternative ne reposant pas sur les revenus et dépenses monétaires (difficiles à estimer en zones rurales), mais basée sur des critères de pauvreté définis par ceux-là même qui vivent dans la pauvreté. Pour valider la classification, le CRSN a calculé le coefficient kappa pour chaque village. Le prochain défi sera de corréler ces résultats avec les données de l’enquête ménage. Source : Savadogo et Souares, 2009. 144. La question de l’abolition du paiement par l’usager a connu un regain d’attention. Un rapport publié en juin 2009, intitulé The Global Campaign for the Health Millennium Development Goals 2009 Leading by Example Protecting the most vulnerable during the economic crisis , approuvé par plusieurs pays, organes et institutions des Nations Page 104 83 Uni es précisait « Il est de plus en plus manifeste que la mise à disposition d’un ensemble de services de qualité gratuits dans les centres de soins se révèle efficace pour surmonter l’inégalité inévitablement entraînée par les services payants. Cette gratuité est un moyen efficace, pragmatique et équitable d’élargir l’accès aux services de santé à une plus grande partie de la population » [cité dans AI 2009]. Au Burkina Faso, deux projets pilotes offrent des services de santé gratuits aux femmes enceintes et allaitantes et aux enfants de moins de 5 ans. Mis en œuvre par les ONG HELP (dans deux districts du Sahel depuis septembre 2007) et Terre des Hommes (dans deux districts du Nord depuis octobre 2008), en collaboration avec les COGES, ces projets ont enregistré des résultats très positifs (Figure 12). Dans les districts d’intervention, l’utilisation des services de santé par les enfants de moins 5 ans a plus que doublé et les accouchements assistés par du personnel qualifié ont augmenté de 50 %, les comparaisons s’étendant sur les 10 mois qui ont précédé et les 10 mois qui ont suivi le projet. Après 10 mois d’intervention, le coût de chaque consultation était estimé à 1 200 francs CFA. Ces initiatives font écho à l’expérience internationale qui suggère que l’abolition du paiement par l’usager est non seulement juste et équitable mais est aussi potentiellement faisable, tant techniquement que financièrement (Encadré 13). Figure 12 : Nombre moyen de consultations mensuelles d’enfants de moins de 5 ans dans les CSPS des quatre districts d’intervention HELP et TdH et des quatre districts de contrôle Source : Ridde et Queuille, 2009. Page 105 84 Encadré 13 : Le débat sur le paiement par l’usager Partout dans le monde, le paiement par l’usager est de plus en plus remis en question . Des recherches menées au Mali, au Burkina Fao et ailleurs ont montré que le paiement par l’usager réduit l’accès des populations vulnérables aux soins de santé, conduisant à une réduction de l’utilisation des services, en particulier chez les femmes et dans les groupes les plus pauvres [James et coll. 2006 cité dans Ridde et Haddad 2009]. Dans son rapport annuel de 2008, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) presse les pays de « résister à la tentation de faire payer l’usager » [2009:26]. Le paiement par l’usager a été supprimé avec succès en Ouganda, au Ghana, en Afrique du Sud, à Madagascar et au Niger. En Ouganda, l’abolition du paiement par l’usager à fait doubler le nombre de personnes fréquentant les cliniques et plus que doubler les taux de vaccination des enfants. James et coll. [2005] estiment que plus que 230 000 vies d’enfants pourraient être sauvées chaque année si les frais étaient abolis dans 20 pays africains. Un nombre croissant de bailleurs de fonds appuient les États désireux d’abolir le paiement par l’usager pour les services de santé de base [DfID 2006, Ridde et Haddad 2009]. Maintenant, s’il est clair que le paiement par l’usager doit être supprimé, on ne sait pas vraiment comment y parvenir. Une étude récente sur l’effet de la suppression du paiement direct des soins de santé sur l’utilisation et les résultats de la santé chez les enfants ghanéens [Ansah et coll. 2009 cité dans Ridde et Haddad 2009] a montré que les systèmes de prépaiement ne sont pas pro-pauvres parce que les plus démunis y sont rarement inscrits. Ridde et Haddad [2009] ont souligné que les systèmes locaux d’assurance maladie ont atteint leur limites en Afrique, où le taux de pénétration, après plus que 15 ans de promotion, demeure très bas (5 %). Ils ont aussi fait état de l’écart considérable « l’enthousiasme généré par les systèmes de prépaiement et l’évidence scientifique en faveur de leur utilisation » . Cependant, tant qu’il n’y aura pas de preuves que les systèmes d’assurance maladie sont inefficaces, ils plaident pour que la protection des familles contre des coûts de santé catastrophiques, et la suppression des obstacles financiers aux soins de santé soient une priorité du système de santé. Des études récentes et en cours sur l’abolition du paiement par l’usager pourraient éclairer le débat. En étudiant les effets de la mise en œuvre de l’Initiative de Bamako dans un district du Burkina Faso, Ridde [2003] a trouvé que le district considéré était en mesure d’absorber le coût financier des soins aux pauvres et que la communauté était capable d’identifier ces derniers. Il a donc recommandé que l’État introduise des mesures incitatives pour que les communautés acceptent d’appliquer un système de santé plus équitable. Une étude de suivi de 3 ans, lancée en 2008, vérifiera la faisabilité et l’efficacité de différents modèles visant à garantir les soins de santé aux plus pauvres (ciblage communautaire avec ou sans un pourcentage de bénéficiaires imposé, financement endogène/exogène, etc.) Cette étude doit mener à la préparation d’un guide pratique pour la mise en œuvre des exemptions de frais dans d’autres parties du pays. En juin 2009, un programme de recherche de trois ans (financé par la DRDI et le FAD) a été lancé pour documenter les politiques d’abolition du paiement par l’usager au Mali, au Niger et au Burkina Faso, à travers une approche interdisciplinaire (anthropologie, sciences politiques, épidémiologie et santé publique). Source : Auteurs. 145. De recherches supplémentaires sont nécessaires pour répondre aux trois questions clés suivantes i) si l’État veut abolir le paiement par l’usager, comment y parvenir ii) comment les partenaires peuvent-ils appuyer l’État et iii) comment l’abolition du paiement par l’usager peut-elle être le point de départ d’une amélioration de la qualité des services Des synergies sont possibles entre l’abolition du paiement par l’usager et un financement basé sur les résultats. Améliorés, les mécanismes de subvention du SONU pourraient être un premier pas en direction d’un financement basé sur la performance. Le PADS 49 travaille déjà au renforcement de ses capacités à adopter le 49 Le Programme d’appui au développement sanitaire (PADS) est un mécanisme de financement commun visant à appuyer le plan national de développement de la santé. Le PADS est défini comme « une initiative conjointe du ministère de la Santé et de certains partenaires pour le développement du secteur de la santé, visant une meilleure coordination et une gestion rationnelle des ressources mobilisées pour la mise en œuvre du PNDS ». En septembre 2009, les bailleurs de fonds qui appuient ce mécanisme de financement commun étaient les Pays-Bas (assumant le rôle de donateur chef de file pour la coordination du mécanisme de financement), la Suède, la France, la Banque mondiale, le FNUAP, l’UNICEF, l’Alliance mondiale pour les Page 106 85 financement basé sur les résultats. Néanmoins, l’abolition du paiement par l’usager n’est pas simple et la dimension technique de n’importe quelle réforme ne doit pas être sous- estimée. Le point de vue de la santé publique ne doit pas être perdu (par exemple, la nécessité d’un système de référence, les moyens de transport et les coûts d’opportunité) pour assurer un impact réel sur l’OMD 5. Il faut garder en mémoire que l’abolition du paiement par l’usager ne lève pas tous les obstacles liés à la demande et que d’autres actions doivent être entreprises. Le véritable effet d’une telle réforme pourrait être lié à l’offre (si des mécanismes efficaces de paiement basés sur les résultats sont encouragés). Les incitations liées à l’offre méritent une attention sérieuse [Meessen 2009], et les expériences menées au Rwanda, en Uganda, au Burundi et au Niger ont beaucoup à offrir. 146. Le débat autour de l’abolition ou de l’expansion de l’exemption des frais implique de reconsidérer la stratégie et le financement du secteur de la santé ainsi que l’ensemble de ses mesures de protection sociale. Les initiatives décrites plus haut sont mises en œuvre parallèlement à d’autres mesures de protection sociale qui visent à garantir l’accès aux services de santé à tous. Premièrement, il y a les subventions universelles de certains services de santé, telles que les subventions du SONU coordonnées par le ministère de la Santé. Des mécanismes de communication et des compensations financières fiables n’ont pas encore été élaboré en vue d’une meilleure efficacité de ces mesures. Deuxièmement, le projet d’établissement d’un système national d’assurance maladie vise à assurer l’accès aux services de santé à une grande partie de la population en 2015 en subventionnant les contributions des plus pauvres et un comité interministériel est chargé d’explorer les moyens de mettre en place un tel système. Un premier pas particulièrement important consistera, dans le cadre de la stratégie nationale de santé, à définir l’ensemble minimal des soins qui seront couverts par le système d’assurance. Comment financer le système (en particulier s’il est supposé couvrir toute la population) et comment identifier les personnes qui auraient droit à une exemption de leur contribution sont des questions difficiles qui n’ont pas encore été étudiées. Ainsi, en revoyant le financement et les mesures de protection sociale du système de santé, les points critiques suivants doivent être considérés : i) Quel modèle faudrait-il promouvoir et quel rôle accorder à chacune des différentes approches actuellement testées ou envisagées subvention des soins de santé (MdS), assurance maladie (MTSS), exemption des frais pour les indigents (MASSN), exemptions des frais pour les groupes vulnérables (NGO), Transferts monétaires (CNLS), etc.? ii) Comment financer le secteur de la santé paiement par l’usager (actuellement les ménages burkinabés sont la principale source de financement, contribuant à hauteur de 40 %), réallocation de la dépense nationale, nouvelles sources de financement (par exemple, une taxe sur les téléphones mobiles), financement international, etc. ? iii) Quels mécanismes de mise en œuvre identification de l’indigent, indemnisation financière des centres de santé, etc. ? vaccins et l’immunisation (GAVI) et le Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme. Ce « pot commun de financement » est géré par le ministère de la Santé. Page 107 86 CHAPITRE V : RECOMMANDATIONS POUR UNE PLUS GRANDE EFFICACITÉ DU SYSTEME DE FILETS SOCIAUX L’analyse présentée dans les chapitres précédents mène à la conclusion que le système actuel de filets sociaux est inadapté et particulièrement insuffisant pour répondre à la pauvreté et à la vulnérabilité. Les programmes actuels ont une couverture limitée et les interventions se font à une échelle passablement restreinte et sont généralement conçues comme des programmes temporaires. Cependant, le Burkina Faso s’est engagé à consolider son système de protection sociale. Dans le cadre de la stratégie de protection sociale, les documents de politiques existants, basés sur quelques initiatives actuelles, doivent être transformés en un vaste système de protection sociale. Une analyse des dépenses publiques indique que, à court terme, les dépenses devraient être maintenues au minimum à leur niveau actuel (environ 1 % du PIB en 2009) et que l’expansion progressive de quelques programmes de filets sociaux efficaces et complémentaires (programmes de nutrition, travaux publics et transferts monétaires) pourrait constituer un choix politique adéquat. Pour garantir la viabilité financière des dépenses dans les filets sociaux, les principales sources de financement sont : Žƒ\03 réallocation des dépenses, des gains d’efficacité et des dépenses dans l’éducation et la santé résolument plus en faveur des pauvres, et une réallocation des dépenses discrétionnaires. Ce rapport suggère donc des actions prioritaires pour le développement d’un système de filets sociaux plus efficace et plus économique i) renforcement du cadre stratégique, institutionnel et financier pour la conception, la mise en œuvre, la gestion, le suivi et l’évaluation des programmes de protection sociale afin de mettre en place une culture de choix politiques éclairés parmi les décideurs et ii) élaboration d’un plan pour améliorer l’efficacité du système de filets sociaux par la réforme des programmes actuels et l’élaboration de nouveaux programmes sur la base des expériences récentes. A. Résumé des constats Pauvreté et vulnérabilité 147. Malgré l’existence d’autres estimations de la pauvreté, qui rend difficile le suivi des tendances de la pauvreté au Burkina Faso, l’incidence de la pauvreté a diminué en grâce à la croissance économique soutenue des dix dernières années. Sur la base des données d’enquête disponibles et des prévisions nationales, la part de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté est passée de 46,4 % en 2003 à 43,2 % en 2009. En termes d’actifs, la pauvreté a aussi décliné de 43,6 % en 2003 à 40,4 % en 2005 et 38,5 % en 2007. Toutefois, au cours de cette même période, la proportion des pauvres chroniques a augmenté à la suite des chocs : de 25,4 % en 2003, ils n’étaient plus Page 108 87 que 18,8 % en 2007 après avoir atteint 31,1 % en 2005 suite aux chocs climatiques. Il existe en fait des raisons de croire que le récent ralentissement de la croissance économique et la hausse des prix alimentaires et pétroliers ont entraîné une chute du revenu réel et inversé la tendance à la baisse de l’incidence de la pauvreté. L’Enquête actuellement en cours sur la consommation des ménages (2009-2010) fournira des informations plus fiables et plus solides sur la tendance de la pauvreté au Burkina Faso. 148. Le Burkina Faso a également fait de grands progrès au niveau de l’accès des ménages aux services de base, toutefois d’importants obstacles demeurent et la rapide croissance démographique risque d’empêcher le pays d’atteindre ses OMD. Les indicateurs disponibles montrent une amélioration de l’accès à l’eau potable (de 54 % en 2004 à 79 % en 2007), tandis que les services de santé sont en moyenne devenus plus accessibles grâce à l’augmentation régulière de la part du budget général consacrée aux dépenses de santé (de 7,4 % en 2004 à 9,9 % en 2006). Néanmoins, l’IDH du PNUD révèle que i) le taux d’alphabétisation reste faible (28,7 % en 2007), tout comme la qualité de l’enseignement ii) des disparités demeurent entre les genres en matière d’inscription scolaire, d’alphabétisation, de taux d’achèvement du primaire et d’accès au premier cycle de l’enseignement secondaire iii) le taux de fertilité reste très élevé avec une moyenne de 6,2 enfants par femme et iv) la rapide croissance démographique (3,1 % par an) a des conséquences fortement négatives sur la croissance, le niveau de vie et la réduction de la pauvreté. 149. Selon l’enquête sur les priorités de 2003, le ménage pauvre burkinabé type compte au moins sept personnes, a un chef de famille masculin, polygame, illettré ou ayant un niveau d’études ne dépassant pas le début de l’école primaire, et agriculteur dans les zones rurales de la Région du Nord-Est. Comme dans les autres pays, la pauvreté reste un phénomène principalement des zones rurales, où réside près de 92 % de la population l’incidence de la pauvreté en milieu rural atteint plus de deux fois celle des zones urbaines (52,3 % contre 19,9 %). En termes de pauvreté régionale, la Région du Centre compte parmi les plus touchées avec un taux de pauvreté bien supérieur à la moyenne nationale. Cette région abrite plus de la moitié des pauvres du Burkina Faso et présente aussi l’écart de pauvreté le plus prononcé. Viennent ensuite les Régions du Nord- Est et du Sud, où le taux de pauvreté est légèrement inférieur à la moyenne nationale. La zone de la Capitale présente quant à elle l’incidence de la pauvreté la plus faible (environ la moitié de la moyenne nationale). Les niveaux socioéconomique et d’instruction du chef de famille constituent des déterminants clés de la pauvreté. Les ménages dont le chef de famille est un homme, dont la part dans l’incidence de la pauvreté est de 95,6 %, sont généralement plus pauvres que ceux dont le chef de famille est une femme, en termes tant d’incidence que d’écart. De plus, l’incidence de la pauvreté est notablement plus élevée dans les ménages dont le chef de famille est illettré ou a un niveau d’étude ne dépassant pas le début de l’école primaire (51,0 % et 41,1 % respectivement). Page 109 88 150. Selon les données disponibles, la vulnérabilité des ménages aux risques dépend de divers facteurs tels que l’état de santé et l’état nutritionnel actuels des individus, le genre, les avoirs, l’infrastructure, la localisation, le niveau d’instruction et les pratiques culturelles et comportementales. Les pauvres sont plus vulnérables que les autres groupes de la population car ils sont généralement plus exposés aux risques, qu’ils sont confrontés à plusieurs risques en même temps et qu’ils disposent de moins de ressources pour les aider à les affronter. 151. Le genre constitue également un facteur clé de pauvreté . Comme dans de nombreuses régions sahéliennes de l’Afrique de l’Ouest, il existe des raisons de penser que certains groupes de femmes pourraient être particulièrement pauvres et vulnérables. Malheureusement, les enquêtes sur la consommation des ménages ne recueillent pas des données individuelles détaillant la répartition au sein des ménages des ressources, de la consommation, des taches et du temps. Toutefois, comme dans de nombreux pays, les ménages burkinabés dont le chef de famille est une femme apparaissent extrêmement hétérogènes. Bien que, comme mentionné plus haut, l’incidence générale de la pauvreté soit plus faible dans les ménages dont le chef de famille est une femme, une analyse utilisant l’enquête sur les priorités de 2003 confirme qu’après la prise en compte de diverses caractéristiques affectant les conditions de vie, il existe peu de différences entre les ménages dont le chef de famille est un homme et ceux dont le chef de famille est une femme. Les Enquêtes démographiques et sanitaires (DHS) de 2003 révèlent que les veuves ainsi que les veuves ou divorcées actuellement remariées pourraient constituer deux groupes particulièrement vulnérables au Burkina Faso. En tenant compte de l’âge, les veuves et les femmes mariées plus d’une fois constituent un groupe particulièrement vulnérable par rapport à celui des femmes mariées une seule fois ou actuellement divorcées. Les données indiquent aussi que les enfants des femmes actuellement ou anciennement veuves sont moins susceptibles d’être scolarisés que les enfants des femmes ayant une autre situation matrimoniale. 152. Comme plus de 40 % de la population burkinabé est pauvre, le coût financier de la suppression de l’écart de pauvreté sera substantiel (entre 2,5 et 2,7 % du PIB) et il ne serait pas réaliste d’envisager une stratégie raisonnable de filets sociaux ciblant les populations les plus pauvres et les plus vulnérables. Au vu des chiffres actuels du budget, ces coûts estimés signifieraient un important engagement financier de la part de l’État. Par exemple, le coût minimal pour combler entièrement l’écart de pauvreté en 2007 (estimé à 2,5 % du PIB) représentait un peu moins de 10 % du budget total de cette année. Ce montant représente aussi moins de la moitié de la masse salariale de l’État pour 2007 (6 % du PIB) ou un peu moins des dépenses de santé totales (2,3 % du PIB) pour cette même année. Stratégie de l’État, dispositifs institutionnels et dépenses en matière de filets sociaux 153. Le Burkina Faso n’a pas encore adopté une politique nationale consolidée de protection sociale, intégrant un réseau de filets sociaux. En 2000, le Burkina Faso a été le premier pays de la région subsaharienne à adopter et mettre en œuvre un Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP), mettant fortement l’accent sur les interventions liées à l’offre (en matière d’éducation et de santé). Néanmoins, cette stratégie à moyen terme ne prenait pas explicitement en compte la protection sociale, y compris les filets sociaux. En 2006, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale (MTSS) a dirigé un processus interministériel visant à élaborer une politique nationale de protection sociale. Bien que ce document ait été finalisé en janvier 2007, il n’a jamais été adopté Et le gouvernement a demandé à chaque ministère d’élaborer sa propre stratégie ministérielle, au lieu de se concentrer sur une approche multisectorielle. Page 110 89 154. Malgré l’absence de stratégie nationale, les programmes de filets sociaux jouent un rôle important dans le développement du capital humain du Burkina Faso et dans les stratégies de réponse aux crises. Les filets sociaux sont identifiés comme des investissements économiques et sociaux nécessaires dans la vision sociale à long terme du pays. Les programmes de filets sociaux apparaissent dans de nombreuses stratégies sectorielles santé, éducation, sécurité alimentaire et emploi. Pourtant, leur potentiel de réduction de la pauvreté et de la vulnérabilité à travers la redistribution, la promotion et la transformation des revenus est moins souvent reconnu dans les stratégies sectorielles à moyen terme. De plus, en raison de l’absence de stratégie globale et de dispositifs institutionnels adaptés, les mécanismes de coordination interministériels demeurent faibles en matière de protection sociale et de filets de protection. 155. Le Gouvernem ent entreprend plusieurs actions pour répondre au besoin d’une protection sociale plus complète, et en particulier d’un système de filets sociaux plus efficace, capable de mieux réagir face aux crises. Le DSRP est en cours de révision et sera remplacé fin 2010 par la Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD). L’expansion des filets sociaux, de même que l’amélioration de l’accès aux services de base, constitue une action prioritaire explicitement identifiée dans le deuxième pilier de la SCADD. En février 2010, un Comité ministériel conjoint sur la protection sociale a été mis en place par décret et la première réunion de ce comité a été organisée en juillet 2010. De plus, en avril 2010, le ministère de l’Économie et des Finances (MEF) a organisé un forum technique national sur la protection sociale, dont l’objectif annoncé était de tracer les grandes lignes d’une vision nationale et consolidée de la protection sociale, y compris de la composante « filets sociaux », qui sera directement reprise par la SCADD. A l’heure actuelle, les parties concernées nationales et internationales œuvrent de concert pour arriver à un consensus national au sein des ministères et agences, tout en unissant leurs efforts pour promouvoir une stratégie intégrée de protection sociale intégrant un système efficace de filets sociaux. 156. En excluant le coût des subventions générales des produits alimentaires et pétroliers, la dépense totale dans les programmes de filets sociaux entre 2005 et 2009 représentaient en moyenne 0,6 % du PIB. Les actuels programmes de filets sociaux du Burkina Faso peuvent être classés en cinq catégories i) transferts monétaires et quasi- monétaires ii) transferts alimentaires (ventes d’aliments à des prix subventionnés, distributions ciblées de vivres, programmes de nutrition, cantines scolaires) iii) subventions universelles (aliments et carburant) iv) travaux publics et v) exemption des frais. Une étude mondiale a récemment conclu que les programmes de filets sociaux représentent généralement entre 1 et 2 % du PIB dans les pays en développement, voire moins [Grosh et coll. 2008]. Alors que le Burkina Faso se situe dans la partie inférieure du spectre, ses dépenses dans les filets sociaux ont presque triplé entre 2005 et 2010 (en francs CFA constants de 2005), passant de 0,3 % du PIB en 2005 à 0.9 % en 2009 (en excluant les subventions générales des produits alimentaires et pétroliers). Ces dépenses dans les filets sociaux représentaient plus du tiers du montant minimum indicatif nécessaire en 2007 pour élever les plus pauvres au niveau du seuil de pauvreté par le biais de transferts monétaires. La dépense par personne pauvre (hors subventions universelles des produits alimentaires et pétroliers) se situait autour de 8 % du seuil de pauvreté en 2007. 157. Les importants efforts réalisés au niveau des programmes de transferts alimentaires la vente d’aliments à des prix subventionnés, les programmes de Page 111 90 nutrition et les distributions ciblées de vivres sont attribués à l’augmentation continue des dépenses de l’État et des bailleurs de fond en faveur des filets sociaux. Depuis 2006, le financement des programmes de filets sociaux est de plus en plus dépendant des bailleurs de fond. Hors subventions universelles, la part totale des financements extérieurs dans les filets sociaux est passée d’environ 57 % en 2005 à 69 % en 2008 et 76 % en 2009. Toujours sans les subventions des produits alimentaires et pétroliers, les dépenses de l’État ont crû plus lentement, passant de 0,1 % du PIB en 2005 à 0,2 % en 2009. L’État et les bailleurs de fonds affichent d’importantes différences dans leurs priorités les bailleurs de fond s’attachent surtout à la nutrition tandis que l’État concentre principalement son financement sur la subvention universelle des produits pétroliers. 158. La couverture des programmes de filets sociaux reste limitée comparée aux besoins. En théorie, l’estimation du nombre total des bénéficiaires des programmes de filets sociaux dépassait les 3,9 millions d’individus en 2009 (soit quelque 25 % de la population totale). En réalité, la couverture de la plupart de ces programmes est temporaire (réponse aux chocs), et le niveau des prestations de certains programmes est très bas et ne suffit pas à aider les personnes pauvres à maintenir leur consommation. Ceci est dû principalement à la limitation des allocations financières et à l’insuffisance des capacités de mise en œuvre, en particulier la difficulté à identifier et à atteindre les plus pauvres. 159. En termes de mesure de l’impact actuel des programmes de filets sociaux, les investissements ont été rares . A l’exception de quelques initiatives récentes financées par les bailleurs de fonds (transferts monétaires, coupons alimentaires et cantines scolaires) pour lesquelles des évaluations approfondies ont été réalisées ou sont en cours de réalisation, il n’existe pas suffisamment de données et de preuves, en particulier pour les programmes financés par l’État, pour informer les responsables politiques des caractéristiques des bénéficiaires, du coût des programmes, des mécanismes de ciblage et des effets réels en termes d’assistance aux personnes pauvres et vulnérables. Un système de suivi capable d’enregistrer la rentabilité des programmes et d’encourager le maintien de données basées sur des faits relatives à l’impact des politiques de protection sociale permettrait de faire des choix politiques plus éclairés. Programmes de filets sociaux existants 160. L’examen des programmes actuels de filets sociaux confirme que, malgré l’importance des besoins, peu de programmes portent assistance aux pauvres chroniques et fournissent des transferts réguliers et prévisibles. Les interventions existantes sont souvent mises en œuvre à travers des projets et pendant les périodes de choc, en se concentrant sur une zone géographique particulière. Il n’existe aucune approche systématique pour aider les ménages pauvres et vulnérables. Les principaux défis sont le manque de définition claire des groupes cibles le choix d’instruments appropriés et la mise en place d’un robuste système de suivi et évaluation pour éclairer les décisions politiques. À partir des récentes initiatives novatrices, telles que les coupons alimentaires, les transferts monétaires et l’exemptions des frais de santé, il est possible tirer des enseignements pour améliorer l’efficacité des programmes de filets sociaux existants et pour, éventuellement, en étendre l’échelle. Page 112 91 Transferts monétaires et quasi-monétaires 161. Des leçons utiles peuvent être tirées des récents programmes de transferts monétaires introduits au Burkina Faso. Depuis 2008, trois programmes pilotes de transferts monétaires ont été mis en place grâce à des financements extérieurs : un programme pilote de transferts monétaires du Conseil national de lutte contre le sida et les infections sexuellement transmissibles (CNLS-IST) et un programme de coupons alimentaires des Catholic Relief Services (CRS) et un autre du Programme alimentaire mondial (PAM). · La recherche-action du CNLS- IST, lancée en 2008, évalue le rôle du genre et de la conditionnalité dans l’impact sur la santé, l’éducation et le bien-être, des transferts monétaires ciblant les orphelins et autres enfants vulnérables (OEV) de la province de Nahouri. Les résultats de cette évaluation qui porte sur 3 900 ménages sont attendus pour la fin 2010. · Les coupons alimentaires urbains ont été introduits par le CRS en 2008 et le PAM en 2009 à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso, en tant que mesure d’urgence répondant à l’insécurité alimentaire croissante due au niveau élevé des prix alimentaires. L’évaluation à mi-parcours du programme du PAM, dont bénéficient 30 000 ménages, a mis en avant un processus de mise en œuvre efficace et des résultats favorables, en dépit des difficultés du ciblage en milieu urbain. Cette évaluation a également révélé que les transferts et les économies de dépenses alimentaires générées par le programme ont amélioré la consommation des ménages bénéficiaires, tant en quantité qu’en qualité, et, dans une moindre mesure, leur accès à la santé et à l’éducation. Transferts alimentaires 162. Les transferts alimentaires sont la principale forme de programmes de filets sociaux au Burkina Faso, représentant 87 % de l’ensemble des dépenses dans les filets sociaux entre 2005 et 2009 et concernant plus de 80 % du total estimé des bénéficiaires des filets sociaux en 2009 (hors subventions des produits alimentaires et pétroliers). Quatre types de transferts alimentaires sont actuellement en place i) les ventes ciblées d’aliments à des prix subventionnés ii) les distributions ciblées de vivres gratuits iii) les programmes de nutrition et iv) les cantines scolaires. Page 113 92 · Ventes ciblées d’aliments à des prix subventionnés En principe, les objectifs des programmes de ventes d’aliments à des prix subventionnés sont : i) de contribuer à la stabilité des prix des céréales dans les provinces déficitaires et ii) de porter assistance aux ménages vulnérables à l’insécurité alimentaire. Toutefois, les plus pauvres peuvent ne pas disposer des ressources financières leur permettant d’acheter les céréales subventionnées proposées. De plus, le nombre, le profil et le niveau de pauvreté réels des bénéficiaires restent inconnus, tout comme l’impact du programme sur la situation de la sécurité alimentaire, à cause de l’absence d’un suivi et évaluation efficace. · Distributions ciblées de vivres gratuits La distribution de vivres gratuits a lieu à travers trois mécanismes i) la distribution de vivres gratuits du Conseil national de secours d’urgence et de réhabilitation (CONASUR) ii) le programme Vivres contre éducation/formation du Programme alimentaire mondial (PAM) et iii) le programme de secours général du Catholic Relief Services (CRS). Comme le pays produit des excédents depuis ces 10 dernières années, le stock de sécurité national (SSN) n’a jamais été utilisé pour servir l’objectif visé. Néanmoins, certaines zones restent structurellement déficitaires (principalement dans les provinces du Nord et de Kadiogo), et 22 354 millions de tonnes de céréales (pour trois mois de consommation) y ont été distribuées en 2008-2009, les bailleurs de fond et les ONG partenaires couvrant environ 40 % des besoins et l’État les 60 % restants. Dans l’ensemble, le système national a apporté en 2008 une assistance alimentaire à quelque 44 000 personnes sur une base annuelle et ad-hoc (en particulier aux victimes d’inondations ou de catastrophes de faible envergure). Les transferts alimentaires du PAM, subordonnés à la participation à des cours d’alphabétisation ou de formation, ont progressivement recentrés leurs efforts sur les provinces du Sahel, et leur portée a été réduite, passant de 21 provinces en 2005 à 11 en 2010 et couvrant environ 36 000 bénéficiaires. Enfin, le CRS assiste chaque année quelque 14 000 personnes vulnérables (personnes vivant avec le VIH, orphelins, personnes âgées et personnes handicapées). Cependant, comme l’insécurité alimentaire est principalement un problème d’accès, les programmes monétaires ou de coupons alimentaires peuvent être préférables. · Programmes de nutrition Au Burkina Faso, près de deux enfants de moins de 5 ans sur 5 souffrent de malnutrition aiguë, en particulier les enfants de 24 à 59 mois, et plus d’un enfant sur trois souffre d’un retard de croissance, avec d’énormes disparités entre les régions. En milieu rural, une fille de 15 à 19 ans sur sept souffre de malnutrition. Étant donnés les besoins, le Gouvernement et ses partenaires, en particulier l’UNICEF et la Banque Mondiale, ont réalisé des efforts substantiels depuis 2003 pour Page 114 93 augmenter les interventions de nutrition. L’UNICEF, le PAM, l’ECHO et leurs ONG partenaires sont particulièrement actifs au niveau du traitement des enfants de moins de 5 ans et des femmes enceintes ou allaitantes modérément et sévèrement mal nourris. Le PAM apporte aussi un soutien nutritionnel aux personnes vivant avec le VIH. Malgré l’importance des efforts, la couverture des programmes existants reste inadéquate, alors que la malnutrition aiguë constitue l’un des principaux obstacles à la réalisation des OMD en matière de nutrition. L’UNICEF estimait à seulement 25 000 le nombre d’enfants sévèrement mal nourris traités en 2009, soit bien moins que les besoins réels (plus d’un million d’enfants sont mal nourris). · Cantines scolaires Les cantines scolaires sont l’un des principaux programmes de filets sociaux actuellement en place au Burkina Faso. En 2009, elles représentaient en moyenne 24% des dépenses totales consacrées aux filets sociaux (à l’exclusion des subventions générales) et couvraient plus de 27 % du nombre total estimé des bénéficiaires des filets sociaux. Plus de 50 % des écoles primaires du pays ont des activités de cantines scolaires, et plus de 50 % des dépenses sont financées extérieurement par l’USAID, le PAM, le CRS et les ONG. Le ministre de l’Éducation de base et de l’alphabétisation (MEBA) gère les programmes endogènes de cantines scolaires et fournit des vivres pour seulement trois mois, tandis que les programmes des bailleurs de fond visent surtout l’appui à des programmes de cantines scolaires fonctionnant tout au long de l’année scolaire. Les constats d’une récente évaluation de l’impact (2008) a rapporté que les deux formes de cantine scolaire assistée, repas pris à l’école et les rations sèches à emporter pour les filles, ont permis d’augmenter la scolarisation des filles d’environ 6 %. Aucune de ces interventions n’a montré d’impact positif significatif sur l’apprentissage, mais un impact positif des rations sèches pour les filles sur le statut nutritionnel des frères et sœurs plus jeunes a été observé.. Ces résultats mitigés invitent à reconsidérer le choix des repas pris à l’école pour augmenter les taux de scolarisation. Les repas pris à l’école sont coûteux et un impact plus important (sur la pauvreté et la nutrition) pourrait être réalisé avec des rations ciblées (éventuellement conditionnelles) avec des résultats similaires sur les taux de scolarisation, et la possibilité de cibler prioritairement les filles et réduire ainsi les disparités entre genres. Le gouvernement prévoit de faire passer son programme de cantines scolaires (repas pris à l’école) à l’échelle pendant l’année scolaire 2010-2011, afin de couvrir toutes les écoles primaires. Il n’est cependant pas clair si cette expansion est une mesure temporaire pour atténuer les effets de la crise récente ou une stratégie à long terme. L’expansion des cantines scolaires peut certes être une réponse temporaire, pratique et légitime à la crise alimentaire mais les autorités doivent continuer à rechercher l’instrument de filet social le plus adéquat à long terme, y compris les mécanismes de ciblage au plus pauvres, pour améliorer les taux de scolarisation et contribuer à la réduction de la pauvreté. Subventions universelles des produits alimentaires et pétroliers 163. Pour atténuer les effets négatifs des prix élevés des produits alimentaires et pétroliers, l’État pratique des subventions universelles qui sont onéreuses et ne Page 115 94 bénéficient pas aux pauvres. La subvention universelle des denrées alimentaires a été introduite en 2008 en réaction à la hausse des cours mondiaux. Elle s’est avérée très onéreuses et moins qu’efficace pour atteindre les pauvres. Les deux quintiles les plus pauvres ont été les plus touchés par la hausse des prix alimentaires mais n’ont que très peu bénéficié des exonérations fiscales seuls 10 % de ces prestations ont bénéficié au quintile le plus pauvre. Au bout de six mois, la mesure a été annulée et le programme clôturé. D’un autre côté, un certain nombre de produits pétroliers sont subventionné depuis des années par l’État, malgré le coût élevé pour les finances publiques et l’impact très limité sur les ménages les plus pauvres (en dehors du pétrole lampant). Selon les estimations, plus de 84 % des prestations profitent aux non-pauvres. Dans l’ensemble, le coût budgétaire direct de l’exonération des taxes à l’importation sur les produits pétroliers équivalait, selon les estimations, à 0,7 % du PIB en 2007 et 2008. Il s’agit là d’un coût élevé pour un impact très limité sur les personnes pauvres et vulnérables. Travaux publics à haute intensité de main-d’œuvre et programmes Argent/Vivres contre travail 164. Il y a beaucoup à apprendre de l’expérience positive des programmes de travaux publics actuellement en cours. Le programme de Pistes rurales Désenclavement à l’Est (PrEst), mis en œuvre par l’ONG Helvetas depuis 2002 sous la supervision du ministère des Infrastructures (MID), adopte une approche à haute intensité de main- d’œuvre pour la construction d’infrastructures en milieu rural. Bien que ce projet ne soit pas conçu comme un filet social spécifiquement destiné aux personnes pauvres valides, les résultats montrent un impact positif sur la réduction de la pauvreté et le développement local (par exemple, une plus grande utilisation des services de santé, un taux de scolarisation plus élevé et un plus faible taux de migration des jeunes). Entre 2005 et 2007, le projet a employé en moyenne 865 personnes (principalement des jeunes de 20 à 35 ans, dont 16 % de femmes) par an pendant environ six mois, en pratiquant un taux de rémunération inférieur au salaire minimum garanti. Parmi les autres expériences de travaux publics, le programme Vivres contre infrastructures du PAM se concentre principalement sur la construction de biens de qualité et, dans une moindre mesure, sur des activités à haute intensité de main-d’œuvre. En s’appuyant sur les expériences du PrEst et du programme Vivres contre infrastructure du PAM, d’autres types de programmes de travaux publics pourraient être introduits en tant qu’instruments efficaces de filets sociaux. Exemption des frais de santé 165. Bien que plusieurs initiatives visent à fournir des soins de santé gratuits aux personnes pauvres et vulnérables, elles ne sont pas opérationnelles en raison du manque de mécanismes de mise en œuvre. A titre d’exemple, la politique de subvention des Soins obstétricaux et néonataux d’urgence (SONU) de 2006 donne aux femmes indigentes le droit à des services de santé gratuits. Malheureusement, elle ne définit pas les conditions d’éligibilité et empêche ainsi ces femmes de bénéficier de ces services. Ce programme se heurte à trois grandes questions : i) comment définir qui est indigent (ou pauvre) ii) qui décide de ce statut et iii) qui supporte les coûts de l’exonération des frais Quelques initiatives intéressantes ont toutefois été menées, en milieu rural par l’Université Page 116 95 de Montréal (en collaboration avec l’IRSS/CNRST) ainsi que par le Centre de recherche sur la santé de Nouna, et en milieu urbain par le PAM et l’IRD. Ces initiatives se sont appuyées sur un processus communautaire pour sélectionner les bénéficiaires de l’exemption des frais payés par l’usager. Bien que l’expérience mondiale indique que l’abolition du paiement par l’usager pour les plus pauvres est équitable et réalisable tant techniquement que financièrement, d’autres études devraient être entreprises pour en définir les mécanismes de mise en œuvre. En particulier dans le cadre du financement du système de santé burkinabé, les points cruciaux suivants devront être examinés i) quel modèle faut-il promouvoir subventions des soins de santé (ministère de la Santé MS), assurance maladie (ministère du Travail et de la Sécurité sociale MTSS), exemption des frais pour les personnes indigentes (pauvres) (ministère de l’Action sociale et de la Solidarité nationale MASSN), exemption des frais pour les groupes vulnérables (ONG), transferts monétaires (Conseil national de lutte contre le sida CNLS), etc. ii) comment financer le secteur de la santé : paiement par l’usager, réallocation des dépenses nationales, nouvelles sources de financement (exemple taxe sur les téléphones portables), financement international, etc. et iii) quels mécanismes de mise en œuvre utiliser pour identifier les pauvres et offrir une compensation financière aux centres de santé B. Recommandations pour les politiques A. Renforcer le cadre stratégique, institutionnel et financier pour la conception, la mise en œuvre, la gestion, le suivi et évaluation des programmes de filets sociaux a) Adopter une stratégie nationale de protection sociale intégrant les filets sociaux 166. Élaborer une stratégie complète de protection sociale, accordant la priorité à une composante de filets sociaux efficaces (transferts non contributifs). Lorsque la pauvreté est envahissante et affecte l’ensemble du pays, il devient crucial d’élaborer une stratégie de protection sociale complète, centrée sur les systèmes aussi bien contributifs que non contributifs. La Politique nationale de protection sociale ébauchée en 2007 constitue un bon point de départ et devrait être actualisée en tenant compte des défis auxquels le pays est actuellement confronté. Étant donné l’importance des besoins de santé et d’éducation, les instruments de protection sociale devraient contribuer directement au développement du capital humain. Cela invite à prêter une intention particulière aux besoins des enfants, qui constituent près de la moitié de la population 50 et forment un groupe cible prioritaire pour l’investissement dans le capital humain (Encadré 14). L’immense défi démographique 51 doit aussi être pris en compte, ce qui suggère, par exemple, d’investir plus dans l’éducation des filles. 50 46,6 % de la population a entre 0 et 15 ans. [INSD 2006]. 51 Le recensement général de la population et du logement de 2006 a révélé un taux de croissance démographique de 3,1 %, contre 2,4 % au cours de la période précédente, ce qui rend encore plus difficile de satisfaire les besoins en services de base. Page 117 96 Encadré 14 : Principes d’une protection sociale tenant compte des enfants Le s principes suivants devraient être considérés pendant la conception, la mise en œuvre et l’évaluation de programmes de protection sociale tenant compte des enfants : ƒ\03 Éviter les effets néfastes sur les enfants et réduire ou atténuer les risques économiques et sociaux qui affectent directement la vie des enfants. ƒ\03 Intervenir le plus rapidement possible lorsque les enfants sont exposés à des risques, afin de prévenir toute déficience ou tout préjudice irréversible. ƒ\03 Prendre en compte les risques et vulnérabilités particuliers au genre et à l’âge des enfants tout au long du cycle de vie. ƒ\03 Atténuer les effets des chocs, de l’exclusion et de la pauvreté sur les familles, en reconnaissant que celles qui élèvent des enfants ont besoin d’un appui pour garantir l’égalité des chances. ƒ\03 Prendre des dispositions particulières pour atteindre les enfants particulièrement vulnérables et exclus, y compris les enfants qui ne bénéficient pas des soins de leurs parents et ceux qui sont marginalisés au sein de leur famille ou de leur communauté à cause de leur genre, d’un handicap, de leur ethnie, du VIH et du sida ou d’autres facteurs. ƒ\03 Considérer les mécanismes et la dynamique interne des ménages qui peuvent affecter la manière dont les enfants peuvent être atteints, en portant une attention particulière à l’équilibre des pouvoirs entre hommes et femmes au sein des ménages et dans la communauté en général. ƒ\03 Écouter les avis et opinions des enfants et de ceux qui s’en occupent, ainsi que des jeunes, pour mieux comprendre et concevoir les programmes et systèmes de protection sociale. Source : DfID UK et coll., 2009. 167. Encourager les synergies et les économies d’échelle . Lorsque les ressources financières sont limitées, il est nécessaire d’encourager les synergies et les économies d’échelle entre les différents instruments de protection sociale et les autres politiques sociales, telles que l’éducation, la santé et l’emploi, à travers des approches de ciblage conjointes et des programmes de filets sociaux soutenant directement la demande de santé et d’éducation. Ces approches devront être clairement formulées dans un plan d’action interministériel de protection sociale. 168. Clarifier les objectifs du système de filets sociaux. Dans le cadre d’une stratégie de protection sociale élargie, la composante des filets sociaux aura les objectifs suivants i) soutenir directement la consommation des populations chroniquement pauvres et vulnérables ii) garantir l’accès des personnes pauvres et vulnérables aux services sociaux de base afin de promouvoir l’investissement humain et iii) apporter un soutien temporaire aux populations pauvres et vulnérables affectées par les chocs. Au Burkina Faso, les principes prioritaires du système de filets sociaux devraient donc être les suivants i) garantir que les populations dans un état de pauvreté extrême chronique et vulnérables bénéficient d’un soutien régulier et prévisible, ainsi que de programmes leur permettant d’échapper aux pièges de la pauvreté et de rompre le cycle intergénérationnel de transmission de la pauvreté ii) fournir des revenus temporaires aux groupes vulnérables en cas de choc iii) prêter une attention particulière aux besoins des enfants vulnérables (exemples nutrition, éducation et transferts monétaires conditionnels) et des femmes pauvres et vulnérables (par exemple, minimiser les impacts potentiellement défavorables et optimiser les impacts favorables sur les femmes et l’égalité hommes-femmes) et iv) faciliter l’accès des personnes pauvres et vulnérables aux services sociaux de base. 169. Développer une vision partagée. Une vision nationale partagée est indispensable pour mettre en place un système de filets sociaux efficace, c’est-à-dire un système Page 118 97 composé de plusieurs programmes, se complétant mutuellement tout en complétant les autres politiques sociales, satisfaisant les critères suivants [Grosh et coll. 2008] : ƒ\03 Approprié conçu pour s’adapter au mieux aux circonstances ; ƒ\03 Adéquat couvrant les différents groupes ayant besoin d’assistance ; ƒ\03 Équitable traitant les bénéficiaires de manière juste et équitable ; ƒ\03 Efficient fonctionnant efficacement avec le moins de ressources possibles pour obtenir l’impact désiré, mais avec suffisamment de ressources pour exécuter correctement toutes les fonctions du programme ; ƒ\03 Incitatif n’entraînant aucune démotivation (exemple participation au marché de l’emploi) ; ƒ\03 Soutenable capable d’être poursuivi de manière équilibrée compte tenu des contraintes imposées par les dépenses publique, tout en restant financièrement et politiquement viable. ƒ\03 Dynamique évoluant au fil du temps. 170. S’accorder sur les actions prioritaires. Les différents documents stratégiques ont tendance à faire référence à l’ensemble des personnes dans le besoin, sans établir clairement des priorités. Étant donné les contraintes financières, il est indispensable de se mettre d’accord sur des priorités communes pour qu’un impact suffisant puisse se faire sentir. Comme mentionné plus haut, il est recommandé de donner la priorité à l’investissement dans le capital humain. Ce qui implique, si on veut aussi investir dans les activités les plus efficientes, d’accorder la priorité aux actions qui appuient dès son début le développement des enfants (Figure 13). 52 Figure 13 : R endement de l’investissement dans le capital humain, en fixant initialement un investissement égal pour tous les âges Source : Carneiro et Heickman, 2003. 52 « Toutes choses restant par ailleurs égales, le taux de rendement d’un dollar investi lorsqu’une personne est encore jeune est plus élevé que celui du même dollar investi à un âge plus avancé. Les fruits des investissements précoces sont récoltés sur une plus longue période que ceux des investissements effectués plus tard au cours du cycle de vie. De plus, comme les investissements précoces accroissent la productivité (diminuent les coûts) des investissements ultérieurs, le capital humain est synergétique. » [Carneiro et Heickman, 2003:7]. Page 119 98 171. Clarifier les liens avec les autres politiques . Les programmes de filets sociaux sont sensés agir en conjonction avec d’autres programmes de réduction de la pauvreté, notamment les programmes liés au marché de l’emploi, les retraites, l’assurance maladie, les politiques visant la stabilité macroéconomique, le développement rural et la formation du capital humain. Les filets sociaux sont généralement utilisés pour compléter les interventions liées à l’offre et pour agir là où d’autres politiques ne sont pas capables de produire des résultats suffisants à court terme. Au Burkina Faso, ils pourraient s’avérer particulièrement utiles pour garantir que les dépenses d’éducation et de santé soient bien orientées vers les plus pauvres. Il est nécessaire de clarifier les complémentarités et les synergies avec les autres politiques sociales (sécurité alimentaire, éducation, santé, emploi, assurance maladie, population, etc.) afin d’appuyer la coordination des efforts. 172. S’accorder sur un langage commun. Aujourd’hui, l’absence de langage commun pour aborder les questions de protection sociale pose un problème majeur et rend difficile le dialogue entre ministères et avec les partenaires internationaux. Il est d’une importance cruciale que le gouvernement burkinabé élabore un glossaire sur la protection sociale qui soit commun à tous les ministères. b) Renforcer le cadre institutionnel de la protection sociale et des filets sociaux. 173. Veiller à ce que le comité interministériel permanent pour la protection sociale soit opérationnel. La protection sociale est une question interministérielle et sa supervision ne devrait donc pas être la responsabilité d’un seul ministère. Étant donné le caractère multisectoriel de la protection sociale, le gouvernement a établi par décret, en février 2010, un Comité permanent pour la protection sociale qui sera chargé de revoir la stratégie de protection sociale, de superviser/coordonner les diverses initiatives (études, projets pilotes, etc.) qui ont été lancées ou devraient l’être, et de veiller à l’établissement du dynamique dialogue intersectoriel nécessaire entre les divers ministères sectoriels. Deux sous-comités devraient aussi être constitués, l’un pour les programmes d’assurance sociale (assurance maladie et système de retraites) et l’autre pour les programmes de filets sociaux. Il s’agit d’une étape importante qui devra s’accompagner d’un renforcement des mécanismes de coordination inter-, intra- et extra-ministérielle. Les raisons de l’impact limité des précédentes initiatives de protection sociale au Burkina Faso mettent en lumière le besoin de garantir en priorité la cohérence sectorielle entre les divers départements concernés, et de promouvoir des évaluations de l’impact des politiques ainsi que des décisions politiques éclairées par des faits. 174. Clarifier le rôle et les responsabilités des différentes institutions nationales impliquées dans les filets sociaux. Une fois que le Cadre stratégique pour la protection sociale aura été défini et que les actions prioritaires en matière de filets sociaux auront été clarifiées, les fonctions respectives des principales structures créées pour la prestation de l’assistance sociale (par exemple, le MASSN, le FSN et le CONASUR au niveau central) devront être revues pour éviter les lacunes et les chevauchements et pour aboutir à une organisation plus efficiente. 175. Définir des modalités de mise en œuvre appropriées pour les nouveaux programmes de filets sociaux. L’identification de l’institution qui dirigera la conception, la mise en œuvre et le fonctionnement continu du programme de transfert social est une première étape cruciale dans l’adoption de ce celui-ci. L’institution qui dispose des caractéristiques suivantes sera la mieux placée pour remplir ce rôle [Samson et coll. 2006] i) un engagement politique durable envers la protection sociale ii) l’influence politique Page 120 99 suffisante pour obtenir des ressources et défendre les priorités du programme et iii) la capacité institutionnelle de mettre en place un système efficace de filet social. Cela dit, il est souvent impossible de trouver ces trois qualités dans une seule et même institution. L’institution choisie est en général l’une des suivantes : le ministère du développement social concerné (le plus engagé) le ministère responsable des finances (le plus puisant) ou une agence séparée placée sous l’autorité d’un comité composé des ministères concernés (rassemblant engagement, influence et capacité). Au fil du temps, une redistribution des responsabilités est également possible, comme cela a été observé en Afrique du Sud (des autorités provinciales vers une agence nationale de sécurité sociale), au Bangladesh (du ministère de l’Assistance sociale vers le ministère des Femmes et des Enfants) ou encore en Namibie (du ministère du Travail vers le ministère de la Santé et des Services sociaux). En Inde, un partage des responsabilités a été décidé, le ministère du Travail supervisant les retraites et le Système national des allocations familiales administrant les subventions. Chacun de ces modèles présente des avantages et des inconvénients. Le choix des modalités institutionnelles au Burkina Faso devra s’appuyer sur un examen des institutions concernées, des objectifs primaires du programme (par exemple, réduction de la pauvreté par rapport à éducation) et de la vision à long terme de la protection sociale. 176. Garantir la séparation des fonctions . L’institutionnalisation d’un programme ne signifie pas que toutes les fonctions doivent être confiées à une seule et unique institution ou à des institutions nationales uniquement. La clé d’une conception et d’une mise en œuvre réussies est de déléguer la responsabilité de chaque fonction à l’institution officielle ou non dont c’est l’activité principale, et de mettre en place des mécanismes de contrôle robustes. A titre d’exemple, la fourniture de transferts monétaires est une activité principale des banques, tandis que c’est traditionnellement le rôle de la société civile de veiller au respect des droits des personnes. Une telle stratégie de mise en œuvre (accompagnée d’une conception adaptée) contribuera à minimiser les risques fiduciaires et de corruption et à optimiser l’efficacité. 177. Soutenir le renforcement des capacités . Le concept de filet social en tant qu’investissement social nécessaire (régulier et prévisible) est passablement nouveau au Burkina Faso. Des efforts de sensibilisation et de formation seront nécessaires aussi bien au niveau national que local. 53 D’autres initiatives pourraient s’avérer utiles pour que les filets sociaux, et la protection sociale en général, soient mieux compris, génèrent plus 53 En janvier 2010, un séminaire de formation soutenu par l’UNICEF a permis de familiariser 30 techniciens issus de 11 ministères aux notions de base de la protection sociale et des filets sociaux. Page 121 100 d’intérêt et voient leur capacités renforcées, par exemple, par le biais de formations « sur le tas » et de voyages d’études. 178. Favoriser une plus grande participation des pouvoirs locaux pour une mise en œuvre efficace des politiques nationales. Les autorités décentralisées doivent être impliquées dans le processus global d’élaboration des politiques. Leurs rôles et responsabilités dans la fourniture de l’assistance sociale devront être clarifiés et renforcés. Toute responsabilité nouvellement définie devra s’accompagner d’allocations budgétaires (exemples formation du personnel, création de ressources matérielles ou humaines, et renforcement du dispositif institutionnel) et être soutenue par de bons mécanismes de coordination entre les différents ministères sectoriels. 179. Explorer plus avant le rôle des ONG et du secteur privé pour la fourniture des filets sociaux. Les capacités des autorités nationales et locales demeurent quelque peu limitées sur le terrain, en particulier dans les zones reculées qui ont le plus besoin d’assistance. Les ONG et le secteur privé pourraient être des partenaires utiles pour intervenir dans ces zones, et il faudrait examiner la possibilité d’une solution basée sur des contrats. Une telle solution actuellement en cours d’élaboration dans le cadre du PADS pourrait fournir des enseignements utiles et être éventuellement étendue au-delà du secteur de la santé. c) Renforcer le cadre financier 180. Avec un revenu par habitant équivalant à 480 dollars EU, l’excédent disponible pour une redistribution à travers un programme permanent de filets sociaux est relativement mince. La forte proportion de pauvres au Burkina Faso signifie que i) tout programme suffisamment étendu pour avoir un impact substantiel serait extrêmement coûteux et ii) les options abordables ne pourront probablement bénéficier qu’à un segment restreint de la population ou n’avoir qu’un effet limité sur les revenus des ménages. Dans ces conditions, le Burkina Faso devra considérer avec attention ses options en matière de politique publique et se montrer très sélectif dans le choix d’interventions capables d’atteindre les plus pauvres tout en restant efficientes. Trois questions centrales devront guider ses choix : i) quels sont les objectifs réalistes d’un filet social financé –par des fonds publics, étant donné la nature et les caractéristiques des pauvres et les préférences politiques et sociales avouées ii) quels groupes (ou sous-groupes) de pauvres seront-ils bénéficiaires et iii) quels sont les programmes de filets sociaux les plus efficients en termes de réalisation des objectifs souhaités En conséquence, pour évaluer la faisabilité de l’expansion des filets sociaux, le gouvernement doit considérer le rôle qu’ils devraient jouer dans la stratégie de développement du pays, le niveau de dépense qui doit raisonnablement leur être consacré, et le meilleur choix de programmes possible en prenant en compte le profil de la pauvreté et de la vulnérabilité, les performances des programmes existants, l’expérience internationale et la capacité institutionnelle nationale. Page 122 101 181. Grâce à un meilleur ciblage, à des efforts pour rationaliser les coûts et à une réallocation des dépenses publiques, il semble raisonnable d’espérer une augmentation progressive de la couverture, et donc des dépenses consacrées aux filets sociaux, d’ici deux à trois ans. Comme les recettes ne permettront pas de créer un espace fiscal substantiel, il semble plus réaliste d’envisager une augmentation des dépenses consacrées aux filets sociaux grâce à i) une réallocation des dépenses consacrées aux programmes moins efficaces et ii) une gestion plus efficace des dépenses publiques. La précédente analyse du profil de la pauvreté et l’examen des dépenses publiques suggèrent que l’expansion progressive de certains programmes de filets sociaux efficaces et complémentaires, tels que les programmes de nutrition, les travaux publics et les récents transferts monétaires, constituerait un choix de politiques approprié. L’augmentation de la couverture des filets sociaux et des dépenses soulève la question de l’espace fiscal et appelle une analyse approfondie des allocations de dépenses et de leur efficacité. Dans ce contexte, au sein des secteurs prioritaires, tels que la santé et l’éducation, les dépenses doivent devenir plus efficaces et plus favorables aux pauvres. En outre, il est possible de réaliser des gains d’efficacité en contrôlant les dépenses discrétionnaires. En s’appuyant sur l’expérience internationale, les dépenses dans les filets sociaux au Burkina Faso pourraient atteindre environ 1,5 % du PIB. Une expansion plus ambitieuse des dépenses dans les filets sociaux ne semble pas souhaitable pour diverses raisons. En premier lieu, il faut éviter d’aboutir à une situation où une augmentation trop prononcée des dépenses dans ce secteur entraînerait une baisse des dépenses dans d’autres secteurs tout aussi vitaux pour la réduction de la pauvreté et de la vulnérabilité des populations, tels que la santé et l’éducation. En second lieu, il est important de regarder l’efficacité des dépenses déjà engagées avant de les augmenter trop rapidement. En troisième lieu, les capacités de mise en œuvre sur le terrain sont limitées. L’efficacité des dépenses dans les filets sociaux doit être renforcée grâce à un meilleur ciblage des bénéficiaires et une réduction relative des coûts de gestion. De plus, la conception et le pilotage des éventuels programmes, tels que les transferts monétaires ou les travaux publics, risquent de modifier la priorité relative des programmes, si bien que la destination et les montants totaux des dépenses devront être reconsidérés. 182. De plus, un arbitrage budgétaire est nécessaire afin de promouvoir ou d’étendre les programmes de filets sociaux les plus rentables. Afin de pérenniser le financement des programmes de filets sociaux, les étapes suivantes peuvent être entreprises : · Établir une classification rigoureuse des dépenses de protection sociale et une liste exhaustive des programmes de filets sociaux. Ceci est essentiel pour estimer clairement le niveau de dépenses justifiées et des dépenses nécessaires pour atteindre les objectifs du système. · Déterminer l’enveloppe totale dans le budget de l’État nécessaire pour atteindre la couverture souhaitée pour les filets sociaux, et la provisionner de manière adéquate dans le budget de chaque année. Dans ce contexte, il faudra déterminer quel niveau de dépenses dans les filets sociaux est raisonnable et abordable. Page 123 102 · S’assurer que l’État est capable de trouver des financements pour les filets sociaux autrement que sur la base de projets, par exemple en sollicitant un soutien budgétaire dans le cadre d’un crédit à l’appui de la réduction de la pauvreté de l’IDA et d’opérations semblables d’autres partenaires extérieurs. Ceci implique une amélioration de la gestion du système de filets sociaux et de divers aspects tels que les mécanismes fiduciaires, la passation des marchés et les audits, ainsi que du suivi et évaluation des résultats. 183. Des économies sont possibles grâce à un meilleur ciblage, une rationalisation des coûts et une réallocation des dépenses publiques par la réduction des programmes de petite envergure ou inefficaces, tout en renforçant quelques programmes viables en les ciblant mieux pour obtenir de meilleurs résultats . Dans ce cadre, il faut que les dépenses deviennent plus efficaces et pro- pauvres en général, que les subventions mal ciblées soient réduites, et que les dépenses soient concentrées sur les secteurs prioritaires tels que la santé et l’éducation. Des économies sur les dépenses discrétionnaires pourraient de plus entraîner des gains d’efficience. d) Renforcer le suivi et évaluation des programmes 184. Promouvoir des évaluations robustes et indépendantes des processus et de l’impact des programmes et favoriser des décisions politiques éclairées par des faits . Les objectifs spécifiques d’un système de S&E sont i) fournir de l’information à la mise en œuvre des programmes et mettre en lumière les ajustements nécessaires en temps opportun ii) démontrer l’impact du programme aux responsables politiques, aux partenaires au développement et au grand public et iii) tirer les enseignements de l’expérience. La fonction d’évaluation est particulièrement critique pour éclairer le développement de politiques basées sur des faits. Comme mentionné tout au long de ce rapport, très peu d’informations valables ont été récoltées sur les caractéristiques réelles des bénéficiaires, les coûts et l’impact des programmes de filets sociaux existants. Ce manque de données entrave la mobilisation d’un plus fort appui politique et financier pour ces programmes. Un suivi et évaluation robuste sera particulièrement crucial pour les projets pilotes envisagés (exemples transferts monétaires, travaux publics et exemption des frais). 185. Un suivi systématique de l’ensemble des programmes de filets sociaux est donc nécessaire pour pouvoir juger si les ressources sont bien utilisées. Il s’agit d’une condition préalable pour le pilotage ou l’augmentation d’échelle de tous les programmes de filets sociaux. En particulier, cinq actions systémiques peuvent être envisagées : ƒ\03 Établir une classification rigoureuse des dépenses de protection sociale et une liste exhaustive des programmes de filets sociaux. ƒ\03 Définir les exigences minimales pour la production de rapports sur les programmes de filets sociaux afin de permettre l’évaluation de leur efficacité , avec une ventilation des coûts entre la prestation des services et les frais généraux, suivant les sources de financement, etc. Dans ce but, un cadre commun devrait clarifier les mécanismes de suivi et d’évaluation des programmes de filets sociaux. Le système de suivi et évaluation comprendra plusieurs indicateurs genre, santé, éducation, pauvreté, nutrition, croissance économique, cohésion sociale, etc. Le travail au sein d’un cadre commun doit améliorer l’efficience des programmes ainsi que la comparaison des programmes entre eux. Page 124 103 ƒ\03 Élargir l’évaluation pour y intégrer des mesures rigoureuses de l’impact, en m ettant l’accent sur le pilotage lorsque de nouvelles interventions sont introduites ou sur l’extension des interventions existantes à de nouvelles catégories de bénéficiaires. ƒ\03 Faire participer la société civile au suivi et évaluation . La société civile est actuellement exclue du processus de suivi et évaluation des filets sociaux fournis par l’État et ses partenaires. Des efforts doivent être faits pour soutenir l’implication de la société civile dans le suivi des programmes, par exemple en soutenant son engagement auprès de l’Assemblée Nationale ou le suivi des budgets par les communautés. ƒ\03 Transmettre systématiquement les rapports d’évaluation des programmes aux ministères sectoriels responsables de la protection sociale, des filets sociaux et du maintien d’une base de données sur les programmes. Ceci permettra aux responsables politiques de prendre des décisions plus éclairées. ƒ\03 Renforcer les capacités des ministères sectoriels en matière de suivi et évaluation et organiser pour les responsables des programmes, des formations aux techniques de suivi et d’évaluation, accompagnées de mécanismes favorisant l’échange d’expérience entre les divers programmes. B. Améliorer l’efficacité du système de filets sociaux a) Définir l’ensemble d’instruments de filets sociaux le plus adapté 186. Mettre à jour l’analyse de la pauvreté pour identifier clairement les groupes cibles prioritaires. Les données disponibles sur la pauvreté sont dépassées et ne reflètent probablement pas les conditions prévalant depuis la crise de 2008 provoquée par l’envolée des prix alimentaires et pétroliers. Les données de l’EICVM 54 actuellement en cours devraient être accessibles dans le courant 2010. Il faudra alors mettre à jour l’analyse de la pauvreté en s’appuyant sur ces données, et des cartes de la pauvreté pourront être dressées à partir du recensement de 2006. 187. Ide ntifier les instruments appropriés pour chaque groupe cible prioritaire. Les type, rôle, envergure et fréquence des instruments de filets sociaux doivent être définis pour chaque ensemble de priorités. Sur base de l’analyse de pauvreté disponible, il est proposé de prendre le groupe d’instruments suivants comme point de départ pour la discussion et les études de faisabilité de la combinaison de programmes à mettre en place de manière permanente pour combattre la pauvreté chronique i) Des programmes de compléments nutritionnels pour les femmes enceintes et allaitantes et les enfants de moins de 5 ans, y compris les veuves et leurs enfants, pour garantir que les besoins nutritionnels de ces groupes particulièrement vulnérables soient couverts ; ii) Des programmes ciblés de cantines scolaires pour les enfants de 6 à 14 ans, afin de stimuler la scolarisation et l’assiduité scolaire des enfants pauvres, y compris ceux des veuves ou ex-veuves ; iii) Des transferts monétaires réguliers aux femmes vivant dans des ménages chroniquement (et extrêmement) pauvres afin d’augmenter les revenus réels et les dépenses alimentaires des ménages les plus pauvres et 54 Enquête intégrale sur les conditions de vie des ménages. Page 125 104 iv) Des travaux publics saisonniers à haute intensité en main-d’œuvre afin de fournir une source de revenus aux hommes et femmes pauvres et de construire des infrastructures publiques ou fournir des services communautaires. 188. Même lorsqu’ils ne ciblent pas explicitement les femmes, les programmes de filets sociaux devraient veiller à ne pas renforcer les inégalités entre les genres et les préjugés sociaux. L’Encadré 15 évoque certaines des choses à faire et à ne pas faire. Encadré 15 : Choses à faire et à ne pas faire pour une protection sociale sensible aux femmes Même si le détail des politiques varie fortement selon les circonstances et les objectifs, du point de vue de l’égalité des genres, un ensemble de principes clairs devrait guider la réflexion sur les politiques de protection sociale. L’objectif clé d’ensemble des politiques devrait être d’aider les femmes pauvres et vulnérables, qu’elles soient ou non explicitement ciblées. Afin d’atteindre cet objectif, les politiques devraient : · Ne pas considérer un modèle unique de ménage et se rappeler que le bénéficiaire du transfert est important les transferts devraient être destinés aux femmes ; · Ne pas se limiter aux chefs de familles, aux hommes ou aux chômeurs ; · Rechercher des mécanismes réalisables de ciblage des pauvres en tant qu’individus, sans coût inopportun pour les atteindre ; · Ne pas entretenir de préjugés contre les femmes, ne pas exacerber les inégalités ; · Essayer de compenser les préjugées préexistants à l’encontre des femmes ; · Considérer la forme du transfert : Une partie des salaires ou les transferts en nature sont souvent préférés par les femmes car les hommes du ménage peuvent plus facilement s’approprier l’argent liquide. L’imposition de conditions est souvent souhaitable pour la même raison ; · Prendre en compte les coûts de transaction : les femmes sont souvent confrontées à de plus grandes contraintes de temps et à une plus faible mobilité ; · Ne pas oublier que les femmes subissent de multiples contraintes sociales ; · Fournir des services de garde d’enfants ; · Ne pas oublier que les réactions aux politiques peuvent varier en fonction du genre par exemple, le manque à gagner ou les effets incitatifs peuvent varier ; · Ne pas oublier que les programmes peuvent avoir des conséquences imprévues : les transferts ont sur l’offre de main-d’œuvre un impact différent selon le genre. Ils peuvent entraîner une redistribution des tâches vers les enfants au sein des ménages ; · Ne pas supposer que l’égalité prévue dans la loi est suffisant. Des actions assertives peuvent être nécessaires pour des raisons à la fois d’efficacité (par exemple, externalités potentielles dues aux avantages pour les enfants du ciblage des femmes le genre du bénéficiaire des transferts compte pour le bien-être des ménages) et d’égalité (lorsque les femmes sont plus pauvres et vulnérables). Source : van de Walle 2010. 189. Améliorer les mécanismes d’augmentation/réduction de l’échelle des programmes en cas de choc. Une fois qu’un système de filets sociaux permanent approprié est en place, des mécanismes particuliers devraient être envisagés pour étendre leur échelle en cas de crise, en les complétant avec d’autres instruments temporaires. Les règles d’extension des programmes devront être intégrées au système national de sécurité Page 126 105 alimentaire (système d’alerte précoce, 55 plans d’urgence, expérience des interventions d’urgence, etc.) b) Renforcer l’efficacité de quelques programmes de filets sociaux choisis 190. Améliorer l’efficience des programmes. Un examen critique approfondi de chaque programme (largement inexistant au Burkina Faso) devrait éclairer les nécessaires ajustements. Sur la base de l’examen des programmes existant présenté dans ce rapport, les recommandations initiales sont les suivantes : i) Transferts monétaires De robustes évaluations d’impact des programmes pilotes en cours devraient prochainement fournir de l’information à l’éventuelle extension des programmes monétaires. Avant d’envisager l’augmentation d’échelle des transferts monétaires pour faciliter l’accès des familles extrêmement pauvres à une meilleure alimentation, en milieu rural comme en milieu urbain, il sera nécessaire de mener de nouvelles études sur leur pertinence et leur faisabilité. En particulier pour la conception et les modalités d’exécution, il serait extrêmement utile de mettre en œuvre, en collaboration étroite avec les autorités nationales, des systèmes pilotes de transferts monétaires prévisibles destinés aux membres féminins des ménages pauvres, sur une base pluriannuelle (pour permettre des ajustements successifs des programmes et un apprentissage) et en couvrant une population suffisamment nombreuse (pour recueillir des faits probants). L’intégration de mesures incitatives pour encourager les mères d’enfants en bas âge à participer à des interventions de nutrition liées à l’offre pourrait également être envisagée. ii) Ventes d’aliments à des prix subventionnés et distributions ciblées de vivres Un examen plus approfondi est nécessaire pour évaluer leur efficience et leur impact sur les bénéficiaires. Toutefois, une réduction de l’envergure de ces programmes en faveur de programmes avec un ciblage plus performant devrait être envisagée. iii) Programmes de nutrition Étant donné les besoins existants, la couverture des programmes doit être élargie et leur cadre stratégique et institutionnel renforcé. iv) Cantines scolaires En se basant sur les estimations disponibles, des études supplémentaires sont nécessaires pour évaluer l’efficience relative des programmes de cantines scolaires assistées par rapport aux autres formes de filets sociaux, en prenant en compte les coûts, l’impact sur la cohésion sociale, le développement humain, etc., et pour rechercher un modèle intégré amélioré de cantines scolaires, qui garantisse un meilleur ciblage des enfants pauvres et une contribution au développement local, grâce à une meilleure appropriation et à un approvisionnement local. v) Subventions générales Ces mesures ne devraient être adoptées qu’en dernier recours en période de crise et surtout cibler les produits qui sont principalement consommés par les pauvres. vi) Travaux publics Il est nécessaire d’évaluer la pertinence et la faisabilité de l’introduction de nouveaux programmes ciblant les pauvres en milieu rural, comme l’utilisation d’un faible taux de rémunération et d’autres critères de ciblage possibles. Ce type de programmes s’est révélé particulièrement adapté dans les situations de forte vulnérabilité, pour soutenir le développement régional et les structures communautaires (Annexe 3), et un programme de travaux publics 55 Le système d’alerte précoce (SAP) est alimenté par plusieurs systèmes d’information sectoriels centralisés au DGPER. Chaque année, une enquête sur la sécurité agricole est menée auprès de 1 000 personnes, afin de déterminer le niveau de vulnérabilité et le nombre de personnes concernées. Page 127 106 (Argent contre trav ail) pourrait devenir un filet social productif s’il est conçu en intégrant de bons principes d’assistance-travail (salaire inférieur à celui du marché, sélection des projets, etc.), et il pourrait avoir un effet direct sur la génération de revenus lors des pénuries saisonnières d’emplois et en temps de crise. vii) Exemption des frais de santé La suppression du paiement par l’usager et les exemptions de frais pour les pauvres ruraux (en particulier, les enfants de moins de 5 ans, les femmes enceintes et allaitantes, les veuves vulnérables ou remariées et leurs enfants) devraient être soigneusement examinées dans le cadre d’une stratégie sanitaire élargie et de réformes financières, afin de mettre en place des mécanismes de compensation qui garantiront la mise en œuvre efficace du programme. Les questions suivantes sont critiques et devront être abordées : identification des bénéficiaires, systèmes de financement et mécanismes de mise en œuvre. 191. Renforcer les liens entre les filets sociaux et les autres services sociaux (éducation et santé). Les investissements suivants sont importants pour élargir la couverture, améliorer l’efficacité et accroître l’impact des transferts sociaux : i) Services d’assistance sociale (pour lesquels le rôle de la société civile est important) Travailleurs sociaux communautaires pour aider les ménages à bénéficier des prestations auxquelles ils ont droit et pour créer des opportunités de mettre les ménages en relation avec les autres services disponibles (par exemple, les activités génératrices de revenus) communication et information du public sur les critères d’éligibilité et les droits aux prestations programmes de soutien parental et services communautaires de santé et d’éducation de qualité, pour permettre aux bénéficiaires d’investir efficacement dans le capital humain et ii) Mesures de renforcement des capacités Pour que le système national de gestion des données (le registre de l’état civil par exemple) et les services sociaux publics décentralisés puissent assurer la supervision et la coordination des différentes ONG participant aux activités de protection sociale. 192. Augmenter l’échelle des programmes efficaces. La couverture actuelle des programmes de filets sociaux reste limitée par rapport aux besoins. Une fois que l’efficience des différents types de programmes de filets sociaux aura été déterminée, et que l’évaluation d’impact des programmes pilotes en cours (transferts monétaires et bons alimentaires) et récemment introduits (travaux publics) sera terminée, il serait souhaitable d’augmenter l’échelle des programmes efficaces. c) Améliorer et harmoniser les approches de ciblage 193. Se mettre d’accord sur des principes de ciblage généraux. Les responsables des politiques devraient prendre en compte les principes suivants : ƒ\03 Envisager de combiner plusieurs méthodes de ciblage – Des évidences indiquent que l’utilisation de multiples méthodes de ciblage (géographique, communautaire, par catégorie, auto-ciblage, par test des moyens d’existence à l’aide de variables de remplacement) rend l’identification des personnes dans le besoin plus précise et plus complète, et améliore donc la performance du ciblage [Coady et coll. 2004a]. Page 128 107 ƒ\03 Considérer des mécanismes de ciblage simplistes mais pratiques et transparents – L’élaboration d’un système de ciblage de la pauvreté juste, transparent, efficace et graduel est cruciale au Burkina Faso mais particulièrement compliquée étant donné les difficultés politiques et administratives. Le ciblage de la pauvreté vise à économiser les ressources des programmes en ne dirigeant les transferts que vers les pauvres. Les économies sur les transferts sociaux doivent être mises en regard du coût des processus de ciblage, qui inclut non seulement les coûts directs pour l’État de l’administration des mécanismes de ciblage mais aussi les coûts privés encourus par les participants pour satisfaire les critères de ciblage, ainsi qu’un ensemble de coûts sociaux, politiques et autres (Encadré 16). ƒ\03 Mettre en place des mécanismes d’appel et de réclamation La réputation d’un programme peut être compromise s’il ne s’accompagne d’aucun mécanisme de résolution des problèmes de ciblage. La mise en place de procédures de réclamation et d’appel contribue à garantir l’accessibilité, la simplicité, la transparence, l’équité et la rapidité des programmes. Une plus grande transparence des normes des programmes est donc nécessaire et des normes de gouvernance élevées doivent être établies et maintenues. Encadré 16 : Cibler ou ne pas cibler – Les coûts et l’économie politique d’une approche sélective Source : Smith, 2001 ; Auteurs. 194. Clarifier les critères d’éligibilité pour chaque type de programme (et les critères de sortie). A l’heure actuelle, de nombreuses contraintes empêchent le ciblage d’être efficace, comme l’information sur la pauvreté, les capacités administratives, les choix politiques et la qualité de la gouvernance. Bien que le terme « indigent » revienne Comme l’illustre le diagramme ci-dessous, il est nécessaire de trouver le bon compromis entre une couverture universelle et un ciblage trop étroit. La question est de déterminer où se situe le bon endroit le long de la courbe. La quantité de données actuellement disponibles ne permet pas d’évaluer avec rigueur ces compromis pour le Burkina Faso. Cependant, les responsables des politiques devraient garder à l’esprit un certain nombre de considérations : • Les programmes universels peuvent bénéficier d’un appui politique et populaire plus étendu ; • Les programmes universels sont onéreux (même dans les pays les plus riches, le débat sur leur accessibilité financière est acharné) et ils profitent à beaucoup de personnes qui n’en ont pas besoins ; • Le ciblage peut entraîner des effets incitatifs pervers ; • L’information est coûteuse ; • Le ciblage par la communauté peut réduire les coûts d’information et administratifs du ciblage mais peut également déplacer certains coûts (opportunité, social, etc.) vers les communautés et • Il n’est pas toujours administrativement possible de cibler. Page 129 108 souvent dans les documents de politiques du Burkina Faso, il n’y a pas de compréhension commune de ce qui décrit une personne indigente. 195. Rechercher des méthodes novatrices de ciblage de la pauvreté. De plus amples recherches sont nécessaires pour pouvoir élaborer des outils de ciblage efficaces, capables de diriger le flux des ressources vers les plus pauvres. Dans ce contexte, il est nécessaire d’adopter l’approche suivante : ƒ\03 Collecter des informations de meilleure qualité pour faciliter le ciblage et évaluer les résultats À l’heure actuelle, il y a un manque de données détaillées sur les bénéficiaires et les coûts des programmes. De plus, l’information sur la pauvreté n’est souvent pas suffisamment désagrégées pour permettre un ciblage fin. ƒ\03 Évaluer l’efficacité du ciblage Pour la plupart des programmes, il n’est pas possible de juger si les méthodes de ciblage adoptées sont efficaces ou non. Seules quelques initiatives ont actuellement fait d’importants efforts de recherche sur le ciblage et mesurent les erreurs d’inclusion et d’exclusion (le programme des coupons urbains, les travaux de recherche de l’Université de Montréal et du Centre de recherche sur la santé de Nouna). ƒ\03 Rechercher des méthodes novatrices de ciblage de la pauvreté Il semble particul ièrement difficile de cibler efficacement les plus pauvres, étant donné les fortes la similarité des caractéristiques observables, qui rend difficile, par exemple, les tests des moyens d’existence à l’aide de variables de remplacement ( proxy means tests ) D’un autre côté, il peut être difficile de mettre en place des mécanismes communautaires sur une grande échelle [Coady et coll. 2004 Save the Children UK et coll. 2005]. Ces difficultés appellent de plus amples recherches sur l’efficacité des différents mécanismes de ciblage (communautaires, enquêtes auprès des ménages, par catégories, auto-ciblage, etc.) dans le contexte socioéconomique particulier des régions du Burkina. ƒ\03 Déterminer la dynamique sociale susceptible d’influencer l’efficacité du ciblage De plus amples recherches sont nécessaires pour mieux comprendre les mécanismes de redistribution existant au sein des ménages et entre eux, et qui sont répandus et fortement ancrés dans la culture de certaines communautés, et pour déterminer comment ces mécanismes influent sur l’efficacité du ciblage et sur l’impact général du programme. De plus, la polygamie est courante au Burkina Faso et une approche commune doit être définie pour ces ménages (faut-il les considérer comme un ou plusieurs ménages ?). Enfin, des recherches doivent également être entreprises pour définir l’unité de ciblage la plus appropriée (le ménage ou l’individu). Des recherches en cours, menées par l’Université de Montréal, indiquent que le ciblage par les communautés (pour identifier les indigents susceptibles de bénéficier d’une exemption de frais) a permis d’identifier des individus pauvres dans des ménages non pauvres. Ce type d’information est impossible à détecter en utilisant des tests des moyens d’existence à l’aide de variables de remplacement (au niveau des ménages). 196. Travailler à la création d’un registre commun. L’identification des individus ou ménages chroniquement pauvres devrait (à l’avenir) profiter à différents programmes de filets sociaux tels que les transferts monétaires et l’exemption des frais, de même qu’au système national d’assurance maladie envisagé. Elle pourrait aussi être utile à d’autres Page 130 109 initiatives telles que les exonérations fiscales. Ceci contribuerait fortement à créer de meilleures synergies et à réaliser de plus grandes économies d’échelle au sein du système de protection sociale. 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Pauvreté et vulnérabilité Pauvreté chronique Pauvreté qui perdure d’année en année, en général à cause de facteurs structurels de longue durée affectant les ménages, tels que de maigres avoirs ou le fait d’habiter dans une localité pauvre, éloignée des marchés et des services. Pauvreté transitoire Pauvreté que connaissent les ménages pendant certaines années mais pas toutes. Ils peuvent être temporairement pauvres à cause de chocs temporaires idiosyncratiques ou covariants, allant d’une maladie au sein du ménage, jusqu’à la perte d’un travail, en passant par la sécheresse ou une crise macroéconomique. Vulnérabilité Vrai semblance ou probabilité qu’un ménage passe au dessous du seuil acceptable défini pour un indicateur donné et tombe dans la pauvreté. Protection sociale Protection sociale Ensemble d’interventions publiques visant à soutenir les membres de la société plus pauvres et plus vulnérables, ainsi qu’à aider les individus, les familles et les communautés à gérer les risques. La protection sociale englobe les filets sociaux (assistance sociale), l’assurance sociale, les politiques du marché du travail, les fonds sociaux et les services sociaux. Assistance sociale Synonyme de « filet social ». Filet social Programme de transferts non contributifs ciblant de l’une ou l’autre manière les pauvres et les personnes vulnérables à la pauvreté et aux chocs. Assurance sociale Programmes contributifs conçus pour aider les ménages à s’assurer eux-mêmes contre les baisses soudaines de revenus. Les types d’assurance sociale comprennent l’assurance publiquement fournie ou mandatée contre le chômage, la vieillesse (pensions), le handicap, le décès du soutien principal et la maladie. Evaluation des programmes Efficacité Rapport entre les objectifs fixés et les résultats obtenus ou espérés du programme, en prenant en compte leur importance relative. Efficience Page 136 115 Rapport entre les résultats obtenus et les ressources utilisées pour les atteindre. Une intervention efficiente utilise les ressources les moins coûteuses possibles pour produire les résultats souhaités. L’efficience mesure les produits qualitatifs et quantitatifs en relation avec les résultats. Impact Effets à long terme, positifs ou négatifs. Viabilité Poursuite des avantages après la fin de l’intervention. Probabilité d’obtention des avantages sur le long terme. Page 137 116 Annexe 2 : Principe de conception des bonnes pratiques de soutien direct tirés de l’expérience internationale Des bonnes pratiques de conception de l’assistance sociale (soutien direct) se dégagent quatre principes fondamentaux de conception : Sélection des ménages bénéficiaires du soutien direct Il est bien connu que plus les critères d’éligibilité sont généreux, plus grand est le réservoir des candidats à l’assistance sociale et plus élevé est le coût du programme. Celui-ci dépend également du niveau et de la durée des prestations (voir plus loin). Par exemple, dans le cas du programme de pension de vieillesse de l’assistance sociale, le Népal a fixé à 75 ans la limite d’âge pour l’éligibilité. Cette mesure a indubitablement restreint le réservoir des bénéficiaires et maintenu le programme dans les limites établies par le budget disponible, mais le programme n’a pas pu atteindre certains des groupes vulnérables critiques, même légèrement en-dessous de 75 ans. D’un autre coté, certains pays ont établi un seuil d’éligibilité très bas à 60 ans, (et même en-dessous), ce qui a produit le résultat contraire : les bénéficiaires étaient trop nombreux et le budget très élevé. Pour surmonter ce genre de difficultés, beaucoup de pays ont maintenant recours à la limitation des transferts sociaux monétaires aux, disons, 10 % les plus pauvres de la population. Le programme pilote de transferts sociaux monétaires du district de Kolomo en Zambie est un exemple de limitation de la couverture aux 10% les plus pauvres de la population. La détermination de l’éligibilité et de la sélection des bénéficiaires éligibles varie largement d’un pays à l’autre en fonction de : i) la faisabilité administrative et ii) l’information disponible. Quand ces deux conditions sont médiocrement satisfaites, des pays (comme le Rwanda) ont recours à des approches de ciblage par les communautés. La bonne pratique impose cependant la validation de ces sélections à travers un système de communication transparent. Dans le programme Oportunidades du Mexique (transfert monétaire conditionnel), par exemple, les listes des bénéficiaires sont présentées au cours de réunions communautaires, ce qui donne aux communautés la possibilité de déceler les erreurs d’exclusion et d’inclusion. Dans tous les cas, un mécanisme de réclamation est indispensable pour assurer que la communauté est satisfaite de l’approche de ciblage utilisée. Lorsque la limitation de l’information est moins sévère, les pays ont adopté des tests des moyens d’existence à l’aide de variables de remplacement ( proxy means tests – PMT). Il s’agit d’une méthode de ciblage où le score de chaque candidat est généré à partir de caractéristiques des ménages assez faciles à observer – généralement des caractéristiques non liées au revenu, telles que la localisation et la qualité du logement, la possession de biens durables, le nombre d’enfants, le niveau d’instruction, etc. Un seuil en-dessous duquel un ménage devient éligible a été établi pour le score. Même lorsqu’une approche de ciblage communautaire comme celle décrite plus haut est adoptée, il est toujours possible de passer progressivement à une méthode PMT, en établissant une présélection des ménages susceptibles de bénéficier des prestations et en utilisant ensuite les réunions communautaires pour assurer la transparence et éviter les erreurs d’inclusion et d’exclusion. Beaucoup de pays à faible revenu ont recours à cette combinaison de PMT et de validation communautaire pour la sélection des bénéficiaires, en général des programmes de filets sociaux. Le Bangladesh est un exemple récent, où un programme de filet social utilisant une combinaison de PMT et de validation communautaire est actuellement mis en place. Détermination du niveau des prestations Page 138 117 La détermination du niveau de soutien direct de l’assistance sociale est une question délicate dans tous les pays. Il est difficile de dégager des conseils stratégiques précis à partir des expériences internationales mais il est toutefois possible d’identifier quelques principes directeurs. Habituellement, dans les programmes de dernier recours visant à réduire l’extrême pauvreté, tels que celui proposé au Rwanda, le niveau des prestations est fixés comme une fraction de l’écart de revenu des bénéficiaires cibles. Le niveau de cette fraction dépend du budget disponible et du nombre de personnes en situation d’extrême pauvreté. L’Arménie et la Géorgie ont appliqué ce principe en utilisant des PMT. À cet égard, il peut être utile d’opérer certains rapprochements entre les informations disponibles sur les ménages. Ainsi, l’information sur le nombre de ménages extrêmement pauvres peut, par exemple, être combinée à celle sur leur écart de revenu (pauvreté), de manière à déterminer les besoins financiers pour un niveau de prestations donné. On peut alors juger de la faisabilité (accessibilité financière) des différentes options de niveau de prestations et décider du niveau acceptable dans le cadre de l’enveloppe budgétaire disponible. Le niveau des prestations ne doit pas nécessairement être fixé à la même hauteur pour tous les types de ménages. Il devrait de préférence varier. Des formules variables de détermination des prestations sont souvent la norme dans de nombreux pays, principalement parce qu’elles permettent des variations dans la situation des ménages (telles que le nombre d’enfants, la présence d’un enfant ou d’une personne handicapée, la longue maladie du chef de famille, etc.) Un très bon exemple (réussi) de formule variable de détermination des prestations est celui du Programme Bolsa Familia du Brésil. Celui-ci fournit deux types de prestations : une prestation de base pour toutes les familles extrêmement pauvres et une prestation variable qui dépend de la composition et des revenus de la famille. Quelle que soit la méthode adoptée pour déterminer le niveau des prestations, il est utile de l’évaluer en pourcentage de la dépense de consommation des ménages extrêmement pauvres. La générosité du programme peut être évaluée à partir de cette proportion. Plus celle-ci est élevée, plus généreux sera le programme. Le maintien d’un niveau généreux de prestations risque d’affecter l’offre de main-d’œuvre à cause d’un effet contraire de démotivation : même en présence d’opportunités d’emploi offertes par le marché du travail, les ménages peuvent en effet choisir de rester dans le programme « généreux ». Bien que cette préoccupation à propos de l’impact du niveau des prestations sur la motivation au travail soit théoriquement valable, elle ne s’applique pas aux programmes ciblant les ménages extrêmement pauvres où aucune main-d’œuvre adulte n’est disponible pour participer au marché du travail (handicapés ou personnes âgées). Mécanismes de fourniture des prestations et modalités de paiement Quatre principes guident généralement le mécanisme de fourniture des prestations : i) assurer la fiabilité et la régularité des paiements ; ii) maintenir la redevabilité (questions de gouvernance) et prévenir la fraude ; iii) réduire les coûts de transaction des bénéficiaires ; et iv) minimiser le coût administratif de la fourniture. Un certain nombre d’agences ou de canaux sont disponibles pour la fourniture des prestations – agences bancaires, agences bancaires itinérantes, bureaux de poste, agences publiques décentralisées, ONG – et le mode choisi doit dans tous les cas satisfaire aux quatre principes précités et il doit être disponible et approprié à la situation particulière du pays. Sans surprise, les modes choisis varient énormément d’un pays à l’autre. Lorsqu’un contractant ou une agence est sélectionné, un contrat incitatif basé sur les performances peut être utilisé, comme l’a fait le programme Bolsa Familia au Brésil. Le Kenya a testé un programme pilote de transferts monétaires aux orphelins et enfants vulnérables utilisant un processus d’appel d’offres pour la sélection de l’agence de service la moins coûteuse. L’avantage de ces agences de Page 139 118 services contractuelles est que les contrats peuvent être revus en fonction des performances. Dans les pays ayant une infrastructure TI plus ou moins développée, les cartes de crédit et les cartes à puce sont utilisées pour transférer l’aide monétaire. Dans l’État de Gujarat en Inde, un programme pilote d’utilisation des cartes à puce est à l’essai pour le transfert de l’assistance sociale. Il est difficile de recommander une option ou des mécanismes spécifiques : le principal défi est d’adapter un mécanisme fiable aux conditions du pays et d’éviter tout effet contraire involontaire. Suivi et évaluation des programmes de transferts monétaires Le suivi des programmes est extrêmement important pour les programmes de filets sociaux, et en particulier pour les transferts monétaires. Un suivi systématique aide à évaluer si le programme est correctement mis en œuvre à tous les niveaux et à apporter des corrections à mi-parcours si la mise en œuvre laisse à désirer. L’évaluation complète le système de suivi dans la mesure où elle permet d’apprécier les effets distributifs des programmes de transferts monétaires. En dépit de l’importance critique du suivi et de l’évaluation, la majorité des programmes de filets sociaux n’ont malheureusement aucun système de suivi et évaluation crédible en place. Le suivi est une activité continue et est habituellement effectué à tous les niveaux – village, district et national. Son rôle principal est d’évaluer si le programme est bien mis en œuvre conformément à la façon dont il est conçu, avec les résultats escomptés. Son coût annuel doit être prévu dans les coûts du programme et il doit faire partie intégrante du cadre programmatique. Un bon système de suivi doit récolter l’information sur les résultats clés du programme. Une bonne pratique veut que le suivi soit assuré par une agence indépendante, extérieure à l’agence ou institution chargée de la mise en œuvre du programme. Une expérience internationale bien documentée de bon suivi nous vient de la Zambie. Le programme pilote de transferts sociaux monétaires du district de Kalmo (réalisé avec l’assistance technique de l’Allemagne) a mis en place un suivi par un tiers, concentré sur la qualité de la gestion du programme, l’efficacité du ciblage, la régularité du paiement des transferts et même leur utilisation par les bénéficiaires. Il ne suffit pas de connaitre les résultats du programme, il faut aussi connaitre son impact sur le bien-être des ménages, qui est le but ultime du programme de transferts monétaires. Plusieurs techniques sont disponibles pour réaliser une évaluation d’impact. On peut distinguer deux approches. La première est quantitative et collecte l’information sur un échantillon aléatoire de ménages appartenant au groupe de traitement et au groupe témoin, au moment du lancement du programme et après un laps de temps donné (disons une année). Des techniques économétriques sont alors utilisées pour évaluer l’impact du programme. 56 L’autre approche, complémentaire à la première, est l’évaluation qualitative qui est basée sur des entretiens avec des groupes focaux et avec des informateurs clés, ainsi que sur l’observation directe. Bien que les évaluations qualitatives ne soient pas représentatives, elles offrent de riches informations sur le fonctionnement du programme, ses mérites et ses lacunes. Une variante de l’évaluation descriptive est l’« évaluation du processus », qui est probablement la technique d’évaluation la plus courante, appliquée dans beaucoup de pays. Son approche consiste à évaluer et à documenter la manière dont est exécuté chacun des processus sous-tendant un programme de transferts. Elle aide à aborder la question de savoir ce qui arrive à travers le programme. L’évaluation du processus complète puissamment, sans pour autant s’y substituer, le système de suivi interne et les autres 56 Pour une compréhension plus approfondie des techniques et des applications de l’évaluation d’impact, visiter le site de la Banque mondiale consacré à l’évaluation d’impact : http://web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/TOPICS/EXTPOVERTY/EXTISPMA/0,,menuPK:384336 ~pagePK:149018~piPK:149093~theSitePK:384329,00.html Page 140 119 évaluations mentionnées ci-dessus. L’exemple de la Zambie vaut qu’on le cite à nouveau : en plus d’autres évaluations, il comprenait une évaluation du processus par des évaluateurs externes, qui a contribué à améliorer la capacité de suivi car elle a révélé des faiblesses spécifiques dans certains processus de base de la mise en œuvre du programme. Source : Grosh et coll. 2008. ‘The Design and Implementation of Effective Safety Nets: For Protection and Promotion’. Banque mondiale. Page 141 120 Annexe 3 : Quelques exemples de pays appliquant de bonnes pratiques pour la mise en œuvre de programmes de filets sociaux en Afrique Les récentes crises financières et la flambée des prix ont accru l’intérêt des décideurs pour la recherche de moyens de lutte contre les vulnérabilités persistantes et toujours plus profondes. Le succès des programmes de transferts monétaires dans plusieurs parties du monde a amené de nombreux dirigeants à se demander si ces programmes pouvaient réussir à relever les défis auxquels l’Afrique subsaharienne (ASS) est actuellement confrontée. Cette section examine comment les transferts monétaires ont été utilisés à travers la région et fait ressortir les enseignements qui ont déjà été tirés des programmes existants. En tenant compte du contexte du Burkina Faso, l’exemple des pays sélectionnés qui suivent fournissent de précieuses leçons sur la manière dont les programmes sont mis en œuvre dans d’autres pays africains. Le Productive Safety Net Program (PSNP – programme de filet social productif) de l’ Éthiopie En Éthiopie, plus de 40 % de la population vit en-dessous du seuil national de pauvreté et plus de 20 % sont extrêmement pauvres ( moins de 1 650 kilocalories par personne et par jour). Etant donné que la variabilité des précipitations est l’une des plus élevées au monde et que les fluctuations des pluies sont inversement liées aux revenus moyens, depuis plus que deux décennies, le Gouvernement d’ Éthiopie a lancé chaque année un appel d’urgence international à l’aide alimentaire. Cette aide d’urgence annuelle avait pour but de satisfaire les besoins de consommation des ménages en situation chronique et transitoire d’insécurité alimentaire. Les évaluations ont montré qu’en dépit d’une aide humanitaire substantielle, l’aide d’urgence était non prévisible tant pour les planificateurs que pour les ménages, arrivant souvent en retard par rapport au besoin. À cause des retards et des incertitudes, l’aide d’urgence ne pouvait pas être utilisée de manière efficace et a peu fait pour protéger les moyens d’existence, prévenir la dégradation environnementale, générer des avoirs communautaires ou préserver les biens des ménages (capital physique ou humain). Caractéristiques du programme Étant donné les lacunes du régime d’aide d’urgence, le Gouvernement éthiopien a lancé en 2005 la mise en œuvre d’un nouveau programme, le Productive Safety Net Program (PSNP – programme de filet social productif). Celui-ci a remplacé le système d’appel humanitaire d’urgence en tant que principal instrument de filet social du pays. Le programme est actuellement opérationnel dans 234 districts en situation d’insécurité alimentaire chronique (sur un total de 692 districts) et ciblaient environ 7 millions de personnes en 2006. Le PSNP fournit des ressources aux ménages en situation d’insécurité alimentaire chronique de deux manières : i) à travers des paiements aux personnes valides pour leur participation à des activités de travaux publics à haute intensité de main-d’œuvre et ii) à travers des subventions directes aux ménages composés de personnes âgées ou de personnes incapables de travailler pour d’autres raisons. Impact du PSNP Une enquête auprès des bénéficiaires effectuée en 2005 a révélé que le PSNP avait un impact positif important sur leur bien-être estimé par des indicateurs à la fois subjectifs et objectifs. L’enquête a trouvé que trois bénéficiaires sur cinq avaient pu éviter de vendre des biens pour s’acheter des vivres en 2005 et, selon 90 % des ménages, ceci était le résultat de leur participation au PSNP. En outre, près de la moitié des bénéficiaires interrogés ont déclaré avoir utilisé les services de santé plus fréquemment et 76 % ont attribué cet accès élargi à l’action du PSNP. Plus d’un tiers des ménages interrogés ont plus inscrit leurs enfants à l’école et 80 % ont attribué cette action à leur participation au PSNP. Page 142 121 Réformes en cours Un travail considérable est prévu pour renforcer la capacité de mise en œuvre et amener les systèmes à un niveau de fonctionnement précédemment impossible avec des programmes fragmentés et provisoires. Un mécanisme de subvention conditionnelle (transfert monétaire conditionnel) est actuellement à l’étude, il devrait fournir des ressources dans les mêmes districts pour aider les ménages en situation d’insécurité alimentaire transitoire pendant les périodes de sécheresse. Ce mécanisme utilisera un indice basé sur la pluviométrie et faisant appel à 30 ans de données pluviométriques pour déclencher le financement. Le PSNP est en outre complété par un plus vaste programme de sécurité alimentaire qui vise à aider les ménages à accroitre leurs revenus par le biais de subventions de réinstallation, de trains de mesures génératrices de revenus pour les ménages, et d’interventions de collecte de l’eau. Les ménages qui bénéficient du PSNP ont aussi droit à une aide dans le cadre d’autres composantes du programme de sécurité alimentaire. Les interventions de sécurité alimentaire financées par les bailleurs de fond en dehors du PSNP sont cependant rarement coordonnées au niveau local et leurs liens avec les services ruraux de base sont également faibles. Enseignements tirés Le PSNP illustre beaucoup des questions qui entourent les filets sociaux dans les pays à faible revenu, notamment : ƒ\03 Le programme s’oriente dans une direction clairement bénéfique grâce à une conception de base qui cherche non seulement à utiliser les ressources pour sauver des vies, mais aussi à apporter un soutien aux moyens d’existence. Les progrès réalisés à ce jour dans la mise en œuvre suggèrent que ceci est possible même dans un environnement à très faible revenu. ƒ\03 Le processus de conception et la planification de la mise en œuvre ont subi un triage sévère. Même quand il sera complètement mis en œuvre, le programme de filet social ne couvrira qu’un tiers du pays. Les districts sélectionnés sont effectivement les plus pauvres, mais beaucoup de personnes pauvres vivent aussi dans les districts non desservis. La mise en œuvre du programme a, en outre, été découpée en phases. Le programme se concentre dans un premier temps sur la consolidation du PSNP de base. Il espère pouvoir l’enrichir dans un certain nombre de dimensions, mais les responsables du programme et les bailleurs de fonds ont réalisé que tout ne pouvait pas être fait dans l’immédiat. Ainsi, par exemple, le fonds d’urgence pour la sécheresse n’a été mis en place qu’au cours de la troisième année du PSNP. ƒ\03 Une bonne mise en œuvre requiert un effort diligent et soutenu. En 2007, le programme a eu de nombreux résultats positifs et les premières évaluations qualitatives de son ciblage et de ses effets sont positives, mis il y a encore beaucoup à faire pour consolider la mise en œuvre. Une bonne mise en œuvre nécessite également de la flexibilité et de l’innovation. Par exemple, le gouvernement avait initialement eu des problèmes au niveau du système de suivi du programme, mais il a depuis déployé des équipes dites d’intervention rapide qui visitent les districts afin d’identifier et résoudre les problèmes de mise en œuvre. Ceci a donné aux responsables une idée de ce qui allait bien et de ce qui n’allait pas, et leur a permis de déterminer si des ajustements étaient nécessaires au niveau des districts individuels ou à un niveau plus systémique. Entretemps, la conception du système de suivi a été simplifiée et un projet pilote d’informatisation est en cours. ƒ\03 Un aspect important de la réforme est le passage à un cadre multi-bailleurs, pluriannuel à la place d’un système annuel d’appel d’urgence où chaque bailleur de fonds prend en charge une initiative séparée. Ceci est complété par la décision d’exécuter le programme Page 143 122 à travers les systèmes publics normaux au lieu des cellules spéciales de mise en œuvre habituellement utilisées dans les programmes financés par des bailleurs de fond. Le cadre pluriannuel et la réduction de la fragmentation devraient permettre la mise en place de systèmes administratifs beaucoup plus efficaces. Le cadre multi-bailleurs devrait également apporter plus de résilience, étant donné que le retrait ou la diminution de l’engagement d’un donateur aura un effet moins néfaste. Kenya Cash Transfer Program for Orphans and Vulnerable Children (CT-OVC – programme de transferts monétaires pour les orphelins et les enfants vulnérables du Kenya) Ce programme de transferts a commencé comme un pré-pilote en 2004. Il a depuis été transformé en un projet pilote de cinq ans et est passé d’un très petit budget à un budget prévisionnel de 26 millions de dollars EU pour l’exercice 2010 (Banque mondiale 2009c). Complètement documenté, ce programme permet de bénéficier d’une précieuse expérience dans les domaines de la défense des politiques, la conception et la mise en œuvre des transferts monétaires conditionnels en ASS. Ce programme est une composante clé de la stratégie de protection sociale d’ensemble du Kenya car il vise les risques encourus par les enfants des communautés où les capacités des systèmes informels de filets sociaux commencent à être dépassées par le grand nombre des OEV, encore accru par les décès d’adultes atteints du SIDA. En plus de susciter l’intérêt des bailleurs de fond, les initiatives CT-OVC ont reçu un fort soutien politique local, incluant des pressions pour une expansion rapide du programme. Objectifs du programme pré-pilote Le but du programme pré-pilote était de prouver la faisabilité du programme de transferts monétaires de soutien aux OEV du Kenya. La phase pré-pilote a commencé en décembre 2004, couvrant initialement 500 enfants. Sa portée a ensuite été élargie pour atteindre 5 000 enfants. Le pré-pilote a reçu l’appui de l’UNICEF et de l’Agence suédoise pour le développement international (SIDA), et était géré à partir du Département des services à l’enfance (Banque mondiale 2009c). Les premiers districts du projet – Nairobi, Kwaleet Garissa – avaient été sélectionnés parce qu’ils étaient des zones où l’UNICEF et la SIDA avaient déjà une expérience et une connaissance du terrain. Le pré-pilote ciblait les ménages pauvres et ceux ayant des OEV, qui ne recevaient aucune autre forme de soutien officiel. Les bénéficiaires recevaient 500 shillings du Kenya (6,25 dollars EU) par mois et par enfant (SCIK et coll. 2005). Théoriquement, des conditions étaient attachées aux transferts du pré-pilote mais il n’y avait aucune conséquence si elles n’étaient pas respectées (Banque mondiale 2009c). Le fait que, pour satisfaire les exigences du programme, les enfants devaient être séparés de leur famille a conduit le pré-pilote à abandonner l’imposition de conditions (Banque mondiale 2005). Cependant, les communautés et certains bailleurs de fond ont exigé que les transferts soient conditionnels, en particulier lors de l’extension du programme aux régions de l’Ouest où l’incidence du VIH est très élevée. Transformation du CT- OVT en projet pilote à part entière S’inspirant de l’expérience du projet pré-pilote, le programme pilote officiel du CT-OVC a démarré en 2005 et a duré jusqu’au milieu de 2009. Le programme se focalise spécifiquement sur les ménages ayant des OEV, avec pour but de garder ces derniers dans leur famille et d’encourager un investissement dans leur capital humain. Les objectifs spécifiques du programme sont très semblables à ceux observés dans d’autres programmes de transferts monétaires conditionnels bien connus en Amérique latine, incluant l’amélioration de la santé, de la nutrition et de l’éducation ainsi que la sensibilisation à ces questions. La planification du programme pilote prévoyait de couvrir sept districts avec l’appui de l’État kenyan, du DfID, de l’UNICEF et de la SIDA (Banque mondiale 2009c). Page 144 123 Les fonds octroyés au programme pilote par les partenaires au développement ont atteint 17 500 ménages qui bénéficient encore des prestations. Entre 1 000 et 4 600 ménages bénéficiaires sont couverts dans chacun des districts. À la fin de la Phase 2 (juin 2009), 70 000 ménages recevaient des prestations. Le ciblage nécessite une approche complexe en cinq étapes qui inclut les comités communautaires Les méthodes de ciblage du pré-pilote ont été raffinées dans le programme pilote. Le ciblage exige cinq étapes (Banque mondiale 2009c). Le ciblage géographique sélectionne les districts du programme sur la base des niveaux de pauvreté et de prévalence du VIH/SIDA. Les districts sont classés sur la base du nombre de ménages OEV extrêmement pauvres qu’on y rencontre. Le nombre de ménages OEV est calculé pour chaque district. Les communautés comptant plus que 5 000 membres, dont au moins 60 % vivent en- dessous du seuil de pauvreté, sont sélectionnées pour participer au programme (Hussein 2006). Les comités communautaires ( Location OVC Committee ) ont été créés pour sélectionner les ménages éligibles. Les ménages doivent être incapables de satisfaire tous leurs besoins élémentaires et ils doivent avoir un membre OEV permanent de moins de 17 ans qui ne reçoit pas de prestations d’un autre programme de transferts monétaires (GdK 2006). Au sein de ce groupe de ménages éligibles, les comités communautaires désignent les ménages qui répondent à 3 critères d’une liste de plus de 10 points liés à la pauvreté (à savoir si le ménage a accès à une source d’eau saine, si ses membres sont en mauvaise santé ou s’ils ne mangent pas plus d’un repas par jour). Les ménages répondant à au moins trois des critères sont considérés comme pauvres (Banque mondiale 2009c). Les services postaux se chargent bien des transferts Le montant des transferts a été fixé à un niveau supposé couvrir suffisamment des besoins des OEV pour aider à les garder dans leur famille. La valeur des transferts variait selon le nombre d’OEV du ménage : 1 000 shillings du Kenya (14 dollars EU) pour un ou deux OEV, 2 000 shillings du Kenya (28 dollars EU) pour trois ou quatre OEV, et 3 000 shillings du Kenya (42 dollars EU) pour cinq OEV ou plus (Banque mondiale2009c). Avec une valeur de référence de 1 500 shillings du Kenya (20 dollars EU), le transfert est important par rapport à la moyenne de 1 800 shillings du Kenya par équivalent adulte pour la consommation. Il est par conséquent plus ou moins égal à 20 % des dépenses des ménages kenyans pauvres (Banque mondiale 2009c). Le montant des transferts n’ayant pas été indexé, leur valeur s’est érodée alors que les prix alimentaires ont augmenté. Dans les districts pilotes, les transferts sont délivrés par l’intermédiaire de la Postal Cooperation of Kenya , qui semble avoir bien fonctionné. Les paiements sont effectués une fois tous les deux mois (OVC 2007). Les transferts sont délivrés avec un décompte indiquant si le ménage a reçu le montant complet et, si tel n’est pas le cas, pourquoi (GdK 2006). L’argent est, chaque fois que possible, remis à la mère ou à la femme qui dirige ou prend soin du ménage. Application souple des conditions Les bénéficiaires des programmes CT-OVC du Kenya ont des responsabilités vis-à-vis de la santé et de l’éducation des enfants, semblables aux conditions imposée par les programmes de transferts monétaires d’Amérique latine : les bénéficiaires de moins d’un an doivent visiter six fois une clinique locale au cours de leur première année pour être vaccinés, recevoir des suppléments de vitamine A et pour le contrôle de leur croissance ; les bénéficiaires âgés de un à trois ans doivent subir un contrôle de croissance et recevoir des suppléments de vitamine A deux fois par an ; les enfants de 5 à 17 ans doivent être inscrits à l’école et y être présents pendant 80 % des jours de classe ; les chefs de ménage doivent participer à des séminaires pédagogiques au moins une fois par an (Banque Page 145 124 mondiale 2009c). Cependant, jusqu’à très récemment, ces conditions n’étaient pas appliquées par le programme, le transfert était essentiellement inconditionnel. Une partie prévue pour le programme était le test d’un transfert conditionnel par rapport à un transfert inconditionnel, mais cette composante n’a été testée que vers la fin 2008. Il y a eu jusqu’ici une confusion sur la façon de faire respecter les conditions qui s’appliquent à la santé, et seules celles qui s’appliquent à l’éducation sont observées. Dans les zones où les conditions sont appliquées, la réduction du nombre de transferts pour non-conformité est de 400 shillings du Kenya par enfant ou adulte qui ne respecte pas les coresponsabilités (Banque mondiale 2009c). Les sorties du programme interviennent s’il n’y a plus d’OEV de moins de 18 ans dans le ménage ou si le ménage est réévalué et n’est plus considéré comme pauvre. Il en est de même des ménages qui quittent la zone du programme, se retirent volontairement ou sont reconnus coupables d’avoir falsifié les informations. (Banque mondiale 2009c). Finalement, les ménages qui ne remplissent pas les coresponsabilités pendant trois périodes consécutives sont supposés devoir sortir du programme. L’organisation et le système de gestion exigent une coordination intersectorielle La cellule centrale du programme pilote, incluant des cellules chargées des opérations, du suivi et évaluation, de l’administration/finances et des systèmes d’information, était originellement située au Département des services à l’enfance du ministère de l’Intérieur (GdK 2006). Le Vice-président a le contrôle ultime du programme (Hussein 2006). L’application des conditions nécessite une coordination étroite du programme avec les ministères techniques étant donné que les objectifs pédagogiques doivent être réalisés par le ministère de l’Education et ceux de la santé par le ministère de la Santé publique et de l’Assainissement. La coordination avec le ministère des Services médicaux et le ministère de l’Immigration et de l’Enregistrement des personnes est également soutenue (Banque mondiale 2009c). Analyse des résultats attendus de la conception de l’évaluation expérimentale Le programme pilote a pris d’importantes mesures, incluant l’utilisation d’un système d’information de gestion (SIG) complet, pour maintenir des contrôles adéquats. L’actuel SIG est centralisé au niveau national mais sera décentralisé plus tard vers les districts (Banque mondiale 2009c). Les enseignants et les travailleurs de la santé remplissent des formulaires rapportant la fréquentation scolaire et les visites aux centres de santé. Le SIG central suit l’information par district. Le respect des conditions est suivi tous les deux mois pour les enfants de zéro à un an, tous les six mois pour les enfants d’un à cinq ans, tous les trois mois pour les conditions dans le domaine de l’éducation et une fois par an pour les sessions de formation des adultes. Le suivi de la conditionnalité est aussi supposé se faire à travers ce système. Le respect des conditions est censé être effectué par sondage, y compris à travers des visites aux ménages bénéficiaires afin de s’assurer du respect des exigences du programme. Des appels peuvent être introduits auprès du District Children Office qui accepte les plaintes concernant les montants payés et la qualité des services offerts. Évaluation d’impact du programme Le programme pilote portant sur les sept districts originaux est soumis à une évaluation d’impact réalisée par Oxford Policy Management , avec des composantes qualitatives et quantitatives. La conception de l’évaluation du programme est expérimentale (bien qu’il y ait eu des différences significatives entre les groupes de traitement et les groupes témoins), et deux locations de traitement et deux locations témoins ont été sélectionnées de manière aléatoire dans chacun des sept districts. L’aspect inconditionnel/conditionnel a également été assigné aléatoirement (Hurrell, Ward, et Merttens 2008). L’échantillon de référence inclut 2 759 ménages. L’analyse de son ciblage a révélé que la majorité des ménages Page 146 125 sélectionnés avaient bien un OEV (98%) et que la plupart de ces ménages étaient très pauvres. Cependant, les personnes extrêmement pauvres étaient sous-représentées dans le programme (Hurrell, Ward, et Merttens 2008). Forte appropriation par les pouvoirs publics, et financement et expansion inclus dans le plan à moyen terme Le transfert conditionnel pour les OEV est inclus dans le Plan à moyen terme et dans la Vision 2030 du Kenya. L’État a financé le programme CT-OVC en 2005-2006, à hauteur de 675 000 dollars EU ou 48 000 000 shillings du Kenya (Hussein 2006). En raison de son expansion, on s’attend à ce que le coût du programme soit de 26 millions de dollars EU pour l’exercice financier 2010. Ce montant représente 0,08 % du PIB nominal et 0,13 % des dépenses publiques. Quand le programme atteindra 100 000 ménages, on s’attend à ce qu’il coûte entre 32 et 35 millions de dollars EU, soit approximativement 0,07 % du PIB nominal et 0,28 % des dépenses publiques (Banque mondiale 2009c). Les coûts administratifs du programme devraient atteindre approximativement 25 % en 2012 et continuer à diminuer. Ce pourcentage est nettement inférieur aux 40 % de coûts administratifs du pré-pilote. Adaptations du CT- OVC en vue de la phase trois d’expansion Les pressions politiques en faveur d’une expansion plus rapide du pilote CT-OVC dans des districts supplémentaires ont eu pour résultat la création de deux programmes parallèles évoluant indépendamment l’un de l’autre. Une nouvelle (troisième) phase du programme tente maintenant d’harmoniser les programmes et de renforcer la capacité pour leur mise en œuvre efficace. L’objectif du gouvernement du Kenya est de couvrir 100 000 ménages pauvres ayant des OEV en 2012 (approximativement 2 000 ménages par district), de manière à couvrir approximativement la moitié des 600 000 OEV extrêmement pauvres du pays (Banque mondiale 2009c). Les mesures suivantes seront introduites durant la troisième phase : ƒ\03 Le mécanisme de ciblage sera ajusté à partir des résultats des évaluations, de l’Enquête intégrée sur le budget des ménages du Kenya, du SIG et des données de référence. Des améliorations seront apportées au programme standardisé sur base des enseignements tirés de la deuxième phase. ƒ\03 Des améliorations seront apportées au SIG pour qu’il soit à même de traiter les demandes considérablement accrues à la suite de la rapide expansion et un contrat sera passé avec une organisation pour qu’elle assure le suivi externe. Ce suivi externe effectuera des contrôles du programme par sondage, fera des recensements communautaires pour évaluer la qualité des comités communautaires, et fera remplir des « carnet d’évaluation citoyen » qui permettront de déterminer l’opinion que les bénéficiaires et les non-bénéficiaires ont du programme ainsi que leur degré de satisfaction. Cette redevabilité améliorée est particulièrement importante compte tenu des préoccupations relatives à la gouvernance et à la corruption au Kenya (Banque mondiale 2009c). ƒ\03 Des efforts considérables seront faits pour améliorer la communication sur le programme avec les bénéficiaires et les non bénéficiaires. Tant la mise en œuvre que le suivi des coresponsabilités devraient s’améliorer. ƒ\03 Vers la moitie ou la fin de 2010, les tests sur l’utilisation d’amendes pour le non-respect des coresponsabilités devraient être achevés (Banque mondiale 2009). ƒ\03 Des évaluations de la capacité liée à l’offre seront également effectuées. Ce renforcement des capacités est crucial ; les fonctionnaires responsables du programmes ont fait des progrès notables au niveau de la mise en œuvre et du renforcement des Page 147 126 capacités, mais il faut en faire davantage pour faire face aux défis de l’expansion continue (Banque mondiale 2009c). Programme de transferts monétaires du Malawi Le programme de transferts sociaux monétaires a commencé en 2006, en tant que programme pilote dans le district de Mchinji, avec le soutien de l’UNICEF, avec pour but de devenir éventuellement un programme national. Son objectif est de réduire la pauvreté, la faim et la famine chez les personnes extrêmement pauvres et celles qui dont aucun membre n’est capable de travailler. Cela inclut de nombreux ménages ayant des orphelins et enfants vulnérables (OEV). Caractéristiques du programme L’objectif du programme pilote de transferts sociaux monétaires de Mchinji visait l’extrême pauvreté. Schubert et Huijbregts (2006) indiquent qu’environ 10 % des ménages malawiens (250 000) sont extrêmement pauvres et incapables de travailler (empêchés ou incapables de travailler). Il a été suggéré que si ces 10 % de ménages recevaient tous des transferts sociaux monétaires, le taux national d’extrême pauvreté baisserait de 22 % à 12 %, pour un coût de 41 millions de dollars EU par an. Cette analyse a contribué à la décision de cibler 10 % des ménages extrêmement pauvres dans la zone du projet pilote de Mchinji, soit approximativement 3 000 ménages ou 15 000 individus (Chipata et Mwamlima 2007). En plus de son objectif de réduction de la pauvreté, le programme vise à améliorer le taux d’inscription et de fréquentation scolaires des enfants bénéficiaires, à démontrer comment un programme de transferts monétaires pourrait s’intégrer dans l’agenda de protection sociale du Malawi (Chipata et Mwamlima 2007), et à vérifier si les assemblées de district pourraient mettre en place des programmes de transferts monétaires efficients et capables d’atteindre les groupes de ménages ciblés (Schubert et Huijbregts 2006). Mchinji a été choisi pour le pilote à cause de sa solide équipe de district, de ses niveaux de pauvreté moyens et de sa proximité relative de la capitale Lilongwe. Le ciblage du pilote de Mchinji inclut les comités villageois élus Les critères de ciblage définissent les personnes extrêmement pauvres comme celles qui font partie du quintile de dépenses inférieur et qui se situent en-dessous du seuil national de pauvreté extrême. D’après cette définition, les ménages bénéficiaires devraient être incapables de se procurer les produits non alimentaires dont ils ont besoin. Les ménages qui ne peuvent pas travailler sont ceux dont le taux de dépendance est supérieur à trois (Schubert et Huijbregts 2006). Pour les sélectionner, les comités locaux, les Community Social Protection Committees , établissent d’abord une liste de tous les ménages qui d’après eux peuvent satisfaire l’exigence du programme d’être « ultra pauvres » ou « empêchés de travailler ». Les comités sont sélectionnés à travers des élections communautaires au cours de la réunion initiale du programme (Schubert 2007b). Les chefs de village ne sont pas autorisés à en faire partie. Les comités doivent ensuite rencontrer et interroger tous les ménages potentiellement bénéficiaires ; le chef du village doit vérifier cette information et les comités doivent classer les ménages identifiés d’après leur niveau d’indigence. Le classement est discuté et approuvé ou modifié au cours d’une réunion du comité. L’information est transmise au Secrétariat et à un sous-comité de la protection sociale ( Social Protection Sub-Committee ) qui doit approuver ou rejeter la liste. Les listes sont supposées reprendre les 10 % de ménages de la communauté jugés les plus nécessiteux. Conception et exécution des transferts Les transferts mensuels à Mchinji, tous inconditionnels, étaient proportionnels à la taille des ménages et au nombre d’enfants scolarisés. Les ménages d’une personne recevaient 600 kwachas (environ 4 dollars EU), les ménages de deux personnes 1 000 kwachas (6,67 dollars EU), les ménages de trois personnes 1 400 kwachas (9,33 dollars EU), et ceux de 4 personnes ou plus, 1 800 kwachas (12 dollars EU) (Schubert et Huijbregts 2006). Les Page 148 127 ménages ayant des enfants à l’école primaire recevaient 200 kwachas (1,33 dollars EU) supplémentaires par enfant, et les ménages ayant des enfants à l’école secondaire recevaient 400 kwachas supplémentaires (2.67 dollars EU) par enfant. Cette prime n’était pas conditionnée à la fréquentation scolaire, elle était simplement donnée quand il y avait des enfants en âge d’école dans un ménage. La valeur moyenne d’un transfert était de 1 700 kwachas (11,33 dollars EU) 57 par ménage et par mois, ce qui était jugé suffisant pour combler écart d’extrême pauvreté des ménages ciblés (Schubert et Huijbregts 2006). Il y avait 3 000 ménages bénéficiaires au début de 2008, et les dépenses étaient de 43 000 dollars EU par mois (Miller et coll. 2008). L’expansion du pilote a été retardée à cause de retards de financement. Il atteignait néanmoins sept districts à la fin 2008 (Horvath et coll. 2008). En avril 2009, le pilote couvrait 92 786 bénéficiaires dans 23 651 ménages de sept districts (UNICEF/GOM 2009). Mécanismes de mise en œuvre et financement Le Programme de transferts sociaux monétaires a été mis en œuvre localement. Le ministère du Développement de la femme et de l’enfant et le Département de la gestion de la pauvreté et des catastrophes en ont assuré la coordination avec le concours de l’UNICEF (Chipata et Mwamlima 2007). Le pilote de Mchinji a été mis en œuvre par l’Assemblée locale, dont le Comité exécutif de district avait un sous-comité de la protection sociale rassemblant des représentants du ministère technique. Ce sous-comité approuvait les demandes de participation au programme. La structure de district du Malawi inclut des fonctionnaires issus de divers départements et capables d’appuyer le programme. La capacité est limitée au niveau du district mais pas autant que dans d’autres pays qui mettent en œuvre des programmes similaires (la Zambie, par exemple) (Schubert et Huijbregts 2006). En dessous du sous-comité, on trouve le Secrétariat du système de transferts sociaux monétaires, avec le personnel chargé de la mise en œuvre du programme, du contrôle du budget et du suivi périodique. En dessous du secrétariat, le Comité villageois de développement supervise le comité communautaire de protection sociale, et ensemble, ils ciblent et suivent les bénéficiaires (Schubert et Huijbregts 2006). Les équipes du comité communautaire de protection sociale perçoivent une rémunération pour certaines des activités qu’elles effectuent. (Schubert 2007b). Pour le pilote, l’UNICEF a fourni l’assistance technique, soutenu l’organisation du programme, financé les transferts jusqu’en décembre 2006 et appuyé la défense des politiques et le renforcement des capacités au Malawi. Ceci comprenait le financement des visites de représentants des pouvoirs publics au Brésil et en Zambie, l’organisation d’ateliers et de visites sur le terrain à Mchinji. Le financement supplémentaire pour l’expansion du programme en 2008 et 2009 a été fourni par la Commission nationale de lutte contre le SIDA à travers le Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme. Les contributions octroyées à l’expansion par le Fonds mondial étaient d’environ 8,8 millions de dollars EU et les fonds de la Commission nationale de lutte contre le SIDA ont été utilisés puisqu’approximativement 70 % des ménages bénéficiaires étaient affectés par le VIH/SIDA (Schubert 2007a). L’Union européenne a prévu de financer le S&E externe. Le pays a marqué son intérêt pour l’obtention d’autres fonds des partenaires au développement, à travers un panier commun de financement, dès que le Transfert social monétaire aura été intégré dans la Stratégie nationale de protection sociale et aura reçu l’appui total du Cabinet (Schubert et Huijbergts 2006). Les autres bailleurs de fond du financement commun devaient être la Banque mondiale, le DfID, l’ACDI et la NORAD (Horvath et coll. 2008). 57 Standardisant le taux de change par rapport à celui indiqué préalablement ; ceci est légèrement différent du rapport de 2006 de Schubert et Huijbregts. Page 149 128 Défis de la conception de l’évaluation Le suivi interne est effectué à travers la production de rapports mensuels sur les coûts, les activités, les résultats, et autres. L’UNICEF et l’USAID financent un programme conjoint d’évaluation externe conduit par l’Université de Boston et le Centre de recherche sociale du Malawi (Miller et coll. 2008). Les évaluations du ciblage ont été effectuées en mars et juin 2007 et une évaluation des systèmes en octobre 2007. L’enquête de référence auprès des ménages a été conduite dans les groupes villageois de traitement et témoins en mars 2007, avant que les ménages du groupe de traitement reçoivent une subvention. Des enquêtes de suivi ont été effectuées en août-septembre 2007 et mars 2008 et les données qualitatives ont été saisies en octobre-novembre 2007. Il semble, cependant, que les méthodes expérimentales aient été compromises au cours de l’évaluation. Le secrétariat du district de Mchinji a choisi les groupes villageois constituant les groupes de traitement et témoins, les ménages de traitement et témoins ont été sélectionnés en appliquant les méthodes de ciblage communautaires, et les ménages témoins n’ont pas compris que la recherche n’avait rien à voir avec la réception de la subvention. Enseignements tirés L’évaluation du ciblage du programme de Mchinji a révélé un grand besoin d’amélioration. ƒ\03 Près d’un tiers des membres de la communauté des zones du programme ont trouvé que le ciblage n’était pas juste. L’évaluation a suggéré que des indicateurs moins subjectifs soient utilisés pour déterminer les bénéficiaires du programme : le ciblage devrait être plus objectif, normalisé et transparent (Miller et coll. 2008). Suivant leur définition de l’éligibilité, les erreurs d’exclusion commises dans les communautés variaient de 37 à 68 %. ƒ\03 La consommation alimentaire des bénéficiaires et leur diversité se sont améliorées par rapport au groupe témoin. De plus, la santé des enfants et des adultes s’est améliorée, et la fréquentation scolaire et la capacité d’apprentissage des enfants rapportées par eux- mêmes auraient augmenté. Le travail des enfants a considérablement baissé dans les groupes de traitement alors qu’il n’a pas changé dans les groupes témoins. L’évaluation a également conclu que la productivité des ménages avait augmenté depuis la réception des transferts. ƒ\03 Le coût prévu pour l’expansion du programme à 273 000 ménages à travers le pays (1,2 millions d’individus dont 60 % devraient être des OEV) est d’environ 55 millions de dollars EU par an ou 1,4 % du PIB (Schubert 2009). En juin 2007, la mise en œuvre des transferts a coûté moins que 2,2 % des coûts du programme et les couts administratifs atteignaient moins de 15 % des mêmes coûts (Horvath et coll. 2008). ƒ\03 Le programme a été confronté à des défis importants, notamment : i) le besoin d’un personnel de district plus nombreux et mieux formé ; ii) les préoccupations permanentes liées à la dépendance des ménages et à la corruption au sein du programme (Chipeta et Mwamlima 2007) ; iii) le taux de rotation élevé des fonctionnaires ; iv) le besoin de meilleurs mécanismes de financement pour le transfert de fonds à hauts niveaux, et un système SIG amélioré pour la consolidation des données aux niveaux du district et national ; v) la nécessité de mettre en place une procédure de plaintes/appel (UNICEF/GOM 2009) ; et vi) le fait que l’expansion du programme nécessitera un engagement accru des pouvoirs publics, particulièrement du ministère des Finances, et un renforcement supplémentaire des capacités à tous les niveaux des pouvoirs publics. 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