DEV32 French COMITE DU DEVELOPPEMENT NUMERO TRENTE-DEUX Problèmes de développement Communications faites à la 47e réunion du Comité du développement Washington, DC-27 septembre 1993 j I i ~ 'n.- > i~aç IMOYI j~-_ Problèmes de développement Communications faites à la 47e réunion du Comité du développement Washington, DC-27 septembre 1993 Comité ministériel conjoint des Conseils de Gouverneurs de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international sur le transfert de ressources réelles aux pays en développement (Comité du développement) Washington, D.C. Copyright (C 1993 Banque mondiale 1818 H Street, N.W. Washington, D.C. 20433, U.S.A. Tous droits réservés Fait aux Etats-Unis d'Amérique Premier tirage: novembre 1993 Le Comité du développement a été établi le 2 octobre 1974, en application de résolutions parallèles adoptées par les Conseils des Gouvemeurs du Fonds monétaire intemational (FMI) et de la Banque mondiale. Il est connu sous le titre officiel de Comité ministériel conjoint des Conseils des Gouverneurs de la Banque et du Fonds sur le trans- fert de ressources réelles aux pays en développement. Ce comité, qui est le seul organisme conjoint du FMI et du Groupe de la Banque mondiale à l'échelon ministériel, accorde une attention particulière aux problèmes que connaissent les pays en développement. Il constitue ainsi, dans les structures de coopération économique interna- tionale, un point de convergence pour l'élaboration d'une vue d'ensemble des diverses activités entreprises au plan international dans le domaine du développement, pour l'examen, dans les meilleurs délais et d'une façon ef- ficace, des problèmes de développement, et pour la coordination des efforts déployés au niveau international afin de faire face aux problèmes de financement du développement. Le Comité a pour mission de donner des avis et de faire rapport aux Conseils des Gouverneurs de la Banque mondiale et du FMI sur tous les aspects de la question générale du transfert de ressources aux pays en développe- ment, eu égard aux dispositions prises ou prévues entre les divers pays, notamment en-ce qui concerne les paie- ments au titre des échanges internationaux, les flux de capitaux, les investissements et l'aide publique au développement. Il fait des propositions, pour examen par les intéressés, concemant la mise en oeuvre de ses conclusions, et il examine de façon continuelle les progrès réalisés dans l'application de ses propositions. Les 22 membres du Comité, qui sont généralement des Ministres des finances, sont alternativement nommés, pour des périodes successives de deux ans, par les pays ou groupes de pays représentés aux Conseils d'adminis- tration de la Banque mondiale ou du FMI. Le Comité a à sa tête un Président, qui est choisi parmi ses membres et qui est secondé par un Secrétaire exécutif élu par le Comité. Pour plus de renseignements sur les origines du Comité et ce qu'il a accompli depuis sa création, voir la bro- chure intitulée Le Comité du développement: Origines et bilan, 1974-1990 (Washington, D.C.: Banque mondiale, 1991). ISBN 0-8213-2711-9 ISSN 0256-6117 TABLE DES MATIERES Avant-propos . ............................................. v 1. Note du Président du Comité du développement, M. Rudolf Hommes, Ministre des finances et du crédit public de la Colombie. 1 2. Rapport de M. Lewis T. Preston, Président de la Banque mondiale 7 3. Déclaration de M. Michel Camdessus, Directeur général du Fonds monétaire international .25 4. Déclaration du Président du Groupe des 24, M. Mohamed Imady, Ministre de l'économie et du commerce extérieur de la Syrie .33 5. Document de synthèse conjoint: Bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement .37 6. Document de synthèse conjoint: Réformes de la sécurité sociale et filets de protection sociale .61 7. Rapport sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement .85 8. Etudes complémentaires A. « Comment rendre plus efficace l'aide financière destinée aux réformes de politique économique », par Tony Killick, de l'Institut du développement outre-mer (ODI) .... ........... 105 B. « La réforme des systèmes de sécurité sociale et des programmes de protection sociale dans les pays en developpement », par Gary S. Fields (Université Cornell) et Olivia S. Mitchell (Université de Pennsylvanie) .... .......... 117 C. « Sécurité sociale et filets de sécurité sociale dans les pays en développement », par Collin Gillion, BIT .... ........ 125 9. Déclaration conjointe du Directeur général du FMI, M. Michel Camdessus, du Président de la Banque mondiale, M. Lewis Preston, et du Directeur général du GATT, M. Peter D. Sutherland .... ............ 137 10. Communiqué du Comité du développement, 27 septembre 1993 .... ....... 139 Appendice A Ordre du jour de la 47e réunion du Comité du développement ... 143 Appendice B Membres du Comité du développement (Liste des pays représentés par eux et liste des Administrateurs correspondants à la Banque mondiale et au FMI) ....... .................. 145 Appendice C Observateurs auprès du Comité du développement .... ...... 149 iii AVANT-PROPOS Le Comité du développement a tenu sa quarante-septième réunion à Washington le 27 septembre 1993. Deux points principaux figuraient à son ordre du jour: premièrement, le bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et ses conséquences pour les besoins de financement: deuxièmement. les réformes de la sécurité sociale et les filets de protection sociale. Avec le premier point, il s'agissait de poursuivre et d'élargir la discussion engagée en 1992 sur les flux et les transferts de ressources en faveur des pays en développement. La question des filets de protection sociale s'inscrivait également dans cette démarche. Les documents de synthèse produits conjointement par la Banque mondiale et le FMI et plusieurs études complémentaires d'experts indépendants ont fourni une base de discussion au Comité. En ce qui concerne le bilan de l'ajustement, les Ministres ont constaté que les pays à faible revenu qui persévéraient dans l'application de programmes d'ajustement vigoureux enregistraient de meilleurs résultats en matière d'objectifs de croissance et de développement que ceux qui faiblissaient dans leur résolution, ou ne s'étaient jamais engagés dans cette voie. Ils se sont donc félicités de l'élargissement du consensus politique sur des stratégies d'ajustement privilégiant la stabilisation et et l'ouverture au marché, alliées à la valorisation des ressources humaines et à la lutte contre la pauvreté. Ils ont souligné l'importance cruciale pour ces pays d'un appui financier extérieur et d'un allégement approprié de leur dette. L'expérience de l'Asie de l'Est, leur semblait-il, pourrait être utile, à certains égards, aux pays à faible revenu. S'agissant des réformes de la sécurité sociale, les Ministres ont examiné les modèles latino-américains et européens. Ils ont estimé qu'un sytème faisant appel à la fois au secteur public et au secteur privé serait approprié, mais que le dosage entre les deux pourrait varier selon les pays. Ils ont convenu que les filets de protection sociale devaient désormais faire partie intégrante des programmes d'ajustement et des politiques de lutte contre la pauvreté. Ils ont également souligné que les pays pauvres avaient besoin d'un appui technique et financier de la Banque mondiale et du FMI, ainsi que des bailleurs de fonds. Les Ministres ont encore pris note des progrès réalisés dans plusieurs autres domaines - processus de paix au Proche-Orient, impact sur les pays en développement des tendances récentes de l'économie mondiale, commerce international (y compris les négociations de l'Uruguay Round), stratégie de la dette et protection de l'environnement - comme mentionnés dans leurs rapports par le Directeur général du FMI et le Président de la Banque mondiale. Vu l'intérêt que suscitent ces sujets, les communications faites lors de cette réunion du Comité sont maintenant publiées (en trois langues - anglais, français et espagnol) à l'intention d'un public plus large. Peter Mountfield Secrétaire exécutif Octobre 1993 v NOTE DU PRESIDENT DU COMITE DU DEVELOPPEMENT, M. RUDOLF HOMMES, MINISTRE DES FINANCES ET DU CREDIT PUBLIC DE LA COLOMBIE Situation générale Nous nous réunissons à un moment difficile pour les pays en développement, spécialement pour les pays à faible revenu, dont traite justement l'un des principaux documents dont nous sommes saisis. La plupart d'entre nous, cependant, éprouvons des difficultés à maintenir une croissance capable d'élever le niveau de vie de nos populations. Nous observons avec admiration, et non sans envie, la réussite de certains pays d'Asie et nous aimerions pouvoir faire aussi bien qu'eux. Le document de M. Preston, déjà distribué, et le rapport de M. Camdessus exposeront quelques-uns des grands problèmes actuels. Peut-être le Comité voudra-t-il s'arrêter particulièrement sur cinq d'entre eux: a) L'économie mondiale sort très lentement de la récession. Même la reprise d'une croissance lente dans les pays industriels ne suffira pas à augmenter la demande des exportations traditionnelles des producteurs de produits de base pour qui, en général, les termes de l'échange se sont gravement détériorés ces dix dernières années. Le Comité intérimaire consacrera le plus clair de sa réunion du 26 septembre aux problèmes de la reprise de la croissance. Naturellement, ses travaux porteront surtout sur les pays industriels. Les pays en développement ne peuvent que bénéficier de l'expansion dans les pays industriels. Cependant, il y a, de toute évidence, des limites à l'effet de répercussion. A mon avis, le Comité aurait tort d'insister trop sur le besoin d'une relance mondiale pour aider les pays en développement. b) Les faibles taux de croissance dans les principaux marchés ont accéléré la tendance longue à la baisse des prix des produits de base, elle-même aggravée par la surproduction. Les produits de base seront l'objet des « Perspectives de l'économie mondiale » que la Banque mondiale publiera au printemps de 1994 et que le Comité décidera peut-être d'examiner à sa réunion de printemps. Les remèdes traditionnels de l'encadrement des marchés des produits de base (par le contingentement, la fixation des prix et la constitution de stocks) n'ont pas toujours réussi dans le passé. Beaucoup de pays, après la CNUCED et le Groupe des 24, se tournent aujourd'hui davantage vers l'utilisation des instruments de couverture contre l'instabilité des marchés pour protéger les pays en développement des mouvements de prix les plus violents. Il serait irréaliste d'espérer qu'un redressement des prix vienne rétablir rapidement les recettes d'exportation à leurs niveaux d'autrefois. c) Les perspectives d'aboutissement des négociations d'Uruguay sont à présent beaucoup plus encourageantes qu'à l'époque de notre précédente réunion. Gardons-nous néanmoins d'en exagérer l'impact sur les pays en développement, à court terme surtout. Pour les raisons déjà indiquées, les négociations n'aideront guère les pays producteurs de produits primaires; d'autre part, l'ouverture des marchés pour les biens manufacturés (spécialement les textiles et les chaussures) s'étalera sur de nombreuses années et, même alors, profitera 1 Note du Président du Comité du développement principalement aux pays qui ont déjà commencé à s'industrialiser. Certains pays à faible revenu risquent même de pâtir, dans le court terme, de la perte de leur accès préférentiel aux marchés existants. d) Les flux de ressources ont vivement augmenté durant ces toutes dernières années. Cependant, l'augmentation a été due en grande partie aux prêts bancaires et (dans une moindre mesure) au financement par obligations, qui, bien entendu, sont les uns et les autres sources d'endettement. L'expansion de l'investissement étranger direct s'est ralentie en 1992. La plupart de ces flux privés est allée à un petit nombre de pays. Si l'on considère, non plus les flux de ressources, mais les transferts nets (en tenant compte des remboursements de principal et des paiements d'intérêts), le tableau est même moins satisfaisant. Pour la majorité des pays, dont beaucoup parmi les plus pauvres, les transferts nets sont négatifs ou ne sont maintenus positifs que par des niveaux relativement élevés de financement concessionnel. Ces transferts, dans le cas des banques multilatérales, sont souvent négatifs, ce qui n'est pas surprenant pour des pays qui empruntent régulièrement depuis de nombreuses années, mais ces flux négatifs doivent être financés. Le remboursement de la dette bilatérale et commerciale, lorsque la réduction de la dette n'est ni justifiée ni possible, vient s'ajouter encore à ces charges. Plus d'un ministre des finances préoccupé par la gestion de trésorerie (c'est-à-dire les transferts) risque encore de rencontrer de graves problèmes, même lorsque les flux de ressources semblent être positifs. Modérons donc notre enthousiasme touchant le maintien de la tendance positive des flux de ressources globaux. e) Nous ne pouvons compter avec certitude, comme autrefois, sur l'augmentation des flux d'aide ou l'allégement de la dette pour faire l'appoint. Comme le souligne le document de M. Preston, les flux d'aide nets ont en fait diminué en 1992 et, dans l'immédiat, les perspectives d'augmentation ne s'annoncent pas favorables, tant à cause des contraintes budgétaires qu'en raison du désenchantement des donateurs. De nouveaux demandeurs apparaissent pour des ressources qui sont limitées tandis que de nouveaux besoins se font jour chez les bénéficiaires traditionnels. En outre, le climat ne paraît guère propice à de nouvelles réductions de la dette au-delà des accords déjà conclus. Le Comité doit considérer toutes ces évolutions avec réalisme. Le redressement de la situation n'est pas affaire de rhétorique. Ceux d'entre nous qui viennent de pays en développement savent que nous devons redoubler d'efforts pour augmenter la productivité de nos économies, pour financer une plus grande part de notre croissance avec nos ressources internes et pour poursuivre l'ajustement entrepris. C'est à nous et nous seuls qu'incombe cette responsabilité. Pays à revenu intermédiaire Les pays à revenu intermédiaire comme le mien devront allier volonté politique et savoir-faire technique, et compter sur la chance. Le problème (pour la plupart d'entre nous) est de maintenir le rythme de l'ajustement et de lui assurer un soutien politique jusqu'à ce 2 Note du Président du Comité du développement que les résultats s'imposent à l'évidence. Nous pouvons aussi faire davantage pour mobiliser l'épargne intérieure et pour attirer les capitaux étrangers dans le sens indiqué à notre précédente réunion. J'espère que le Comité trouvera le temps d'examiner un certain nombre des idées de suivi avancées à la réunion du ler mai. Pays à faible revenu: ajustement et financement Pour les pays à faible revenu, qui sont au centre de nos débats ce mois-ci, les problèmes sont beaucoup plus graves. Le document de travail sur le sujet expose clairement les résultats déjà obtenus dans le groupe des pays « en cours d'ajustement » en ce qui conceme la réduction des déficits budgétaires, la lutte contre l'inflation et l'amélioration de la situation des paiements courants. Dans la plupart de ces pays, le PIB conserve ou retrouve un rythme de croissance lent. Il en va différemment, cependant, pour le PIB par habitant: dans presque tous les cas, les populations sont plus pauvres qu'il y a dix ans. Les faibles taux de croissance que l'on observe actuellement ne rattraperont pas les taux d'accroissement démographique avant des années. Comme l'indique le plus récent Rapport sur le développement dans le monde, il est probable que l'accroissement démographique dans les pays les plus pauvres (notamment en Afrique) se stabilisera un jour, comme il l'a fait dans les pays à revenu intermédiaire d'aujourd'hui. En attendant, la crise des espérances déçues se poursuivra. On pourra atténuer, mais non éliminer, ce que cela a de néfaste, par un surcroît d'attention aux réformes internes. (Ceci est très étroitement lié au second thème de notre ordre du jour, à savoir la mise en place de filets de protection sociale, dont je traiterai dans un moment.) Pour les pays à faible revenu, en Afrique comme ailleurs, le mieux est cependant de chercher à accélérer la croissance. A ce sujet, des enseignements intéressants peuvent être tirés d'autres régions. Les versions préliminaires de l'étude de la Banque sur ce qui s'est passé en Asie de l'Est, à paraître prochainement, en proposent quelques-uns. Il faut avant tout, notamment, faire en sorte que l'inflation demeure faible - en gérant le déficit budgétaire - et maintenir des taux de change compétitifs. Les pays qui ont réussi ont beaucoup investi dans le capital humain. Ils ont créé des systèmes financiers efficaces et sûrs. Ils ont limité les distorsions de prix. Ils ont délibérément encouragé l'importation de techniques étrangères. Ils ont réfréné les partis pris hostiles à l'agriculture. Ils ont créé des institutions capables de promouvoir la croissance. Le bilan de leurs interventions sur les marchés semble mitigé: peu d'entre elles ont réussi, mais quand elles ont réussi, leur impact a été considérable. Dans tous les cas, les coûts ont été maintenus dans des limites raisonnables. La promotion de certaines industries a rarement donné de bons résultats. La répression des taux d'intérêt et l'orientation du crédit ont parfois eu de bons résultats. La stratégie d'encouragement des exportations qui a été appliquée est à la fois le type d'intervention qui a le mieux réussi et celui qui se prête sans doute le mieux à une transposition ailleurs. D'ici la fin de l'année, il sera possible de comparer ces enseignements avec les conclusions d'une autre grande étude de la Banque mondiale sur l'ajustement en Afrique 3 Note du Président du Comité du développement subsaharienne, qui doit paraître sous peu. Une comparaison très simple permet d'illustrer les résultats des deux études. Il y a trente ans, la Thaïlande était aussi pauvre que le Ghana. Aujourd'hui, elle est en passe de devenir un grand pays industriel. Le Ghana, malgré la réussite de sa politique d'ajustement jusqu'à une date récente, reste pauvre et son revenu par habitant est en baisse. Pourquoi le Ghana n'a-t-il pas eu une croissance aussi rapide que la Thaïlande? Pourquoi l'Afrique tout entière n'a-t-elle pas connu le succès des pays d'Asie de l'Est? Il y a bien sûr de nombreuses réponses à cette question simpliste. Et il est dangereux de transposer aveuglément une politique économique d'un pays dans un autre, où les circonstances peuvent être fort différentes. Il faut du temps pour mettre en place des institutions nouvelles adaptées à la culture du pays. Cependant, on aurait tort également de considérer automatiquement que ces transpositions sont condamnées à l'échec. Et dans la situation désespérée qui est actuellement celle de nombreux pays à faible revenu, il me semble que toutes les possibilités de ce type doivent au moins être envisagées. Du reste, un grand nombre des leçons tirées de l'expérience de l'Asie de l'Est trouvent déjà application dans les activités courantes de la Banque mondiale et du FMI. Mais je pense que la publication de l'étude sur l'expérience de l'Asie de l'Est, qui sera suivie plus tard dans l'année par celle sur l'Afrique, nous offre une occasion unique. Osons poser la question « Pourquoi pas un miracle asiatique en Afrique? ». Le Comité souhaitera peut-être se demander comment une étude systématique, pays par pays, des enseignements tirés de l'expérience de l'Asie de l'Est pourrait trouver application dans les pays à faible revenu d'Afrique et d'ailleurs. Il n'est pas nécessaire de tout faire d'un coup. Cela pourrait, par exemple, faire partie de l'examen régulier de la stratégie d'aide aux pays pour chacun des pays mentionnés dans le document dont nous sommes saisis. Les résultats pourraient aussi figurer dans la documentation destinée aux groupes consultatifs ou aux tables rondes du PNUD, afin que les donateurs puissent réfléchir à la meilleure direction à donner à leur action. Dans chaque cas, il faudra s'attacher à prendre les choses sur leur aspect positif: « Cette stratégie réussira-t-elle ici? ». Si la réponse préliminaire est « non », il faudra alors se demander « Pourquoi? Peut-on faire quelque chose pour qu'il en soit autrement? Comment faudrait-il l'adapter? ». Une grande part des travaux préparatoires a déjà été accomplie à l'occasion des deux études que j'ai mentionnées. Ce qu'il faut maintenant, c'est l'élan politique qui pourrait venir de notre comité. Il ne faudrait pas attendre d'une telle démarche des résultats spectaculaires ou immédiats. Mais, appliquée avec soin et réflexion, elle est susceptible de fournir des indications utiles dans divers pays. Au surplus, un grand nombre des leçons pourraient être appliquées tout aussi bien dans les pays à revenu intermédiaire. Si le Comité le souhaite, nous pourrions prier la direction et les Administrateurs de la Banque d'élaborer en commun une procédure à suivre pour l'application de ces enseignements de la manière que j'ai suggérée. Les Membres du Comité voudront peut-être aussi examiner le document supplémentaire soumis par M. Tony Killick de l'Overseas Development Institute de Londres. M. Killick admet que les choix fondamentaux qui fondent l'actuelle stratégie d'ajustement sont généralement bons. Il est plus réservé que les auteurs du document de travail quant aux 4 Note du Président du Comité du développement actuels succès de la stratégie. Il fait ressortir un certain nombre de contraintes qui gênent les gouvernements et les institutions dans son application et il formule plusieurs critiques précises quant à la manière dont opèrent les deux groupes d'acteurs. Il faudrait savoir si les Membres partagent ces vues et s'ils ont des suggestions concrètes à faire pour améliorer le fonctionnement de la stratégie. Filets de protection sociale et réforme des politiques sociales Beaucoup des questions examinées dans ce document sont nouvelles pour le Comité du développement, mais ont une importance considérable pour les Membres. Comme nous sommes, pour la plupart, ministres des finances, j'aimerais insister spécialement sur les questions connexes de l'impact macroéconomique et des conséquences budgétaires des dispositifs de sécurité sociale. Lorsque les régimes sont financés par les contributions des assurés, ils constituent un moyen de mobiliser l'épargne intérieure, et l'investissement des excédents prend une très grande importance. Comme l'indique le document, trop souvent jusqu'à présent, les régimes gérés par les pouvoirs publics ont été contraints d'investir dans des titres du secteur public qui se sont avérés d'une valeur douteuse, ce qui a contribué aux déficits qui pèsent aujourd'hui si lourdement sur la situation budgétaire de tant de pays. Au contraire, la fourniture des prestations sociales par le secteur privé crée des possibilités d'investissement rentable dans le secteur privé. Convenablement guidée, elle peut apporter une contribution précieuse au secteur le plus dynamique de l'économie. Mais, surtout lorsque les compétences en gestion des fonds sont limitées et que les moyens de réglementation font quasiment défaut (comme dans de nombreux pays en développement), la privatisation des régimes de retraite crée des risques graves pour les bénéficiaires. Il n'est pas facile de trouver la bonne réponse à ce dilemme, réponse qui sera probablement différente d'un pays à l'autre. J'aimerais ajouter cette question à celles dont la liste figure à la page (i) du document. Un aspect particulier relie le présent thème à la seconde moitié du document. Dans les pays où le régime de sécurité sociale ne s'applique essentiellement qu'aux salariés du secteur public, la privatisation des entreprises publiques laissera de nombreux travailleurs sans protection. Il faudra apporter un soin particulier au règlement de ce problème. Le document montre clairement qu'aucun modèle unique de réforme de la sécurité sociale ne conviendra à tous les pays en développement. Je propose néanmoins que nous concentrions notre attention sur la troisième question posée à la page (i): le dispositif à plusieurs niveaux décrit ici constitue-t-il un cadre utile pour l'examen des types de réforme appropriés aux différents pays? Ces questions générales concernant la conception des programmes d'assurance sociale et les filets de sécurité sont également examinées dans deux documents supplémentaires. Le premier est l'oeuvre du Bureau international du travail, de Genève, qui est bien informé sur ces systèmes, tant dans les pays industriels que dans les pays en développement. C'est un très précieux complément au document de travail. Le second est l'oeuvre de deux éminents 5 Note du Président du Comité du développement universitaires, les professeurs Fields et Mitchell. La Section 5 de leur document traite de l'ordre du jour de la réforme et énonce sept propositions générales que j 'ai trouvées particulièrement éclairantes. Mais la Section 6, consacrée au rôle des institutions internationales de développement, énumère quatre tâches précises que nous devrions, me semble-t-il, étudier attentivement. La première est un prolongement naturel de l'aide que la Banque aussi bien que le Fonds s'efforcent déjà de fournir (dans la limite des ressources disponibles) dans les cas appropriés. Mais les trois autres représentent quelque chose de nouveau. Le Comité souhaite-t-il faire siennes des propositions de cette nature et, si tel est le cas, quelle serait la meilleure manière de procéder? Je serais heureux de recueillir les réactions sur ce point durant la réunion. Le reste du document porte sur les « filets de protection sociale ». Il s'agit d'un problème qui n'est pas nouveau et qui est, depuis plusieurs années, un élément essentiel de la campagne de lutte de la Banque mondiale contre la pauvreté. Mais, pour la première fois, le document situe solidement le sujet dans le contexte de l'ajustement économique. Ces dernières années, l'accélération du rythme de l'ajustement dans de nombreux pays a conduit le FMI et la Banque à reconnaître qu'ils doivent chercher délibérément à prévoir des filets de protection sociale dans leurs programmes. L'expérience s'est accumulée dans ce domaine, mais aucun consensus général n'existe quant à la démarche à suivre ni quant aux solutions précises à appliquer dans chaque cas. Le document suggère que ces questions fassent l'objet d'un débat ouvert dont toutes les parties espèrent pouvoir tirer d'utiles leçons. Il ne faut pas s'attendre à voir des décisions concrètes émaner de ce premier échange de vues, mais je suis sûr que celui-ci se révélera utile. Rôle de la femme dans le développement Enfin, il nous faut prendre note de l'intéressant rapport intérimaire distribué par la Banque mondiale sur sa propre stratégie concernant les disparités entre hommes et femmes dans le développement. Comme le rapport le montre clairement, un examen approfondi de ce domaine est en cours aujourd'hui à la Banque et il en sera rendu compte au Conseil des Administrateurs en mars. Il pourrait en résulter une série de questions nouvelles dont les ministres seraient saisis lors d'une réunion ultérieure. En attendant, nous devons, me semble-t-il, féliciter la Banque des excellents travaux déjà accomplis et des nombreux projets actuellement en préparation. Nous devons aussi reconnaître que beaucoup plus reste à faire. Conclusion J'espère que ces réflexions préliminaires aideront à focaliser les débats du Comité à sa réunion du 27 septembre. 6 RAPPORT DE M. LEWIS T. PRESTON, PRESIDENT DE LA BANQUE MONDIALE AU COMITE DU DEVELOPPEMENT I. Introduction 1. Une fois encore, le Comité du développement est saisi de plusieurs questions d'importance majeure pour la communauté internationale. Parce que de nombreux pays doivent encore poursuivre et approfondir la réforme de leurs économies, le moment est venu, pour le Comité, de faire le point des progrès accomplis et des enseignements tirés des opérations d'ajustement dans les pays à faible revenu. Un tel bilan ne peut qu'aider à renforcer l'efficacité de la conception et de l'exécution des programmes futurs. 2. Il est opportun également que le Comité examine l'expérience des régimes formels de sécurité sociale et des filets de protection sociale. Dans un ensemble de pays très divers - où se côtoient pays à faible revenu en cours d'ajustement, pays à revenu intermédiaire d'Amérique latine et d'autres régions, et anciennes économies planifiées qui entreprennent aujourd'hui des réformes orientées vers le marché - la protection des pauvres, des personnes âgées et d'autres groupes vulnérables est l'une des principales préoccupations actuelles. 3. Le Rapport sur le développement dans le monde 1993, paru récemment, sur le thème Investir dans la santé, vient donc à point nommé. La protection de la santé humaine est un élément essentiel de tout dispositif de protection sociale; elle est en outre étroitement liée à l'objectif fondamental de réduction de la pauvreté poursuivi par la Banque. Le Rapport sur le développement dans le monde 1993 expose un programme d'action qui sauverait des millions de vies et économiserait des milliards de dollars dans les pays en développement. Il préconise une augmentation considérable des investissements dans diverses activités de santé publique (vaccination, services de santé en milieu scolaire, planning familial et nutrition, prévention du sida, et autres) et la fourniture d'un ensemble de services cliniques essentiels d'une haute efficacité par rapport à leur coût, dont le contenu précis varierait d'un pays à l'autre. Il décrit également les implications de ce programme d'action pour le volume et l'affectation de l'aide extérieure destinée au secteur de la santé. Je suis certain que vous trouverez un grand intérêt à ces analyses et recommandations de vaste portée. 4. Je vous invite aussi à considérer attentivement le rapport établi pour votre réunion sur les activités de la Banque en vue de renforcer le rôle de la femme dans le développement. Ce rapport montre que les questions touchant le rôle respectif des hommes et des femmes sont désormais bien mieux prises en compte au niveau des activités de prêt de la Banque, de ses études économiques et sectorielles, de ses travaux de recherche, de la formation de son personnel et de ses activités de diffusion, et de son organisation interne. La collaboration établie avec d'autres organismes, notamment des donateurs bilatéraux, a beaucoup contribué à ces progrès substantiels. Je suis absolument 7 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement résolu à renforcer encore l'action de la Banque dans ce domaine. Il reste beaucoup à faire pour assurer une participation pleine et entière des femmes au processus de développement, et la Banque compte bien intensifier encore sa contribution. 5. Le présent rapport passe en revue un certain nombre d'événements intéressant la Banque survenus depuis la précédente réunion du Comité, tenue le ler mai. Il indique l'état d'avancement de la ratification de la Dixième reconstitution des ressources de l'Association internationale de développement (IDA), des négociations pour la reconstitution des ressources du Fonds pour l'environnement mondial (FEM) et des discussions en vue de la prolongation du Programme spécial d'assistance aux pays à faible revenu d'Afrique subsaharienne qui entreprennent des réformes d'ajustement. Il fait également le point sur diverses initiatives récentes de la Banque pour renforcer l'efficacité de ses activités de prêt. Il contient en outre quelques brèves observations sur ses opérations de prêt dans plusieurs grands domaines qui présentent un intérêt particulier pour les Membres, notamment les prêts aux pays en transition de l'ancienne Union soviétique et d'Europe de l'Est, et les prêts pour l'environnement. IH. Evolutions récentes de l'économie mondiale: incidences sur les pays en développement 6. La conjoncture internationale dresse aujourd'hui encore des obstacles redoutables sur la voie du développement. Depuis la réunion tenue par le Comité au printemps dernier, les perspectives économiques des grands pays industriels se sont encore détériorées et la croissance prévisionnelle de leur production en 1993 a été révisée en baisse d'un demi à un point de pourcentage. Selon les projections actuelles, 1994 ne promet qu'une reprise paresseuse. La faiblesse de la demande dans les pays industriels a entraîné de nouvelles baisses des prix des produits primaires dont beaucoup de pays en développement dépendent pour l'essentiel de leurs recettes d'exportation. Les prix des produits de base sont aujourd'hui inférieurs d'environ 25 % en dollars constants par rapport à la moyenne de 1990. Ces évolutions compliquent beaucoup l'effort d'ajustement de nombreux pays. 7. Sur le front des échanges commerciaux, il ne reste plus beaucoup de temps pour mener à bonne fin les négociations d'Uruguay. Engagées voilà sept ans, ces négociations doivent s'achever le 15 décembre, qu'il y ait accord ou non entre les parties. Les dispositions concernant l'accès aux marchés dont les Etats-Unis, la Communauté européenne, le Japon et le Canada sont convenus au sommet de Tokyo, en juillet dernier, les ont certes relancées, mais de nouveaux développements menacent de briser à nouveau le mouvement. En outre, la décision prise à Tokyo de réduire ou d'éliminer les obstacles tarifaires et non tarifaires pour un vaste groupe de produits est subordonnée à l'issue d'autres négociations, dont certaines présenteront vraisemblablement des difficultés considérables. Les dispositions semblent encore fort éloignées dans plusieurs domaines 8 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement d'importance capitale - dont l'agriculture et les services. Une fois encore, j'invite instamment les membres du Comité à apporter leur ferme appui et à exercer l'influence dont ils disposent dans leurs capitales respectives en faveur d'une conclusion favorable des négociations d'Uruguay d'ici à la fin de l'année. La Banque continue à attacher la plus grande importance à pareille issue. Tout échec porterait gravement atteinte aux efforts de réforme des pays en développement qui sont nombreux à avoir pris de courageuses mesures pour libéraliser leur commerce dans l'attente que les grandes nations commerçantes en feraient autant. Agissons enfin pour qu'une expansion des échanges dynamise les efforts de développement et la croissance des économies du monde entier. 8. Dans le contexte général de croissance lente dans les pays industriels et d'incertitude pour les échanges commerciaux, il semble que les résultats des pays en développement au premier trimestre de 1993 aient été, globalement, à peu près conformes aux projections, bien que les taux de croissance régionaux restent largement disparates. Ainsi, la croissance réelle de la production dans beaucoup de pays d'Asie de l'Est et dans quelques-uns des pays d'Amérique latine a dépassé de loin les prévisions. En revanche, les pays exportateurs de pétrole du Moyen-Orient et les pays d'Afrique subsaharienne tributaires des produits de base ont eu apparemment des résultats inférieurs aux prévisions, en raison surtout d'une évolution défavorable des termes de l'échange. Les perspectives économiques des anciennes républiques soviétiques restent très incertaines, et il n'est guère probable que la baisse de leur production, quoique plus lente que ces dernières années, fasse bientôt place à une reprise. Dans certains pays d'Europe centrale et orientale, notamment en Pologne, les tendances paraissent toutefois nettement plus favorables. 9. L'environnement extérieur continuera d'exercer une forte influence sur les perspectives économiques des pays en développement. La prolongation de la récession dans les pays industriels, le ralentissement de la croissance du commerce mondial, l'utilisation plus fréquente de restrictions commerciales pour protéger les emplois nationaux, et le maintien de la pression à la baisse des prix des produits de base - qui sont autant d'éléments d'un scénario pessimiste plausible pour les 18 prochains mois - compromettraient gravement les réformes engagées par de nombreux pays à revenu faible ou intermédiaire. Le Comité devra suivre de près les tendances dans ces domaines. Im. Tendances récentes des transferts de ressources aux pays en développement 10. En 1992, selon des estimations préliminaires, les flux de ressources totaux nets (aide publique au développement, plus autres flux publics et ressources du secteur privé) du monde développé vers les pays en développement ont atteint le niveau record d'environ 9 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement 127 milliards de dollars (à prix et taux de change constants) . (Voir le tableau Annexe 1). Ce chiffre marque une augmentation de 16 % par rapport à 1991. Cette forte hausse tient presqu'entièrement au gonflement des flux privés, en particulier des prêts bancaires internationaux. 11. L'augmentation globale des flux privés - qui sont passés de 51,8 milliards de dollars en 1991 à 72,6 milliards de dollars en 1992 - témoigne largement du succès des réformes entreprises par plusieurs pays en cours d'ajustement. Cependant, seul un nombre relativement petit de pays ont bénéficié de cette augmentation. Les pays à faible revenu (hormis la Chine et l'Inde) ont obtenu une légère augmentation des prêts bancaires, mais n'ont guère reçu d'autres financements privés, tandis que les flux privés vers les pays les plus pauvres - principalement, mais non exclusivement, en Afrique subsaharienne - se situent aujourd'hui à des niveaux négatifs. En outre, l'instabilité de certains flux privés, et les difficultés qui pourraient en résulter pour la gestion macroéconomique interne de certains pays destinataires, ne laissent pas d'inquiéter. Tout bien considéré, et malgré ces inquiétudes, l'augmentation globale des transferts de ressources privées est un phénomène hautement positif. 12. Les flux d'origine publique ont en fait diminué en 1992, passant de 57,5 milliards de dollars en 1991 à 54,1 milliards de dollars en 1992 (à prix et taux de change constants). Le volume de l'aide publique au développement (APD), qui a représenté près de 80 % du total des flux publics nets, revêt une importance particulière. Les flux nets d'APD se sont réduits en 1992, passant de 43,7 milliards de dollars à 42,5 milliards de dollars. En outre, les perspectives immédiates ne semblent pas favorables pour de nombreux donateurs. Alors que certains ont déjà comprimé leurs budgets d'aide, d'autres risquent de leur emboîter le pas quand ils auront terminé l'examen de leurs programmes d'aide et de leurs incidences budgétaires. Le Japon fait notablement exception, qui a récemment annoncé son intention d'augmenter ses décaissements d'APD en 1993-97 de 50 % par rapport à la période quinquennale précédente. I Les chiffres mentionnés aux paragraphes 10 à 12 proviennent du Système de notification de la dette à la Banque mondiale. ils diffèrent à plusieurs égards des statistiques desflux de ressources diffusées par le Comité d'aide au développement (CAD) de I 'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). L'OCDE/CAD inclut dans ses statistiques des pays que la Banque ne classe pas parmi les pays à revenu faible ou intermédiaire et englobe certaines catégories de flux qui n'entrent pas dans la base de données de la Banque. Les chiffres calculés par la Banque correspondent à 116 pays à revenu faible ou intermédiaire qui notifient les mouvements de la dette extérieure décrits dans les Tableaux de la dette internationale, tandis que les données de l'OCDE/CAD portent sur 147pays. Quant aux catégories deflux, I'OCDE/CAD englobe lesflux à court terme, les dons d 'assistance technique et les dons des organisations non gouvernementales, qui ne figurent pas dans les données du Système de notification de la dette à la Banque. 10 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement 13. Les évolutions récentes du volume de l'aide sont inquiétantes en ce que de nombreux pays à faible revenu restent massivement tributaires de l'aide concessionnelle pour le financement extérieur de leurs objectifs de développement. En outre, sous l'effet des opérations de maintien de la paix et de l'aide humanitaire, les ressources limitées disponibles à des conditions concessionnelles font l'objet de demandes croissantes qui menacent de réduire la part des fonds allouée aux programmes de développement à plus long terme. Beaucoup de pays sont soumis à de graves contraintes budgétaires, mais l'aide ne représente partout qu'une petite partie des dépenses publiques, et il faudra faire preuve d'une volonté politique suffisante pour que la lenteur de la croissance dans les pays donateurs ne devienne pas le prétexte facile d'une réduction des budgets d'aide. L'aide concessionnelle continuera à jouer un rôle vital aux lendemains de la guerre froide. Progrès dans la réduction de la dette 14. L'allégement du fardeau de la dette supporté par de nombreux pays lourdement endettés reste un moyen essentiel de faire en sorte que ces pays disposent de ressources extérieures suffisantes à l'appui de leurs efforts de développement. De nouveaux progrès sont intervenus depuis mon dernier rapport au Comité. 15. Il faut relever, en particulier, une accélération de l'usage fait du Fonds de désendettement des pays exclusivement IDA pour atténuer le poids de la dette commerciale extérieure de ces pays. Depuis la dernière réunion du Comité, une nouvelle opération a été conclue pour la Bolivie, par laquelle 20,5 millions de dollars procurés par le Fonds et par d'autres donateurs ont permis de réduire de 170 millions de dollars l'encours de la dette éligible. Le nombre total des opérations a ainsi été porté à trois pour l'exercice 93 (les deux autres pays bénéficiaires étant le Guyana et l'Ouganda) et des dons ont été accordés à cinq autres pays pour préparer des opérations (Albanie, Nicaragua, Sao Tomé-et-Principe, Sierra Leone et Zambie). A ce jour, le montant total des dettes commerciales extérieures éteintes grâce aux opérations de réduction de la dette soutenues par le Fonds est proche de 623 millions de dollars de principal. Sept autres pays sont actuellement en contact avec l'IDA en vue de bénéficier des mécanismes du Fonds. 16. Le Conseil des Administrateurs de la Banque a approuvé la prolongation de l'existence du Fonds jusqu'au 31 juillet 1995. Le montant initial des ressources affectées à ce mécanisme était de 100 millions de dollars, financés par un prélèvement sur le revenu net de la BIRD pour l'exercice 89. Les opérations soutenues par le Fonds ont bénéficié en outre d'un important soutien financier public bilatéral. Le Fonds ne dispose plus que d'environ 3,7 millions de dollars de ressources non engagées. Etant donné l'augmentation des demandes des pays admissibles, les Administrateurs de de la Banque ont récemment recommandé au Conseil des Gouverneurs de reconstituer les ressources du Fonds à hauteur de 100 millions de dollars par prélèvement sur le revenu net de la BIRD pour l'exercice 93. 1 1 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement 17. Toujours dans le domaine de la réduction de la dette, cinq accords de rééchelonnement sont intervenus au Club de Paris depuis la réunion du Comité tenue le ler mai. Le Bénin, le Burkina Faso et le Guyana ont obtenu le bénéfice des « conditions de Toronto améliorées » applicables aux pays à faible revenu lourdement endettés; le Pérou a obtenu un rééchelonnement similaire à celui accordé à plusieurs autres pays à revenu intermédiaire lourdement endettés; enfin, le Costa Rica a rééchelonné ses arriérés aux conditions conventionnelles. En outre, la République dominicaine a commencé à effectuer des paiements d'intérêts mensuels sur sa dette à moyen et à long terme envers les banques commerciales et l'on prévoit la conclusion d'un accord global de réduction de la dette avec ses banques commerciales créancières d'ici au 31 décembre prochain. La Jordanie aussi a récemment conclu un accord de principe sur la réduction de sa dette envers les banques commerciales. 18. Ces accords marquent de nouveaux progrès bienvenus vers la réduction de l'endettement qui a entravé la croissance et le développement de tant de pays pendant la majeure partie de la dernière décennie. Beaucoup de pays à faible revenu et de pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, surtout mais non exclusivement en Afrique subsaharienne, continuent cependant d'éprouver de graves difficultés de service de la dette. Sans doute faudra-t-il leur consentir de nouvelles réductions allant bien au-delà de ce qu'ils ont déjà obtenu de leurs créanciers. C'est là un problème que le Comité du développement devrait suivre en permanence. IV. Banque mondiale et IDA : transferts de ressources et efforts actuels de mobilisation de ressources A) Engagements de prêt Banque/IDA lors de l'exercice 93 19. Dans le contexte général de l'évolution des flux de ressources qui vient d'être décrite, j'ai le plaisir d'informer les Membres que les décaissements bruts de la BIRD et de l'IDA ont globalement représenté 18,0 milliards de dollars pendant l'exercice 93, contre 16,5 milliards de dollars durant l'exercice 92. Pour la seule BIRD, ils se sont chiffrés à 13,0 milliards de dollars (1,4 milliard de plus qu'au cours de l'exercice précédent) et pour l'IDA, à 5,0 milliards de dollars (environ 150 millions de plus). Les décaissements nets BIRD/IDA ont augmenté d'environ 10 % entre les deux exercices. Les nouveaux engagements de prêt de la BIRD et de l'IDA envers les pays en développement ont atteint le total sans précédent de 23,7 milliards de dollars pour l'exercice 93. Le chiffre correspondant pour l'exercice 92 était de 21,7 milliards de dollars. Au cours de l'exercice clos le 30 juin dernier, les engagements de la BIRD ont représenté 16,9 milliards de dollars pour 122 projets et ceux de l'IDA 6,8 milliards de dollars pour 123 projets. Alors que la Banque s'efforce d'élever la qualité de ses projets 12 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement en cours d'exécution par des mesures qui devraient accélérer les décaissements (voir les paragraphes 41 à 50), il importe qu'elle ne le fasse pas aux dépens de ses nouveaux prêts pour de bonnes opérations. B) Note sur les prêts aux pays de l'ancienne Union soviétique et d'Europe de l'Est 20. La majeure partie du surcroît d'engagements de l'exercice 93 est allée aux pays de l'ancienne Union soviétique et d'Europe de l'Est. Le total des prêts à ces pays est passé de 1,8 milliard de dollars durant l'exercice 92 à 3,3 milliards de dollars durant l'exercice 93, et le nombre des projets de 11 à 26. Au cours du dernier exercice, la Banque a renforcé sa capacité de faire face efficacement et à temps aux grands défis que pose le processus historique de transformation économique en cours dans ces pays. 21. La Fédération de Russie est devenue membre de la Banque en juin 1992 et, en un an (exercice 93), les engagements de la Banque en sa faveur ont atteint environ 1,4 milliard de dollars. Le programme de prêt a commencé par un prêt de réhabilitation pour soutenir les premières phases du processus de réforme entrepris par la Fédération; sont venus ensuite des services d'assistance technique et un prêt à l'appui de la réforme du secteur pétrolier. En Pologne, l'accélération du programme de réforme s'accompagne d'une expansion rapide du secteur privé. Pour soutenir la privatisation, la réforme du secteur financier et la restructuration, le Conseil de la Banque a approuvé lors de l'exercice 93 une série d'opérations d'ajustement représentant 750 millions de dollars, qui a porté à 900 millions de dollars le total des engagements de l'exercice au profit de la Pologne. L'augmentation de l'aide est devenue aussi particulièrement importante dans les pays baltes, où les prêts de réhabilitation accordés par la Banque ont soutenu les premières étapes de l'ajustement. 22. Certains signes positifs sont apparus récemment dans la région. La Fédération de Russie a entrepris la mise en oeuvre d'un programme de stabilisation pour réduire l'inflation, soutenu par le FMI au titre de sa nouvelle Facilité pour la transformation systémique. Des mesures sont en cours pour poursuivre la libéralisation des prix et du commerce extérieur dans le secteur énergétique, et pour réduire les subventions massives aux importations. Le programme de privatisation se poursuit à vive allure; jusqu'à 5.000 moyennes et grandes entreprises pourraient être privatisées d'ici à la fin de l'année. L'initiative annoncée à Tokyo en juillet par le Groupe des sept pour renforcer le soutien financier apporté à la Fédération de Russie est conçue de manière à coincider avec l'amélioration des politiques intérieures de la Fédération, et la Banque accélère ses activités à l'appui du programme. 23. Des programmes de stabilisation ont été mis en place au Bélarus, au Kazakhstan et au Kirghizistan, avec le soutien de la Facilité pour la transformation systémique. La 13 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement Banque prévoit d'apporter son concours aux programmes de stabilisation et aux mesures de réforme structurelle qui les accompagnent en accordant des prêts de réhabilitation. Le programme de stabilisation de l'Albanie se révèle efficace. L'inflation a été ramenée aux environs de 1 % par mois et la croissance agricole a repris, en grande partie grâce à la privatisation. La Banque a soutenu rapidement cet effort par de petits projets ciblés pour l'agriculture, la remise en état de l'infrastructure et la mise en place de filets de protection sociale. Dans les Etats baltes, la production s'est stabilisée et l'inflation a été réduite fortement. La Banque prévoit de soutenir les efforts de ces pays par des projets qui financeront l'octroi de crédits au secteur privé naissant et la remise en état d'infrastructures, en vue notamment d'économies d'énergie. Le Conseil de la Banque a approuvé en juin l'octroi à l'Ukraine d'un prêt de 27 millions de dollars destiné au développement des institutions. L'objectif est d'aider le gouvernement à appliquer des réformes économiques et à renforcer des institutions essentielles à l'instauration d'une économie de marché. 24. Si la BIRD conserve une vaste capacité de prêt pour répondre aux besoins financiers probables des pays en transition et de ses emprunteurs de plus longue date du monde en développement, l'aptitude du Groupe de la Banque à répondre aux besoins pressants de ses membres à faible revenu dépendra fondamentalement du volume des ressources concessionnelles qui seront mises à sa disposition. La reconstitution de plusieurs mécanismes d'aide concessionnelle améliorerait grandement les flux de ressources vers les pays à faible revenu. Trois cas sont examinés spécialement ici: la Dixième reconstitution des ressources de l'IDA, le Fonds pour l'environnement mondial (FEM) et le Programme spécial d'assistance (PSA) aux pays à faible revenu d'Afrique subsaharienne qui entreprennent des réformes d'ajustement. C) Dixième reconstitution des ressources de l'IDA : rapport sur l'avancement du processus de ratification 25. Dans mon rapport au Comité à sa réunion de printemps, j'avais eu le plaisir d'annoncer que 34 pays donateurs s'étaient mis d'accord sur un montant total de 13 milliards de DTS (environ 18 milliards de dollars) pour la Dixième reconstitution des ressources de l'IDA. J'avais souligné, cependant, la nécessité de prendre rapidement les mesures parlementaires et autres nécessaires à l'entrée en vigueur d'IDA-10, faisant valoir que celle-ci devrait intervenir dès l'été 1993 pour éviter de perturber le fonctionnement de l'IDA. 26. Ce but n'a pas encore été atteint. Au 1er septembre, 11 donateurs représentant environ 52 % du total des contributions des donateurs avaient officiellement notifié leurs contributions à l'IDA (Allemagne, Australie, Canada, Corée, Danemark, Japon, Nouvelle-Zélande, Norvège, République tchèque, Royaume-Uni, et Suède). Nous sommes 14 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement extrêmement reconnaissants aux donateurs qui ont déjà fait le nécessaire pour exécuter leurs engagements. Cependant, comme l'entrée en vigueur de l'opération est subordonnée à la réception de notifications de donateurs représentant 80 % des contributions, la Dixième reconstitution des ressources de l'IDA n'a toujours pas pris effet. 27. Bien que, durant la période d'IDA-9 (exercices 91-93), de nombreux bénéficiaires de l'aide de l'IDA aient avancé considérablement vers la mise en place de conditions propices à une croissance économique plus forte et plus durable, il leur reste encore un long chemin à parcourir. Tous ces pays ont besoin du soutien ininterrompu de la communauté des donateurs, y compris l'IDA. En outre, des ressources sont nécessaires pour aider les nouveaux bénéficiaires de l'IDA et ceux dont les programmes sont actuellement réactivés et pour permettre à l'Association d'élargir la portée sectorielle de ses opérations, et en particulier de faire une plus grande place aux projets concernant l'environnement. Aussi est-il essentiel que la Dixième reconstitution entre en vigueur aussitôt que possible. J'invite instamment les Membres à tout faire pour favoriser la conclusion rapide du processus de ratification et, le cas échéant, l'obtention des approbations parlementaires requises. 28. Fort heureusement, l'IDA a pu éviter d'interrompre ses opérations de prêt grâce au système d'accès anticipé aux contributions qui est entré en application le ler juillet dernier. A ce titre, l'IDA peut engager un tiers de la contribution totale des donateurs participant au système. En août, ses Administrateurs l'ont également autorisée à engager par anticipation 800 millions de DTS par an au titre des sommes qui lui seront remboursées durant la période de la Dixième reconstitution. Ces moyens aideront l'IDA à continuer de fonctionner malgré l'entrée en vigueur tardive d'IDA-10. Toutefois, la situation dans laquelle se trouvent aujourd'hui les pays à faible revenu n'exigent rien de moins que l'aide d'une IDA fonctionnant à plein. D) Les activités de la Banque mondiale dans le domaine de l'environnement et la reconstitution des ressources du Fonds pour l'environnement mondial (FEM1 29. Le Fonds pour l'environnement mondial (FEM), géré conjointement par le PNUD, le PNUE et la Banque mondiale, est, lui aussi, un mécanisme de financement concessionnel très important pour appuyer les activités entreprises dans des pays à faible revenu qui contribueront à la réalisation des objectifs environnementaux mondiaux. Les paragraphes 32 à 35 ci-dessous décrivent la situation actuelle du Fonds, après un bref exposé des activités de prêt et autres de la Banque mondiale dans le domaine de l'environnement. 30. Depuis la Conférence des Nations-Unies sur l'environnement et le développement (CNUED), comme je l'ai indiqué dans mon précédent rapport au Comité, la Banque a 15 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement accéléré ses activités pour aider les pays membres à s'attaquer à leurs problèmes d'environnement. Le nombre de prêts et crédits Banque/IDA à l'appui d'une meilleure gestion de l'environnement a augmenté fortement au cours de l'exercice écoulé où le total des prêts destinés à des projets exclusivement environnementaux a atteint le chiffre sans précédent de 2,0 milliards de dollars pour 24 opérations. En outre, 30 autres projets approuvés durant l'exercice 93 comprennent des composantes environnementales. Le Conseil des Administrateurs de la Banque a approuvé des prêts ou crédits à l'appui de sept projets comportant environ 1,3 milliard de dollars pour la lutte contre la pollution, 11 projets totalisant 526 millions de dollars pour la gestion des ressources naturelles et six projets impliquant 173 millions de dollars pour le renforcement des institutions dans le domaine de l'environnement. En outre, la Banque s'attache à intégrer la prise en compte de l'environnement à tous les aspects de ses activités de prêt et autres. Un rapport qui sera bientôt publié (The World Bank and the Environment: FY93) décrit en détail les efforts accrus de la Banque pour apporter une aide aux pays dans le domaine de la gestion de l'environnement, pour évaluer et réduire les effets défavorables des projets qu'elle finance, pour renforcer les synergies positives entre développement et environnement, pour relever les défis environnementaux mondiaux, et pour renforcer les ressources humaines et les moyens institutionnels à sa disposition pour s'attaquer aux questions d'environnement dans toute leur complexité. 31. Depuis la CNUED, la Banque s'efforce d'élargir sa collaboration et sa coopération internationales en matière d'environnement. Elle joue un rôle actif au sein de la nouvelle Commission du développement durable qui a tenu sa première réunion - très fructueuse - à New York en juin. En outre, la Banque a participé à la mise en place du Comité interinstitutions du développement durable et continuera de jouer un rôle important dans les efforts de ce nouvel organe pour améliorer l'efficacité de la suite donnée à la CNUED au sein du système des Nations-Unies. 32. Les activités du FEM tiennent une place majeure dans le renforcement de la coopération internationale pour le règlement des problèmes environnementaux mondiaux. L'objectif est d'aider les pays en développement à supporter les coûts supplémentaires imputables au lancement de projets qui contribueront à la protection de l'environnement mondial. Le FEM a été choisi comme mécanisme de financement provisoire pour les conventions sur la diversité biologique et sur les changements climatiques. La phase pilote du FEM s'est ouverte au début de 1991. En juin 1993, 727 millions de dollars avaient été engagés pour 113 projets acceptés ou en cours de réalisation par les trois agents d'exécution. Ces fonds se répartissaient comme suit: 468 millions de dollars pour 53 projets d'investissement gérés par la Banque; 242 millions de dollars pour 55 projets d'assistance technique et de recherche du PNUD; et 17 millions de dollars pour cinq projets relevant du PNUE. 33. Comme le FEM a engagé la totalité de ses fonds de base, des discussions se poursuivent depuis mars en vue de la reconstitution de ses ressources pour la phase 16 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement suivante de ses activités. Elles se déroulent simultanément avec des échanges de vues sur les modalités appropriées de gestion, de vote, et d'intervention du Fonds. Le processus de reconstitution des ressources a officiellement commencé à la Réunion des participants tenue à Beijing (Chine) en mai dernier et les négociations continueront à se dérouler en parallèle avec celles sur la réorganisation des structures. 34. Les participants à la réunion de Beijing ont discuté des ressources à mettre à la disposition de la nouvelle phase du FEM. Beaucoup de donateurs se sont prononcés en faveur d'une reconstitution de deux à trois milliards de DTS (environ 2,8-4,2 millions de dollars) pour une période de trois à cinq ans à compter de juillet 1994. L'évaluation de la phase pilote qui sera prochainement achevée jouera un rôle important dans la détermination du volume des ressources de la deuxième phase du FEM. 35. Je ne doute pas qu'un accord satisfaisant interviendra sur la restructuration du Fonds. Je me félicite du soutien que les donateurs ont déjà apporté au FEM et je les engage vivement à décider du niveau des ressources pour la prochaine phase et à régler les autres questions en suspens dès que possible. Associé à la pleine mise en vigueur d'IDA-10, un renouvellement substantiel des ressources du FEM aiderait les pays en développement à atteindre leur objectif d'un développement durable tout en protégeant aussi l'environnement mondial. C'est pourquoi, je prie instamment les Membres d'apporter leur appui à une reconstitution substantielle et rapide des ressources du FEM doté de nouvelles structures. E) Programme spécial d'assistance (PAS) en faveur des pays à faible revenu d'Afrique subsaharienne qui entreprennent des réformes structurelles 36. Pour ce qui est de l'Afrique, chacun sait que la plupart des pays à faible revenu de la région souffrent énormément depuis le début des années 80. La croissance moyenne de 37 pays à faible revenu d'Afrique subsaharienne a été de 1,6 % durant la période 1981-86 et de 2,4 % en 1987-92. Cependant, pendant la même période 1987-92, les pays africains qui ont appliqué sans désemparer leurs programmes d'ajustement sont parvenus à une croissance moyenne d'environ 4 % par an. Néanmoins, le taux annuel moyen d'accroissement démographique étant d'environ 3,1 % par an, cette situation a de nombreuses conséquences défavorables - comme la diminution des revenus par habitant et une forte augmentation tant absolue que relative de l'emprise de la pauvreté. Tout en persévérant dans l'application d'une vaste gamme de réformes économiques, beaucoup de pays de la région doivent faire davantage pour maîtriser leur expansion démographique s'ils veulent améliorer durablement les revenus par habitant. 37. Les insuffisances des politiques nationales et des capacités institutionnelles des pays d'Afrique ont contribué à la diminution de la croissance économique et à la montée de la pauvreté observées ces 20 dernières années, lesquelles ont été encore aggravées par une 17 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement conjoncture économique internationale difficile - caractérisée notamment par de fortes baisses des prix des produits de base, un alourdissement du fardeau de la dette et les effets défavorables de la récession de pays industrialisés. Cependant, beaucoup de pays à faible revenu d'Afrique subsaharienne ont profondément réformé leurs politiques macroéconomiques, leurs politiques de change et du commerce extérieur, leurs politiques des prix internes, ainsi que d'autres aspects majeurs de leurs économies. Les donateurs ont réagi à ces initiatives ces dernières années en augmentant substantiellement les transferts nets de ressources, surtout de type concessionnel. 38. Depuis 1987, à l'initiative de la Banque, 17 donateurs soutiennent le Programme spécial d'assistance (PAS) aux pays à faible revenu surendettés qui appliquent des programmes d'ajustement. Ce programme vise à mobiliser des aides à la balance des paiements qui puissent être rapidement décaissées; il est actuellement dans sa deuxième phase, couvrant les années 1991 à 1993, pour laquelle les donateurs se sont engagés à fournir quelque 7,0 milliards de dollars de cofinancements et de financements coordonnés en vue d'aider à satisfaire les besoins de financement externe des 27 pays d'Afrique subsaharienne actuellement admissibles. De son côté, l'IDA a accordé 2,9 milliards de dollars de crédits d'ajustement. Bien que globalement les résultats soient inégaux, et que les progrès restent lents et difficiles, cette aide a permis à beaucoup de pays admissibles d'amorcer un net mouvement de reprise, qu'il s'agisse de la croissance du PIB, du niveau de l'investissement ou des exportations. Il leur reste toutefois à vaincre d'énormes obstacles pour soutenir cet effort et il leur sera impossible de le faire sans le maintien de substantiels apports extérieurs. 39. Le Programme spécial d'assistance a contribué de manière importante à la formation d'un consensus entre les donateurs et les bénéficiaires sur les priorités d'action, à la mobilisation de ressources additionnelles, et à la coordination de l'aide fournie. Réunis en octobre 1992, les donateurs ont reconnu que le PSA avait été un mécanisme efficace et se sont déclarés prêts à soutenir une nouvelle phase, qui couvrirait la période 1994-1996. Lorsqu'ils se rencontreront à Paris le mois prochain, ils examineront les objectifs et les priorités d'une troisième phase, y compris la possibilité d'ajouter le financement de programmes d'investissements sectoriels à la fourniture de ressources à décaissement rapide à l'appui des balances des paiements. Ils examineront aussi les ressources nécessaires à cette troisième phase et annonceront le montant de leurs contributions. De nombreux pays de la région commencent à recueillir concrètement les fruits des réformes accomplies. Ce ne serait certainement pas le moment de diminuer les concours extérieurs. Je ne doute pas que les donateurs du Programme spécial d'assistance pensent de même. J'espère qu'à la présente réunion du Comité du développement, les Ministres appuieront fermement l'apport de substantielles ressources supplémentaires aux pays réformateurs dans le cadre d'une troisième phase du Programme spécial d'assistance. 40. Il est important de souligner que beaucoup des enseignements tirés des opérations d'ajustement s'appliquent également aux pays à faible revenu non africains et que ceux-ci, 18 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement en s'engageant sur la voie de réformes devront relever les mêmes défis, avec des besoins de financement du même ordre. Cet aspect est bien mis en évidence dans le document sur l'ajustement dans les pays à faible revenu établi par les services de la Banque et du FMI pour la présente réunion du Comité. La communauté internationale doit continuer à suivre de près les besoins de financement extérieur de iojj les pays à faible revenu qui procèdent à des réformes, et y répondre en offrant des volumes d'assistance suffisants à des conditions appropriées. Cela dit, l'immensité des problèmes auxquels sont confrontés les pays à faible revenu d'Afrique subsaharienne est telle qu'ils ne pourront s'y attaquer avec efficacité que si leurs efforts de réforme restent soutenus par un volume substantiel d'apports extérieurs concessionnels. Les donateurs ont beaucoup fait pour répondre aux besoins financiers de ces pays au cours de la décennie écoulée, et je suis sûr qu'ils ne vont pas relâcher leur effort. V. Efficacité du développement et rôle de la Banque mondiale 41. Pour que les pays en développement continuent à progresser vers la réalisation de leurs objectifs de croissance durable, de réduction de la pauvreté et de protection de l'environnement, il est essentiel qu'ils puissent compter sur des financements externes d'un volume suffisant. Cependant l'efficacité avec laquelle les ressources sont fournies par les donateurs et utilisées par les destinataires fait l'objet d'une plus grande attention. Les contraintes qui pèsent de plus en plus rigoureusement sur le volume des ressources d'origine publique ont incité plusieurs institutions bilatérales et multilatérales à rechercher comment tirer un meilleur parti de ces ressources au profit du développement. 42. La Banque mondiale est aux tous premiers rangs dans ce domaine. A la réunion du Comité tenue le ler mai, j'ai exposé dans leurs grandes lignes les mesures prises pour améliorer la gestion du portefeuille de la Banque et donc la performance des projets en cours d'exécution. Ces dispositions se fondaient sur les conclusions et recommandations du rapport remis à l'automne dernier par le Groupe d'étude sur la gestion du portefeuille. 43. Après des échanges de vues avec les Administrateurs de la Banque, la direction a présenté un aperçu des nouvelles étapes de l'action engagée par la Banque pour améliorer la performance de son portefeuille, en indiquant les dispositions concrètes correspondantes, la répartition des responsabilités et le calendrier fixé. Ces recommandations ont été examinées et approuvées par le Conseil le 9 juillet. Le plan d'action, c'est-à-dire les nombreuses mesures précises et contrôlables que prendront le personnel et la direction de la Banque en coordination étroite avec les actionnaires et les emprunteurs, repose sur l'idée que le portefeuille de la Banque doit être géré à l'échelle du pays, et non pas simplement projet par projet. En conséquence, pour chacun de nos pays emprunteurs, c'est l'ensemble du portefeuille de projets financés par la Banque qui sera désormais pris en considération pour apprécier l'efficacité. Des examens annuels de 19 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement la performance du portefeuille auront lieu systématiquement pour tous nos grands emprunteurs et des examens réguliers, mais moins fréquents, seront effectués pour les plus petits emprunteurs. En outre, la performance du portefeuille et le programme de prêt seront explicitement liés. 44. La supervision des opérations en cours a déjà été renforcée et l'évolution se poursuivra dans ce sens. Les ressources de la Banque affectées à la supervision ont augmenté de 16 % durant l'exercice 92 et de 8 % au cours de l'exercice 93, une nouvelle hausse de 12 % étant prévue pour l'exercice 94. Chaque projet en portefeuille comportera désormais un plan d'exécution clair permettant d'en suivre l'avancement. Pour les projets réputés « à problèmes », des plans d'action spécifiques seront arrêtés conjointement avec les emprunteurs et, le cas échéant, avec les autres cofinanciers. 45. On portera une plus grande attention à la qualité des projets nouveaux. A ce titre, il s'agira notamment de s'assurer que la conception des projets est compatible avec les capacités locales disponibles pour en assurer l'exécution et l'exploitation; de veiller à ce qu'existent dans le pays lui-même un sentiment de propriété et un véritable engagement envers les projets financés; de faire davantage pour associer les parties prenantes locales à la conception et à l'exécution des projets, et en particulier pour assurer la participation des pauvres aux activités les concernant. En outre, les risques et les incertitudes des projets feront l'objet d'une analyse plus rigoureuse. 46. Les autres mesures envisagées comprennent le renforcement du rôle du Département de l'évaluation rétrospective des opérations, et des modifications de la politique du personnel, spécialement pour recruter dans les domaines de compétences insuffisamment représentés et pour évaluer les critères de promotion et de comportement professionnel. Plusieurs facteurs génériques qui influencent la performance du portefeuille sont en cours d'examen, en vue notamment de simplifier les pratiques administratives, d'élargir le rôle des bureaux extérieurs dans la gestion du portefeuille et d'instituer une unité indépendante d'inspection pour renforcer les fonctions de supervision, d'audit et d'évaluation rétrospective. Nous informerons régulièrement le Conseil des Administrateurs de la Banque de l'avancement de ce programme d'action en lui présentant notamment une évaluation complète du degré d'application des diverses propositions et mesures d'ici au mois de juin 1994. 47. Nos évaluations de la performance du portefeuille nous ont notamment fait mesurer combien il importe de diffuser des renseignements à jour et pertinents sur ce que la Banque fait et envisage de faire. Une plus grande transparence du fonctionnement de la Banque devrait donner à ses actionnaires, pays développés comme pays en développement, la certitude qu'ils comprennent ses opérations et peuvent les soutenir résolument. Une plus grande ouverture s'impose pour expliquer les activités de la Banque aux diverses parties prenantes des opérations auxquelles elle prête son concours financier. D'un autre côté, les relations de confiance de la Banque avec ses emprunteurs reposent sur sa capacité 20 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement de préserver le caractère confidentiel de certains types de renseignements, et l'accès à certains documents doit être restreint à certains stades du processus de délibération interne afin que toutes questions puissent être ouvertement débattues à l'intérieur de l'institution. 48. Compte tenu de ces préoccupations, les Administrateurs de la Banque ont récemment approuvé une politique d'information bien plus ouverte. En conséquence, le volume des informations mises à la disposition du public sera sensiblement accru. Il sera plus facile de prendre connaissance d'un grand nombre des rapports établis par les services de la Banque, comme les rapports d'évaluation des projets, les études économiques et sectorielles préparées pour les divers pays, les résumés des rapports d'évaluation rétrospective, et les documents de politique sectorielle après leur approbation par le Conseil. En outre, la Banque publiera une description factuelle plus complète de chaque projet en préparation sous la forme de « fiches d'information » qui donneront à un stade plus précoce beaucoup plus de détails sur les opérations envisagées que ce n'était le cas jusqu'ici. Un Centre public d'information de la Banque mondiale sera créé en janvier 1994 et facilitera l'accès aux documents de la Banque dans les pays membres par l'intermédiaire d'un réseau informatique. 49. Ces diverses initiatives contribueront grandement à renforcer l'efficacité des activités de développement de la Banque. Cependant, le succès dépendra d'abord de l'action des emprunteurs. Le principal enseignement que nous apporte l'expérience est en effet que le développement relève avant tout de la responsabilité des pays en développement eux-mêmes. L'aide et les institutions extérieures ne peuvent que soutenir leurs efforts. En dernière analyse, tout ce qu'entreprend la Banque pour renforcer l'impact de ses opérations sur le développement ne peut réussir que dans la mesure où réussissent les efforts faits par ses emprunteurs pour s'aider eux-mêmes. Au surplus, ces efforts doivent porter sur la totalité des programmes nationaux d'investissement public- et non pas seulement sur ceux que la Banque aide à financer. 50. La Banque peut s'enorgueillir d'avoir, la première parmi les institutions internationales, entrepris l'examen critique - avec ses emprunteurs - de l'ensemble de ses activités, bien que cela l'ait exposée au jugement scrutateur de nombreux observateurs extérieurs. Je ne doute pas qu'à la suite de cette autocritique et des mesures prises en conséquence, la Banque s'affirmera comme une institution de développement plus efficace encore. VI. Conclusion 51. Le rapport que je viens de vous faire vous aura clairement montré l'ampleur des tâches à accomplir et le nombre de mesures décisives à prendre dans de nombreux 21 Rapport du Président de la Banque mondiale au Comité du développement domaines. Le Groupe de la Banque n'a cessé d'y travailler activement et amplement depuis la précédente réunion du Comité. Des progrès sont en cours pour procurer aux pays en développement davantage de ressources susceptibles de les aider à atteindre leurs grands objectifs de développement et pour rendre plus efficaces la fourniture et l'utilisation de ces ressources. Cependant, toutes les parties - pays industriels, pays en développement et membres de la communauté internationale - devront poursuivre leurs efforts pour garantir de nouveaux progrès. Les vastes transformations qui se produisent aujourd'hui dans le monde resteront inachevées tant qu'un plus grand succès ne sera pas obtenu dans la réalisation des objectifs de développement et que tous les pays, développés et en développement, ne seront pas parvenus à une intégration plus productive dans une économie mondiale prospère. Les mesures portées à l'attention du Comité dans le présent rapport sont autant de pas importants dans cette direction. 22 Tableau annexe 1. Apports nets totaux de ressources à long terme aux pays en développement / (Milliards de dollars, prix de 1992) Type de flux 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 V Financement public du développement 43,5 44,3 46,0 48,8 44,7 41,0 43,6 59,2 57,5 54,1 APD 27,1 27,0 33,4 35,8 39,0 35,8 37,4 44,6 43,7 42,5 Dons publics3/g 12,6 15,6 18,9 20,4 20,0 20,6 20,9 28,9 30,4 30,0 Préts concessionnels publics 14,5 11,4 14,5 15,5 18,9 15,2 16,6 15,7 13,3 12,5 Préts non concessionnels publics 16,4 17,3 12,6 13,0 5,7 5,2 6,2 14,6 13,9 11,6 Flux privés 50,6 40,3 41,0 29,4 31,7 44,2 42,0 43,1 51,8 72,6 Prêts privés 36,8 26,4 22,7 12,2 10,0 16,5 11,4 12,6 11,4 28,8 Investissement direct étrangerÉ/ 10,8 10,6 14,5 12,9 16,7 22,7 26,1 25,4 35,2 38,3 Dons privés_/ 2,9 3,3 3,8 4,3 4,9 5,0 4,5 5,1 5,2 5,5 FLUX NETS TOTAUX 94,1 84,6 87,0 78,2 76,4 85,2 85,7 102,3 109,4 126,7 Pour mémoire : Paiements d'intérêts 58,5 67,6 73,1 69,9 66,8 72,0 62,6 55,9 59,1 52,0 Bénéfices sur investissement direct étranger 14,9 13,6 14,3 13,1 13,8 14,1 15,4 14,5 11,4 18,9 Données connexes : tJ FMI - Flux netsW 14,0 5,8 -0,3 -3,2 -7,1 -6,4 -2,6 0,1 3,1 1,1 Dons de coopération techniquel/ 8,7 9,1 11,2 11,3 12,8 13,6 13,1 14,3 14,7 11,4 Investissements participatifs de portefeuiLley 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 3,9 4,0 7,6 8,1 Pour mémoire :pI Banque mondiale - Flux nets 7,1 7,7 7,0 7,3 5,9 3,3 3,1 5,3 2,5 0,1 IDA - Flux nets 2,9 3,2 3,7 4,0 4,6 4,3 3,8 4,3 4,2 4,9 1. Cent seize (116) pays en développement pour Lesquels des données figurent dans L'édition 1992-1993 des TabLeaux de La dette internationale. 2. Projections du Département de l'économie internationale, Division Dette et finances internationales, sauf pour Les flux nets du FMI, de La Banque mondiale et de ['IDA qui correspondent aux chiffres effectifs du Système de notification de la dette à la Banque mondiale. 3. Chiffres de L'OCDE (jusqu'à 1991 compris). 4. Hors dons de coopération technique 5. Chiffres du FMI sur Les balances des paiements, incluant les bénéfices réinvestis. 6. Comprend le Fonds fiduciaire, la Facilité d'ajustement structurel et la Facilité d'ajustement structurel renforcée du FMI. 7. Estimations des services de la Banque mondiale (disponibles seulement à partir de 1989), étabLies sur la base des opérations sur le marché déclarées et ne correspondant souvent qu'aux flux bruts. 8. Les chiffres des flux nets de la Banque mondiale et de l'IDA correspondent aux années civiles. Les chiffres historiques ne diffèrent des chiffres correspondant aux exercices budgétaires, plus largement diffusés, qu'en raison de la période d'agrégation différente. 1 i i i DECLARATION DU DIRECTEUR GENERAL DU FONDS MONETAIRE INTERNATIONAL AU COMITE DU DEVELOPPEMENT SUR LA SITUATION ECONOMIQUE MONDIALE AINSI QUE SUR LES TENDANCES ECONOMIQUES DANS LES PAYS EN DEVELOPPEMENT Alors que l'activité économique restera faible dans la majorité des pays industrialisés, la croissance devrait se poursuivre à un rythme assez soutenu dans le groupe des pays en développement en 1993-94 (voir tableau). Le dynamisme des importations qui en résultera pour ces derniers met en évidence la contribution décisive que les pays en développement peuvent apporter à la prospérité de l'économie mondiale. Cependant, les succès enregistrés par un nombre croissant d'entre eux contrastent fortement avec la précarité chronique de la situation de bon nombre des pays les plus pauvres, où le revenu réel par habitant a continué de baisser et est beaucoup plus bas aujourd'hui qu'il y a un ou deux ans seulement. Perspectives de l'économie mondiale Un grand nombre de pays en développement ont bénéficié récemment d'une amélioration de leur environnement économique extérieur: la baisse des taux d'intérêt, l'accroissement des entrées de capitaux et la poursuite de l'expansion du commerce intrarégional ont amorti les retombées négatives du marasme persistant de l'activité économique dans les pays industrialisés. Les pays les plus pauvres - et notamment les pays africains - continuent toutefois d'être handicapés par la baisse des cours des produits de base. Les perspectives de croissance pour le groupe des pays en développement devraient s'améliorer car les taux d'intérêt restent bas, l'activité économique se renforce dans les pays industrialisés et le commerce international se redresse. L'activité économique mondiale, médiocre cette année encore, devrait s'améliorer quelque peu l'année prochaine, suite à l'accélération de la croissance de la production, qui passerait de 2 1/4 % en 1993 à 3 1/4 % en 1994. La croissance économique a fléchi dans les pays industrialisés au premier semestre de 1993, après des résultats déjà modestes en 1992. On s'attend à un recul de la production en Europe continentale sur l'ensemble de 1993, et à une hausse minime au Japon. La reprise devrait s'accélérer dans le courant de l'année en Amérique du Nord et au Royaume-Uni, et s'affirmer progressivement dans la plupart des autres pays industrialisés en 1994. En revanche, l'activité économique devrait rester relativement vigoureuse dans les pays en développement, où l'on s'attend à ce que la production augmente de 6 % en 1993 et de 51/2 % en 1994, sous l'impulsion principalement du dynamisme des pays en développement d'Asie. Cependant, la croissance devrait demeurer faible dans de nombreux pays pauvres, notamment en Afrique subsaharienne. Dans les pays d'Europe centrale en transition vers le marché, la production devrait diminuer à nouveau, en moyenne, en 1993, mais bien moins que lors des années précédentes et augmenter, pour la première fois depuis 1988, l'année suivante. 25 Principaux indicateurs économiques (Variation annuelle en Pourcentage, sauf indication contraire) 1990 1991 1992 1993 1994 Monde Croissance du PIB réel 2,2 0,6 1,7 2,2 3,2 VoLume des échanges 4,5 2,4 4,6 3,0 5,0 Prix de produits échangés Combustibles 28,2 -17,0 -0,5 -8,4 3,3 Produits de base, combustibles exclus1 -7,7 -4,5 -0,2 -2,5 3,9 Produits manufacturés 9,0 -0,7 3,8 -2,6 2,0 LIBOR sur le dollar à 6 mois 8,4 6,1 3,9 3,5 4,1 PaYs industrialisés Croissance du PIB réel 2,3 0,5 1,7 1,1 2,2 Inflation 5,1 4,6 3,3 3,0 2,7 Croissance du volume des importations 4,5 2,5 3,7 1,2 3,4 Pays en développement Croissance du PIS réel 3,7 4,5 5,8 6,1 5,5 Inflation 65,4 35,7 38,8 43,8 34,7 Inflation (médiane) 10,2 11,4 9,4 6,9 5,4 Solde extérieur courant (en milliards de dollars) -12,1 -82,2 -62,4 -80,1 -84,6 Solde extérieur courant (en pourcentage des exportations) -1,2 -7,5 -5,2 -6,3 -6,0 Croissance du volume des exportations 6,4 8,1 9,5 9,4 9,2 Croissance du volume des importations 7,6 9,7 10,5 9,3 9,1 Termes de l'échange 2,1 -3,7 -1,2 -1,0 0,0 Valeur unitaire des exportations 6,4 -2,4 0,5 -1,1 2,3 Valeur unitaire des importations 4,3 1,4 1,7 -0,1 2,3 Dette (en milliards de dollars E.U.) 1292 1356 1390 1476 1527 Dette (en pourcentage des exportations) 126,2 124,5 116,3 115,6 107,4 Service de la dette (en pourcentage des exportations) 14,5 14,4 14,2 13,7 12,4 Par région Afrique Croissance du PIB réeL 1,9 1,6 0,4 1,6 2,6 Inflation 16,9 32,3 41,3 36,4 22,6 Solde extérieur courant (en pourcentage des exportations) -2,3 -4,4 -7,7 -9,7 -6,9 Croissance du voltume des exportations 5,8 1,9 2,1 0,1 0,0 Croissance du volume des importations 2,6 -2,7 4,8 -0,5 -2,5 Termes de l'échange 3,3 -5,6 -5,0 -2,9 0,4 Dette (en pourcentage des exportations) 219,8 230,3 226,4 241,5 235,4 Asie Croissance du PIB réel 5,7 6,1 7,8 8,7 7,1 Inflation 7,5 8,4 7,5 8,3 7,8 Solde extérieur courant (en pourcentage des exportations) -0,4 -0,2 -0,7 -2,7 -3,2 Croissance du volume des exportations 8,8 11,9 11,2 12,7 11,5 Croissance du volume des importations 8,7 11,7 12,2 13,5 12,3 Termes de l'échange -1,6 -0,2 1,2 -0,7 -0,1 Dette (en pourcentage des exportations) 67,5 66,1 61,0 62,1 57,7 Moyen-Orient et Europe Croissance du PIB réel 4,2 2,4 7,8 3,4 4,6 Inflation 23,9 24,0 23,3 22,7 21,3 Solde extérieur courant (en pourcentage des exportations) -0,6 -27,3 -7,1 -5,5 -5,1 Croissance du volume des exportations 1,4 3,1 8,4 6,9 6,9 Croissance du volume des importations 7,2 4,5 2,5 2,9 5,1 Termes de l'échange 14,1 -11,5 -3,4 -1,8 -0,6 Dette (en pourcentage des exportations) 125,4 135,4 130,5 133,2 122,4 26 Principaux indicateurs économiques (fin) (Variation annuelle en Pourcentage. sauf Indication contraire) 1990 1991 1992 1993 1994 Hémisphère occidentaL Croissance du PIB réel 0,3 3,3 2,5 3,4 3,5 InfLation 480,1 135,9 165,9 221,1 162,9 Solde extérieur courant (en pourcentage des exportations) -3,5 -11,1 -19,2 -20,4 -18,2 Croissance du voLume des exportations 5,9 4,7 8,5 4,1 6,7 Croissance du volume des irportations 7,6 17,8 16,9 4,5 5,8 Termes de l'échange -0,5 -4,2 -5,6 -0,5 0,9 Dette (en pourcentage des exportations) 256,9 259,5 252,8 249,7 238,1 Classification analytiaue Pays n'ayant Pas eu récemment des difficultés à assurer le service de leur dette Croissance du PIB réeL 0,2 2,1 2,1 2,9 3,7 InfLation 226,8 92,5 109,3 135,0 100,0 Solde extérieur courant (en pourcentage des exportations) -7,0 -10,5 -16,1 -16,9 -15,3 Croissance du volume des exportations 0,2 -1,0 5,9 4,8 6,8 Termes de L'échange 1,7 -5,0 -4,2 -1,2 0,9 Pays n'ayant Pas eu récemment des difficultés à assurer le service de leur dette Croissance du PIB réel 5,7 5,7 7,5 8,3 6,6 Inflation 9,7 10,9 10,8 10,7 9,7 Solde extérieur courant (en pourcentage des exportations) -2,0 -1,5 -1,7 -3,4 -3,4 Croissance du volume des exportations 9,2 11,0 11,9 13,3 11,3 Termes de l'échange -0,3 0,0 -0,1 -0,5 0,1 Exportateurs de combustibles Croissance du PIB réel 4,1 4,1 5,9 2,9 4,4 Inflation 17,1 16,9 17,5 16,3 12,1 Solde extérieur courant (en pourcentage des exportations) -0,0 -27,3 -16,0 -14,2 -11,7 Croissance du volume des exportations 4,6 4,5 8,6 5,0 7,5 Termes de L'échange 15,6 -12,0 -5,8 -1,9 -0,5 Exportateurs de produits de base. combustibles exclus Croissance du PIB réel 1,9 3,6 4,2 4,1 4,1 Inflation 184,9 88,2 45,4 39,4 28,0 Solde extérieur courant (en pourcentage des exportations) -12,5 -16,8 -26,2 -26,2 -24,3 Croissance du volume des exportations 12,5 3,7 5,5 5,6 5,6 Termes de l'échange -7,0 -3,5 -3,2 -2,0 1,1 Exportateurs de produits manufacturés Croissance du PIB réel 4,0 5,1 7,1 8,6 6,5 Inflation 94,2 43,1 58,2 73,2 58,0 Solde extérieur courant (en pourcentage des exportations) 0,9 1,9 1,6 -1,5 -2,4 Croissance du volume des exportations 5,9 11,0 11,7 12,3 11,0 Termes de L'échange -2,0 0,1 1,2 -1,0 -0,2 1 En dollars E.U. Moyennes pondérées en fonction de La part des pays ou groupes de pays en développement dans les exportations de produits de base en 1979-81. 27 Déclaration du Directeur général du FMI au Comité du développement Selon les projections, le volume du commerce mondial augmentera de 3 % en 1993, soit de l'h point de moins qu'en 1992, en raison surtout du fléchissement de la demande en Europe. L'accélération attendue de la croissance des pays industrialisés en 1994 devrait entraîner une expansion plus rapide du commerce. L'expansion continue des échanges entre les pays en développement a contribué à soutenir le commerce mondial, en dépit de la conjoncture maussade des pays industrialisés. En Asie, les exportations intrarégionales ont vu leur part dans le total des exportations s'accroître de façon particulièrement spectaculaire et elles ont retrouvé dans l'hémisphère occidental un niveau comparable à ceux observés avant la crise de la dette. La baisse de 1 ¼/4 % en 1992 des termes de l'échange de l'ensemble des pays en développement tient au léger tassement des prix des produits de base et du pétrole par rapport aux prix de leurs importations. En Asie, toutefois, la hausse des prix relatifs des exportations de produits manufacturés a permis une amélioration de 1 ¼/4 % des termes de l'échange en 1992. On s'attend à ce que les termes de l'échange des pays en développement enregistrent encore une détérioration de 1 % en 1993, suite à une baisse des prix des produits de base et du pétrole. Sur un plan régional, c'est en Afrique que cette détérioration devrait être la plus nette. En 1994, les termes de l'échange des pays en développement devraient demeurer à peu près inchangés, sous l'effet notamment du raffermissement de l'activité économique dans les pays industrialisés. Les taux d'intérêt à long terme ont poursuivi leur mouvement de repli, qui s'explique par les perspectives d'évolution généralement encourageantes de l'inflation, par les progrès accomplis dans la voie de l'assainissement des finances publiques et par la révision en baisse des prévisions de croissance des secteurs publics et privés. Les taux d'intérêt à court terme ont très peu varié aux États-Unis et au Royaume-Uni depuis la mi- avril, et ont légèrement diminué au Canada et au Japon. Leur baisse a été plus marquée en Allemagne et en Europe continentale, et l'on s'attend que ce mouvement se confirmera suite à l'élargissement des marges de fluctuation prévues avant intervention obligatoire dans le mécanisme de change du Système monétaire européen. Quelles que soient les incertitudes à court terme, l'évolution observée va dans le sens souhaité par la stratégie de coopération préconisée par le Comité intérimaire, et c'est faire preuve d'un optimisme raisonné que d'espérer que les conditions d'un renforcement des résultats économiques mondiaux vont se mettre en place progressivement . De plus en plus d'observateurs s'accordent à penser que les graves déficits budgétaires en Amérique du Nord et en Europe sont insoutenables et qu'ils devront être très sensiblement résorbés à moyen terme. Grâce aux plans de réduction des déficits mis en oeuvre et au succès que continuent d'avoir les mesures prises pour endiguer l'inflation dans la plupart 1Voir la «Déclaration pour la coopération au service d'une expansion mondiale durable» adoptée à l'issue de la quarantième réunion du Comité intérimaire du Conseil des gouverneurs du FMI le 30 avril 1993. 28 Déclaration du Directeur général du FMI au Comité du développement des pays industrialisés, la politique monétaire est mieux à même de soutenir l'activité économique. Dans les pays en développement, les excellents résultats affichés par les pays qui réussissent le mieux témoignent à la fois des bénéfices à long terme d'une application soutenue des programmes de stabilisation et de réforme - dans les pays d'Asie, par exemple - et du champ qui existe pour une reprise de la croissance dès lors qu'un environnement macroéconomique stable a été mis en place et que les réformes confiant aux forces du marché l'allocation efficiente des ressources sont mises en oeuvre. Les progrès ont été lents, toutefois, dans le domaine commercial. Mais l'accord de Tokyo sur l'accès aux marchés renforce les chances de voir les négociations commerciales multilatérales de l'Uruguay Round trouver en 1993 la conclusion si longtemps attendue. Un grand nombre de questions délicates demeurent néanmoins en suspens. De surcroit, la tentation protectionniste reste forte et le recours accru aux accords d'organisation du commerce et à d'autres distorsions non tarifaires menace toujours l'avenir du système commercial multilatéral. Tendances économiques dans les pays en développement Alors que l'activité reste faible dans la majorité des pays industrialisés, les projections indiquent que la croissance devrait rester relativement soutenue dans le groupe des pays en développement en 1993-94. Ces bons résultats s'expliqueraient par le succès des efforts de stabilisation dans nombre d'entre eux, le dynamisme du commerce intrarégional, le bas niveau des taux d'intérêt sur la dette libellée en dollars et l'augmentation des entrées de capitaux. L'expérience des deux dernières décennies montre que si les entrées de capitaux peuvent présenter des avantages considérables, elles ne sont cependant pas sans risques, en particulier lorsqu'elles sont importantes par rapport au potentiel économique et financier du pays. Les politiques permettant de tirer le meilleur parti de cet afflux de capitaux sont foncièrement les mêmes que celles qui assurent le meilleur emploi des ressources intérieures, c'est-à-dire celles qui dégagent des investissements un rendement supérieur au coût des ressources employées. Pour assurer un niveau élevé d'épargne intérieure et des taux de rendement suffisants aux investissements intérieurs, il convient de s'en remettre résolument aux forces du marché et d'adopter une politique financière prudente, une stratégie commerciale ouverte sur l'extérieur et un taux de change compétitif. Ce type de politique est maintenant mis en oeuvre dans un grand nombre de pays en développement, dont beaucoup appartiennent à l'hémisphère occidental. La croissance, en moyenne relativement forte des pays en développement dans leur ensemble masque des différences très sensibles entre les taux de croissance régionaux (voir graphique). L'Asie devrait connaître une croissance de 83X % en 1993, due principalement au maintien d'une activité économique soutenue en Chine. Mais les autorités chinoises ont pris récemment plusieurs initiatives visant à freiner l'expansion de la demande globale, et l'on devrait observer un certain fléchissement de la croissance dans 29 Déclaration du Directeur général du FMI au Comité du développement la région en 1994. Dans les pays en développement d'Europe et du Moyen-Orient, la croissance devrait fléchir et s'établira à 3'h % en 1993 avant de remonter à 4'h % en 1994; les fluctuations du taux de croissance moyen dans la région témoignent encore très largement des retombées de la crise de 1991. L'augmentation de la production devrait être de 3'h %, en moyenne, dans les pays en développement de l'hémisphère occidental en 1993-94. Les entrées de capitaux considérables enregistrées par plusieurs d'entre eux et l'allégement du service de la dette dans la majeure partie de la région ont revigoré l'activité économique au cours de la période récente. Au Brésil, l'incertitude entourant l'orientation de la politique économique et le taux élevé de l'inflation ont entraîné un recul de la production en 1992, mais la reprise est attendue en 1993. En Afrique, les mauvaises conditions climatiques, l'atonie de la demande d'exportations dans les pays industrialisés et les problèmes liés au déséquilibre de la politique économique de plusieurs pays ont assombri les perspectives à court terme, et la croissance ne devrait pas dépasser l'h % en 1993 et 2'h4 % en 1994. Les pays d'Afrique subsaharienne qui avaient des accords avec le FMI dans le cadre de la facilité d'ajustement structurel (FAS) et de la facilité d'ajustement structurel renforcée (FASR) à la fin de 1992 devraient connaître une croissance de 4'h %, en moyenne, en 1993 et 1994. Selon les projections, l'inflation devrait légèrement augmenter, en moyenne, dans les pays en développement pour se situer à 44 % en 1993, avant de retomber à 35 % en 1994. Cette moyenne assez élevée s'explique par les hausses de prix extrêmement fortes qu'ont connues un petit nombre de pays; l'inflation médiane est beaucoup moins élevée et devrait encore diminuer pour tomber de 7 % en 1993 à 51/2 % en 1994. En Afrique, l'inflation devrait ralentir en 1993 comme en 1994 si les programmes de réforme adoptés par un certain nombre de pays sont mis en oeuvre. Elle devrait augmenter légèrement en Asie pour se situer à 8 1/4 % en 1993, mais ces projections dépendent en grande partie de ce que sera l'évolution macroéconomique de la Chine, qui connaît une accélération brutale de l'inflation depuis le début de l'année. Dans l'hémisphère occidental, en dépit des progrès très sensibles réalisés par plusieurs pays, l'inflation chronique élevée qui persiste au Brésil se traduit par une moyenne élevée au niveau régional. Si l'on ne tient pas compte du Brésil, l'inflation dans l'hémisphère occidental devrait ralentir et tomber de 16 % en 1993 à 1 l'h % en 1994. Elle ne devrait que peu diminuer dans les pays en développement d'Europe et au Moyen-Orient, où elle atteindrait 22y4 % en 1993 et 21 1/4 % en 1994. L'augmentation du volume des exportations des pays en développement a été de 9'h2 % en 1992 et devrait se poursuivre au même rythme en 1993 sous l'impulsion, cette année encore, de l'expansion du commerce intrarégional, en Asie et dans l'hémisphère occidental en particulier. Selon les projections, la croissance des exportations se ralentira en 1993 dans les pays exportateurs de combustibles, car on s'attend à ce que la demande de produits pétroliers soit faible; elle restera vigoureuse, en revanche, dans les pays exportateurs de produits manufacturés. En 1994, la croissance des exportations devrait s'accélérer dans toutes les régions, sauf en Afrique où elles continueront vraisemblablement de stagner dans plusieurs grands pays. 30 Developing Countries: Real GDP 1 (AtnLuatL percrnd chlange) 10 10 8 :~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~8 *Atddtr East artd Europe 4 B s4 0 Cr `, jWcs t errt -2 _ `^ |Ho~~~~cmi.s,phcrc -- -4 l I -4 80 8 1 82 83 84 85 86 87 88 89 90 9 1 92 93 94 t Comnposites are indices based ori arithimetic averages of real GDP wei.ghted by the averagee U.S. dollar value ot respective GPs over the preceding three years. Shaded area indica.es staff projections. B 2B . B 0*.~~~3 Déclaration du Directeur général du FMI au Comité du développement la région en 1994. Dans les pays en développement d'Europe et du Moyen-Orient, la croissance devrait fléchir et s'établira à 31/2 % en 1993 avant de remonter à 41l/2 % en 1994; les fluctuations du taux de croissance moyen dans la région témoignent encore très largement des retombées de la crise de 1991. L'augmentation de la production devrait être de 31/2 %, en moyenne, dans les pays en développement de l'hémisphère occidental en 1993-94. Les entrées de capitaux considérables enregistrées par plusieurs d'entre eux et l'allégement du service de la dette dans la majeure partie de la région ont revigoré l'activité économique au cours de la période récente. Au Brésil, l'incertitude entourant l'orientation de la politique économique et le taux élevé de l'inflation ont entraîné un recul de la production en 1992, mais la reprise est attendue en 1993. En Afrique, les mauvaises conditions climatiques, l'atonie de la demande d'exportations dans les pays industrialisés et les problèmes liés au déséquilibre de la politique économique de plusieurs pays ont assombri les perspectives à court terme, et la croissance ne devrait pas dépasser 1 /2 % en 1993 et 2'/2 % en 1994. Les pays d'Afrique subsaharienne qui avaient des accords avec le FMI dans le cadre de la facilité d'ajustement structurel (FAS) et de la facilité d'ajustement structurel renforcée (FASR) à la fin de 1992 devraient connaître une croissance de 41/2 %, en moyenne, en 1993 et 1994. Selon les projections, l'inflation devrait légèrement augmenter, en moyenne, dans les pays en développement pour se situer à 44 % en 1993, avant de retomber à 35 % en 1994. Cette moyenne assez élevée s'explique par les hausses de prix extrêmement fortes qu'ont connues un petit nombre de pays; l'inflation médiane est beaucoup moins élevée et devrait encore diminuer pour tomber de 7 % en 1993 à 5'b2 % en 1994. En Afrique, l'inflation devrait ralentir en 1993 comme en 1994 si les programmes de réforme adoptés par un certain nombre de pays sont mis en oeuvre. Elle devrait augmenter légèrement en Asie pour se situer à 8 1 % en 1993, mais ces projections dépendent en grande partie de ce que sera l'évolution macroéconomique de la Chine, qui connaît une accélération brutale de l'inflation depuis le début de l'année. Dans l'hémisphère occidental, en dépit des progrès très sensibles réalisés par plusieurs pays, l'inflation chronique élevée qui persiste au Brésil se traduit par une moyenne élevée au niveau régional. Si l'on ne tient pas compte du Brésil, l'inflation dans l'hémisphère occidental devrait ralentir et tomber de 16 % en 1993 à 11 1/2 % en 1994. Elle ne devrait que peu diminuer dans les pays en développement d'Europe et au Moyen-Orient, où elle atteindrait 22-/4 % en 1993 et 211 % en 1994. L'augmentation du volume des exportations des pays en développement a été de 91/2 % en 1992 et devrait se poursuivre au même rythme en 1993 sous l'impulsion, cette année encore, de l'expansion du commerce intrarégional, en Asie et dans l'hémisphère occidental en particulier. Selon les projections, la croissance des exportations se ralentira en 1993 dans les pays exportateurs de combustibles, car on s'attend à ce que la demande de produits pétroliers soit faible; elle restera vigoureuse, en revanche, dans les pays exportateurs de produits manufacturés. En 1994, la croissance des exportations devrait s'accélérer dans toutes les régions, sauf en Afrique où elles continueront vraisemblablement de stagner dans plusieurs grands pays. 32 DÉCLARATION DU PRÉSIDENT DU GROUPE INTERGOUVERNEMENTAL DES VINGT-QUATRE POUR LES QUESTIONS MONÉTAIRES INTERNATIONALES, M. MOHAMMED IMADY, MINISTRE DE L'ÉCONOMIE ET DU COMMERCE EXTÉRIEUR DE LA SYRIE Permettez-moi tout d'abord de vous présenter mes félicitations les plus chaleureuses pour votre élection à la présidence du Comité du développement. Au nom du Groupe des Vingt-Quatre, je tiens à vous assurer de notre détermination à coopérer et à nous consacrer aux travaux du Comité au cours de l'année à venir. Je souhaite par ailleurs rendre hommage à M. Ricardo Hausmann pour son excellente contribution aux travaux du Comité. Pour commencer, je voudrais noter qu'au cours de ses réunions de la semaine dernière, le Groupe des Vingt-Quatre a délibéré, comme au cours des occasions précédentes, sur les principaux points inscrits à l'ordre du jour. Permettez-moi de vous faire part ici de l'essentiel de nos débats. Lors de notre examen des principaux facteurs qui influent sur les perspectives de croissance et sur les chances de voir la pauvreté reculer dans nos pays en développement, nous avons noté que les courants d'évolution qui se sont esquissés sur la scène mondiale n'étaient pas favorables. Je n'en prendrai comme exemple que l'environnement économique mondial, les tendances récentes et les perspectives en matière de flux d'aide, enfin, l'inachèvement du cycle des négociations commerciales internationales. Nous avons constaté que les perspectives de la conjoncture mondiale ne se sont pas améliorées depuis notre dernière réunion. En fait, le rapport de M. Preston au présent Comité révèle une évolution en baisse marquée d'une projection clé - la croissance de la production des pays industrialisés. C'est là, bien sûr, une question qui vient d'être assez longuement débattue par nos collègues du Comité intérimaire. À ce qu'il semble, il nous faut malheureusement faire face pendant un certain temps encore à une croissance peu dynamique et à une situation économique mondiale incertaine. Les tendances des flux d'aide sont préoccupantes. Les chiffres du rapport susmentionné du Président révèlent une nouvelle baisse de l'aide financière publique au cours de l'année dernière, qui vient s'ajouter à celle déjà enregistrée l'année précédente. On a toutefois observé une augmentation importante - et bienvenue - des flux de ressources privées. Mais, comme vous le savez, ces flux additionnels ne bénéficieront qu'à un nombre limité de pays, pour la plupart à revenu intermédiaire; ils n'atteignent pas les pays à faible revenu, notamment les pays d'Afrique subsaharienne, qui en ont le plus besoin. Ce qui est tout aussi préoccupant, c'est que les perspectives d'évolution des 33 Déclaration du Président du Groupe des 24 flux d'aide ne sont pas encourageantes en raison de l'attitude négative du public dans nombre de pays donateurs. C'est là une question que nous espérons voir approfondir par le Comité. Sur le front des échanges commerciaux, l'optimisme que nous ressentions après le sommet de Tokyo a maintenant fait place à un sentiment d'incertitude et à une certaine appréhension quant aux chances d'une conclusion favorable des négociations de l'Uruguay Round. Comme vous l'avez mentionné dans votre rapport, M. le Président, nous devrions en fait prendre soin de ne pas exagérer l'incidence des négociations de l'Uruguay Round sur les pays en développement. Nous avons toutefois conscience que le prix à payer en cas d'échec des négociations peut être élevé pour tous nos pays. Tout échec ébranlerait la confiance des milieux d'affaires et compromettrait la réforme vers une stratégie d'ouverture qu'appliquent maintenant nombre de pays en développement. Nous espérons que cela pourra être évité. En dépit des nombreux aspects défavorables qui caractérisent l'environnement extérieur, maints pays en développement ont persévéré dans la mise en oeuvre de réformes favorisant les mécanismes du marché, et un grand nombre d'entre eux ont vu leurs efforts couronnés de succès notables. La stratégie d'une croissance soucieuse d'équité, qui est appliquée en Asie orientale, continue d'en offrir un exemple excellent et stimulant. En Amérique latine, l'activité s'est accélérée dans un certain nombre de pays et la charge de la dette a été maîtrisée. Un grand nombre de pays à faible revenu ont persévéré dans leurs efforts d'ajustement, souvent à un coût social élevé. C'est en faveur de ces pays que nous devons faire les efforts les plus concertés si nous voulons leur donner une chance de s'attaquer au problème épineux de la pauvreté et de participer à l'activité économique mondiale. Cela m'amène au point particulièrement important de l'ordre du jour de la réunion d'aujourd'hui: le bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu. Nous avons pris note de l'utile documentation établie par la Banque mondiale et par le FMI et souscrivons aux grandes lignes de l'analyse qui met l'accent notamment sur l'application de mesures d'ajustement cohérentes, sur la nécessité d'un plus large horizon temporel pour les réformes structurelles, sur la contribution essentielle d'une croissance génératrice d'emplois et sur le renforcement des moyens institutionnels et administratifs. Cependant, il est par ailleurs évident que le succès des efforts d'ajustement dépend du ferme soutien de la communauté internationale sous la forme d'une aide concessionnelle suffisante, de marchés plus ouverts et d'une réduction de la dette bien supérieure à celle qui est offerte jusqu'à présent. 34 Déclaration du Président du Groupe des 24 Nous avons en outre trouvé fort intéressante la documentation complémentaire présentée à la présente réunion - pratique dont nous espérons qu'elle sera maintenue sous votre direction, M. le Président. Nous exhortons en particulier le FMI et la Banque mondiale à poursuivre l'examen des principales questions soulevées dans ces documents, qui ont trait notamment à l'importance cruciale de l'appartenance des programmes d'ajustement aux pays qui les appliquent, à l'efficacité de la conditionnalité et au contenu de l'assistance technique. En ce qui concerne les autres aspects particuliers qui sont à l'étude aujourd'hui, nous avons noté que l'expérience des gouvernements, des donateurs et des organisations internationales dans le domaine des réformes des systèmes de sécurité sociale est assez récente; en conséquence, il est nécessaire, à notre avis, de procéder à des travaux analytiques plus poussés et à de plus larges échanges de vues et de connaissances. Nous avons souligné que les systèmes de sécurité sociale doivent être conçus en fonction de la situation particulière de chaque pays, notamment de la viabilité des systèmes de cotisation. Nous avons aussi souligné que les dispositifs de protection sociale aident énormément à mobiliser l'opinion en faveur des programmes d'ajustement. Nous estimons par ailleurs que ces dispositifs devraient faire partie intégrante des programmes de stabilisation et de réforme, revêtir un caractère temporaire et être bien ciblés. Enfin, nous sommes d'avis que donateurs et institutions internationales devraient participer activement à leur financement. Un dernier sujet de réflexion nous est fourni par l'approche du cinquantième anniversaire des institutions de Bretton Woods. Nous sommes d'avis que cet événement historique devrait être l'occasion d'étudier, dans une perspective à long terme, le fonctionnement du système monétaire et financier international, les résultats du processus de développement et le rôle des pays en développement dans la prise de décision au niveau international. Nous exprimons l'espoir que les délibérations sur ces questions contribueront au renforcement - des plus nécessaires - de la coopération économique internationale et des institutions pertinentes. Nous avons souligné combien il importe d'examiner les moyens d'accroître le rôle et l'efficacité du Comité intérimaire et du Comité du développement et de faire en sorte que les points de vue et les intérêts des pays en développement soient présentés avec efficacité au sein des instances de coordination des politiques économiques des pays industrialisés. En conclusion, permettez-moi de vous renseigner sur deux questions dont nous sommes convenus, avec notre ancien président, M. Hausmann, de poursuivre l'étude, suite à notre discussion en mai dernier sur les flux de ressources privées. 35 Déclaration du Président du Groupe des 24 La première est l'établissement de relations entre notre Groupe et le Comité d'aide au développement (CAD) au sujet de l'efficacité de l'aide. Le contact a été établi et j'ai convenu avec le Président du CAD d'examiner cette question dans une optique mondiale une fois qu'elle aura été approfondie dans le cadre des entretiens que le CAD envisage de mener avec les différents États membres de l'OCDE. La deuxième a trait à l'examen, par le Groupe des Vingt-Quatre, de la possibilité de couverture des opérations sur marchandises dans les pays en développement. J'ai le plaisir d'annoncer qu'une étude faite à ma demande sur ce sujet a en effet été récemment soumise à notre attention. Il est demandé aux administrateurs pour les pays en développement de l'examiner avant notre réunion du printemps prochain. Il me reste enfin à mentionner que nous entreprenons actuellement plusieurs travaux de recherche qui devraient intéresser à la fois nos deux institutions et le présent Comité. 36 BILAN DE L'AJUSTEMENT DANS LES PAYS À FAIBLE REVENU ET CONSÉQUENCES POUR LES BESOINS DE FINANCEMENT Le document ci-joint, préparé conjointement par les services de la Banque mondiale et du FMI, fait le point de l'ajustement dans les pays à faible revenu. Ce bilan est fondé principalement sur l'examen des accomplissements des pays qui bénéficiaient de prêts à l'ajustement de la Banque et des ressources de la facilité d'ajustement structurel renforcée du FMI. L'étude tire les enseignements de ce bilan et en examine les conséquences pour le financement des futurs efforts d'ajustement. La présente note d'accompagnement propose aux Ministres quelques thèmes de réflexion. Thèmes de réflexion i) Les pays à faible revenu forment un groupe varié et tant la nature que la portée des réformes qu'ils ont accomplies diffèrent beaucoup d'un pays et d'une époque à l'autre. Lorsque leurs efforts d'ajustement ont été soutenus, ils ont obtenu des succès relatifs sur le front macroéconomique. En général, la libéralisation du régime des changes et du commerce y a bien progressé, de même que la déréglementation des prix intérieurs, en particulier dans le secteur agricole. Leurs progrès ont toutefois été moins sensibles pour ce qui est de la réforme du secteur financier et des entreprises publiques. Les Ministres souhaiteront peut-être formuler des observations sur les mesures à considérer comme prioritaires et sur les moyens de hâter les progrès dans les domaines où les réformes piétinent. ii) L'expérience montre qu'avec le ferme appui de la communauté internationale, les pays à faible revenu qui persévèrent dans leurs efforts d'ajustement pendant un certain laps de temps obtiennent en général de meilleurs résultats que les autres, et en termes de croissance et sur le front de la pauvreté. Ce constat vaut aussi pour les pays où le revenu est plus élevé. Les pays qui ont le mieux réussi ont misé sur la stabilité macroéconomique, des taux de change réalistes et l'ouverture sur l'extérieur. Cependant, l'expérience montre aussi que pour parvenir à un sentier de croissance plus vive et durable qui fasse reculer la pauvreté, et pour faire croître l'investissement privé, il faut entreprendre des réformes structurelles de longue haleine et il faut du temps pour établir la crédibilité de cette nouvelle politique. Les Ministres souhaiteront peut-être formuler des observations sur les conséquences de ce constat pour les futurs efforts d'ajustement des pays à faible revenu et se demander s'il existe un cadre qui permettrait à chacun de tirer parti de l'expérience des autres. iii) Compte tenu de ce bilan, il faut que les pays à faible revenu qui ont entrepris l'ajustement de leur économie persévèrent et que les autres s'engagent sur la même voie dès que possible. Le but des programmes de réforme doit rester inchangé: une croissance harmonieuse génératrice d'emplois - avec une inflation faible et des comptes extérieurs viables - étayée par des interventions visant spécifiquement à lutter contre la pauvreté et par des mesures de protection de l'environnement. Les pouvoirs publics doivent s'attacher à réduire les déficits budgétaires, à diminuer les dépenses publiques improductives, notamment les dépenses militaires, à faire du secteur public un outil performant, utile à l'ensemble de l'économie, à réformer plus énergiquement les entreprises publiques et à établir un régime de change et de commerce libéral. Il faut éviter de paralyser la croissance de l'emploi en subventionnant directement ou indirectement les facteurs de production autres que le travail (par exemple en bonifiant les taux d'intérêt). Le préjugé 37 défavorable dont pâtit couramment le secteur agricole dans les pays à faible revenu doit être corrigé, car c'est dans ce secteur que se trouve la plus grande partie des pauvres. En outre, il importe de renforcer les capacités administratives et institutionnelles. Dans bon nombre de cas, il faudra une assistance technique bien ciblée, coordonnée et programmée afin d'étoffer les moyens d'exécution des pouvoirs publics, en particulier pour ce qui touche à l'examen et au contrôle des dépenses publiques, à la réforme de la fiscalité et à l'administration de l'impôt, à l'efficacité des services sociaux, notamment de santé et d'éducation, ainsi qu'à la réforme des entreprises publiques et du secteur financier. Les Ministres souhaiteront peut-être exprimer leurs points de vue sur l'ordre de priorité à accorder à ces multiples éléments de réforme et sur le rôle que doit jouer l'assistance technique. iv) À terme, et à supposer que les efforts d'ajustement soient poursuivis, les besoins de financement extérieurs prévisibles du groupe des pays à faible revenu sont appelés à diminuer légèrement, d'après les projections, au cours des cinq prochaines années. Cependant, les chiffres globaux afférents à ce groupe masquent de grandes divergences d'une région à l'autre et à l'intérieur d'une même région. Les besoins de financement resteront élevés en Afrique et en Asie et augmenteront même pour certains pays. Les pays à faible revenu devront intensifier leurs efforts en vue de mobiliser l'épargne intérieure et de continuer à attirer des montants croissants de capitaux privés et d'investissements directs étrangers ainsi que d'importants flux de capitaux extérieurs publics pour être en mesure de financer les investissements nécessaires pour assurer une croissance à long terme et une position extérieure viable. Les Ministres souhaiteront peut-être faire part de leurs observations sur les diverses formes de financement possibles - allégement de dette. financement bilatéral concessionnel. flux de capitaux privés et assistance des institutions financières internationales. en particulier dans le cadre d'IDA-10 (groupe de la Bangue mondiale) et à l'aide du mécanisme qui succédera à la FAS renforcée (FMI). v) Pour ce qui est de la dette, le Club de Paris a accordé d'importants allégements de dette, offrant une série de concessions encore plus avantageuses qu'auparavant qui permettent une réduction de 50 % de la valeur nette actualisée des montants consolidés et il s'est déclaré prêt à envisager d'éventuelles réductions de l'encours de la dette après une période d'ajustement soutenu de trois à quatre ans. Il importe de veiller à ce que les opérations de désendettement ne compromettent pas l'assistance financière directe à ces pays. S'il est vrai qu'ils reçoivent un soutien de trésorerie immédiat et non négligeable, nombre de pays à faible revenu en cours d'ajustement ont cependant des problèmes d'endettement très graves à plus long terme et même une réduction de 50 % de la dette ne suffirait pas pour permettre à ceux qui sont exceptionnellement endettés d'atteindre une position extérieure viable, même avec un effort d'ajustement soutenu. Le Ministres s'accordent-ils pour penser que dans un certain nombre de cas où la dette représente une charge particulièrement lourde, les créanciers devront faire preuve de la souplesse requise et aller au-delà des modalités actuelles d'allégement de la dette et de rééchelonnement des flux de paiement? vi) Il faudra que les pays industrialisés créent un climat économique mondial propice en appliquant fermement des politiques macroéconomiques et structurelles saines et en veillant à mener à bon terme les négociations de l'Uruguay Round. Par ailleurs, il demeurera essentiel de soutenir les efforts de réforme des pays à faible revenu en continuant de leur fournir une aide concessionnelle. Cette assistance internationale sans faille serait un bon placement, car le processus de réforme est maintenant bien engagé dans maints pays à faible revenu, et cet appui pourrait bien être d'autant plus efficace que ces pays sont plus ouverts aux réformes propres à favoriser le jeu des forces du marché et qu'ils en ont déjà acquis une certaine expérience. Pour continuer à bénéficier de flux d'aide abondants, les pays qui ont entrepris de réformer leur économie doivent de leur côté 38 démontrer qu'ils font une utilisation efficace de ces concours et que, progressivement, ils en deviennent de moins en moins tributaires, que la lutte contre la pauvreté donne des résultats et que les réformes politiques progressent, de même que la rationalisation des dépenses publiques. Quant aux bailleurs de fonds, en concentrant leurs efforts d'assistance sur les pays à faible revenu qui entreprennent de vigoureuses réformes, ils en accroîtraient l'efficacité et aideraient à remobiliser l'opinion en faveur de l'aide publique. Les Ministres souhaiteront peut-être formuler des observations sur les efforts supplémentaires nécessaires pour porter l'aide concessionnelle à un niveau approprié. remobiliser l'opinion en faveur de l'aide publique et veiller à ce que celle-ci soit accordée en priorité aux pays qui persévèrent dans leurs efforts de réforme. vii) La Banque mondiale et le FMI travaillent en étroite collaboration à soutenir les réformes mises en oeuvre dans les pays à faible revenu, auxquels ils fournissent des conseils pratiques, chacun dans son domaine d'activité et de compétence respectif, ainsi que des ressources financières - par l'intermédiaire de l'IDA (groupe de la Banque mondiale) et au titre de la FAS renforcée (FMI) - et de l'assistance technique. Le cadre de la politique macroéconomique et structurelle à moyen terme, qui est exposé par chaque pays dans un document-cadre de politique économique (DCPE), fournit une bonne base pour la coordination des prêts accordés à l'appui des programmes d'ajustement par les créanciers bilatéraux, les institutions multilatérales et les banques régionales de développement. Les Ministres souhaiteront peut-être faire part de leurs points de vue sur l'efficacité avec laquelle cette collaboration aide à entretenir la dynamique de l'ajustement dans les pays à faible revenu. Ce document a été établi par Emmanuel van der Mensbrugghe, du Département de l'élaboration et de l'examen des politiques du FMI, et par Anandarup Ray et Sona Varma, du Département de Développement politique de la Banque mondiale. 39 BILAN DE L'AJUSTEMENT DANS LES PAYS À FAIBLE REVENU ET CONSÉQUENCES POUR LES BESOINS DE FINANCEMENT (Document préparé conjointement par les services du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale) I. Introduction 1.1 Les efforts d'ajustement soutenus ont donné des résultats positifs et encourageants dans bon nombre de pays en développement ces dix dernières années. Tous n'ont cependant pas été aussi fructueux: la réaction de l'économie a souvent été moins marquée dans les pays à faible revenu que dans les pays à revenu intermédiaire. Le présent document est fondé sur l'analyse des résultats de l'ajustement à laquelle ont procédé récemment les services de la Banque mondiale et du FMI; il donne un aperçu général des progrès accomplis et des bienfaits que l'ajustement commence à produire (section II)]. Les domaines d'action prioritaires du point de vue des pays en développement et des pays industrialisés sont succinctement décrits à la section III, en même temps que les conséquences du processus d'ajustement pour le financement et le rôle que les institutions financières internationales pourraient jouer2. Il. Aperçu des résultats récents 2.1 L'ajustement aux chocs extérieurs survenus à la fin des années 70 et au début des années 80 a souvent été plus difficile dans les pays à faible revenu qu'ailleurs. Ces pays avaient en général des fondations moins solides sur lesquelles asseoir leur croissance. En effet, ils avaient des ressources humaines et des infrastructures matérielles insuffisantes, des institutions publiques faibles et des exportations moins diversifiées. En outre, leur stratégie économique était souvent repliée sur l'intérieur et hostile au jeu des forces du marché, puisque caractérisée par l'intervention de l'État dans tous les secteurs, par une politique monétaire et financière laxiste et par un système d'incitations inapproprié. De ce fait, les déséquilibres financiers et extérieurs se sont accentués, avec pour résultats une croissance économique faible, voire nulle, et un endettement souvent intolérable, en particulier dans les pays d'Afrique subsaharienne. 2.2 La nécessité de vastes réformes structurelles est apparue au début des années 80 et est devenue plus pressante vers le milieu de la décennie. Dans diverses proportions, selon les pays, les programmes d'ajustement englobaient des mesures macroéconomiques de stabilisation, les réformes structurelles nécessaires pour réduire les multiples distorsions du système d'incitations et des mesures à long terme visant à dynamiser l'offre et à engager l'économie sur un sentier de croissance plus vive, qui permette de faire reculer la pauvreté. 1 Les rapports qui ont servi de base au présent document sont notamment le «Troisième rapport sur les prêts à l'ajustement» de la Banque mondiale et le «Bilan de l'application des accords appuyés par la FAS renforcée» du FMI. 2 Sauf indication contraire, on entend dans le présent document par pays à faible revenu les pays ayant reçu des crédits de l'IDA pendant la période de base d'IDA-9 ou admis à bénéficier des ressources de la FAS renforcée. La liste de ces pays est donnée en annexe. 41 Bian de l'ajustement dans ks pays à faibk revenu et conséquences pour ks besoins de financement 2.3 De plus en plus, les pays à faible revenu se sont rendus compte des bienfaits à attendre des vastes réformes structurelles et le nombre des pays qui ont entrepris l'ajustement de leur économie n'a cessé d'augmenter depuis le début des années 80. À présent, quelque 35 à 40 pays à faible revenu sont passés par ce processus à des degrés divers. Parmi les pays qui sont récemment venus s'ajouter à la liste, il convient de mentionner l'Albanie, l'Éthiopie, le Honduras, la Mongolie, le Nicaragua, la République kirghise, la République démocratique populaire lao et le Zimbabwe. 2.4 Les résultats obtenus jusqu'à présent indiquent que le processus d'ajustement est nettement plus vaste et plus long qu'on ne l'avait prévu au début des années 80. Cela s'explique en partie par l'environnement extérieur auquel sont confrontés les pays à faible revenu - caractérisé par la faiblesse des cours des produits de base et dernièrement par la récession dans les pays industrialisés. Il y a toutefois aussi eu des transferts extérieurs nets positifs, en hausse dans de nombreux cas. En outre, le processus d'ajustement s'est prolongé parce que les réformes intérieures se sont révélées plus difficiles, et les ressources institutionnelles plus faibles qu'on ne l'avait prévu, mais aussi à cause de l'instabilité de la situation politique dans plusieurs cas. Les réformes ont été interrompues et dans plusieurs cas il y a eu recul, même dans des pays politiquement stables. Portée des réformes 2.5 Les pays à faible revenu forment un groupe varié et tant la nature que la portée des réformes qu'ils ont accomplies diffèrent beaucoup d'un pays et d'une époque à l'autre. Malgré la diversité des cas, on retrouve des caractéristiques communes. Lorsque les efforts d'ajustement ont été soutenus, la stabilisation macroéconomique a raisonnablement bien réussi et la libéralisation du régime des changes et du commerce a progressé, de même que la déréglementation des prix intérieurs. Il y a toutefois eu plus de difficultés pour ce qui est de la réforme des entreprises publiques, des privatisations et de la réforme du secteur financier. 2.6 Mesures macroéconomiques et stabilisation. La stabilité macroéconomique est cruciale pour l'ajustement, la croissance et la réduction de la pauvreté. Maints pays ont pris des mesures de correction macroéconomique avec la rigueur budgétaire et monétaire voulue et moyennant des réajustements des taux de change. En pourcentage du PIB, le déficit budgétaire des pays à faible revenu a été ramené de 8,4 % en moyenne pendant la période 1981-86 à 7,5 % en 1987-92. Cela a contribué à une diminution de la croissance moyenne de la masse monétaire au sens large qui est tombée de 43 % en 1981-86 à 20 % au cours de la période 1987-92. De ce fait, le taux d'inflation moyen du groupe des pays à faible revenu est descendu de 56 % en 1981-86 à 22 % en 1987-923. Pour juguler l'inflation, il est indispensable de continuer à maîtriser les déficits budgétaires et la croissance de la masse monétaire au sens large - par l'intermédiaire d'une banque centrale forte qui applique une politique monétaire prudente. 2.7 La qualité de l'effort budgétaire détermine si les réductions du déficit peuvent être durables et si l'orientation budgétaire est compatible avec une croissance à long terme et un recul de la pauvreté. Les pays ont passé en revue les grands postes des dépenses courantes et les subventions 3 Les données relatives à la masse monétaire et à l'inflation n'englobent pas deux cas extrêmes, le Nicaragua et le Zaïre, où des taux d'hyperinflation ont été observés pendant la seconde période. 42 Bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement dans des domaines tels que la fonction publique, les intrants agricoles, la distribution alimentaire dans les zones urbaines et l'énergie, et ils y ont pratiqué des coupes claires dans nombre de cas. La répartition des dépenses courantes et des investissements publics entre les secteurs s'est elle aussi améliorée, au bénéfice notamment des secteurs sociaux. Il reste toutefois encore beaucoup à faire pour réduire les dépenses improductives et pour améliorer le cadre institutionnel dans lequel les décisions sont prises, mises en oeuvre et suivies. Du côté des recettes, l'amélioration de l'assiette et de l'administration de l'impôt reste prioritaire, encore que de nombreux pays (par exemple, le Bangladesh, la Bolivie, le Kenya, le Malawi, le Niger et le Sénégal) se soient déjà acheminés vers l'adoption de la taxe à la valeur ajoutée (TVA). 2.8 Réforme du régime des changes et du commerce. L'un des objectifs clés des réformes a été la libéralisation du régime des changes et du commerce, qui visait à réduire la protection (restriction des importations) et à encourager les exportations (et la diversification des exportations, qui se limitaient à un petit nombre de produits primaires). Un régime de commerce plus libéral ne rehausse pas seulement l'efficacité et les avantages comparatifs, il encourage aussi l'emploi parce que les exportations non traditionnelles ont généralement une plus forte intensité de main-d'oeuvre que les produits de substitution aux importations. Les restrictions touchant le change et le commerce comprenaient la limitation rigoureuse des allocations de devises, des restrictions quantitatives, des taxes à l'exportation et des droits de douane à l'importation. D'importants progrès ont été accomplis dans ce domaine. Dans nombre de cas, le taux de change a été ramené à un niveau plus réaliste et plus compétitif et la réglementation des changes a été assouplie. Cela a permis de faire progresser la libéralisation du commerce. Les obstacles non tarifaires, tels que les contingents à l'importation et les systèmes de licences restrictifs, ont été réduits, de même que le niveau et la dispersion des taux tarifaires. Sri Lanka, par exemple, a non seulement réduit ses restrictions quantitatives (qui, dans certains cas, étaient si rigoureuses que même les droits de douane élevés étaient superflus), mais a aussi ramené les taux tarifaires maximums de plus de 100 % à 50 %. Il est vrai que les pays à faible revenu ont encore beaucoup de marge de manoeuvre pour abaisser leurs droits de douane, mais il convient de noter qu'ils les ont réduits unilatéralement sans attendre un geste réciproque de la part des pays industrialisés. 2.9 Prix intérieurs et secteur agricole. Parmi les importants éléments des programmes de réforme, il faut noter aussi l'alignement des prix intérieurs sur les cours mondiaux, la déréglementation de la commercialisation et la lutte contre le préjugé défavorable à l'égard du travail manuel ainsi que la réduction des subventions du capital. Les réformes de prix ont été significatives dans de nombreux secteurs, y compris l'énergie, mais avant tout dans le secteur agricole qui est en général le plus vaste dans les pays à faible revenu. C'est aussi le secteur où se trouve la plus grande partie des pauvres: la croissance du secteur rural est une condition sine qua non de la création d'emplois et du recul de la pauvreté. La Chine, le Ghana, le Guyana, le Nigéria et le Zimbabwe notamment ont réalisé d'importants progrès dans la réforme des prix agricoles. 2.10 Le préjugé défavorable dont souffre depuis longtemps l'agriculture a été atténué dans bon nombre de pays à faible revenu. Cela tient à la fois aux réformes des prix agricoles et à l'amélioration des politiques macroéconomiques et de la réglementation des changes et du commerce (les secteurs non agricoles étaient les principaux bénéficiaires de la protection que fournissaient les droits de douane, les contingents et le contrôle des changes). Ce préjugé est toutefois encore répandu parce que le raffermissement des prix agricoles est loin d'être universel. En ce qui 43 Bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement concerne la promotion des exportations, les réformes des offices de commercialisation ont bien progressé dans certains cas, mais il reste beaucoup à faire (voir l'encadré 1). Encadré 1. Ajustement, agriculture et pauvreté La vaste majorité des pauvres des pays à faible revenu vivent dans les zones rurales. Et pourtant, dans les années 70 et au début des années 80, ces pays avaient à l'égard de l'agriculture une attitude négative, parfois au plus haut degré, et la pénalisaient par des impôts et des contrôles sectoriels directs qui s'ajoutaient aux effets de la surévaluation des taux de change et de la protection de l'industrie. Les offices de commercialisation semi-publics constituaient de gros obstacles en raison des prix excessivement bas qu'ils payaient aux producteurs. Lorsque la faible de la croissance a fait place à une crise véritable au début des années 80, maints gouvernements ont réagi initialement en rationnant encore plus les devises et les biens intérieurs. En Tanzanie, par exemple, la plupart des ressources en devises, déjà peu abondantes, ont été mises à la disposition de secteurs extrêmement inefficaces, tandis que la plupart des biens de consommation disparaissaient des marchés des zones rurales. Les réformes entreprises dans les pays à faible revenu s'attaquent à ces distorsions. La commercialisation a été libéralisée dans de nombreux pays. La dépréciation de la monnaie et la libéralisation du commerce intérieur et extérieur ont fait remonter les prix des produits agricoles échangés. Les producteurs de produits primaires tels que le cacao, au Ghana et au Nigéria, en ont bénéficié et le meilleur approvisionnement des zones rurales en biens de consommation a aussi stimulé l'offre. Source: «La lutte contre la pauvreté: progrès réalisés dans l'application de la stratégie de la Banque mondiale et problèmes à résoudre», Banque mondiale 1993 2.11 Réforme des entreprises publiques et privatisation. Le secteur des entreprises publiques s'est rapidement développé au cours des années 70 dans la plupart des pays à faible revenu et en est arrivé à dominer un grand nombre de secteurs clés, en même temps qu'il grevait lourdement le budget et évinçait les activités du secteur privé. Les réformes des entreprises publiques ont toutefois été lentes et ardues. Il s'est révélé difficile d'améliorer durablement les méthodes de gestion et de maintenir des contraintes budgétaires rigoureuses. Dans bien des cas, les comptes des entreprises parapubliques ne font pas l'objet de vérifications régulières, pas plus que le crédit bancaire au secteur public n'est surveillé de façon systématique. Souvent, il n'est pas possible de déterminer toute l'ampleur du secteur des entreprises publiques, encore moins d'évaluer ses résultats et ses besoins de réforme à cause de la grave insuffisance des données. 2.12 De nombreux organismes du secteur public exercent des activités de production, de commercialisation et de distribution que le secteur privé peut assurer plus efficacement. Bien que les privatisations - y compris celles qui résultent d'investissements directs étrangers - se soient multipliées dans quelques pays (par exemple au Pakistan et à Sri Lanka), elles n'ont pas encore sérieusement démarré dans bon nombre d'autres pays (voir l'encadré 2). Dans bien des cas, les efforts de réforme visaient essentiellement à améliorer la gestion des entreprises moyennant une restructuration ou la mise au point de contrats-plans avec le secteur privé. 44 Bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement Encadré 2. Ajustement et entreprises publiques à Sri Lanka Sri Lanka a adopté une stratégie de développement axée sur l'extérieur dès 1977, mais depuis lors son programme de réforme ne progresse pas sans heurts pour plusieurs raisons, notamment à cause des troubles civils. Les réformes se sont toutefois poursuivies et le processus de privatisation a fini par aller de l'avant. Sri Lanka a intensifié ses efforts d'ajustement en 1988 et a ramené son déficit budgétaire de 15,7 % du PIB en 1988 à 7,4 % en 1992. Par ailleurs, la réforme des systèmes d'échanges et de paiements extérieurs a joué un rôle important. Pendant la période allant de 1990 à 1993, les transactions extérieures courantes et les opérations qu'enregistrent les postes importants du compte des mouvements de capitaux ont elles aussi été libéralisées; il est notamment devenu plus facile de rapatrier les bénéfices et les dividendes et, pour les résidents, d'ouvrir des comptes en devises. En 1992, le système tarifaire simplifié ne comportait plus que quatre taux (allant de 10 % à 50 %), et la plupart des mesures de protection non tarifaires avaient été éliminées (sauf pour les produits agricoles). Depuis longtemps, les entreprises publiques occupent une place prédominante dans l'économie et il a été difficile d'opérer des améliorations durables dans ce domaine, car les privatisations soulevaient manifestement de graves difficultés sur le plan politique. Néanmoins, le processus a vraiment commencé de façon sérieuse en 1990. Les entreprises publiques du secteur des industries extractives ont toutes été privatisées en 1990-92. En 1992, le programme a gagné un certain appui politique et les réformes réglementaires et fiscales ont encouragé de nouvelles privatisations et facilité les inlvestissements directs étrangers. Depuis juin 1992, une trentaine d'entreprises industrielles ont été privatisées sur un total de 159. D'importants progrès ont également été accomplis dans la privatisation de la gestion: dans le secteur agricole, le gouvernement a transféré à des sociétés privées la gestion de la plupart des plantations de cultures commerciales appartenant à l'État selon un système fondé sur le partage des bénéfices. 2.13 Réforme du secteur financier. Les systèmes financiers dans les pays à faible revenu se caractérisaient généralement par des normes prudentielles peu rigoureuses, un manque de contrôle, une concurrence limitée, de lourdes pertes sur les prêts, des coûts de fonctionnement élevés et l'interférence des forces politiques. Les réformes ont essentiellement porté sur le secteur bancaire officiel et elles visaient à réduire la répression financière, à rétablir la solvabilité des banques - notamment en les restructurant et en affermissant leur assise financière - et à améliorer l'infrastructure administrative. 2.14 De grands progrès ont été accomplis dans la libération des taux d'intérêt, qui sont devenus positifs en termes réels. Les réformes du secteur financier n'ont toutefois pas beaucoup avancé dans la plupart des cas, parce qu'un grand nombre d'entre elles viennent tout juste d'être engagées et aussi parce qu'elles ne peuvent donner des résultats appréciables sans une réforme simultanée des entreprises publiques déficitaires. Par ailleurs, il faut du temps pour restructurer ou privatiser les banques, améliorer le contrôle bancaire et opérer les modifications juridiques et institutionnelles nécessaires pour passer au contrôle monétaire indirect. En Bolivie, par exemple, des réformes du secteur financier ont été amorcées en 1987 et des progrès considérables ont été réalisés depuis lors 45 Bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement dans les domaines suivants : amélioration du cadre réglementaire et juridique, fermeture des banques d'État, renforcement du contrôle bancaire et libération des taux d'intérêt. Cependant, il reste encore beaucoup à faire pour développer le marché des capitaux et rationaliser le système de pensions. Ouelques enseignements à tirer 2.15 Croissance. Comment ont évolué les revenus dans les pays à faible revenu? Le taux moyen de croissance du PIB réel dans ces pays a été de 2,6 % par an au cours de la période 1987-92, soit un niveau voisin de celui de la période 1981-86, mais avec des différences notables d'un pays à l'autre. Maints pays ont enregistré des taux de croissance supérieurs à 4 %, par exemple le Burundi, la Chine, le Ghana, l'Inde, le Nigéria, le Népal, l'Ouganda, le Pakistan, la République démocratique populaire lao et la Tanzanie. En revanche, de nombreux autres ont continué à souffrir d'une diminution du revenu par habitant, en particulier les pays d'Afrique subsaharienne. 2.16 Diverses analyses et études usant des méthodes différentes tendent à démontrer que les pays à faible revenu qui persévèrent dans leurs efforts d'ajustement pendant un certain laps de temps obtiennent en général de meilleurs résultats qu'avant la période d'ajustement et que les autres pays. C'est incontestable en ce qui concerne le groupe des pays à faible revenu. Pour les besoins de l'analyse, ce groupe a été divisé en deux sous-groupes: le groupe A comprend les 25 pays qui ont reçu une aide au titre d'accords FAS/FAS renforcée et/ou au moins un prêt à l'ajustement (y compris les prêts de la BIRD aux pays pouvant bénéficier d'un financement mixte BIRD/IDA) pendant les deux dernières périodes de base de l'IDA4. Le groupe B englobe tous les autres pays de l'échantillon dont les programmes d'ajustement ont souvent subi des interruptions majeures ou viennent tout juste de démarrer5. 2.17 Cette comparaison montre que le taux moyen de croissance des pays du groupe A a progressé, passant de 1,9 % en 1981-86 à 3,1 % en 1987-92. En revanche, il est tombé de 2,7 % 4 Bangladesh, Bénin, Bolivie, Burundi, Côte d'Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guyana, Honduras, Kenya, Lesotho, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, Mozambique, Niger, Ouganda, Philippines, Rép. dém. populaire lao, Sénégal, Sri Lanka, Tanzanie et Togo. 5 Ce groupe se compose des pays suivants : Albanie, Angola, Burkina Faso, Éthiopie, Égypte, Guinée-Bissau, Haiti, Mongolie, Nicaragua, Népal, Nigéria, Pakistan, République arabe du Yémen, République Centraficaine, République Dominicaine, République kirghise, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Tchad, Zaire, Zambie et Zimbabwe. Il ne comprend pas les petites économies insulaires dont le revenu par habitant dépasse le plafond opérationnel d'admissibilité aux crédits de l'IDA, ni l'Afghanistan, le Cambodge, le Libéria, le Myanmar et le Viet Nam. La Chine et l'Inde ne figurent ni dans le groupe A ni dans le groupe B en raison de leur très grande taille, mais elles sont classées dans le groupe C (tableau 1) qui comprend également les pays du groupe A. La comparaison des groupes B et C corrobore les conclusions de la présente analyse. A noter également que les groupes A et C se sont bien mieux comportés que le groupe B, en dépit du fait que la tendance d'évolution de leurs termes de l'échange n'était pas favorable (tableau 1). On se reportera aux études réalisées par la Banque et le FMI, en particulier aux rapports cités à la note 1, pour une analyse plus détaillée des nombreux facteurs qui expliquent ces résultats. 46 Bldan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement en 1981-86 à 1,3 % en 1987-92 pour les autres pays (groupe B). Ces résultats concordent avec l'une des principales conclusions présentées dans le document de la Banque mondiale intitulé «Troisième rapport sur les prêts à l'ajustement»6 ainsi qu'avec le bilan détaillé que le FMI a dressé de l'application des accords FAS/FAS renforcée des dix-neuf pays considérés. 2.18 La comparaison confirme aussi l'une des constatations les plus courantes, à savoir que la stabilisation macroéconomique va de pair avec une croissance plus forte. Les pays du groupe A sont parvenus à réduire sensiblement l'inflation et les déficits budgétaires en 1987-92, par rapport à la période précédente. En revanche, les pays du groupe B ont connu une aggravation de l'inflation et n'ont opéré aucune réduction significative de leur déficit budgétaire pendant les périodes susmentionnées (tableau 1). En ce qui concerne le secteur extérieur, les progrès ont été moins nets. Le déficit extérieur courant s'est creusé en moyenne de quelque 2 points de pourcentage du PIB pour les pays du groupe A, ce qui tient à la forte dégradation des termes de l'échange, à l'augmentation des investissements et à l'accroissement des financements concessionnels disponibles. 2.19 Les enseignements décrits ci-après sont particulièrement notables. * Les pays qui ont déployé des efforts de réforme soutenus ont obtenu des résultats encourageants. Ceux qui ont le mieux réussi ont mis l'accent sur la stabilité macroéconomique, le réalisme du taux de change et l'ouverture sur l'extérieur. * Pour mettre l'économie sur un sentier de croissance plus vive et durable, il faut opérer des réformes structurelles fondamentales de longue haleine. C'est le cas notamment pour l'agriculture, secteur dont les pays à faible revenu sont fort tributaires. Au niveau de la production, la réaction a été rapide et vigoureuse, parfois même tout à fait spectaculaire pour certaines cultures (par exemple la culture du riz au Guyana et au Viet Nam). Cependant, pour que ces progrès soient durables et gagnent l'ensemble du secteur agricole, il faut qu'en retour celui-ci reçoive des flux de capitaux privés (ainsi que de meilleures techniques) et de main-d'oeuvre. Ce type d'ajustement fondamental prend du temps étant donné que les nouvelles politiques doivent devenir crédibles. * Les mesures destinées à promouvoir l'investissement privé - tant national qu'étranger - sont déterminantes pour la croissance à long terme, mais l'investissement privé réagit avec des décalages considérables dans les pays à faible revenu. Il est non seulement nécessaire d'établir la crédibilité des réformes macroéconomiques, mais pour développer le secteur privé il faut aussi prendre des mesures complémentaires afin de surmonter des obstacles aussi importants que l'existence de systèmes juridiques et réglementaires inadéquats ou mal administrés, le mauvais fonctionnement des 6 La version mise à jour de ce rapport indique qu'en ce qui concerne le groupe des pays qui ont procédé à un ajustement intensif, tels qu'ils sont définis dans le rapport, le taux de croissance est passé de 1,3 % en 1981-86 à 2,8 % en 1987-92. D'après une autre étude, pour le groupe des pays bénéficiant du Programme spécial d'assistance pour l'Afrique (PSA), le taux de croissance a été de 3,2 % par an en moyenne entre 1988 et 1991, contre 1,4 % pour les pays d'Afrique non inclus dans ce programme. 47 Bdan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de fiancement institutions et des marchés, l'insuffisance des infrastructures et celle des ressources humaines. * Trois éléments sont déterminants pour la réussite de l'ajustement: il faut que les affaires publiques soient bien conduites, que les institutions soient solides et efficaces et que le pays emprunteur soit le maître d'oeuvre du programme. Plus le pays et l'ensemble de sa population participent à la conception et à la réalisation du programme, plus il a de chances de réussir. Le degré de participation dépend énormément de la qualité de la fonction publique et des institutions locales, du savoir- faire technique dont dispose l'emprunteur et de la volonté des dirigeants politiques de 7 faire aboutir le processus de réforme7. 2.20 Lutte contre la pauvreté. La pauvreté est un problème persistant. Durant les années 80, le mouvement général d'amélioration du niveau de vie s'est ralenti. Parmi les pays à faible revenu, le nombre de ceux où la pauvreté sévit a légèrement diminué depuis cinq ans, mais les progrès ont été lents et inégaux. Comme il ressort du tableau 1, les revenus par habitant n'ont que modérément augmenté entre 1987 et 1992; ils ont en fait diminué dans les pays du groupe B, dont les programmes d'ajustement ont subi des interruptions majeures ou viennent tout juste de démarrer. Pour faire reculer la pauvreté, il faut une croissance bien plus rapide, largement répartie dans l'économie et à forte intensité de main-d'oeuvre. En d'autres termes, il faut éviter les préjugés à l'égard du secteur agricole et du travail manuel dans les choix de politique économique : pour que la croissance soit équitable, le secteur rural doit participer pleinement au processus (voir l'encadré 1). Même si la croissance est largement répartie, d'importants aspects de l'activité économique ou de larges segments de la population peuvent être laissés pour compte. Pour s'attaquer à ces problèmes, il est nécessaire de cibler les mesures de lutte contre la pauvreté. Il faut réaffecter les dépenses publiques aux secteurs sociaux, car l'accès des pauvres aux services sociaux de base et la mise en place de dispositifs de protection sociale font partie intégrante de la lutte contre la pauvreté8. Les programmes d'ajustement favorisent maintenant de plus en plus la réaffectation des dépenses publiques qui s'impose. Il ne faut pas laisser se relâcher l'attention accordée au ciblage des dépenses publiques et à la création de dispositifs de protection des pauvres et des couches vulnérables pendant la période d'ajustement9. 2.21 L'environnement. La relation qui existe entre l'ajustement et l'environnement est un sujet complexe et encore imparfaitement compris, bien qu'il fasse l'objet de multiples études. Des rapports positifs ou négatifs peuvent se nouer du fait de fluctuations des prix relatifs - changements, 7 Voir en particulier l'étude du Département de l'évaluation rétrospective des opérations intitulée «Adjustment in Sub-Saharan Africa: Selected Findings from OED Evaluations». 8 D'après le Troisième rapport sur les prêts à l'ajustement, la part du total de l'éducation et de la santé dans le total des dépenses publiques a augmenté dans quelques-uns des pays en cours d'ajustement entre la première et la deuxième moitié des années 80. Il est toutefois difficile d'analyser avec précision ces dépenses parce que les données à ce sujet font défaut. 9 Les dispositifs de protection sociale sont examinés dans un document distinct établi pour la réunion du Comité du développement de septembre 1993. 48 Bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement entre autres, de la structure des impôts, des droits de douane, des salaires réels, des taux de change, et il est bien souvent difficile, voire impossible, d'en déceler l'incidence ultime sur l'environnement. Il est clair cependant que beaucoup des éléments classiques du processus d'ajustement s'accordent avec les objectifs écologiques. En général, les efforts visant à faire concorder les prix avec le coût des ressources sont bons pour l'environnement parce qu'ils découragent le sous-emploi ou le gaspillage des ressources. C'est par exemple ce qui se passe lorsque l'on réforme la tarification de l'énergie et des eaux, ou encore lorsque l'on réduit les subventions pour les intrants agricoles tels que les pesticides. De plus, les mesures visant à stimuler la croissance, qui créent des emplois dans l'industrie ou l'agriculture, peuvent aussi réduire la pauvreté et éviter que les pauvres qui ne possèdent pas de terres ne surexploitent les ressources marginales et librement accessibles (mangroves et forêts par exemple). Ces divers exemples montrent que beaucoup de réformes permettent de «gagner sur tous les tableaux», lorsqu'elles concilient les objectifs écologiques, économiques et sociaux. 2.22 Certaines mesures d'ajustement peuvent toutefois avoir des conséquences défavorables prévisibles pour l'environnement, par exemple la compression des dépenses publiques lorsque l'on cherche à réduire le déficit du budget de l'Etat. Si les défenseurs de l'environnement ont peu d'audience, les crédits alloués à la préservation de la nature et à la lutte contre la pollution risquent de subir des coupes disproportionnées. En pareil cas, il peut être utile de prévoir des mesures spécifiques de protection de l'environnement, comme on prévoit des mesures de protection sociale lorsque l'objectif est de lutter contre la pauvreté. Il est plus difficile de prévenir les conséquences beaucoup moins évidentes que l'ajustement peut avoir pour l'environnement; il s'agit de ce qui se passe lorsque l'on entreprend des réformes macroéconomiques ou sectorielles alors que les ressources continuent à être sous-évaluées ou avant d'opérer les réformes de la fiscalité ou des institutions nécessaires pour éviter les retombées défavorables sur l'environnement. La libéralisation du commerce, par exemple, peut encourager la déforestation ou la pêche abusive du fait que les prix à la production augmentent - si on laisse persister les distorsions causées par la politique menée de longue date et consistant à fixer très bas le prix du bois d'abattage ou à ne pas limiter l'accès aux domaines de pêche. L'encouragement des activités industrielles, propre à favoriser la croissance et à réduire la pauvreté, peut causer une pollution excessive si l'on ne met pas en place des systèmes de taxes pour l'environnement et des institutions pour la réglementation du secteur. En pareil cas, la solution n'est pas de retarder la stabilisation ou le processus d'ajustement, mais plutôt d'incorporer dans le programme des mesures spécifiques, créant les instruments fiscaux ou institutionnels requis pour atténuer les atteintes à l'environnement. III. Plan d'action Perspectives en matière de politique économique 3.1 Pays en développement. Comme l'indique le bilan qui précède, les pays à faible revenu qui n'ont pas encore assuré la stabilité macroéconomique et jeté les bases d'une croissance soutenue devraient amorcer le processus le plus tôt possible. En effet, s'il porte ses fruits à court et à moyen terme, ce processus peut aussi demander beaucoup de temps. Les pays qui ont entrepris l'ajustement de leur économie, quant à eux, doivent persévérer. Leurs réformes doivent viser à établir une croissance harmonieuse - avec une inflation faible et des comptes extérieurs viables - étayée par des interventions visant spécifiquement à lutter contre la pauvreté et par des mesures 49 Bdan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de fiancement de protection de l'environnement. Un des éléments de ces réformes doit être la création et le soutien de régimes libéraux de change et de commerce - même si les négociations de l'Uruguay Round continuent à piétiner - ainsi que de marchés compétitifs de manière à promouvoir un secteur privé dynamique. 3.2 Étant donné la nécessité d'accroître l'épargne intérieure dans la plupart des pays en développement, la réduction des déficits budgétaires, conjuguée à un effort plus énergique de réforme des entreprises publiques, libérerait les ressources dont les pays ont tant besoin pour rehausser leurs taux de croissance et d'investissement. La rationalisation accrue des dépenses publiques, si elle fait diminuer les dépenses improductives, notamment les dépenses militaires, permettrait de rehausser l'efficience économique et le bien-être social. La mise en place de dispositifs de sécurité régionaux efficaces et la réduction des ventes d'armes officielles pourraient être déterminantes à cet égard. Il faudrait encourager beaucoup plus l'épargne privée en réformant les secteurs bancaires et financiers et en élargissant les marchés des capitaux. 3.3 Les perspectives d'avenir des pays à faible revenu ne permettent aucune complaisance. L'ajustement est un processus difficile, même avec des dispositifs de protection sociale solides pour protéger les populations vulnérables et pauvres. Pour qu'il soit durable, il faut que les gouvernants et l'ensemble de la population aient le sentiment d'en être les maîtres d'oeuvre. C'est là une affaire de bonne gestion de la chose publique, qui requiert stabilité et participation. 3.4 Les réformes des institutions devraient occuper une place de choix dans les programmes de réforme et il faut renforcer les ressources administratives. Les organisations bilatérales et multilatérales devront continuer à fournir de l'assistance technique pour améliorer les capacités des institutions et des administrations ainsi que la collecte des données et les méthodes comptables. Dans nombre de cas, il faudra que l'assistance technique soit bien ciblée et programmée afin d'étoffer les moyens d'exécution des pouvoirs publics, en particulier pour ce qui touche à l'examen et au contrôle des dépenses publiques, à la réforme de la fiscalité et à l'administration de l'impôt, ainsi qu'à la réforme des entreprises publiques et du secteur financier. 3.5 Pays industrialisés. C'est aux pays industrialisés qu'incombe pour l'essentiel la responsabilité d'améliorer l'environnement économique mondial. Comme les pays à faible revenu, ils doivent mener avec persévérance des politiques macroéconomiques et structurelles saines. Le déploiement systématique de la stratégie à moyen terme de rééquilibrage des finances publiques aura un effet favorable sur les taux d'intérêt, l'investissement privé et la création d'emplois, ainsi que sur l'offre d'épargne qui est nécessaire pour financer l'investissement et la croissance dans les pays en développement. Les mesures structurelles visant à améliorer l'allocation des ressources et le fonctionnement efficace des marchés du travail et des produits sont tout aussi importantes pour accélérer la croissance de la production, qui elle-même renforcera la demande intérieure. 3.6 Il est crucial et urgent de mener à bon terme les négociations de l'Uruguay Round. L'échec de ces pourparlers au sein du GAIT risquerait d'intensifier les pressions protectionnistes. Il est indispensable pour assurer le succès à long terme des efforts de réforme des pays à faible revenu que les pays industrialisés prennent des mesures pour ouvrir leurs marchés, en particulier aux produits textiles et agricoles. Dans la période de transition qui devrait déboucher sur une efficacité accrue dans un climat de plus grande liberté des échanges, certains pays qui ne peuvent se passer actuellement d'importations alimentaires subventionnées et de préférences commerciales risquent 50 Bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement d'avoir de plus grands besoins de financement. En tout état de cause, les pays à faible revenu devront poursuivre leurs efforts de réforme, notamment dans le domaine commercial, pour se préparer à mieux soutenir la concurrence sur un marché libre. Conséquences pour le financement 3.7 À quelques exceptions près, comme la Chine et l'Inde, la plupart des pays à faible revenu - même ceux qui ont mis en oeuvre pendant des années d'ambitieux programmes de réformes - n'ont actuellement guère ou pas du tout accès aux marchés internationaux des capitaux. En conséquence, ils devront redoubler d'efforts pour mobiliser l'épargne intérieure et pour continuer à attirer des flux de capitaux privés, ainsi que des flux d'aide publique extérieure, surtout concessionnels, pour financer les investissements nécessaires afin d'assurer une croissance durable et une position extérieure viable. Étant donné que le monde se dispute de plus en plus les ressources financières et qu'un grand nombre de pays industrialisés ont des contraintes budgétaires, les pays à faible revenu devront miser davantage sur l'épargne intérieure et en même temps montrer qu'ils utilisent à bon escient l'aide qu'ils reçoivent. Voilà qui exigera un effort constant de réforme structurelle, en vue notamment d'accroître l'épargne et l'efficacité du secteur public et de progresser dans des domaines tels que la lutte contre la pauvreté et la mise en valeur des ressources humaines. De la part des donateurs et créanciers officiels, il faudra un appui constant et ferme sous des formes variées, notamment des allégements de dettes, des financements concessionnels et des crédits officiels à l'exportation, entre autres. 3.8 L'évolution à moyen terme des besoins de financement extérieurs des pays à faible revenu dépend de la vigueur des réformes, de la demande mondiale et des termes de l'échange. En raison de l'interaction complexe de ces facteurs, les perspectives sont très incertaines et on ne peut donner que des ordres de grandeur pour les besoins de financement globaux. Mis à part la Chine, les financements bruts accordés aux pays à faible revenu se sont chiffrés à 59 milliards de dollars E.U. par an en 1987-92; on s'attend à une légère diminution pour la période 1993-97, où ils se réduiraient à 54 milliards de dollars E.U. par an (tableau 2)10. Les chiffres globaux sont peu parlants, car on peut s'attendre à ce que les besoins et les sources de financement se modifient beaucoup dans chaque région et d'une région à l'autre. La diminution des besoins globaux tiendrait en grande partie à une baisse sensible des paiements d'amortissement inscrits à l'échéancier dans le cas de quelques pays qui ont bénéficié d'un important allégement de dette (I'Égypte, par exemple). Les chiffres globaux masquent aussi une perspective bien réelle pour de nombreux pays à faible revenu, en particulier d'Afrique et d'Asie, à savoir que leurs besoins de financement restent élevés, et même qu'ils s'accroissent dans certains cas. D'après les estimations des services de la Banque mondiale et du FMI, les besoins de financement de la région Afrique pourraient dépasser l'estimation actuelle de 23 milliards de dollars E.U., si d'importants efforts d'ajustement étaient entrepris dans des cas exceptionnellement difficiles, tels que le Libéria, la Somalie, le Soudan et le Zaïre. À l'évidence, tout dérapage sérieux des programmes de réforme que déploient les pays à faible revenu, ou toute évolution défavorable de l'environnement extérieur auquel ils doivent faire face, modifiera les besoins de financement brut et la répartition du financement. 10 Par besoins de financement bruts on entend le déficit extérieur courant, non compris les dons, les paiements d'amortissement, la réduction ou l'élimination des arriérés et la constitution de réserves, selon la définition donnée dans les Perspectives de l'économie mondiale de mai 1993. 5 1 Bian de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement 3.9 L'ensemble des prêts et des dons officiels permettrait, d'après les projections, de couvrir environ les deux tiers des besoins de financement prévus. Un allégement sensible de la dette - il représentait en moyenne quelque 15 milliards de dollars E.U. par an, soit 25 % de la dette totale, au cours des cinq dernières années - continuera d'être nécessaire, de même que d'autres concours exceptionnels de balance des paiements, en provenance de sources bilatérales et multilatérales, notamment le FMI et la Banque mondiale. 3.10 La dette extérieure totale des pays à faible revenu était estimée à environ 500 milliards de dollars E.U. à la fin de 1992, soit 219 % des recettes d'exportation. Le poids de l'endettement varie toutefois beaucoup d'un pays à l'autre: le ratio dette/exportations s'échelonne de 1.800 % au Mozambique à 80 % en Chine. Le ratio global du service de la dette (sur la base des droits et obligations constatés) est estimé à 43 %, mais pour un grand nombre de ces pays il est proche de 70 %; sur la base des encaissements et décaissements, le ratio global du service de la dette est estimé à 20 %. 3.11 Étant donné la lourde charge que représente la dette pour bon nombre de pays à faible revenu, le Club de Paris a accordé d'importants allégements de dette, offrant une série de concessions encore plus avantageuses qu'auparavant qui permettent une réduction de 50 % de la valeur nette actualisée des montants consolidés et il s'est déclaré prêt à envisager d'éventuelles réductions de l'encours de la dette après une période d'ajustement soutenu de trois à quatre ans1l. Pour de nombreux pays, les instruments mis en place, de pair avec l'application par tous les créanciers de l'assortiment des concessions plus avantageuses que celles définies à Toronto, devraient suffire à résoudre les problèmes d'endettement extérieur à condition que les futures opérations de réduction de l'encours de la dette s'effectuent avec souplesse. Des réductions plus rapides de l'encours de la dette opérées cas par cas pourraient avoir l'effet très bénéfique de renforcer la confiance des investisseurs. Il importe de veiller à ce que les opérations de , désendettement ne compromettent pas l'assistance financière directe à ces pays. S'il est vrai qu'ils reçoivent un soutien de trésorerie immédiat et non négligeable, nombre de pays à faible revenu en cours d'ajustement ont cependant des problèmes d'endettement très graves à plus long terme et même une réduction de 50 % de la dette ne suffirait pas pour permettre à ceux qui sont exceptionnellement endettés d'atteindre une position extérieure viable, même avec un effort d'ajustement soutenu. Dans un certain nombre de cas où la dette représente une charge particulièrement lourde, les créanciers devront donc faire preuve de la souplesse requise et aller au-delà des modalités actuelles d'allégement de la dette et de rééchelonnement des flux de paiement. 3.12 Plusieurs pays à faible revenu ont contracté une grande partie de leurs obligations auprès de créanciers bilatéraux qui ne sont pas membres du Club de Paris (l'ex-URSS et les pays de l'OPEP, par exemple). Dans quelques cas (les Fonds arabes par exemple), il s'agit pour une large part de crédits concessionnels; dans d'autres, c'est l'inverse. Ces dettes posent les mêmes problèmes que les créances détenues par les membres du Club de Paris. Certains de ces créanciers ont eux aussi accordé un allégement de dette concessionnel, avec une réduction de la valeur nette actualisée 11 Les 17 pays à faible revenu qui ont conclu des accords de rééchelonnement avec le Club de Paris depuis décembre 1991 ont tous bénéficié de concessions encore plus généreuses qu'auparavant, en général pour une période de plusieurs années sur la base d'accords au titre de la FAS renforcée ou, dans deux cas, de programmes d'accumulation de droits. 52 Bila de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement supérieure à 50 %, mais, dans d'autres cas, la restructuration de la dette n'a pas encore eu lieu. Il importera que les autres créanciers bilatéraux appliquent des conditions comparables aux concessions plus avantageuses offertes par le Club de Paris. Cela est aussi valable pour les créanciers privés (banques commerciales et crédits-fournisseurs) qui détiennent un grand volume de créances sur certains pays à faible revenu. 3.13 En plus des allégements de dette, la plupart des pays à faible revenu continueront à avoir grand besoin d'aide financière bilatérale. La stratégie qui consiste à subordonner les anciennes créances aux nouvelles en définissant des dates butoirs a permis aux créanciers du Club de Paris d'accorder de nouveaux crédits. 3.14 Étant donné l'endettement de la plupart des pays à faible revenu et le niveau de leur revenu, il est probable que dans l'avenir prévisible leurs besoins de financement seront couverts principalement par des flux concessionnels. Les dons, qui représentaient 55 % du total des flux d'APD au début des années 80, en représentent maintenant les deux tiers. Pour que les apports d'aide aux pays à faible revenu se poursuivent, ceux-ci doivent montrer qu'ils en font un usage efficace - ce qui suppose de meilleurs résultats économiques qui leur permettent de devenir progressivement moins tributaires de l'aide, des progrès dans la lutte contre la pauvreté, des réformes politiques et une restructuration efficace des dépenses publiques. Quant aux bailleurs de fonds, en concentrant leurs efforts d'assistance sur les pays à faible revenu qui entreprennent de vigoureuses réformes, ils en accroîtraient l'efficacité et aideraient à remobiliser l'opinion en faveur de l'aide publique. 3.15 La conjonction de meilleurs résultats économiques et des apports d'aide publique peut catalyser les flux privés, comme on l'a vu dans plusieurs pays d'Asie et d'Amérique latine12. Les apports de capitaux privés et l'investissement direct étranger jouent un rôle important et des réformes macroéconomiques et structurelles convaincantes visant à construire un secteur privé solide ont aidé à attirer ce genre de flux dans un nombre limité mais croissant de pays à faible revenu, aussi importe-t-il de poursuivre cet effort. Par ailleurs, pour les pays qui ont éprouvé des difficultés à assurer le service de leur dette, il sera important de régulariser les relations avec les créanciers, notamment en procédant, le cas échéant, au rachat des dettes anciennes envers les banques commerciales moyennant d'importantes décotes dictées par le marché; ces rachats seraient financés à l'aide de dons et faciliteraient l'accès, en particulier aux crédits commerciaux, à des conditions moins onéreuses. Progressivement, à mesure que les réformes feront effet et que les résultats économiques s'amélioreront, on peut s'attendre à ce que les pays à faible revenu soient plus nombreux à pouvoir compter de plus en plus sur des flux de capitaux privés. Le rôle des institutions financières internationales 3.16 Le processus de réforme des pays à faible revenu est long, il exige un effort soutenu, mais il est maintenant bien engagé dans un grand nombre de pays et il mérite de continuer à recevoir l'appui de la communauté internationale sous forme de ressources concessionnelles. Ce soutien de la communauté internationale pourrait bien être d'autant plus efficace que ces pays sont plus ouverts 12 Le sujet des flux de capitaux privés a été examiné à la réunion du Comité du développement de mai 1993. 53 Bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement aux réformes propres à favoriser le jeu des forces du marché et qu'ils en ont déjà acquis une certaine expérience. Les bailleurs de fonds devront travailler en étroite collaboration avec les pays qui ont entrepris des réformes et avec les institutions financières internationales pour bien coordonner les conseils de politique économique, mettre le financement extérieur à la disposition des pays en temps voulu et à des conditions appropriées et leur fournir l'assistance technique requise en temps opportun. Les bailleurs de fonds et les institutions financières internationales devraient aussi veiller à affecter l'aide en priorité aux pays qui persévèrent dans leurs réformes. 3.17 La Banque mondiale et le Fonds monétaire international ont contribué de façon décisive au soutien des réformes, en fournissant des conseils de politique économique, des ressources financières et de l'assistance technique. Les prêts du FMI au titre de la FAS renforcée et les crédits à l'ajustement de l'IDA, opérations pour lesquelles les pays définissent le cadre de leur politique structurelle et macroéconomique à moyen terme, ont été des éléments essentiels et complémentaires d'un réseau croissant d'assistance bilatérale et multilatérale à l'appui des efforts de réforme des pays à faible revenu. Pour les bailleurs de fonds qui soutenaient le processus de réforme, les documents- cadres de politique économique (DCPE), décrivant le cadre de la politique à moyen terme et les besoins de financement, fournissaient un contexte pour l'instruction des dossiers d'assistance. Du fait de l'intensification des relations avec la Communauté européenne, le cadre macroéconomique et structurel défini dans les DCPE est maintenant devenu un élément des programmes indicatifs pour le financement de l'ajustement structurel dans le cadre de Lomé IV. Les DCPE sont également pris en considération par les banques régionales de développement. 3.18 Le FMI favorise le développement d'un environnement mondial propice par la surveillance qu'il exerce sur les politiques de tous les pays membres. Il remplit cette mission en tenant des consultations au titre de l'article IV avec chacun des pays membres et en procédant à l'examen continu des perspectives de l'économie mondiale, par l'analyse multilatérale des conséquences des politiques suivies par chaque pays pour le fonctionnement de l'ensemble du système monétaire international. Des mesures ont récemment été prises pour renforcer la surveillance et donner plus de continuité et de souplesse aux activités de surveillance du Conseil d'administration, améliorer la qualité et le ciblage des travaux menés par les services du FMI et intensifier la coopération avec les pays membres. Ces mesures visent à accroître le rôle que joue l'institution pour encourager l'application de politiques appropriées et cohérentes dans un cadre à moyen terme en vue d'établir les bases de l'expansion du commerce, de l'investissement et de la croissance à l'échelle mondiale. 3.19 L'aide concessionnelle fournie par le FMI au titre de la facilité d'ajustement structurel et de la facilité d'ajustement structurel renforcée a été son principal instrument d'appui aux pays à faible revenu et elle a permis de catalyser d'autres sources de financement, notamment sous forme d'allégements de la dette et d'apports de fonds. Les montants engagés au titre de la FAS et de la FAS renforcée entre 1986 et juin 1993 totalisent 6,8 milliards de dollars E.U. (les ressources provenant du Compte des ressources générales du FMI se sont chiffrées à 14,8 milliards de dollars E.U. pendant cette période). Au vu des résultats positifs obtenus jusqu'à présent dans le cadre de la FAS renforcée et de la persistance des besoins d'ajustement et de financement des pays admis à bénéficier de ses ressources, le Comité intérimaire et le Comité du développement sont convenus en mai 1993 que le FMI doit continuer à fournir ce genre d'aide concessionnelle et ils ont vivement recommandé qu'un nouveau mécanisme soit mis en place d'ici à la fin de novembre 1993 pour succéder à la FAS renforcée et assurer la continuité de ses opérations. Le volume de prêts qui servirait à financer le nouveau mécanisme, et fait actuellement l'objet de pourparlers avec les 54 Bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement contributeurs éventuels, doit permettre au FMI de continuer à couvrir sa part des besoins de financement des pays à faible revenu (décrits ci-dessus) au cours des cinq prochaines années. Le montant total de ressources requis pour la bonification du mécanisme qui remplacera la FAS renforcée est assez faible et couvrirait une période de fonctionnement relativement longue. Dans le cadre de ce mécanisme, outre l'approche actuelle des réformes macroéconomiques et structurelles, les objectifs prioritaires seront les suivants: intensifier les efforts visant à améliorer la qualité des données et à renforcer les moyens administratifs de la réforme en s'attachant davantage à fournir en temps voulu une assistance technique bien ciblée, en collaboration avec d'autres institutions, dont la Banque et les bailleurs de fonds bilatéraux, qui viendront compléter les programmes appuyés par la FAS renforcée. Les pays seraient encouragés à réexaminer en temps opportun les objectifs et politiques de leur programme en fonction des variations imprévues de la situation extérieure, en usant notamment de mécanismes pour imprévus, et à intégrer dans leurs programmes des dispositifs de protection sociale bien conçus. 3.20 L'IDA a appuyé des réformes au niveau macroéconomique et sectoriel en combinant des opérations à décaissement rapide et des investissements avec une assistance technique. Pour aider les pays à faible revenu à faire face à la deuxième crise pétrolière, l'IDA a mis en place en 1980 des crédits à l'ajustement en faveur de réformes. Pendant la période 1980-85, les engagements de l'IDA ont atteint environ 20,0 milliards de dollars E.U., dont 1,6 milliard de dollars E.U. au titre de crédits à l'ajustement structurel et sectoriel. Cette aide s'est développée de façon régulière à mesure que les pays étaient de plus en plus nombreux à adopter des programmes d'ajustement. Entre 1986 et juin 1993, les engagements de l'IDA en faveur des pays à faible revenu ont totalisé 40,2 milliards de dollars E.U., dont 9,5 milliards de dollars E.U. au titre d'opérations d'ajustement. En plus de ces ressources, plusieurs pays pouvant bénéficier d'un financement mixte ont reçu des prêts à l'ajustement de la BIRD représentant au total 0,6 milliard de dollars E.U. au cours de la période 1980-85 et 5,4 milliards de dollars E.U. entre 1986 et juin 1993. Si l'on fait la somme de l'aide apportée par l'IDA et par la BIRD, le total des engagements depuis 1980 se chiffre donc à 65,5 milliards de dollars E.U., dont 16,5 milliards de dollars E.U. au titre de prêts et crédits à l'ajustement. 3.21 L'IDA continue elle aussi à jouer un grand rôle de catalyseur pour d'autres financements, grâce aux cofinancements, d'une part, et aux financements coordonnés, d'autre part. Par exemple, le Programme spécial d'assistance pour l'Afrique (PSA), mis en place en 1988, favorise une stratégie qui allie des concours concessionnels supplémentaires et l'allégement de dette de la part de multiples bailleurs de fonds. Le PSA (première phase) a permis de mobiliser 5,6 milliards de dollars E.U. en 1988-90 et les bailleurs de fonds se sont engagés à verser environ 7,0 milliards de dollars E.U. pour la période 1991-93. L'allégement de dette accordé au titre du PSA vient s'ajouter aux réductions de dette opérées dans le cadre du Fonds de désendettement des pays que l'IDA a créé en 1989, à l'aide d'un don de 100 millions de dollars E.U. prélevé sur le bénéfice net de la BIRD, pour aider les pays, exclusivement IDA, qui sont lourdement endettés et appliquent des programmes d'ajustement; ce fonds poursuit ses opérations avec le même volume de ressources. Les bailleurs de fonds ont décidé de verser 18 milliards de dollars E.U. au cours de la période de base de la Dixième reconstitution des ressources de l'IDA (exercices 94-96), mais l'application de cette décision requiert des dispositions législatives qui n'ont pas encore été prises. 3.22 Tout au long de cette période, le champ des réformes que l'assistance de l'IDA servait à soutenir n'a cessé de s'élargir: ces réformes ont porté sur la fiscalité, la gestion des dépenses 55 Bian de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de fiancement publiques, les institutions et mesures intéressant le secteur bancaire et financier, la politique commerciale, les entreprises publiques, les privatisations, les programmes sociaux, la déréglementation des prix et du commerce, l'amélioration de la gestion de l'environnement et les réorientations de la politique économique dans divers secteurs tels que l'agriculture et l'énergie. L'assistance de l'IDA à l'appui de ces réformes a gagné en efficacité grâce aux bilans des résultats de l'ajustement que l'organisation effectue périodiquement ainsi qu'aux travaux du Département de l'évaluation rétrospective des opérations et à ceux de critiques indépendants. L'IDA a formulé à l'intention de ses services les directives suivantes, qui définissent les éléments qui conditionnent l'octroi des crédits à l'ajustement. L'initiative du programme d'ajustement doit venir du gouvernement du pays intéressé, qui doit aussi en diriger la mise au point; les services de l'IDA doivent encourager les autorités à garder la maîtrise des programmes et éviter les prêts à l'ajustement lorsque le large appui politique souhaitable fait défaut; les mesures soutenues par des opérations ou des bailleurs de fonds différents doivent être conçues comme faisant partie d'un programme global intégré qui s'accorde avec une stratégie générale de lutte contre la pauvreté et de développement durable supposant notamment que des ressources adéquates soient consacrées aux services sociaux pour les pauvres; enfin, ces opérations doivent être bien coordonnées et convenablement financées. Les directives précisent en outre que la conditionnalité doit être conçue avec soin de manière à porter sur les réformes clés, lesquelles ne doivent pas être trop nombreuses, faute de quoi le programme deviendrait irréalisable; il convient en outre de s'assurer que les réformes en question ne dépassent pas les compétences de l'emprunteur. Il y a des chances pour que le laps de temps requis pour que l'ajustement fasse effet soit beaucoup plus long qu'on ne le prévoyait à l'origine au début des années 80, parce que l'appareil productif réagit en général avec un temps de retard considérable dans les pays à faible revenu. Pour être efficace, l'appui aux programmes d'ajustement doit allier les crédits d'ajustement, les prêts sectoriels et les prêts-projets à l'assistance technique. Ces opérations de l'IDA doivent s'inscrire dans une stratégie efficace d'assistance aux pays membres qui vise l'objectif ultime de la Banque, à savoir aider ses emprunteurs à faire durablement reculer la pauvreté, en développant les capacités et en finançant les investissements stratégiques nécessaires pour que l'appareil productif réagisse à l'amélioration de la politique économique. 56 Annexe 1. Liste des pays à faible revenu Afrique Asie Angola Afghanistan Bénin Bangladesh Burkina Faso Bhoutan Burundi Cambodge Cap-Vert Chine Comores Iles Salomon Côte d'Ivoire Inde Djibouti Kiribati Éthiopie Maldives Gambie Mongolie Ghana Myanmar Guinée Népal Guinée-Bissau Pakistan Guinée équatoriale Philippines Kenya Rép. dém. pop. lao Lesotho Samoa-Occidental Libéria Sri Lanka Madagascar Tonga Mali Vanuatu Malawi Viet Nam Mauritanie Mozambique Amérique latine et Caraïbes Nigéria Bolivie Ouganda Dominique République Centrafricaine Grenade Rwanda Guyana Sao-Tomé-et-Principe Haiti Sénégal Honduras Sierra Leone Nicaragua Somalie Rép. Dominicaine Soudan Saint Kitts-et-Nevis Tanzanie Sainte Lucie Tchad Saint-Vincent-et-les Grenadines Togo Zaïre Moyen-Orient et Afrique du Nord Zambie Zimbabwe Égypte Yémen Europe et Asie centrale Albanie République kirghise 57 Tableau 1. - Principaux indicateurs macroéconomiques, 1981-1992 Moyenne Moyenne 1990 1991 1992 1981-86 1987-92 Groupe A (25 pays)' Croissance du PIB réel, variation annuelle en pourcentage 2,8 2,6 2,4 1,9 3,1 Croissance du PIB par habitant, variation annuelle en pourcentage 0,05 -0,5 -0,8 -1,2 0,04 Prix à la consommation, variation annuelle en pourcentage 16,8 15,7 13,0 110,8 19,3 Déficit budgétaire/PIB, en pourcentage 6,9 5,3 5,3 9,5 6,8 Déficit extérieur courant/PIB, en pourcentage 16,3 16,4 16,8 12,6 15,0 Investissement/PIB, en pourcentage 24,5 25,2 25,1 19,8 23,2 Croissance des exportations en volume, variation annuelle en pourcentage 7,2 2,7 4,4 3,7 4,1 Termes de l'échange, variation annuelle en pourcentage -7,5 -0,6 -5,0 0,7 -5,6 Groupe B (24 pays)2 Croissance du PIB réel, variation annuelle en pourcentage 0,6 -1,2 -0,1 2,7 1,3 Croissance du PIB par habitant, variation annuelle en pourcentage -2,5 -3,8 -2,5 0,4 -1,0 Prix à la consommation, variation annuelle en pourcentage3 30,0 38,8 52,4 16,1 32,5 Déficit budgétaire/PIB, en pourcentage 10,9 10,8 9,1 10,4 11,0 Déficit extérieur courant/PIB, en pourcentage 14,7 17,0 19,1 12,3 15,4 Investissement/PIB, en pourcentage 17,1 15,6 16,0 21,2 17,6 Croissance des exportations en volume, variation annuelle en pourcentage4 -0,8 -6,3 2,1 2,3 -0,6 Termes de l'échange, variation annuelle en pourcentage -3,5 -4,8 -3,4 -2,0 -2,8 POUR MÉMOIRE Ensemble des pays à faible revenu5 Croissance du PIB réel, variation annuelle en pourcentage 2,1 1,5 2,1 2,7 2,6 Croissance du PIB par habitant, variation annuelle en pourcentage -0,4 -0,9 -1,5 0,0 0,2 Groupe C (27 pays)6 Croissance du PIB réel, variation annuelle en pourcentage 2,9 2,7 2,9 2,4 3,3 Croissance du PIB par habitant, variation annuelle en pourcentage 0,3 -0,3 -0,3 -0,7 0,4 Prix à la consommation, variation annuelle en pourcentage 16,0 15,2 12,6 103,0 18,6 Déficit budgétaire/PIB, en pourcentage 6,8 5,2 5,2 9,1 6,7 Déficit extérieur courant/PIB, en pourcentage 14,8 14,8 15,2 11,5 13,7 Investissement/PIB, en pourcentage 24,9 25,6 25,5 20,5 23,7 Croissance des exportations en volume, variation annuelle en pourcentage 7,4 3,0 4,7 4,0 4,6 Termes de l'échange, variation annuelle en pourcentage -7,1 -0,5 -4,5 0,8 -5,3 Sources: estinations des services de la Banque mondiale et du FMI, base de données de la Banque mondiale et Perspectives de l 'économie mondiale du FMI. I Le Groupe A comprend les pays suivants: Bangladesh, Bénin, Bolivie, Burundi, Côte d'Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guyana, Honduras, Kenya, Lesotho, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, Mozambique, Niger, Ouganda, Philippines, République démocratique populaire lao, Sénégal, Sri Lanka, Tanzanie et Togo. 2 Le Groupe B se compose des pays suivants : Albanie, Angola, Burkina Faso, Égypte, Éthiopie, Guinée-Bissau, Hatti, Mongolie, Népal, Nicaragua, Mgéria, Pakistan, République arabe du Yémen, République démocratique populaire Yémen, République Centrafricaine, République Dominicaine, Rwanda, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Tchad, Zaïre, Zambie et Zimbabwe. 3 Non compris le Nicaragua et le Zaïre. 4 Pays exportateurs de produits autres que les combustibles seulement (non compris l'Égypte, le Nigéria et le Yémen). 5 Les 72 pays ayant reçu des crédits de I 'IDA pendant la période de base d'IDA-9 ou admis à bénéficier des ressources de la FAS renforcée. 6 Le Groupe C comprend les pays du Groupe A plus la Chine et l'Inde. 58 Tableau 2. Besoins de financement extérieur des pays à faible revenu1 (Milliards de dollars E.U.) Moyenne Moyenne 1993-97 1987-92 1992 (Projections) Besoins de financement bruts2 58,6 63,1 54,4 (64,6) (64,8) (65,8) Afrique 21,0 21,9 22,6 Asie 21,9 23,7 23,7 Autres 15,7 17,5 8,1 1. Solde des transactions courantes (non compris les transferts officiels) -31,1 -29,1 -27,4 (-27,1) (-21,7) (-25,7) 2. Amortissement prévu à l'échéancier 24,1 24,4 20,4 (28,2) (29,9) (27,6) 3. Autres 3,3 9,6 6,6 (9,3) (13,2) (12,5) Sources de financement 1. Dons 10,9 12,0 11,6 (1 1,1) (12,6) (1 1,9) 2. Emprunts bruts 26,0 25,1 25,14 (33,8) (32,1) (34,1) 3. Allégement de la dette 14,9 15,5 ) (14,9) (15,5) ) 17,75 ) (19,7) 4. Autres sources de financement3 6,8 10,5 ) (4,8) (4,6) ) Sources: estinmations et projections des services de la Banque mondiale et du FMIfondées sur la base de données de la Banque mondiale et des Perspectives de l'économie mondïale de mai 1993 publiée par le FMI. I Il s 'agit des 72 pays admis à bénéficier des ressources de la FAS renforcée ou ayant reçu des crédits de lIDA pendant la période de base 1987-89. Les chiffres entre parenthèses englobent la Chine. 2 Déficit extérieur courant, compte non tenu des paiements d'anortissement, de la réduction ou de l'élmination des arriérés et de la constitution des réserves internationales. 3 Y compris l'utilisation des ressources du FMI, I 'investissement direct net, les engagements à court terme nets, les transactions nettes sur avoirs et les erreurs et omissions nettes. 4 Projectons: emprunts au ttre des engagements de prêts existants et des engagements de prêts futurs qui n'ont pas encore été obtenus. 5 Besoin de financement résiduel, qui pourrait être couvert par allégement de dette (grâce aux accords de rééchelonnement de dette présents etfuturs) ainsi que par d'autres formes de financement (décrites à la note 3 ci- dessus, et consistant principalment en concours à la balnce des paiements de sources bilatérales et multilatérales, dont le FMI et la Banque mondiale). 59 i 1 REFORMES DE LA SECURITE SOCIALE ET MISE EN PLACE DE FILETS DE PROTECTION SOCIALE DANS LES ECONOMIES EN VOIE DE REFORME ET DE TRANSFORMATION Le document ci-joint, préparé conjointement par les services de la Banque et du Fonds, examine le rôle des dispositifs de sécurité sociale et des filets de protection sociale dans la mise en oeuvre et la réussite des réformes économiques. Dans de nombreux pays en voie d'ajustement, en particulier dans ceux de l'ex-Union soviétique (EUS), en Europe de l'Est et en Amérique latine, les dispositifs actuels de sécurité sociale constituent une source importante de déséquilibres macroéconomiques, effectifs ou potentiels, et constituent donc un important domaine à réformer. En même temps, avec les filets de protection sociale, ils entrent pour une part importante dans la réaction des pouvoirs publics à certaines des retombées négatives qu'ont les réformes macroéconomiques pour les ménages pauvres et vulnérables. En ce qui concerne les dispositifs de sécurité sociale, le document considère essentiellement les pensions, dont la part est prédominante dans le total des dépenses de sécurité sociale, alors qu'il examine plus en détail, pour les filets de protection sociale, la gamme des instruments disponibles à cet effet. L'expérience des institutions de Bretton Woods dans ce domaine est relativement récente, et le document que voici doit être vu comme un moyen de recueillir le point de vue des Ministres, qui ont une expérience directe de ces questions, en vue d'orienter, grâce à leurs conseils, la nature et la direction des travaux à accomplir dans ce domaine. La présente note de couverture propose quelques thèmes de discussion. Thèmes de discussion Réformes de la sécurité sociale i) Les dispositifs de sécurité sociale couvrant les risques normaux associés avec la vieillesse, la maladie et le chômage constituent une base importante pour le fonctionnement efficace et équitable des économies de marché. Dans de nombreuses régions du monde, cependant, la sécurité sociale, outre qu'elle est une source majeure de déséquilibre budgétaire, n'atteint pas ses objectifs. Les buts de la réforme sont a) de minimiser les distorsions d'allocation et de contribuer à la stabilité macroéconomique par une réduction des déséquilibres budgétaires, et b) de promouvoir l'équité, tant entre générations qu'entre catégories de revenus, notamment en vue d'assurer, pour un coût minimum, une protection maximale contre les risques inhérents au cours normal de la vie et au chômage. Les stratégies de réforme comprennent des mesures initiales pour abaisser le niveau relativement élevé des droits à prestations et améliorer la couverture, ainsi que le passage à un système à plusieurs niveaux, comprenant une pension minimale versée par l'Etat, complétée par des pensions de nature contributive et volontaire, ces deux régimes pouvant être gérés par le secteur privé. On a eu tendance, par le passé, à adopter des solutions à court terme qui entraînaient des conséquences désastreuses à long terme. Les réformes devraient être conçues en fonction du cadre juridique, de la capacité administrative, des ressources et des contraintes politiques propres au pays. * Les Ministres voudront peut-être formuler des observations sur l'objectif immédiat de réforme de la sécurité sociale dans les pavs en développement. Comment peut-on réduire la charge budgétaire que représente la sécurité sociale tout en élargissant sa couverture? 61 * Les Ministres voudront peut-être aussi dire ce qu'ils pensent de la réforme de la sécurité sociale dans les économies en transition. Quels sont les éléments minimums de sécurité sociale à préserver? Peut-on préserver la couverture universelle tout en réalisant un ajustement budgétaire? * Comment aborder. dans une perspective à long terme, les réformes de la sécurité sociale? Le système à plusieurs niveaux présenté dans le document est-il approprié - pour les pays en développement et/ou pour les économies en transition? Le versement à tous d'une pension et d'allocations de chômage d'un montant égal pour tous représente-t-il une solution appropriée dans un premier temps? * Comment peut-on encourager le secteur privé à iouer un plus grand rôle? Est-ce réalisable en l'absence d'un cadre réglementaire et juridique bien administré? Filets de protection sociale ii) Du fait que les systèmes de sécurité sociale sont souvent limités au secteur moderne de l'économie et couvrent rarement les couches les plus pauvres de la population, ou dans les cas où ces dispositions n'existent pas, de nombreux pays ont recours à des filets de protection sociale temporaires, souvent mis en place à la suite de bouleversements économiques majeurs. Les pays en développement disposent de tout un éventail d'instruments de protection sociale. Le choix approprié dans un pays donné dépend des mesures de réforme économique adoptées, de la composition des groupes cibles, des arrangements institutionnels existants, de la disponibilité des données, des moyens administratifs, des financements disponibles et des préférences des autorités quant aux moyens d'action. De manière générale, un bon équilibre entre les différentes mesures de réforme économique ainsi qu'une augmentation des dépenses sociales destinées aux pauvres pourraient contribuer à atténuer les effets de certaines mesures sur les pauvres. Néanmoins, la mise en place de filets de protection sociale, pour éviter les effets négatifs temporaires mais importants que peuvent entraîner les mesures de réforme économique pour les groupes vulnérables, est un moyen essentiel de venir en aide aux pauvres, mais aussi de renforcer la viabilité politique des réformes économiques. Ces mesures pourraient prendre la forme de subventions ciblées, telles que des indemnités financières, des bons d'approvisionnement, des indemnités pour les travailleurs licenciés et des programmes de travaux publics ciblés sur les plus pauvres, auxquels sont proposés des emplois rémunérés au-dessous des tarifs du marché. Plusieurs questions se posent généralement lorsque les pays tentent de mettre en place des filets de protection sociale: * Les Ministres pourraient souhaiter débattre de ce qui serait la meilleure facon de venir à bout des contraintes à l'intégration des filets de protection sociale aux programmes de réforme dans les pavs en développement. Quel est le rôle relatif de facteurs tels que la disponibilité des données, la capacité administrative, le financement disponible et les considérations politiques? * Les Ministres pourraient souhaiter examiner les sources possibles de financement pour les filets de protection sociale. en particulier les possibilités de réaffectation des dépenses budgétaires vers a) le financement des filets de protection sociale et b) les dépenses sociales pour les pauvres. Dans quelle mesure les bailleurs de fonds peuvent-ils apporter des conseils techniques et un soutien financier pour la mise en place de filets de protection sociale dans les pays à faible revenu? 62 * Les Ministres désireront peut-être dire ce qu'ils pensent du rôle des mesures de protection sociale dans le renforcement du soutien politique aux réformes. Y a-t-il un arbitrage à opérer entre l'affectation de ressources à la protection sociale des plus pauvres et la préservation du soutien des autres groupes de population à l'effort de réforme? Le rôle des bailleurs de fonds, de la Banque et du Fonds iii) Le rôle des organismes donateurs bilatéraux - en particulier en Europe de l'Est et dans l'ex-Union soviétique - est capital pour la réforme des systèmes de sécurité sociale. La coordination des activités de ces organismes est indispensable pour éviter la duplication des efforts. La Banque et le Fonds ont travaillé en étroite collaboration pour aider leurs pays membres à réformer leur système de sécurité sociale et établir des filets de protection sociale en leur fournissant des conseils, des ressources financières (dans le cas de la Banque) et une aide technique. La Banque a principalement pour rôle de mener le dialogue avec les pays membres en vue de rendre les actuelles dispositions permanentes de sécurité sociale plus équitables, accessibles aux pauvres et d'un bon rapport coût-efficacité. En ce qui concerne les filets de sécurité sociale, la Banque continuera à fournir des conseils, des ressources financières et une assistance technique pour leur mise en place. Le Fonds continuera, en étroite collaboration avec la Banque, à s'attacher principalement à fournir aux pays membres des informations sur les implications macroéconomiques et budgétaires des solutions qui se présentent pour réformer les systèmes de sécurité sociale et mettre en place des filets de protection sociale. * Les Ministres voudront peut-être avoir des échanges de vues sur l'efficacité de cette collaboration dans l'aide apportée aux pays membres en vue de réformer les systèmes de sécurité sociale et de mettre en place des filets de protection sociale. Ce document a été établi par Ke-Young Chu et Sanjeev Gupta, du Département des Finances publiques; Tony Boote et Arend Kouwenaar, du Département de l'élaboration et de l'examen des politiques du FMI, et par Kalanidhi Subbarao avec la collaboration de Jyotsna Jalan du Département d'éducation et politique sociale de la Banque mondiale. 63 i 11 1 1 REFORMES DE LA SECURITE SOCIALE ET MISE EN PLACE DE FILETS DE PROTECTION SOCIALE DANS LES ECONOMIES EN VOIE DE REFORME ET DE TRANSFORMATION (Document préparé conjointement par les services du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale) I. Introduction 1.1 Dans de nombreux pays, des réformes économiques ont été mises en place pour remédier aux déséquilibres macroéconomiques et pour éliminer les obstacles structurels à une meilleure performance économique. Dans les pays en voie d'ajustement, en particulier dans l'ex- Union soviétique (EUS) et en Amérique latine, les systèmes de sécurité sociale sont eux-mêmes devenus une source de déséquilibre; dans le cadre de leurs efforts de réforme, ces pays tentent de maîtriser la charge budgétaire que représentent ces mesures. Les réformes économiques peuvent produire des effets négatifs pour les ménages pauvres et vulnérables. Pour atténuer ces effets à court terme, les dispositions existantes en matière de sécurité sociale, dont seules bénéficient généralement les personnes actives du secteur moderne de l'économie, peuvent être complétées par des filets de protection sociale. Ainsi, les systèmes de sécurité sociale peuvent, d'une part, contribuer à l'ajustement requis et, d'autre part, offrir la solution nécessaire aux éventuelles conséquences néfastes de cet ajustement lorsqu'ils sont complétés par des filets de protection sociale. 1.2 La sécurité sociale se compose a) des assurances sociales (couvrant généralement les pensions, les allocations de chômage et les soins de santé) et b) de l'assistance sociale (comprenant divers transferts en nature et monétaires en faveur de l'ensemble de la population ou de groupes cibles précis). Tandis que les objectifs de l'assurance sociale sont de préserver un niveau de revenu et de prémunir contre les risques, l'assistance sociale est fournie aux ménages qui ne sont couverts par aucune assurance ou qui sont très pauvres et vulnérables aux chocs économiques. Quelques pays disposent d'une assistance sociale permanente pour venir en aide aux ménages chroniquement pauvres. De plus, des filets de protection sociale (comprenant divers transferts monétaires et en nature, le recyclage de la main-d'oeuvre et des programmes de travaux publics) sont mis en place dans de nombreux cas pour apporter un soutien aux ménages fragilisés à la suite de grands bouleversements (modification des orientations macroéconomiques, sécheresse, famine, etc.). 1.3 Le présent document examine les systèmes de sécurité sociale et les filets de protection sociale dans les pays en développement, dans le contexte des réformes économiques. La Section II présente brièvement la façon dont les Etats couvrent les risques qui se présentent aux ménages dans le cours ordinaire de la vie. Cette section identifie les pays, en particulier en Amérique latine et dans l'EUS, où prédominent les systèmes structurés de sécurité sociale et où il se pose des problèmes, et examine diverses possibilités de réforme. La Section III considère la manière dont les pouvoirs publics pourraient adapter le système structuré de sécurité sociale lorsque le pays subit de graves difficultés économiques et adopte des mesures pour y remédier. La mise en place de filets temporaires de protection sociale est particulièrement indiquée dans les pays où la couverture des systèmes structurés est faible. La Section IV conclut en exposant ce que cela implique pour les Etats, les organismes donateurs, la Banque et le Fonds. 65 1.4 La discussion des systèmes de sécurité sociale porte en grande partie sur les pensions, car celles-ci représentent, dans la plupart des pays, une grande proportion des dépenses de sécurité sociale. Le document n'aborde pas la question du financement de la santé et de l'assurance maladie, ce thème étant traité en détail dans le Rapport sur le développement dans le monde 1993. Enfin, le débat se limite aux pays en voie de réforme, le sujet principal de ce document étant la protection des ménages vulnérables pendant les périodes de réforme économique par la réforme des actuels systèmes structurés de sécurité sociale et la mise en place de filets de protection. 1.5 L'expérience en matière de réforme de la sécurité sociale et d'intégration des filets de protection sociale en période de réforme économique est encore limitée, et les Etats, les bailleurs de fonds et les institutions internationales continuent à en tirer des leçons. Le présent document constitue donc une première tentative d'examen de certaines questions en vue de recueillir l'avis des Ministres, confrontés chaque jour à ces problèmes, et de mettre à profit leur expérience pour orienter les travaux prévus par la Banque et le Fonds dans ce domaine '. Il. Les systèmes structurés de sécurité sociale A. Aperçu de la situation de la sécurité sociale dans les pays en développement en voie de réforme 2.1 La situation de la sécurité sociale dans les pays en développement et les économies en transition varie beaucoup en ce qui concerne la nature des dispositions (prise en charge structurée ou non), la portée de la couverture sociale (employés du secteur public par rapport au privé, employés du secteur structuré par rapport au secteur non structuré, populations rurales par rapport aux populations urbaines), et l'ampleur de la participation du secteur privé à la protection sociale. Les pays en voie de réforme économique se rangent en deux grandes catégories: ceux où le système structuré de sécurité sociale couvre une partie relativement grande de la population (essentiellement en Europe de l'Est, en ex-Union soviétique et en Amérique latine), et ceux où le système structuré se limite pratiquement au secteur moderne et où l'organisation de la sécurité sociale est principalement non structurée (Asie, Moyen-Orient et Afrique du Nord, et Afrique subsaharienne). 2.2 Dans les pays de l'ex-Union soviétique (EUS) et d'Europe de l'Est, les principales prestations d'assurance sociale sont les pensions (retraite et invalidité), les indemnités d'assurance maladie et les allocations de maternité. Dans de nombreux pays de l'EUS, les pensions sont versées par une caisse séparée, alimentée en majeure partie par les cotisations patronales de sécurité sociale, tandis que les indemnités de maladie et les allocations de maternité sont versées par une caisse d'assurance sociale. Par contre, dans les pays d'Europe de l'Est, toutes les prestations, pensions 1. Un document des services du Fonds, Social Safetv Nets in Economic Reform (ESB/93/34), a été examiné par le Conseil du Fonds le 2 juin 1993; une étude de la Banque intitulée Old Age Securitv sera réalisée par la Département de la recherche sur les politiques au cours de l'exercice 94; enfin, un programme de travail du Département Education et politique sociale de la Banque, The Effectiveness of Social Safetv Nets, débouchera sur la rédaction, au cours de l'exercice 95, d'un document sur les pratiques optimales. 66 comprises, sont versées par une caisse d'assurance sociale. Il existe aussi des régimes non financés par les cotisations. L'Etat offre et subventionne en grande partie l'accès universel aux soins de santé. Les indemnités de chômage ont été introduites récemment. Ces prestations sont financées par les cotisations patronales de sécurité sociale et, lorsque cela est nécessaire, par des transferts budgétaires. 2.3 En Amérique latine, la sécurité sociale a pour composante principale les pensions de vieillesse, dont bénéficient tous les employés du secteur structuré (public et privé). Les employés du secteur non structuré n'ont généralement pas accès à cette couverture. Les pensions sont financées essentiellement par les cotisations patronales de sécurité sociale, et les prestations sont liées au revenu. Dans certains pays (Brésil, Costa Rica et Uruguay), il existe aussi des régimes non financés par les cotisations ou assortis de conditions de ressources ou d'autres régimes non liés au revenu. Le modèle chilien d'assurance privée, dans lequel les régimes publics ont entièrement cédé la place aux systèmes privés, n'a pas encore été adopté dans d'autres pays d'Amérique latine. Il existe, dans quelques pays, des allocations de chômage pour les employés du secteur structuré qui cotisent de manière générale. Au Brésil, par exemple, les salariés versent l'équivalent d'une journée de salaire par mois à un fonds qui finance les allocations de chômage. En Argentine, l'assurance chômage est venue s'ajouter, en décembre 1991, au système des indemnités de licenciement. Les prestations sont financées par les cotisations patronales au fonds national pour l'emploi. 2.4 En Asie, les prestations de sécurité sociale dont bénéficient les personnes âgées et les malades varient beaucoup d'un pays à l'autre. C'est ainsi qu'en Inde, on observe une forme très répandue de sécurité sociale qui a pour base la famille. La sécurité sociale de type institutionnel est limitée aux employés du secteur organisé des entreprises publiques aussi bien que privées. Cependant, l'Inde a fait de rapides progrès en matière de pensions et d'épargne privée sous la forme de systèmes d'assurance vie en adoptant des dispositions fiscales qui leur sont favorables. Aux Philippines, un système de prestations de caractère officiel protège non seulement les employés du secteur public et du secteur privé, mais aussi ceux qui travaillent à leur compte. En milieu rural, toutefois, cette protection est limitée. Il faut dix années de contributions pour en faire partie et le programme a des aspects redistributifs qu'il convient de noter. En Chine, la sécurité économique prend appui sur les aspects structurels de l'économie, la coutume et toute une gamme de programmes publics qui visent des objectifs précis de sécurité sociale. Au niveau structurel, i) tous les ménages ruraux ont accès à des terres agricoles, individuellement ou collectivement, et ii) les pratiques suivies en matière d'embauche et d'emploi visent à maintenir un taux élevé d'emploi en milieu urbain. La coutume veut - et c'est une coutume suivie par la quasi-totalité des populations rurales ainsi que par un grand nombre de citadins - que l'on s'occupe de ses parents une fois que ceux-ci sont devenus vieux. De ce fait, la sécurité sociale de type institutionnel n'a à desservir qu'un faible pourcentage de la main-d'oeuvre employée dans le secteur organisé: les agents de l'Etat et les employés des entreprises d'Etat et des grandes entreprises collectivisées. Cela ne comprend pas les chômeurs et la population « flottante » (ceux qui sont légalement supposés se trouver dans leur région d'origine, mais qui vivent en fait à l'intérieur ou autour des villes à croissance plus rapide). Les régimes de sécurité sociale structurés que l'on trouve en Chine sont les suivants: l'assurance des travailleurs, la protection sociale, l'aide sociale et le secours aux victimes de catastrophes et la santé publique. L'assurance des travailleurs (qui couvre les pensions d'invalidité et de vieillesse, les prestations de maternité et de maladie et les soins de santé subventionnés) s'adresse à ceux qui ont un emploi, mais non aux paysans, et elle est financée par une taxe sur la masse salariale des entreprises ou reste à la charge directe de l'employeur. La protection sociale couvre diverses dispositions de garantie du revenu ainsi que les aides sociales dispensées sur le lieu de travail ou dans les zones rédidentielles, y compris dans les villages. L'aide sociale représente principalement l'aide aux pauvres des 67 campagnes, y compris aux personnes âgées qui n'ont plus de famille. Les secours aux victimes de catastrophes concernent l'ensemble de la population rurale exposée aux catastrophes naturelles. 2.5 Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, les régimes publics de pensions et les arrangements traditionnels, non structurés, assurent ensemble la sécurité économique des personnes âgées. Il n'existe pas encore de régimes de retraite privés dans cette région du monde. Les régimes de retraite publics versent des prestations liées aux gains et stipulent que les cotisations peuvent augmenter pour couvrir le financement des prestations. Les pensions versées ont une caractéristique redistributive qui apparaît dans les pensions minimum et maximum. La couverture varie à l'intérieur de la région. En Algérie, les travailleurs indépendants, agricoles ou non, sont couverts. En Jordanie, la loi sur la sécurité sociale habilite l'organisme de sécurité sociale à percevoir des cotisations et à fournir une assurance couvrant: i) les accidents du travail et les maladies professionnelles; ii) l'invalidité, la vieillesse et la santé; iii) la maladie et la maternité; iv) une assurance maladie pour les travailleurs et les personnes à charge; v) les allocations familiales; et vi) le chômage. A ce jour, seuls les deux premiers éléments sont en place, et une étude sur l'introduction de l'assurance chômage et maladie est envisagée. 2.6 En Afrique subsaharienne, les systèmes structurés de sécurité sociale sont rares et, lorsqu'ils existent, ils ne s'appliquent qu'au secteur organisé. Cependant, de nombreuses institutions non structurées de protection sociale, reposant sur la collectivité et la famille, existent en milieu rural et urbain. Les systèmes ruraux de sécurité sociale diffèrent selon qu'il s'agit de régions plus ou moins riches en terres. Lorsque celles-ci sont abondantes, la sécurité réside dans la constitution de grandes familles ou de clans. Cela permet de réaliser des économies d'échelle et de partager les risques. Par exemple, en Gambie, où les terres sont relativement abondantes, un système institutionnalisé de sécurité alimentaire et sociale au niveau communautaire existe grâce au système Zakat, qui consiste à redistribuer une taxe (obligation de verser 10 % de la récolte principale à la mosquée) aux pauvres et aux nécessiteux des communautés villageoises. Ces systèmes villageois de sécurité sociale rendent d'autant moins nécessaire de cibler les ménages. Dans les régions pauvres en ressources foncières, la stratégie généralement utilisée pour se prémunir contre les risques est la diversification des sources de revenus. C'est ainsi qu'au Rwanda, pays pauvre en terres, la population rurale vit pour l'essentiel dans des fermes individuelles et isolées. On n'y trouve pas de sécurité sociale structurée, mais l'Etat se charge de fournir une certaine sécurité. Comme dans la plupart des autres pays d'Afrique subsaharienne, l'action de l'Etat prend la forme, notamment, de programmes de travaux publics, de soins de santé en milieu rural et de centres de nutrition. B. La nécessité d'une réforme 2 2.7 Avec la disparition des formes traditionnelles d'entraide sociale et le vieillissement de la population, une organisation structurée de l'assurance sociale devient souhaitable pour protéger les individus contre le vieillissement, la perte d'emploi et l'incapacité. Cependant, si on n'y prend garde, la mise en place de ce type de mécanisme structuré risque de provoquer un effondrement des formes 2. L'expérience en matière d'assurance chômage est très limitée. Celle-ci n'a été mise en place que récemment dans certains pays d'Amérique latine, d'Europe de l'Est et de l'EUS, et elle est inexistante dans la plupart des pays à faible revenu. Le financement de la santé et l'assurance maladie font partie des questions examinées dans le Rapport sur le développement dans le monde 1993. Cette section est donc consacrée essentiellement à la réforme des pensions. 68 traditionnelles de soutien. De plus, les ressources qui sont propriété commune - et qui sont un important filet traditionnel de sécurité pour les pauvres dans beaucoup de pays - ont diminué, provoquant, outre la disparition progressive d'une ressource d'appoint pour les pauvres, une dégradation de l'environnement. A l'heure actuelle, toutefois, il n'existe de grands systèmes structurés que dans les pays à revenu intermédiaire, systèmes qui, du reste, ont de nombreux points faibles, les deux principaux étant les déséquilibres budgétaires et l'absence de protection des pauvres en raison d'une couverture insuffisante et d'une répartition inéquitable des prestations. Dans ce contexte, la réforme des systèmes structurés est d'une importance capitale pour la réussite de certains programmes d'ajustement, non seulement parce que le rétablissement de l'équilibre budgétaire est essentiel à la stabilité macroéconomique, mais aussi parce qu'il convient d'exploiter le potentiel de systèmes structurés, adaptés et réformés, pour mieux aider les groupes vulnérables en période de réforme économique. 2.8 Déséquilibres budgétaires. Les budgets de la sécurité sociale sont déficitaires dans de nombreux pays. Pendant les années 80, le déficit du budget de la sécurité sociale, dans six grands pays d'Amérique latine, a oscillé entre 0,1 et 4,3 % du PIB. La part du PIB consacrée aux dépenses publiques au titre des pensions s'élève à 7,1 % en Pologne, 9,4 % en Hongrie, 10,5 % en Uruguay et 5,8 % en Argentine. Ainsi, dans de nombreux pays, les régimes de sécurité sociale ont contribué à l'instabilité macroéconomique, et en ont subi les conséquences. Cette crise est particulièrement aiguë en Europe de l'Est, où l'adoption de mesures de réforme a accru la demande de prestations, notamment d'allocations de chômage. 2.9 Les causes structurelles de ces déséquilibres budgétaires comprennent la faiblesse de la gestion financière et le niveau élevé des coûts administratifs, problèmes aggravés par le vieillissement de la population et le niveau des prestations. Les déficits financiers ont encore été aggravés par les chocs macroéconomiques extérieurs. 2.10 Faiblesse de la gestion financière. La mauvaise gestion des placements des fonds de pensions, les subventions croisées entre différents régimes de sécurité sociale et les incitations structurelles à échapper au paiement des cotisations sont autant d'éléments qui affaiblissent la gestion financière des régimes de pensions. Dans certains pays (Pérou, Venezuela, Turquie, Egypte et Madagascar), les caisses de retraite sont obligées d'investir leurs actifs dans des emprunts du secteur public qui ont eu des taux réels de rendement négatifs, ce qui a eu pour effet d'entamer la base de capital de ces caisses. Au Pérou, par exemple, le rendement réel des investissements des caisses publiques de retraite est passé de -17,2 % en 1981 à -93,5 % en 1988. De plus, les caisses de retraite excédentaires ont dû prélever sur leurs ressources de quoi financer les soins de santé. Dans les pays de l'EUS, des caisses de retraite extrabudgétaires financent aussi les allocations familiales (telles que les allocations pour enfant), ce qui a eu pour effet d'affaiblir la viabilité financière à long terme de ces caisses. Enfin, dans les régimes fondés sur la répartition adoptés par de nombreux pays d'Amérique latine, les pensions sont financées sur les recettes actuelles et ne sont pas liées aux cotisations, ce qui crée une incitation à se soustraire aux cotisations. Outre qu'ils sont mal gérés, les systèmes structurés s'avèrent très coûteux à administrer. Ainsi, en Amérique latine, le coût administratif des systèmes de sécurité sociale représente en moyenne 16 % des dépenses totales de sécurité sociale, contre 3 % dans les pays de l'OCDE. 2.11 Vieillissement de la population. De nombreux pays ont connu une évolution démographique considérable; la baisse du taux de natalité a entraîné le vieillissement des populations et l'accroissement du taux de dépendance (ratio du nombre de retraités au nombre de cotisants). Dans 69 le même temps, les versements au titre des pensions ont augmenté avec la progression du nombre de personnes âgées et de leur longévité. Des pays tels que la Hongrie, l'Argentine et l'Uruguay sont actuellement confrontés à ce problème. C'est un problème qui se posera aussi au Brésil, au Mexique et aux pays de l'EUS, étant donné leurs tendances démographiques actuelles. Au Brésil, par exemple, le rapport entre la population âgée de plus de 60 ans et la tranche d'âge des 20 à 59 ans s'établissait à 13,8 % en 1990, mais on prévoit qu'il atteindra 21,5 % en 2020. En Turquie et en Ukraine, il faut deux cotisants pour faire vivre un retraité. 2.12 Niveau des prestations. Un défaut important de ces systèmes réside dans les possibilités de retraite anticipée et le niveau relativement élevé des prestations, éléments qui ont entraîné l'escalade des coûts et des déséquilibres actuariels et financiers, d'où érosion du montant réel des pensions et baisse de la qualité de la couverture sociale. Ainsi, en Russie, quelqu'un qui n'a pas travaillé cinq ans a droit à une pension sociale équivalant aux deux tiers de la pension minimum. Ceci, qui ne présentait pas de problème en régime soviétique de plein emploi, devient de plus en plus, aujourd'hui, une source de tension budgétaire et de distorsion du marché du travail. Au Brésil et au Costa Rica, un assuré peut partir à la retraite après 20 à 30 années de service, quel que soit son âge - souvent dès l'âge de 40 ou 45 ans 3. Le niveau relativement élevé des prestations est une cause importante des difficultés financières. En outre, la plupart des pays ont eu tendance, dans le passé, à adopter des solutions à court terme (comme d'autoriser les gens à prendre leur retraite prématurément pour réduire le chômage), qui ont généralement eu pour effet d'élargir les droits à prestations et de créer des intérêts acquis, avec tout ce que cela a de conséquences délétères pour le long terme. De plus, une fois ces stratégies à court terme engagées, il est difficile de faire marche arrière. 2.13 Les régimes de sécurité sociale ont vu leurs difficultés s'aggraver par suite de la dégradation des conditions macroéconomiques pendant les années 80. Les cotisations réelles de sécurité sociale ont diminué avec la baisse des salaires réels et l'augmentation du chômage déclaré. L'expansion des activités à forte intensité de main-d'oeuvre du secteur non structuré a limité la progression des cotisations de sécurité sociale, du fait que les employeurs et les employés de ce secteur n'étaient pas légalement tenus de cotiser. Les dépenses de sécurité sociale ont augmenté avec la hausse du chômage, le renchérissement des soins de santé et du matériel médical et la multiplication des personnes à assister. 2.14 Une couverture insuffisante et inéquitable. L'un des buts premiers des systèmes de sécurité sociale est de protéger les ménages pauvres et vulnérables. Dans la pratique, comme il est indiqué ci-dessus, il existe de grandes variations dans le degré de couverture, depuis la couverture quasi universelle dans les économies en transition d'Europe de l'Est et les pays de l'EUS jusqu'à celle inexistante ou insignifiante des systèmes structurés dans la plupart des pays d'Afrique subsaharienne. De plus, même dans les pays où tous les employés du secteur moderne sont couverts par la sécurité sociale, la répartition des prestations est inégale et comporte de grandes différences entre groupes de bénéficiaires, voire au sein de ces groupes. Dans les pays d'Amérique latine, par exemple, les 3. Par exemple, depuis 1991, l'ouverture des droits à pension au Brésil ne nécessite que cinq années de cotisations, ce qui produit (lorsque le cotisant a atteint l'âge de la retraite, qui est de 65 ans pour les hommes et de 60 ans pour les femmes) un niveau de pension égal à 70 % des gains moyens au cours des trois dernières années d'activité, plus 1 % des gains moyens pour chaque année de cotisation au-delà de cinq ans. 70 membres des forces armées reçoivent des pensions qui sont 2,5 à 8 fois plus élevées que celles de la population en général, ces chiffres variant entre 1,6 et 6,9 pour la police et 1,2 et 3,8 pour les fonctionnaires. C. Les voies de la réforme: les pensions 2.15 La nature du problème diffère selon les régions, et selon les pays au sein d'une région. Mais le défi posé aux responsables des systèmes structurés de sécurité sociale est le même: comment remédier aux déséquilibres budgétaires tout en s'assurant que ces régimes offrent aux ménages vulnérables une protection efficace par rapport au coût? Les systèmes de sécurité sociale doivent être adaptés à ce qu'un pays peut se permettre dans les limites de ses valeurs sociales et de sa structure démographique. Une protection sociale excessive peut affaiblir la compétitivité internationale du pays. Si le système accumule aujourd'hui les déficits, ce sont les générations futures qui en supporteront indûment la charge. Les objectifs de la réforme sont a) de minimiser les distorsions d'allocation des fonds et d'assurer la stabilité macroéconomique en réduisant les déséquilibres budgétaires, et b) de promouvoir l'équité, tant entre générations qu'entre catégories de revenus, en vue notamment d'offrir, pour un coût minimal, une protection maximale contre les risques inhérents au cycle de vie et contre le chômage. Les stratégies de réforme peuvent varier selon les pays en fonction de la situation de départ et de l'ampleur des distorsions, mais aussi des caractéristiques structurelles et culturelles. Un système réformé devrait être simple et facile à administrer, surtout dans les pays qui manquent de moyens administratifs. Etant donné que les pensions représentent une grande proportion des dépenses de sécurité sociale et qu'elles sont donc une composante extrêmement importante des systèmes structurés de sécurité sociale dans de nombreux pays, on ne s'occupera que de la réforme des pensions. 2.16 Passer à des régimes à gestion privée. Etant donné les contractions budgétaires, il est impératif, dans certains pays, de limiter la dépendance à l'égard des pensions publiques et de développer les régimes d'assurance complémentaire à caractère privé. Actuellement, la part du secteur privé dans le régime des pensions varie considérablement selon les pays. En Amérique latine, notamment au Chili, les compagnies d'assurances privées prennent une importance accrue. Dans les pays de l'EUS et d'Europe de l'Est, le secteur privé commence tout juste à apparaître, les marchés financiers se mettent en place, et on n'y dispose pas encore d'un cadre juridique et institutionnel approprié pour le bon fonctionnement des régimes d'assurance et de pensions privés. En Afrique subsaharienne et en Asie du Sud, il n'existe de régimes privés qu'en Afrique du Sud, au Zimbabwe, à Sri Lanka et en Inde, généralement en association avec des institutions d'épargne contractuelle, comme les compagnies d'assurance vie. En Afrique, des entreprises multinationales proposent des pensions privées, mais cela ne concerne que les classes moyennes et aisées de la population urbaine employée dans le secteur moderne. 2.17 L'assurance sociale est financée par les cotisations salariales des assurés, par les cotisations patronales et, dans certains pays, par l'Etat. Dans les pays où l'Etat est devenu le principal cotisant, comme c'est le cas dans la plupart des pays d'Amérique latine, la réforme prend la forme d'un passage progressif des régimes par répartition à un système de pensions liées au revenu, administré par le secteur privé, mais réglementé par l'Etat. Le passage à un tel système peut réduire ce que le système précédent pouvait avoir de mauvais: la faiblesse du rapport entre 71 cotisations et prestations 4 . Dans ce type de système, le travailleur peut voir clairement le rapport entre ses cotisations actuelles et sa future pension; l'administration du régime devient ainsi transparente pour tous. Cette évolution peut aussi favoriser les marchés financiers et l'épargne. Le Chili a rompu nettement avec le passé en adoptant un tel système, géré entièrement par le secteur privé. Cependant, le bon fonctionnement d'un tel système exige que soient réunies un certain nombre de conditions préalables, ce qui peut s'avérer difficile. Cela comprend, notamment, l'existence d'un bon système financier qui permette d'obtenir des rendements suffisants des réserves susceptibles d'être investies, et l'assurance que les réserves seront sauvegardées. Un important facteur de limitation des possibilités offertes par cette option tient au fait que les marchés financiers des pays n'offrent pas aux éventuels investisseurs des conditions adéquates. L'expansion de ces marchés permettrait aux pensions privées de devenir un moyen efficace pour mobiliser l'épargne contractuelle nationale. De plus, il peut être nécessaire de prévoir un système complémentaire pour répondre aux besoins des personnes qui n'ont jamais travaillé ou dont les gains ont été insuffisants. 2.18 Des réformes plus progressives. Dans la plupart des pays, le système de sécurité sociale représente une lourde charge en termes de prélèvements opérés sur la masse salariale (entre 30 et 60 % de celle-ci) et de transferts budgétaires. C'est pourquoi il est préférable de rétablir l'équilibre par la réduction des dépenses plutôt que par une augmentation du taux des cotisations (encore qu'il demeure important de veiller à ce que les contributions de sécurité sociale soient effectivement payées. Ainsi, pour alléger les charges budgétaires, il faudrait mettre fin à des programmes coûteux et très inéquitables, comme les régimes fondés sur l'ancienneté, qui permettent aux salariés de partir à la retraite après un certain nombre d'années de travail (généralement 20) indépendamment de leur âge, et retarder le départ à la retraite pour les hommes et les femmes. Les réformes « douces » (comme, en Uruguay, l'incitation à retarder le départ à la retraite ou, au Panama, la suppression de la retraite anticipée) ne sont pas parvenues à remédier aux problèmes fondamentaux que sont les déséquilibres financiers, le caractère mal défini des droits à pension, et la faiblesse du rapport entre cotisations et prestations. De nombreux pays ont élargi la couverture aux populations rurales pour rendre le système plus équitable. 2.19 Des systèmes à deux ou trois niveaux. Une réforme du système des pensions selon le modèle chilien constitue peut-être un objectif peu réaliste pour beaucoup de pays en développement à faible revenu et pour les pays d'Europe de l'Est et de l'EUS. Une stratégie intermédiaire pourrait consister à adopter des systèmes à deux ou trois niveaux, comprenant un régime public qui n'offrirait 4. Toutefois, même dans le cadre de régimes privés, deux problèmes fondamentaux demeurent: mauvais choix du risque et aléa de moralité. Il y a mauvais choix lorsqu'une compagnie d'assurances n'établit pas de distinction entre assurés à haut risque et assurés à faible risque, et fait payer à tous la même prime, calculée sur la base du risque moyen. De ce fait, les personnes à faible risque doivent verser une prime par trop élevée, et peuvent décider de ne pas s'assurer alors qu'il serait dans leur intérêt de le faire pour une prime actuarielle. Ce problème est très répandu, en particulier dans le cas de l'assurance médicale des personnes âgées. Il y a aléa de moralité lorsqu'un assuré peut, sans qu'il lui en coûte rien, arranger à sa convenance et le risque assuré et l'ampleur du dommage subi. Ceci pose un problème dit de tiers payant, qui se retrouve aussi dans le domaine médical. Lorsque la compagnie d'assurance médicale règle tous les frais médicaux, le médecin le sait et se comporte comme si le coût était nul pour le patient. C'est là un comportement contraire à l'efficacité, car il entraîne une surconsommation de services médicaux et exerce des pressions à la hausse sur les primes d'assurance. 72 qu'une pension minimale de subsistance, avec pensions réduites pour les retraités en activité 5; un régime de pensions à cotisations définies (à gestion publique, ou privée sous mandat, ou entièrement privée); et un régime privé volontaire qui viendrait en complément de ce dernier régime. Ce type de pension volontaire pourrait être exploité sous forme de coopérative appartenant soit aux membres eux-mêmes, soit à l'employeur. Le principal avantage d'une telle stratégie est que la pension de subsistance répond aux objectifs de filet de sécurité et de réduction de la pauvreté, tandis que les objectifs de garantie du revenu et d'assurance vieillesse peuvent être atteints par le régime à cotisations définies. Cela permet de réduire les coûts budgétaires, car la responsabilité est progressivement transférée de l'Etat à l'individu. Dans un tel système, l'Etat continuerait à jouer un rôle central touchant la satisfaction des besoins des pauvres et des groupes vulnérables. 2.20 L'ampleur et la rapidité du passage à un système à deux ou trois niveaux, ainsi que la couverture des employés (du secteur public et privé), dépendent des conditions de départ. De plus, il n'est pas nécessaire de mettre en place les trois niveaux l'un après l'autre; on peut instaurer le deuxième ou le troisième régime même si le premier régime (public) est limité ou inexistant. Par exemple, dans les pays où les employés du secteur privé non structuré ne cotisent actuellement à aucun régime, et ne bénéficient donc d'aucune protection sociale, il serait souhaitable de mettre en place le régime de base en raison de ses effets de redistribution, mais aussi pour assurer le minimum absolu de sécurité sociale. Cependant, les contraintes budgétaires empêcheront peut-être ces pays de financer le premier régime de pension publique minimale pour tous les groupes vulnérables avant de nombreuses années. L'adoption complète d'un système à deux ou trois niveaux pourrait être un objectif à long terme pour beaucoup de pays à faible revenu. Dans les pays où les employés des secteurs public et privé cotisent actuellement à des régimes par répartition, et où les marchés de l'assurance privée sont très actifs (comme dans la plupart des pays d'Amérique latine), le passage à un système à deux ou trois niveaux pourrait être un objectif à moyen terme. 2.21 Le passage à un sytème à deux ou trois niveaux prend évidemment un caractère plus urgent dans les pays où la charge budgétaire est élevée et où il est impératif de réduire la dépendance vis-à-vis des régimes publics de pensions, comme c'est le cas dans la plupart des pays d'Europe de l'Est et de l'EUS. Pourtant, les réformes ne peuvent progresser que lentement, par suite de contraintes politiques et administratives. La mise en oeuvre d'un système à deux ou trois niveaux reste donc un objectif à moyen terme, même s'il demeure nécessaire à court terme de préparer le cadre administratif et juridique devant faciliter le passage à un tel système. 2.22 Conditions préalables à la réforme de la sécurité sociale. L'expérience montre que, même dans les pays dotés de marchés financiers relativement développés et d'une bonne administration publique, il faut compter deux ans de préparation pour mener à bien la réforme. Ceci suppose l'existence d'un cadre juridique, des moyens administratifs et la faisabilité politique. 2.23 Cadre juridique. Préalablement à toute réforme, il faut évaluer les cotisations salariales en vue de leur transfert aux nouveaux fonds de pensions. Un cadre juridique est nécessaire pour gérer, exploiter et réglementer les régimes de retraite privés ainsi que les marchés des titres et de l'assurance. L'Etat pourra être pressé de garantir explicitement la valeur des cotisations capitalisées qui seront transférées aux nouveaux fonds de pensions à gestion privée, mais il lui faudra, si possible, 5. Les retraités en activité sont très nombreux dans l'EUS et en Europe de l'Est en raison des multiples possibilités de retraite anticipée. 73 résister à ces pressions étant donné les risques que cela comporte. En Europe de l'Est et dans les pays de l'EUS, l'insuffisance ou l'absence de cadre administratif et juridique ralentit considérablement le rythme des réformes, mais cet élément ne serait pas un obstacle majeur dans beaucoup de pays à faible revenu ni en Amérique latine. 2.24 Capacité administrative. Les obstacles aux réformes sont souvent liés à la capacité administrative des pays. Ainsi, les pays qui passent d'un système d'économie dirigée à l'économie de marché devront peut-être répartir les prestations liées aux gains à l'intérieur d'une marge étroite, ce qui leur donnerait l'apparence de prestations forfaitaires. Le versement de pensions à taux forfaitaire aurait l'avantage de réduire la complexité administrative, mais cela ne serait pas équitable pour ceux qui auraient travaillé de nombreuses années. Dans certains pays à faible revenu, la capacité administrative ne constituerait pas nécessairement une contrainte (par exemple, en Inde), dans la mesure où il existe des administrateurs compétents capable de gérer des systèmes complexes. 2.25 Faisabilité politique. La différence de degré entre les réformes entreprises en Amérique latine et celles qui sont envisagées en Europe de l'Est et dans les pays de l'EUS s'explique non seulement par les difficultés pratiques mentionnées ci-dessus, mais aussi par plus ou moins d'engagement politique qu'elles suscitent. Même simples, les réformes rencontrent une résistance politique dans nombre de pays, car il est toujours difficile de toucher aux droits. La plupart des réformes, comme celle qui consisterait à n'offrir qu'une pension minimum ou à encourager l'épargne privée sous contrôle de l'Etat, sont mal accueillies par les classes moyennes, qui redoutent une réduction de leurs prestations. Les pressions populaires, souvent génératrices de goulets d'étranglement administratifs et juridiques, rendent tout progrès vers la réforme des pensions lent, long et douloureux. III. Protéger les ménages pauvres et vulnérables en période de réformes 3.1 Les réformes économiques visent à promouvoir une croissance durable, assortie d'un faible taux d'inflation et viable par rapport à l'extérieur. Une croissance soutenue contribue à la longue à réduire la pauvreté. Les mesures de réforme économique peuvent aussi bénéficier immédiatement à différents groupes de pauvres: par exemple, la libération des prix agricoles profite souvent directement aux petits agriculteurs. Mais certaines mesures de réforme peuvent aussi avoir des effets néfastes pour certains groupes de pauvres. Lorsqu'on réduit les subventions, les acheteurs des biens qui étaient jusque-là subventionnés - et notamment les pauvres - subissent une perte de revenu réel. La fermeture d'entreprises non rentables, par suite d'une réduction des subventions ou de la suppression d'une protection commerciale résultant de la libéralisation des échanges, peut se traduire par la perte de leur gagne-pain pour de nombreux travailleurs. 3.2 Un dosage et un échelonnement appropriés des politiques d'ajustement pourraient contribuer à atténuer le coût des réformes pour les pauvres. Par exemple, une politique d'assainissement fiscal ou la réduction des dépenses improductives pourraient permettre de réduire progressivement les subventions dont les pauvres bénéficient directement. La hausse des taxes sur les denrées alimentaires de base pourrait être évitée, du moins temporairement. L'accroissement des dépenses sociales spécialement destinées aux pauvres pourrait aussi tempérer l'incidence négative de l'ajustement. Il restera néanmoins des cas où l'impact serait trop grand pour être absorbé directement par une combinaison judicieuse de mesures et où, comme on l'a vu, les dispositions en vigueur en 74 matière de protection sociale structurée (ou non) pourraient se révéler insuffisantes. Dans de tels cas, il conviendrait, pour atténuer ces effets, d'envisager des mesures supplémentaires, notarmment sous la forme de filets de protection sociale. 3.3 L'intégration de filets de protection sociale dans les programmes de réforme économique pourrait non seulement faciliter la transition pour les pauvres, mais aussi renforcer l'adhésion sociale et politique aux réformes. Par exemple, de fortes hausses des prix des denrées alimentaires de base ne sont peut-être pas réalisables sans l'adoption simultanée de mesures visant à atténuer leurs effets négatifs sur les couches pauvres de la population. Il peut être difficile de licencier des employés du secteur public sans leur offrir une forme quelconque d'assistance. Il faudra s'y prendre de bonne heure et prévoir des formules d'application rapide afin qu'il y ait synchronisation entre ce type d'intervention et le programme d'ajustement macroéconomique. Il faudra veiller, toutefois, à ce que les formules employées soient conçues de telle manière que les pauvres puissent rapidement se passer du filet de sécurité et commencer à entrer dans le courant ordinaire de l'activité économique. 3.4 Les contraintes qui pèsent sur les ressources peuvent toutefois induire des tensions entre l'objectif de protection des pauvres et celui d'atténuation des pertes subies par les autres catégories de la population. Ces dernières jouent souvent un rôle plus déterminant pour le renforcement de l'adhésion politique aux réformes; mais les compensations offertes à ces catégories pourraient se faire aux dépens des mesures d'aide aux pauvres. A. L'éventail des mesures applicables 3.5 Les pays en développement disposent de divers moyens pour mettre en place un filet de protection sociale. Le choix des moyens dans un pays donné dépend de la situation du pays, de la combinaison des politiques d'ajustement adoptées, y compris de la rapidité avec laquelle les mesures sont prises et l'ordre dans lequel elles le sont, de la composition des groupes cibles, des dispositions institutionnelles existantes, de la disponibilité des données, de la capacité administrative, des financements disponibles et des préférences des autorités quant aux moyens d'action. Ces facteurs sont examinés de façon plus détaillée dans la Section B ci-après. De manière générale, un bon équilibre dans la combinaison des réformes peut contribuer à atténuer l'incidence de certaines mesures sur les pauvres, ce que ferait aussi une orientation plus marquée vers les dépenses destinées spécialement aux pauvres. 3.6 Néanmoins, les filets de protection sociale visant à atténuer les effets négatifs temporaires mais importants des réformes économiques pour les groupes vulnérables constituent un bon moyen de répondre aux besoins des pauvres tout en renforçant la viabilité politique des réformes économiques. Ces mesures pourraient comprendre: 3.7 Des subventions ciblées. Les mesures de réforme comprennent souvent l'élimination progressive des subventions, par exemple sur les denrées alimentaires, les engrais et l'énergie. Dans certains cas, il s'est avéré difficile de réduire rapidement les subventions pendant la phase initiale des réformes (pays de l'ESU), tandis que, dans d'autres, les subventions ont été restreintes assez rapidement (Algérie, Bulgarie, Jordanie et Pologne). Cette approche laisse aux consommateurs le temps de l'adaptation, mais elle a forcément une portée générale et pourrait être plus coûteuse que des approches plus ciblées. 75 3.8 Dans certains cas, des subventions généralisées ont été remplacées par des subventions spécifiques (portant, par exemple, sur certaines catégories de denrées alimentaires normalement consommées seulement par les ménages pauvres, comme, en Zambie, le maïs de qualité inférieure). De telles mesures, lorsqu'elles sont réalisables, pourraient offrir une aide d'un meilleur rapport coût- efficacité, mais devraient rester temporaires, étant donné les risques de surconsommation des denrées subventionnées. 3.9 Pour mettre en place une assistance mieux ciblée, il faut pouvoir identifier les bénéficiaires, disposer des moyens administratifs (en particulier au niveau local) et avoir la volonté politique de cibler les bénéficiaires 6, Pour les pays qui sont en mesure de le faire, une autre possibilité serait de distribuer des coupons et des bons d'alimentation qui sont honorés par les commerçants du secteur privé, sans qu'il y ait distorsion des prix du marché (par exemple, en Jordanie). Pareille approche rend inutile l'existence de deux marchés séparés, contribuer à assurer une consommation minimale des aliments de base, et se prête à un ciblage géographique ou catégoriel plus fin en faveur des régions souffrant de déficit alimentaire, des personnes âgées, des enfants et des chômeurs. Les transferts en nature de certaines denrées alimentaires peuvent aussi être efficaces lorsqu'ils empruntent des voies qui existent déjà (comme la distribution de lait dans le cadre des repas scolaires, les soins de médecine préventive par le canal des dispensaires et des associations féminines locales). Dans de nombreux cas, cependant, les coûts de distribution sont plutôt élevés et une distribution assurée par l'Etat peut être très inefficace. 3.10 Compensations financières. Les subventions ciblées peuvent aussi prendre la forme d'une compensation limitée en espèces, versée lors de la suppression des subventions, comme l'ont fait certains pays de l'EUS (Kirghizistan) et d'Europe de l'Est. Les avantages de cette formule sont que le bénéficiaire est libre de choisir ses priorités, le coût budgétaire est connu avec plus de certitude, et les capacités administratives que cela demande peuvent être moindres. Les prestations risquent toutefois de perdre rapidement de leur valeur en période d'inflation rapide. Certains pays à faible revenu ont offert des compléments de revenu aux ménages pauvres (Mozambique), mais ces mesures n'ont souvent qu'une portée limitée et entraînent des coûts administratifs considérables. 3.11 Indemnité de licenciement et reconversion. Lorsque la mise en place des réformes provoque une augmentation du chômage suite à la contraction du secteur public et à la réforme des entreprises publiques, et qu'il n'existe pas de système structuré d'indemnisation du chômage, le filet de protection sociale pourrait inclure des prestations financières sous forme d'indemnités de licenciement (par exemple, dans des pays à faible revenu comme la Gambie, le Ghana et Sri Lanka). Cette mesure peut être associée à des actions de reconversion des travailleurs licenciés pour raisons économiques (EUS et Europe de l'Est). Ce recyclage constitue une bonne politique sociale, mais aussi un investissement dans le capital humain. S'il ne crée pas immédiatement des emplois, il peut remédier à la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée dans les zones de croissance, avec effet indirect sur l'emploi. Une autre solution réside dans l'octroi de crédit aux travailleurs licenciés pour leur permettre de trouver un autre emploi ou de créer de petites entreprises, bien que ceci puisse conduire à des abus. 6. Le passage de subventions généralisées à des subventions ciblées peut réduire de plus de moitié les coûts budgétaires, mais cette réduction pourrait avoir pour contrepartie une hausse des coûts administratifs, hausse qui pourrait, selon les estimations, varier entre 5 et 30 % des subventions en question. 76 3.12 Travaux d'utilité publique. Si le processus réformateur entraîne à court terme une forte hausse du chômage, le filet de protection sociale peut inclure des programmes de travaux d'utilité publique destinés à créer des possibilités d'emploi pour les pauvres (Chili, Bolivie, Inde et Mozambique). Ces programmes font souvent appel à des petits entrepreneurs comme intermédiaires (par exemple, en Bolivie et au Honduras). Cependant, qu'ils constituent une stratégie générale de réduction de la pauvreté ou un filet de sécurité temporaire, les programmes de travaux d'utilité publique ne sont efficaces dans le ciblage des prestations sur les pauvres ou les chômeurs que si les salaires proposés sont faibles, et si ces emplois sont de courte durée (comme au Chili). Le travail peut aussi être rémunéré, en partie ou totalement, par des prestations en nature, comme dans le cas des programmes « vivres contre travail » (Bangladesh et Inde). Des travaux d'utilité publique bien conçus peuvent renforcer les infrastructures existantes, améliorant ainsi le facteur offre de l'économie. Le programme de travaux d'utilité publique du Chili fournissait, au plus fort de son activité, des prestations temporaires à plus de 10 % de la population active, pour un coût représentant l'équivalent de 1,4 % du PIB. 3.13 Adaptation de la sécurité sociale. Lorsque les réformes nécessitent une adaptation des dispositions de sécurité sociale pour atteindre les objectifs macroéconomiques et la stabilité budgétaire, ces modifications pourraient être conçues de manière à protéger les ménages vulnérables pendant la période de transition (comme dans les pays de l'EUS). Comme on l'a noté plus haut, à court terme et étant donné les contraintes macroéconomiques, la restructuration des droits, du montant et de la durée des prestations signifie que, pour les chômeurs et les retraités, la moyenne des prestations devrait être modeste, soit très proche du minimum. Cette restructuration viserait à instaurer la stabilité budgétaire, mais aussi à offrir une protection à ceux qui en ont le plus besoin: les travailleurs faiblement rémunérés, les retraités et ceux qui sont au chômage ou en passe d'y être. Un système de prestations forfaitaires pour les indemnités de chômage (comme en Pologne) et pour les pensions (comme pour les retraités non actifs en Lettonie) pourrait, malgré son inéquité actuarielle, constituer une option raisonnable en période de transition. 3.14 Accroissement des dépenses sociales pour les pauvres. Dans les cas où l'incidence des réformes sur les pauvres est plus diffuse et difficile à mesurer, l'accroissement des dépenses publiques pour les pauvres peut offrir une protection sociale efficace. On peut ainsi atténuer certains des effets pervers de la réforme, notarmment lorsque celle-ci a dépassé la phase initiale de réalignement des prix. Elle s'appuie sur l'organisation institutionnelle et budgétaire existante, et est particulièrement appropriée pour les pays à faible revenu que des contraintes techniques empêchent d'adopter la stratégie de compensation ciblée, ou qui n'ont que des moyens administratifs limités. Dans ces cas, les programmes de réforme pourraient s'attacher à modifier la composition des dépenses, en les orientant vers les soins de santé primaires et l'éducation, et à améliorer l'accès des plus vulnérables, notamment les femmes, à ces services (comme en Ethiopie, au Ghana et au Malawi). Et il faudrait maintenir ce minimum de dépenses en période d'assainissement budgétaire. B. Facteurs influant sur le choix et la Dortée des instruments de protection sociale. 3.15 Le choix et la portée des instruments dépendent avant tout des conditions qui règnent dans le pays. Celles-ci varient beaucoup, en particulier par la démographie (notamment la proportion de personnes âgées ou de jeunes enfants), la gravité de la crise économique à laquelle les réformes doivent remédier, et le plus ou moins de protection assuré aux ménages pauvres et vulnérables par un système structuré de sécurité sociale. 77 3.16 Dans les pays à faible revenu, où la pauvreté absolue est très répandue, il est difficile de délimiter les groupes cibles. La pénurie de données et les difficultés administratives sont aggravées par la présence de beaucoup de pauvres dans le secteur non structuré. Les contraintes financières sont particulièrement vives, encore que l'aide extérieure puisse jouer un rôle important. Dans ces pays, le dilemme consiste à choisir de cibler les programmes sociaux vers les pauvres en général ou vers les groupes qui subissent les effets pervers des réformes économiques. Les pays qui ont dépassé la phase initiale d'ajustement des prix mettent ensuite l'accent sur la réforme du secteur public. En l'absence de système structuré de sécurité sociale, cela veut dire que le filet de protection sociale devrait consister en indemnités de licenciement, en stages de recyclage, en programmes de travaux d'utilité publique et autres mesures ad hoc qui viendraient se greffer sur les structures institutionnelles existantes. Mais beaucoup de pays à faible revenu n'ont pas encore dépassé le stade de la réforme des prix. Dans ces pays, il sera peut-être nécessaire de prendre des mesures bien ciblées pour atténuer les effets initiaux des pertes de revenu réel dues à la hausse des prix. 3.17 Les pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord sont confrontés à deux problèmes liés à la sécurité sociale et à la protection des pauvres. Premièrement, dans de nombreux pays, mais surtout en Algérie et en Egypte, le secteur public est très vaste. Modernisation et privatisations entraîneront probablement des licenciements, alors que ces économies connaissent déjà un taux de chômage élevé. Des programmes d'indemnisation et de recyclage seront donc nécessaires. Deuxièmement, les difficultés budgétaires imposent de réduire les subventions dont bénéficient les prix des denrées alimentaires. Ceci voudrait dire que, selon les conditions particulières au pays, des programmes mieux ciblés devront être mis en oeuvre. 3.18 Dans les pays de l'ex-Union soviétique et certains pays d'Europe de l 'Est, d'importants ajustements des prix sont encore en cours, et le rôle du secteur public diminue au profit du secteur privé. Si la pauvreté absolue n'est pas un problème aussi grave que dans les pays à faible revenu, l'évolution des prix relatifs et la hausse du chômage continuent à être d'importantes sources de préoccupations sociales. Une grande partie des pays de l'EUS ont aujourd'hui un taux de chômage déclaré relativement faible, mais la réforme des entreprises va probablement aggraver les choses. Les dispositions de protection sociale en vigueur sont coûteuses et inefficaces. La protection des pauvres dans ces pays devrait donc passer par une réforme des systèmes de sécurité sociale, dont on améliorerait l'efficacité et le ciblage, tout en en atténauant les effets pervers pour les groupes vulnérables au moyen d'une assistance bien ciblée destinée à amortir pour eux les conséquences de la hausse des prix des denrées alimentaires de première nécessité et de l'énergie. Ces mesures devraient comprendre une aide en faveur des retraités et des chômeurs, des actions de reconversion et des programmes de travaux d'utilité publique. 3.19 Les pays en développement à revenu intermédiaire, comme ceux d'Amérique latine, ont pour la plupart dépassé la phase d'ajustement des prix, mais sont encore confrontés à de graves problèmes d'ajustement macroéconomique, qui ont en partie leur origine dans leur système de sécurité sociale. On y trouve bien un système structuré, mais il fonctionne souvent mal, la couverture en est limitée et les coûts administratifs élevés. Il semble donc que les pouvoirs publics devraient s'attacher à améliorer le fonctionnement, la couverture et l'efficacité du système de protection sociale. Il faudrait le faire également pour l'aide aux chômeurs et l'amélioration de la formation. 3.20 Le choix des instruments dépendra d'un certain nombre de facteurs 78 3.21 Le dosage des mesures de réforme. Une libéralisation brutale des prix, notamment des denrées alimentaires (comme dans les pays en transition), nécessiterait dans un premier temps, pour atténuer les pertes de revenu réel qui en résulteraient, des mesures telles que des subventions ciblées ou des compensations financières. Le licenciement des employés du secteur public, par suite d'une réduction des subventions ou de la libéralisation des échanges (comme en Afrique), pourrait nécessiter des mesures visant à résoudre les problèmes causés par le chômage, telles que des indemnités de chômage et de licenciement, des actions de reconversion ou des progranmmes de travaux d'utilité publique. Dans les pays où les programmes de réforme ont progressé, on est passé, en ce qui concerne l'orientation des mesures de protection sociale, du premier domaine au second. 3.22 Composition des groupes cibles. Une nombreuse population âgée nécessite des pensions, tandis qu'une forte proportion de jeunes enfants nécessite d'autres types de mesures, telles que des allocations familiales ou des dépenses scolaires. Des transferts ciblés en nature, comme une prise en charge médicale des personnes âgées ou la fourniture de lait aux enfants, pourraient alors être utiles. Un taux de chômage élevé appelle la création de progranmmes d'emploi ciblés. 3.23 Dispositions institutionnelles existantes. Les instruments choisis devraient s'appuyer sur les dispositions existantes et les compléter, qu'elles soient structurées (voir Section Il ci-dessus) ou non. La famille élargie vient en aide à ses membres en période de crise économique, les mécanismes communautaires permettent à leurs membres de grouper les risques et les organisations non gouvernementales ciblent leur aide sur les plus vulnérables. 3.24 Disponibilité des données. Le ciblage des filets de protection sociale exige de pouvoir ientifier à temps les catégories de population en difficulté. L'expérience a montré qu'il est souvent difficile d'identifier les pauvres en raison du manque de données sur les ménages dans certains pays. Lorsque ces données sont inexistantes ou peu fiables, il peut être difficile de déterminer les besoins sur la base des revenus ou du patrimoine. Dans de tels cas, il pourra être possible de concevoir des programmes spécifiquement pour certaines régions ou catégories de population (régions frappées par la sécheresse, personnes âgées, enfants), ou pour les pauvres par une certaine forme d'autosélection, comme les programmes de travaux d'utilité publique pour lesquels on propose des salaires suffisamment inférieurs aux niveaux du marché. 3.25 Capacité administrative. Lorsque les administrations centrales ou locales sont faibles, les collectivités locales et les organisations non gouvernementales peuvent constituer des intermédiaires fiables, mais elles peuvent avoir besoin du soutien de l'Etat; et une bonne coordination avec l'administration centrale est essentielle. Les collectivités locales sont généralement mieux en mesure de cibler leurs actions, et elles comprennent mieux la situation de la pauvreté dans leur zone géographique, en particulier dans les grands pays. 3.26 Financement. Le problème des moyens financiers est une contrainte évidente qui peut influer sur le choix des instruments et l'étendue de la protection. On peut atténuer cette contrainte en réduisant les dépenses improductives ou en augmentant les recettes. Dans certains pays à faible revenu, l'aide extérieure peut jouer un certain rôle, du moins temporairement, dans le financement des filets de protection sociale. 3.27 Préférences quant aux moyens d'action. Les pouvoirs publics peuvent avoir des préférences différentes quant aux moyens d'action qu'ils souhaitent mettre en oeuvre, mais ceux-ci comprennent généralement la volonté de protéger certaines catégories de populations urbaines contre 79 les augmentations relatives des prix agricoles, et d'offrir des indemnités aux travailleurs licenciés pour motifs économiques. Diverses autorités ont montré de la réticence à cibler l'assistance uniquement sur les pauvres. 3.28 En conclusion, la nécessité d'adopter des mesures de protection sociale dépend des conditions qui règnent dans le pays, ainsi que du dosage et de l'échelonnement des mesures de réforme. S'il est tout à la fois possible et nécessaire de tenter de concevoir les réformes de manière à réduire leur incidence négative sur les pauvres, les programmes de réfornes devraient avoir pour objectif un ajustement macroéconomique et structurel efficace, tout en atténuant les éventuels effets négatifs pour les pauvres en instaurant un filet de protection sociale. Un ciblage plus précis des subventions aux couches défavorisées de la population augmentera le nombre de pauvres que l'on aura pu aider avec un montant donné de crédits budgétaires. Cependant, il manque encore à beaucoup de pays les données nécessaires, ou la capacité administrative (locale), ou la volonté politique de pratiquer ce ciblage et, lorsque cette mesure est envisageable, elle peut être coûteuse. On pourrait aussi cibler les prestations sur certaines régions géographiques ou certaines catégories de population (comme les personnes âgées, les enfants et les chômeurs). Les programmes de travaux d'utilité publique proposant des bas salaires peuvent constituer une autre solution, d'un bon rapport coût-efficacité, encore que plus limitée, avec des coûts administratifs réduits par l'effet d'autosélection. D'une manière générale, la protection sociale pourra être rendue plus durable par un accroissement des dépenses publiques pour les pauvres, comme par l'organisation de programmes de soins de santé primaires, d'éducation et de nutrition, et par l'amélioration de l'accès des personnes vulnérables à ces services. IV. Le rôle des Etats, des orzanismes d'aide, de la Banque et du Fonds 4.1 Perspectives pour les Etats. La réforme des systèmes de sécurité sociale et la mise en place de filets de protection sociale sont par essence des tâches complexes. Elles impliquent des choix politiques qui menacent des intérêts acquis, et elles soulèvent de difficiles problèmes techniques. Ces décisions impliqueront probablement un arbitrage entre le souci de protéger les pauvres et les catégories vulnérables et celui d'offrir des compensations aux autres catégories de population, politiquement plus influentes, pour les dédommager des pertes subies du fait des mesures prises. De plus, les impératifs qui dictent de telles réformes sont généralement renforcés par des difficultés macroéconomiques, de sorte qu'elles sont inévitablement conçues dans de difficiles conditions d'austérité financière. Mais force est de dire aussi qu'en tardant à aborder ces probèmes, on ne ferait probablement qu'aggraver les déséquilibres structurels. 4.2 Les stratégies possibles pour réformer les systèmes de sécurité sociale et instaurer des filets de protection sociale varieront selon les pays en fonction des facteurs mentionnés plus haut, en particulier les conditions socio-économiques ainsi que la nature et l'ampleur des problèmes et des distorsions. Le succès des réformes et la mise en place de filets de protection sociale ont pour éléments clés: * la constitution d'un consensus politique sur la nécessité des réformes, étant donné la difficulté des décisions à prendre; * l'amélioration progressive de l'administration et des bases de données afin de permettre un réglage plus précis des réformes au fur et à mesure de leur progression; 80 * des filets de protection sociale conçus de manière que certaines mesures temporaires ne deviennent pas permanentes; * le financement des filets de protection sociale au moyen des ressources intérieures par l'augmentation des recettes ou la réduction d'autres dépenses, en particulier les dépenses improductives; * dans les pays de l'EUS, d'Europe de l'Est et d'Amérique latine, où l'ajustement des systèmes de sécurité sociale est absolument indispensable, l'adoption rapide de mesures pour abaisser le niveau des droits et élargir la couverture sociale aux pauvres; * l'amélioration de la réglementation des marchés financiers et des régimes de retraite privés. 4.3 Le rôle des organismes donateurs. Les organismes donateurs bilatéraux peuventjouer un rôle déterminant dans la mise en place et le financement de filets de protection sociale dans les pays pauvres. Dans de nombreux pays, l'assistance technique peut jouer un rôle dans la réforme des systèmes de sécurité sociale; la participation des bailleurs de fonds à ce type d'aide est en augmentation dans les pays d'Europe de l'Est et de l'EUS. L'aide bilatérale de certains pays contribue déjà à la préparation de projets comportant la réforme des systèmes d'assurance sociale en Europe de l'Est. La coordination de l'activité des bailleurs de fonds est essentielle pour éviter la duplication des efforts, en particulier dans des domaines comme celui de l'aide alimentaire. Il faudrait examiner toutes les implications de l'aide alimentaire pour le financement des filets de protection, certains pays ayant recours presque exclusivement à ce type d'aide pour établir des filets de protection en période de transition. Dans de telles conditions, une interruption brutale de l'aide alimentaire pourrait désorganiser tout le programme d'assistance sociale du pays bénéficiaire. Il faudrait aussi prendre en compte les incidences de l'aide alimentaire sur l'agriculture locale. La monétisation budgétaire de l'aide alimentaire est indispensable à la génération de ressources pour financer les filets de protection. C'est pourquoi il est essentiel que les donateurs évaluent soigneusement les effets de l'aide en nature sur les pays bénéficiaires. 4.4 Le rôle de la Banque. Etant donné son objectif global de réduction de la pauvreté et de développement général des ressources humaines, la Banque a pour rôle d'établir un dialogue avec les pays membres en vue de rendre les dispositions permanentes en matière de sécurité sociale plus équitables, applicables aux pauvres, d'un bon rapport et efficaces, et d'apporter son concours aux réformes par des prêts appropriés. De plus, la Banque continue de fournir une assistance technique en vue de renforcer les capacités administratives de ses emprunteurs par la formation du personnel des institutions compétentes. Ainsi, un récent prêt à la Hongrie permettra d'améliorer la capacité administrative du système d'assurance sociale de mieux gérer ses ressources financières, ainsi que de renforcer les capacités de décision et d'évaluation des dirigeants et des responsables hongrois. 4.5 La Banque a participé en outre à un nombre restreint mais croissant d'interventions temporaires (soit comme opérations indépendantes, soit dans le cadre d'un projet) de protection sociale pour les groupes vulnérables. Les actions les plus fréquentes à cet égard ont été les programmes de travaux d'utilité publique à forte intensité de main-d'oeuvre (comme au Mali, au Honduras et au Sénégal), les programmes de nutrition (Bolivie), les subventions alimentaires ciblées ou la transformation de programmes à durée indéterminée et non ciblés en programmes ciblés (Tunisie), et la reconversion de ceux auxquels les programmes d'ajustement ont fait perdre leur emploi (par exemple, le National Renewal Fund en Inde et des programmes réalisés dans les pays de l'EUS et en Afrique subsaharienne). Les fonds sociaux offrent un instrument de plus en plus utilisé, auquel la Banque fait appel pour financer des interventions sociales visant à protéger certains groupes 81 vulnérables contre les effets pervers à court terme des programmes d'ajustement (Honduras, Bolivie). Dans le contexte de ses programmes, la Banque accordera davantage d'attention à la mise en place de filets de protection sociale efficaces d'un bon rapport coût-efficacité. 4.6 En collaboration avec le FMI, la Banque poursuivra le dialogue avec ses pays membres pour rechercher ensemble des méthodes efficaces pour transformer les subventions généralisées en filets de protection ciblés sur les ménages pauvres et vulnérables, en utilisant à cet effet divers moyens, et notamment celui du document-cadre de politique économique. 4.7 Dans ses études économiques et sectorielles, la Banque cherchera à approfondir sa compréhension des relations qui existent entre les interventions de protection par filets de sécurité et les stratégies de développement des ressources humaines et de réduction globale de la pauvreté. Ce type d'analyse devrait normalement précéder les projets de mise en place de filets de sécurité, y compris de fonds sociaux, bien que ceci soit souvent rendu difficile par la nécessité d'agir rapidement. Un examen préalable de l'incidence potentielle des interventions de mise en place de filets de protection fera apparaître leurs interactions possibles avec les autres programmes de réduction de la pauvreté, ce qui permettra aux pouvoirs publics d'identifier et d'exploiter les synergies entre ces deux types d'action; et qui réduira en outre les risques de duplication des efforts. 4.8 La Banque fait actuellement la synthèse des aspects analytiques et empiriques de la réforme des systèmes d'assurance sociale 7. Elle préparera en outre des dossiers sur les conclusions de l'évaluation des programmes et projets de filets de protection sociale en cours et achevés,. Lorsque la synthèse de ces conclusions sera terminée, elle s'efforcera de tirer des enseignements de l'expérience passée pour renforcer les liens entre les filets de protection sociale et la conception des politiques nationales, et pour améliorer le dialogue avec les pays membres sur un programme global d'assistance. 4.9 Au cours des 15 dernières années, la Banque a beaucoup fait pour aider les pays à recueillir des données sur les ménages pour lui servir de base à son travail sur la pauvreté. Des enquêtes sur le niveau de vie ont été menées dans de nombreux pays d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine. En collaboration avec le PNUD, la Banque a apporté son concours à l'initiative « Dimensions sociales de l'ajustement » en Afrique subsaharienne, qui a considérablement accru le volume d'informations sur les ménages sur lesquelles fonder une analyse de la pauvreté, et améliorer la capacité de collecte des données dans les pays. 4.10 Pour faciliter les travaux sur la réforme de la sécurité sociale et l'établissement de filets de protection sociale, la Banque continuera, en collaboration avec des donateurs bilatéraux et des organismes multilatéraux, dont le Bureau international du travail, à aider les emprunteurs à se doter de moyens accrus pour analyser et suivre de près l'évolution de la situation dans le pays au moyen d'enquêtes sur les revenus/dépenses des ménages et d'indicateurs sociaux (c'est ainsi que l'office russe de la statistique, Goskomstat, vient de procéder à ce type d'enquête sur les ménages pour la Russie avec une assistance financière de la Banque pour la conception, la mnise en oeuvre et l'analyse de cette enquête; une enquête similaire est sur le point de commencer au Kirghizistan). 7. Une étude intitulée Old-Age Security sera réalisée par le Département de la recherche sur les politiques au cours de l'exercice 94. 82 4.11 Le rôle du Fonds. Etant donné son mandat principal, le Fonds a l'intention, dans ses actions de conseil et d'assistance financière à ses pays membres, de continuer à centrer son action sur la promotion de politiques macroéconomiques saines en vue d'assurer une croissance soutenue, la stabilité des prix et la viabilité de la balance des paiements. Un système de sécurité sociale mal conçu constitue une source majeure de déséquilibre budgétaire, tandis que les réformes économiques nécessitent la mise en place de filets de protection sociale. Dans ces deux domaines, le Fonds continuera à orienter principalement son action sur la fourniture de conseils aux Etats membres en ce qui concerne l'évaluation des incidences macroéconomiques et budgétaires des diverses options élaborées en collaboration avec la Banque. En particulier, dans le contexte des programmes du Fonds, notamment les programmes financés dans le cadre de la Facilité d'ajustement structurel renforcée (FASR), une attention plus grande sera portée à la mise en place de filets de protection sociale bien conçus. 4.12 Les services du Fonds continueront de fournir aux Etats membres des conseils sur les incidences budgétaires de la réforme des systèmes de sécurité sociale, en particulier dans le cadre des programmes de réforme économique qu'il soutient. Le programme limité d'assistance technique du Fonds continuera, en étroite coopération avec la Banque mondiale et d'autres institutions, à aider les pays à élaborer, pour leurs systèmes de sécurité sociale, des réformes efficaces et rentables. 4.13 Les services du Fonds continueront à aider les pays à choisir un ensemble bien agencé d'actions destinées à minimiser les effets négatifs sur les ménages pauvres ou vulnérables, tout en maintenant le cap sur le rétablissement et la préservation de l'équilibre macroéconomique en vue de favoriser une croissance durable. En étroite collaboration avec la Banque et d'autres institutions, le Fonds poursuivra son action d'assistance aux autorités pour l'évaluation des effets négatifs des réformes dont souffrent encore les pauvres, en vue d'intégrer les filets de protection sociale dans des programmes. Une attention particulière sera accordée au financement des filets de protection sociale par des ressources intérieures, obtenues par l'accroissement des recettes, la rationalisation des dépenses publiques et la réduction des dépenses improductives, à l'augmentation et à l'amélioration de la composition des dépenses sociales essentielles, ainsi qu'à l'accès des pauvres aux services publics essentiels. Si les ressources le permettent, l'assistance technique à la mise en place de filets de protection sociale sera poursuivie, les compétences du Fonds venant compléter utilement le travail de la Banque et d'autres institutions. On continuera à diffuser, comme par le passé, les leçons de l'expérience acquise dans ce domaine auprès des responsables des pays membres. 83 RAPPORT INTERIMAIRE SUR LES ACTIVITES DE LA BANQUE MONDIALE POUR LA PROMOTION DU ROLE DE LA FEMME DANS LE DEVELOPPEMENT (Rédigé par les services de la Banque mondiale) 1. Le rapport qui suit rend compte des progrès faits par la Banque, en collaboration avec les emprunteurs et les autres donateurs externes, dans l'application de la stratégie opérationnelle pour la promotion du rôle de la femme dans le développement. En 1990, le Comité du développement a approuvé l'initiative tendant à ce que les politiques et programmes de développement tiennent dûment compte des besoins spécifiques des femmes. Un rapport intérimaire a été établi en 1991 sur les activités des exercices 90 et 91. 2. Le présent document décrit les progrès réalisés au cours des exercices 92 et 93. Durant cette période, certains secteurs de la Banque ont modifié leur approche théorique. L'idée de promouvoir le rôle de la femme dans le développement, qui consiste à examiner isolément les problèmes rencontrés par les femmes, a fait place à une vision plus ouverte qui envisage ces problèmes en les situant dans un contexte social par rapport aux problèmes des hommes. La première partie du document présente les progrès accomplis depuis 1991 dans les activités opérationnelles, la formation du personnel et les travaux de vulgarisation de la Banque, et décrit les dispositions institutionnelles existant au sein de la Banque. La seconde partie décrit les programmes d'action régionaux et les problèmes en suspens. PRINCIPAUX PROGRES ACCOMPLIS DEPUIS 1991 Progirès dans l'analyse des Problèmes respectifs des hommes et des femmes en rapport avec le développement 3. Etudes économiques et sectorielles. Depuis le précédent rapport intérimaire, la Banque a continue à intégrer davantage à ses activités des mesures visant à promouvoir le rôle de la femme dans le développement. Un examen de l'ensemble des rapports d'études économiques et sectorielles de la Banque lors de l'exercice 92 a indiqué que 46 % de tous les rapports contenaient des travaux d'analyse portant sur le rôle de la femme dans le développement, soit une proportion très proche de celle observée lors de l'exercice 91 (48 %). Les travaux de ce type ont été plus fréquents dans les secteurs sociaux que dans les autres secteurs. Cependant, la question du rôle de la femme dans le développement est prise de plus en plus en compte dans des domaines comme l'agriculture. les marchés de l'emploi, le crédit, les services ruraux, la gestion des ressources naturelles, l'approvisionnement en eau, les transports, l'infrastructure urbaine et l'énergie. 4. Les évaluations du rôle de la femme dans le développement à l'échelle des pays méritent de retenir spécialement l'attention parmi les rapports d'études économiques et sectorielles car elles sont très détaillées et font une large place aux travaux des chercheurs et analystes locaux. Elles servent de base au dialogue de la Banque et des autres bailleurs de fonds avec les gouvernements, de même qu'à la conception de programmes d'action destinés à aider les pays à offrir de meilleures possibilités aux femmes dans le secteur social comme dans le secteur productif. Les premières évaluations du rôle de la femme dans le développement ont porté sur 31 pays, dont 19 dans la Région Afrique. Quatre ont été publiées (Kenya, Bangladesh, Inde et Pakistan). Lors des exercices 92 et 93, le rapport sur la condition de la femme en Turquie a été publié et 10 autres rapports sont en préparation ou en cours d'examen avec les gouvernements concernés-'. L'évaluation de la condition de la femme au Honduras a fait l'objet d'un débat public au sein du parlement hondurien. Toutes les recommandations ont reçu l'appui des participants, parmi lesquels figuraient des parlementaires et des 1' Les dix rapports par pays sur le rôle de la femme dans le développement portent sur.: la République centrafricaine, la Guinée-Bissau, le Nigéria, le Mali, la Mauritanie, le Sénégal, la Zambie, la Russie, le Honduras et le Venezuela. 85 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement responsables du Gouvernement et d'organisations non gouvernementales. Les activités de suivi sont coordonnées par la Commission parlementaire de la condition de la femme. 5. Habituellement, les rapports économiques sur les pays traitent des disparités entre hommes et femmes d'un point de vue général. Lorsqu'il existe des données statistiques, les rapports présentent des indicateurs sociaux par sexe, exposant les inégalités entre hommes et femmes dans des domaines tels que l'alphabétisme, les taux de scolarisation et les niveaux de rémunération. Le rapport économique sur l'Ouganda, publié récemment, examine explicitement les problèmes créés par les inégalités entre hommes et femmes dans la stratégie du pays pour stimuler la croissance et lutter contre la pauvreté. Les Régions accordent également une place de plus en plus importante aux différences de condition entre hommes et femmes dans les évaluations de la pauvreté, surtout dans les pays où le nombre des ménages dont le chef est une femme est anormalement élevé, comme c'est le cas en Afrique subsaharienne, et où les indicateurs sociaux révèlent des écarts considérables entre hommes et femmes. 6. Etudes spéciales. Outre les études économiques et sectorielles, la Banque a effectué de nombreuses études spéciales, formelles et informelles, portant sur des problèmes particuliers: * Dans la Région Amérique latine et Caraïbes, des études ont été faites sur l'emploi et la rémunération des femmes en Amérique latine, et les gains et la participation des femmes au marché du travail. Ces travaux ont fourni des renseignements utiles aux responsables des décisions et des opérations dans le domaine de la valorisation des ressources humaines. * Dans la Région Afrique, une étude est en cours au sujet du statut juridique des femmes. Elle comprend une phase théorique, au cours de laquelle seront examinés les liens entre le droit, la condition respective de l'homme et de la femme et le développement économique, et une phase opérationnelle qui consistera à recommander des réformes juridiques spécifiques dans chaque pays. Des travaux ont commencé également au sujet des liens que les hommes et les femmes entretiennent avec l'environnement en Afrique, et notamment du rôle des femmes dans la gestion des ressources naturelles. * Dans la Région Asie, une étude technique sur la création d'entreprises et les services financiers destinés aux femmes rassemble les enseignements de dix années d'expérience de la Banque et propose des moyens de fournir le plus utilement possible une assistance dans ce domaine à l'avenir. * Dans la Région Europe et Asie centrale, une étude sur la condition des femmes en Russie met en évidence les problèmes critiques des femmes dans les économies en transition. Ces problèmes sont étudiés actuellement plus en détails dans de nombreux pays (voir Encadré 1). * Dans la Région Moyen-Orient et Afrique du Nord, une étude régionale est en cours sur les femmes rurales dans les pays du Maghreb. * Une analyse de l'expérience de la Banque dans le domaine des études économiques et sectorielles, et de son expérience des prêts pour les femmes en Europe et Asie centrale et au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, met en relief les difficultés rencontrées par les femmes dans ces deux régions et indique les leçons à tirer des activités passées, pour les appliquer éventuellement à de futurs projets. 86 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement Encadré 1: Prordis des femmes en Europe et Asie centiale Le passage atuel des pa) s d'Europe onentale d'une économie dirigée à une économie de marché est à l'ongmne d'un nouveau domaine d'investiganons pour la Banque. A quelques exceptons prés. les problèmes renconu'és par les femmes dans ces pays sont dans l'ensemble différents de ceux auxquels se heurtent les femmes des pays en développement des autres régions du monde. Jusqu'à présent. dans la Région Europe et Asie centrale, les femmes jouissaient de l'égalité d'accès à l'enseignement et aux services de santé. Elles participaient pleinement au marché du travail, et des crèches et des écoles matemelles prenaient soin des enfants. La transinon économique a un effet néganf sur ces services traditionnels Par exemple. en pénode de chômage croissanL d'une façon générale, les femmes représentent 70 à 80 % du nombre total de chômeurs et restent au chômage plus longtemps que les hommes. Cela tent au fait que les femmes. aussi éduquées sotent-elles. sont surlout employées dans les secieurs de l'économie les moins rémunérés, et ce sont donc elles qui sont généralement licenciées en premier Tel est particulièrement le cas dans les pays d'Asie centrale, où le chômage des femmes atteint 89 % du nombre total de chômeurs. sans compter le fait que l'accès à la formnaton y est plus facile aux honumes qu'aux femmes. Un autre problème qui se pose est la détérioranon de la santé des femmes, les services de santé ayant de plus en plus de mal à survisre à la période de transiton. Les taux de mortalité maternelle et infantile ont augmenté dans la région Europe et Asie centrale au cours des cinq demtères années, en particulier dans les pays d'Asie centrale et surtout en milieu rural. Si les taux de fécondité sont en baisse en Russie, dis contnuent d'tre élevés en Asie centrale. ce qui entraine un taux d'accroissement naturel de la population de 2,2 % par an. Comme autres indications de la déténoration de la situanon sanitaire, on peut signaler les forts taux d'avortement, l'absence de programmes de planning familial ten particulier dans les pay s d'Asie centrale), les forts pourcentages de femmes enceuntes souffrant d'anémie. les problèmes d'hygiène et la mauvaise qualité de l'eau, les carences en iode et en fer et la fonte incidence des maladies cardiovasculaires ou respiratoires et autres maladies non transmissibles. Le rnieau de pauvreté croissant dans lequel se uousemn les femmes est une autre dimension umportante des problèmes d'égalité des sexes tels qu'ils se posent dans la Région Europe et Asie centrale. On trouve un pourcentage partculièrement élevé de femmes parm les ménages défavonsés, et notamment ceux ayant une femme à leur téte, ceux comprenant beaucoup d'enfants ou encore les ménages d'étudiants, sans parler des femmes au chômage ou à la reuaite. Ce problème est accru du fait que les femmes sont confrontées à une baisse progressive des allocations familiales et autres prestanons dans le cadre des réformes axées sur le marché. De plus. on assiste à une diminuton des services auparavant foumis par des enurepnses. celles-ci n'étant plus en mesure de maintenir les importants programmes sociaux qu'elles assuraient traditionnellement. Cette . fénunisation . de la pauvreté est particulièrement préoccupante dans les pays d'Asie centale. compte tenu du nombre de ménages à plusieurs enfants et des forts pourcentages de femmes . avanL dans les zones rurales. où la paur reté est plus prononcée Pour remédier à ces problèmes en Europe onentale et en Asie centrale il faudra suivre une démarche différente de celle appliquée dans les autres pays en développement où les problèmes pnontaires sont le manque d'instruciion des femmes et leur accès insuffisant aux servtces agncoles. La Région déseloppe actuellement son portefeuille de préts et réalise des études économuques et sectonelles qui l'aideront à définir les problèmes les plus urgents rencontrés par les femmes, et les solunons envisageables. Source: B Dabrowska, A. Wheeler et Mlana Gracheva Memorandum on Women in De%elopmett in ECI, EC2, and EC3. 87 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement sans parvenir à être viable sur le plan institutionnel et financier s'il est conçu plus comme une action d'aide sociale que comme une opération commerciale. Les différents stades d'évolution des entreprises sont fonction des degrés d'accès du chef d'entreprise au crédit. Afin de concevoir des projets comportant des mécanismes appropriés pour la fourniture de l'aide, il faut décider quel est l'assortiment de services le plus efficace dans une situation donnée. Par exemple, les entreprises de subsistance, caractérisées par des activités économiques diversifiées, saisonnières et à temps partiel, menées le plus souvent par les femmes dans les ménages à bas revenu peu enclins à prendre des risques, nécessiteront une approche ciblée. En revanche, les entreprises bien établies, qui tendent à bénéficier de mécanismes financiers exigeant un titre de propriété incontestable sur un actif susceptible de garantir un prêt, peuvent nécessiter des solutions de type institutionnel telles que des prêts de groupe ou les cautions de remplacement. 14. L'expérience montre que la réussite d'un projet dépend de nombreux éléments qui doivent généralement être présents dès la conception des opérations. Le plus important d'entre eux semble être l'existence, chez les emprunteurs et l'organisme d'exécution, de la volonté de remédier aux inégalités entre hommes et femmes et d'engager les moyens nécessaires à cette fin. D'autre part, il est essentiel d'utiliser le plus possible du personnel féminin, tant dans l'administration du pays que dans l'équipe du projet, afin de concentrer l'attention sur les disparités entre hommes et femmes. Enfin, pour cibler les populations bénéficiaires, il est utile de disposer d'un ensemble solide de données de base ou d'analyses des différences de situation entre hommes et femmes. Tous ces éléments étaient réunis dans le cas du Fonds d'investissement social de la Bolivie, projet dont les composantes « promotion du rôle de la femme dans le développement » ont été exécutées avec succès (Encadré 2). 15. La Banque a largement coopéré avec les donateurs bilatéraux et multilatéraux et les ONG, et cette coopération s'est faite à deux niveaux. Au sein même de la Banque, le Programme de promotion du rôle de la femme dans le développement (RFD) a beaucoup gagné grâce aux appuis bilatéraux reçus. Dans la plupart des cas, les principales évaluations du rôle des femmes dans le développement ont été entreprises avec l'appui conjoint de la Banque et de fonds fiduciaires financés par la Norvège et les Pays-Bas. Les services chargés des questions de RFD dans les Régions Asie et Afrique bénéficient d'un appui substantiel de la part de la Norvège. Au niveau local, le personnel chargé de promouvoir le rôle de la femme dans le développement en Indonésie et l'un des postes chargés de cette question en Inde ont également été financés sur des ressources bilatérales. Par ailleurs, le travail préparatoire à la mise au point des grandes orientations concernant le rôle de la femme dans le développement a bénéficié d'un financement conjoint de donateurs bilatéraux et de la Banque. De leur côté, les donateurs bilatéraux se sont rendus compte que leur action dans ce secteur pouvait avoir davantage d'impact s'ils mettaient en commun leurs ressources fmancières et humaines avec celles de la Banque. Pour sa part, celle-ci a redoublé d'efforts pour s'attaquer aux problèmes d'égalité des sexes et en faire un domaine à part entière de ses opérations courantes, comme en témoigne la création d'un fonds régional pour la promotion du rôle de la femme dans le développement au sein de deux Régions - Europe et Asie centrale, et Moyen-Orient et Afrique du Nord. 90 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement Encadré 2: Boliiie - Projet de ronds d'invesftissement social Dès le stade de la concepton des acuvîrés. le projet Fonds d'investissemenL social (FIS). exécutéen Boihie. a comporté des mécanismes eificaces pour tenir compie des problèmes des femmes. Lin cenain nombre d'éléments clés, présents dès la concepaon et la préparanon du projet, onr facilité ulténeurement le déroulement des operauons: • Le FIS a pu s'nspirer de l'expérience de son prédécesseur. le Fonds social d'urgence de la Bolivie, pour la concepnon de services ei d'invesussemenis destnés aux femmes. comme des crèches et des programmes de somIs de santé et d'alphabénsation à l'iniention des femmes à bas revenu. * Le Gouemernent a soutenu pleinemeni le projet dès le dépari et avait accepté d'inscrire au programme d'imestissement du secteur public ses dépenses correspondant à d'Lmporants services de santé et d'éducaton. * Les objectifs du projet et des sous-projets ont été formulés clairement et la portée des activinés et des interventions concemant les femmes était bien définie. * Le projet a utilisé une base de données sur les communautés pour déterminer celles où existaient des besoins. Il a utiltsé des mécanismes de ciblage pour identifier les populations à risques, parmu lesquelles figurait un nombre disproportonné de mères ei d'enfants. * Les groupes de femmes et les organisanons communautaires ont été appelés à parctper très tôt à la concepuon du projet. ce qui a aidé à ideniifier les besoins de sous-projets pornant sur la foumiture de crèches, de somns de santé, de services de nunition et d'activités de formation pratque. * On a fait appel à des ONG locales. particuliérement là où la capacité institunonnelle élait insuffisante, c'est-à-dire, en général. dans les régions les plus pauvres Les ONG actives dans ces régions ont reçu un appui instiutionnel pour formuler et exécuter des projets * Les femmes ont non seulemenm été ciblées en tant que bénéficiaires, mais elles ont également parucipé à la founuture des services de santé, de nutnuon et de crèche, et cenaines femmes ont même aidé à la construction d'installations. Source Sayeeda Chaudhry. *WID Updare for IDA Technical Note.. 23 juin 1993. 16. La coopération des ONG et des groupes d'appui locaux a, de plus, contribué à la réussite d'un grand nombre de programmes. Les ONG, de par leur implantation au niveau communautaire, savent dans quels domaines les besoins se font le plus sentir à l'échelon d'un pays, et elles peuvent contribuer utilement à la supervision et au suivi des projets. La collaboration avec les donateurs multilatéraux est moins fréquente, mais dans les cas où une telle collaboration s'est avérée appropriée (par exemple, entre la Banque et le Fonds de développement des Nations-Unies pour la femme, ou UNIFEM; voir Encadré 3), l'expérience a été concluante pour chacun des partenaires. Formation du versonnel et activités de vulzarisation 17. S'il importe que la Banque continue de faire preuve, au plan institutionnel, de son attachement vis-à-vis des problèmes concernant la promotion du rôle de la femme dans le développement, il faut aussi 91 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement aux évaluations de la pauvreté et aux principales études économiques et sectorielles. La mise en oeuvre de ce programme élargi sera assurée conjointement par l'Equipe RFD et pauvreté et par l'équipe, aux effectifs plus importants, qui s'occupe du développement social au sein du Département technique pour l'Asie. 28. Europe et Asie centrale. Les activités de promotion du rôle de la femme dans le développement dans la Région Europe et Asie centrale se concentrent sur les secteurs qui, dans les économies en transition, doivent faire l'objet de réformes si l'on veut répondre aux besoins des femmes. Il s'agit notamment de la santé maternelle, de l'emploi et des soins aux enfants, de la formation et de l'éducation, de la pauvreté et de la vieillesse, ainsi que de la protection et de la pratique juridiques. Dans plusieurs domaines clés, comme la santé et l'emploi, des progrès ont été faits pour ce qui est d'incorporer les questions d'égalité des sexes dans les activités de la Région. Celle-ci s'est donnée pour but d'appuyer des efforts concrets de promotion du rôle de la femme dans le développement et de faire prendre davantage conscience de l'importance qu'il y a à prendre en compte le point de vue des femmes. Un fonds a été créé au sein du bureau de l'Economiste en chef afin de soutenir des activités portant sur les problèmes d'égalité des sexes. Il a pour objectif de financer des études sur les questions qui sont d'une importance capitale pour les femmes durant le processus de transition, et d'amener les meilleurs spécialistes disponibles - au sein de la Banque comme à l'extérieur - à prendre part à cet effort. Les études serviront de base aussi bien à la mise au point des projets qu'à la réalisation d'études économiques et sectorielles. La stratégie suivie par cette Région en vue de promouvoir le rôle de la femme dans le développement fera périodiquement l'objet d'un examen afin de tirer les enseignements qui s'en dégagent, d'identifier les domaines dans lesquels l'effort doit se poursuivre et d'évaluer les incidences budgétaires. 29. Amérigue latine et Caraïbes. Dans cette région, les efforts destinés à améliorer la situation des femmes consistent surtout à valoriser le capital humain que celles-ci représentent. Tous les projets qui y sont menés dans les secteurs sociaux comportent des volets de RFD spécifiques ou traitent indirectement de problèmes qui ont une incidence sur les femmes, et les projets entrepris dans les autres secteurs comprennent en outre, de plus en plus, des composantes de RFD. La supervision des projets fait notamment appel à des indicateurs permettant de mesurer les progrès réalisés dans ce domaine. Cela consiste à rassembler des données de base par le biais d'études sur la mesure des niveaux de vie, afin de disposer ainsi de renseignements détaillés sur la consommation des ménages et de permettre aux gouvernements de juger de l'efficacité de leurs interventions dans le domaine social. La Région continuera d'entreprendre des études spécialisées débouchant sur des recommandations précises destinées à être prises en compte lors de la conception des nouveaux projets. Par exemple, des études comme celle sur la législation et l'emploi et la rémunération des femmes aideront le personnel de la Banque à concevoir des projets qui tenteront d'éliminer les contraintes juridiques auxquelles sont soumises les femmes sur le marché du travail, ce qui permettra non seulement de s'attaquer aux problèmes qui se posent dans ce secteur mais aussi à certaines de leurs causes sous-jacentes. 30. Moyen-Orient et Afrique du Nord. Dans cette Région, les questions de promotion du rôle de la femme dans le développement sont intégrées aux études et aux activités de prêt consacrées au secteur social et aux ressources humaines et, de plus en plus, à celles touchant le secteur agricole. La Région est décidée à tirer parti des succès passés et à étendre ses initiatives. Chaque département a désigné un coordonnateur pour les questions de RFD, et le bureau régional a récemment décidé de créer un fonds spécial qui fournira des ressources pour de nouvelles initiatives dans ce domaine durant l'exercice 94. En outre, le Vice-Président régional a constitué un groupe d'étude qui sera chargé de proposer une stratégie concernant la promotion du rôle de la femme dans le développement et les questions d'égalité des sexes, et de faire connaître les implications que cette stratégie aura sur le plan des effectifs et des ressources. Ce groupe n'a pas encore achevé ses travaux, mais il envisage de prendre toute une série d'initiatives, consistant notamment: i) à examiner les études économiques et sectorielles et les activités de prêt sous l'angle des problèmes d'égalité des sexes, jusqu'à ce que ces problèmes soient totalement pris en compte dans le travail mené dans tous les domaines par la Région; ii) à 96 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement organiser des séminaires de haut niveau à l'intention des responsables des pays emprunteurs, pour que ces derniers prennent mieux conscience de l'importance de ces problèmes; iii) à inscrire la question de l'égalité des sexes à l'ordre du jour d'une réunion du Comité des conseillers de la Région en 1994; iv) à entreprendre une étude sur les différences de situation entre hommes et femmes au plan régional; et v) à accroître, au sein de la Région, le nombre d'agents dotés d'une expérience dans ce domaine. 31. Développement des ressources humaines et politigue opérationnelle. Le service chargé de la promotion du rôle de la femme dans le développement au sein de la Vice-Présidence Développement des ressources humaines et politique opérationnelle a entrepris la rédaction d'un document de politique générale sur les problèmes d'égalité des sexes et le développement, qui sera soumis au Conseil en mars 1994. Ce document proposera une série de mesures de portée générale visant à faire en sorte que ces problèmes soient mieux intégrés aux opérations de la Banque. Le service a également entrepris une vaste étude spéciale destinée à faire la synthèse des analyses menées au cours des cinq dernières années, à la Banque et à l'extérieur, sur la rentabilité des investissements consacrés aux femmes et des mesures prises pour donner à celles-ci un meilleur accès à l'éducation, aux services de santé, à l'agriculture, aux moyens financiers pour la création d'entreprises, et au marché du travail. Cette étude examinera également les résultats obtenus dans l'exécution des projets afin d'identifier les enseignements à tirer de l'expérience faite par la Banque, les autres bailleurs de fonds, les ONG et les groupes d'appui locaux, l'objectif étant de dégager des « approches prometteuses » qui permettront de s'attaquer aux problèmes d'égalité des sexes dans le cadre des projets et des stratégies d'aide aux pays. Le contenu de l'étude sera communiqué lors de la Conférence mondiale sur les femmes, qui se tiendra en 1995, et fera l'objet d'une diffusion mondiale. On s'attend à ce que cette étude contribue utilement au dialogue que la Banque entretient avec ceux qui déterminent et mettent en oeuvre les politiques dans les pays en développement. 32. Outre la réalisation de cette étude spéciale, la Vice-Présidence Développement des ressources humaines et politique opérationnelle élargira également le cadre de ses travaux d'analyse afin d'examiner les questions nouvelles qui commencent à se poser à l'échelon intemational, telles que les liens entre l'environnement et les rôles respectifs des hommes et des femmes, les incidences différentes que peuvent avoir les réformes économiques sur les personnes de l'un ou l'autre sexe, et les facteurs juridiques qui empêchent les femmes de participer au développement économique. 33. Le programme de travail de cette vice-présidence sera également axé sur les problèmes d'exécution, un appui devant être foumi aux régions dans les domaines suivants: enquêtes et statistiques désagrégées selon le sexe, développement institutionnel, éducation, santé, ressources financières et création d'entreprises, et marchés du travail. Cet appui consistera à appliquer les connaissances et les enseignements tirés de l'étude spéciale à la situation particulière des pays et des projets. Si ce type d'expérience fait défaut, le service chargé de la promotion du rôle de la femme dans le développement appuiera la mise au point de programmes pilotes en collaboration avec les bailleurs de fonds et les départements géographiques concemés. 34. La Vice-Présidence Développement des ressources humaines et politique opérationnelle prévoit en outre de mettre sur pied un programme de formation renforcé afin d'aider le personnel de la Banque à intégrer les problèmes d'égalité des sexes et leur analyse dans les stratégies d'aide aux pays et dans des secteurs déterminés. En mettant l'accent sur divers moyens concrets et « méthodes prometteuses », cette formation foumira aux agents de la Banque les connaissances pratiques qui leur permettront d'appliquer l'analyse de ces problèmes dans leur propre domaine. Pour aider ces agents à surmonter les contraintes institutionnelles affectant la mise en oeuvre d'activités sur le terrain axées sur les problèmes d'égalité des sexes, cette vice-présidence a par ailleurs entrepris de constituer une banque de données sur les ONG spécialisées dans le domaine de la promotion du rôle de la femme dans le développement et d'aider le personnel en question à tirer 97 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement parti de ces ressources dans leur travail opérationnel. Elle collabore également avec les ONG afin de leur apprendre comment fonctionne la Banque et de leur fournir des moyens concrets de concevoir des composantes de projets axées sur les problèmes d'égalité des sexes. 35. Enfin, cette vice-présidence renforce actuellement ses fonctions de suivi pour faire face à l'expérience croissante qui se dégage de l'application du programme de promotion du rôle de la femme dans le développement au niveau des opérations de la Banque. Doté de moyens accrus, son service chargé du suivi des questions de pauvreté et d'égalité des sexes veillera à ce que la promotion du rôle de la femme dans le développement fasse partie intégrante des stratégies d'aide aux pays, ainsi que de la conception et de l'exécution des projets. Un de ses objectifs majeurs sera d'aller au-delà d'un simple suivi quantitatif des projets pour se préoccuper davantage de leur degré d'efficacité, et notamment d'appuyer la réalisation d'études d'impact concernant des approches particulièrement novatrices. Ce service vérifiera en outre dans quelle mesure les problèmes d'égalité des sexes identifiés dans le cadre des stratégies d'aide aux pays sont effectivement abordés dans le dialogue que la Banque entretient avec ses emprunteurs et suivis d'effets dans le cadre de ses activités de prêt. 36. Le Dénartement de l'évaluation rétrosvective des opérations prépare un programme à long terme afm d'évaluer la façon dont les questions d'égalité des sexes ont été traitées dans le cadre des prêts de la Banque entre 1975 et 1992. De son côté, la Vice-Présidence Environnement et développement durable prévoit d'inclure ces questions dans les directives pour les évaluations sociales qu'elle doit soumettre au Conseil durant l'exercice 95. Enfin, des mesures ont commencé à être prises pour intégrer l'analyse de ces questions dans le secteur urbain et dans celui de l'infrastructure. Ouestions en suspens 37. L'examen des conditions dans lesquelles le programme de RFD a été mis en oeuvre durant les deux derniers exercices montre que la Banque a continué de faire des progrès pour ce qui est d'intégrer les problèmes d'égalité des sexes dans les opérations. Des progrès ont certes été réalisés afin d'inclure les femmes parmi les bénéficiaires des projets et de faire en sorte qu'elles prennent part à ces projets et aient accès à leurs composantes, mais il n'en reste pas moins que la Banque doit s'attacher davantage à intégrer les questions touchant la situation des femmes dans son dialogue général avec ses pays membres. Son personnel prend de plus en plus conscience de la nécessité d'incorporer ces questions dans les opérations de la Banque et de tirer parti des exemples de pratiques optimales en la matière. Mais même lorsque ces questions sont prises en compte, des décalages continuent d'exister entre les recommandations des études économiques et sectorielles et la conception des projets, et l'on continue souvent de négliger la supervision, en cours de projet, des activités menées dans ce domaine. L'insuffisance des capacités institutionnelles au niveau des emprunteurs reste un sérieux problème, et la difficulté qu'il y a à obtenir des divers administrations publiques qu'elles accordent autant d'importance aux préoccupations des femmes qu'à d'autres questions représente un défi majeur pour la Banque. 38. Le fait d'intégrer, d'une façon explicite et cohérente, les problèmes d'égalité des sexes dans le dialogue de politique générale que la Banque entretient avec ses pays emprunteurs et dans les stratégies d'aide à ces pays constitue peut-être le critère le plus significatif des progrès réalisés par la Banque dans l'application de son programme de promotion du rôle de la femme dans le développement. Une façon d'amener les pays emprunteurs à prêter davantage attention à ces problèmes consiste à les aborder explicitement dans les stratégies d'aide aux pays menées par la Banque en vue de faire reculer la pauvreté. 98 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement 39. Il faut resserrer les liens entre les études sectorielles et la conception des projets. Pour cela, on peut par exemple entreprendre des études qui abordent non seulement les problèmes mais aussi leurs causes sous-jacentes. Le rapport à venir sur la législation et l'emploi et la rémunération des femmes en Amérique latine et dans les Caraibes a pour but d'aider le personnel de la Banque à concevoir des opérations destinées à éliminer les contraintes juridiques auxquelles sont soumises les femmes sur le marché du travail. Une autre approche consisterait à classer par ordre de priorité divers problèmes touchant la condition féminine et à débloquer ensuite des ressources suffisantes pour que des progrès sensibles puissent être accomplis en vue d'incorporer les problèmes les plus prioritaires dans l'ensemble des activités courantes de la Banque; c'est là la stratégie suivie actuellement par la Région Europe et Asie centrale. 40. Il convient de renforcer à la fois la conception et la supervision des projets. Sachant que les facteurs socioculturels et institutionnels locaux doivent être pris en compte, il est logique d'associer à la mise en oeuvre des projets les populations locales qui ont directement intérêt à ce qu'ils soient couronnés de succès. On devra donc envisager et accroître l'utilisation de personnel résidant sur place, d'ONG et de groupes d'appui locaux. Une supervision locale des projets par les bénéficiaires renforce également la responsabilisation, comme en témoigne le projet de décentralisation et de développement régional entrepris au Mexique. Un autre essai qui s'est révélé utile, dans la Région Moyen-Orient et Afrique du Nord, est l'utilisation de la technique de supervision thématique (Encadré 4), qui permet aux services d'examiner des problèmes communs à l'échelon de toute une série de projets et favorise ainsi une supervision plus efficace. Encadré 4: Supierisilon thématique La supen ision thématique est auee sur une composante ou un problème donné et pennet d'îdenufier les parucularités communes ou les tendances génerales que presente un groupe de projets à CeL égard Elle offre plusieurs avantages eUe se concentre sur des quesions qui nsqueraient d'-tre négligées durant la supen ision des dîsers projets; elle facilite le iransfert de connaissances d'un projet à l'autre: elle met en eévidence les mnsuftisances que presenie la s%rucnure unsuwuîonnelle sous-Jacente: et elle permet de dire si les contraintes qui ont été relesees sont propres à un projet donné ou si elles se rerrouveni dans un cerin nombre de projets Ce t',pe de super.isiona donné d'excellents résultats pour les composantes de RFD * qui représentent une petite panie ou une composante pilote du projet pns dans son ensemble. et qui ne jusnfienr donc pas le colt d'un expen pour des missions de supen ision individuelles. * qui nécessitent des compétences très spécialisées. * qui ont un aspect novateur ei qUI exigent une supen ision intensise: * qui sont entreprises dans des régions du globe ou les contacts entre hommes et femmes sont mterdits en public et où le personnel masculin aura donc des problemes pour superviser des acns nés destinées aux femmes. Source .Implemenung Agncultural De%elopment for Women in Yemen.. Women in EC4 & MENA. mars 1992. 41. La mise en oeuvre de l'ensemble des mesures décrites ci-dessus nécessitera une prise de conscience et un engagement accrus du personnel à tous les niveaux. La formation de ce personnel et la diffusion des directives, des exemples de pratiques optimales et des documents expliquant concrètement l'approche à adopter figureront parmi les objectifs prioritaires de la Vice-Présidence Développement des ressources humaines et politique opérationnelle. Il faudra, chaque fois que possible, former le personnel local des missions résidentes et le charger de préparer et de superviser les éventuelles composantes des projets portant sur le rôle de la femme dans le développement. Il convient aussi d'assurer la formation, au niveau local, de consultants indépendants en ce qui concerne les questions d'égalité des sexes et les méthodes de travail de la Banque. Etant donné que ces questions ont une dimension plus foncièrement socioculturelle que bon nombre des problèmes de 99 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement développement auxquels la Banque ait eu à faire face jusqu'à présent, il faut veiller à assurer une juste répartition des qualifications en recrutant davantage de spécialistes des sciences sociales et en apprenant au personnel existant à intégrer les questions d'égalité des sexes dans les activités de la Banque. Cela dit, il ne faut pas se cacher que ces initiatives porteront leurs fruits uniquement dans la mesure où les emprunteurs eux-mêmes prendront plus clairement conscience de ces problèmes et y attacheront davantage d'importance. Il s'agit là, intrinsèquement, d'un processus à long terme, particulièrement dans les pays où les inégalités entre hommes et femmes sont les plus marquées. Les efforts menés par la Banque contribueront dans une large mesure à faire en sorte que ses propres opérations aident, d'une manière efficace et équitable, à faire reculer la pauvreté et, grâce au dialogue qu'elle entretient avec ses pays emprunteurs, à sensibiliser ceux-ci aux lourdes conséquences que ces inégalités ont du point de vue économique et social. Mais en dernière analyse, c'est aux gouvernements eux-mêmes qu'il incombe d'opérer un changement. 100 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement ANNEXE EXEMPLES DE PROJETS Turquie - Projet d'emploi et de formation En Turquie, bien que la constitution n'établisse pas de discrimination à l'encontre des femmes, celles-ci deux fois moins nombreuses que les hommes sur le marché du travail, et elles travaillent pour la plupart dans le secteur agricole. Pourtant, les femmes turques sont largement favorables au travail en dehors du foyer, et les autorités sont déterminées à accroître la productivité et l'emploi des femmes. Le Projet d'emploi et de formation a pour objectifs généraux d'améliorer la formation offerte à la main-d'oeuvre, de donner aux chômeurs non qualifiés des moyens de se procurer un emploi, et de faire en sorte que les décisions touchant le marché du travail soient prises d'une façon plus efficace, tant par les employeurs que par les employés. Les services de l'emploi ont reçu pour instruction de ne plus définir tel ou tel emploi comme étant réservé aux hommes ou aux femmes exclusivement. Cela devrait permettre aux femmes d'accéder plus largement aux emplois qui offrent des perspectives de carrière, et notamment à ceux qui ont jusqu'ici été l'apanage des hommes. Tous les services qui doivent être fournis dans le cadre du projet seront accessibles aux femmes, et celles-ci seront vivement encouragées à y prendre part. Les listes d'emplois vacants ne feront plus de distinction selon le sexe, et les documents et procédures d'orientation professionnelle ne contiendront plus de stéréotypes sexuels. De plus, un fonds sera établi afin d'appuyer la recherche concernant l'emploi des femmes, de mettre en évidence les facteurs qui gênent ou favorisent l'accès des femmes aux emplois productifs, et d'améliorer la productivité et les revenus des femmes. Source: Rapport d'évaluation, République turque, Projet d'emploi et de formation, 6 novembre 1992. Sri Lanka - Projet d'approvisionnement en eau et d'assainissement communautaire A Sri Lanka, ce sont généralement les femmes qui sont chargées d'aller chercher l'eau pour leur famille et d'en gérer l'utilisation, ainsi que de veiller à l'hygiène familiale et à la propreté de leur foyer. Or, elles sont rarement associées à la planification ou à l'exploitation et à l'entretien des réseaux d'approvisionnement en eau et d'assainissement. Dans d'autres pays en développement, des organisations féminines ont pris l'initiative d'installer leurs propres réseaux ou de gérer les installations existantes, montrant ainsi que les femmes ont un rôle à jouer dans ce domaine. Lorsque la gestion est assurée par un groupe composé d'hommes et de femmes, ces dernières sont souvent chargées de percevoir les redevances, de tenir les comptes et de superviser le réseau d'approvisionnement en eau. Dans d'autres pays, les femmes ont aussi reçu une formation pour réparer et entretenir les pompes. On a constaté qu'elles réagissaient plus rapidement que leurs collègues masculins en cas de plaintes concernant les réseaux, dans la mesure où elles sont souvent les premières à souffrir d'interruptions de service. Dans le cadre de ce projet, plusieurs mesures sont prises pour faire en sorte que les femmes reçoivent un maximum de bénéfices. Il est ainsi prévu de recruter du personnel féminin pour le service chargé du programme d'approvisionnement en eau et d'assainissement communautaire et de faire le nécessaire pour que les femmes prennent part, au niveau de la communauté, aux discussions concernant tous les aspects des systèmes d'approvisionnement en eau et d'assainissement. Il est également prévu d'inclure les problèmes d'égalité des 101 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement sexes dans l'ensemble des enquêtes initiales et des propositions de projets, ainsi que dans toutes les activités de formation pertinentes destinées aux hommes politiques, aux responsables communautaires, aux services chargés du programme d'approvisionnement en eau et d'assainissement, au personnel des organismes partenaires et aux membres des organisations communautaires. Parmi les organismes partenaires envisagés pour ce projet figure l'Association des guides de Sri Lanka, qui a mené beaucoup d'activités de développement communautaire et notamment la construction d'installations d'approvisionnement en eau et d'assainissement. Ses membres ont en effet mis en place des puits dans l'ensemble du pays avec la coopération de l'UNICEF, d'une ONG appelée « Decade Service » et de l'Agence canadienne de développement international. Source: Rapport d'évaluation, Sri Lanka, Projet d'approvisionnement en eau et d'assainissement communautaire, 16 novembre 1992. Egypte - Projet de gestion des ressources dans la région de Matrouh Ce projet a pour but de lancer un programme de gestion viable des ressources naturelles destiné à préserver les ressources en eau et en sols ainsi que la végétation de la région. Il est aussi destiné à lutter contre la pauvreté et à améliorer la qualité de la vie de la population bédouine locale en établissant, dans le cadre de l'organisation tribale traditionnelle, une structure qui puisse constituer un mécanisme efficace afin d'encourager cette communauté à prendre une part active à la gestion de ces ressources. Les femmes jouent un rôle économique important dans la zone du projet et participent pleinement à tous les aspects de la gestion des exploitations agricoles. Non seulement elles prennent une part active à l'élevage et aux activités agricoles et horticoles, mais elle participent également à des activités rémunératrices en dehors de l'agriculture, ainsi qu'à des travaux d'infrastructure (comme la construction de digues). Elles interviennent aussi dans la gestion communautaire traditionnelle par des voies bien établies. Etant donné le rôle essentiel que jouent les femmes dans la production agricole et la gestion de l'environnement, le projet collaborera étroitement avec les groupes communautaires afin de définir les besoins des femmes, d'assurer leur participation à la préparation et à l'exécution des plans de gestion des ressources locales, et d'identifier des activités rémunératrices pour les femmes. Il existe des mécanismes acceptables au regard des traditions pour amener les femmes à prendre part à la préparation et à l'exécution des projets, et ils seront intégrés aux structures du projet. L'une des premières activités consistera à assurer la formation du personnel du projet sur les questions d'égalité des sexes. Par ailleurs, une vulgarisatrice sera affectée à chacun des centres d'appui sous-régionaux pour assurer la liaison avec les femmes à l'échelon local. Ces vulgarisatrices s'occuperont des activités agricoles et non agricoles comme l'élevage de petits animaux, la culture des légumes, la récolte des olives et le séchage des figues. Leur travail sera coordonné par une vulgarisatrice basée au service de coordination du projet. Un centre d'information multimédias aidera par ailleurs à produire des documents audiovisuels adaptés aux besoins des femmes rurales. Enfin, le projet assurera l'octroi de crédits pour aider les femmes à entreprendre des activités rémunératrices. Source: Mémorandum et recommandations du Président de la Banque mondiale, Projet de gestion des ressources dans la région de Matrouh, 3 mai 1993. Mozambique - Projet de développement du secteur public et des institutions juridiques A l'heure actuelle, le Mozambique compte environ 90 juristes qualifiés pour une population de 16 millions d'habitants. Près d'un tiers de ces juristes sont des femmes. La faculté de droit de l'Université 102 Rapport intérimaire sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement Eduardo Mondlane estime que le pays aura besoin d'environ 1.200 diplômés d'ici l'an 2000 pour répondre aux besoins de l'administration publique et du secteur privé en matière de services juridiques. Une association des femmes pour le droit et le développement (MULEIDE) a été créée en tant qu'organisme privé afin d'apporter une aide aux femmes par le biais d'études, de services de conseil juridique et de cours d'instruction civique. En août 1992, elle a ouvert un bureau afin de dispenser des conseils juridiques aux femmes défavorisées. Le principal objectif de ce projet est d'accroître l'offre de personnel qualifié - planificateurs de haut niveau, analystes de politique économique, gestionnaires et techniciens - et d'améliorer les rémunérations et autres prestations et conditions d'emploi des fonctionnaires de rang supérieur. Il a spécifiquement pour but i) de mettre en place un groupe de juristes compétents, qui soient en mesure de concevoir et d'instaurer un cadre juridique et réglementaire perfectionné afin de servir de base à un système axé sur le marché, et d'établir un corps de juristes, de personnel para-légal, de magistrats et d'auxiliaires de justice pour assurer la bonne administration de la justice; et ii) d'appuyer les efforts entrepris par les autorités afin de renforcer la gestion du secteur public, que ce soit en réformant la fonction publique ou en assurant la formation des fonctionnaires. Le projet s'attachera particulièrement à favoriser l'avancement professionnel des femmes au sein de la fonction publique en prenant des mesures pour leur ouvrir davantage l'accès à la formation (sur place et à l'étranger). C'est ainsi que des allocations spéciales seront accordées aux femmes chargées de famille, afin de les aider à se procurer des aides familiales ou des services de garderie pendant leurs périodes d'études à l'étranger. Source: Mémorandum et recommandations du Président de la Banque mondiale, Renforcement des capacités Projet de développement du secteur public et des institutions juridiques, 29 octobre 1992. Ce rapport été redigé par Minh Chau Nguyen avec la collaboration de Diane E. Steele du Département d'éducation et politique sociale de la Banque mondiale. 103 COMMENT RENDRE PLUS EFFICACE L'AIDE FINANCIERE DESTINEE AUX REFORMES DE POLITIQUE ECONOMIQUE Tony Killick* Overseas Development Institute, Londres Mon exposé peut se résumer en quelques propositions : 1. Les orientations générales des programmes d'ajustement du FMI et de la Banque mondiale (appelés ci-après les IFI, institutions financières internationales) sont correctes en principe. 2. Mais il est assez douteux que ces programmes aient obtenu d'excellents résultats dans les pays à faible revenu (appelés ci- après les PFR). 3. Une des raisons en est que la conditionnalité ne s'est guère révélée capable d'améliorer la politique économique. 4. Les contraintes qui brident les IFI réduisent considérablement l'efficacité de leur conditionnalité. 5. En tout cas, les changements imposés de l'extérieur sont rarement fructueux; les meilleures réformes viennent de l'intérieur. 6. Il convient donc de réexaminer les liens entre les réformes de politique économique des PFR et les aides financières accordées à l'appui de ces réformes. Les orientations générales des IFI sont correctes en principe Les IFI ont raison de préconiser des mesures d'ajustement énergiques face aux turbulences de l'économie mondiale, à l'accélération des changements structurels et technologiques, aux répercussions souvent défavorables des interventions antérieures des pouvoirs publics dans l'économie sur les possibilités des gouvernements de satisfaire les aspirations matérielles de la population. Il est hors de doute que le l'ensemble des politiques économiques d'un pays exerce une influence décisive sur ses résultats économiques et qu'il importe donc que ces politiques soient correctes. Il y a une relation positive entre la croissance économique et la nature des mesures de réforme que comportent les programmes d'ajustement des IFI. * L'auteur a collaboré à deux importantes études consacrées aux politiques du FMI à l'égard des pays en développement. Observateur attentif des programmes d'ajustement structurel de la Banque mondiale, il est l'auteur d'un livre récent, rédigé à la demande de l'Institut de développement économique de la Banque, où il étudie la conception et l'articulation des politiques d'ajustement des pays à faible revenu. Les opinions exprimées dans cette note n'engagent que la responsabilité de son auteur. 105 Plus précisément, les IFI ont raison d'insister sur l'importance d'une gestion macroéconomique efficace, qui suppose une discipline budgétaire et monétaire; de recommander d'aller dans le sens des forces du marché au lieu de les contrer; de mettre en garde contre les effets souvent néfastes des interventions multiformes de l'État omniprésent. Les programmes d'ajustement des IFI tendent à remédier à ce genre de problèmes; on ne peut que les approuver. C'est pourquoi je suis d'accord avec l'orientation générale de leurs recommandations. Or, malheureusement : Il est assez douteux que les programmes d'ajustement des IFI aient donné d'excellents résultats dans les PFR. Il est très difficile d'évaluer convenablement l'impact d'un programme des IFI, ne serait-ce que parce qu'on ne peut que deviner ce qui se serait passé en l'absence de programme. Toutefois, on a accumulé suffisamment d'expérience et d'observations pour pouvoir avancer quelques conclusions plausibles. La première est qu'il ne faut pas se contenter de comparer les taux de croissance des pays qui ont une politique d'ajustement et ceux des pays qui n'en ont pas, comme le fait le "Issues Paper" conjoint du FMI et de la Banque mondiale. Il faut corriger les données pour tenir compte des différences entre les situations initiales, de l'influence des chocs extérieurs et autres, des effets bénéfiques qu'ont les concours financiers additionnels sur les pays qui s'ajustent. Ces corrections étant faites, il est de bonne règle de soumettre les différences que présentent encore les taux de croissance (ou tous autres indicateurs de résultats) aux tests classiques de signification statistique. Or, il apparaît que les résultats présentés dans le "Issues Paper" n'ont fait l'objet ni de corrections ni de tests; ils ne méritent donc pas d'être pris en considération. De toute façon, tout ce que fait valoir le "Issues Paper", c'est que les PFR menant une politique d'ajustement ont connu une croissance économique à peu près parallèle à l'expansion de leur population, leur revenu par habitant demeurant donc stationnaire. Les services du FMI et d'autres chercheurs ont, pour leur part, effectué des tests plus rigoureux. A quoi ont-ils abouti, dans le cas des PFR? a) Le taux de mortalité ou d'interruption des programmes est élevé. Pendant la période 1980-90, la moitié des programmes du FMI ont expiré en cours de route; pendant la période 1987-90, les deux tiers. Entre 1980 et 1988, pour les trois quarts des prêts à l'ajustement de la Banque mondiale, le décaissement de tranches du prêt a été retardé pour cause de non-respect d'une condition de politique économique; on n'a pas de chiffre analogue pour les années suivantes, mais on nous dit que les conditions ont été mieux remplies. 106 b) Les programmes améliorent la balance des paiements. Les observations concordent : les programmes du FMI et de la Banque mondiale améliorent les résultats à l'exportation et les autres indicateurs de la balance des paiements. Par contre, il est douteux qu'ils réduisent l'inflation. c) Les programmes n'influencent guère la croissance économique des PFR. Dans le cas du FMI, la plupart des tests ne font apparaître aucune corrélation significative entre les programmes et les variations de la croissance du PIB. S'agissant des programmes de la Banque mondiale, les résultats sont plus nuancés : certains tests ne font pas apparaître de relation, mais d'autres donnent des résultats plus positifs. Des données encore inédites relatives à l'Afrique indiquent qu'il y a à peu près autant de pays en cours d'ajustement où la croissance se ralentit que de pays où elle s'accélère. d) Les programmes vont de pair avec un recul de l'investissement. Cela est incontestable, tant pour les programmes du FMI que pour ceux de la Banque mondiale. Cela s'explique à la fois par la baisse du niveau de l'investissement public et par la mollesse avec laquelle le secteur privé réagit à l'amélioration du climat économique. e) Les résultats sont généralement moins favorables pour les PFR (ou les pays africains) que pour les pays à revenu intermédiaire. S'agissant du FMI, les résultats statistiques allant dans ce sens sont assez anciens et les tests plus récents ne sont pas concluants. Dans le cas de la Banque mondiale, la plupart des tests (mais pas tous) font apparaître des résultats moins favorables pour les PFR; il se pourrait cependant que le problème soit lié essentiellement à l'Afrique, et non à l'ensemble des PFR, d'où le titre donné à un document de travail de la Banque mondiale en 1992 : "Why structural adjustment has not succeeded in sub- Saharan Africali. En tout cas, l'expérience montre incontestablement que, dans les PFR, l'ajustement prend plus de temps qu'on l'avait pensé. Bien qu'il ne soit pas possible d'exposer ici toutes les observations faites, tant elles sont nombreuses et complexes, il apparaît que les programmes d'ajustement ne peuvent que modérément améliorer les résultats économiques des PFR. De ce fait, certains concours financiers consentis à l'appui de ces programmes n'ont eu qu'un faible rendement. Ces résultats assez médiocres sont imputables à plusieurs facteurs. Parfois, les instruments de politique économique disponibles étaient trop faibles au regard de l'ampleur des problèmes à surmonter. Des 1 "Pourquoi l'ajustement structurel n'a pas donné de résultats en Afrique subsaharienne". 107 variations inattendues des termes de l'échange, ou bien d'autres "chocs", ont aussi fait dérailler les programmes. Les IFI imputent souvent l'échec d'un programme au manque de volonté politique (je reviendrai sur ce point). Enfin, la conception même des programmes n'est pas toujours irréprochable. En particulier : Si les résultats ne sont pas toujours bons, c'est en partie parce que la conditionnalité ne s'est guère révélée capable d'améliorer la politique économique. C'est surtout par des réformes de la politique et de l'appareil économiques que les programmes d'ajustement cherchent à améliorer les résultats de l'économie. Or les faits montrent que les programmes n'ont guère de prise sur la politique économique. Les constatations, déjà résumées ci-dessus, auxquelles ont abouti les études empiriques sur les effets des programmes permettent aussi de mieux voir dans quelle mesure ceux-ci sont capables d'améliorer la politique économique. En résumé, les IFI étant considérées globalement i) les constatations ne permettent guère de conclure à une influence modératrice des programmes d'ajustement sur le crédit intérieur, principale cible des programmes du FMI. Les constatations, tant pour le FMI que pour la Banque mondiale, en ce qui concerne les effets des programmes sur les résultats budgétaires sont contrastées, mais il y a de nombreux dérapages dans l'application de la conditionnalité budgétaire; ii) en revanche, la conditionnalité des IFI exerce certainement une influence décisive et durable sur le taux de change. On observe aussi une très forte corrélation avec d'autres réformes concernant les prix : relèvement des prix agricoles à la production et déréglementation des prix à la consommation, par exemple; iii) les programmes d'ajustement ont beaucoup plus de mal à susciter des changements d'ordre institutionnel : réformes du secteur financier, par exemple, et privatisations d'entreprises publiques. Il est probable que même les constatations décrites ci-dessus, pour limitées qu'elles soient, surestiment encore l'influence des programmes car certains changements se seraient produits de toute façon - voir plus loin, à propos de la "propriété des programmes". De surcroît, bon nombre de réformes sont sans lendemain car certains gouvernements font volte-face, reviennent à leurs anciennes habitudes ou reprennent leurs interventions par la bande en les baptisant autrement. Par exemple, une étude inédite de la Banque mondiale indique qu'environ un pays africain sur trois "en cours d'ajustement" pratique encore une politique macroéconomique dont la médiocrité se combine à un interventionnisme envahissant, et que rares sont les pays africains qui ont persévéré dans la voie des réformes. Il est donc facile de surestimer l'influence qui peut être exercée au moyen de la conditionnalité. L'une des raisons en est que 108 Les contraintes qui brident les IFI réduisent considérablement l'efficacité de leur conditionnalité. Les IFI sont d'abord bridées par des problèmes de ressources. Le plus grave, semble-t-il, tient à L'INSUFFISANCE DES CONNAISSANCES. Aucun pays ne ressemble à un autre. Chacun a une économie qui se différencie des autres par ses caractéristiques structurelles et ses problèmes particuliers. Dans chaque cas, une complexe interaction se produit entre les politiques des pouvoirs publics et les autres variables économiques. Les programmes d'ajustement ne sont efficaces que s'ils sont taillés sur mesure et adaptés à ces particularités locales. Pour mettre au point un programme parfaitement conçu, il faut donc connaître à fond le pays auquel on le destine - en connaître davantage que ce qu'on peut raisonnablement exiger des services des IFI à Washington, qui travaillent toujours sous pression. Faute de connaissances suffisantes, les IFI risquent de s'enliser dans le conformisme qui menace toute institution et de s'en tenir à des prescriptions plus ou moins routinières. Les dirigeants du FMI comme ceux de la Banque mondiale dénient que ces institutions appliquent mécaniquement des formules toutes faites et protestent qu'au contraire, leurs services adaptent les programmes aux particularités de chaque pays. Mais il existe bel et bien un fossé, dont on se plaint souvent, entre les aspirations des dirigeants et ce qui se passe dans la réalité des faits, où les solutions ne sont jamais faciles. On bute forcément sur cette difficulté quand on veut utiliser la conditionnalité pour changer les choses. Le danger, évidemment, est que, au contact des réalités, certains programmes s'avèrent mal adaptés, voire complètement irréalistes, et qu'ils engendrent des "coûts d'ajustement" qui auraient pu être évités - autre sujet de fréquentes récriminations de la part des PFR. A l'insuffisance des connaissances vient s'ajouter L'INSUFFISANCE DU PERSONNEL : manque d'effectifs et roulement des agents (les compétences, elles, sont généralement au-dessus de toute critique). Le manque d'effectifs est particulièrement aigu au FMI : le nombre de ses programmes et leurs exigences en personnel ont beaucoup augmenté depuis quelques années (surtout depuis la création de la FAS et de la FASR, la mise en place, corrélative, du dispositif des documents-cadres de politique économique, et l'utilisation plus fréquente - et bienvenue - par le Fonds de missions de revue), alors que les organes dirigeants des IFI se sont opposés à un accroissement proportionnel du personnel cadre. Quant au roulement du personnel, ce ne sont pas tellement les départs d'agents des IFI qui posent problème (encore que, sous la pression des Conseils, les conditions d'emploi se soient quelque peu dégradées); ce sont surtout les mouvements à l'intérieur de chaque institution. Les responsables des pays en développement se plaignent souvent et vigoureusement des retards et autres coûts engendrés par la nécessité fréquente de mettre de nouveaux chefs de mission et autres envoyés au 109 courant des réalités locales. À ces inconvénients s'ajoute le manque de confiance en soi des nouveaux membres de la mission, qui vient aggraver leur insuffisance de connaissance précise des problèmes particuliers; tout cela risque de donner l'impression que, dans les négociations, les IFI sont intraitables et arrogantes. La troisième contrainte est celle des MOYENS FINANCIERS. Comme c'est un sujet trop vaste pour que je puisse le traiter ici, je me limiterai à trois observations. La première est que beaucoup trop de gens pensent que le "Vu et approuvé, bon pour financement" d'une IFI a nécessairement un puissant effet de catalyseur sur les autres concours financiers. Le FMI le prétend régulièrement, mais cela n'est pas confirmé par les faits. Les études économétriques n'ont fait apparaître aucune corrélation systématique entre les programmes du FMI et les apports de capitaux. Les observations sont très diverses. Dans certains cas, l'effet catalytique est évident. Mais dans d'autres, les fonds du FMI n'ont finalement servi qu'à alourdir le service de la dette extérieure. Il est probable que, dans la majorité des cas, les concours du FMI n'ont finalement guère eu d'effet net sur le compte des mouvements de capitaux (sans parler des reflux nets continus, des PFR vers le FMI, ces dernières années). Les programmes qui supposent un fort effet catalytique risquent donc de s'avérer irréalistes - les exemples ne manquent pas -, et d'engendrer des coûts d'ajustement inattendus pour finalement s'effondrer. Deuxième observation, d'ailleurs liée à la précédente : le "Issues Paper" risque de donner une impression trompeuse en projetant une image optimiste de deux aspects du financement officiel : a) il sera peut- être difficile d'atteindre les niveaux de dons et de prêts que suppose le tableau 2 de ce document, compte tenu de ce que certains appellent maintenant la "crise de l'aide", c'est-à-dire la pression que les difficultés budgétaires actuelles exercent sur les budgets d'aide dans les principaux pays donateurs; b) les observations de la Banque mondiale et de la CNUCED montrent que même le "dispositif renforcé de Toronto" pour l'allégement de la dette désormais disponible est loin de répondre aux besoins d'un grand nombre de PFR, de sorte qu'on peut lire dans la dernière édition des "Tableaux de la dette internationale" (page 41) : "Il faut donc nous demander s'il importe de prendre des mesures plus exhaustives ... Troisième observation : il subsiste une inadéquation entre, d'une part, les délais nécessaires à l'ajustement structurel des PFR et, d'autre part, l'horizon temporel des programmes du FMI et de la Banque mondiale. L'horizon envisagé par les programmes, surtout ceux du FMI, restent trop rapproché, une des grandes raisons en étant que les IFI ne peuvent disposer que d'un volume limité de financements concessionnels. Si l'on reconnaissait la nécessité de mettre en oeuvre des programmes à plus long terme, on verrait du même coup qu'il est nécessaire de disposer d'un volume plus important de moyens de financements concessionnels. 110 Deuxième problème : la rigueur. Les principaux actionnaires ou les dirigeants des IFI font pression pour que les mesures prévues paraissent rigoureuses et de grande envergure. À cela vient s'ajouter la tendance à la prolifération de la conditionnalité : le nombre d'actions préalables et de critères de réalisation appliqués par le FMI et la Banque mondiale augmentent notablemnent avec le temps et, souvent, cela implique des engagements tellement nombreux qu'il est impossible de les tenir tous. Ces facteurs ont plusieurs conséquences défavorables. Ils découragent les gouvernements de demander une aide (le taux de recours à la FASR s'en ressent beaucoup) ou bien ils les incitent à attendre d'avoir épuisé toutes les autres possibilités, de sorte que les programmes doivent trop souvent affronter des situations critiques. Ces facteurs mettent aussi à rude épreuve le potentiel d'action limité des PFR, ce qui conduit au "non-respect" des conditions et à des soupçons de mauvaise foi. Ou bien, quand à ces facteurs s'ajoute une pression continue sur les services des IFI pour qu'ils maintiennent constant le niveau des prêts à l'ajustement, on aboutit à des "programmes en papier", c'est-à-dire qu'on écrit noir sur blanc l'engagement de mettre en oeuvre un ambitieux programme de réformes dont les deux parties conviennent tacitement qu'il ne pourra pas être mis en oeuvre ou qu'il ne le sera pas. Les membres du Comité du développement apprendront peut-être avec quelque surprise, s'ils ne le savent déjà, qu'on se sert parfois de la conditionnalité comme d'un faux-semblant : on signe des accords dont les services des IFI savent pertinemment qu'ils sont impossibles à mettre en oeuvre mais qui ont pour but soit d'impressionner les dirigeants et les conseils et de continuer à "faire tourner l'argent", soit simplement de faire croire que les pays débiteurs sont traités équitablement. Dans un cas comme dans l'autre, le programme de réformes perd une partie de sa crédibilité, il a moins de chances d'influencer les anticipations et les décisions d'investissement, et il compromet les perspectives de voir les réformes futures provoquer des réactions positives. Tout cela contribue à expliquer pourquoi, comme on l'a vu, l'investissement privé a réagi avec faiblesse. Troisième et dernier problème : la contrainte de l'inégalité de traitement. Elle peut prendre deux formes. D'une part, il y a traitement inégal des pays emprunteurs quand - c'est le cas le plus fréquent - certains d'entre eux en particulier (les anciennes colonies, les alliés stratégiques) bénéficient en coulisse du soutien des principaux États bailleurs de fonds. Ce problème s'est posé avec une acuité particulière dans le cas du FMI, où il y a eu plusieurs cas démontrés, mais il affecte aussi la Banque mondiale de plus en plus, à mesure qu'elle lie davantage ses prêts à la politique économique des pays bénéficiaires. 111 D'autre part, le traitement est inégal quand il y a manque de symétrie entre pays en développement et pays développés : lorsque les premiers empruntent, on exige qu'ils acceptent que les IFI interviennent dans l'élaboration de leur politique économique jusqu'à un point que les pays de l'OCDE ne toléreraient pas un instant, eux qui ne tiennent souvent aucun compte des avis que le FMI leur donne dans le cadre de la "surveillance". Il convient de noter que cette asymétrie de traitement n'a rien à voir avec la position excédentaire ou déficitaire des pays voir les États-Unis. Qu'elle prenne l'une ou l'autre forme, l'inégalité de traitement ébranle la légitimité de la conditionnalité des IFI : les gouvernements confrontés à des exigences vraiment rigoureuses sont moins motivés à tenir leurs engagements, et les mesures prévues par les programmes perdent encore de leur crédibilité. Bref, l'action des IFI est faussée par un certain nombre d'insuffisances qui contribuent à limiter l'efficacité de leur conditionnalité dans les PFR. Mais ce n'est pas tout. Au-delà de ces insuffisances, je mets aussi en doute le bien-fondé de la conditionnalité en tant qu'instrument utilisé pour réformer les politiques économiques et les institutions, parce que : Les changements imposés de l'extérieur sont rarement fructueux; les réformes les plus efficaces viennent de l'intérieur. L'élément crucial ici, c'est ce que l'on appelle à la Banque mondiale la "propriété" des programmes, c'est-à-dire la mesure laquelle le gouvernement du pays intéressé considère comme sien le programme d'ajustement et s'estime moralement obligé de le mettre en oeuvre. Il est assez surprenant de constater le peu d'intérêt qu'on a accordé aux conclusions d'un rapport récent du Département de l'évaluation rétrospective des opérations (OED) de la Banque mondiale, où figurent des constatations substantielles et statistiquement très significatives qui, en démontrant l'importance de ce facteur psychologique, viennent confirmer ce qu'on pensait déjà plus ou moins intuitivement. On trouvera quelques précisions dans l'appendice à cette note. En résumé, le rapport montre que la mesure dans laquelle le facteur de "propriété" est présent permettait de prévoir le degré de réussite à attendre du programme d'ajustement dans les trois quarts des cas, les "déviations" les plus importantes s'expliquant par des chocs exogènes. La "propriété" était élevée dans la plupart des programmes ayant obtenu de bons résultats, faible dans la plupart des programmes stériles. Quand la "propriété" échappe au gouvernement, celui-ci esquive ses engagements et tire son épingle du jeu dès que l'occasion s'en présente. 112 Or, malheureusement, du fait même qu'elle est essentiellement coercitive*, la conditionnalité entame la "propriété". Comme elle est par nature imposée, elle peut donner lieu à du ressentiment chez les ministres et les hauts fonctionnaires qui doivent mettre en oeuvre les mesures - et en supporter les conséquences. À la limite, l'impression, dans l'opinion publique, que des mesures sont imposées au pays risque d'ébranler la légitimité des programmes et d'amplifier l'opposition aux réformes. (C'est pour cela que le jugement des IFI, lorsqu'elles se plaignent d"'un manque de volonté politique", peut être trop superficiel). Les porte-parole des IFI dénient que les programmes sont imposés, mais je prétends, quant à moi, qu'ils sont imposés plus fréquemment qu'ils veulent l'admettre. Cela est confirmé par le fait même (voir l'appendice) que les services de la Banque mondiale considèrent que la mesure dans laquelle le gouvernement s'estimait "propriétaire" du programme était "faible" ou "très faible" dans la moitié des cas (40/81) et "très forte" dans un cinquième seulement des programmes (16/81). Les programmes "maison" ont d'importants avantages. Du fait qu'ils sont enfantés par les mentalités et les institutions politiques et administratives nationales, ils reflètent plus fidèlement les objectifs et les priorités du pays et ils risquent moins d'être sabotés pendant leur mise en oeuvre. L'idéal, c'est que le programme emporte l'adhésion générale de la population grâce à une vaste campagne d'information et de consultation du public. Dans le cas de programmes plus controversés, le gouvernement saura réfléchir à la manière dont les coûts sociaux qu'ils comportent doivent être gérés et l'opposition politique qu'ils soulèvent doit être surmontée - une tâche pour laquelle les IFI ne sont pas bien placées. Par définition, les programmes "maison" sont parfaitement adaptés aux particularités locales et bénéficient du fait que leurs auteurs sont ceux qui ont la meilleure connaissance possible du terrain. L'engagement et la persévérance du gouvernement dans la voie des réformes seront d'autant plus durables que c'est lui-même qui les aura choisies. * Je sais qu'en qualifiant la conditionnalité de coercitive, je vais soulever des objections; mais je fonde ce point de vue sur le fait que la conditionnalité oblige un gouvernement à prendre des mesures qu'il n'aurait pas prises (sinon, elle ne servirait à rien) en le menaçant de lui retirer l'aide financière s'il ne les prend pas. Ce n'est pas la même chose que de dire que les rapports entre les IFI et les gouvernements sont autoritaires; cela n'est le cas qu'exceptionnellement. 113 Il convient de réexaminer les liens entre les réformes de politique économique des PFR et les aides financières accordées à l'appui de ces réformes. Les IFI et leurs principaux actionnaires devraient plus largement reconnaître que la conditionnalité n'a que des possibilités limitées quand on l'utilise pour faire dépendre l'aide financière des résultats de la politique d'ajustement. Il vaudrait mieux s'efforcer de persuader les gouvernements d'aller plus loin dans la voie de ce que M. Camdessus, Directeur général du FMI, appelle "la révolution silencieuse" des attitudes à l'égard de la gestion économique. Les IFI devraient refuser de jouer à "la conditionnalité de papier"; il vaudrait mieux évaluer les actions de leurs agents en fonction de la qualité - et non du volume - des prêts qu'elles accordent. Cela implique, bien sûr, que les IFI devraient accepter de dire "Non" plus souvent aux gouvernements qui ne s'engagent que du bout des lèvres à procéder à des réformes et qu'elles devraient insister pour que ce soient les gouvernements emprunteurs qui élaborent leurs propres programmes. À tout le moins, les gouvernements devraient accepter de rédiger eux-mêmes leurs lettres d'intention et les grandes lignes de leur politique de développement; ces documents ne devraient en aucun cas être écrits à Washington, par les services des IFI. Il devrait en étre de même pour les documents-cadres de politique économique (DCPE), encore qu'à cet égard on ait davantage progressé dans la bonne direction. Ces propositions signifient notamment que 1. Une redistribution des ressources financières est fort probable, avec pour effet, d'une part, de réduire celles dont bénéficient les pays qui reculent devant l'exigence d'ajustement et les pays qui constituent la clientèle d'autres États et, d'autre part, d'accroltre celles allant aux pays qui ajustent résolument leur économie. L'efficacité globale de l'aide financière ne pourra qu'y gagner. 2. Il importe de ne pas confondre le refus de l'ajustement avec l'insuffisance de moyens techniques dont souffrent certains PFR. Il faudrait que ces derniers puissent accéder plus facilement à l'assistance technique dont ils ont besoin pour développer leur potentiel. Toutefois, il faudrait aussi que cette assistance technique soit indépendante des IFI, pour éliminer le plus possible les conflits d'intérêt; et elle ne devrait jamais être imposée, car les conseillers techniques qu'on impose ne sont pas plus efficaces que les réformes qu'on impose. 3. L'accent mis sur des programmes de réformes "maison" exigera des IFI qu'elles évaluent de manière plus pragmatique et dans un esprit plus ouvert les programmes qu'on leur soumettra. À titre d'exemple, on peut citer le fait que la Banque mondiale accepte plus volontiers de donner son aval à des programmes du genre de ceux qui mettent en jeu le Japon, la Corée et Taiwan. 114 4. Pour que le choix des pays bénéficiaires soit plus sélectif, il faudra que les principaux pays actionnaires des IFI manoeuvrent moins en coulisse pour favoriser les pays demandeurs auxquels ils s'intéressent tout particulièrement. Il faut espérer que la fin de la guerre froide facilitera une modération à cet égard. Août 1993 115 APPENDICE Le tableau suivant est tiré du rapport du Département de l'évaluation rétrospective des opérations (OED) de la Banque mondiale intitulé World Bank Structural and Sectoral Adjustment Operations: The Second OED Overview (juin 1992, chapitre 10 et annexe 8). La mesure dans laquelle les pays sont "propriétaires" (ownership) des programmes y a été évaluée en fonction des critères suivants : initiative, locale ou extérieure, des mesures inscrites au programme; conviction plus ou moins forte que ces mesures sont bien adaptées aux besoin; importance du soutien accordé au programme par les instances politiques suprêmes; enfin, vigueur des efforts tendant à obtenir l'adhésion de l'opinion publique au programme. Un test de corrélation entre cette variable et le degré de réussite du programme, tel qu'apprécié par la Banque, a ensuite été effectué. Le tableau récapitule les résultats de cette évaluation. Plusieurs tests statistiques ont confirmé la signification de la corrélation obtenue. Bien entendu, corrélation ne veut pas dire causalité; l'OED n'a fait aucun test de causalité. Toutefois, étant donné la structure des tests, on ne voit pas très bien comment le lien de causalité aurait pu jouer dans le sens allant de l'efficacité vers la propriété; l'OED a estimé que les résultats indiquaient que l'efficacité des programmes était une conséquence du fait que les pays emprunteurs s'estimaient propriétaires du programme. De fait, le degré de "propriété" s'est révelé avoir une forte valeur prédicative du succès des programmes dans 73 % des cas, les "déviations" les plus importantes s'expliquant apparemment par l'intervention de chocs exogènes. L'évaluation a fait apparaitre que c'est probablement le soutien - ou le manque d'opposition - des principaux groupes d'intérêt qui a exercé la plus grande influence. Corrélation entre les résultats des programmes et la mesure dans laquelle les pays emprunteurs s'estiment propriétaires des programmes Nombre de programmes dont les résultats sont Propriété Très Peu Très peu Nombre satis- Satisfai- satisfai- satisfai- total des faisants sants sants sants programmes Très forte 9 6 O 1 16 Forte 6 15 2 2 25 Faible 4 10 6 3 23 Très faible O 3 7 7 17 Totaux 19 34 15 13 81 116 LA REFORME DES SYSTEMES DE SECURITE SOCIALE ET DES PROGRAMMES DE PROTECTION SOCIALE DANS LES PAYS EN DEVELOPPEMENT Gary S. Fields et Olivia S. Mitchell 1. Introduction Partout dans le monde, les pays en développement, et organismes d'aide au développement qui les conseillent, s'inquiètent de plus en plus du coût des systèmes de sécurité sociale et des programmes visant à mettre en place un filet de protection sociale, et des inefficacités qu'entraînent le fonctionnement de ces programmes. Ensemble, les programmes de sécurité sociale et de protection sociale peuvent être considérés comme des "programmes de protection économique". Dans cette note, nous identifierons les principaux facteurs d'incertitudes économiques que les populations des pays en développement doivent prendre en ligne de compte, nous montrerons comment les programmes de sécurité sociale et de protection sociale répondent (ou ne répondent pas) à ces risques et nous esquisserons quelques réformes prioritaires qui nous paraissent essentielles pour que ces programmes permettent de relever les défis des années 90 et au-delà. Enfin, nous recensons diverses mesures qui pourraient utilement être prises par les organes internationaux pour améliorer considérablement l'environnement dans lequel ces réformes sont exécutées. 2. Les incertitudes économiques dans les pays en développement L'incertitude économique est constante partout. Les principales causes sont les mêmes dans tous les pays: * l'incapacité des individus à se procurer les ressources dont ils ont besoin du fait du chômage ou du sous-emploi, d'une rémunération insuffisante et irrégulière, d'une infirmité ou d'un décès; * les changements familiaux (divorces, naissances, migrations); * les chocs industriels (baisse du prix des biens échangés, perte de marchés, changements soudains dans l'appropriation et la structure du capital des entreprises); * les événements régionaux ou nationaux (inflation, faillites bancaires, catastrophes naturelles, crises politiques); * enfin, les événements internationaux (récession mondiale). Toutes ces sources d'incertitude économique ont ceci en commun qu'elles infligent un préjudice économique à tout ou partie de la population. Il arrive dans certains cas que ces causes d'incertitude soient tellement anciennes qu'elles entralnent un grave déficit de consommation pendant une période prolongée. 117 Gary S. Fields et Olivia S. Mitchell Il est bien connu que certains des facteurs d'incertitude économique qu'on vient de citer peuvent être évités pour peu que les individus aient la possibilité de contracter des assurances privées. A titre d'illustration, les salariés des pays développés où il existe un marché privé dynamique de l'assurance souscrivent des assurances privées pour se prémunir contre les conséquences d'un décès prématuré et de la perte de revenu qui en résulte pour leur famille. De même, beaucoup d'entreprises privées des Etats membres de l'OCDE offrent à leurs salariés un régime d'entreprise couvrant l'invalidité et la vieillesse, de telle sorte que ceux-ci peuvent assurer leurs revenus en bénéficiant des tarifs attrayants des assurances de groupe. Dans de nombreux pays, la famille joue aussi un rôle: partout en Afrique et en Asie, il est d'usage que les enfants aident leurs parents âgés, fournissant une autre sorte d'assurance privée pour les personnes âgées. En général, l'assurance privée fonctionne mieux lorsqu'il existe des données d'informations fiables sur les pertes et risques potentiels (statistiques de mortalité par exemple, des liens solides et durables entre les individus (familles, clans, groupes professionnels) et des groupes suffisamment importants pour répartir les risques. Souvent, les assurances privées protègent bien les nantis parce qu'ils sont capables de payer directement leur assurance et qu'ils sont en mesure de se couvrir indirectement en renonçant à une partie de leur salaire ou grâce à d'autres transferts lorsque la protection sociale est assurée par l'employeur ou par la famille. A l'inverse, les personnes qui ont des maladies chroniques ou un revenu modeste n'ont en général pas les moyens de payer, ou même d'obtenir, une assurance privée. Ce problème est particulièrement aigu dans les pays où les organismes d'assurance sont rares. C'est pourquoi il faut parfois prévoir des programmes sociaux pour garantir la sécurité économique dans les cas où le marché des assurances privées est jugé inadéquat. 3. Comment les programmes de sécurité économique fonctionnent-ils en pratique? Les programmes publics de sécurité économique qui existent de par le monde diffèrent selon qu'ils mettent l'accent sur une logique d'assistance sociale ou au contraire d'assurance sociale, selon les moyens financiers du pays considéré et les pressions économiques et politiques qui font pencher la balance dans un sens ou dans l'autre. De plus, le type de couverture varie à l'intérieur d'un même pays. Par exemple, de nombreuses républiques issues de l'ex-Union Soviétique offrent une retraite confortable à certains groupes clés tels que les militaires, les fonctionnaires et les mineurs, les retraités n'appartenant pas à ces catégories n'ayant droit à rien ou presque. A l'opposé, la sécurité sociale australienne, qui est financée par l'Etat, réserve le bénéfice de son régime d'assurance vieillesse aux plus démunis mais fournit une couverture maladie à tous sans distinction de revenu. Dans une certaine mesure, le schéma redistributif dépend de la décision de l'Etat de gérer lui-même le système de sécurité sociale ou de s'en remettre à un sous-traitant. Ainsi, au Chili, le régime national d'assurance vieillesse confie à des gestionnaires de fonds privés les cotisations des travailleurs de telle manière que les placements réalisés au moyen de ces capitaux assurent un revenu de remplacement aussi élevé que possible à l'issue de la cessation d'activité. Nonobstant ces différences, les systèmes conçus pour fournir une protection économique ont ceci en commun qu'ils sont institués pour le long terme et qu'ils font partie du contrat social entre les générations. Cette caractéristique les distingue des programmes de protection sociale, au moins sur le plan conceptuel, parce que les seconds sont ordinairement considérés comme des 118 Gary S. Fields et Olivia S. Mitchell dispositifs transitoires destinés à atténuer les principaux effets néfastes des réformes économiques sur les groupes vulnérables" (Document de synthèse conjoint - 8/2/1993). Les programmes qui répondent à ce critère sont variés. On considère généralement qu'ils comprennent les transferts ciblés de nourriture, d'argent ou d'autres services et parfois des emplois publics. C'est justement parce qu'ils sont conçus comme des mesures provisoires que les programmes de protection sociale sont souvent mis sur pied à la hâte et qu'on ne se préoccupe guère de leur impact à long terme sur le comportement du marché du travail, ni de leur incidence budgétaire à un horizon éloigné. Dans les années 80 par exemple, beaucoup de pays européens offraient des allocations complémentaires aux travailleurs âgés en surnombre, ce qui leur permettait de rester au chômage jusqu'au moment où ils pouvaient prendre une retraite anticipée. Mais une fois en place, ces systèmes ont bénéficié d'un soutien politique et ont été regardés comme un droit acquis de sorte que la réforme ou la suppression de ces subventions devenait très difficile. Un autre inconvénient lié à ces dispositifs est qu'ils influent à la longue sur les comportements, comme on a pu s'en rendre compte lorsque les systèmes d'indemnisation du chômage ont poussé les ayants-droit à réclamer plus tôt que prévu des prestations plus onéreuses au régime national d'assurance vieillesse. Les systèmes de sécurité sociale et de protection sociale comportent beaucoup d'avantages. En l'absence d'un système national et obligatoire, l'Etat ne pourrait effectuer des transferts sociaux au profit de catégories que le reste de la population ne prendrait pas spontanément en charge. Seule la puissance publique dispose du pouvoir de taxation nécessaire pour répartir le risque de variabilité des revenus entre les générations. Ainsi, dans beaucoup de pays développés, la sécurité sociale a été instituée durant la dépression mondiale des années 30, afin de prélever des revenus sur les salariés en activité au profit de la malheureuse génération qui arrivait à l'âge de la retraite complètement démunie; mais ces programmes ont aussi de nombreux inconvénients, notamment leur coût élevé, le caractère inéquitable des prestations et souvent, des effets négatifs sur le marché du travail et d'autres marchés. Trop souvent, les prestations sont considérées comme un dû plutôt que comme une assurance, d'où des atteintes inconciliables entre les diverses parties prenantes, qui les amènent à des conclusions diamétralement opposées. Par exemple, si l'on se place dans la perspective de l'assurance, les fonctionnaires des pays de l'Est dont l'emploi est supprimé n'ont pas droit aux allocations chômage s'ils n'ont pas cotisé au préalable à un régime ad hoc; mais si l'on considère ces allocations comme un droit, ils pourraient éventuellement en bénéficier si leur emploi est supprimé. On trouvera ci-après un exposé détaillé des réformes prioritaires. Auparavant, il est toutefois important de reconnaître qu'on ne peut pas couvrir toutes les incertitudes économiques, ni sur le marché privé, ni par les régimes nationaux de sécurité sociale ou les filets de protection mis en place par l'Etat. L'effondrement des institutions politiques et économiques (en temps de guerre par exemple, ou en cas de troubles politiques ou d'hyperinflation) peut entraîner une diminution importante de la consommation de nombreux segments de la population. Dans ce cas, des institutions plus diversifiées à caractère plus général permettraient d'opérer certains transferts sociaux et de fournir la protection sociale nécessaire pour atténuer l'incertitude économique. 119 Gary S. Fields et Olivia S. Mitchell 4. Problèmes liés à la conception des programmes de protection économique On attend des systèmes de la sécurité sociale et des programmes de protection sociale qu'ils remédient à des problèmes très divers. Nous pensons que les systèmes de protection économique ont une seule fonction essentielle: assurer un niveau de consommation adéquat. Par conséquent, les objectifs de la réforme énoncés dans le Document de synthèse conjoint sont parfaitement cohérents avec cette préoccupation: "a) minimiser les distorsions dans l'allocation des ressources et contribuer à la stabilité macroéconomique en réduisant les déséquilibres fiscaux, et b) promouvoir l'équité, tant entre les générations qu'entre les différents groupes de revenu, de manière à assurer au moindre coût la meilleure protection possible contre les risques liés au cycle de vie et le chômage" (Document de synthèse conjoint). Pour cela, des décisions très importantes doivent être prises au sujet des normes d'adéquation à retenir, du contenu des programmes à élaborer pour chaque groupe-cible et de la répartition des ressources budgétaires entre les différents programmes. Nous traiterons tour à tour ces différents points. Fixer des normes d'adéquation: Même si le système de protection économique vise à garantir un niveau de consommation adéquat, il reste à déterminer les critères au regard desquels ce niveau sera jugé adéquat en pratique. On peut opter pour un critère de niveau absolu, comme dans le cas d'un seuil national de pauvreté, qui est le niveau en dessous duquel un individu ou une famille vivant dans un pays donné est considéré comme pauvre. On peut tout aussi bien fixer un critère relatif selon lequel l'adéquation sera déterminée par référence au niveau de consommation observé avant l'événement qui est la cause de l'incertitude économique (retraite, chômage, etc...). Comme on le verra ci-après, le choix du critère n'est pas indifférent. Décider qui sera assuré: Il faut déterminer avec soin le groupe-cible. A cet égard, il faudrait distinguer trois groupes: les pauvres, les groupes vulnérables et les perdants. Certains analystes associent les « pauvres et les groupes vulnérables » comme s'il s'agissait d'une population homogène ayant les mêmes besoins en matière de protection économique. Dans bien des cas, ils ont tort : certains pauvres ont un revenu assuré, mais il est très bas. A l'inverse, certains individus peuvent être vulnérables tout en étant nantis, parce que leur revenu est variable. Comme certains pauvres, mais pas tous, sont vulnérables, et comme une partie, mais non la totalité, des personnes vulnérables est pauvre, les décideurs doivent déterminer à qui s'adressent les programmes de protection économique. Quant aux perdants, parmi ceux qui sont le plus fortement pénalisés, il y a ceux qui se trouvent dans la meilleure situation au départ et qui, de ce fait, ont le plus à perdre. Après avoir établi une distinction claire entre ces catégories, le pays doit décider à qui s'adresse le programme de protection économique : les pauvres, ceux qui sont vulnérables ou les perdants? Pour qu'un programme soit bien conçu, il est indispensable de déterminer qui fait partie du groupe ciblé et qui n'en fait pas partie. Concevoir des programmes appropriés : Une fois qu'il a décidé de retenir une norme d'adéquation absolue ou relative et qu'il a défini les bénéficiaires (les pauvres, les groupes vulnérables ou les perdants), un pays dispose des éléments nécessaires pour élaborer le programme de protection économique. Supposons qu'un pays veuille fournir une protection économique minimum aux pauvres. Il peut le faire en effectuant, au profit de ceux dont la consommation est inférieure au seuil mimimum (c'est-à-dire ceux dont les revenus sont 120 Gary S. Fields et Olivia S. Mitchell insuffisants au regard d'une norme fixée par référence à un niveau absolu), des transferts monétaires ou des prestations en nature. Cette démarche, fondée sur des transferts déterminés en fonction des besoins afin d'atténuer la pauvreté, est habituellement qualifiée « d'assistance sociale ». Elle combine une aide alimentaire, des prestations sociales en espèces et/ou des subventions au logement. Si le pays vise à instaurer un système permettant de protéger les personnes vulnérables, son approche doit être très différente. Par exemple, les riches aussi bien que les pauvres sont confrontés au risque économique de vivre au-delà de leur période d'activité et donc d'avoir à recourir au programme de protection économique mis en place à l'intention des personnes âgées. Toutes les couches de la société sont exposées à ce risque et on peut concevoir un système de pensions de retraite pour y faire face. Comme en général les bénéficiaires de ce genre de système ne sont pas pauvres, il s'agit plus d'un programme d'assurance que d'un programme de lutte contre la pauvreté. Si le marché de l'assurance privée est inexistant ou incomplet, un système public peut contribuer à remédier aux défaillances du marché. Les plans destinés à dédommager les perdants répondent parfois à des considérations politiques plutôt qu'à des impératifs économiques. Dans les pays en développement de tous les continents, les agents des organes gouvernementaux et des entreprises parapubliques sont très bien payés par rapport aux autres salariés à niveau de qualifications égal. Or, dans beaucoup de ces pays, on réduit les effectifs de la fonction publique. Lorsqu'un programme de réforme économique implique des réductions d'emplois, ceux qui travaillent dans le secteur public et qui perdent leur emploi subissent une perte très réelle parce que les salaires offerts ailleurs sont moins élevés. Les arbitrages budgétaires: La Banque et le Fonds, à l'instar des autres organismes d'aide au développement, ont consacré beaucoup de temps et d'argent à la mise en place de programmes destinés à compenser les préjudices subis par les perdants. Ces programmes se justifient souvent comme le prix à payer pour que les pays aidés entreprennent les réformes souhaitables. Encore faut-il déterminer comment répartir des ressources budgétaires rares entre les pauvres, les groupes vulnérables et les perdants. Mais, à l'heure actuelle, personne ne saurait dire comment les dépenses de protection économique sont réparties entre ces groupes. Il faut aussi toujours garder à l'esprit que la sécurité sociale et les filets de protection exigent un transfert de ressources réelles et que les contraintes budgétaires imposent fréquemment des arbitrages délicats entre la protection économique et les autres programmes, ainsi qu'entre les divers programmes de protection économique. 5. Calendrier des réformes Les propositions qui suivent ont pour but de guider les débats sur les choix d'orientation. PROPOSITION 1: le choix des prestations à offrir doit être effectué en même temps que celui de leur mode de financement. Les pouvoirs publics ne doivent ni promettre ni instituer des prestations que le pays n'a pas les moyens de financer, ni aujourd'hui, ni à l'avenir. 121 Gary S. Fields et Olivia S. Mitchell PROPOSITION 2: il ne faut pas confondre les pauvres, les groupes vulnérables et les perdants. Des dispositifs distincts doivent être prévus pour assurer la protection économique de chacun de ces groupes. Les programmes d'assurance sociale et les systèmes d'assistance sociale doivent être gérés séparément quoique de manière coordonnée. Les programmes d'assistance sociale, qui s'adressent aux indigents, ne doivent pas être confondus avec les prestations à caractère universel. PROPOSITION 3 : les systèmes public et privé comportent chacun des avantages et des inconvénients. La plupart des pays font appel aux deux. L'équilibre idéal est fonction des objectifs du pays concerné, de ses compétences dans le domaine de la gestion efficiente du développement et de sa volonté d'y parvenir, de la capacité financière du pays et de l'existence des institutions privées nécessaires. PROPOSITION 4 : les décideurs doivent reconnaître que l'objectif essentiel des programmes publics de protection économique est de permettre aux pauvres de maintenir un niveau de consommation adéquat défini par rapport à un critère absolu tel que le seuil de pauvreté déterminé à l'échelle nationale. Comme les pauvres n'ont pas les moyens de financer eux-mêmes ces programmes, d'autres doivent le faire à leur place (si les pauvres pouvaient payer, les programmes seraient inutiles). Souvent, l'efficience commande que les prestations au titre de l'assistance sociale soient ciblées de telle manière que, dans toute la mesure du possible, elles soient réservées aux pauvres, à l'exclusion de tout autre groupe. PROPOSITION 5 : les programmes de sécurité économique ont aussi pour but de fournir une assurance contre des événements de nature à entraîner une diminution du revenu, comme la vieillesse, l'invalidité et le chômage. Ces programmes doivent être considérés comme une assurance en cas de diminution excessive de la consommation et être financés à l'avance par les assurés eux-mêmes. Les primes d'assurance doivent être fixées à un niveau suffisant pour garantir la solidité financière de ces programmes dans le respect des principes d'assurance. L'Etat peut faciliter le développement de groupes d'assurance privés pour couvrir des risques diversifiables. PROPOSITION 6: il est à craindre que, si des programmes d'assurance volontaire sont mis sur pied, les individus n'aient pas la discipline nécessaire pour veiller à leurs intérêts bien compris à long terme. Pour éviter le risque d'insuffisance de couverture qui amènerait les assurés à solliciter les programmes financés sur fonds publics lorsqu'ils sont victimes de difficultés économiques, l'Etat devrait rendre ce type d'assurance obligatoire. Les conditions prévalant dans chaque pays détermineront si l'organisation du système doit être assurée par l'Etat ou s'il doit en confier la gestion à des organismes privés. PROPOSMON 7 : certains filets de protection sociale ne sont destinés ni aux pauvres ni aux groupes vulnérables, mais aux perdants. C'est ainsi que dans certains pays, des groupes puissants ont exigé et obtenu, des allocations chômage en contrepartie de leur consentement aux réformes économiques et à l'ajustement structurel. Ces groupes ne sont généralement pas les plus démunis. Les gouvernements et les organismes internationaux doivent résister à la tentation de recourir à ces programmes pour s'assurer un appui politique, car ils peuvent se révéler fort coûteux et difficiles à supprimer, sans oublier que les concessions obtenues par les uns peuvent inciter les autres à en demander autant. 122 Gary S. Fields et Olivia S. Mitchell 6. Le rôle des institutions internationales d'aide au développement A mesure que les pays en développement entreprendront de mettre au point et de réformer leurs systèmes de protection économique dans le contexte plus large des mesures prises pour rendre leurs économies plus productives, chacun adaptera son programme en fonction de ses capacités institutionnelles et de ses priorités. Cependant, les organisations internationales d'aide au développement peuvent faciliter le processus de différentes manières. La mission la plus importante peut-être qui incombe au Fonds, à la Banque et aux autres agences internationales est de fournir l'assistance technique aux administrations des pays en développement chargées des programmes de protection économique. La structure des prestations et du financement des systèmes de sécurité sociale et des dispositifs de protection sociale influe sur l'économie par le biais du marché du travail, du marché des capitaux et d'autres composantes telles que le marché de l'assurance. Ces effets sont souvent prévisibles (ainsi, les prélèvements sur les salaires découragent l'emploi dans les secteurs assujettis et les pensions généreuses incitent les salariés à prendre une retraite précoce) et les experts de l'extérieur peuvent aider les responsables des pays en développement à tenir compte de ces éléments. Ces techniciens peuvent aussi aider à élaborer les réformes nécessaires en s'inspirant des enseignements tirés de l'expérience des autres pays. Par exemple, ils pourraient attirer l'attention sur la charge lourde et durable qu'implique pour la collectivité la décision des gouvernements chilien et américain de garantir les pensions de retraite servies par les organismes privés. Tous les pays en développement ont également besoin d'un système standardisé de notification et d'information sur les prestations de l'assurance sociale et de l'assistance sociale et leur financement. Les organismes internationaux peuvent élaborer et mettre en place des normes internationales pour l'audit de ces systèmes. Ils peuvent aussi fournir des moyens techniques plus sophistiqués dans plusieurs domaines tels que l'évaluation de la structure des prestations (par exemple, calculer pour des régimes précis, la valeur actuarielle des cotisations), les systèmes de financement (les taux de cotisation à prévoir pour servir des prestations d'un niveau donné), et enfin les pratiques de gestion de la trésorerie et de tenue des registres. Les organismes internationaux peuvent aussi aider à mettre en place une entité chargée de suivre la réglementation des assurances privées et des marchés de capitaux de manière à alléger la tâche du secteur public des pays en développement. Une structure administrative internationale analogue à la Commission américaine des opérations de bourse (Securities and Exchange Commission) pourrait surveiller et réglementer la qualité et les conditions des investissements dans les pays en développement; il faut de même un organisme similaire pour réglementer et contrôler les normes et pratiques internationales dans le domaine des assurances. Ces organismes pourraient faciliter et surveiller l'implantation et la croissance de banques et sociétés d'investissement, et superviser le développement des nouvelles compagnies d'assurances. Enfin, les régimes de sécurité sociale préfinancés requièrent un instrument de placement, mais peu de pays en développement ont un marché des capitaux suffisamment structuré pour rendre crédible la matérialisation future des prestations promises. Le problème prend un relief particulier en période de forte inflation. Nous proposons que les institutions financières internationales considèrent les moyens propres à faciliter l'accès à un portefeuille d'obligations émises par les pays développés, à un mécanisme garantissant des taux d'intérêt réels positifs et à 123 Gary S. Fields et Olivia S. Mitchell d'autres possibilités d'investissement plus rentables. Ces mesures permettraient d'améliorer grandement l'environnement des systèmes de protection économique dans les pays en développement. 124 REUNION DU COMITE DU DEVELOPPEMENT DU FONDS MONETAIRE INTERNATIONAL ET DE LA BANQUE MONDIALE Sécurité sociale et filets de sécurité sociale dans les pays en développement Note sur les méthodes d'approche et les activités du Bureau international du travail Colin Gillion Département de la sécurité sociale, OIT La note ci-après expose de façon succincte la méthode d'approche du Bureau international du travail pour les questions qui touchent la conception et la réforme des systèmes et des filets de sécurité sociale dans les pays en développement 1. Il convient de souligner que, si cette note décrit la manière de voir et les activités du Bureau, elle n'engage en rien les organes officiels de l'Organisation internationale du travail elle-même, pas plus qu'elle ne reflète nécessairement leurs points de vue. Elle est succincte, mais certains de ces thèmes ont déjà été traités dans diverses publications et documents internes récents dont elle s'inspire en grande Fartie. Plusieurs de ces études seront mises à la disposition des participants à la réunion du Comité 1. Questions générales Presque tous les pays sont maintenant dotés d'un système de sécurité sociale institutionnalisé sous une forme ou une autre. Mais les risques pris en charge et la population couverte, le niveau des prestations et l'efficacité des régimes varient énormément d'un groupe de pays à l'autre, d'une région à l'autre et d'un pays à l'autre. Les pays qui sont en train de passer d'une économie planifiée à une économie de marché, c'est-à- dire, pour l'essentiel, les pays de l'Europe de l'Est et de l'Europe centrale, forment un groupe distinct qui n'est pas pris en considération dans cette note. Bien qu'ils aient également grand besoin de réformer leurs systèmes de sécurité sociale et de protection sociale, ces pays ont des caractéristiques très différentes de celles de la plupart des pays en développement, notamment pour ce qui est des moyens administratifs, du caractère universel des prestations fournies, et de la structure de leur marché du travail. De ce fait, la problématique générale, les stratégies d'action et les mesures de réforme possibles sont aussi différentes. 2. En particulier: Assurances sociales et protection sociale, Rapport du Directeur général (Partie 1) à la quatre-vingtième Conférence internationale du travail, Genève, juin 1993; La sécurité sociale et la restructuration économique, Rapport du Directeur général (Partie II) à la treizième conférence des Etats américains, Caracas, octobre 1992; Les soins de santé et les pensions dans les pays en développement: les fondements d'une stratégie, articles de Gillion, Otting, Cichon et Iyer publiés dans la Revue internationale du travail, Vol. 132, No 2, 1993; Protection sociale. les filets de sécurité et l'ajustement structurel (novembre 1991) et Protection sociale et filets de sécurité (novembre 1992), documents préparés pour la Commission de l'emploi du Conseil d'administration. 125 Colin Gillion Les systèmes de sécurité sociale des pays en développement sont relativement récents. Un certain nombre de régimes ont été créés dans certains pays d'Amérique latine dans les années 20 et 30, mais c'est seulement à la fin de l'époque coloniale, dans les années 40, 50 et même 60, que des systèmes de sécurité sociale ont été institués dans la plupart des pays en développement. Si les pays développés ont obtenu des résultats probants 3, les systèmes de sécurité sociale des pays en développement sont déficients sur un certain nombre de points importants, même après plusieurs décennies d'existence. Ces déficiences, qui reflètent en partie des problèmes liés à la structure des économies nationales, sont souvent aggravées par la faiblesse chronique des moyens administratifs et financiers des pays concernés. Mais elles reflètent aussi les difficultés et les crises auxquelles les pays en développement sont confrontés depuis une dizaine d'années ainsi que les problèmes liés aux programmes d'ajustement structurel. Par contre, les bouleversements économiques et sociaux ont entraîné une augmentation de la demande de programmes efficaces de protection sociale. Devant le contraste qui existe entre ce qui est offert et ce qui est souhaité, de plus en plus nombreux sont ceux qui critiquent la conception, le fonctionnement et le bien-fondé des systèmes en place, et les gouvernements et les partenaires sociaux se montrent plus disposés à envisager d'importantes réformes, voire, dans certains cas, la refonte totale du cadre de la protection sociale. Mais, lorsqu'il s'agit d'entreprendre des réformes, les pays en développement se heurtent à trois contraintes majeures, qui n'existent pas ou qui sont bien moins sensibles dans les pays développés. L'un des problèmes les plus importants tient à la proportion de la main-d'oeuvre employée dans le secteur formel ou moderne de l'économie, où il est possible d'identifier les employés et les employeurs, de suivre le niveau des rémunérations, de recouvrer les cotisations et les impôts et d'établir les droits à prestation. Cette proportion peut être très faible dans les pays en développement. Elle est inférieure à 10 % dans la région Afrique, plus élevée dans d'autres régions. Les pays en développement, dans leur ensemble, sont toutefois confrontés à un simple problème arithmétique: ils ne possèdent ni le cadre de base nécessaire à la mise en place d'un dispositif de compensation automatique entre les cotisants et les bénéficiaires, ni une base de recettes fiscales générales suffisante pour étendre les prestations à l'ensemble de la population. Le plus préoccupant, c'est que, depuis une dizaine d'années, le secteur moderne se rétrécit sous l'effet des pressions induites par un environnement défavorable et, avec lui, la proportion de la population qui peut être couverte par la sécurité sociale. La deuxième contrainte est essentiellement d'ordre social et politique. Dans beaucoup de pays en développement, la répartition des revenus est en général plus inégale que 3 L'exemple des pays développés montre, dans une certaine mesure, ce à quoi les pays en développement pourraient parvenir. Les systèmes de sécurité sociale des pays développés sont des systèmes de grande envergure, universels, bien gérés, qui permettent en général de fournir des soins de santé de qualité, d'atténuer la précarité des conditions de vie des personnes âgées et d'assurer un revenu de base aux personnes sans emploi ou sans revenu. Mais ils sont coûteux, et on commence à s'interroger sur leur impact, l'ampleur de leur couverture et leur mode de financement. 126 Colin Gillion dans les pays développés, et cette inégalité est souvent renforcée par le jeu du pouvoir et des influences politiques. Lorsque la mise en place d'un système de sécurité sociale implique une redistribution des revenus entre un groupe économique ou social et un autre - par exemple, pour la fourniture de services de santé à l'ensemble de la collectivité ou la protection contre la pauvreté -, il va probablement en résulter des tensions et il sera difficile de persuader les nantis de faire pression pour que la couverture sociale soit étendue aux segments défavorisés de la collectivité qui en sont exclus, et qui n'auront sans doute pas les moyens de se prendre en charge. La répartition actuelle et acceptée des revenus impose de toute évidence des limites culturelles et sociales au degré de solidarité qu'un programme de protection sociale peut impliquer. La troisième contrainte a trait à la rentabilité et à l'efficacité des institutions de sécurité sociale chargées de recouvrer les cotisations et de verser les prestations. L'administration des programmes de sécurité sociale est inévitablement une chose complexe compte tenu des dossiers à tenir, des mesures à prendre pour que les employeurs et les salariés respectent leurs obligations, compte tenu de la gestion financière que cela implique, du contrôle des prestataires indépendants, et compte tenu de la structure des réglementations. Dans de nombreux pays en développement, ces mécanismes sont inopérants, ou ils fonctionnent si mal que les systèmes en place sont loin d'être suffisamment importants ou efficaces pour couvrir ne serait-ce que la totalité du secteur moderne. Ces problèmes ne sont pas nécessairement insurmontables mais, tant qu'ils ne seront pas résolus, ils constitueront un handicap majeur pour le bon fonctionnement des régimes de sécurité sociale. L'optique de l'OIT sur ces questions et sur l'impulsion à donner aux réformes se fonde à la fois sur des considérations techniques et sur son appréciation normative des problèmes qui se posent. L'OIT a de tout temps considéré que la protection sociale est un droit de l'homme, et qu'elle est un élément essentiel qui doit être incorporé dans les concepts des normes internationales du travail. Les Conventions et recommandations internationales du travail - qui sous-tendent le mandat de l'OIT dans le domaine de la politique du travail et de la politique sociale - et les ouvrages publiés à ce sujet reflètent en grande partie les préoccupations qui nourrissent les débats actuels sur les choix d'orientation. Sous forme d'instruments juridiques internationaux, les normes internationales du travail traduisent les vues normatives de la communauté internationale sur les mesures de protection sociale minimales. Ces normes ont évolué au fil du temps et, avec les autres déclarations des droits de l'homme relatives à la protection sociale, elles demeurent le critère fondamental qui permet de juger de la nécessité d'une réforme et de la direction à imprimer aux mesures de réforme. Nonobstant ces contraintes, et dans le contexte de ses attributions normatives, l'OIT a décidé d'aborder la question des réformes dans une optique pragmatique et d'adopter une méthode d'approche souple et progressive. 2. Les pensions et le financement des soins de santé Un certain nombre de points communs existent entre les soins de santé et les pensions. L'efficacité de la gestion et de l'administration des régimes de sécurité sociale figure en tête de la liste des améliorations à apporter. Mais, même si ces régimes fonctionnaient de manière efficace, une structure pluraliste et souple des prestations, des services et du mode de financement 127 Colin Gillion semble être la meilleure solution pour des sociétés qui, compte tenu de la structure de leur marché du travail et des fortes disparités dans les revenus et les patrimoines, ne sont pas encore en mesure d'instaurer un système comportant des prestations sociales uniformes. Dans ce contexte, l'Etat a un double rôle: d'une part, il doit assurer des prestations de base à l'ensemble de la population et préserver les droits à prestation des salariés du secteur moderne qui versent des cotisations; d'autre part, il doit réglementer et superviser les prestations qui pourraient être fournies par des régimes ne relevant pas du secteur public. Pour cela, il faudrait peut-être modifier les structures institutionnelles et créer, en particulier, des organes de contrôle placés entre l'Etat, les institutions de sécurité sociale et les organismes et prestataires privés. Il est essentiel à cet égard que les améliorations apportées au fonctionnement des systèmes de protection sociale aillent de pair avec les modifications que cela implique dans la structure de ces systèmes ou dans le cadre institutionnel : seule une intervention conjuguée dans les deux domaines sera efficace. Questions et problèmes qui se posent Les principaux problèmes des régimes de retraite des pays en développement sont les suivants: - En dépit de ce qui était prévu initialement, ces pays n'ont pour ainsi dire pas réussi à étendre la couverture des régimes de retraite au-delà du secteur formel de leur économie. Il s'ensuit que des segments importants de la population restent sans protection face aux aléas du long terme; - Les règles du jeu sont loin d'être suivies: le produit des cotisations est fréquemment inférieur à ce qu'il devrait être; les employeurs (y compris les administrations publiques, souvent de connivence avec les employés) ne versent pas les cotisations dues ou sous-estiment l'assiette des cotisations; - Le revenu des investissements en termes réels est souvent très nettement inférieur à ce qu'il devrait l'être, et parfois même négatif. Cet état de choses se produit lorsque le fonctionnement des marchés financiers laisse à désirer ou lorsque l'Etat s'approprie de façon implicite ou explicite les réserves de la sécurité sociale; - Les coûts administratifs absorbent en général une forte proportion des recettes, soit parce que la gestion est inefficace en général, soit parce que les services de sécurité sociale ont des effectifs pléthoriques et/ou offrent des rémunérations excessives; - Lorsqu'ils existent, les transferts directs de l'Etat, en particulier les transferts nécessaires pour financer le minimum vieillesse n'ont cessé de diminuer au cours des quelque dix dernières années à cause des contraintes budgétaires en général, mais aussi parce que les transferts sont trop bas dans l'ordre des priorités des dépenses publiques; - Les carences administratives, en particulier le manque de rigueur dans la tenue et le traitement des dossiers, signifient dans beaucoup de cas que les prestations sont 128 Colin Gillion versées avec retard, qu'elles sont inférieures à ce qu'elles devraient être ou ne sont pas versées du tout; - Les taux élevés d'inflation, combinés à l'insuffisance des recettes fiscales et à l'absence de procédures d'indexation, ont entraîné une dévalorisation importante du niveau initial des prestations, puis de leur valeur réelle, tant et si bien qu'elles sont tombées à un niveau dérisoire dans certains pays. Des problèmes similaires se posent pour le financement et l'organisation des systèmes de soins de santé dans les pays en développement. Ces systèmes comprennent en général trois grands éléments: - un système public financé sur les deniers de l'Etat, qui est en principe ouvert à tous, et s'adresse à ceux qui n'ont pas les moyens de payer d'autres types de soins de santé, ou n'y ont pas accès; - un système privé de taille réduite, mais bien équipé, qui sert les patients qui ont les moyens de payer ou qui ont souscrit une assurance santé privée; - entre ces deux extrêmes, il existe toute une gamme de régimes d'assurance santé dont peuvent bénéficier les salariés du secteur moderne et les membres de leur famille. Dans de nombreux cas, ces régimes font partie d'un système formel de protection sociale financé par les cotisations salariales et patronales. Outre les problèmes d'administration et de gestion identiques à ceux des régimes de pension, les systèmes de soins de santé se heurtent à d'autres difficultés: - Globalement, les programmes de soins de santé manquent en général de crédits. Les ressources affectées aux soins de santé sont inférieures à ce qu'on pourrait espérer, même eu égard à la faiblesse des revenus, et elles sont très inférieures aux dépenses qu'il faudrait consacrer à ce secteur en tant qu'investissement dans des ressources humaines, et donc dans le développement économique et social; - Le secteur de la santé dans son ensemble souffre d'un manque de planification, de supervision et de ressources. Il souffre en particulier d'un manque de coordination et d'une mauvaise répartition des ressources, notamment des ressources en personnel, entre les différents compartiments du système des soins de santé; - Les services de santé, notamment ceux qui relèvent du secteur public et de la sécurité sociale, sont souvent de mauvaise qualité; l'accès à ces services est souvent limité et les files d'attente peuvent être longues surtout en dehors de la capitale et des grandes villes; - Les ressources sont mal réparties: elles sont excessivement concentrées sur les soins curatifs et, à ce niveau, sur les soins hospitaliers coûteux, au détriment des mesures préventives. Les excédents de capacité dans certaines régions contrastent avec 129 Colin Gillion l'insuffisance des installations et des services dans d'autres régions. Souvent, les traitements faisant appel à des technologies de pointe prennent une place excessive au détriment de services plus simples, plus efficaces par rapport aux coûts et plus courants qui utilisent des techniques moins coûteuses; - Les trois éléments du secteur de la santé doivent faire face à une progression rapide des coûts, due en grande partie à l'augmentation des rémunérations, mais aussi aux difficultés liées à l'approvisionnement et au coût des produits pharmaceutiques. Ces considérations et d'autres indiquent qu'il est indispensable de réformer et de développer aussi bien les régimes de retraite que le financement des soins de santé. Efficacité opérationnelle Il faut en priorité chercher à améliorer la gestion, l'administration, la planification et le fonctionnement des soins de santé et des régimes de pension. Il est manifeste que cela suppose une entreprise évolutive de longue haleine plutôt que des changements radicaux ou soudains, mais l'essentiel est de fixer les objectifs à atteindre en matière de gestion, de décider qui doit en assumer la responsabilité et qui doit rendre compte des résultats obtenus. Les principaux domaines visés sont - L'amélioration de la gestion financière, notamment en ce qui concerne le placement des fonds de pensions; - Un suivi actuariel régulier des régimes; - La mise au point et l'adoption de techniques de traitement électronique des données et leur application à la tenue des dossiers; - Un suivi plus rigoureux de l'emploi et des rémunérations, et l'adoption de mesures destinées à contraindre les employeurs et les salariés à s'acquitter de leurs obligations; - La mise en oeuvre de programmes de formation et de perfectionnement du personnel; - Des rapports plus efficaces entre les services centraux, les services régionaux et les services locaux; - L'amélioration des relations avec les clients, une plus grande transparence des opérations et la fourniture aux cotisants et aux allocataires de meilleurs services d'information sur leurs obligations et leurs droits; - L'amélioration des services de prévision et d'analyse des politiques pour qu'ils soient en mesure de fournir des conseils de gestion et d'assurer une meilleure 130 Colin Gillion coordination avec les services publics, en général, et les ministères du travail, des finances, du Plan et des affaires sociales, en particulier; - Le renforcement du suivi, de la planification et du contrôle de l'offre de professionnels de la santé, de leur rémunération et de leur répartition entre les différents compartiments des soins de santé et les diverses régions; - L'amélioration du suivi des marchés et des prix des produits pharmaceutiques. Structure des régimes Les réformes devront viser à améliorer l'efficacité des opérations, mais aussi éventuellement à modifier la structure des systèmes de soins de santé et des régimes de pension. De façon générale, il faudrait chercher à atteindre au moins trois grands objectifs: fournir des services de base qui mettraient les personnes âgées à l'abri du besoin dans le cas des retraites et qui permettraient d'assurer à tous l'accès aux soins base dans le secteur de la santé; fournir des pensions de vieillesse procurant un revenu de remplacement aux personnes âgées et des services de soins de santé de bonne qualité (sans plus) à ceux qui sont en mesure de cotiser aux régimes de sécurité sociale; et favoriser la constitution de retraites complémentaires facultatives et la création de services de santé privés pour ceux qui ont les moyens de les payer. Les ressources qu'implique la réalisation de ces trois objectifs fondamentaux proviennent de trois sources: les transferts directs opérés par l'Etat sur le produit de la fiscalité; les prestations fournies par les régimes de sécurité sociale financés par les cotisations assises sur les rémunérations; et les revenus découlant des économies accumulées pendant toute la vie active. La méthode la plus simple consiste à adopter un système à plusieurs niveaux qui, tant pour les pensions que pour les soins de santé, permettrait d'assortir les ressources et l'utilisation qui en est faite en fonction des différents objectifs: - un niveau de base, correspondant à des prestations forfaitaires et des services de santé de base, auquel aurait accès l'ensemble de la population et qui serait financé selon le principe de la répartition au moyen des prélèvements fiscaux; - un niveau de sécurité sociale, financé par les cotisations patronales et salariales, assurant aux cotisants un niveau déterminé de pensions et de soins de santé; - un niveau complémentaire facultatif, fondé sur des régimes individuels de retraite et d'assurances médicales complémentaires, opérant sur le principe de la capitalisation intégrale, qui seraient offerts par des organismes privés et gérés par eux. On peut imaginer une variété infinie de structures dans ce cadre général. Mais, pour évaluer les avantages d'une structure donnée, il faut considérer en priorité celles qui permettront d'étendre la portée des régimes de sécurité sociale aux segments de la population non couverts - en général les plus démunis - qui travaillent dans le secteur informel des économies en développement. Cela signifie que le financement et les prestations doivent comporter un degré important de solidarité entre les groupes économiques et sociaux. Cette solidarité pourrait être en partie assurée via les prélèvements fiscaux et leur utilisation. Mais, étant donné les limites de 131 Colin Gillion l'assiette fiscale dans les pays en développement, il faudra presque inévitablement instituer des systèmes de sécurité sociale (obligatoires) à côté des régimes financés par l'impôt et par des ressources privées si l'on veut assurer un équilibre adéquat entre les trois objectifs. Et il faudra également prendre des mesures normatives pour persuader les couches aisées de la collectivité d'accepter la redistribution indispensable des revenus et des prestations pour atteindre les pauvres 4 Le rôle de l'Etat Quelle que soit la structure particulière adoptée pour les régimes de soins de santé ou de pension, l'Etat sera nécessairement le principal responsable du bon fonctionnement des systèmes dont il est directement chargé, et du suivi, de la supervision, de la réglementation et de la coordination des régimes administrés par les institutions de sécurité sociale ou des organismes extérieurs au secteur public. Ces deux tâches sont inévitablement complexes, les questions de réglementation et de supervision ne soulevant pas moins de difficultés que l'administration et le fonctionnement des régimes, et elles exigent une cohésion entre la politique sociale de l'Etat et ses politiques économique et financière. C'est en partie en raison de la structure pluraliste des systèmes de retraite et des mécanismes de financement des soins de santé et en partie parce que l'Etat est lui-même l'un des principaux opérateurs dans ces deux domaines que de solides arguments militent en faveur d'une certaine répartition des fonctions institutionnelles entre les administrations publiques, les institutions de sécurité sociale et les organismes privés responsables des régimes complémentaires. Il importe de coordonner, de planifier et de réglementer les différents niveaux de prestations pour que l'ensemble du système fonctionne correctement, et la meilleure solution consistera éventuellement à donner plus grand pouvoir de contrôle à un seul organe de supervision, indépendant des différents organismes qui sont parties prenantes aux divers systèmes et dirigé par des représentants des groupes les plus directement concernés - les employeurs et les assurés, et les représentants de l'Etat. La nécessité de créer un tel organe de contrôle est particulièrement évidente pour ce qui concerne la gestion financière et la planification et la coordination générales des différentes composantes du système de protection sociale. 3. Filets de sécurité sociale La mise en place de filets de sécurité sociale présente des aspects particuliers dans le contexte des pays en développement, où une importante proportion de la population active - et inactive - est pauvre, ne peut trouver un emploi dans le secteur moderne, ce qui l'empêche de bénéficier de la protection sociale associée à ce type d'emploi. Les programmes conventionnels d'allocations de chômage et de garantie de revenu du type de ceux qui existent dans les pays développés sont irréalisables ou ne peuvent fonctionner à cause de la dualité des économies, qui se caractérisent par un secteur informel important, un sous-emploi rampant et un taux de chômage élevé. Ils ne peuvent pas non plus remplacer les programmes de lutte contre la pauvreté dans les 4 Et qu'il est bien sûr dans leur intérêt d'améliorer le niveau de vie, les soins de santé, l'éducation et les possibilités d'emploi des individus qui ne font pas partie du secteur moderne. 132 Colin Gillion pays où, pour des raisons essentiellement structurelles, une grande partie de la population vit dans des conditions de pauvreté endémique. Dans de telles circonstances, les mesures sociales visant à protéger la population contre les chocs macroéconomiques ou microéconomiques, ont également un caractère duel. On pourrait envisager un ensemble de mesures passives d'aide économique et de mesures actives d'emploi pour protéger le revenu des victimes de délestages dans le secteur moderne et encourager leur réinsertion, et éventuellement leur fournir la formation nécessaire. Les mesures que l'on peut prendre à cet effet sont désormais bien connues grâce à l'expérience des pays développés. Elles comprennent: - des programmes d'allocations de chômage et de garantie du revenu (et/ou d'indemnités de licenciement forfaitaires) pour amortir la perte initiale de revenu due au chômage et faciliter la recherche d'un emploi; - le versement d'allocations minimales et d'allocations familiales au bénéfice des chômeurs en fin de droits; - le maintien de la couverture de soins de santé, au moins pendant un certain temps après le licenciement; - un ensemble de services de placement; - des programmes de formation de base et de formation professionnelle conçus pour améliorer les possibilités d'emploi des travailleurs licenciés; - pour les jeunes qui entrent dans la vie active, des facilités de formation et une aide financière pour les aider à trouver un emploi sur le marché primaire; - pour les travailleurs plus âgés, élargissement des possibilités de retraite anticipée; - aide à la création de petites entreprises grâce à des facilités de crédit; - des mesures générales en vue de promouvoir l'emploi et de créer des emplois; - des programmes de subventions à l'emploi et/ou d'emploi dans le secteur public, lorsque cela se justifie pour des raisons de nécessité et de rentabilité. Les mesures de ce genre sont particulièrement appropriées dans les pays qui ont entrepris des programmes de restructuration économique, lesquels impliquent des délestages, parfois massifs, dans la fonction publique et les entreprises parapubliques, de même que dans les entreprises non rentables et non compétitives du secteur privé. Mais, pour diverses raisons, ces mesures sont difficiles à mettre en oeuvre dans les pays en développement. Les problèmes de financement sont un obstacle majeur, surtout lorsque les programmes d'ajustement structurel s'accompagnent d'une compression des dépenses publiques. Ces mesures peuvent également perdre de leur efficacité pour diverses raisons: la proximité d'autres chômeurs dans le secteur 133 Colin Gillion traditionnel, l'inadéquation entre l'offre et la demande de qualifications, et les difficultés d'adaptation des nouveaux chômeurs, le fait que les programmes doivent être en grande partie autofinancés, et la nécessité de traiter de manière équitable ceux qui ont perdu leur emploi et ceux qui n'en ont jamais eu. En outre, dans bien des cas, la population (généralement bien plus pauvre) du secteur informel, en milieu urbain comme en milieu rural, a besoin d'un filet de sécurité différent. Elle doit être protégée contre les variations brutales des prix des produits de base et des produits de subsistance, contre les variations de revenu liées aux mouvements des prix à l'importation et à l'exportation, des taux de change et des taux d'intérêt, ou à la suppression des subventions et/ou du contrôle des prix des produits de consommation courante, du chauffage ou du logement. Dans ce cas, il faudra éventuellement maintenir les subventions, aider en particulier les ménages qui ont des enfants et faire une place plus grande aux dépenses sociales dans les budgets nationaux. Ces mesures générales posent aussi d'autres problèmes, dont le moindre n'est pas, comme pour d'autres programmes sociaux, le manque de moyens administratifs pour les mettre en oeuvre et assurer un ciblage approprié. Les contraintes peuvent être particulièrement importantes dans les pays qui entreprennent des programmes d'ajustement structurel non seulement à cause des restrictions supplémentaires que ces programmes imposent au budget de l'Etat, mais aussi parce que les mesures de libéralisation économique, en particulier la suppression des subventions, des contrôles de prix et des contingentements, peuvent avoir elles-mêmes des effets négatifs sur les couches les plus démunies de la population. Dans ce cas, il faudra impérativement modifier la cadence et la rigueur des réformes économiques pour atténuer leurs répercussions sur les pauvres, réaménager les priorités budgétaires pour accorder une plus large place aux mesures de lutte contre la pauvreté et intégrer, dès le départ, les mesures de protection sociale dans les éléments de base du programme d'ajustement structurel. 4. Les activités de l'OIT Depuis sa création, en 1919, l'OIT s'efforce de promouvoir l'assurance sociale et la protection sociale. Au cours des quarante dernières années, l'organisation s'est surtout attachée à promouvoir les régimes de sécurité sociale, les mesures de lutte contre la pauvreté, les filets de sécurité et la création d'emplois dans les pays en développement. L'action passée de l'OIT et son programme actuel - qui couvre les activités de plusieurs départements de l'organisation - sont décrits en détail dans un certain nombre de publications et rapports annuels récents de l'OIT 5. Les principaux domaines couverts sont les suivants: - L'élaboration de normes et de règles pour promouvoir et suivre l'application des normes internationales du travail par les pays membres et, plus particulièrement, dans le cas présent, pour promouvoir les normes relatives à la protection sociale, au chômage et à la création d'emplois. Citons aussi diverses activités en vue de 5 Voir, par exemple, le Rapport du Directeur général à la Conférence internationale du travail de 1993. Partie Il: Activités de l'OIT. 1992, qui décrit les nouveaux projets de coopération technique approuvés en 1992, et Programme et budget pour la période biennale 1994-95. 134 Colin Gillion promouvoir le tripartisme, en particulier dans la mesure où il influe sur la gestion, le contrôle et la formulation des programmes de sécurité sociale. - La réalisation d'études sur la sécurité sociale, l'emploi, la formation et la lutte contre la pauvreté, essentiellement dans le cadre du programme du Budget ordinaire du Bureau. - Des activités dans le domaine de la formation, comprenant l'élaboration de programmes de formation professionnelle pour les pays en développement, dans le cadre des mesures prises pour promouvoir l'emploi et, plus précisément, des programmes de formation destinés à former les agents de la sécurité sociale et des services de l'emploi dans les pays en développement; - Des activités d'assistance technique (généralement de courte durée) en vue d'aider les pays membres à définir leur choix d'orientation sur diverses questions relevant du domaine social ou de l'emploi. Ces activités comprennent notamment des conseils actuariels (et une formation) portant sur la planification et la gestion financières, et une assistance pour aider les pays à élaborer leur législation; - Des activités de coopération technique de plus grande envergure. Dans le domaine de la sécurité sociale, elles peuvent aller de la conception intégrale de systèmes de sécurité sociale à la fourniture d'une assistance spécifique pour la mise en place de services de traitement des données, l'organisation et la gestion des institutions de sécurité sociale et le financement des régimes de sécurité sociale. Dans le domaine de l'emploi et de la formation, elles englobent les mesures visant à améliorer la situation du marché du travail et les possibilités d'emploi des femmes, des migrants et autres groupes déterminés, divers types de caisses sociales et de programmes d'indemnisation (notamment dans le contexte des programmes d'ajustement structurel), la fourniture de conseils sur la législation du marché du travail, la création de services d'information sur le marché du travail, la modernisation des services chargés de l'emploi et les mesures visant à améliorer la protection sociale et l'intégration des travailleurs du secteur informel au marché du travail. L'OIT ne dispose en propre que de ressources limitées pour ces activités. La majeure partie des activités d'envergure sont financées par des organismes extérieurs (ou par les pays eux-mêmes), l'OIT jouant alors le rôle d'agent d'exécution. Le Programme des Nations Unies pour le développement est la principale source de financement extérieur, mais la Banque mondiale, les bailleurs de fonds bilatéraux ou multilatéraux, ou d'autres organismes extérieurs contribuent aussi de façon importante au financement de divers projets. Dans nombre de cas, l'OIT travaille en coopération étroite avec ces organismes sur des questions de fond et des questions analytiques, et il en va de même pour les questions touchant l'administration et le financement des projets. Cette coopération devrait se poursuivre et se développer. août 1993 135 DECLARATION CONJOINTE DU DIRECTEUR GENERAL DU FMI, M. MICHEL CAMDESSUS, DU PRESIDENT DE LA BANQUE MONDIALE, M. LEWIS PRESTON ET DU DIRECTEUR GENERAL DU GATT, M. PETER SUTHERLAND Nous, Chefs du secrétariat du FMI, de la Banque mondiale et du Gatt, partageons la conviction unanime des Ministres que les gouvernements de leurs pays doivent s'attacher en toute priorité à mener à bien les négociations de l'Uruguay Round d'ici la fin de l'année. Les mesures que les participants doivent prendre sont évidentes - il faut modifier les politiques qui, dans leur pays, sont préjudiciables à la croissance et au bien- être social. Il en résultera un renforcement salutaire des possibilités de croissance partout dans le monde. Le moment est venu d'agir. Pendant de nombreuses années, la croissance du commerce mondial et des flux financiers a été un facteur important du développement des nations. L'année dernière, elle a assuré pour ainsi dire la totalité de la croissance dans les pays industriels. L'occasion nous est offerte d'accroître la contribution du commerce à l'activité économique globale dans les décennies à venir en garantissant une plus grande stabilité grâce à l'actualisation et au renforcement des règles commerciales multilatérales et à la libéralisation des échanges commerciaux dans tous les secteurs. Nous avons donc décidé de souligner conjointement que les gouvernements doivent dès à présent prendre des mesures décisives pour arrêter une stratégie de coopération en faveur d'une relance de la croissance et de l'emploi s'ils veulent faire aboutir l'Uruguay Round et saisir les chances qui en découleront. Par une renforcement de l'activité économique, et en particulier la création d'emplois, le succès de l'Uruguay Round contribuerait beaucoup à supprimer les incertitudes et à accroître les possibilités commerciales. Un échec entraînerait une aggravation du protectionnisme et une perte de confiance qui aurait des conséquences économiques et sociales majeures pour les pays à revenus élevés comme pour les pays à faibles revenus. Il menacerait par ailleurs les nouvelles démocraties de l'Europe de l'Est et les pays de l'ex-Union soviétique, pour lesquelles la réforme économique et l'intégration au système économique mondial sont des facteurs indispensables de stabilité et de croissance économique. Un échec donnerait raison à ceux, toujours plus nombreux, qui prêchent le protectionnisme et risqueraient encore davantage de nous entraîner dans un cercle vicieux où le renforcement du protectionnisme empéche la reprise économique et où l'absence de reprise entretient à son tour les pressions protectionnistes. L'expérience montre que les mesures défensives visant à protéger des branches de production sensibles permettent d'y préserver l'emploi pendant un certain temps mais en font disparaître d'autres ailleurs - à l'échelon national et mondial - par un accroissement des prix et des impôts, un 137 abaissement des salaires et un ralentissement de la croissance de l'emploi. En revanche, avec un commerce libéral, reposant sur des règles claires et prévisibles, on se retrouve dans un cercle vertueux d'abaissement des prix, d'accroissement des salaires et de dynamisation de la croissance de l'emploi. Les incertitudes quant à l'attachement des nations industrielles au système de commerce multilatéral risquent de nuire au succès de nombreux pays qui ont libéralisé unilatéralement leurs régimes commerciaux ces dernières années et découragent d'autres de suivre leurs traces. La poursuite de l'ouverture des marchés - leurs propres marchés comme ceux des pays industriels - est indispensable à la croissance des pays à faible revenu. Les pays à revenu élevé, plutôt que de craindre une telle croissance, devraient l'encourager, car elle se traduit par une expansion des marchés pour leurs propres industries à vocation exportatrice. Résister à la concurrence n'a jamais entraîné de croissance durable des revenus. La bonne réaction est donc de restructurer l'industrie et de recycler la main-d'oeuvre, ce qui permettra d'élever le niveau de vie de tous. Il y a trop en jeu; les hésitations politiques et les intérêts acquis doivent passer au deuxième plan. Il faut prendre sans tarder des décisions courageuses et clairvoyantes pour mener à bien l'Uruguay Round et contribuer ainsi à établir une croissance économique rapide et durable. 138 COMITE DU DEVELOPPEMENT COMITE MINISTERIEL CONJOINT DES CONSEILS DES GOUVERNEURS DE LA BANQUE ET DU FONDS k SUR LE TRANSFERT DE RESSOURCES REELLES AUX PAYS EN DEVELOPPEMENT 1818 H Street, N.W., Washington, D.C. 20433 Téléphone: (202) 458-2980 Fax: (202) 477-1906 Le 27 septembre 1993 COMMUNIOUE 1. Le Comité du développement a tenu sa Quarante-septième réunion le 27 septembre 1993 à Washington, sous la présidence de M. Rudolf Hommes, Ministre des finances et du crédit public de Colombie 1/. Le Comité a adressé ses remerciements à son ancien Président, M. Ricardo Hausmann, du Venezuela. GAZA ET CISJORDANIE 2. Le Comité s'est félicité de la remarquable contribution qu'a apportée la Banque mondiale au processus de paix engagé au Moyen-Orient en préparant le terrain à un programme coordonné d'appui financier pour Gaza et la Cisjordanie. ECONOMIE MONDIALE 3. Le Comité a examiné l'impact des tendances récentes de l'économie mondiale sur les pays en développement. Il a lancé de nouveau un appel pour qu'un nouvel élan soit donné & la croissance dans les pays industrialisés et que l'Uruguay Round trouve une conclusion positive d'ici à la fin de 199' sur la base d'un accord complet et équilibré, cela stant .tsentiel aux perspectives de croissance des pays industrialisés comme des pays en développement. Aussi prend-il note avec satisfaction de la déclaration conjointe de MM. Sutherland, Preston et Camdessus, diffusée le matin de sa réunion. l/ M. Lewis T. Preston, Président de la Banque mondiale, M. Michel Camdessus, Directeur général du Fonds monétaire international, M. Peter Sutherland, Directeur général du GATT, M. Mohammad Imady, Ministre de l'économie et du commerce extérieur de Syrie et Président du Groupe des 24, et M. Peter Mountfield, Secrétaire exécutif, ont participé à la réunion. Ont également assisté à la réunion les observateurs de plusieurs organisations régionales et internationales. 139 RESULTATS DE L'AJUSTEMENT ET BESOINS DE FINANCEMENT DES PAYS A FAIBLE REVENU 4. Le Comité reconnaît les difficultés rencontrées par beaucoup de pays à faible revenu pour apporter à leur économie les ajustements nécessaires à leur progrès économique et social. Les raisons principales en sont les déficiences de leur situation initiale, le manque d'épargne intérieure, l'insuffisance des moyens institutionnels et administratifs, l'application de politiques inappropriées qui ne peuvent être corrigées du jour au lendemain, et un environnement extérieur défavorable. Dans la plupart des domaines, leurs progrès ont été plus lents que ceux des pays à revenu intermédiaire. Mais il ressort d'un bilan préliminaire que les pays persévérant dans l'application d'énergiques politiques d'ajustement obtiennent de meilleurs résultats que les autres. Dans ces pays-là, on constate de notables progrès vers la stabilisation macroéconomique, l'adoption de politiques d'ouverture au monde extérieur et vers la libération des prix intérieurs, notamment dans le secteur de l'agriculture. Cependant, même dans ces pays, les réformes du secteur financier et des entreprises publiques ont pris du retard, et l'investissement privé a considérablement tardé à réagir. C'est pourquoi les améliorations n'ont pas encore débouché sur une augmentation soutenue du revenu par habitant, et tous les pays ne sont pas parvenus dans la même mesure à faire reculer la pauvreté et à protéger l'environnement. 5. Le Comité constate avec satisfaction le consensus politique grandissant dont font l'objet les stratégies d'ajustement axées sur la stabilisation et l'ouverture au marché, alliées à la valorisation des ressources humaines et à la lutte contre la pauvreté. Il est persuadé que ces stratégies finiront par donner de bons résultats si elles sont - appliquées avec persévérance et appuyées par des réformes structurelles propices à un développement viable et durable. Il engage donc vivement les pays qui ne se sont pas encore engagés sur la voie de l'ajustement à définir et appliquer leurs propres programmes sur cette base. La conception des programmes d'ajustement et de l'aide extérieure doit refléter le contexte sociopolitique et la capacité institutionnelle des pays en cause. Les meilleurs programmes sont donc ceux que le pays a lui-même choisis et établis. La Banque et le Fonds (selon le cas) porteront une attention accrue, dans leurs relations avec les pays emprunteurs, aux effets que les mesures macroéconomiques et d'ajustement, et la façon dont elles sont échelonnées, ont sur la pauvreté, l'emploi, l'investissement et l'environnement. Certaines des leçons de l'expérience de l'Asie de l'Est pourraient être utiles aux pays à faible revenu d'aujourd'hui, notamment au plan des politiques macroéconomiques, de l'orientation de la production vers le marché extérieur, de la valorisation des ressources humaines et de la formation d'une fonction publique qualifiée. 6. Dans de nombreux cas, les pays à faible revenu auront besoin de compléter leur épargne intérieure par des investissements étrangers, par l'obtention en temps voulu d'une substantielle aide financière concessionnelle, et par des allégements appropriés de leur dette 140 bilatérale. Pour obtenir de l'extérieur l'appui et les investissements dont ils ont besoin, ils devront maintenir leur attachement à la réforme économique, à la lutte contre la pauvrete, à la défense de l'environnement, à la participation de la population et à une bonne gestion des affaires publiques. Les bailleurs de fonds devraient orienter leur aide concessionnelle en priorité vers les pays à faible revenu engagés dans un effort d'ajustement. Ils devraient mener à bien la ratification d'IDA-lO dans les meilleurs délais, convenir d'un éventail de contributeurs aussi large que possible à la facilité appelée à succéder à la FASR, s'attacher à ce que celle-ci soit mise en oeuvre rapidement, et apporter de substantiels concours bilatéraux au PSA. REFORME DE LA SECURITE SOCIALE ET FILETS DE PROTECTION SOCIALE 7. Le Comité a considéré la nécessité persistante d'une aide sociale, que ce soit pour faire face aux risques de l'existence ou pour aider ceux auxquels les indispensables mesures d'ajustement portent atteinte. Dans bien des cas, les systèmes d'assurance existants imposent une charge insoutenable au budget de l'Etat et à la compétitivité du secteur structuré, tandis que d'importants groupes de population restent sans protection. Il sera peut-être nécessaire de revoir à présent les droits conférés par les systèmes existants. Dans beaucoup de pays, y compris les économies en transition, un système faisant appel à la fois au secteur public et au secteur privé sera approprié, mais le dosage entre les deux variera selon les cas. Les institutions internationales peuvent soutenir cet effort en continuant à fournir une assistance technique et des conseils sur les orientations à suivre. 8. Outre ces systèmes classiques de sécurité sociale, les pays engagés sur la voie de l'ajustement ou d'une transformation systémique pourraient avoir besoin de mettre en place des filets de protection sociale supplémentaires bien conçus; intégrés à leurs stratégies de lutte contre la pauvreté., ceux-ci pourraient porter, par exemple, sur des programmes de travaux publics à fort coefficient de main-d'oeuvre, des programmes de nutriti-zn, 'es subventions alimentaires ciblées, des activités de à-ecycl.age au profit des travailleurs licenciés, et des « fonds sociaux ». Mais les gouvernements devraient éviter d'ouvrir de nouveaux droits à prestations de longue durée, qui risqueraient d'accroître ultérieurement les difficultés budgétaires. La formule à retenir dépendra des données disponibles, des moyens administratifs et des ressources financières. Il conviendrait, le cas échéant, de réaffecter les crédits budgétaires afin de dégager des ressources financières à la fois pour la mise en place de filets de protection et pour d'autres dépenses sociales au profit des pauvres. L'aide à apporter par ce biais aux groupes les plus pauvres de la population pourrait exiger, de la part de la Banque mondiale et des bailleurs de fonds, un appui technique et financier soutenu. Le Comité note avec satisfaction le rôle constructif joué par la Banque et le Fonds, dans leurs domaines de compétence respectifs, à l'appui des réformes des systèmes de sécurité sociale, ainsi que pour la mise en place et le financement de filets de protection dans le cadre de leurs opérations de prêts à l'ajustement. 141 STRATEGIE DE LA BANOUE MONDIALE POUR LA PROMOTION DU ROLE DE LA FEMME DANS LE DEVELOPPEMENT 9. Le Comité accueille avec satisfaction le rapport concernant les efforts entrepris par la Banque mondiale pour intégrer les questions d'égalité des sexes dans sa stratégie globale de développement. Il se félicite des progrès réalisés et du fait que le Président s'est engagé à renforcer encore l'action de la Banque dans ce domaine. Il note que le Conseil des Administrateurs de la Banque examinera la stratégie retenue au printemps de 1994. COUT-EFFICACITE DE L'AIDE 10. Le Comité estime qu'il est plus important que jamais d'accroître l'efficacité de l'aide au développement; il ne félicite des mesures que la Banque mondiale a prises récemment à cet effet, et se propose d'étudier cette question l'année prochaine. Afin que l'aide profite au maximum à ses bénéficiaires, il faut que les organismes donateurs et les institutions multilatérales s'attachent à améliorer le rapport coût-efficacité de leurs interventions. PROCHAINE REUNION 11. Le Comité tiendra sa prochaine réunion à Washington le 26 avril 1994, et examinera à cette occasion les questions de population et de migration. 142 Appendice A DC/93-19 Le 7 septembre 1993 AVIS DE REUNION La quarante-septième réunion du Comité du développement se tiendra le lundi 27 septembre 1993, à partir de 9 heures, dans la Salle de conférence du Fonds monétaire international, à Washington. ORDRE DU JOUR PROVISOIRE 1. Principaux documents à examiner : 1/ a) Bilan de l'ajustement dans les pays à faible revenu et conséquences pour les besoins de financement b) Réformes de la sécurité sociale et filets de protection sociale dans les économies en voie de réforme et de transformation 2. Rapport d'activité (à noter) Rapport sur les activités de la Banque mondiale pour la promotion du rôle de la femme dans le développement j/ 3. Questions diverses _/ Documents de synthèse établis conjointement par la Banque mondiale et le FMI, conformément à la demande formulée par le Comité au paragrapheL 12 de son communiqué de mai 1993. 2/ Rapport établi par la Banque mondiale, conformément à la demande formulée par le Comité au paragraphe 22 de son communiqué d'octobre 1991. Seront en outre disponibles trois documents supplémentaires sur les sujets susmentionnés (DC/93-24, DC/93-25 et DC/93-26). * * * Le présent document faisant l'objet d'une diffusion restreinte, il est demandé à ses destinataires de respecter son caractère confidentiel et de s'abstenir de le reproduire ou de le citer. 143 Appendice B MEMBRES DU COMITE DU DEVELOPPEMENT Liste des Administrateurs correspondants à la Banque mondiale et au FMI et des pays representés Members Executive Directors Countries 1. Mohammad Abalkhail Muhammad AI-Jasser Saudi Arabia Minister of Finance (Fund) and National Economy Ibrahim A. AI-Assaf Saudi Arabia (Bank) 2. Ibrahim Abdul Karim A. Shakour Shaalan Bahrain, Egypt, Iraq, Jordan, Kuwait, Minister of Finance (Fund) Lebanon, Socialist People's Libyan Arab and National Economy Faisal Abdulrazak AI-Khaled Jamahiriya, Maldives, Oman, Qatar, Bahrain (Bank) Syrian Arab Republic, United Arab Emirates, Republic of Yemen 3. Edmond Alphandéry Marc-Antoine Autheman France Minister of Economy (Fund and Bank) France 4. Pedro Aspe Roberto Marino Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Secretary of Finance (Fund) Honduras, Mexico, Nicaragua, Spain, and Public Credit Angel Torres Venezuela Mexico (Bank) 5. Piero Barucci Giulio Lanciotti Albania, Greece, Italy, Malta, Portugal, Minister of the Treasury (Fund) San Marino Italy Enzo R. Grilli (Bank) C. Llc,, ivl. Betsen NVacant) United States Secretary of the Treasury (Fund) United States (Vacant) (Bank) 7. Mohamed Berrada Abbas Mirakhor Islamic State of Afghanistan, Algeria, Minister of Finance (Fund) Ghana, lslamic Republic of Iran, Morocco Mohamed Benhocine Morocco, Pakistan, Tunisia (Bank) 8. Franz Blankart Daniel Kaeser Azerbaijan, Kyrgyz Republic, Poland, Secretary of State, Director (Fund) Switzerland, Turkmenistan, Uzbekistan Federal Office for Foreign Jean-Daniel Gerber (Tajikistan) Economic Affairs (Bank) Switzerland 145 Members Executive Directors Countries 9. Kenneth Clarke David Peretz United Kingdom Chancellor of the Exchequer (Fund and Bankl United Kingdom 10. John Dawkins Ewen L. Waterman Australia, Kiribati, Korea, Marshall Treasurer (Fund) Islands, Mongolia, New Zealand, Papua Australia John H. Cosgrove New Guinea, Philippines, Seychelles, (Bank) Solomon Islands, Vanuatu, Western Alternate Member: Samoa IFederated States of Ralph Willis Micronesia) Minister of Finance Australia 11. Helle Degn Ingimundur Fridriksson Denmark, Estonia, Finland, Iceland, Minister for (Fund) Latvia, Lithuania, Norway, Sweden Development Cooperation Jorunn Maehlum Denmark (Bank) 12. Kablan D. Duncan Corentino V. Santos Benin, Burkina Faso, Cameroon, Cape Minister Delegate to the IFund) Verde, Central African Republic, Chad, Prime Minister in charge of Jean-Pierre Le Bouder Comoros, Republic of Congo, Côte Economy, Finance, (Bank) d'Ivoire, Djibouti, Equatorial Guinea, Commerce and Planning Gabon, Guinea, Guinea-Bissau, Côte d'ivoire Republic of Madagascar, Mali, Mauritania, Mauritius, Niger, Rwanda, Sao Tomé and Principe, Senegal, Togo, ZaTre 13. Hirohisa Fujii Hiroo Fukui Japan Minister of Finance (Fund) Jap_n Yasuyuki Kawahara (Bankj 14. Rudolf Hommes Alexandre Kafka Brazil, Colombia, Dominican Republic, Minister of Finance (Fund) Ecuador, Guyana, Haiti, Panama, and Public Credit Pedro Sampaio Malan Suriname, Trinidad and Tobago Colombia (Bank) Alternate Member: Mario Read Vittini Governor Banco Central de la Republica Dominicana Dominican Republic 146 Members Executive Directors Countries 15. Wim Kok Godert A. Posthumus Armenia, Bulgaria, Cyprus, Georgia, Deputy Prime Minister (Fund) lsrael, Moldova, Netherlands, Romania, and Minister of Finance Eveline Herfkens Ukraine Netherlands (Bank) Alternate Member: J.P. Pronk Minister for Development Cooperation Ministry of Foreign Affairs Netherlands 1 6 Liu Zhongli Zhang Ming China Minister of Finance (Fund) China Wang Liansheng (Bank) 17. Gilles Loiselle Douglas E. Smee Antigua and Barbuda, The Bahamas, Minister of Finance (Fund) Barbados, Belize, Canada, Dominica, Canada Robert R. de Cotret Grenada, lreland, Jamaica, St. Kitts (Bank) and Nevis, St. Lucia, St. Vincent and Alternate Member: the Grenadines Huguette Labelle President Canadian International Development Agency Canada 18. Philippe Maystadt Jacques de Groote Austria, Belarus, Belgium, Czech Minister of Finance (Fund) Republic, Hungary, Kazakhstan, Belgium Bernard Snoy Luxembourg, Slovak Republic, Turkey (Bank) 13. Festus G. Mogae L.J. Mwananshiku Angola, Botswana, Burundi, Ethiopia, Vice President and (Fund) The Gambia, Kenya, Lesotho, Liberia, M;r'ster of Finance O.K. Matambo Malawi, Mozambiaue, Namibia, Nigeria, and Development Planning (Bank) Sierra Leone, Swaziland, Tanzania, Botswana Uganda, Zambia, Zimbabwe 20. Crispiniano Sandoval A. Guillermo Zoccali Argentina, Bolivia, Chile, Paraguay, Minister of Finance (Fund) Peru, Uruguay Paraguay Nicolas Flaho (Bank) 21. Aleksandr N. Shokhin Konstantin G. Kagalovsky Russian Federation Deputy Prime Minister (Fund) Russian Federation Boris Fedorov (Bank) 147 Members Executive Directors Countries 22.' Manmohan Singh K.P. Geethakrishnan Bangladesh, Bhutan, India, Sri Lanka Minister of Finance (Fund) India Bimal Jalan (Bank) 23. Carl-Dieter Spranger Stefan Schoenberg Germany Federal Minister for (Fund) Economic Cooperation Fritz Fischer and Development (Bank) Germany 24. Tarrin Nimmanahaeminda J.E. Ismael Fiji, Indonesia, Lao People's Democratic Minister of Finance