TABLE DES MATIÈRES Remerciements.................................................................................................................................................................................................... 1 Avant-propos........................................................................................................................................................................................................ 2 Numériser l’agriculture : résultats des programmes de délivrance de bons électroniques (E-vouchers) au Mali, au Niger et en Guinée....................................................................................................................................................................................... 5 Dossier spécial : Améliorer la performance des projets grâce à un outil rentable : le suivi itératif des bénéficiaires...... 18 Aperçu des indicateurs macroéconomiques des pays AFCW3, 2014-2019.................................................................................. 42 Guinée................................................................................................................................................................................................................... 43 Mali........................................................................................................................................................................................................................ 47 Niger...................................................................................................................................................................................................................... 51 Tchad..................................................................................................................................................................................................................... 55 REMERCIEMENTS Ce rapport est le fruit d’un travail de collaboration réalisé sous la houlette de José López-Calix, Lars C. Moller, Marianne Grosclaude et Andrew L. Dabalen, avec les contributions écrites d’une équipe interdisciplinaire de la Banque mondiale composée d’Amadou Ba, Rhoda Rubaiza, Andre-Marie Taptue, Aly Sanoh, Aboudrahyme Savadogo, Olivier Béguy, Susana Sanchez, Boulel Touré, Luc Razafimandimby, Marcel Nshimiyimana, Markus Kitzmuller, Olanrewaju Malik Kassim et Irum Touqeer. Soukeyna Kane, Christophe Lemiere, Madio Fall, François Nankobogo, Joelle Dehasse, Rachidi B. Radji, Michael Hamaide et Boubacar Sidiki Walbani ont quant à eux prodigué des encouragements, fourni des conseils, des informations et des commentaires pertinents. L’analyse des expériences pilotes de délivrance de bons électroniques (E-voucher) et du premier cycle de suivi itératif des bénéficiaires a été préparée dans le cadre d’un programme de travail mondial sur des questions agricoles et de pauvreté à l’échelle de la Banque. Nous adressons nos vifs remerciements à Flore Martinant de Préneuf et Irina Shuman, qui ont réalisé l’évaluation par les pairs de la contribution sur les bons électroniques ; et à Kristen Himelein, qui en a fait de même pour le suivi itératif des bénéficiaires. La compilation du rapport n’aurait pas été possible sans l’aide rédactionnelle de Maude Jean-Baptiste, le soutien médiatique d’Anne Senges, Dasan Bobo et Edmond Bagde Dingamhoudou, et l’aide administrative de Micky Ananth, Mariama Diabate-Jabbie et Jeanne D’Arc Edima. Un précieux travail d’édition et de composition a été réalisé en temps opportun par Valérie Bennett, Maria Deverna, Pia Decarsin et leurs collègues traducteurs et éditeurs chez JPD Systems. 1 AVANT-PROPOS La contribution du secteur agricole à l’économie de la Guinée, du Mali et du Niger est essentielle. En part de PIB, l’agriculture représente, respectivement pour ces pays, 16 %, 38 % et 40 %. C’est aussi la première source d’emploi pour la majorité de la population (68 %, 57 %, et 75 %, respectivement). Cet important secteur se caractérise par des rendements faibles dus à l’utilisation limitée et la qualité médiocre des intrants. Le Centre international pour le développement des engrais (IFDC) a estimé le rendement céréalier moyen à 1,6 tonne par hectare en 2014 au Mali, ce qui est supérieur à la moyenne subsaharienne (1 tonne/ha), mais nettement inférieur aux rendements potentiels. La majorité des terres de ces pays se trouve dans des zones semi-arides et arides du Sahel et du désert du Sahara. Par conséquent, les crises de plus en plus fréquentes dues à la grande vulnérabilité du Sahel aux changements climatiques – qui se traduisent par des épisodes météorologiques extrêmes et récurrents comme des inondations et des sécheresses – et la baisse de la productivité ont eu des effets néfastes sur les revenus des agriculteurs tout en compromettant la sécurité alimentaire des ménages. L’article principal du présent volume est donc consacré à l’effort novateur visant à introduire des systèmes de bons électroniques ou e-vouchers, appuyés par des moyens numériques, pour la délivrance de subventions agricoles en Guinée, au Mali et au Niger. Le programme E-voucher est bâti autour de trois composantes clés : une plateforme numérique pour les messages SMS ; une base de données fiable d’agriculteurs enregistrés électroniquement dans les régions ciblées et un répertoire des distributeurs d’intrants agricoles. Ce faisant, la distribution des engrais (ou semences) devient transparente, garantit une qualité élevée et, à mesure qu’elle se développe, favorise la participation du secteur privé. Sur la base de pratiques pilotes dans l’ensemble de la sous-région, quatre enseignements principaux sont tirés. Première- ment, le ciblage est un facteur déterminant de portée et succès. En général, il est effectué en fonction du principal objectif du programme : soit la réduction de la pauvreté, qui viserait les agriculteurs situés dans les déciles les plus bas de la répartition des revenus, soit la productivité agricole, qui viserait également ceux qui se trouvent quelques déciles plus haut. Une décision claire à cet égard doit être prise d’emblée. Deuxièmement, chez les populations rurales fortement analphabètes, les technologies numériques doivent être adaptées à leurs besoins, la messagerie vocale fonctionnant mieux que les messages SMS. Troisièmement, l’efficacité de ce programme dépend de celle des marchés publics. Dans nombre de cas, les retards dans la fourniture d’intrants agricoles sont le fait de goulets d’étranglement au stade de la passation des marchés. Comme les gouvernements sont fortement engagés dans l’amélioration de ces approches, j’espère que ce rapport fournira des informations supplémentaires pour les aider à réussir leur mise en œuvre. Le second thème spécial examine les expériences pilotes d’introduction du suivi itératif des bénéficiaires (Iterative Beneficiary Monitoring – IBM) en tant qu’outil de suivi novateur et rentable dans les projets de la Banque. Le suivi itératif des bénéficiaires est conçu comme une boucle de rétroaction légère, économique, indépendante, rapide et itérative. Avec un simple questionnaire et des missions de courte durée sur le terrain, il collecte directement auprès des 2 bénéficiaires des informations sur la performance du projet. Le résultat est un rapport bref et précis sur les problèmes devant être résolus par les équipes de projet. De cette manière, le suivi itératif des bénéficiaires améliore la réactivité des équipes de projet ainsi que l’engagement et la satisfaction des bénéficiaires grâce à des cycles d’amélioration positifs qui se renforcent mutuellement. Le suivi itératif des bénéficiaires a d’abord été développé au Mali, pour pallier l’accès limité aux activités du projet en raison de l’insécurité, mais considérant sa nature agile, il est également devenu attractif et applicable dans des environnements sécurisés. La gamme de projets appliquant ces stratégies de suivi comprend, entre autres, les programmes de cantine scolaire, les systèmes de bons électroniques (e-vouchers) et la distribution de cartes de transfert de fonds pour des soins de santé destinées aux populations extrêmement pauvres. Les résultats du suivi de ces projets initiaux ont été partagés avec les coordinateurs de projet. La Banque mondiale étend actuellement l’approche du suivi itératif des bénéficiaires à diverses opérations au Mali, au Tchad, en Guinée, au Niger, au Bénin, en République centrafricaine et au Nigeria. Concernant les perspectives économiques, je suis particulièrement heureuse d’annoncer que tous les pays devraient connaître en 2019 des taux de croissance solides et positifs, le Niger et la Guinée représentant respectivement 6,5 % et 5,9 %, le Mali 5 % et le Tchad près de 3,4 %. La croissance positive du Tchad résulte également de la restructuration réussie de sa dette envers Glencore. La stabilité macroéconomique, y compris de faibles taux d’inflation, devrait aussi être préservée grâce à la reprise de la croissance en 2019. Cela est important dans le contexte de la hausse des prix du pétrole. Les taux d’inflation se maintiendront sous la barre des 3 % et, dans le cas de la Guinée, resteront à un chiffre. Entre-temps, les risques de dégradation résultant de chocs internes ou externes et de revirements de politique resteront importants. En réponse, tous les gouvernements continuent à mettre en œuvre des politiques d’assainissement budgétaire favorisant la croissance et soutenues par les programmes du Fonds monétaire international (FMI) actuels et les opérations de la Banque mondiale en cours de préparation. Pour finir, je voudrais rappeler à nos lecteurs qu’il s’agit de la septième édition d’une série de rapports traitant des principaux problèmes de développement en Guinée, au Mali, au Niger et au Tchad. La série de bilans économiques AFCW3 vise à susciter un débat public sur des évolutions macroéconomiques et structurelles importantes pour soutenir la réduction de la pauvreté. La série fournit également une vaste analyse — même si les résultats sont préliminaires et loin d’être aboutis. En un mot, cette série est un instrument innovant de partage des connaissances pour la Banque mondiale et notre sous-région AFCW3. En effet, elle est utile pour approcher les médias, la société civile, les universités et le grand public afin de discuter des réformes politiques prioritaires introduites ou débattues dans ces pays.1 Pour conclure, je tiens à exprimer une fois de plus ma gratitude envers nos partenaires gouvernementaux, techniques et financiers pour leur coopération et leurs multiples contributions conjointes au cours de ces derniers mois. Leurs encouragements, leurs apports et conseils techniques ont permis de créer un environnement particulièrement propice à un échange riche et régulier sur les politiques de développement. J’espère que cette série permettra d’approfondir ces échanges et de les faire circuler dans l’espace public pour mieux informer les citoyens et leur permettre d’exprimer leurs opinions. Soukeyna Kane Directrice des opérations de la Banque mondiale Guinée, Mali, Niger et Tchad Il convient de noter que les constatations, interprétations et conclusions exprimées dans ce rapport sont exclusivement celles du personnel de la Banque mondiale, 1 et ne reflètent pas nécessairement les opinions du Groupe de la Banque mondiale, et de ses organisations affiliées ni celles des Directeurs exécutifs de la Banque mondiale ou des gouvernements qu’ils représentent. 3 4 NUMÉRISER L’AGRICULTURE RÉSULTATS DES PROGRAMMES DE DÉLIVRANCE DE BONS ÉLECTRONIQUES (E-VOUCHERS) AU MALI, AU NIGER ET EN GUINÉE Amadou Ba (Agro-économiste Principal) et Rhoda Rubaiza (Agro-économiste Principal) Mars 2019 Résumé Ce dossier propose d’examiner les résultats d’un système pilote de subventions électroniques à l’agriculture fondé sur des bons électroniques (E-vouchers), conçu et mis en œuvre en Afrique de l’Ouest. Il présente les caractéristiques du programme de bons électroniques, décrit les expériences de ce type en Guinée, au Mali et au Niger, et en tire des enseignements et des recommandations. 1. INTRODUCTION Dans le cadre de leurs programmes de renforcement des capacités du secteur agricole, les gouvernements de Guinée, du Mali et du Niger distribuent aux agriculteurs et aux éleveurs des paquets de technologies améliorées sous forme de subventions (engrais, semences, semis, petit matériel et équipements de taille intermédiaire, petits ruminants et autres intrants). Ces subventions visent à aider ces producteurs à développer leurs exploitations dans un contexte de vulnérabilité aux changements climatiques, de baisse de fertilité des sols et de forte demande de produits agricoles liée à la forte croissance démographique. Sous l’égide de leurs gouvernements respectifs, les ministères en charge de l’agriculture en Guinée, au Mali et au Niger ont mis en place un système pilote de subventions électroniques fondé sur des codes de bons afin d’améliorer l’efficac- ité, la transparence et la traçabilité de l’attribution de ces subventions. Dans le cadre de ce programme d’E-vouchers, une base de données électronique des bénéficiaires (codage) a été créée et des bons électroniques ont été envoyés aux bénéficiaires par SMS. Ces SMS précisent également les subventions qui leur sont accordées et les informent du lieu où ils recevront les intrants agricoles. Enfin, le programme assure aussi le suivi de l’utilisation des subventions et évalue leur impact sur les bénéficiaires. Ce programme pilote a été soutenu dans les trois pays par le Programme de productivité agricole en Afrique de l’Ouest (PPAAO), financé par la Banque mondiale, dont l’objectif de développement est de générer et accélérer l’adoption de technologies améliorées dans les pays participants pour les produits de base prioritaires, comme indiqué dans la politique agricole régionale (ECOWAP) de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). 5 L’objectif de ce rapport est de partager l’expérience et les enseignements tirés de la mise en œuvre de ce programme en Afrique de l’Ouest avec des responsables des politiques et des partenaires au développement qui cherchent à concevoir ou mettre en œuvre des programmes similaires pour améliorer l’efficacité, l’efficience et l’impact des programmes de subvention des intrants agricoles. 2. CONTEXTE La Guinée, le Mali et le Niger sont des pays à faible revenu situés en Afrique de l’Ouest. Le secteur agricole contribue pour beaucoup à leur économie en termes de part du PIB (16 %, 38 % et 40 % en 2017, respectivement)2 et d’exportations. C’est aussi la principale source d’emploi pour la majorité de la population (68 %, 57 % et 75 %, respectivement, en 2018)3. Dans ces trois pays, le secteur agricole se caractérise par de faibles rendements dus à une utilisation limitée d’intrants. Par exemple, selon l’Aperçu des statistiques sur les engrais au Mali de 2013-20164, la consommation d’engrais reste assez FIGURE 1 : CONSOMMATION ANNUELLE L’ENGRAIS AU MALI 5 Code SH Nom de l’engrais 2013 2014 2015 2016 3102100000 Urée 169 514 128 963 131 562 219 405 3105400000 MAP 64 778 28 587 58 146 87 427 3104200000 MOP 34 513 43,082 54 180 82 905 3102210000 Sulfate D’ammonium 40 844 23 290 18 897 47 759 3105300000 DAP 5 384 3 875 4 354 39 448 Autres Engrais 56 952 67 662 33 336 113 711 Total (MT) 371 985 295 459 300 474 590 655 S ource : FTWG-MLI FIGURE 2 : RENDEMENTS CÉRÉALIERS AU MALI, TONNES MÉTRIQUES PAR HECTARE 6 Maïs Sorgho Linéaire (mil) Mil Linéaire (riz) Riz Linéaire (maïs) 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 Linéaire (sorgho) S ource : FAOSTAT 2 Indicateurs du développement dans le monde (WDI), 2018 3 Ibid. 4 Source  : FTWG-MLI in Africa Fertilizer Organization, 2017. Aperçu des statistiques sur les engrais au Mali, 2013-2016 https://africafertilizer.org/wp-content/ uploads/2017/09/Mali-Fertilizer-Statistics-Overview-2016.pdf 5 Ibid. 6 Une grave sécheresse a ete enregistrée en 2011. 6 faible, bien qu’elle augmente. Le rapport a révélé que 590 655 tonnes d’engrais ont été utilisées en 2016, soit près du double de 2015. Avec l’utilisation croissante des intrants, la productivité a augmenté, mais elle reste faible et inférieure au potentiel du pays. Le Centre international pour le développement des engrais (IFDC) a estimé les rendements céréaliers moyens à 1,56 tonne par hectare en 2014 au Mali, un chiffre supérieur à la moyenne de l’Afrique subsaharienne (1 tonne/ ha), mais inférieur aux rendements potentiels. Le Mali et le Niger sont des pays enclavés dont la majorité des terres se trouve dans des zones semi-arides et arides du Sahel et du désert du Sahara. Les crises de plus en plus fréquentes provoquées par la grande vulnérabilité de la région du Sahel aux changements climatiques — qui se traduisent par des épisodes climatiques extrêmes récurrents comme des inondations et des sécheresses — ont eu des effets néfastes sur les revenus des agriculteurs, et ont compromis la sécurité alimentaire des ménages. Au lendemain de la crise alimentaire mondiale de 2008, les gouvernements de Guinée, du Mali et du Niger ont lancé des stratégies de développement agricole axées sur l’intensification de la production agricole – dont l’Initiative 3N « Les Nigériens nourrissent les Nigériens », l’Initiative riz au Mali et l’Initiative présidentielle pour l’agriculture en Guinée – afin d’aider les ménages touchés par les crises. Ces initiatives cherchent à remédier aux faibles rendements agricoles — résultant d’une utilisation inadéquate des intrants agricoles, notamment des engrais et des semences certifiées — en subventionnant des intrants agricoles améliorés afin de stimuler la productivité agricole. Dans le cadre de leurs initiatives respectives, les gouvernements des trois pays ont mis au point des programmes de subvention aux intrants afin de renforcer les capacités des ménages touchés par la crise alimentaire et les crises climatiques récurrentes. 3. PROGRAMMES TRADITIONNELS DE SUBVENTION DES INTRANTS Parmi les trois pays, c’est le Mali qui dispose du programme de subventions agricoles le plus important. En 2018, les subventions accordées étaient estimées à 45 milliards FCFA (environ 80 millions USD). En réponse à la crise alimentaire mondiale, le gouvernement a lancé l’Initiative riz lors de la campagne agricole de 2008-2009. Son objectif était de stimuler la production de riz locale en fournissant aux agriculteurs des semences et des engrais subventionnés, ainsi que des facilités de crédit pour acquérir du matériel agricole et des services de vulgarisation. Pour soutenir davantage le développement du secteur, le gouvernement a adopté la Stratégie nationale de développement de la riziculture (SNDR) 2009-2018. En 2009, le gouvernement a étendu l’Initiative riz au maïs, au blé, au mil et au sorgho afin d’accroître la production, principalement grâce à des subventions sur les engrais. Cependant, même si le programme national de subvention des engrais a augmenté la production agricole, plusieurs analyses indiquent qu’il a ciblé les agriculteurs aisés plutôt que les plus pauvres. L’augmentation des subventions allouées a très peu amélioré les rendements agricoles par rapport à la quasi-stagna- tion observée au cours de la période considérée, ce qui pose le problème de l’efficacité des subventions des intrants agricoles. Les principaux problèmes découlant de la mise en œuvre de ces programmes concernent : 1) les phases de conception et de mise en œuvre du programme de subvention caractérisé par le rôle prédominant du secteur public et ne laissant que peu, voire aucune, marge de manœuvre pour mobiliser les investissements du secteur privé ; 2) la sélection des fournisseurs d’intrants (principalement des semences et des engrais) au moyen d’un processus d’appel d’offres souvent peu transparent ; 3) un système de ciblage en pratique défaillant, qui ne garantit pas toujours que les bénéficiaires ciblés reçoivent bien les intrants subventionnés alors que la population cible principale se compose de petits exploitants agricoles ; 4) l’absence d’évaluation officielle et régulière de la performance et des impacts de ces programmes par des organismes externes indépendants ; 5) l’inadéquation entre les quantités d’intrants distribués et la superficie des exploitations agricoles des ménages bénéficiaires ; et 6) l’absence de transparence et de traçabilité dans l’allocation et la distribution des intrants, discréditant ainsi le programme et provoquant des retards et des goulots d’étranglement dans la fourniture des intrants aux bénéficiaires. 7 Au final avec le système traditionnel de subvention des intrants agricoles, ce sont des sommes importantes qui sont dépensées avec un important risque de ne pas atteindre les résultats escomptés à cause de l’opacité des dispositifs de distribution et de l’absence de dispositif de suivi évaluation. En plus, les véritables bénéficiaires de cette subvention ne sont pas souvent servis, du fait de beaucoup de sources de déperditions tout au long de la chaîne de distribution. En conséquence, pour améliorer leur système de subvention des intrants, la Guinée, le Mali et le Niger ont choisi de concevoir un système pilote fondé sur une meilleure identification des bénéficiaires et de leurs besoins, les technolo- gies de l’information et de la communication (TIC) et l’implication du secteur privé, ainsi que sur le suivi des opérations et des résultats. Il convient de noter que le programme de bons électroniques ou e-vouchers a été lancé dans un contexte marqué par l’amélioration de la couverture de la téléphonie mobile en milieu rural s’est constamment améliorée en Guinée, au Mali et au Niger. 4. SYSTÈME PILOTE DE BONS ÉLECTRONIQUES (E-VOUCHERS) Le système de délivrance des subventions agricoles à base de bons électroniques s’appuie sur une plateforme numérique pour la distribution d’intrants agricoles et envoie instantanément des bons électroniques par SMS aux terminaux mobiles d’une base de données d’agriculteurs (bénéficiaires). Ces SMS les informent que des subventions leur ont été accordées et où ils peuvent les récupérer. Ce faisant, ce système permet également le suivi et évaluation en temps réel de la distribution des intrants aux agriculteurs. 4.1 Objectifs du programme Le programme de bons électroniques a été lancé en 2015-2016 dans le nord du Mali (Mopti, Tombouctou et Gao) sous l’égide du Programme de productivité agricole en Afrique de l’Ouest (PPAAO). Il a ensuite été étendu aux régions méridionales du pays et aux pays voisins, à commencer par le Niger, où deux cycles de distribution de bons électroniques ont eu lieu en 2017 et 2018, puis la Guinée en 2018. Une étude de faisabilité du système est en cours au Tchad. Dans les trois pays pilotes, les objectifs du programme de bons électroniques étaient les suivants :  méliorer la transparence de la distribution des intrants agricoles. Au Mali, le programme de bons > A électroniques a été lancé au moment où le système traditionnel de distribution d’intrants avait révélé de nombreuses limites. L’implication de plusieurs intermédiaires, notamment les comités de distribution villageois, les élus locaux et les fonctionnaires, est une des nombreuses raisons techniques invoquées pour expliquer l’inefficacité de l’approche traditionnelle de la distribution de subventions. Dans ces circonstances, le système de bons électroniques peut être considéré comme une solution plus transparente pour établir un contact direct entre l’agriculteur et le distributeur. Améliorer le ciblage des segments de population les plus vulnérables pour la distribution des intrants. Les >  enquêtes menées avant la mise en place des bons électroniques ont permis d’identifier les couches les plus vulnérables de la population et leurs besoins en intrants, sur la base des conditions agroenvironnemental- es prédominantes dans lesquelles elles opèrent. Au Niger, cette approche a été mise en œuvre en étroite collaboration avec le projet de Filets sociaux financé par la Banque mondiale, dont la base de données a servi de tremplin au programme de bons électroniques.  aire participer le secteur privé à la distribution d’intrants de bonne qualité. Dans le cadre du système de > F bons électroniques, une base de données de distributeurs d’intrants agricoles sélectionnés en fonction de critères techniques et commerciaux stricts a été créée pour chaque pays. 8 > Améliorer le suivi et évaluation de l’utilisation des subventions et de leurs impacts sur les utilisateurs. 4.2 Comment fonctionne la plateforme du programme de bons électroniques ? Le système est articulé autour de l’introduction et l’interaction de trois composantes clés : > Le développement d’une plateforme numérique ; La création d’une base de données fiable dans laquelle les agriculteurs sont enregistrés électroniquement ; >  > La création d’un répertoire des distributeurs d’intrants agricoles. 4.3 Quelle est la structure de la plateforme du programme de bons électroniques ? Dans les trois pays étudiés, le ministère de l’Agriculture est en charge de la coordination des différents acteurs du programme, notamment des entreprises de télécommunication, des agriculteurs et des distributeurs d’intrants agricoles. Le système de bons électroniques s’appuyant sur l’envoi de SMS, une campagne de sensibilisation a été menée pour encourager les agriculteurs à s’inscrire et à ne pas supprimer les SMS reçus depuis le numéro de téléphone de la plateforme. Chaque agriculteur enregistré reçoit un SMS avec le nom et le numéro de téléphone du distributeur d’intrants agricoles ad hoc, le montant et le type d’intrants qu’il est habilité à recevoir. Le distributeur confirme l’éligibilité de l’agriculteur au système de bons électroniques et la validité de son bon électronique avant de livrer les intrants. Dès que le distributeur reçoit la confirmation, le bon électronique devient caduc. Après la transaction, l’agriculteur reçoit un message lui demandant de confirmer le montant et le type d’intrants reçus. La Figure 3 ci-dessous illustre la structure des bons. FIGURE 3 : PLATEFORME DE BONS ÉLECTRONIQUES AU MALI ET EN GUINÉE (Exemple du modèle Slimtrader mis en œuvre dans ces pays) Ministère en charge de l’agriculture Téléphone Téléphone Téléphone Société A Société B Société C > Étape 1 Plateforme électronique > Étape 3 > Étape 6 Étape 7 > Étape 4 > Base de données Base de données > Étape 5 distributeurs agriculteurs d’intrants agricoles Étape 2 > Les étapes ci-dessus sont décrites à l’Annexe 1. 9 5. COMMENT LE BON ÉLECTRONIQUE A-T-IL ÉTÉ MIS EN ŒUVRE EN GUINÉE, AU MALI ET AU NIGER ? 5.1 Identification des bénéficiaires L’identification des bénéficiaires est le point de départ et un élément clé du processus de mise en œuvre des bons électroniques. L’objectif principal est de collecter des données sur les agriculteurs, les superficies plantées pour chaque culture et le géoréférencement des terres agricoles. Dans l’ensemble, ces enquêtes se sont révélées lourdes et également coûteuses. Au Mali, la campagne 2017/2018 a mobilisé 250 enquêteurs pour l’enregistrement électronique des exploitations dans une base de données pour une durée de 45 jours. En Guinée, 210 jeunes enquêteurs ont été sélectionnés en Haute Guinée et formés en techniques d’enquêtes et l’enrôlement électronique sur la plateforme e- voucher. Au Niger, l’approche retenue dans les enquêtes est de cibler des communes sélectionnées suite à l’analyse de la liste des communes vulnérables suite à l’enquête prévision et estimation des récoltes (EPER) avec pour objectif de recenser les ménages vulnérables et alimenter la base des données de la Cellule Filets Sociaux (CFS) avec des variables complémentaires qui vont permettre d’assurer une bonne distribution des intrants agricoles par bons électroniques. Au total ce sont près de 36,000 ménages qui ont été recensés dans 20 communes au Niger. Le tableau ci-dessous fournit une synthèse des résultats du recensement des agriculteurs effectué pendant la saison des cultures pluviales de 2018. TABLEAU 1 : AGRICULTEURS IDENTIFIÉS POUR LE PROGRAMME DE BONS ÉLECTRONIQUES PAYS NOMBRE D’AGRICULTEURS INSCRITS FEMMES % COMMENTAIRES Guinée 68 520 36% La  phase pilote a été mise en œuvre dans la région de Kankan, plus précisément dans les préfectures de Kankan, Kouroussa, Mandiana et Siguiri. Mali 93 054 20% C  ette phase a couvert deux cercles dans la région de Ségou et deux autres dans la région de Sikasso. Niger 47 678 21% Agriculteurs répartis dans 20 communes sur 4 régions. 5.2 Sélection des distributeurs d’intrants agricoles La sélection des distributeurs d’intrants agricoles a suivi un processus identique dans les trois pays. Une campagne de publicité a été organisée, suivie de la sélection des distributeurs d’intrants agricoles, conformément aux procédures de passation des marchés publics. Afin d’encourager la création d’un réseau local de distributeurs, les fournisseurs sont tenus d’implanter leurs magasins dans les communes et les districts cibles, de sorte à réduire la distance entre le village du bénéficiaire et le lieu de livraison des intrants. Dans l’ensemble, le cahier de charges des fournisseurs insisté sur la qualité des intrants comme l’obligation de fournir des semences certifiées au Niger. Au début du programme, les fournisseurs étaient sélectionnés et payés dans le cadre de projets financés par la Banque mondiale. Avec l’amélioration du processus de distribution des intrants agricoles rendue possible par l’introduction du bon électronique, les pouvoirs publics ont progressivement intégré le financement des intrants à 10 leurs budgets nationaux. Cette évolution positive a été observée au Niger, où le gouvernement a financé avec ses propres ressources une partie des semences distribuées dans le cadre de l’opération des bons électroniques de 2018, ainsi qu’au Mali, où les intrants sont entièrement financés par le budget national. 5.3 Développement de la plateforme numérique La conception initiale de la plateforme numérique et la codification des agriculteurs et de leurs organisations ont été réalisées au Mali et en Guinée par une firme internationale spécialisée dans le développement de ce type d’applications. Avec le temps, de nouvelles start-up locales ont commencé à développer des plateformes numériques similaires pour le programme de bons électroniques notamment au Mali et au Niger. Cependant, l’hébergement et la maintenance des plateformes numériques et des serveurs ont été un problème épineux pour ces pays. Parce que certains ont préféré que les plateformes ne soient pas hébergées ou administrées par des entreprises privées ou hors des frontières du pays, les organismes nationaux chargés de la mise en œuvre des bons électroniques ne disposent toujours pas des capacités techniques requises. Le Niger et le Mali en sont des exemples typiques. Au Niger, la base de données est administrée par la Direction générale de l’agriculture (DGA) qui ne dispose toujours pas des compétences informatiques nécessaires, tandis qu’au Mali, cette responsabilité incombe au PPAAO qui est mis en œuvre par le Conseil national de la recherche agricole (CNRA). Fortes de l’expérience du Mali et du Niger, les autorités guinéennes ont choisi de confier la gestion de la base de données à une cellule technique compétente, à savoir la Direction générale des technologies de l’information et de l’économie numérique (DNTIEN). Cette entité est responsable du fonctionnement général du système de bons électroniques, de l’utilisation pratique de l’application mobile et de l’administration technique des bons électroniques en Guinée. Les administrateurs identifiés du projet ont un nom d’utilisateur et un mot de passe qui leur permet de se connecter sur le site internet du projet (https://www.evoucher.gov.gn/fr) pour accéder à la base de données des producteurs codifiés, ainsi que des informations sur les subventions agricoles et apporter l’appui nécessaire aux acteurs. 5.4 Contrats avec des opérateurs de téléphonie mobile et attribution de codes abrégés Pour faciliter l’envoi de SMS entre la plateforme numérique et les différentes parties intéressées (distributeurs d’intrants agricoles et bénéficiaires), les organismes publics en charge de la réglementation du secteur des télécommunications ont attribué des codes abrégés exclusifs pour le programme de bons électroniques (à savoir 36026 au Mali et 4042 au Niger). Au Niger, un seul opérateur de téléphonie mobile a pu rapidement signer un contrat avec l’entité nationale en charge de la mise en œuvre du bon électronique. En revanche, les deux principaux opérateurs de téléphonie mobile au Mali ont signé des contrats pour intégrer le code abrégé à leur réseau SMS dans le but de transmettre des messages SMS entre la plateforme et les bénéficiaires, d’une part, et entre la plateforme et les distributeurs, d’autre part. Pendant la phase expérimentale du programme de bons électroniques, le coût des SMS envoyés était de 10 à 25 FCFA selon les pays et les opérateurs. Ces frais ont été entièrement pris en charge par le PPAAO. Dans les trois pays pilotes, des problèmes de couverture du réseau ont perturbé l’envoi et la réception des SMS. 5.5 Ciblage des bénéficiaires Le ciblage implique la définition de critères d’éligibilité des bénéficiaires potentiels du programme de subvention. Étant donné le nombre élevé de producteurs enregistrés dans la base de données ne pouvant pas être servis par la subvention, les pays ont établi des critères de sélection qui peuvent être rangés en trois grands groupes : 11  ritères de ciblage fondés sur la vulnérabilité : Programmes de bons électroniques basés sur des régions > C et groupes cibles vulnérables à la pauvreté ou l’insécurité alimentaire et souffrant de graves pénuries de production agricole et animale par rapport à la moyenne nationale ou pluriannuelle. Le programme de bons électroniques du Niger est un exemple typique de cette approche puisqu’il cible les régions souffrant des pénuries de production les plus importantes et, plus particulièrement, les communautés les plus défavorisées, et reconnues comme telles dans les enquêtes menées dans le cadre du programme de Filets sociaux.  ritères de ciblage fondés sur la promotion des cultures prioritaires : En adoptant ces critères, les pays > C cherchent à accroître leur productivité dans des segments stratégiques du secteur agricole. Le gouvernement malien a choisi d’utiliser le bon électronique pour promouvoir la production de céréales (maïs, mil, sorgho et riz).  ritères de ciblage fondés sur le genre : Au Mali, le premier programme de bons électroniques, mis en œuvre > C spécifiquement dans la région septentrionale, ciblait principalement les femmes et les petits agriculteurs. La Guinée s’est inspirée du Mali en appliquant les mêmes critères pour lancer son programme pilote de bons électroniques. Le Tableau 2 ci-dessous présente les critères de ciblage appliqués en Guinée, au Mali et au Niger. TABLEAU 2 : CRITÈRES DE CIBLAGE DU PROGRAMME DE BONS ÉLECTRONIQUES EN GUINÉE, AU MALI ET AU NIGER PROGRAMME DE BONS TARGETING CRITERIA ÉLECTRONIQUES Programme pilote • Trois districts affectés par des épisodes climatiques extrêmes Nord Mali • Être une femme, quelle que soit l’activité agricole 2015-2016 • Pour les agriculteurs, cultiver une superficie comprise entre 0,5 and 5 hectares • Pour les éleveurs, avoir au moins cinq (5) têtes de bétail pour être éligible à la subvention pour les petits ruminants, et posséder un cheptel de dix (10) pour bénéficier de la subvention à la volaille Mali (Ségou et Sikasso) • Cultiver du maïs dans les districts de Koutiala et Yanfolila (région de Sikasso) 2017–2018  ultiver du mil, du sorgho, du riz irrigué, du riz pluvial ou du riz de plaine dans les districts de Bla • C et de Niono (région de Ségou) Guinée • Priorité à la région de Haute-Guinée, qui bénéficiait auparavant de kits d’intrants 2017–2018 subventionnés pour le coton • Sensibilité au genre : 40 % de femmes • Petits exploitants (0 à 2 ha) ayant un accès limité aux intrants agricoles : 80 % des producteurs Sur la base des critères ci-dessus, trois grandes catégories de bénéficiaires ont été identifiées :  • 50 % des subventions destinées aux petits agriculteurs, c.-à-d. qui cultivent ≤ 2 ha de riz ou de maïs (dont au moins 50 % de femmes) • 30 % des subventions destinées aux agriculteurs de taille moyenne, c.-à-d. qui cultivent entre 2 et 4 ha de riz ou de maïs (dont au moins 40 % de femmes) • 20 % des subventions destinées aux agriculteurs qui cultivent entre 5 et 10 ha de riz ou de maïs, sans distinction de sexe Niger • Être résident d’une municipalité constituée à plus de 50 % de ménages vulnérables7 2017–2018 Bénéficiaires déjà sélectionnés dans le cadre du programme de filets sociaux • 7  ource : Résultats de l’Enquête Prévision et Estimation des Récoltes (EPER) conduite en 2017 pendant la saison des cultures pluviales par la direction des S Statistiques du ministère de l’Agriculture et de l’Élevage. 12 ENCADRÉ 1 : MALI — MISE EN ŒUVRE DU PROGRAMME DE BONS ÉLECTRONIQUES, 2017-2018 Au Mali, le système de bons électroniques (e-vouchers) a été mis en place dans les régions de Ségou (districts de Bla et de Niono) et de Sikasso (districts de Koutiala et de Yanfolila). Dans la région de Sikasso (districts de Koutiala et de Yanfolila), le maïs était la culture subventionnée, tandis que dans la région de Ségou (districts de Bla et de Niono), c’était le mil, le sorgho, le riz irrigué, le riz pluvial et le riz de plaine. Les bénéficiaires du programme de bons électroniques au Mali ont reçu uniquement des engrais. La subvention a été répartie comme suit : i) pour les exploitations de 1 à 3 ha, une subvention aux engrais a été accordée pour 1 ha ; (ii) pour les exploitations de 3 à 5 ha, une subvention aux engrais a été accordée pour 1,5 ha ; et iii) pour les exploitations de 5 ha et plus, une subvention aux engrais a été accordée pour 2 ha. Au total, 93 000 agriculteurs (dont 19,3 % de femmes) ont été enregistrés. Après l’application des critères d’éligibilité définis dans le manuel de procédures des subventions du ministère de l’Agriculture, 24 583 bénéficiaires ont été jugés éligibles au programme d’e-vouchers. Après que les bons électroniques ont été distribués dans les quatre districts, 18 276 des 24 583 bénéficiaires ciblés ont récupéré leurs intrants auprès des distributeurs, soit un taux de 74,3 %. Au total, 10 207 tonnes métriques d’engrais ont été distribuées dans les quatre districts. ENCADRÉ 2 : GUINÉE — MISE EN ŒUVRE DU PROGRAMME DE BONS ÉLECTRONIQUES, 2017-2018 Un total de 96 000 agriculteurs, dont 22,7 % de femmes, a été enregistré sur la plateforme du programme de bons électroniques. La subvention a couvert 40 % des dépenses d’engrais et d’herbicides pour les petits agriculteurs, 30 % pour les agriculteurs de taille moyenne et 20 % pour les gros agriculteurs. En termes d’assistance, deux types de kits ont été distribués : un kit de riz contenant 50 kg de semences de riz, 150 kg de NPK et 100 kg d’urée, et un kit de maïs contenant 35 kg de semences de maïs, 100 kg de NPK et 50 kg d’urée. Globalement, les « petits exploitants » devaient recevoir 1 kit, les « agriculteurs moyens » 2 kits, et les « gros agriculteurs » cultivant des superficies supérieures à 5 ha, 4 kits. Chaque kit devrait donc permettre de cultiver efficacement environ 1 ha de terre. Au cours de la phase pilote, 5 000 kits composés de semences, d’engrais et d’herbicides (dont 4 000 kits de riz et 1 000 kits de maïs) ont été distribués, pour un total de 200 tonnes de semences de riz, 35 tonnes de semences de maïs, 700 tonnes de semences, 15 450 tonnes d’urée et d’engrais NPK et 25 000 l d’herbicide. Pour cette phase, trois catégories de producteurs ont été identifiées en fonction de la taille déclarée de leur exploitation (moins de 2 ha, 2-4 ha, plus de 5 ha), représentant respectivement 82 %, 11 % et 7 % des bénéficiaires. Au total, 1 261 bénéficiaires sur 3 500 – soit 36 % des bénéficiaires – étaient des femmes. Ce pourcentage était de 39 % pour les petits exploitants (moins de 2 ha). En 2019, 20 000 agriculteurs bénéficieront des bons électroniques. 13 ENCADRÉ 3 : NIGER — MISE EN ŒUVRE DU PROGRAMME DE BONS ÉLECTRONIQUES, 2017-2018 Au Niger, l’opération 2018 des bons électroniques et l’expérience pilote de 2017 ont été conduites par la Direction générale de l’agriculture (DGA) avec un financement du PPAAO et du Projet d’appui à une agriculture intelligen- te face au climat (PASEC). La Cellule filets sociaux (CFS) a apporté son soutien technique afin de mieux cibler les groupes vulnérables. Ainsi, la DGA a utilisé la base de données de la CFS sur les ménages vulnérables au Niger en introduisant un certain nombre de variables liées au secteur agricole. Dans cette optique, la DGA a mené une enquête complémentaire pour compléter les données de référence du recensement réalisé dans le cadre des filets sociaux et pour cibler les ménages agricoles vulnérables susceptibles de bénéficier de la distribution de semences améliorées de mil, de sorgho et de niébé par le biais des bons électroniques. Les communes bénéficiaires ont été sélectionnées sur la base des résultats de l’enquête EPER (Enquête Prévision et Estimation des Récoltes) conduite en 2017 pendant la saison des pluies par la Direction des statistiques du ministère de l’Agriculture et de l’Élevage. Le programme de bons électroniques a été mis en œuvre dans 20 communes des régions de Dosso, Maradi, Tahoua, Tillabéri et Zinder. Le bon électronique donnait lieu à la distribution d’un kit composé uniquement de semences (10 kg de céréales et 5 kg de niébé) permettant de cultiver au moins 1,5 ha de terres. Au total, 30 838 ménages ont directement bénéficié du programme, dont 26 % étaient dirigés par des femmes. 6. LEÇONS TIRÉES DE LA MISE EN ŒUVRE DU SYSTÈME DE BONS ÉLECTRONIQUES (E-VOUCHERS) Au cours de la phase pilote, un certain nombre de difficultés ont surgi, de l’enregistrement à la distribution des bons. Les leçons suivantes en ont été tirées : 6.1 Le ciblage est un facteur déterminant dans la mise en œuvre réussie du bon électronique Les gouvernements ne peuvent pas subventionner l’achat d’intrants agricoles pour tous les agriculteurs et doivent donc s’assurer que les subventions allouées sont utilisées efficacement. Le ciblage des bénéficiaires est par conséquent essentiel pour procéder à une bonne distribution des intrants à l’aide des technologies de l’information et de la communication (TIC). Les trois pays étudiés n’ont pas tous réussi à atteindre les bénéficiaires ciblés, ce qui peut être dû au fait que les objectifs du programme n’étaient pas clairs : l’objectif est-il de réduire la pauvreté (il s’agit donc d’un programme de sécurité) ou d’accroître la productivité ? S’il s’agit de réduire la pauvreté, les bénéficiaires visés doivent être les plus pauvres. Mais si l’objectif est d’accroître la productivité, les bénéficiaires ciblés pourraient se trouver dans les deuxième et troisième quintiles des plus pauvres, où les agriculteurs sont en transition d’une production de subsistance à une production axée sur le marché et seraient prêts à tirer le meilleur parti de la subvention afin d’accroître leur productivité. 6.2 Les populations fortement analphabètes devraient bénéficier de technologies adaptées à leur situation Avec seulement 32 % d’adultes alphabétisés en Guinée, 33 % au Mali, et 30,6 % au Niger, les informations clés adressées aux bénéficiaires sur la subvention allouée ont été perdues. De très nombreux agriculteurs ont supprimé les bons électroniques envoyés par SMS par ignorance. L’introduction et l’utilisation d’une messagerie vocale pourraient contribuer à résoudre ce problème. 8 Indicateurs de développement dans le monde (WDI), 2014 9 WDI, 2015 10 WDI, 2012 14 La mise en œuvre a été également entravée par la faible couverture du réseau en milieu rural et le fait que certains bénéficiaires (essentiellement des femmes) n’avaient pas de numéro de téléphone personnel ou d’appareil téléphonique. 6.3 Les marchés publics d’intrants sont liés à des retards dans la fourniture des intrants Les données des trois pays montrent que les programmes de subvention dans lesquels les intrants sont achetés par le biais du secteur public connaissent souvent des retards de livraison. Dans plusieurs régions des pays étudiés, la fourniture d’intrants agricoles a été retardée. Dans certains cas, les bons électroniques ont été distribués après le début de la saison des pluies. Ces retards étaient principalement dus aux goulets d’étranglement dans les marchés publics et à des problèmes d’organisation rencontrés par certains distributeurs d’intrants agricoles peu habitués au nouveau système de distribution des intrants. 7. PERSPECTIVES ET RECOMMANDATIONS 7.1 Définir les objectifs du programme et mieux cibler les bénéficiaires La clarification des objectifs du programme de subvention est essentielle à son succès. Au stade de la conception, les gouvernements doivent définir les objectifs du programme d’E-vouchers afin que les bénéficiaires soient mieux ciblés et reçoivent les bons kits. 7.2 Utiliser la technologie NFC pour éliminer l’analphabétisme et les obstacles à l’accès au téléphone La technologie NFC a été utilisée en Éthiopie pour améliorer l’accès aux intrants. Les bénéficiaires reçoivent des bandes NFC sur des cartes ou des bracelets et les distributeurs d’intrants agricoles acquièrent des téléphones intelligents avec une application qui peut lire la bande. Lorsque l’étiquette ou la carte NFC touche le téléphone, l’information qu’elle contient est téléchargée dans le téléphone, ce qui évite au bénéficiaire de lire, écrire, taper et envoyer un SMS. En outre, l’application pourrait être utilisée hors connexion, la transaction terminée et les informations envoyées ultérieurement lorsque le téléphone est dans une zone de bonne couverture. 7.3 Participation du secteur privé au programme La participation du secteur privé au programme devrait être renforcée. Inversement, la participation du secteur public devrait être réduite. Les deux sont des facteurs clés de succès. Les données provenant de l’Éthiopie, du Rwanda et du Mozambique11 montrent qu’une participation accrue du secteur privé, par exemple dans l’acheminement des paiements d’intrants via des institutions financières, le soutien à la participation du secteur privé à l’importation et la production d’intrants, et un plan de sortie défini pour réduire l’allocation de subventions renforceront la transparence et la rentabil- ité et accéléreront la fourniture d’intrants.  iversifier le contenu des kits de bons électroniques en ajoutant des semences améliorées et des services de 7.4 D vulgarisation électronique En général, les kits fournis aux agriculteurs ne contiennent qu’un seul type d’intrant (semences au Niger et engrais au Mali). Dans les deux cas, l’impact de la subvention sur la productivité peut être facile à établir en l’absence d’un autre intrant. Les kits de bons électroniques doivent changer de contenu et comprendre un ensemble plus cohérent 11 AGRA, 2019. Examen du programme de subvention des intrants agricoles du Mali. 15 d’intrants (semences améliorées ou certifiées, engrais et services de conseil ou de vulgarisation) adaptés aux besoins des bénéficiaires et capables d’accroître nettement les rendements. Dans le même ordre d’idées, le développement de services de vulgarisation électronique utilisant la même plateforme électronique que le bon électronique est une option à la portée des trois pays. 7.5 Améliorer la planification des programmes de bons électroniques (e-vouchers) La mise en œuvre du programme de bons électroniques a été souvent retardée. Dans plusieurs villages, les intrants ont été fournis après le début de la saison des pluies. L’amélioration de la planification des activités de base dans le cadre du programme de bons électroniques (inventaire des intrants, contrats avec les distributeurs d’intrants agricoles, création d’une plateforme numérique et tests de fonctionnalité) contribuera grandement à relever ce défi. 7.6 Encourager des interventions axées sur le genre En raison de l’accent mis sur certaines cultures et des contraintes de propriété foncière rencontrées par les femmes, ces dernières ont reçu très peu de bons électroniques. Pour y remédier, il faudra canaliser davantage de soutien aux femmes, comme ce fut le cas avec le premier programme d’E.-vouchers mis en place dans le nord du Mali et de la Guinée. Les pays doivent réorienter le programme afin de couvrir plus de cultures généralement cultivées par des femmes, telles que les légumes, le sésame et la roselle. Des solutions plus innovantes devraient être mises en œuvre en faveur des femmes qui n’ont pas accès à la terre, à la suite de l’expérience réussie au Niger, où des kits contenant du petit bétail et de la volaille ont été fournis comme actifs initiaux aux femmes pauvres et sans terre. 7.7 Renforcer les capacités de gestion et d’administration des bases de données Dans les trois pays, la mise en œuvre du programme de bons électroniques a mis en évidence les défis auxquels sont confrontées les entités en charge de l’agriculture dans la gestion de la plateforme numérique. Ces entités manquent souvent des compétences techniques nécessaires en dépit de l’assistance substantielle de prestataires de services privés, y compris de start-up locales. En choisissant de confier la gestion de la base de données à une entité technique pleinement qualifiée de la Direction générale des technologies de l’information et de l’économie numérique (DNTIEN), la Guinée a permis une appropriation plus efficace par les parties prenantes et un appui technique pour la mise en œuvre correcte d’un programme de développement de l’agriculture numérique. Ces entités nationales doivent être renforcées pour qu’elles puissent jouer pleinement leur rôle. 16 ANNEXE I : LE SYSTÈME DE BONS ÉLECTRONIQUES (E-VOUCHERS) ÉTAPE PAR ÉTAPE Étape 1 : Un SMS est envoyé de la plateforme électronique (représentée par un code court, par ex. 4455) > Ex. de SMS : « Votre numéro de bon est : 12345. Merci de collecter 50 kg de semences de riz auprès du distributeur d’intrants agricoles ABC, numéro de téléphone : 74989521. » Étape 2 : L’agriculteur se rend chez le distributeur ABC avec le SMS. Étape 3 : Le distributeur ABC demande l’approbation de la plateforme. > Ex. : « Approuver 11203 30 sur 4455 » Étape 4 : Le distributeur ABC reçoit l’approbation par SMS : > Ex. : « 30 kg pour le bon n° 11203 est prêt pour livraison à : [Nom de l’agriculteur ; numéro de téléphone] » Par la suite, le numéro de bon n’est plus utilisable. Étape 5 : Le distributeur ABC livre le produit au bénéficiaire. Étape 6 : Le bénéficiaire reçoit un SMS de confirmation : > Ex. : « Combien de kg de produits avez-vous reçus pour le bon n° 11203 ? Envoyer : Confirmer [espace] Numéro du bon [espace] Quantité sur 4455. » > Ex. : « Confirmer 11203 50 » Étape 7 : Le bénéficiaire répond au SMS (en suivant les instructions de l’Étape 6). Enfin, la plateforme envoie la réponse suivante : « Merci pour la confirmation. » 17 DOSSIER SPÉCIAL AMÉLIORER LA PERFORMANCE DES PROJETS GRÂCE À UN OUTIL RENTABLE : LE SUIVI ITÉRATIF DES BÉNÉFICIAIRES André-Marie Taptue, Aboudrahyme Savadogo et Aly Sanoh, mars 2019 Résumé Le suivi itératif des bénéficiaires (Iterative Beneficiary Monitoring – IBM) est une approche conçue comme une boucle de rétroaction légère, peu coûteuse, indépendante, rapide et itérative, qui recueille des informations directement auprès des bénéficiaires et produit des rapports succincts sur les problèmes pouvant être résolus par les équipes de projet. Cette approche améliore l’efficacité du projet et accroît l’engagement et la satisfaction des bénéficiaires en créant des cycles d’amélioration positifs qui se renforcent mutuellement. Le suivi itératif des bénéficiaires (IBM) a été développé au Mali pour parer à l’accès limité aux activités de projet en raison de l’insécurité, mais son faible coût, son potentiel de haute fréquence et sa rapidité en font également un outil attrayant applicable à des environnements sécurisés. L’IBM a été utilisé pour identifier les lacunes d’un projet de cantines scolaires au Mali : il a contribué à réduire les délais de transfert de fonds aux écoles et à augmenter le nombre d’écoles offrant des repas cinq jours par semaine. Cette méthode a également permis d’appuyer un programme de bons électroniques (e-vouchers) au Mali, qui est utilisé pour fournir aux agriculteurs des engrais de qualité, en temps opportun et selon les quantités promises. Dans le cadre d’un projet de mobilité et de connectivité rurales au Mali, l’IBM, mis en œuvre à un stade précoce, a vérifié si la population recevait les messages de sensibilisation envoyés à travers les radios rurales, si elle était affectée par les travaux et leur degré de satisfaction. La mise en œuvre du suivi itératif des bénéficiaires a convaincu les responsables d’un projet d’assurance maladie pour les plus démunis au Mali de trouver un moyen d’améliorer la distribution des cartes de santé et des transferts monétaires. Les résultats du suivi de ces projets initiaux ont été partagés avec les responsables de projet dans le pays afin de résoudre les problèmes identifiés alors que les projets étaient toujours en cours. La Banque mondiale étend actuellement la méthodologie du suivi itératif des bénéficiaires à plusieurs secteurs, et l’applique à des projets au Mali, au Tchad, en Guinée, au Niger, au Bénin, en République centrafricaine et au Nigeria. 1. INTRODUCTION La réussite des projets est souvent entravée par le manque d’informations sur les bénéficiaires. Même dans un environnement sécurisé, l’accès aux événements sur le terrain varie en fonction des saisons et dépend des routes et de leur qualité, du coût de la collecte de données et des capacités des équipes de projet. Dans un contexte de fragilité, de conflit et de violence, l’accès physique peut être particulièrement limité par l’insécurité et la difficulté à mener des visites sur le terrain, ce qui freine la collecte d’informations sur des dynamiques spécifiques et les opinions des bénéficiaires dans ces régions. Par la suite, ces manques d’informations entravent la mise en œuvre opérationnelle, en 18 particulier dans les endroits où les interventions de développement sont le plus nécessaires. En outre, les systèmes de suivi & évaluation (S&E) des projets ne permettent pas toujours de combler ces lacunes, car ils utilisent des approches lourdes, tandis que les capacités locales et les ressources disponibles peuvent être insuffisantes pour mener des enquêtes à grande échelle. Ces systèmes sont censés surveiller les progrès et signaler les lacunes ou les problèmes potentiels. Dans la pratique, la plupart des systèmes de S&E ne fournissent pas de rapports fréquents ou indépendants, mais se concentrent plutôt sur l’élaboration d’indicateurs d’étapes pour les évaluations à mi-parcours et les évaluations finales des projets. Il est également fréquent que ces systèmes de S&E ne soient pas toujours exécutés efficacement et les rapports arrivent souvent trop tard pour permettre aux projets de s’améliorer. Par ailleurs, en raison de leur coût élevé, les enquêtes de S&E ne peuvent pas être répétées fréquemment et la collecte des données est généralement effectuée à trois reprises ou moins sur une période de cinq ans. Les missions de supervision constituent une autre source d’information sur la performance des projets, mais les informations obtenues sont souvent limitées, car elles sont moins fréquentes, planifiées pour de courtes périodes (généralement pas plus de deux semaines) et souvent mises en attente par les équipes de projet en cas d’événements sécuritaires. Des évaluations effectuées par du personnel indépendant au projet peuvent également fournir des informations objectives sur l’efficacité des projets. Ces informations se présentent généralement sous forme de tests aléatoires et contrôlés ou d’enquêtes à grande échelle, telles que les enquêtes sur les indicateurs de prestation de services (IPS) – qui mesurent la qualité de la prestation de services de santé et d’éducation –, ou les enquêtes de suivi des dépenses publiques (ESDP) – qui suivent le flux des ressources du niveau central au niveau décentralisé. Bien que fiables, ces approches à forte intensité de données sont coûteuses et difficiles à mettre en œuvre dans un environnement fragile et peu sécurisé : elles ne peuvent donc pas être répétées fréquemment. En outre, elles nécessitent beaucoup de temps et donnent rarement des résultats rapides, résultats qui, dans certains cas, ne sont disponibles qu’après la clôture du projet. Ces manques d’informations peuvent être comblés en concevant une approche différente afin de collecter plus fréquemment des informations auprès des bénéficiaires et d’autres parties prenantes. Pour aider les responsables de projet à atteindre leurs objectifs, il est indispensable de mettre en place un système de boucle de rétroaction itératif fournissant des informations impartiales. Cela permettra à l’équipe de projet de tirer des enseignements sur les difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre du projet et d’améliorer sa performance. Une fois les mesures prises, l’équipe doit évaluer si les faiblesses identifiées ont été corrigées. Pour permettre un retour d’information régulier, la collecte des données doit être accessible et agile afin de fournir des résultats rapides. Une collecte de données idéale fournit des données fiables, régulières et peu coûteuses. Ce système contribue à améliorer l’efficacité des projets et à accroître la satisfaction et l’implication des bénéficiaires. Pour répondre à ces exigences, un système de rétroaction des bénéficiaires simple et peu coûteux, axé sur une série de problèmes et mis en œuvre par une entité indépendante non impliquée dans la gestion du projet a été conçu. Cette approche est connue sous le nom de suivi itératif des bénéficiaires (Iterative Beneficiary Monitoring – IBM). Le suivi itératif des bénéficiaires (IBM) complète les missions de supervision et le S&E des projets en offrant une boucle de rétroaction agile, et axée sur les problèmes pour la gestion de projet. Il fournit aux équipes de projet des retours d’informa- tion grâce à plusieurs cycles de collecte de données à petite échelle, ce qui permet aux équipes de cerner rapidement les problèmes de mise en œuvre et d’adopter des mesures correctives. L’IBM recueille des données auprès des bénéficiaires en utilisant un nombre réduit de questions et des échantillons plus petits, tout en restant informatif. Cette approche met l’accent sur la flexibilité de la conception, réduit les coûts, facilite l’analyse des données en temps opportun et accélère la préparation des rapports tout en mettant l’accent sur les retours d’information pertinents pour la mise en œuvre. Outre le fait d’améliorer l’efficacité des projets, le suivi itératif des bénéficiaires vise à accroître la satisfaction et l’implication des bénéficiaires. Ces objectifs peuvent être atteints en veillant à cibler les bénéficiaires où qu’ils soient, et en s’assurant qu’ils reçoivent en temps opportun les biens et services qui leur sont utiles. Le respect du Manuel de procédures et l’identification de tout obstacle pendant la mise en œuvre conduisent à une amélioration du projet. Pour 19 accroître la satisfaction des bénéficiaires, l’approche IBM permet de fournir aux bénéficiaires un retour d’informations sur le projet et de vérifier si une mesure corrective leur convient, ce qui accroît leur intérêt et leur engagement. Appliqué au Mali depuis 2015, le suivi itératif des bénéficiaires a amélioré l’efficacité des projets dans les secteurs de l’agriculture, de l’éducation, des transports et de la santé. Cela a mené à une augmentation des demandes d’expansion à d’autres projets au Mali et à d’autres pays tels que le Tchad, la Guinée et le Niger. La mise en œuvre de projets dans ces pays se heurte à un certain nombre de contraintes qui limitent la réalisation de leurs objectifs. Si les projets subissent de longs retards à plusieurs niveaux au cours de leur mise en œuvre, il a été difficile d’identifier et de quantifier tous les obstacles. En outre, l’insécurité et les facteurs de fragilité tels que les disparités économiques et régionales, le développement inégal et la mauvaise gouvernance limitent l’accès aux bénéficiaires, qui ne peuvent donner leurs points de vue sur la mise en œuvre des projets. Par conséquent, le suivi itératif des bénéficiaires joue un rôle important dans la collecte d’informations auprès des bénéficiaires, et améliore ainsi l’impact des projets. 2. MÉTHODOLOGIE L’idée de la boucle de rétroaction itérative consiste à permettre à l’équipe de projet de tirer des leçons des obstacles à la mise en œuvre du projet et d’améliorer ainsi la performance tout au long du projet. Une fois que des mesures ont été prises, l’équipe doit déterminer si les problèmes identifiés ont été résolus. Le suivi itératif des bénéficiaires suit un processus différent de celui des grosses enquêtes et peu fréquentes et avec de longs rapports, et privilégie des enquêtes agiles et fréquentes accompagnées de rapports succincts se focalisant sur les leçons apprises. La conception du suivi itératif des bénéficiaires comprend cinq étapes (voir Figure 1), en commençant par une familiar- isation avec le projet et l’identification des difficultés rencontrées par les équipes. La première étape est longue, mais indispensable pour comprendre les détails de la conception du projet et déterminer les challenges pour un suivi de haute qualité. Les documents de base du projet doivent être lus, à commencer par le Document d’évaluation du projet et le Manuel d’exécution. Ces documents ont en effet une valeur inestimable pour identifier les sources d’information ou les normes qui peuvent être utilisées pour évaluer le projet. Les rapports de supervision, les mémorandums et les rapports de mission contribueront également à identifier les problèmes potentiels. La collecte d’informations auprès des bénéficiaires et d’autres parties prenantes sur la prestation de services de première ligne (telles que les équipes travaillant dans les écoles, les centres de santé ou les organisations agricoles) est au cœur de l’approche de rétroaction itérative, et constitue la deuxième étape durant laquelle les questionnaires et les méthodes d’échantillonnage sont élaborés. Ce qui compte, c’est surtout l’expérience de toutes les parties prenantes du projet. Le suivi itératif des bénéficiaires s’efforce donc d’obtenir un retour d’informations direct de ces bénéfici- aires. L’identification des informations à obtenir et des personnes qui doivent les fournir est une étape importante dans la conception d’un système de rétroaction. Par exemple, dans un projet de cantines scolaires, les opinions des parents et des tuteurs sont essentielles, car ce sont eux qui peuvent déterminer si leurs enfants ont mangé. Les élèves peuvent donner leur avis sur la quantité et la qualité des aliments et la fréquence à laquelle ils les reçoivent. Les chefs d’établissement peuvent confirmer si l’argent destiné à l’achat des aliments arrive en temps opportun, les associations de parents d’élèves peuvent expliquer si les procédures sont respectées et les personnes qui préparent les repas sont bien placées pour indiquer si l’argent reçu est suffisant. Il est donc essentiel que le système itératif soit développé en étroite collaboration avec les responsables de projet. Les responsables doivent fournir un accès aux dossiers des projets (y compris aux bases de données des bénéficiaires nécessaires à l’échantillonnage) et valider la méthodologie et les instruments choisis pour la collecte des données. Si cela n’est pas fait consciencieusement, les responsables de projet peuvent contester la validité des résultats et il y aura peu de suivi. En plus de collaborer étroitement avec les responsables de projet, l’équipe de suivi devra également veiller à ce que l’identité des répondants et les lieux de collecte des données demeurent confidentiels. 20 Il est important de préserver la simplicité du processus de collecte des données et de résister à la tentation de recueillir plus d’informations qu’il n’est strictement nécessaire. La capacité d’un responsable de projet est souvent limitée, et une équipe de projet ne peut traiter qu’un nombre restreint de questions à la fois. Étant donné que l’approche est itérative, de nouvelles questions peuvent être abordées dans les cycles suivants de collecte de données, car il n’est pas nécessaire d’examiner toutes les questions lors de la première itération. Cela permet à l’équipe de projet de classer les questions en fonction de leur importance ou de la facilité à les résoudre. Comme le processus de collecte des données est réduit au minimum, la conception des instruments de collecte des données est relativement simple. Néanmoins, la validation des instruments de collecte par les responsables de projet demeure une étape essentielle. Cela inclut des tests préalables dans un contexte réel et de débattre des instruments avec le personnel clé du projet afin de s’assurer que les questions adéquates sont prises en compte de façon appropriée. FIGURE 1 : LES CINQ ÉTAPES DE L’APPROCHE DE SUIVI ITÉRATIF DES BÉNÉFICIAIRES 1ÈRE ÉTAPE 2ÈME ÉTAPE 3ÈME ÉTAPE 4ÈME ÉTAPE 5ÈME ÉTAPE Identifier Collecte Partage et Finalisation les défis des données Analyse des discussion du du rapport et du projet avec à partir d’un données et rapport avec identification le TTL et l’unité système élaboration le TTL, le CMU de nouveaux de mise en rapide et peu du rapport et l’Unité défis à partir œuvre du coûteux de gestion des leçons projet du projet apprises ÉDITIONS SUIVANTES Les petits échantillons ne constituent pas un problème en soi. Lorsque les problèmes liés au projet sont répandus ou que des normes ou des délais doivent être respectés (comme indiqué dans le Manuel d’exécution), un petit nombre d’observations peut mettre en évidence un problème. Quelle que soit la taille de l’échantillon, le plan d’échantillonnage est essentiel pour assurer la représentativité des résultats. Cela implique d’identifier une base de données fiable, dans laquelle l’échantillon peut être prélevé. Ce n’est généralement pas un problème, car la plupart des projets possèdent une base de données des bénéficiaires ou peuvent en créer une rapidement. Mais il faudra sans doute prendre des décisions supplémentaires avec les équipes de projet sur les méthodes de réduction des coûts. Par exemple, l’équipe peut proposer d’échantillonner uniquement dans une petite zone géographique, ce qui peut être acceptable si la zone correspond à une limite supérieure, où les effets des lacunes du projet risquent d’être plus accentués que dans d’autres zones. Cependant, cette mesure peut ne pas être acceptable lorsque la participation de responsables de secteur, comme le responsable de district le plus haut placé, est essentielle pour assurer les résultats du projet. Supposons, par exemple, que les transferts d’argent aux écoles proches de la capitale soient retardés. Dans pareil cas, il serait plausible de supposer que la situation est pire dans les régions plus éloignées. La technologie peut contribuer à améliorer l’efficacité et réduire les coûts d’échantillonnage. Si les projets enregistrent les numéros de téléphone des bénéficiaires, les informations peuvent être obtenues rapidement et à moindre coût au 21 moyen d’enquêtes téléphoniques, même lorsque la taille de l’échantillon augmente. Cela est particulièrement important dans un contexte d’insécurité ou lorsque la population peut être hostile aux autorités et à leurs activités. La collecte de données via la téléphonie mobile est également une solution lorsque les bénéficiaires sont eux-mêmes mobiles, comme c’est le cas des populations déplacées ou nomades. La collecte de données par téléphone étant peu coûteuse, la collecte de numéros de téléphone simplifie la création d’une boucle de rétroaction itérative. Cependant, s’il n’existe pas de base de données des bénéficiaires avec leurs numéros de téléphone, les données peuvent être recueillies au cours d’entretiens en face à face. Ces entretiens sont toutefois généralement coûteux en raison des coûts élevés de transport et d’hébergement, et impliquent parfois des risques pour les enquêteurs. Par conséquent, les échantillons en face à face doivent être réduits au minimum. Les risques dans les zones dangereuses sont atténués pour les enquêteurs qui sont présentés aux autorités locales afin d’éviter toute confusion avec d’autres agents. Les répondants sont également protégés par le caractère confidentiel des informations susceptibles de les identifier. En comparaison, la collecte de données elle-même est relativement peu coûteuse. Le principe du suivi itératif des bénéficiaires est que chaque phase de la collecte de données doit coûter moins de 5 000 USD. Compte tenu de ces éléments, la boucle de rétroaction itérative diffère fondamentalement des enquêtes ordinaires, dans lesquelles la collecte de données est la partie la plus coûteuse du processus. Pour garantir le succès du suivi itératif des bénéficiaires, les coûts de la collecte des données doivent être maintenus à un niveau bas. Si ce n’est pas le cas, la collecte fréquente de données ne serait pas possible et, par conséquent, le caractère itératif du suivi disparaîtrait. Une fois recueillies, les données sont analysées et transmises en guise de rétroaction aux responsables des projets dans les gouvernements et aux responsables des équipes de la Banque mondiale aux étapes 4 et 5 du processus. Étant donné que le nombre de questions est limité à chaque itération, l’analyse des données est rapide. Les rapports de l’IBM sont spécifiques, factuels et succincts : ils contiennent généralement moins de 10 pages. Comme ils sont susceptibles de révéler les lacunes du projet, il faut veiller à respecter les plus hauts niveaux d’exactitude. Souvent, les résultats sont discutés avec les responsables du projet au sein du gouvernement. Ces autorités peuvent donc demander à l’équipe de projet de prendre les mesures nécessaires pour résoudre les problèmes, mais cela sera rarement nécessaire, car les équipes de projet sont toujours très réceptives aux constatations de l’IBM et interviennent rapidement pour régler les problèmes soulevés et combler les lacunes afin d’achever la cinquième étape du système. Cette étape est suivie d’un autre cycle de collecte de données (généralement après quelques mois) dans le but de mesurer les améliorations et d’identifier éventuellement de nouveaux problèmes qui auraient pu survenir depuis le cycle précédent. Le processus de production des rapports est identique à celui du cycle précédent. Ce cycle est ensuite répété régulièrement jusqu’à la fin du projet. TJusqu’à présent, les rapports de suivi itératif des bénéficiaires ont été élaborés à usage interne des équipes de projet des gouvernements clients et de la Banque mondiale, car leur diffusion plus généralisée auprès du public pourrait entraîner des conséquences indésirables. L’expérience des médias et des ONG en matière de suivi du prix de l’eau en Tanzanie est instructive à cet égard. Dans ce cas, des principes de suivi léger ont été appliqués, mais au lieu de chercher à régler le problème avec le régulateur, les responsables du processus de suivi ont cherché à attirer l’attention des médias. Les pressions du public et les questions parlementaires ont donné lieu à des mesures correctives, mais celles-ci ont été plutôt ponctuelles et symboliques. Par ailleurs, certains résultats se sont révélés préjudiciables, car plusieurs postes de distribu- tion d’eau ont été fermés à cause de surfacturations, réduisant encore davantage les possibilités des personnes dépendant de ces postes pour leur approvisionnement en eau par rapport à leur situation antérieure. De plus, après l’intérêt initial des médias, il n’y a pas eu de suivi systématique de la question, et la surfacturation s’est poursuivie sans relâche. 3. LE SUIVI ITÉRATIF DES BÉNÉFICIAIRES DANS LES PAYS AFCW3 L’approche du suivi itératif des bénéficiaires a débuté au Mali en 2015, d’abord dans le cadre d’un projet éducatif (repas scolaires), puis d’un projet agricole (bons électroniques) au Mali et au Niger. Cette méthode de suivi a ensuite 22 été utilisée au Mali dans le cadre d’un projet de transferts monétaires, d’un projet de mobilité rurale dans le secteur des transports, et plus récemment dans des projets gouvernementaux comme l’assurance maladie en faveur des plus pauvres et dans des commissions foncières, qui constituent dans les deux cas un déclencheur du programme d’Appui budgétaire général (ABG). 3.1 Le suivi itératif des bénéficiaires appliqués à des projets d’éducation Dans le cas du projet de cantines scolaires au Mali, le chef de l’équipe de projet a exprimé à l’équipe de l’IBM ses préoccupations sur le fait qu’une partie seulement des fonds alloués à la composante du projet a été utilisée. Les deux équipes ont décidé d’approfondir la question et se sont mises d’accord sur une répartition claire des tâches. L’équipe de l’IBM devait s’occuper de toutes les questions de collecte des données et l’établissement des rapports, tandis que l’équipe de projet devait faciliter les échanges avec le ministère de l’Éducation et l’Unité d’exécution du projet (UEP). Pour comprendre les difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre, le Centre national des cantines scolaires du ministère de l’Éducation avait partagé la base de données des écoles bénéficiant du programme de cantines scolaires. Cette base de données avait été utilisée pour constituer un échantillon des écoles bénéficiaires. Afin d’assurer l’appropriation et l’exactitude, des fonctionnaires du ministère et du Centre ont participé activement à la préparation et à la validation de la méthodologie et des outils de l’enquête, mais n’ont pas reçu la liste des écoles figurant dans l’échantillon. Le premier cycle a permis de collecter des données dans 20 écoles choisies de manière aléatoire dans la région de Koulikoro.12 Deux enquêteurs ont été formés et se sont rendus dans chaque école pour mener des entretiens en face à face avec les directeurs d’école, les responsables des cantines scolaires et un sous-échantillon de parents. Le processus de collecte a coûté moins de 5 000 USD et la préparation du rapport a pris peu de temps (deux semaines), les informations ayant été recueillies sur une série limitée de questions. Les responsables du Centre national des cantines scolaires et le chef d’équipe de projet ont été informés des principaux résultats, communiqués au directeur pays de la Banque mondiale et au ministre de l’Éducation nationale. Les résultats ont montré qu’il fallait plus de quatre mois pour transférer des fonds du ministère de l’Éducation aux écoles. Par conséquent, une grande partie de l’argent destiné aux repas est arrivée après le début de l’année scolaire, compromettant ainsi l’un des objectifs du programme, qui est d’augmenter les taux d’admission. En outre, le montant FIGURE 2 : UN SUIVI RÉGULIER A PERMIS D’AMÉLIORER LA PERFORMANCE DE LA RESTAURATION SCOLAIRE Délai moyen de transfert Pourcentage d’écoles offrant des repas moins de 5 jours par semaine 25 13 1er transfert 2ème transfert 3ème transfert 4ème transfert 1ère édition 2ème édition du suivi du suivi 1ère édition du suivi 2ème édition du suivi Source: Calculs des auteurs basés sur les données du suivi itératif des bénéficiaires En général, la taille de l’échantillon dans un plan de suivi itératif des bénéficiaires est déterminée par trois facteurs : le temps nécessaire à la collecte des données (générale- 12  ment moins de deux semaines), le budget et la longueur du questionnaire. Un essai pilote permet d’estimer le temps nécessaire à la réalisation d’un entretien, ainsi que le nombre de bénéficiaires susceptibles d’être interrogés dans un délai de deux semaines. Ces paramètres sont ajustés si nécessaire pour respecter les contraintes budgétaires. 23 des fonds envoyés aux écoles était insuffisant pour nourrir tous les élèves pendant la période envisagée, et certaines écoles ont été contraintes d’offrir des repas moins de cinq jours par semaine, réduisant la motivation des élèves à rester à l’école. Les transferts devaient être effectués tous les trimestres, mais leur fréquence a été beaucoup plus faible. En outre, le Manuel de procédures n’a pas été respecté. Alors que les montants transférés étaient censés refléter les taux d’inscrip- tion, ils étaient souvent largement supérieurs ou inférieurs aux montants prévus. Le rapport de suivi a fait l’objet de discussions avec le chef de l’équipe de projet, le personnel du projet et le ministre de l’Éducation qui a répondu en envoyant des lettres aux responsables du projet pour les informer du problème. D’autres missions de supervision ont été demandées et le ministre a sollicité des informations précises sur les inscriptions scolaires afin de remédier aux problèmes liés aux montants des transferts. Six mois plus tard et un an avant la clôture du projet, un deuxième cycle de collecte de données a été mené dans 30 écoles choisies au hasard dans la liste de Koulikoro mise à jour fournie par le Centre national des cantines scolaires, à l’exclusion des écoles interrogées lors du premier cycle. Les résultats ont montré que les délais de transfert des fonds aux écoles étaient dorénavant beaucoup moins longs. La plupart des écoles ont reçu des montants correspon- dant à la somme attendue, et tout l’argent décaissé par le ministère est parvenu aux écoles. Malgré cela, certaines écoles ont encore offert des repas moins de cinq jours par semaine, en particulier celles qui n’ont pas reçu des fonds suffisants pour nourrir la totalité des élèves. Le deuxième rapport a révélé des améliorations significatives dans la mise en œuvre du projet, bien que certains problèmes persistent (voir Tableau 1). Les conclusions positives et négatives ont été communiquées au chef de l’équipe de projet, aux responsables de projet du gouvernement et au ministre de l’Éducation nationale. 3.2 Le suivi itératif des bénéficiaires (IBM) appliqué aux projets agricoles Le succès du suivi itératif des bénéficiaires (IBM) dans le projet de cantines scolaires dans le secteur de l’éducation a suscité l’intérêt des autres responsables de projet. Par conséquent, l’approche a été étendue à un projet agricole qui distribuait des subventions dans le nord du pays non sécurisé à l’aide de bons électroniques (« e-vouchers »). Dans le système de bons électroniques, les bénéficiaires ont été recensés et leurs numéros de téléphone et principales caractéristiques enregistrés dans une base de données. Cette information a été ensuite utilisée pour leur envoyer des e-vouchers par SMS. Dès réception de leurs bons, les bénéficiaires peuvent se rendre dans un magasin et recevoir leurs produits, en règle générale des engrais ou des produits d’élevage. La direction du projet s’est dite préoccupée par la faible utilisation des bons. Une mission de supervision a indiqué que, lors de la première vague de distribution d’intrants, seuls 41 % des bénéficiaires de bons électroniques avaient retiré leurs produits, malgré leur gratuité. Cela suggère que des problèmes sont apparus au niveau du système de distribution des intrants ou un manque d’intérêt des bénéficiaires pour les produits proposés. L’identification de la nature exacte des problèmes était un élément déterminant de la réussite du projet. L’objectif principal de la mise en œuvre de l’IBM était alors de confirmer le pourcentage d’agriculteurs qui ont retiré leurs produits et de vérifier pourquoi d’autres ne l’ont pas fait. Le système de bons électroniques repose sur une base de données contenant les numéros de téléphone des bénéfici- aires. Compte tenu de l’insécurité persistante dans les zones d’intervention, l’équipe a choisi de recourir à des entretiens téléphoniques pour la collecte des données. Les responsables du projet ont partagé la base de données des bénéficiaires avec les analystes et ont participé à des séances de travail conçues pour valider la méthodologie et les instruments d’enquête, et pour sélectionner un échantillon représentatif de 100 bénéficiaires interrogés par téléphone. L’analyse de la base de données partagée a révélé la duplication de nombreux numéros de téléphone attribués à différentes personnes dans différents villages. Bien que le Manuel de procédures autorise plusieurs bénéficiaires à utiliser le même 24 TABLEAU 1 : RÉSULTATS DE DEUX CYCLES DE SUIVI ITÉRATIF D’UN PROJET DE CANTINES SCOLAIRES AU MALI PREMIER CYCLE MESURES ADOPTÉES DEUXIÈME CYCLE : 6 MOIS PLUS TARD Échantillon 20 écoles Rapports discutés avec 30 écoles non incluses dans le ministre de l’Éducation Durée et méthode de 10 jours d’entretiens en 10 jours d’entretiens en face à face collecte des données face à face Coût de la collecte des données <5 000 USD <5 000 USD Préparation et analyse Personnel pendant 5 semaines Personnel pendant 2 semaines Source de financement Tâche de suivi de la pauvreté Tâche de suivi de la pauvreté Problèmes Constatations Constatations 1. Délai de transfert des Plus de 3 mois Envoi de lettres de Réduit de deux tiers money to schools sensibilisation par le ministre aux responsables 2. Le montant total envoyé Oui de projet Oui par le gouvernement central parvient-il aux écoles ? 3. L’argent arrive-t-il à Non, l’argent arrive longtemps Réduction considérable des délais temps ? après la reprise des cours de transfert 4. Nombre de transferts 1 sur 4 prévus 3 sur 4 prévus 5. Nombre de jours couverts 50 % des écoles couvrent Mise en place de missions Réduit à 13 % par les montants envoyés aux moins de 40 jours, comme de supervision par le écoles demandé ministre 6. Nombre de jours par semaine 25 % des écoles offrent des Réduit à 13 % où des repas sont offerts aux repas moins de 5 jours élèves par semaine 7. Les montants transférés Les transferts ne tiennent La situation s’est améliorée, mais un reflètent-ils les taux pas compte de la taille des écart persiste entre la taille des écoles d’inscription ? écoles, comme demandé. et les chiffres utilisés par le ministère. numéro de téléphone parce qu’ils ne possèdent pas tous un téléphone, ces bénéficiaires doivent vivre dans le même village. Cependant, les numéros dupliqués identifiés dans la base de données n’étaient pas attribués à des personnes vivant au même endroit. Une fois les instruments d’enquête validés, deux enquêteurs ont été formés à la collecte de données par téléphone. Après quatre tentatives d’appel par répondant, 40 % seulement ont pu être contactés, ce qui soulève des questions sur la couverture du réseau dans les villages où vivent les bénéficiaires, sur l’exactitude des numéros de téléphone dans la base de données ou sur la localisation des bénéficiaires, certains pouvant avoir quitté leur localité initiale en raison de l’insécurité. Les premiers résultats ont montré que tous les bénéficiaires de bons électroniques ont retiré leurs produits, indiquant que la faible utilisation des produits n’est pas due à un manque d’intérêt. Une proportion importante des bénéficiaires n’étant pas joignable par téléphone, il n’a pas été possible de savoir si tous les bons électroniques ont été bien réceptionnés. Comme certains entretiens téléphoniques n’ont pas pu avoir lieu, il est possible que de nombreux bons électroniques n’aient pas atteint leurs destinataires, ce qui laisse supposer un problème de communication entre la plateforme de bons 25 électroniques et les bénéficiaires. Enfin, de nombreux bénéficiaires ont indiqué ne pas avoir reçu la totalité des produits (gratuits) indiqués sur leurs bons ni avoir été indemnisés pour les articles non reçus. Suite à ces résultats, l’équipe du projet et les fournisseurs de services de télécommunications ont été contactés pour discuter des résultats et résoudre certains problèmes, notamment la duplication des numéros de téléphone dans la base de données, l’impossibilité d’envoyer un nombre élevé de SMS par seconde et l’absence de message confirmant la réception des SMS envoyés. Le rapport a été partagé avec le ministère de l’Agriculture et l’équipe du projet, qui a pris des mesures pour nettoyer la base de données, demandé aux contrôleurs de s’assurer que les agriculteurs reçoivent la quantité complète de produits qui leur était due, et dresser un compte rendu de ses conclusions. TABLEAU 2 : R ÉSULTATS DE DEUX CYCLES DE RÉTROACTION ITÉRATIVE SUR LA DISTRIBUTION D’ENGRAIS À L’AIDE DE BONS ÉLECTRONIQUES PREMIER ROUND : DEUXIÈME ROUND : 5 MOIS PLUS TARD Taille de l’échantillon 100 bénéficiaires 850 bénéficiaires Durée et méthode de 5 jours par appels 10 jours par appels téléphoniques collecte téléphoniques Coût de la collecte < $ 5000 < $ 5000 Préparation et analyse 3 semaine/personnel 1 semaine/personnel Source de financement Projet agricole Opération d’appui budgétaire CONTRAINTES ACTIONS PRISES CONTRAINTES ACTIONS PRISES 1. Les localités des bénéficiaires Une entreprise de 1. Bons électroniques distribués L’OPD est reportée jusqu’à ce sont-elles couvertes par le télécommunication fournit des deux mois après le début de que les problèmes de couverture réseau téléphonique ? informations sur la couverture du la saison de plantation. et de délai de livraison du système réseau dans les localités du projet. de bons électroniques soient résolus. 2. Les bons sont-ils bien livrés ? Une réunion est organisée 2. Seulement 15 % des La méthode d’identification des avec des entreprises de bénéficiaires ont récupéré bénéficiaires a changé. 3. Only 40% of beneficiaries télécommunication qui ont leur engrais, car les bons can be reached by phone amélioré le nombre de SMS avaient été envoyés en retard. for interview. pouvant être envoyés par seconde et convenu d’envoyer des 3. Seulement 8 % des messages de confirmation de bénéficiaires de la base de réception. Au deuxième cycle, données sont des femmes. 64 % ont pu être contactés. 4. 13 % des bénéficiaires sont Base de données nettoyée, 4. Grande différence de prix Les engrais sont maintenant achetés dupliqués dans la base de nombre de doublons réduit entre le prix officiel de selon une procédure internationale données. à moins de 5 %. l’engrais et le prix du marché concurrentielle. (jusqu’à 9 USD par sac). 5. 43 % des bénéficiaires Mesures prises pour améliorer reçoivent moins d’engrais la supervision de la livraison que prévu. des intrants ; 30 % déclarent avoir reçu moins que la quantité prévue. 26 ENCADRÉ 1 : L’IBM DU SYSTÈME DE BONS ÉLECTRONIQUES : RÉSUMÉ SYSTÈME DE BONS ÉLECTRONIQUES AU MALI Système de bons électroniques au Mali Quelques conclusions Impossible de connaître le nombre de bons réellement livrés (problème de du premier cycle de télécommunication) ; suivi 58 % des bénéficiaires ont reçu leurs bons et retiré leurs produits ; 43 % des bénéficiaires ont reçu moins que prévu ; Mesures prises Instruction de nettoyer la base de données et livre la quantité exacte de produits par le ministre de aux bénéficiaires ; l’Agriculture pour Coordination avec les entreprises de télécommunication pour résoudre le problème s’adapter : de réseau. • 5 % de doublons dans la base de données •Possibilité de connaître le nombre de Conséquences Conclusions du Améliorations bons électroniques réellement livrés deuxième cycle de • Retard dans l’OPD suivi et conséquences •Moins de 10 % de femmes bénéficient de •Instruction d’enrôler plus de Nouveaux problèmes bons électroniques femmes •Bons envoyés trop tard à la fin de la campagne agricole •Commencer la distribution • Peu de bénéficiaires ont retiré leurs produits plus tôt Une deuxième phase de collecte de données a été réalisée cinq mois plus tard avec un échantillon plus important. À ce stade, il était nécessaire d’évaluer l’efficacité de l’approche, car la mise en œuvre réussie du système de bons électroniques était une condition préalable à l’appui budgétaire au gouvernement du Mali. Des informations autres qu’une simple compréhension du fonctionnement de l’approche étaient nécessaires, et des éléments de preuve devaient être recueillis sur le pourcentage de bénéficiaires dans chaque district et l’application des critères de ciblage. La deuxième phase a montré que la gestion du système s’était améliorée. La base de données était plus propre, plus de personnes pouvaient être contactées, plus de messages pouvaient être envoyés par seconde, et les messages envoyés étaient reçus. Cependant, les résultats ont également montré que le déploiement du système laissait encore beaucoup à désirer. Toutes les zones convenues n’ont pas été couvertes et les bons électroniques ont été envoyés tardivement, généralement trois mois après le début de la saison agricole. De plus, des bons électroniques ont été distribués pour des engrais non utilisables sur les cultures en cours. Enfin, il a été révélé que les fournisseurs d’engrais n’avaient pas été sélectionnés de manière concurrentielle par le gouvernement. Ces résultats ont conduit à des discussions de haut niveau entre les responsables de la Banque mondiale et les autorités maliennes. Les résultats des deux cycles de suivi des bénéficiaires sont présentés dans le Tableau 2 et le résumé dans l’Encadré 1. Au Niger, l’IBM a été mis en œuvre dans le cadre du système de bons électroniques pour le Programme de productivité agricole en Afrique de l’Ouest (PPAAO) et le Projet d’action communautaire (PAC 3). Le système de bons électroniques au Niger fonctionne de manière similaire à celui du Mali, comme décrit ci-dessus. Le PAC 3 vise à : (a) renforcer les capacités des bénéficiaires dans le cadre de la planification et du suivi du développement local ; et (b) améliorer l’accès des populations vulnérables aux services sociaux et économiques. Le projet soutient des microprojets mis en œuvre par des associations communautaires conformément aux plans de développement des gouvernements clients. Les bénéficiaires sont des membres d’associations confrontés à des difficultés liées à des déficits importants de production céréalière, à de graves niveaux d’insécurité alimentaire, à un niveau élevé d’endettement des ménages, à des pertes importantes de bétail, etc. 27 L’IBM a été mis en œuvre sur la base d’un échantillon de 455 bénéficiaires, dont 202 éleveurs de bétail pour la reconsti- tution et l’engraissement des troupeaux, 220 pour la gestion durable des terres et de l’eau et 33 pour les cultures maraîchères. Les résultats de l’IBM montrent que 52 % des bénéficiaires du projet étaient des femmes. Cependant, environ 10 % d’entre elles n’ont pas reçu de formation pour améliorer leurs activités, contre 1 % seulement des hommes. En pratique, le comité de gestion censé suivre les activités des bénéficiaires a accordé plus d’attention aux activités des hommes qu’à celles des femmes (94 % des hommes bénéficiant d’activités de suivi contre seulement 56 % des femmes). L’une des principales faiblesses de la mise en œuvre du projet soulignée par l’IBM fut le retard pris dans l’assistance fournie aux bénéficiaires, avec environ 50 % des bénéficiaires recevant de l’aide au moins trois mois après avoir transmis leur contribution financière pour le cofinancement de leur projet. En moyenne, les hommes ont subi un retard de 2,5 mois, contre 3,6 mois pour les femmes, avant de recevoir une assistance dans le cadre du projet. Un mécanisme de plainte est en place afin de permettre aux bénéficiaires de signaler les contraintes et les problèmes auxquels ils sont confrontés au cours de la mise en œuvre du projet. Cependant, 39 % des bénéficiaires n’étaient pas au courant de ce mécanisme. Les résultats du suivi ont été partagés avec les équipes de projet de la Banque mondiale et du gouvernement. Le rapport vient d’être achevé et le prochain cycle de suivi itératif des bénéficiaires évaluera toutes les actions entreprises, ainsi que leur impact. 3.3 Le suivi itératif des bénéficiaires (IBM) appliqué aux projets de santé L’IBM est actuellement utilisé pour soutenir le régime d’assistance médicale (RAMED) du gouvernement du Mali, qui vise à fournir des soins gratuits aux personnes extrêmement pauvres sur le territoire national. Il vise à aider ces personnes à recevoir des soins gratuits en cas de maladie. Pour atteindre cet objectif, les personnes vivant dans une extrême pauvreté sont identifiées et munies de cartes d’assurance maladie à présenter à l’hôpital. Dans les discussions avec l’équipe de projet, des préoccupations ont été exprimées concernant la distribution des cartes d’assurance maladie et leur acceptation dans les centres de santé. Par conséquent, le point de départ pour la mise en œuvre de l’IBM dans ce projet à long terme était d’évaluer dans quelle mesure les cartes d’assurance maladie ont été distribuées et de savoir si les centres de santé les acceptaient facilement. Deux cycles de suivi itératif sur 700 bénéficiaires chacun ont été conçus pour le projet, allant jusqu’à décembre 2018. Après avoir validé les documents d’enquête avec l’équipe de projet du gouvernement, l’équipe de l’IBM a obtenu la liste des bénéficiaires potentiels ainsi que leurs numéros de téléphone, ce qui a permis de collecter des données par téléphone, car de nombreux numéros étaient en service. Chaque personne sélectionnée dans l’échantillon et non accessible devait être appelée quatre fois avant de confirmer qu’elle n’était pas joignable par téléphone. Le premier cycle de suivi a révélé plusieurs problèmes entravant le fonctionnement du projet. Contrairement à l’opinion du responsable de projet sur la distribution à grande échelle de cartes d’assurance, le premier cycle de suivi a révélé que seulement 39 % des bénéficiaires avaient reçu leur carte. En réalité, si les cartes ont été imprimées à Bamako et envoyées aux maires des communes bénéficiaires, les maires n’ont pas eu les moyens de les distribuer. En outre, même parmi ceux qui détenaient une carte, certains ont dû payer pour des consultations et des médicaments à l’hôpital. Des discussions avec les médecins hospitaliers ont révélé que les campagnes de sensibilisation ont une réelle influence sur l’utilisation des cartes par les bénéficiaires. Cependant, les hôpitaux n’étaient pas convaincus qu’ils seraient remboursés s’ils fournissaient des consultations et des médicaments gratuits aux patients titulaires d’un certificat médical. Enfin, certains bénéficiaires n’ont pas été sensibilisés à l’importance des cartes et ne savaient pas pourquoi elles leur avaient étaient remises. La diffusion du rapport a abouti à deux initiatives principales liées au projet : (a) l’envoi de la mission d’information dans les centres de santé, pour les rassurer sur le paiement et leur expliquer comment demander le remboursement des soins gratuits accordés aux patients présentant une carte de santé émise par le projet, et pour informer les bénéficiaires sur l’utilisation des cartes ; et (b) la promotion de la distribution des cartes. Le projet a combiné la distribution de cartes 28 et des transferts monétaires, les bénéficiaires du RAMED étant également des bénéficiaires de ce dernier projet. Cela a permis d’augmenter la distribution de cartes de 39 % à 52 %, comme mesuré lors du deuxième cycle d’IBM, trois mois après le premier cycle. Cependant, les centres de santé refusent toujours de fournir des soins gratuits aux bénéficiaires, et la moitié des personnes qui se sont rendues à l’hôpital avec une carte ont dû payer les soins. Il a été proposé de mettre en place une assistance téléphonique pour les bénéficiaires rencontrant des résistances à l’hôpital afin qu’un responsable de projet puisse expliquer le mécanisme et convaincre l’hôpital. FIGURE 3 : POURCENTAGE DE PATIENTS FIGURE 4 : POURCENTAGE DE PATIENTS AYANT PAYÉ LEURS MÉDICAMENTS TITULAIRES D’UNE CARTE RAMED, ACCEPTÉE ET LEURS CONSULTATIONS OU NON DANS LES HÔPITAUX EN MARS 2018 % de bénéficiaires ayant payé leur consultation % de bénéficiaires ayant payé leurs médicaments L’hôpital n’a pas accepté L’hôpital a accepté Août 2017 Mars 2018 la carte RAMED la carte RAMED ENCADRÉ 2 : LE SUIVI ITÉRATIF DES BÉNÉFICIAIRES DU PROJET D’ASSURANCE MALADIE : RÉSUMÉ ASSURANCE MALADIE POUR LES PERSONNES Seuls EXTRÊMEMENT ont reçuAU PAUVRES 39 % des bénéficiaires MALI leur carte d’assurance ; Quelques conclusions Certains bénéficiaires ont payé leurs soins de santé bien qu’ils aient présenté leur du premier cycle de carte à l’hôpital ; suivi Certains bénéficiaires ne savent pas pourquoi ils ont reçu une carte d’assurance maladie ; Peu d’enfants et de femmes sont inscrits ; Mesures prises par le Associer la distribution des cartes d’assurance maladie et des transferts monétaires ; projet pour s’adapter : Instruction d’organiser des séances d’information pour les bénéficiaires et les centres de santé. Conséquences Conclusions du Amélioration • 52 % des bénéficiaires ont reçu leurs cartes ; deuxième cycle de • Lancer la nouvelle OPD ?? La moitié des bénéficiaires qui sont rendus à • •1 00 % des cartes distribuées ; suivi et conséquences Certains problèmes •Aucun bénéficiaire n’effectue l’hôpital avec leur carte a payé pour des services ; persistent Manque d’informations sur le système pour les • de paiement à l’hôpital ; bénéficiaires et les centres de santé ; •Toutes les factures des centres Trop peu d’enfants et de femmes sont inscrits ; • de santé sont remboursées. 29 3.4 Le suivi itératif des bénéficiaires appliqués aux projets de transport Au Mali, le Projet de mobilité et de connectivité rurales (PMCR) et sa composante d’engagement communautaire utilisent également le suivi itératif des bénéficiaires. Le projet vise à réhabiliter les pistes rurales et les ponts dans les communes rurales de deux régions du Mali : Koulikoro et Sikasso. Pendant l’exécution des travaux, le chef de projet et le coordonna- teur du projet se sont intéressés à plusieurs questions, notamment: a) si les messages de sensibilisation diffusés par les stations de radios rurales ont été entendus par la population ; b) si des déviations de haute qualité ont été construites ; c) si le mécanisme de traitement des plaintes était en place et la population connaissait son fonctionnement ; d) si l’infrastructure achevée était de bonne qualité, ou inondée et inaccessible pendant la saison des pluies ; et e) si la population était satisfaite de l’infrastructure. Ces préoccupations constituaient des défis à relever dès le début de la mise en œuvre du suivi itératif des bénéficiaires. Les populations riveraines des routes et des ponts en construction ou en réhabilitation devaient apporter des réponses à ces questions. Deux enquêteurs ont été formés et déployés dans les deux régions pour recueillir des données. La conception du suivi itératif des bénéficiaires a donc fait l’objet d’une enquête en face à face pour la collecte de données et elle a ciblé les populations vivant autour des tronçons routiers et des ponts éligibles au projet. Ne disposant pas de la liste de ces personnes, les enquêteurs ont été invités à choisir au hasard les ménages selon la méthode de la « marche aléatoire ». À partir d’un point bien connu du village (école, centre de santé, pharmacie, boulangerie, etc.), le premier ménage est choisi. L’enquêteur avance ensuite, saute cinq ménages, et choisit un deuxième ménage. Le processus continue et couvre la totalité du village jusqu’à ce que l’enquêteur atteigne le nombre de ménages retenus dans le village. Au total, 90 ménages ont été choisis et leurs chefs ont été interrogés dans le cadre de l’enquête. Les déplacements des enquêteurs dans les zones du projet et les visites des ménages ont permis de cartographier la position des ménages et de confirmer qu’ils vivaient à proximité des infrastructures en cours de réhabilitation. POSITION DES VILLAGES VISITÉS DANS LE CADRE DU SUIVI ITÉRATIF DES BÉNÉFICIAIRES 30 Au cours de cette première phase de collecte de données sur le terrain, les enquêteurs ont enregistré les numéros de téléphone des chefs de ménage, qui seront utilisés lors des prochains cycles de suivi itératif des bénéficiaires. L’enquête téléphonique pourrait également être utilisée pour recueillir des données sur des questions telles que la violence basée sur le genre, comme demandé par le responsable de projet. Sur ce dernier point, l’idée est de mener une enquête téléphonique qui garantisse la confidentialité des réponses et demande aux personnes interrogées si elles ont remarqué des signes de violence sexiste entre un membre de leur ménage et un travailleur du projet. Un questionnaire pour ce type de suivi itératif des bénéficiaires sera conçu avec l’aide de spécialistes en genre. Malgré les retards, les messages de sensibilisation ont été adressés aux villages bénéficiaires par le biais de radios rurales. Au total, 90 % des ménages ont entendu un message concernant le projet avant ou pendant le projet. En outre, plus de la moitié des chefs de ménage ont participé à une réunion de sensibilisation sur le projet. Pour le chef d’équipe de projet à la Banque mondiale, le coordonnateur national du projet et les responsables de la composante de participation citoyenne, ce résultat indique le potentiel de sensibilisation de la population par le biais de radios rurales, car elles visent à s’assurer que le degré d’information ne diminue pas à l’avenir, étant donné que le projet repose sur une approche séquentielle, chaque séquence bénéficiant d’une campagne de sensibilisation. Les futurs rapports de suivi itératif des bénéficiaires évalueront ces activités, compareront les résultats et enverront les conclusions aux parties prenantes. Le rapport du suivi itératif des bénéficiaires a confirmé le fonctionnement du mécanisme de traitement des plaintes. Plus de 80 % des ménages savaient qu’ils pouvaient déposer une plainte si le projet les affectait de manière négative. De plus, 90 % de ces ménages savaient où déposer une telle plainte. Par ailleurs, toutes les personnes qui se sont considérées lésées par le projet ont déposé une plainte auprès du bureau du mécanisme de traitement des plaintes. Toutefois, plus de la moitié d’entre elles n’ont pas reçu de réponses dans les 40 jours, comme l’exige le Manuel de procédures. Les prochains cycles de suivi itératif des bénéficiaires veilleront à ce que les personnes affectées par le projet continuent de déposer des plaintes, et s’assureront si les réponses sont apportées dans les délais impartis. Les travaux ont commencé dans tous les villages, mais les progrès sont variables d’un endroit à l’autre. Les photographies ci-dessous montrent un pont et un tronçon de route réhabilités par le projet. Ces routes sont presque terminées ou sont les plus avancées. Dans certaines communes, les ménages ont estimé que moins de la moitié des travaux étaient terminés, tandis que dans d’autres, les ménages ont affirmé que peu de travail avait été accompli. Le suivi de l’avancement des travaux par les communes est un autre axe de travail du suivi itératif des bénéficiaires. Au fur et à mesure de la collecte des numéros de téléphone des ménages vivant à proximité d’infrastructures moins avancées, le suivi itératif des bénéficiaires sera conçu pour surveiller à distance la progression de ces travaux. PONT ET ROUTE EN COURS DE RÉHABILITATION À KOULIKORO 31 Lors de la réhabilitation d’un pont ou d’une portion de route, les entreprises sont invitées à construire d’abord une voie de contournement ou déviations pour que la population puisse circuler pendant la durée des travaux. Pendant les travaux, il convient de vérifier si des dérivations ont été construites et si elles sont utilisables. Dans le cas contraire, les entreprises devraient être tenues de construire des voies de contournement pour faciliter les déplacements de la population. La photographie ci-dessous montre un pont en construction sur une voie de contournement. Plus de 90 % des ménages ont déclaré que les entreprises construisaient des déviations lorsqu’elles réhabilitaient un pont ou une route, même si les avis divergeaient sur la qualité des travaux. Dans certaines communes, plus de 90 % des ménages ont confirmé que les contournements étaient de bonne qualité, mais ce chiffre tombe à 85 % dans certaines communes, et à 34 % dans d’autres. PONT EN COURS DE RÉHABILITATION, AVEC UNE VOIE DE CONTOURNEMENT Le suivi itératif des bénéficiaires a également évalué la satisfaction des bénéficiaires quant à la qualité des infrastructures réhabilitées. Plus de 90 % des ménages étaient satisfaits des résultats du projet, qu’ils jugeaient de bonne qualité. Toutefois, près de 20 % des ménages ont déclaré que les ponts et les routes réhabilités ont été inondés pendant la saison des pluies, interrompant les déplacements de population. Ce dernier résultat remet en question les capacités de la population à évaluer la qualité de l’infrastructure construite. Il souligne également les limites de l’information que le suivi itératif des bénéficiaires peut recueillir auprès des bénéficiaires. Par exemple, le point de vue des bénéficiaires sur la qualité des infrastructures telles que les routes, les ponts, les salles de classe, les bâtiments, etc., ne doit pas être pris pour une approbation des spécifications techniques. 3.5 Intégration du suivi itératif des bénéficiaires dans les pays AFCW3 : quelles sont les prochaines étapes ? L’approche générale de IBM dans AFCW3 consiste à soutenir des projets représentant les différents piliers des cadres de partenariat pays (CPP) et à fournir des possibilités d’évaluation comparative au sein de l’Unité de gestion du projet (UGP) pour des opérations similaires. L’extension du suivi itératif des bénéficiaires dans les pays AFCW3 impliquera son introduction dans d’autres secteurs et projets en Guinée et au Tchad, en plus du Mali et du Niger. Les projets communs à tous ces pays ou à certains d’entre eux seront ciblés et suivis à l’aide des mêmes questionnaires. Par exemple, le Projet 32 de mobilité et de connectivité rurales est mis en œuvre au Mali, au Niger et en Guinée, et géré par la même équipe de la Banque mondiale. Les enseignements tirés du suivi itératif des bénéficiaires sur ce projet au Mali seront utilisés pour concevoir des projets dans les autres pays à l’aide du même questionnaire, adapté si nécessaire. Les projets régionaux dans ces pays sont également ciblés. C’est le cas du Projet régional d’appui au pastoralisme au Sahel (PRAPS) dans le secteur agricole. Ce projet vise à améliorer l’accès aux actifs productifs essentiels, aux services et aux marchés pour les pasteurs et les agropasteurs dans certaines zones transfrontalières et le long des axes de transhumance dans six pays du Sahel, dont le Tchad, le Mali et le Niger. Le projet a démarré ses activités dans ces pays il y a deux ans. Le suivi itératif des bénéficiaires utilisera le même questionnaire pour identifier les lacunes qui nuisent à son efficacité et son évaluation comparative entre les pays. 4. SUIVI ITÉRATIF DES BÉNÉFICIAIRES ET DIMENSION DE GENRE Parce qu’il recueille des données factuelles directement auprès des bénéficiaires, le suivi itératif des bénéficiaires a été très efficace dans le suivi des résultats des projets liés au genre. En règle générale, les projets définissent le pourcentage de femmes à cibler parmi les bénéficiaires, même si dans de nombreux cas ce pourcentage n’est pas atteint. Dans plusieurs cas, des rapports du suivi itératif des bénéficiaires ont mis en évidence des préjugés sexistes alarmants. Les bénéficiaires d’un programme de transferts monétaires se sont révélés être principalement des hommes, tout comme les bénéficiaires du programme de bons électroniques. Dans le premier cas, le projet a transféré de l’argent aux chefs de ménage. Cependant, au Mali, 90 % des chefs de ménage sont des hommes. Ce lien entre les critères de sélection des bénéficiaires et les coutumes locales a été révélé par le suivi itératif des bénéficiaires. Dans le cas du programme de bons électroniques, il a choisi d’enregistrer les propriétaires fonciers comme bénéficiaires d’engrais plutôt que les agriculteurs qui travaillent réellement la terre. Ce critère excluait les femmes qui travaillent sur des terres familiales sans en être propriétaires. En outre, les produits agricoles éligibles aux engrais étaient les céréales, principalement produites par des hommes. Les légumes et les produits de jardinage cultivés par des femmes n’étaient pas admissibles. Ce choix excluait les femmes en tant que bénéficiaires du programme. Dans un autre projet gouvernemental visant à créer des commissions foncières dans chaque municipalité pour traiter les questions foncières au niveau local, il s’est avéré que les commissions foncières ne comptaient pratiquement pas de femmes alors qu’en fait les femmes sont les plus touchées par les questions foncières. Pour être membre d’une commission foncière, il faut être dirigeant d’une association locale. Cependant, dans chaque commune, il n’existe pratiquement aucune association de femmes, alors que les associations d’hommes sont nombreuses. Par conséquent, peu de femmes ont été élues membres des commissions foncières. FIGURE 5 : S ÉLECTION DE RÉSULTATS LIÉS AU GENRE MIS EN ÉVIDENCE PAR DIFFÉRENTES ACTIVITÉS DU SUIVI ITÉRATIF DES BÉNÉFICIAIRES BÉNÉFICIAIRES DE TRANSFERTS BÉNÉFICIAIRES DE BONS MEMBRE DES COMMISSIONS MONÉTAIRES ÉLECTRONIQUES FONCIÈRES Femmes, 21 % Femmes, 8 % Femmes, 6 % Hommes, 79 % Hommes, 92 % Hommes, 94 % 33 Les résultats défavorables en matière de genre révélés par le suivi itératif des bénéficiaires n’étaient pas la conséquence de mauvaises intentions. Les projets ont souvent été conçus en tenant compte du genre, et dans certains cas, ils ont même fait appel à des spécialistes en la matière. Le personnel de la Banque mondiale a toujours réagi positivement à ces conclusions. Pourtant, une attitude positive ne suffit pas à elle seule à éviter que les préjugés sexistes ne se perpétuent lors de la conception et de la mise en œuvre des projets. Dans certains cas, les problématiques de genre ont été carrément oubliées, et pour le système de bons électroniques (E-voucher), la procédure d’enregistrement des bénéficiaires a été modifiée et les femmes ont été enregistrées comme bénéficiaires potentielles aux côtés des chefs de ménage. En conséquence, le pourcentage de femmes bénéficiaires a augmenté, même s’il n’atteignait pas les 40 % convenus. En 2019, le suivi itératif des bénéficiaires évaluera si la proportion de femmes s’est améliorée. FIGURE 6 : POURCENTAGE DE FEMMES PARMI LES BÉNÉFICIAIRES D’ENGRAIS AU MALI Après réflexion avec les responsables des projets de transferts monétaires, il a été convenu que le problème pourrait être résolu en recadrant les transferts monétaires en faveur des femmes plutôt que des ménages, et un financement supplémentaire pour le programme de protection sociale en préparation adoptera cette approche. Les gestionnaires se sont également engagés à mettre à l’ordre du jour l’égalité des sexes pendant la mise en œuvre de chaque note conceptuelle et l’examen des décisions pour les nouveaux projets, et ils continueront d’encourager l’équipe du suivi des bénéficiaires à recueillir de l’information sur les résultats des projets en cours. 5. AUTRES USAGES DU SUIVI ITÉRATIF DES BÉNÉFICIAIRES 5.1 Le suivi itératif des bénéficiaires pour prendre la relève du S&E amélioré Le suivi itératif des bénéficiaires peut être utilisé pour poursuivre les activités de supervision entreprises dans le cadre du mécanisme de suivi et évaluation (S&E) amélioré (anciennement « suivi par tierce partie »), qui est coûteux et difficile à reproduire. Cette approche est à l’essai dans la région de Gao (Mali) dans le cadre du Projet de 34 FIGURE 7 : REPRÉSENTATION DU S&E AMÉLIORÉ AU MALI IO N BANQUE MONDIALE C O O R D IN AT TIERCE PARTIE : AMRAD ET GISSE FINANCEMENT CO NT SU RA GOUVERNEMENT PE T RV ISI ON MISE EN ŒUVRE Le S&E amélioré est onéreux et la collecte de données ne peut être reproduite. Le suivi itératif des bénéficiaires est donc utilisé pour assurer le suivi des PROJET recommandations : cas du PRRE à Gao, Mali reconstruction et de relance économique (PRRE). Cela a été introduit dans un contexte où la supervision des opérations soutenues par la Banque mondiale au Mali a été entravée par une insécurité prolongée, en particulier dans les zones directement touchées par le conflit de 2012. Dans ce contexte, le mécanisme habituel de supervision appliqué jusqu’à présent par la Banque mondiale a révélé des limites et ne permettait plus aux équipes de la Banque d’appuyer le pays de manière opportune et efficace et de veiller à ce que les opérations produisent les résultats attendus sur le terrain. Par conséquent, l’UGP du Mali s’est engagée au fil du temps dans des discussions avec les départements spécifiques de la Banque en vue d’initier des approches alternatives à l’appui d’une supervision plus efficace des projets par les équipes de la Banque mondiale. L’une de ces initiatives est le suivi et évaluation amélioré (S&E amélioré). Une phase pilote du S&E amélioré est en cours à Gao pour le Projet de reconstruction et de relance économique du pays (PRRE). Le dispositif de S&E amélioré proposé s’articule autour de la combinaison de deux instruments complémentaires : l’un impliquant des activités non complexes ciblant des projets d’infrastructure déjà achevés, l’autre nécessitant des activités relativement complexes pour le suivi des investissements en cours ou prévus dans le domaine des infrastructures.Le premier instrument s’appuie sur le Groupe d’intérêt scientifique des statisticiens économistes (GISSE),qui a effectué une seule mission sur le terrain pour recueillir des données auprès de tous les sites ciblés où des travauxd’infrastructure ont été achevés à Gao. Le deuxième instrument s’articule autour d’une organisation non gouvernementale (ONG), l’Association malienne de recherche-action pour le développement (AMRAD), qui effectue des missions périodiques sur des sites ciblés à mesure que les travaux d’infrastructure évoluent pour recueillir les données et informations nécessaires sur la dynamique technique et sociale. La Banque mondiale finance le projet et coordonne les activités de S&E amélioré. L’Unité d’exécution du projet (PIU) mise en place par l’État exécute le projet, signe les contrats pour les tiers et les supervise. 35 Cependant, le S&E amélioré est onéreux (voir Tableau 3 pour des exemples) en raison des coûts associés aux risques d’insécurité, et ne peut donc pas être reproduit. Il est financé par les ressources du projet qui seraient sinon affectées à d’autres activités. Ainsi, les projets ne peuvent pas se permettre de reproduire l’approche de S&E amélioré, qui est généralement une activité ponctuelle qui fournit une image ponctuelle du projet, mais ne permet pas d’assurer le suivi des recommandations. TABLEAU 3 : COÛT DU S&E AMÉLIORÉ DES PROJETS DE LA BANQUE MONDIALE PAYS PROJET COÛT COÛT DU S&E AMÉLIORÉ (millions USD) (milliers USD) Cameroun Projet de transport 100 1 300 Mali Projet de reconstruction et de relance économique 100 639 Somalie Projet de reconstruction et de développement durable 250 12 000 Soudan du Sud Projet migration 260 2,000 Afghanistan Projet de reconstruction 3 300 30 500 Pakistan Relèvement après la crise 200 1 600 Irak Projet d’urgence sur l’éducation, le développement 955 1 800 et les transports Afin d’assurer une surveillance permanente des projets couverts par des tiers, ceux-ci sont invités à collecter les numéros de téléphone des bénéficiaires et de toutes les parties prenantes et à prendre des photographies des infrastructures. Par la suite, le suivi itératif des bénéficiaires est mis en œuvre pour assurer le suivi des recommandations du S&E amélioré et pour évaluer les changements en utilisant la base de données des bénéficiaires constituée lors des visites de S&E amélioré sur le terrain. Les bénéficiaires sont invités à envoyer de nouvelles photographies de l’infrastructure, qui sont ensuite comparées aux précédentes afin de confirmer que les exigences ont été respectées. Par exemple, pendant le S&E amélioré du projet PRRE à Gao, l’ONG et les entreprises privées sous contrat ont fourni des photographies de tables bancs en mauvais état, et le spécialiste de la passation des marchés a exigé que ce mobilier soit remplacé avant d’accepter la livraison et le paiement aux prestataires. Au moment du remplacement des tables bancs, les activités de S&E amélioré étaient terminées et le remplacement effectif a été vérifié par le suivi itératif des bénéficiaires, qui a demandé aux directeurs d’école de le confirmer avec des photographies à l’appui. 5.2 Le suivi itératif des bénéficiaires dans le programme d’Appui budgétaire général Le suivi itératif des bénéficiaires a été utilisé au Mali pour consolider les éléments de preuve fournis par le gouvernement dans le cadre du programme d’appui budgétaire général (ABG). Une série d’opérations de politique de développement (OPD) a été mise en œuvre au sein de l’UGP du Mali depuis 2016, en mettant l’accent sur la réduction de la pauvreté et la croissance inclusive tout en apportant un soutien au budget. Alors que l’ancienne série des OPD se concentrait sur le renforcement des systèmes de gestion des finances publiques (GFP) et de la gouvernance, la série en cours oriente les 36 réformes structurelles vers des secteurs spécifiques et vers l’inclusion. Cette série vise à libérer le potentiel de secteurs économiques clés tels que l’agriculture, la santé, l’énergie, les télécommunications et les routes. Ce faisant, elle vise également à soutenir les efforts déployés par l’État pour assurer une croissance inclusive et résiliente en augmentant les transferts aux populations les plus pauvres et les plus vulnérables et en étendant la couverture de la protection sociale. Au Mali, le suivi itératif des bénéficiaires a été utilisé comme outil pour valider les éléments de preuve des OPD antérieures menées par le gouvernement. Il a été utilisé pour évaluer les éléments de preuve relatifs au système de bons électroniques (E-voucher), aux commissions foncières et au programme d’assurance maladie destiné aux personnes extrêmement pauvres. En Guinée et au Tchad, le suivi itératif des bénéficiaires soutiendra la série d’Appui budgétaire général (ABG) basée sur des indicateurs liés à des projets sociaux dans les secteurs de l’agriculture et de l’éducation. En ce qui concerne le système de bons électroniques au Mali, le suivi itératif des bénéficiaires a confirmé l’affirmation de l’État selon laquelle le protocole de distribution des engrais avait été respecté. Les messages de sensibilisation devaient être diffusés à un moment précis avant le début de la distribution. Le suivi itératif des bénéficiaires a utilisé son centre d’appels au Mali pour confirmer auprès des exploitants agricoles qu’ils avaient bien reçu ces messages, comme le prétendent les pouvoirs publics. En outre, il a été possible d’évaluer l’utilité de ces messages dans le succès du système de bons électroniques. Suite au message de sensibilisation, le déclencheur de l’OPD a demandé que des bons électroniques soient envoyés à un moment précis à tous les exploitants agricoles. Comme les avocats ont soutenu qu’une simple lettre du gouvernement ne suffisait pas, le suivi itératif des bénéficiaires a été introduit téléphonant à un échantillon d’agriculteurs pour savoir quand ils avaient reçu leurs bons. Les résultats de cette enquête, y compris le pourcentage d’agriculteurs ayant confirmé la réception des bons électroniques et la date à laquelle ils ont été reçus, ont été envoyés en guise de preuve aux avocats qui ont validé l’information. En ce qui concerne le programme d’assurance maladie pour les personnes extrêmement pauvres, le suivi itératif des bénéficiaires a confirmé la distribution des cartes d’assurance et comparé le pourcentage de bénéficiaires qui les ont reçues à l’objectif fixé dans la matrice OPD ainsi qu’à l’affirmation de l’État. Le système rapide a permis de confirmer si les bénéficiaires recevaient des soins de santé gratuits lorsqu’ils tombaient malades et se rendaient à l’hôpital, et si les directeurs de centres de santé étaient remboursés par le projet. Un système itératif a été mis en place pour s’assurer que le projet ne présentait à aucun moment une lacune susceptible de nuire à son efficacité. En ce qui concerne les commissions foncières, les avocats ont recherché des preuves de leur création et de leur fonctionnalité. Après avoir rassemblé ces informations, le suivi itératif des bénéficiaires a permis de déterminer si les commissions foncières avaient organisé des réunions sur les problèmes fonciers dans leurs communes en téléphonant à un échantillon aléatoire de membres de chaque commission. Les résultats ont été acceptés en guise de preuve par les avocats. Comme les activités de ces commissions doivent être permanentes, cette enquête fréquente et rapide auprès de leurs membres est devenue régulière. 6. CONCLUSION Le suivi itératif des bénéficiaires s’est révélé être un outil efficace pour améliorer l’impact des projets. Il a été mis en œuvre dans différents secteurs pour aider les projets à atteindre efficacement leurs objectifs. Toutefois, la mise en œuvre du suivi itératif des bénéficiaires fait face à un certain nombre de risques et défis. Les principaux risques sont liés à l’obtention de listes de bénéficiaires de projets avec leurs coordonnées, aux retards dans le traitement des problèmes identifiés lors de la première phase du suivi itératif des bénéficiaires, aux problèmes liés aux réseaux et à l’insécurité. Sachant que ces risques peuvent compromettre la mise en œuvre du système, le succès du suivi itératif des bénéficiaires dépend de la collaboration et de l’implication des responsables de projet, qui doivent mettre 37 à disposition les listes de bénéficiaires. Compte tenu des effets positifs du suivi itératif des bénéficiaires au Mali et au Niger, du grand intérêt exprimé par les chefs de projet et de l’implication des coordonnateurs de projet, le risque de non-collaboration est faible. Afin d’atténuer le risque de retards dans le traitement des problèmes identifiés et le déclenchement des cycles ultérieurs du suivi itératif des bénéficiaires, l’équipe responsable de cette activité peut se joindre à l’équipe de projet pour trouver des solutions après diffusion et assurer le suivi. Dans le but d’atténuer l’impact des problèmes liés au réseau, il est possible de combiner les enquêtes téléphoniques et les enquêtes sur le terrain. En l’absence des numéros de téléphone des bénéficiaires, les enquêteurs sont envoyés dans la zone du projet pour la collecte des données malgré l’exposition potentielle à l’insécurité. Dans ce cas, la durée sur le terrain pour la collecte des données est réduite au minimum et les enquêteurs sont présentés aux autorités locales afin d’éviter toute confusion avec d’autres agents. Lors de leur première visite dans la zone du projet, les enquêteurs enregistrent les numéros de téléphone des bénéficiaires et des parties prenantes pour les cycles ultérieurs de collecte de données. Les défis proviennent de différentes sources. Si l’approche de rétroaction régulière du suivi itératif des bénéficiaires est relativement simple, son application requiert beaucoup d’attention. Il est essentiel d’établir de bonnes relations avec une équipe de projet, car personne n’aime recevoir des commentaires négatifs, même si c’est précisément ce qu’un système de rétroaction régulière est censé faire. La confidentialité, de bonnes relations avec le personnel du projet et les pouvoirs publics et un accord sur les objectifs communs du processus de suivi sont essentiels. Une fois que les objectifs du processus de suivi sont clarifiés et alignés sur ceux des responsables de la mise en œuvre du projet, les réticences disparaissent. Le fait de démarrer le suivi itératif des bénéficiaires au tout début du projet augmente ses impacts positifs. Par conséquent, l’intégration d’une approche de suivi itératif dans la conception du projet présente l’avantage d’identifier rapidement des options pour le suivi des bénéficiaires. De petits changements dans la conception du projet ou dans le manuel de procédures peuvent grandement faciliter le suivi itératif. Par exemple, cela fait une différence lorsque le manuel de procédures stipule que les numéros de téléphone et les caractéristiques essentielles des bénéficiaires doivent être saisis dans une base de données électronique accessible à des fins d’échantillonnage et de suivi (sous forme anonyme). De plus, lorsque le manuel de procédures stipule que certains avantages doivent être distribués avant une certaine date, il propose un moment précis à partir duquel les progrès vers les objectifs du projet peuvent être mesurés. Même si une approche de suivi itératif n’est conçue que pendant la phase de mise en œuvre du projet, il est possible de trouver des moyens de faciliter le suivi. L’enregistrement des numéros de téléphone des répondants lors des entretiens en face à face permet un suivi facile. Au cours de chaque cycle du suivi sur les repas scolaires, les numéros de téléphone des répondants (gestionnaires de cantines, chefs d’établissement et chefs de ménage) ont été recueillis pour un suivi ultérieur. Parfois, les bénéficiaires fournissent volontairement des informations à l’équipe de projet, souvent par SMS, sur les cas où l’argent destiné à la cantine scolaire a été épuisé avant la date prévue, que l’argent soit arrivé à temps ou non, ou sur toute autre question relative au fonctionnement de la cantine. Lorsque ces informations sont reçues et jugées pertinentes, l’équipe du projet peut utiliser les numéros de téléphone d’autres bénéficiaires pour vérifier si ce qui a été signalé ou si c’est un cas unique ou un problème plus général. Une autre question à prendre en compte est celle de savoir qui doit effectuer le suivi. Au Mali et au Niger, le personnel du département de la pauvreté et équité est responsable de la collecte et de l’analyse des données, tandis que le personnel du secteur facilite le dialogue avec les équipes du projet. Travailler avec le personnel du département pauvreté et équité présente des avantages majeurs puisqu’il possède une vaste expérience de l’échantillonnage, de 38 la conception d’instruments de collecte de données, de la formation des enquêteurs et de l’exécution d’activités de collecte de données primaires ainsi que de l’analyse de données et de rapports. De plus, son personnel connaît bien la Banque mondiale et ses opérations. La présence locale est un autre élément important de réussite. La présence facilite l’établissement d’un climat de confiance avec les équipes de projet et la compréhension du fonctionnement du projet, et facilite grandement les discussions sur les résultats et les mesures correctives. La présence à proximité du lieu d’exécution du projet accroît également la réactivité, ce qui est important lorsqu’il s’agit d’identifier et de traiter rapidement les problèmes, car les journées perdues ne peuvent être rattrapées, les repas manqués ne peuvent être remplacés et les intrants agricoles distribués tardivement sont peu utiles aux exploitants agricoles. La connaissance des procédures et du personnel du projet facilite la conception d’une boucle de rétroaction itérative, et l’externalisation de l’approche comme pour les audits financiers risque de poser problème. Toutefois, une approche intermédiaire pourrait fonctionner. Un spécialiste du suivi itératif des bénéficiaires pourrait être embauché dans le cadre des projets et travailler de façon indépendante, à l’instar des spécialistes de la passation des marchés et de la gestion financière. La conception des instruments et l’établissement des rapports pourraient être confiés à un personnel maîtrisant la conception et l’analyse des enquêtes auprès des ménages, tandis que le dialogue avec le client pourrait être confié aux responsables du projet, et la collecte des données sous-traitée. Cette configuration est réalisable dans l’architecture de projet de la Banque mondiale, le temps du personnel pouvant être financé sur les budgets de supervision, tandis que la collecte des données peut être financée sur le budget de S&E de chaque projet. Cette configuration institutionnelle souligne les responsabilités respectives du gouvernement bénéficiaire et de la Banque mondiale en matière de mise en œuvre et de supervision des projets, tout en garantissant une séparation suffisante des fonctions afin d’éviter tout biais dans les rapports. 39 ANNEXE 1. MÉTHODE D’ÉCHANTILLONNAGE13 L’échantillonnage pour les enquêtes de suivi itératif des bénéficiaires varie d’un projet à l’autre. Il n’existe pas de méthodologie unique applicable à tous les projets suivis. En général, la taille de l’échantillon dépend du budget et des contraintes de temps. Le budget alloué à la collecte des données ne devrait pas dépasser 5 000 USD, ce qui sert principalement à payer les enquêteurs et les crédits pour les enquêtes téléphoniques. Pour maintenir la rapidité et assurer la qualité des données, le suivi itératif des bénéficiaires déploie des enquêteurs sur le terrain ou utilise les appels téléphoniques pendant deux semaines au plus. Lorsque le nombre de bénéficiaires est inférieur à 1 000, tous peuvent être échantillonnés si le temps et le budget le permettent. Cette option a été utilisée au Niger dans le cadre du projet de bons électroniques, qui comptait moins de 500 bénéficiaires. Lorsque le nombre de bénéficiaires du projet est de 1 000 ou plus, le suivi itératif des bénéficiaires applique une méthodologie d’échantillonnage formelle. Par exemple, son application à la cantine scolaire, aux bons électroniques et aux soins de santé au Mali a suivi une approche probabiliste de l’échantillonnage. Pour identifier les lacunes qui entravent un projet, il n’est pas nécessaire de toujours cibler tous les bénéficiaires ou toutes les régions où vivent les bénéficiaires. Tout dépend des problèmes. Lors de la première tentative, l’équipe peut envisager une région proche de la capitale afin d’évaluer les délais nécessaires pour fournir des services ou des biens ou pour transférer de l’argent aux bénéficiaires. Si ce délai est jugé excessif, on peut en déduire que la situation est encore plus grave dans les régions éloignées. Si ce n’est pas le cas, les cycles suivants du suivi itératif des bénéficiaires peuvent aller plus loin dans la sélection de l’échantillon. D’un cycle à l’autre du suivi itératif, il est recommandé que l’équipe de projet prélève de nouveaux échantillons, ce qui peut aider à réduire le biais de sélection (le cas échéant) pendant l’échantillonnage. En ce qui concerne le projet de cantine scolaire au Mali, la première phase du suivi itératif des bénéficiaires s’est concentrée sur la région de Koulikoro, la plus proche de Bamako. Nous nous attendions à ce que la proximité de la capitale facilite la supervision et limite les délais de transfert d’argent. Au total, 68 établissements scolaires de cette région ont bénéficié du projet. Compte tenu du nombre de questionnaires (directeurs d’établissements scolaires, gestionnaires de cantines scolaires et parents d’élèves), du budget et des contraintes de temps, nous sommes arrivés à un échantillon de 20 établissements scolaires à interroger en face à face. Après avoir numéroté les établissements, l’échantillon de 20 a été sélectionné au hasard selon l’approche d’échantillonnage systématique. Dans chaque établisse- ment sélectionné, tous les directeurs et les gestionnaires de cantines scolaires ont été interrogés. Dans chaque classe, cinq élèves ont été choisis au hasard et leurs parents ont également participé à l’enquête. Sur la base des résultats, qui ont montré de graves problèmes dans cette région, le second cycle du suivi itératif des bénéficiaires a concerné 30 établissements scolaires différents des 20 premiers, toujours dans la même région. Avec des résultats positifs observés au second cycle, le troisième cycle s’est étendu à Gao et Mopti, qui sont éloignés de la capitale et aussi touchés par l’insécurité. Pour le programme de bons électroniques ainsi que le programme d’assurance maladie pour les plus démunis au Mali, la liste des bénéficiaires, assortie de leur numéro de téléphone, était disponible. Compte tenu des contraintes de temps et de budget, nous avons déterminé la taille des échantillons (100 pour le premier cycle et 800 pour le second pour le Les populations de l’univers du suivi itératif des bénéficiaires au Mali étaient les suivantes : repas scolaires (premier et deuxième cycles : 68 établissements scolaires) ; 13  bons électroniques (premier cycle : 252 995 agriculteurs ; deuxième cycle : 97 476 agriculteurs ; troisième cycle : 92 792 agriculteurs et 106 fournisseurs) ; assurance maladie (premier et deuxième cycles : 4 035 bénéficiaires). Au Niger, les populations de l’univers étaient : 300 pour le PPAAO, 12 000 pour le projet de filets sociaux et 455 pour le PAC3. 40 programme de bons électroniques, et 700 pour le programme d’assurance maladie), les échantillons étant sélectionnés selon la méthode d’échantillonnage systématique et couvrant toutes les régions où les projets étaient mis en œuvre. En ce qui concerne le projet de mobilité et de connectivité rurales, l’équipe du projet a demandé de mesurer l’impact sur les populations vivant à proximité des infrastructures en cours de réhabilitation. En l’absence de la liste de ces ménages, l’échantillon (90 ménages) a été sélectionné sur le terrain selon la méthode de la marche aléatoire. À partir d’un point bien connu du village (école, clinique, pharmacie, boulangerie, etc.), le premier ménage est choisi. Ensuite, l’enquêteur avance, saute quelques ménages (nombre fixe après chaque ménage sélectionné) et sélectionne le second. Le processus se poursuit pour couvrir l’ensemble du village jusqu’à ce que l’enquêteur atteigne le nombre de ménages défini dans le village. Le deuxième cycle du suivi en préparation, qui cible les usagers des routes et des ponts réhabilités, prévoit d’utiliser la méthode des quotas. 2. QUESTIONNAIRE Les questionnaires du suivi itératif des bénéficiaires sont spécifiques à chaque projet ; ils dépendent des problèmes relevés dans le cadre du suivi et sont adaptables d’un cycle à l’autre dans le cadre d’un même projet. Il n’existe pas de questionnaire standard utilisable pour tous les projets. Cependant, les questionnaires du suivi itératif des bénéficiaires se concentrent sur un maximum de cinq problèmes principaux, et les questions sont formulées de manière à les suivre. La conception du questionnaire est également basée sur le type de bénéficiaires du projet (individus, communautés, ONG, etc.). Lorsque les répondants sont des individus, les premières questions tiennent compte des caractéristiques sociodémo- graphiques après les informations sur la localisation géographique pour l’analyse spatiale. Lorsque les répondants sont des ONG, des communes ou d’autres entités, les questionnaires commencent par la localisation géographique. Après ces questions, qui peuvent être transférées d’un projet à l’autre, le reste du questionnaire contient des questions spécifiques au projet et aux problèmes étudiés. Les questionnaires utilisés jusqu’à présent pour le suivi itératif des bénéficiaires peuvent être partagés sur demande. 41 APERÇU DES INDICATEURS MACROÉCONOMIQUES La reprise économique s’est consolidée en 2018 et les De la guinée, mali, niger et Tchad, 2014-2019 ...avec des taux d’inflation en légère perspectives de cette année sont positives pour 2019... augmentation avec la reprise, mais limités à un seul chiffre. Tchad Mali Guinée Niger Tchad Mali Guinée Niger Taux de croissance du PIB (%) Moyenne annuelle 2014 2015 2016 2017 2018e 2019p 2014 2015 2016 2017 2018e 2019p Les déficits du compte courant restent élevés en Guinée et au ...tandis que les termes de l’échange semblent s’améliorer au Niger en raison de fortes importations liées au secteur minier... Tchad, mais pas avec la même magnitude que l’année dernière. 2014 2015 2016 2017 2018e 2019p 2014 2015 2016 2017 2018e 2019p Variation annuelle en % % du PIB Tchad Mali Guinée Niger Tchad Mali Guinée Niger Les déficits budgétaires étaient élevés en 2018 ...soutenus par une augmentation supplémentaire sauf au Tchad, et doivent être consolidés... des recettes 2014 2015 2016 2017 2018e 2019p Tchad Mali Guinée Niger Dons compris, base caisse, % du PIB Hors dons, % du PIB Tchad Mali Guinée Niger 2014 2015 2016 2017 2018e 2019p Source : Estimations des équipes du FMI et de la Banque mondiale ; FMI (AIV), plusieurs années. Remarque : Les données de 2018 sont des prévisions et des estimations dans certains cas. Les données de 2019 sont des prévisions. Les déficits budgétaires comprennent les dons et sont basés sur une comptabilité de caisse (sauf pour le Niger, où ils sont basés sur les engagements). Ils peuvent être légèrement différents de ceux figurant dans le texte, qui sont basés sur les engagements. 42 GUINÉE Le pays a connu un ralentissement de la croissance, établie à 5,8 %, en 2018, en raison de la diminution récente des activités minières. Le déficit du compte courant extérieur s’est creusé avec le fléchissement de la croissance des exportations. Les perspectives sont positives, soutenues par d’importants investissements directs étrangers (IDE) dans l’exploitation minière, et des investissements dans les infrastructures. Le taux d’extrême pauvreté devrait encore diminuer. Des cours des matières premières en baisse, une production minière inférieure aux prévisions et des dérapages budgétaires liés aux élections constitu- ent des risques à la baisse pour les perspectives du pays. ÉVOLUTIONS RÉCENTES La croissance a ralenti, passant de 9,9 % en 2017 à 5,8 % en 2018 (3,1 % par habitant), malgré un PIB nettement inférieur au potentiel de production. En dépit des forts investissements directs étrangers (IDE), la croissance du secteur minier s’est essoufflée, passant de 52,3 % en 2017 à 6,7 % en 2018. Toutefois, la croissance hors secteur minier a progressé de 4,1 % en 2017 à 5,6 % en 2018, grâce aux investissements dans les infrastructures. L’inflation a frôlé les 10 % – 9,9 % en 2018 – sous l’effet d’une hausse des prix du carburant et de l’électricité dans le contexte d’un écart de production positif. Le déficit du compte courant extérieur a enregistré une augmentation de 6,8 % du PIB en 2017 à 16,1 % en 2018, ce qui correspond à sa moyenne historique. Cette augmentation s’explique par un ralentissement de la croissance des exportations (7,3 %) et une progression plus rapide des importations liées aux IDE (19,8 %). Les flux d’IDE de 13,2 % du PIB ont contribué à financer le déficit du compte courant. Les réserves internationales brutes s’établissent à 3,2 mois d’importations en 2018 (contre 2,4 mois en 2017), reflétant des prêts extérieurs à l’appui de projets et un soutien budgétaire plus importants que prévu. Le déficit budgétaire a légèrement augmenté, passant de 2,0 % du PIB en 2017 à 2,1 % en 2018. Toutefois, le déficit primaire a chuté de 1,2 % du PIB en 2017 à 0,9 % en 2018. Cette amélioration résulte d’une réduction des subventions de l’énergie et des carburants et d’un plafonnement du recrutement et des promotions dans le secteur public. Les recettes fiscales ont légèrement augmenté avec la hausse des recettes fiscales minières, dans un contexte de baisse du recouvrement de l’impôt sur le commerce international. La dette publique est passée de 39,9 % du PIB en 2017 à 38,9 % en 2018, grâce à la forte croissance du PIB nominal. Les engagements extérieurs non concessionnels ont augmenté avec la signature du prêt pour le barrage de Souapiti (1,2 milliard USD). Deux autres prêts non concessionnels, destinés à la réhabilitation de la route nationale RN1 et des routes urbaines de Conakry (598 millions USD), ont été signés en 2018, avec pour garantie les recettes fiscales minières. Le risque de surendettement extérieur reste modéré. Le gouvernement a pris d’importantes mesures pour améliorer sa politique monétaire. La Banque centrale a réduit son financement public dans les limites légales. Le gouvernement a réagi en augmentant ses emprunts auprès des banques 43 commerciales, qui ont connu une hausse de 28 % à la fin septembre (en glissement annuel). Toutefois, la croissance de la monnaie de réserve a décliné pour s’établir à 6 % à la fin septembre. En outre, la Banque centrale a consolidé son système de suivi et de reporting pour les financements publics en fournissant des rapports réguliers à son conseil d’administration. La recapitalisation de la Banque centrale (environ 300 millions USD) a renforcé son autonomie. La Banque centrale cible l’argent de base conformément au programme du FMI visant à préserver une inflation modérée. Le crédit au secteur privé est reparti à la hausse, atteignant 8,8 % à la fin septembre (en glissement annuel). On estime que l’extrême pauvreté en Guinée a progressivement diminué. Malgré une reprise vigoureuse, l’inflation des prix des denrées alimentaires a exercé une pression à la baisse sur le pouvoir d’achat des ménages. Les projections basées sur la croissance du PIB par habitant suggèrent qu’environ 26 % de la population ont vécu sous le seuil de pauvreté international en 2018 (1,90 USD par jour exprimé en PPA 2011), ce qui représente 3,3 millions de très pauvres. La pauvreté non monétaire reste élevée. PERSPECTIVES Les perspectives économiques à moyen terme sont positives. La croissance devrait atteindre environ 6 % sur la période 2019-2021, l’écart de production demeurant nettement positif tout au long de cette période. Les investissements dans l’exploitation minière et ses infrastructures devraient continuer de stimuler la croissance, financée par les entrées d’IDE. Le secteur de la construction devrait également connaître une forte croissance grâce aux investissements publics et privés dans les infrastructures énergétiques et de transport. La productivité agricole s’améliorera grâce à un meilleur approvisionnement en intrants agricoles et aux progrès dans les institutions et les infrastructures. Le déficit budgétaire (dons inclus) devrait tomber à environ 1 % du PIB d’ici 2021, sous l’effet de la hausse des recettes fiscales, qui augmenteront de 13,5 % du PIB en 2018 à 15,1 % en 2021. Le gouvernement continuera de mettre en œuvre des mesures de mobilisation des recettes fiscales, telles qu’une meilleure rationalisation des exonérations fiscales ad hoc, des simplifications du code des impôts, une révision des règles et dispositions fiscales internationales, un nettoyage des bases de données des contribuables et la mise en place d’une nouvelle structure organisationnelle pour la Direction générale des impôts. En 2019-2021, les exportations devraient croître de 7,9 %, sous l’impulsion de la nouvelle production minière, tandis que les importations augmenteront de 4,9 % grâce aux importations de produits intermédiaires et d’équipement. En conséquence, le déficit du compte courant extérieur devrait tomber à 12,9 % du PIB d’ici 2021. Les entrées d’IDE couvriront plus de 70 % des besoins de financement entre 2019 et 2021, les prêts à long terme couvrant le reste. La Banque centrale prévoit de mener une politique monétaire plus prudente et de limiter le financement de l’État. Les objectifs de croissance des réserves monétaires seront soutenus par une meilleure gestion des liquidités. L’inflation devrait donc diminuer légèrement pour s’établir à 8 % en 2021, soit environ 1 point de pourcentage de moins que le taux d’inflation annuel moyen au cours des cinq dernières années. Le programme du FMI permettra de continuer à renforcer l’indépendance de la Banque centrale. Le taux d’extrême pauvreté devrait encore baisser de 26 % à 22 % d’ici 2021. RISQUES ET DÉFIS Des risques à la baisse pèsent sur les perspectives économiques. Un fléchissement de la croissance chinoise ou des économies avancées ou une baisse de la demande de bauxite en raison des droits de douane américains sur la production d’aluminium chinoise pourrait réduire les investissements en Guinée du fait d’une demande plus faible pour ses ressources minérales. La baisse des prix des matières premières (en particulier la bauxite et l’or) ou la lenteur des progrès en matière de développement des infrastructures pourraient aussi freiner la croissance. Des conditions 44 financières mondiales plus strictes ou plus volatiles, telles qu’une appréciation du dollar américain, pourraient nuire à la compétitivité et grever les réserves de change. Inversement, un accroissement plus rapide de la capacité de production minière ou des infrastructures minières ou une hausse du prix des matières premières favoriserait une croissance plus forte. Par ailleurs, des dérapages budgétaires (résultant d’une moindre mobilisation des recettes, d’une faible hiérarchisa- tion des projets d’investissement public ou d’une augmentation des dépenses courantes) pourraient conduire à un financement inflationniste par la Banque centrale, à une hausse des emprunts et à une moindre viabilité de la dette à moyen terme. Un recours à l’endettement plus important que prévu, en particulier à l’endettement hors concession, aggraverait également les paramètres de la dette. L’accroissement des dépenses pendant la période électorale à venir ou en réponse à des contestations politiques ou à l’activité syndicale présente des risques supplémentaires. La réduction de la pauvreté bénéficiera d’une productivité accrue du secteur agricole et de la création d’un espace budgétaire pour financer les investissements dans le capital humain et la protection social. 45 PRINCIPAUX INDICATEURS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS (2016–2021) 2016 2017 2018(e) 2019 (f) 2020(f) 2021(f) (variation annuelle en pourcentage, sauf indication contraire) Comptes et prix nationaux PIB à prix constants 10,5 9,9 5,8 5,9 6,0 6,0 PIB à prix courants 17,8 22,0 15,9 15,3 14,5 14,5 Déflateur du PIB 6,7 11,0 9,5 8,8 8,0 8,0 Prix à la consommation Moyenne annuelle 8,2 8,9 9,9 8,9 8,3 8,0 Fin de période 8,7 9,5 9,6 8,6 8,0 7,9 Secteur extérieur Exportations (en USD) 16,2 47,4 0,1 -0,7 14,0 8,9 Importations (en USD) 82,4 -8,7 19,4 9,5 5,0 0,1 Liquidités et crédit Actifs étrangers nets 7,3 9,6 5,8 6,3 6,7 6,4 Actifs nationaux nets 2,7 6,2 6,3 6,1 6,3 6,1 Créances nettes sur l’État 1,9 5,0 -0,3 -0,3 -0,7 -0,5 Crédit au secteur non gouvernemental 2,4 0,9 6,5 6,4 7,0 6,6 Réserves monétaires 15,5 10,3 14,5 9,9 10,9 10,8 Masse monétaire 9,9 15,8 12,0 12,4 13,0 12,5 Financement du gouvernement central (en % du PIB) Total recettes et dons 15,8 15,2 15,6 15,6 16,4 16,9 Recettes 13,2 13,2 13,5 13,9 14,7 15,1 Dons 2,1 1,5 1,2 1,1 1,1 1,2 Total dépenses et prêts nets 16,0 17,2 17,7 17,9 18,1 17,9 Dépenses courantes 11,6 11,3 11,6 10,5 11,3 11,3 Dépenses en capital 4,7 5,7 6,1 7,6 7,1 6,6 Solde budgétaire global Hors dons -0,2 -2,0 -2,1 -2,3 -1,7 -1,0 Dons inclus -2,3 -3,5 -3,3 -3,4 -2,8 -2,2 Solde du compte courant (en % du PIB) Hors transferts officiels Avec transferts officiels -31,6 -6,8 -16,1 -20,2 -17,1 -12,9 Balance des paiements globale 0,8 0,7 1,6 1,4 1,2 1,6 Réserves brutes (en mois d’importations) 2,4 2,4 3,2 3,5 3,8 4,0 Dette publique extérieure 21,6 19,2 21,3 31,1 32,4 31,7 PIB nominal (milliards GNF) 77 899 94 491 109 610 126 271 144 706 165 689 Source : Banque mondiale MFMOD, FMI et autorités guinéennes. Remarque : (e) = estimation ; (p) = projection 46 mali La croissance a encore ralenti pour s’établir à 4,9 % en 2018 en raison des dérapages budgétaires et de l’incertitude liée aux élections. La pauvreté a reculé grâce à une augmentation substantielle de la production agricole. Le déficit budgétaire s’est creusé sous l’effet d’une baisse conséquente des recettes, tandis que la position extérieure s’est détériorée à la suite d’une dégradation des termes de l’échange. Les perspectives sont contrariées par les risques à la baisse liés à l’insécurité, les risques budgétaires liés au secteur de l’énergie et les chocs exogènes potentiels. Pour aller de l’avant, le Mali doit rétablir la sécurité, améliorer le recouvrement des impôts et diversifier davantage son économie. RÉVOLUTIONS RÉCENTES La croissance a ralenti pour la troisième année consécutive, à 4,9 % (1,9 % par habitant) en 2018, ramenant ainsi l’économie à son taux de croissance potentiel. Le ralentissement de la croissance est dû en partie à la propagation de l’insécurité dans les régions du Centre et du Sud. L’incertitude à l’approche de l’élection présidentielle a également joué un rôle. Du côté de la demande, l’investissement total a chuté de plus de 2 % du PIB, le gouvernement ayant réduit l’investissement public en réponse à une chute brutale des recettes. En revanche, la baisse des recettes a permis de soutenir la demande intérieure privée. L’inflation a légèrement augmenté, passant de 1,8 % en 2017 à 2,0 % en 2018. Malgré la flambée des cours internationaux du pétrole (23,2 %), les prix sur le marché intérieur n’ont augmenté que de 3 %. Cela a permis de contenir l’inflation, mais au prix d’un coût budgétaire, car les subventions budgétaires ont augmenté. Le déficit du compte courant extérieur s’est creusé, passant de 5 % à 7,4 % du PIB en 2018, la progression des importations liées au pétrole ayant compensé les exportations très performantes de coton et d’or. On estime que la production d’or a augmenté de 21 % et que le pays a enregistré une récolte record estimée à 705  000 tonnes de coton (25 % de croissance). Le déficit du compte courant a été financé par une combinaison d’IDE (60 %) et d’emprunts extérieurs (40 %). Le déficit budgétaire est passé de 2,9 % du PIB en 2017 à 4,8 % en 2018 à la suite d’une baisse des recettes importante et imprévue. Les recettes fiscales ont diminué de 15,2 % en 2017 à 11,9 % en 2018. Cette performance médiocre est principalement attribuable à de sérieux manquements des contribuables à l’approche de l’élection présidentielle. Les pertes de recettes, dues à l’effet limité des hausses des cours internationaux du pétrole sur les prix du marché intérieur et à l’augmentation des exonérations fiscales, ont également joué un rôle. La hausse de la fraude fiscale est aussi associée à l’insécurité croissante et aux attaques terroristes récurrentes, qui ont entraîné la fermeture de bureaux de douane dans les zones affectées. Pour remédier à ce problème, le gouvernement a décidé de réduire les dépenses de plus de 2 % du PIB. La réduction des dépenses a touché principalement l’investissement public dans tous les secteurs, y compris la santé et l’éducation. Le déficit budgétaire a été essentiellement financé par l’émission d’obligations régionales, car le pays a souffert d’une baisse des financements extérieurs. La dette publique est passée de 36,1 % en 2017 à 38,3 % du PIB en 2018. Le risque de surendettement extérieur reste modéré. 47 Les politiques monétaires et de change du Mali sont gérées par la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), qui maintient un régime de change fixe entre le franc CFA et l’euro. Les réserves internationales de la BCEAO se sont stabilisées en 2018, soutenues par d’importantes émissions d’euro-obligations par la Côte d’Ivoire et le Sénégal. Les réserves auraient atteint 4,1 mois d’importations potentielles de biens et services fin 2018, contre 3,8 mois fin 2017. À la suite d’une politique monétaire plus stricte entre début 2017 et fin juin 2018, la BCEAO a réduit de 24 % son refinancement auprès des banques, tandis que les tensions régionales sur les liquidités ont été provisoirement tempérées par les émissions d’euro-obligations. Le taux de change effectif réel (TCER) est resté globalement stable et conforme aux fondamentaux, avec des mouvements qui ont généralement suivi ceux du taux de change euro/USD. La poursuite de la consolidation budgétaire parmi les pays membres est nécessaire pour soutenir les réserves régionales. On estime que le taux d’extrême pauvreté a diminué de 46,3 % en 2015 à 42,7 % en 2017. La forte production agricole, y compris le coton, et l’essor du secteur tertiaire ont probablement accru la consommation des ménages ruraux et induit une nouvelle baisse de la pauvreté. PERSPECTIVES La croissance devrait être autour de 5 % à moyen terme, ce qui correspond au taux de croissance potentiel. La croissance du secteur primaire devrait ralentir pour revenir à sa tendance à long terme, mais rester élevée et contribuer substantiellement à la croissance. Le secteur tertiaire sera l’un des principaux moteurs de la croissance, soutenu par les secteurs des télécommunications et des transports et, dans une moindre mesure, par le développement du commerce et des services financiers. Le déficit du compte courant extérieur devrait rester supérieur à 7 % du PIB à moyen terme. Le déficit devrait être financé à la fois par les IDE et les emprunts publics. Les perspectives budgétaires restent difficiles et de gros efforts d’assainissement sont nécessaires à court terme, en particulier du côté des recettes. La baisse des performances enregistrée en 2018 rend difficile la réalisation de l’objectif de 3 % du PIB fixé par l’UEMOA en matière de déficit budgétaire. Le taux de pauvreté devrait diminuer régulièrement à condition que l’expansion robuste de l’économie malienne se poursuive et que la menace sécuritaire ne se propage pas plus au sud. Selon ces hypothèses, le PIB par habitant augmentera, parallèlement à une réduction du taux de pauvreté à environ 40,2 % en 2019. RISQUES ET DÉFIS La fragilité de la situation sécuritaire demeure le risque le plus important et le plus imprévisible. Il est essentiel d’empêcher la propagation de l’insécurité dans les régions méridionales du pays, car un tel évènement aurait un coût important, affectant les secteurs agricole et minier et provoquant profondément un ralentissement économique. Un choc climatique négatif pourrait réduire la croissance agricole, aggraver l’insécurité alimentaire et créer des tensions inflationnistes, augmentant ainsi les besoins en dépenses sociales. Compte tenu des réserves budgétaires limitées du Mali, ces risques pourraient conduire à une sous-exécution budgétaire des projets d’investissement public et à une accumulation des arriérés. Une détérioration importante et inattendue des termes de l’échange pourrait aggraver davantage les déséquilibres budgétaires et extérieurs et ralentir la croissance. Le Mali reste tributaire de ses ressources naturelles et doit impérativement diversifier davantage ses exportations pour parvenir à une stabilité macroéconomique. 48 D’autres risques externes dépendent de la réduction potentielle du financement des donateurs et de la baisse des IDE. Enfin, sur le plan régional, un nouveau durcissement de la politique monétaire par la BCEAO pourrait ralentir le crédit au secteur privé et alourdir le coût de la dette intérieure. Le service public de l’énergie (EDM) représente un risque budgétaire majeur, alors que l’augmentation de la dette intérieure pourrait peser sur les finances publique. 49 PRINCIPAUX INDICATEURS MACROÉCONOMIQUES (2016-2022) 2016 2017 2018(e) 2019(p) 2020(p) 2021(p) 2022(p) Économie réelle (variation annuelle en pourcentage, sauf indication contraire) PIB (nominal, en milliards FCFA) 8 308 8 929 9 557 10 221 10 950 11 727 12 564 PIB réel 5,8 5,4 4,9 5,0 4,9 4,8 4,8 Déflateur du PIB 1,4 2,0 2,0 1,9 2,1 2,2 2,2 Inflation des prix à la consommation -1,8 1,8 2,0 2,0 2,1 2,2 2,2 (moyenne) Comptes budgétaires (pourcentage du PIB, sauf indication contraire) Dépenses totales 22,3 22,9 20,0 23,5 24,1 24,4 24,6 Recettes totales 16,7 18,4 14.2 18,5 19,1 19,3 19,6 Dons 1,6 1,6 1,0 2,0 2,0 2,1 2,1 Solde public général -3,9 -2,9 -4,8 -3,0 -3,0 -3,0 -3,0 Dette publique 35,9 35,4 37,3 37,5 38,1 38,7 39,3 Dette intérieure 11,0 11,0 12,5 13,3 14,1 14,9 15,5 Comptes monétaires sélectionnés (contribution à la croissance de la masse monétaire) Crédit au secteur gouvernemental 10,4 3,9 7,4 5,0 — — — Crédit à l’économie 13,7 6,3 9,4 8,6 — — — Masse monétaire (M2) 7,3 7,9 17,0 7,7 — — — Balance des paiements pourcentage du PIB, sauf indication contraire) ( Solde du compte courant -7,2 -5,9 -7,4 -7,2 -7,4 -7,2 7,0 Importations 40,3 38,9 38,9 38,1 36,7 35,3 34,0 Exportations 23,5 23,1 23,1 21,5 19,9 18,9 18,0 Investissements directs étrangers 1,8 2,7 2,7 2,7 2,7 2,7 2,7 Dette extérieure 25,0 24,4 24,8 24,2 24,0 23,8 23,9 Termes de l’échange 15,5 -1,3 -4,9 -3,1 0,2 1,1 0,9 Autres postes pour mémoire PIB nominal en USD (milliards) 13,3 16,1 17,4 18,4 19,8 21,2 22,7 Source : Estimations (2016-2018) et projections (2019-2022) des personnels du ministère des Finances, du FMI et de la Banque mondiale, décembre 2018 Remarque : (e) = estimation ; (p) = projection 50 niger La croissance a affiché une tendance à la hausse, atteignant 5,2 % en 2018. Le déficit budgétaire a diminué, tandis que le déficit du compte courant extérieur a augmenté. Les perspectives sont positives et la croissance devrait atteindre en moyenne 6 % par rapport à 2019-2021. La pauvreté devrait diminuer entre 2018 et 2020. Les risques de détérioration incluent les fluctuations des prix des matières premières, les aléas climatiques et l’insécurité. Les inégalités de genre, la forte croissance démographique et le faible développement humain restent des défis majeurs. ÉVOLUTIONS RÉCENTES La croissance a atteint 5,2 % en 2018 (1,4 % par habitant), en hausse par rapport à 4,9 % en 2017, légèrement au-dessus de son taux de croissance potentiel de 4,9 %. La croissance a été principalement tirée par les secteurs des services, de la construction et de l’agriculture. La demande globale a été soutenue par une augmentation de la consommation privée et des investissements publics et privés alors que le Niger se prépare à accueillir le Sommet de l’Union africaine de 2020. L’inflation a augmenté de 2,4 % en 2017 à 2,7 % en 2018. Cette légère hausse de l’inflation a été entraînée par des anticipations liées à la mise en place de nouvelles taxes. Le déficit du compte courant extérieur (dons inclus) s’est creusé, passant de 16,2 % du PIB en 2017 à 19,2 % du PIB en 2018. Cette détérioration est principalement due à la hausse des importations liées aux investissements privés et publics. Le déficit du compte courant était financé en majeure partie par les investissements privés étrangers et des prêts-projets. Le déficit budgétaire (base d’engagement, dons inclus) est passé de 5,7 % en 2017 à environ 4,4 % du PIB en 2018 en raison d’une augmentation des recettes totales, y compris les dons de 2,8 % du PIB. Les recettes fiscales à elles seules ont augmenté de 2,0 % du PIB. Les recettes non fiscales ont également augmenté grâce à des facteurs exceptionnels, notamment la vente de licences de télécommunication et une prime à la signature d’un contrat pétrolier. L’augmenta- tion des recettes totales a compensé l’augmentation des dépenses totales de 1,8 % du PIB, résultant en grande partie d’une augmentation des projets financés par des sources extérieures, ce qui a également entraîné une augmentation des importations, comme mentionné ci-dessus. Les dépenses récurrentes ont diminué de 0,5 % du PIB grâce aux efforts soutenus déployés pour contrôler les salaires et les traitements. La dette publique a augmenté de 49,2 % du PIB en 2017 à 50,5 % du PIB en 2018, dont 34 % constituaient la dette extérieure. Le risque de surendettement général et extérieur du Niger est modéré. Les politiques monétaires et de change du Niger sont gérées par la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), qui maintient une parité fixe entre le franc CFA et l’euro. Les réserves internationales de la BCEAO se sont 51 stabilisées en 2018 grâce aux importantes émissions d’euro-obligations émises par la Côte d’Ivoire et le Sénégal. Les réserves auraient atteint 4,1 mois d’importations potentielles de biens et services à fin 2018, contre 3,8 mois à fin 2017. Malgré le resserrement de la politique monétaire du début 2017 à fin juin 2018, la BCEAO ayant réduit de 24 % son refinancement auprès des banques, les tensions sur les liquidités régionales ont été temporairement atténuées par les émissions d’euro-obligations. Le taux de change effectif réel (TCER) est resté globalement stable et conforme aux principes fondamentaux, les mouvements ayant généralement suivi ceux du taux de change euro/dollar. Un assainissement budgétaire continu entre les pays membres est nécessaire pour soutenir les réserves régionales. Le Niger a réalisé des progrès en termes de réduction de la pauvreté, le taux e pauvreté passant d’environ 50,3 % à 45,7 % (en utilisant le seuil de pauvreté international de 1,90 USD par jour) entre 2005 et 2014. Cela suggère que l’extrême pauvreté a pu s’aggraver au cours de la même période, les 10 % les plus pauvres connaissant une croissance négative de la consommation. Parallèlement, le coefficient de Gini s’est nettement détérioré, passant de 28,6 % en 2005 à 33,6 % en 2014. PERSPECTIVES Les perspectives restent globalement positives. La croissance du PIB devrait atteindre en moyenne 6 % entre 2019 et 2021, principalement grâce au secteur agricole, et en particulier aux efforts supplémentaires déployés par le gouvernement pour améliorer la productivité. La poursuite des investissements visant à réduire le déficit d’infrastructure de l’électricité et des TIC,dans lequel le secteur privé jouerait un rôle plus important,notamment par le biais de partenariats public-privé et d’investissements étrangers directs, permettra également de soutenir la croissance. Enfin, la construction d’un oléoduc destiné à l’exportation de pétrole brut entraînera une hausse des investissements. Face à la diminution temporaire des pressions sur l’offre et aux efforts visant à préserver la stabilité de la politique monétaire dans le cadre de l’UEMOA, l’inflation devrait s’établir autour de 2 %. Les réserves de l’UEMOA devraient représenter environ 4,6 mois d’importations d’ici 2022, au moment où les pays membres mettent en œuvre des mesures d’assainissement budgétaire et que la compétitivité extérieure s’améliore. Le déficit du compte courant extérieur (y compris les dons) devrait rester élevé et représenter en moyenne 20 % du PIB entre 2018 et 2021. Alors que les exportations devraient enregistrer de bonnes performances et que les exportations officielles à destination du Nigeria et les exportations de pétrole et de produits non pétroliers continuent de progress- er, elles devraient être compensées par des investissements publics et privés à forte intensité d’importations. Le solde du compte courant ne devrait s’améliorer qu’en 2022 avec le début des exportations de pétrole brut et la disparition progressive des importations liées à des projets. Le déficit du compte courant devrait continuer à être principalement financé par des IDE et des prêts-projets. Le déficit budgétaire global devrait atteindre le critère de convergence de l’UEMOA de 3 % du PIB d’ici 2020, soit un an après les autres pays membres. La mobilisation des recettes restera le principal moteur, mais la rationalisation des dépenses récurrentes y contribuera également, et les contraintes en matière de dépenses, en particulier celles relatives aux investissements, constitueront une deuxième ligne de défense en cas de baisse des recettes. Les investissements prévus pour accroître la productivité agricole et élargir l’accès à l’énergie et aux technologies numériques dans les zones rurales devraient permettre de réduire la pauvreté. En utilisant le seuil de pauvreté international (1,90 USD par jour exprimé en PPA), la pauvreté devrait reculer de 2,5 points de pourcentage par rapport à 2018-2020. 52 RISQUES ET DÉFIS Les facteurs de risques qui pourraient entraîner une détérioration des perspectives économiques ne sont pas négligeables. L’économie reste exposée aux aléas des conditions météorologiques et aux fluctuations des prix des matières premières. La situation de la sécurité régionale est préoccupante. L’économie nigérienne reste donc vulnérable à un ralentisse- ment prolongé si ces chocs se concrétisent. En outre, la lenteur des réformes structurelles ne permettrait pas au Niger de progresser à un rythme soutenu vers une croissance stable et une stabilité macroéconomique. Des lacunes dans la réalisation d’investissements productifs dans les secteurs des transports, de l’énergie, des télécommunications et de l’agriculture auraient des effets négatifs sur la croissance à moyen terme. De même, ne pas réussir à élargir l’assiette fiscale et/ou à maîtriser les dépenses et améliorer l’efficacité des investissements publics mettrait en péril la viabilité des finances publiques et la soutenabilité de la dette. Les inégalités de genre, la forte croissance démographique et le faible développement humain restent aussi des défis majeurs. 53 PRINCIPAUX INDICATEURS MACROÉCONOMIQUES ET FINANCIERS (2015-2021) 2015 2016 2017 2018(e) 2019(p) 2020(p) 2021(p) Économie réelle (variation annuelle en pourcentage, sauf indication contraire) PIB réel 4,0 4,9 4,9 5,2 6,5 6,0 5,6 PIB hors ressources 4,5 4,9 4,5 5,3 5,4 6,0 6,1 Volume des exportations -4,5 -2,0 13,5 2,1 11,8 10,3 5,4 PIB réel par habitant 0,1 1,0 1,0 1,3 2,6 2,1 1,5 Volume des importations 7,3 -14,1 10,2 12,7 16,4 13,8 -5,8 Déflateur du PIB 0,5 0,2 -0,1 3,3 2,4 1,9 2,0 Inflation des prix à la consommation 1,0 0,2 2,4 2,7 2,4 2,1 2,0 (moyenne annuelle) IPC en fin de période 2,2 -2,2 4,8 2,9 2,2 2,0 2,0 Comptes budgétaires PIB en pourcentage, sauf indication contraire) ( Total recettes et dons 23,4 20,5 21,4 22,7 24,3 25,2 24,9 Total dépenses et prêts nets 32,5 26,3 26,8 28,5 28,4 28,0 27,1 Dépenses courante 15,5 14,0 14,1 13,6 13,5 13,1 12,8 Dépenses en capital 17 12,3 12,7 14,9 14,9 14,9 14,4 Solde global (base d’engagement, dons inclus) -9,1 -6,1 -5,7 -4,4 -4,5 -3,0 -2,7 Comptes monétaires sélectionnés (variation annuelle en pourcentage de la masse monétaire début de période) Masse monétaire 4,6 8,7 -4,9 12,0 7,4 8,5 7,5 Crédit au secteur non gouvernemental 6,3 3,8 5,3 13,1 12,5 11,7 11,2 Balance des paiements en pourcentage du PIB, sauf indication contraire) ( Solde du compte courant externe (dons inclus) -20,5 -15,5 -16,2 -19,2 -21,1 -23,3 -19,4 Importations 27,4 22,6 24,7 26,3 28,4 30,2 27,0 Exportations 15,1 13,6 14,6 14,3 14,7 14,8 14,9 Investissement direct étranger 6,9 3,7 3,7 5,3 6,9 9,1 6,7 Total dette publique et dette garantie par l’État 41,6 43,7 49,3 50,5 50,8 49,8 48,3 Dette publique et dette extérieure garantie 30,3 32,6 32,4 34,0 34,9 36,1 36,6 par l’État Dette publique intérieure 11,4 11,1 16,8 16,5 15,8 13,6 11,8 Termes de l’échange (variation en pourcentage) -7,5 -4,4 -4,2 -1,7 -0,7 -1,7 0,1 Poste pour mémoire PIB (nominal - monnaie locale) 4 269 4 511 4 726 5 135 5 600 6 051 6 518 Source: Ministère des Finances, Niger ; Banque mondiale (2019) Remarque : (e) = estimation ; (p) = projection 54 TCHAD La situation économique s’est améliorée, même si la reprise reste faible. Le taux de croissance du PIB réel a atteint 2,6 % en 2018 grâce à la hausse des prix du pétrole et de la production agricole. L’amélioration du recouvrement des recettes et la baisse de la masse salariale se sont traduites par un excédent budgétaire. À moyen terme, les exportations pétrolières pourraient soutenir l’accélération de la croissance à 5 % environ, tout en renforçant l’équilibre budgétaire et le solde du compte courant. Toutefois, les fluctuations des prix du pétrole, l’insécurité et la vulnérabilité du secteur bancaire font peser des risques à la baisse. La pauvreté devrait reculer, mais à un rythme moins rapide en raison de la forte croissance démographique. ÉVOLUTIONS RÉCENTES L’économie s’est redressée en 2018 après deux années de profonde récession. Le taux de croissance est estimé à 2,6 % en 2018, grâce à la hausse des prix du pétrole, de la production pétrolière et de la production agricole. L’import- ant écart de production négatif commence à se réduire alors que la croissance du PIB converge vers son taux potentiel (1 %). La réduction de l’écart de production concorde avec l’accélération de l’inflation de l’IPC, qui a atteint 2,1 % en 2018, contre -0,7 % en 2017. Le secteur primaire (principalement l’agriculture et les sous-secteurs pétroliers) a contribué de près de 2 % à la croissance globale en 2018. En revanche, les contributions des secteurs secondaire et tertiaire se sont maintenues à 0,1 et 0,7 point de pourcentage, respectivement. Les progrès du secteur industriel indiquent une lente augmentation des investissements en capital. Dans le même temps, le secteur des services a bénéficié du dynamisme du secteur primaire et du remboursement d’arriérés par le gouvernement central. Le déficit de la balance courante extérieure a chuté de 5,1 % en 2017 à 4,2 % en 2018, grâce à la hausse des exportations de pétrole. Après une contraction en 2017, les importations ont augmenté de 1 % tandis que la consommation privée et l’investissement en capital ont également connu une hausse. Le compte financier s’est également amélioré grâce à la réduction du service de la dette auprès du principal créancier privé du Tchad (Glencore). Le gouvernement a poursuivi ses efforts d’assainissement budgétaire en mobilisant des recettes et en maîtrisant les dépenses récurrentes. Les recettes totales sont passées de 14,2 % du PIB en 2017 à 15,5 % en 2018, grâce à une augmentation des recettes pétrolières. La collecte des recettes non pétrolières a augmenté, car les impôts ont été payés via des banques commerciales et non pas versés directement au Trésor. Les dépenses totales sont restées stables, à environ 14,6 % du PIB en 2018, sous l’effet d’une baisse (hausse) importante de la masse salariale (dépenses d’investissement) de 6,5 (3,6) % du PIB en 2017 à 5,6 (4,4) % en 2018. Selon les estimations, le déficit budgétaire global devrait passer de -1,4 % du PIB en 2017 à un excédent de 0,8 % en 2018. En juin 2018, le Tchad a finalisé la restructuration de sa dette garantie par le pétrole auprès de Glencore. L’accord comprend un mécanisme de transfert de trésorerie assorti de paiements d’intérêts et d’amortissements proportionnels 55 aux revenus pétroliers disponibles. En conséquence, la dette publique a retrouvé une trajectoire viable caractérisée par un ratio nettement inférieur du service de la dette par rapport aux recettes. La dette publique s’est maintenue à 49,2 % en 2018. Le risque d’un surendettement extérieur reste élevé. En tant que membre de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), le Tchad a une politique monétaire conduite par la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC). Suite au choc pétrolier et à la chute brutale des réserves de change à 2,7 mois fin 2017, la BEAC a mis en œuvre des politiques monétaires plus strictes afin de reconstituer les réserves de change régionales et de stabiliser le secteur financier. La BEAC a éliminé les avances statutaires et relevé son taux directeur de 2,95 % en mars 2017 à 3,5 % en octobre 2018. La pauvreté et la vulnérabilité sont omniprésentes au Tchad. Selon la dernière enquête nationale auprès des ménages (2011), 29 % de la population vivent en dessous du seuil de pauvreté alimentaire, 47 % en dessous du seuil de pauvreté national, et 68 % sont considérés comme vulnérables. PERSPECTIVES Les exportations de pétrole devraient rester un moteur clé de la croissance à moyen terme. Par ailleurs, la privatisation de l’entreprise publique cotonnière devrait améliorer sensiblement la contribution du secteur agricole à la croissance. L’accélération de la croissance sera plus modérée en 2019, les cours du pétrole étant plus bas que prévu. Toutefois, la hausse escomptée de la production pétrolière devrait stimuler les investissements et les exportations en 2020, et générer une croissance du PIB réel d’environ 5,6 %. Une convergence vers le taux de croissance potentiel devrait entraîner un ralentissement de la croissance de 4,8 % d’ici 2021. La croissance des importations devrait s’accélérer et atteindre 4,1 % d’ici 2021, grâce à une hausse de la consommation et de l’investissement, bien que compensée par une croissance plus forte des exportations. Par conséquent, le déficit du compte courant devrait se stabiliser autour de 5 % du PIB d’ici 2021. Les réserves régionales de la CEMAC devraient atteindre environ 4,2 mois d’importations d’ici 2021, la BEAC continuant à resserrer sa politique monétaire et son financement exceptionnel. Le gouvernement devrait rationaliser davantage les dépenses courantes tout en renforçant les efforts de mobilisation des recettes. Ainsi, le solde budgétaire global devrait rester excédentaire et pourrait atteindre 1,2 % du PIB en 2021. L’accord avec Glencore et l’apurement des arriérés prévu réduiront le ratio de la dette publique par rapport au PIB de 49,2 % en 2018 à 37 % en 2021. Avec une solide croissance du PIB réel pour la période 2019-2021, la pauvreté devrait baisser de 40 à 38 % (en utilisant le seuil de pauvreté international de 1,90 USD par jour exprimé en PPA). Toutefois, avec une croissance démographique de 3,3 % par an, le nombre absolu de personnes pauvres restera stable, à environ 6,3 millions d’ici 2021. RISQUES ET DÉFIS La reprise économique au Tchad reste fragile et soumise à des risques importants. La volatilité des cours du pétrole fait peser des risques à la hausse et à la baisse sur l’économie. Le mécanisme de transfert de trésorerie avec Glencore permet d’atténuer l’incidence budgétaire de cette volatilité, puisque le remboursement de la dette augmente avec la hausse des prix du pétrole (et inversement). Une nouvelle baisse des liquidités bancaires et une nouvelle augmenta- tion potentielle des arriérés intérieurs accroissent la vulnérabilité du secteur financier. Une hausse possible de la masse salariale et de l’encours total de la dette pourrait réduire l’espace budgétaire à moyen terme. Enfin, les élections générales prévues pour le troisième trimestre de 2019 pourraient retarder d’importantes réformes politiques. Pour atténuer ces risques et réduire la pauvreté, le Tchad doit investir ses revenus pétroliers dans des secteurs stratégiques tels que les infrastructures, l’agriculture, l’éducation et la santé. 56 PRINCIPAUX INDICATEURS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS (2015–2021) 2015 2016 2017 2018(e) 2019(p) 2020(p) 2021(p) Économie réelle (variation annuelle en pourcentage, sauf indication contraire) PIB réel 2,8 -6,3 -3,0 2,6 3,4 5,6 4,8 PIB pétrolier 32,1 -11,2 -16,2 10,9 12,6 19,4 9,0 PIB non pétrolier -2,9 -6,7 -0,5 1 1,5 2,4 3,7 PIB par habitant (USD) 962,7 874,8 823,1 820 823,2 844,4 859,5 Déflateur du PIB (niveau) -8 -1,2 1,1 1,2 1,3 1,3 1,3 Inflation des prix à la consommation (moyenne) 3,7 -1,1 -0,7 2,1 2,6 3,1 3,0 Prix du pétrole Perspectives énergétiques mondiales (WEO) (USD/baril) 50,8 42,8 52,8 68,3 61,8 61,5 60,8 Prix tchadien (USD/baril)14 39,9 36,2 49,4 63,3 57,8 57,5 56,8 Production pétrolière (millions de barils) 47,5 44,4 35,9 39,8 44,8 53,5 58,5 Comptes budgétaires (pourcentage du PIB non pétrolier, sauf indication contraire) Dépenses (total) 22,9 18 18 18,3 18,3 18,4 18 Recettes et dons (total) 17,1 14,9 17,1 19,4 18,5 20 19,5 Solde public général (avec dons, base engagements) -5,8 -3 -1 1 0,2 1,6 1,5 Solde global (avec dons, base caisse) -4,5 -5,2 -2,5 -0,6 -0,4 0,9 0,8 Solde primaire non pétrolier (base engagements, hors dons) -9,7 -4,4 -3,8 -4,4 -4,1 -3,7 -3 Comptes monétaires sélectionnés variation annuelle en pourcentage, sauf indication contraire) ( Base monétaire -4,7 -7,7 -4,3 7,2 … ... ... Crédit au secteur privé 1,1 -2,7 -1,7 1,0 … ... ... Intérêts (taux directeur de la BEAC) 2,45 2,45 2,95 3,50 3,50 2,95 2,95 Secteur extérieur Exportations de biens et services (GNFS, -33,3 -23,1 25,0 14,6 7,7 10,7 9,1 IImportations de biens et services (GNFS, -24,7 -12,0 4,1 2,9 5,2 5,6 5,7 Termes de l’échange -38,3 -6,9 28,1 25,8 -0,1 -5,1 -4,2 Balance des paiements (pourcentage du PIB, sauf indication contraire) Solde du compte courant (avec transferts) -11,3 -13,0 -5,1 -4,2 -5,7 -4,9 -5,1 Réserves brutes (milliards USD, fin de 0,4 -0,3 0,0 0,1 0,3 0,5 0,7 Réserves brutes (au niveau régional, en 4,3 2.3 2,7 3,0 3,7 3,9 4,5 mois d’importation de biens et services) Dette extérieure 25,0 27,2 27,3 26,2 25,0 22,2 19,6 Taux de change (moyenne de la période) en USD/FCFA 591,2 592,7 592,7 580,9 — — — Postes pour mémoire : PIB nominal non pétrolier (milliards FCFA) 5 184 4 838 4 829 5 011 5 283 5 631 6 028 PIB nominal (milliards FCFA) 6 474 5 984 5 746 6 079 6 455 7 103 7 669 Sources : MFMOD Banque mondiale, FMI et autorités tchadiennes. Remarque : (e) = estimation ; (p) = projection 14 Le prix du pétrole tchadien correspond au prix du Brent moins une remise au titre de la qualité. 57