Del'ÉVIDENCE E empirique "à la formulation de POLITIQUE S TH EWORLD BANK Identification des méthodes qui fonctionnent, par le Réseau pour le développement humain Septembre 2013 Des écoles privées à faibles coûts pour répondre aux besoins éducatifs: L'évaluation d'impact d'un programme au Pakistan De par le monde, l'éducation des enfants est une priorité, mais les vont, rendant l'éducation une priorité pour le gouvernement de pays en développement font face à de grandes difficultés : les écoles cette province. À travers l'Association internationale de dével- sont souvent surpeuplées et en mauvais état, les enseignants man- oppement (IDA) - le fonds de la Banque mondiale pour les quent parfois à l'appel et certains ne possèdent pas les compétences plus démunis -, le gouvernement du Sind a reçu une aide pour requises ou alors ne s'intéressent pas à l'enseignement. Quant aux par- développer et mettre en oeuvre son Programme de réforme ents, ils hésitent à envoyer du secteur de l'éducation (Sindh Education Sector Reform Pro- leurs enfants, notamment gram). Le but de cette réforme était d'augmenter les inscrip- leurs filles, dans des écoles tions, d'améliorer la réussite des étudiants et de réduire les éloignées, préférant peut- disparités sociales en matière d'éducation, en améliorant les être les garder à la maison performances scolaires par à travers une responsabilité et une pour aider aux travaux mé- gouvernance accrues. nagers. Les chiffres parlent Un des programmes inclus dans la réforme consistait à oc- d'eux-mêmes: 57 millions troyer aux entrepreneurs privés des subventions en espèces, afin de d'enfants qui sont en âge fournir des écoles primaires gratuites et mixtes dans les villages isolés de fréquenter l'école pri- dépourvus d'écoles locales. Afin d'en mesurer les effets, une évalua- maire n'y vont pas, et ceci tion d'impact a été intégrée à ce programme. Lévaluation a révélé malgré la poussée mondiale vers l'éducation primaire universelle que dans les villages ciblés par le programme les garçons et les filles motivée par les Objectifs du Millénaire pour le développement des étaient plus susceptibles d'aller à l'école et obtenaient de meilleurs Nations unies. résultats que les enfants des villages non bénéficiaires. Ces enfants La Banque mondiale travaille en parallèle avec des gouverne- nourrissaient également de plus grands rêves : les filles avaient plus ments à l'élaboration et à la mise en oeuvre de méthodes innov- tendance à vouloir devenir enseignantes plutôt que femmes au foyer antes visant à accroître l'accès à l'éducation, notamment pour les ; et les parents avaient plus tendance à souhaiter que leurs enfants filles, et à améliorer la qualité de l'enseignement. Afin d'augmenter deviennent médecins ou ingénieurs plutôt qu'agriculteurs. le taux d'inscription ainsi que le niveau de l'enseignement et de la La Banque mondiale, qui s'est engagée dans la lutte pour responsabilité des écoles, les responsables politiques et les spécial- l'accès à l'éducation universelle, a annoncé cette année qu'elle istes de l'éducation dans les pays en développement sont en train financerait le second Programme de réforme de l'éducation d'examiner diverses possibilités. Celles-ci incluent le recours aux du Sind (Sindh Education Reform Program Package). Le pro- écoles privées et autres écoles non gouvernementales, pour cibler gramme vise à développer le partenariat public-privé, et soute- les enfants défavorisés. Dans la province pakistanaise du Sind, nir et renforcer la qualité des écoles. Comme le montre cette seule la moitié des enfants en âge de fréquenter l'école primaire y évaluation, l'innovation dans l'éducation en vaut la peine. Au Pakistan, les écoles privées, destinées depuis longtemps aux en- privées à faibles coûts, dont les frais de scolarité s'élèvent en moyenne fants de l'élite du pays, sont devenues populaires auprès des familles à moins de 5 dollars par mois dans les villages ruraux, représentant pauvres grâce à la propagation de nouvelles écoles moins dispend- un modeste pourcentage du revenu moyen des ménages. Les études ieuses. Plus d'un tiers des enfants fréquentent maintenant ces écoles portant sur ces écoles révèlent généralement que l'apprentissage des élèves est meilleur et que les enseignants sont plus performants, bien l'éducation et l'apprentissage, notamment dans les villages dépour- qu'ils soient moins bien payés et souvent moins qualifiés que leurs vus d'écoles locales. Le programme de Promotion des écoles privé- homologues dans les écoles publiques*. es à faibles coûts dans la province rurale du Sind (Promoting Low- Actuellement, les responsables politiques et les spécialistes de Cost Private Schooling in Rural Sindh program) a été créé par la l'éducation au Pakistan se tournent vers un système lucratif pour Fondation pour l'éducation du Sind (Sindh Education Founda- améliorer la qualité de l'éducation ainsi que l'accès aux enfants en tion), une agence semi-publique du gouvernement de cette prov- âge de fréquenter l'école primaire, dont plus d'un quart dans le pays ince, qui travaille en collaboration avec une équipe de la Banque ne va pas à l'école. Si les détails varient selon les modèles, les parte- mondiale. Le projet avait pour but d'encourager les entrepreneurs nariats public-privé nécessitent en général que les écoles suppriment privés à construire et à diriger des écoles primaires dans les villages les frais de scolarité, en échange d'une subvention par élève destinée mal desservis. Pour pouvoir en profiter, les écoles devaient satis- à couvrir les frais encourus par l'école. Le montant de la subven- faire certains critères concernant leurs établissements, être mixtes, tion est inférieur au coût de fonctionnement d'une école publique supprimer les frais de scolarité pour tous les élèves, et compter au où les salaires sont généralement plus élevés, et des mesures de con- moins deux femmes dans leur corps enseignant. En échange, les trôle ont été intégrées aux partenariats public-privé, afin de garan- entrepreneurs privés agréés par la fondation recevaient une sub- tir un enseignement de qualité : par exemple, dans le cadre d'un vention par élève. Ils bénéficiaient également d'une aide non fi- programme lancé en 2005 dans la province du Pendjab, les écoles nancière sous forme de manuels ou d'autre matériel gratuit, d'une privées à faibles coûts existantes peuvent bénéficier d'une subven- formation pour les enseignants, et de visites régulières du person- tion par élève si elles suppriment les frais de scolarité et s'assurent nel de la fondation, qui leur conseillait des moyens d'améliorer qu'un pourcentage minimum d'élèves réussisse un examen scolaire l'enseignement et l'apprentissage des élèves. standardisé, proposé régulièrement. Ce programme, qui a rehaussé les notes d'examen et le nombre d'inscriptions (voir « l'évidence à Espoir la politique », octobre 2012), couvre désormais plus d'un million Selon Saima Kausar, directrice d'une école du programme à Wazir Sangi, d'élèves dans quelque 2 000 écoles privées partenaires. le village où elle a grandi, « l'éducation est très importante et les filles y Dans la province du Sind, les spécialistes de l'éducation se sont ont autant droit que les garçons. [...1 J'ai toujours pensé que les filles de également tournés vers les écoles privées pour améliorer l'accès à mon village devraient apprendre à lire et à écrire tout comme je l'ai fait. » * Voir Andrabi, Tahir, Jishnu Das,Asim ljaz Khwaja. 2008.A dime a day:The possibilities and limits of private schooling in Pakistan. Comparative Education Review 52(3):329-355; Das, Jishnu, Priyanka Pandey, and Tristan Zajonc. 2006. Learning levels and gaps in Pakistan. World Bank Policy Research Working Paper 4067. Washington, D.C.: World Bank. Évaluation Le programme a démarré dans 10 districts, choisis pour leur très du groupe témoin où aucune école privée n'avait été créée dans faible performance relative à trois mesures d'accès à l'éducation le cadre du programme. Cent quatre-vingt-dix-neuf villages sur : le nombre d'enfants scolarisés, l'égalité des sexes parmi les 263 à travers les trois groupes ont fait l'objet d'une enquête. enfants scolarisés et le pourcentage de familles vivant à moins Les écoles ont ouvert durant l'été 2009, au milieu de l'année de 15 minutes de l'école primaire la plus proche. Lévaluation scolaire. L'enquête initiale fut réalisée en février 2009, une pre- avait pour but de mesurer l'impact des écoles privées financées mière enquête de suivi en juin 2010 et une deuxième un an plus par le programme sur le taux d'inscription général ainsi que sur tard. La première enquête de suivi a procédé au recensement com- l'apprentissage, et de déterminer si verser une subvention par plet de chaque village et a porté sur 25 157 enfants âgés de 5 à élève plus importante pour les filles scolarisées augmenterait leur 15 ans. La deuxième enquête de suivi a porté sur un échantillon taux d'inscription. Deux cent soixante-trois villages mal desservis représentatif dans chaque village des ménages ayant des enfants. ont participé à la première vague du programme (celui-ci s'est En tout, 17 721 enfants âgés de 5 à 17 ans ont été interrogés lors développé depuis). Ces villages ont été répartis de façon aléa- de cette deuxième enquête de suivi. Les chercheurs ont interrogé toire parmi trois groupes : les villages dont les nouvelles écoles les ménages et les enfants, qui ont passé chez eux un test de langue privées avaient reçu une subvention de 350 roupies (4,70 dollars) et de mathématiques. Les chercheurs ont aussi interrogé les écoles par élève, indépendamment du sexe (100 villages), les villages afin de rassembler des données sur leur fonctionnement, leurs dont les écoles avaient reçu 100 roupies de plus (1,34 dollar) établissements et leur personnel, ainsi que les enseignants, pour pour chaque élève de sexe féminin (100 villages), et 63 villages valider les taux d'inscription et de participation déclarés. * Cette note s'appuie sur le rapport de recherche « Leveraging the Private Sector to Improve Primary School Enrollment: Evidence from a Randomized Controlled Trial in Pakistan » (mobiliser le secteur privé pour améliorer la fréquentation des écoles primaires : résultats d'un essai contrôlé randomisé au Pakistan), écrit par Felipe Barrera- Osorio, David S. Blakeslee, Matthew Hoover, Leigh L. Linden, Dhushyanth Raju et Stephen Ryan en mai 2013. Dans les villages bénéficiant d'écoles privées financées dans les ménages interrogés dans les villages bénéficiaires et té- par le programme, le taux de scolarisation des enfants moins. Le pourcentage des bonnes réponses a été calculé pour a augmenté de 30 points de pourcentage par rapport chaque candidat. L'impact du programme sur les résultats a été aux villages du groupe témoin. de 21 points de pourcentage (66 % de bonnes réponses dans les villages bénéficiaires contre 45 % dans les villages du groupe té- Le taux de scolarisation dans les écoles primaires du Sind est l'un moin). Pour les enfants inscrits à l'école en raison du programme, des plus bas du pays. Avant le lancement du programme, 53 pour l'impact s'est élevé à 63 points de pourcentage. Les résultats sug- cent des garçons âgés de cinq à neuf ans et 41 pour cent des filles gèrent donc que les écoles privées financées par le programme ont fréquentaient l'école primaire. Dans les villages ciblés par le pro- été très efficaces pour améliorer l'apprentissage des élèves. gramme, le taux de scolarisation était encore plus bas, avec seule- ment 30 pour cent des enfants allant à l'école. Un an après le début du programme, qui a amené des écoles privées dans ces villages isolés, le taux de scolarisation avait aug- menté de 50 points de pourcentage par rapport au taux de sco- larisation moyen des villages du groupe témoin. Autrement dit, dans les villages bénéficiaires, plus de 80 pour cent des enfants en âge de fréquenter l'école primaire allaient à l'école, un taux comparable à ceux des grandes villes du Pakistan. Au cours de la deuxième année du programme, le gouvernement s'est mis à rouvrir des écoles abandonnées dans certains villages du groupe témoin, ce qui a augmenté le taux de scolarisation de 20 points de pourcentage. Ainsi, bien que le taux d'inscription soit resté élevé dans les villages bénéficiaires, l'impact du programme a été réduit à 30 points de pourcentage par rapport aux 50 points de pourcentage de la première année. Les écoles du programme ont non seulement offert un Il y a eu également un grand bond dans le taux meilleur enseignement, malgré un corps enseignant d'inscription des filles. moins expérimenté par rapport aux écoles publiques, - mais ils ont fourni de meilleurs établissements à I'impact sur le taux d'inscription des filles dans les villages bénéfici- leurs élèves. aires s'est avéré très élevé. À la fin de la première année scolaire, il éta- it supérieur de 5,2 points de pourcentage par rapport à l'impact chez Conformément aux résultats d'études portant sur des écoles les garçons. À la fin de la deuxième année scolaire, il était égal chez privées à faibles coûts dans d'autres régions du Pakistan, les écoles les garçons et chez les filles. Accorder aux écoles une subvention par de la province du Sind ont mieux su conserver leur personnel et élève plus importante pour les filles n'a donc pas eu d'impact sup- assurer leur fonctionnement. Compte tenu de l'importance de la plémentaire, comparé à une distribution de subventions identiques qualité des infrastructures des écoles privées pour la Fondation pour les filles et les garçons. Basée sur ces résultats, la fondation ne pour l'éducation du Sind, les écoles disposaient en général de propose plus aux écoles des subventions de montants différents. plus de salles de classe que les écoles publiques, et étaient plus susceptibles d'avoir assez de pupitres pour leurs élèves, ainsi que Les enfants en âge de fréquenter l'école primaire sont de l'eau potable, de l'électricité et des toilettes. devenus non seulement plus susceptibles d'aller à Le programme exigeait que ces écoles embauchent au l'école, mais ils ont également obtenu de meilleurs moins deux femmes parmi les enseignants, et le nombre total résultats dans les tests standardisés. d'enseignantes était plus élevé que dans les écoles publiques. Les enseignantes des écoles privées avaient en général moins Dans le cadre de la deuxième enquête de suivi, environ deux an- d'expérience dans l'enseignement que leurs homologues dans les nées scolaires après le début du programme, des tests de mathé- écoles publiques et leurs salaires étaient plus faibles, mais rien matiques et de langue ont été donnés aux enfants de 5 à 10 ans, n'indique que cela a nui à la qualité de l'éducation. Les enfants qui vont à l'école acquièrent des médecins ou ingénieurs que les familles des villages du groupe compétences et un savoir indispensables pour témoin." Elles avaient également moins tendance à envisag- mieux réussir dans la vie. De plus, l'école permet aux er un avenir où leurs fils seraient agriculteurs et leurs filles enfants et à leurs parents de nourrir des ambitions. femmes au foyer. La durée idéale de scolarisation estimée par L'évaluation a ainsi révélé que fréquenter une école ces familles s'est aussi allongée d'un an et demi. De leur côté, privée financée par le programme n'a pas simplement les enfants souhaitaient davantage d'éducation, par rapport donné accès à une meilleure éducation, mais a aux enfants des villages du groupe témoin. également permis aux enfants de voir plus grand. Les enfants ont eux-mêmes nourri de plus grands espoirs: les filles étaient moins susceptibles de déclarer vouloir devenir Dans les villages ciblés par le programme, les familles étaient femmes au foyer et avaient plus tendance à envisager une car- plus susceptibles de souhaiter que leurs enfants deviennent rière d'enseignante. Con=usion Au Pakistan, les écoles privées à faibles coûts se sont avérées des bons scolaires sur l'inscription à l'école des enfants non très efficaces pour attirer les élèves garçons et filles et pour leur scolarisés des bidonvilles. Cette initiative du gouvernement du fournir un enseignement de qualité, à un coût moins élevé Pendjab s'inscrit dans le cadre de son deuxième programme de que dans les écoles publiques. Cette réduction des coûts vient réforme du secteur de l'éducation, et bénéficie du financement en partie du salaire moindre octroyé aux enseignants par rap- de la Banque grâce aux fonds de l'IDA. Les bons scolaires se- port à ceux du secteur public, ce qui ne semble pas avoir af- ront valables dans les écoles privées à faibles coûts, qui devront fecté la qualité de l'enseignement. Au contraire, comme les garantir un niveau minimum d'apprentissage pour pouvoir ac- écoles privées du Sind financées par le programme bénéfici- cueillir des enfants boursiers. Une autre évaluation, financée aient d'une plus grande responsabilité et d'un soutien accru à par le Fonds d'évaluation d'impact stratégique (Strategic Impact l'enseignement et à l'apprentissage, leurs élèves ont obtenu de Evaluation Fund ou SIEF), mesurera l'impact d'un programme meilleurs résultats aux tests que les enfants qui ne pouvaient dont le but est d'encourager un meilleur fonctionnement des fréquenter que l'école publique. écoles privées à faibles coûts et d'accroître leur utilisation au Il reste beaucoup à apprendre sur la mise en place et le Pakistan à travers des subventions spéciales, des prêts et du fi- soutien de programmes pour améliorer l'accessibilité et la qual- nancement en équité, évitant aux écoles de dépendre de l'argent ité de l'éducation. Dans les régions urbaines du Pendjab, les du gouvernement. chercheurs de la Banque mondiale prévoient évaluer l'impact Le Réseau pour le développement humain, qui appartient au Groupe de la Banque mondiale, soutient et diffuse les travaux d'évaluation d'impact de projets de développement destinés à lutter contre la pauvreté. L'objectif est de collecter et d'exploiter des données empiriques, afin d'aider les gouverne- ments et les organismes de développement à concevoir et à mettre en oeuvre les politiques les plus appropriées et les plus efficaces pour améliorer les opportunités en matière d'éducation, de santé et d'emploi dans les pays en développement. Pour plus d'informations sur qui nous sommes et ce que nous faisons, voir : http://www.worldbank.org/sief La série de notes périodiques « de l'évidence empirique à la formulation de politiques » est produite par le SIEF avec l'appui généreux du Département du développement international du gouvernement britannique. of# e Human DeveLopment Network LA BANQUE MONDIALE, RÉSEAU POUR LE DÉVELOPPEMENT HUMAIN 1818 H STREET, NW WASHINGTON, DC 20433 Produit par le Bureau de l'Économiste en chef, Réseau pour le développement humain, Communications/Aliza Marcus